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N
° 2989

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 1er décembre 2010.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE CHAPITRE III DU PROJET DE LOI (N° 2789) portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques,

PAR Mme Laure de La RAUDIÈRE,

Députée.

——

Voir le numéro : 2789.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

I.— LE TROISIÈME« PAQUET TÉLÉCOMS » 9

A.— LE DEUXIÈME « PAQUET TÉLÉCOMS » 9

B.— L’EXAMEN DU TROISIÈME « PAQUET TÉLÉCOMS » 10

1. La proposition initiale de la Commission européenne 10

a) Proposition de directive modifiant les directives « cadres », « accès » et « autorisation » 11

b) Proposition de directive modifiant les directives « service universel » et « vie privée » 11

c) Proposition de règlement instituant une autorité européenne du marché des communications électroniques 11

2. Les principaux débats 12

C.— LES MESURES EMBLÉMATIQUES DU TROISIÈME « PAQUET TÉLÉCOMS » 13

II.— L’ARTICLE 11 DU PROJET DE LOI HABILITANT LE GOUVERNEMENT À LÉGIFÉRER PAR VOIE D’ORDONNANCE 14

A.— LE CONTENU DE L’HABILITATION 14

B.— LA TRANSPOSITION DU TROISIÈME « PAQUET TÉLÉCOMS » PAR VOIE D’ORDONNANCE (1° ET 2° DE L’ARTICLE 11) 15

1. La mise en conformité du droit national avec le droit communautaire 15

2. Le choix d’une transposition par voie d’ordonnance 16

C.— LES MESURES COMPLÉMENTAIRES (3°, 4° ET 5° DE L’ARTICLE 11) 17

III.— L’AVANT-PROJET D’ORDONNANCE 19

A.— NEUTRALITÉ 19

1. Le pouvoir donné à l’ARCEP d’imposer des exigences minimales en matière de qualité de service 20

2. L’extension du pouvoir de règlement des différends de l’ARCEP 21

3. Le débat sur la neutralité des réseaux 22

B.— CONSOMMATEURS 22

1. Portabilité en un jour 23

2. Transmission des données de localisation des appelants aux services d’urgence 23

3. Accès des personnes handicapées aux services de communications électroniques 23

4. Positionnement des dispositions 24

C.— PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE 24

1. Protection des données personnelles 24

2. Prospection automatique 25

D.— RENFORCEMENT DU RÉGULATEUR 26

1. Objectifs fixés à l’ARCEP et au ministre en charge des communications électroniques 26

2. Mutualisation 27

3. Pouvoirs de sanction 28

4. Pouvoirs de régulation asymétrique 29

5. Pouvoirs en matière de téléphonie 30

E.— GESTION DU SPECTRE 31

1. Mesures de transposition 31

2. Mesures complémentaires 32

a) Extension des pouvoirs de sanction de l’ANFR 32

b) Possibilité de céder à l’intérieur d’une même bande de fréquence les autorisations délivrées pour certains services de radio 33

c) Faculté accordée à l’ANFR de réaliser des contrôles a priori 33

d) Pouvoir accordé à l’ANFR de suspendre ou retirer son accord sur l’implantation des antennes de téléphone mobile 33

3. La transposition de la directive GSM 34

F.— SÉCURITÉ 34

1. Mesures de transposition du « paquet télécoms » 35

2. Mesures complémentaires 35

a) Autorisation, sanction et contrôle des matériels d’interception 36

b) Protection des infrastructures critiques 38

G.— SERVICE UNIVERSEL (ARTICLES L. 35-1, L. 35-2, L. 35-2-1) 39

H.— CORRECTIONS D’ERREURS ET CLARIFICATIONS 40

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE 41

II.— EXAMEN DES ARTICLES 51

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 55

ANNEXES 59

MESDAMES, MESSIEURS,

Le 25 novembre 2009, le Parlement Européen et le Conseil adoptaient le troisième « paquet télécoms », composé d’un règlement et de deux directives. La France devra avoir transposé dans son droit national, avant le 26 mai 2011, ces deux directives. Celles-ci contiennent de nombreuses dispositions renforçant les pouvoirs des autorités de régulation nationales et améliorant la protection des consommateurs, de la vie privée, de la liberté de communication, de la neutralité des réseaux, ou encore la gestion du spectre.

Pour autant, de l’avis de tous les acteurs, ce troisième « paquet télécoms » ne représente pas un bouleversement de la réglementation européenne. L’essentiel des mesures à prendre au niveau national consiste à répliquer en droit français les nouvelles dispositions de droit européen. C’est ce qui justifie la proposition du Gouvernement de recourir à une transposition par voie d’ordonnance.

Il faut souligner que l’élaboration des mesures de transposition s’est faite en toute transparence, avec la mise en consultation publique d’un avant-projet d’ordonnance en mai 2010. Le contenu de ce rapport complétera les éléments dont dispose la représentation nationale afin qu’elle puisse se prononcer de manière éclairée.

La neutralité de l’internet et des réseaux mérite, en raison du débat qu’elle suscite, une mention spécifique. Le troisième « paquet télécoms » reconnaît explicitement le principe de neutralité. Il protège à travers une transparence accrue des offres d’accès à internet et l’extension du pouvoir de règlement des différends des autorités de régulation nationale à tous les litiges portant sur les conditions techniques et tarifaires d’acheminement du trafic. Ces évolutions sont positives mais ne traitent pas entièrement le sujet de la neutralité des réseaux, notamment la discrimination entre les flux.

La mission d’information qu’a constitué la Commission des affaires économiques à ce sujet et que votre rapporteure a l’honneur de codiriger avec Mme Corinne Erhel, députée des Côtes d’Armor, devrait, d’ici le début de l’année prochaine, formuler des recommandations sur les mesures qu’il pourrait apparaître opportun d’adopter en complément.

I.— LE TROISIÈME« PAQUET TÉLÉCOMS »

Le troisième « paquet télécoms » est l’aboutissement d’un long processus de révision du cadre réglementaire, entamé à la fin de l’année 2005 par la Commission européenne. Après deux lectures et l’institution d’un comité de conciliation, un compromis a été adopté le 25 novembre 2009. Il faut rappeler que l’adoption des textes qui composaient le paquet était soumise à la procédure de codécision, qui implique l’accord conjoint du Parlement et du Conseil.

Le « paquet télécoms » est composé principalement de trois textes : deux directives (2009/140/CE et 2009/136/CE) qui modifient les directives de 2002 et qui doivent être transposées en droit national avant le 25 mai 2011, ainsi qu’un règlement (1211/2009/CE) qui institue l’ORECE (Organe des régulateurs européens des communications électroniques – BEREC en anglais) et qui est d’application directe. Ont été joints à ce « paquet télécoms » initial deux textes additionnels : une déclaration de la commission sur la neutralité de l’internet (2009/C 308/02) et une directive 2009/114/CE modifiant la directive GSM.

A.— LE DEUXIÈME « PAQUET TÉLÉCOMS »

La transposition du troisième « paquet télécoms » s’inscrivant dans la continuité de la révision du cadre réglementaire européen pour le deuxième paquet, il semble utile de préciser à nouveau le contexte et le contenu du deuxième « paquet télécoms ».

Ce faisant, on se reportera utilement aux dossiers législatifs concernant les lois du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom (1) et du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle (2), ainsi qu’aux rapports de MM. Alfred Trassy-Paillogues, Gérard Larcher, Pierre Hérisson Bruno Sido qui les commentaient.

Le deuxième paquet simplifiait considérablement la réglementation communautaire qui s’était développée à partir de 1990, en faisant passer de 28 à 8 le nombre de textes sur le sujet. Il est utile de rappeler les grandes lignes des textes qui le composaient :

– la directive « cadre » 2002/21/CE réduisait notamment le contrôle a priori exercé par les autorités de régulation nationale aux seuls cas dans lesquels était constaté un déséquilibre fort entre opérateurs, en instituant à cette fin la procédure d’analyse de marché et en renforçant en contrepartie les pouvoirs d’information et de sanction des autorités ;

– la directive « autorisation » 2002/20/CE remplaçait notamment le régime d’autorisation des opérateurs de communications électroniques par un régime déclaratoire, sauf dans le cas de l’utilisation de ressources rares comme les fréquences ou les numéros ;

– la directive « service universel » 2002/22/CE obligeait notamment les États membres à désigner les entreprises chargées du service universel par une procédure ouverte d’appel à candidature ou de mise aux enchères. Elle définissait le service universel comme étant formé de trois composantes (la téléphonie fixe, devant permettre l’accès à internet à des débits d’au moins 56 Kbits, la tenue d’un annuaire et la mise en place de cabines téléphonique) et chargeait les autorités de régulation nationales de définir, sans l’intervention du ministre, les charges et contributions afférentes ;

– la directive « vie privée » 2002/58/CE prévoyait notamment des mesures de protection des données personnelles ;

– enfin, la directive « accès » 2002/19/CE réglait le régime de l’accès et de l’interconnexion entre opérateurs.

Ce sont ces cinq directives qui sont modifiées par les directives du troisième « paquet télécoms » de 2009.

Le deuxième paquet contenait, en outre, trois textes (qui ne sont pas affectées par le troisième paquet) :

– une décision concernant le spectre radioélectrique ;

– une directive 1999/5/CE concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications ;

– une directive 2002/77/CE concernant la concurrence dans les marchés des réseaux et des services de communications électroniques.

B.— L’examen du troisiÈme « paquet tÉLÉcoms »

1. La proposition initiale de la Commission européenne

À l'issue des consultations qu’elle avait organisées à partir de 2005 sur l’opportunité de réformer le cadre réglementaire européen des télécommunications, la Commission européenne faisait le constat que des améliorations significatives pouvaient être apportées au cadre réglementaire européen et avançait des propositions organisées autour de trois axes : mieux légiférer, achever le marché unique, et être en connexion avec les consommateurs.

Ces orientations étaient déclinées dans deux directives et un règlement dont on rappellera les principales dispositions.

a) Proposition de directive modifiant les directives « cadres », « accès » et « autorisation »

Les mesures envisagées avaient pour objet :

– de réformer la gestion du spectre radioélectrique, en rendant notamment contraignant le principe de neutralité technologique et en posant le principe de neutralité à l’égard des services avec des possibilités de dérogation ;

– de faire évoluer la régulation en limitant la régulation ex ante, en renforçant le rôle de la Commission et en instituant la séparation fonctionnelle comme solution à la disposition des autorités de régulation nationales ;

– de renforcer la sécurité et l’intégrité du réseau.

b) Proposition de directive modifiant les directives « service universel » et « vie privée »

Les mesures envisagées avaient pour objet :

– d’assurer une plus grande transparence pour le consommateur ; de permettre la portabilité des numéros en un jour pour le fixe et le mobile ; d’améliorer le fonctionnement des appels d’urgence (112) en insistant notamment sur la localisation de l’appelant ; de prévoir la fixation d’un niveau minimal de qualité de service pour les communications électroniques ; d’assurer un accès équivalent aux services de communications électroniques pour les personnes handicapées, âgées et ayant des besoins spécifiques (directive « service universel ») ;

– d’instituer un mécanisme de notification des violations de données personnelles ; de renforcer les pouvoirs des États membres de lutte contre les spams ; d’étendre le champ des obligations de la directive à un certain nombre de réseaux publics prenant en charge les dispositifs de collecte de données et d’identification (directive « vie privée »).

c) Proposition de règlement instituant une autorité européenne du marché des communications électroniques

Cette autorité, qui avait vocation à remplacer le Groupement des régulateurs européens, devait, selon la proposition initiale de la Commission, lui fournir des avis sur les décisions réglementaires et fusionner avec l’agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l’information (ENISA).

2. Les principaux débats

L’examen par le Parlement européen et le Conseil des propositions de la Commission a conduit aux évolutions suivantes :

– opposition du Parlement Européen et du Conseil aux mesures proposées par la Commission sur l’assouplissement de la gestion du spectre, conduisant notamment à accroître considérablement les possibilités de dérogation aux principes de neutralité technologique et de neutralité à l’égard des services ;

– réduction de l’ambition concernant l’Autorité européenne du marché des communications électroniques, aboutissant à la constitution d’un organe des régulateurs européens des communications électroniques n’intégrant pas l’ENISA, sans personnalité juridique, et assisté d’un office avec la personnalité juridique, financé par une subvention européenne et des contributions des autorités de régulation nationale ou des États membres ;

– introduction par le Parlement Européen de nouvelles mesures relatives au partage des éléments de réseaux et des ressources associées ainsi qu’à l’incitation à investir dans les nouveaux réseaux ;

– débat à l’initiative du Conseil sur les pouvoirs supplémentaires accordés à la Commission et sur les conditions dans lesquelles pourra être utilisée la solution de la séparation fonctionnelle.

À l’issue de la seconde lecture, le 6 mai 2009, le Parlement Européen et le Conseil avaient trouvé un compromis sur la totalité des sujets, à l’exception de la restriction de l’accès à internet, ce qui a conduit au report de l’adoption du paquet au 25 novembre 2009.

Il faut rappeler à cet égard qu’un amendement (dit « Bono », du nom de son auteur ; « 138 », du nom de son numéro ; « anti-Hadopi », du nom de la loi française qu’il avait pour objet d’interdire) avait été adopté en première lecture au Parlement. Il prévoyait qu’aucune suspension de l’accès à internet ne pouvait avoir lieu dans les États membres sans intervention préalable du juge. Supprimé par le Conseil, il a été adopté à nouveau par le Parlement en seconde lecture. Des négociations ont eu lieu sur cette question au sein du comité de conciliation, conduisant à retenir (à l’article 1er de la directive 2009/140) une rédaction sophistiquée qui n’autorise les États membres à prendre des mesures de restriction aux services de communications électroniques qu’à condition qu’elles soient « appropriées, proportionnées, et nécessaires dans le cadre d’une société démocratique » et à subordonner leur mise en œuvre « à des garanties procédurales adéquates à la convention européenne des droits de l’homme, notamment « une procédure préalable, équitable et impartiale » et le « droit à un contrôle juridictionnel effectif en temps utile ».

C.— Les mesures emblÉmatiques du troisiÈme « paquet tÉLÉcoms »

Dans son MEMO/09/513 du 20 novembre 2009, la Commission européenne met en avant douze mesures emblématiques parmi les dispositions du paquet.

Afin de suivre l’ordre retenu pour le commentaire des dispositions de l’avant-projet d’ordonnance, on peut les présenter comme suit :

– Liberté de communication : encadrement de la suspension de l’accès à internet. Cette mesure ne nécessite pas de transposition spécifique mais exige la conformité de l’ensemble du droit national.

– Neutralité : reconnaissance du principe ; transparence des contrats sur la gestion de trafic et les restrictions d’accès ; pouvoir des autorités de réglementation nationales de fixer un niveau minimal de qualité de service sur internet.

– Protection des consommateurs : portabilité des numéros fixes et mobiles en un jour, sous réserve de disponibilité de l’accès ; accroissement de l’information des consommateurs ; transmission obligatoire des informations de localisation des appelants aux services d’urgence ; accès des handicapés aux mêmes fonctionnalités que les autres consommateurs.

– Protection de la vie privée : notification obligatoire des violations de données personnelles ; amélioration de l’information et du contrôle sur les cookies.

– Renforcement des régulateurs : indépendance accrue ; institution de l’ORECE ; droit de regard de la Commission sur les mesures de régulation proposées par les autorités de régulation nationales ; séparation fonctionnelle comme réponse aux problèmes de concurrence ; prise en compte du risque lié à l’investissement pour favoriser l’investissement dans les nouveaux réseaux.

– Gestion du spectre : réforme de la gestion du spectre pour accélérer notamment la diffusion du haut débit.

– Sécurité et service universel : les mesures du « paquet télécoms » relatives à ces sujets ne sont pas mentionnées dans les 12 mesures mises en avant dans le MEMO de la Commission, mais il s’agit néanmoins de deux axes importants, qui seront commentés dans la troisième partie de ce rapport.

II.— L’ARTICLE 11 DU PROJET DE LOI HABILITANT LE GOUVERNEMENT À LÉGIFÉRER PAR VOIE D’ORDONNANCE

La Commission des affaires économiques s’est saisie pour avis de l’article 11 du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques (DDADUE).

A.— LE CONTENU DE L’HABILITATION

Cet article est ainsi rédigé :

« Article 11

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi :

1° Les dispositions de nature législative nécessaires pour transposer la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant les directives 2002/21/CE relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, 2002/19/CE relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion, et 2002/20/CE relative à l’autorisation des réseaux et services de communications électroniques ;

2° Les dispositions de nature législative nécessaires pour transposer la directive 2009/136/CE du Parlement et du Conseil du 25 novembre 2009 modifiant la directive 2002/22/CE concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, la directive 2002/58/CE concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques et le règlement (CE) n° 2006/2004 relatif à la coopération entre les autorités nationales chargées de veiller à l’application de la législation en matière de protection des consommateurs ;

3° Toutes dispositions modifiant la partie législative du code des postes et des communications électroniques, autres que celles mentionnées au 1° et au 2°, afin d’accroître l’efficacité de la gestion des fréquences radioélectriques notamment en encourageant le développement du marché secondaire des fréquences et en renforçant le dispositif de contrôle des brouillages et de lutte contre les brouillages préjudiciables ;

4° Toutes dispositions de nature législative, autres que celles mentionnées au 1° et au 2°, de nature à :

– renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques, notamment en ce qui concerne la recherche, la constatation et la répression des infractions ;

– répondre aux menaces et prévenir et réparer les atteintes à la sécurité des systèmes d’information des autorités publiques ainsi que des opérateurs mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense ;

5° Toutes dispositions modifiant la partie législative du code des postes et des communications électroniques afin de remédier aux éventuelles erreurs et en clarifier en tant que de besoin les dispositions.

II. – Les dispositions de l’ordonnance pourront être étendues ou adaptées à la Nouvelle-Calédonie et aux collectivités d’outre-mer.

III. – Un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l’ordonnance. »

B.— LA TRANSPOSITION DU TROISIÈME « PAQUET TÉLÉCOMS » PAR VOIE D’ORDONNANCE (1° ET 2° DE L’ARTICLE 11)

1. La mise en conformité du droit national avec le droit communautaire

Comme rappelé précédemment, le « paquet télécoms » est composé de deux directives modificatrices (2009/136/CE et 2009/140/CE) et d’un règlement instituant l’ORECE (1211/2009/CE), ainsi que d’une déclaration de la Commission sur la neutralité de l’internet annexée à la directive 2009/140/CE. La déclaration, qui n’engage que la Commission, et le règlement, dont les dispositions sont directement applicables, n’ont pas besoin d’être transposés.

En permettant la transposition des deux directives modificatrices du « paquet télécoms » par voie d’ordonnance, les 1° et 2° de l’article 11 autoriseront le Gouvernement à mettre le droit français en conformité avec la totalité des obligations communautaires découlant du « paquet télécoms ».

En vertu des articles 4 de la directive 2009/136/CE et 5 de la directive 2009/140/CE, le délai maximal pour la transposition des directives par les États membres est fixé au 25 mai 2010. Il faut noter que cette date limite s’applique non seulement aux mesures législatives, mais aussi réglementaires et administratives. Or des délais incompressibles pèseront, une fois le présent projet de loi promulguée, sur l’édiction de l’ordonnance puis sur les décrets d’application. Une grande diligence sera donc nécessaire afin de respecter les obligations européennes.

2. Le choix d’une transposition par voie d’ordonnance

► La voie d’une transposition par ordonnance a été retenue, selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, au motif que « la plupart des dispositions nécessitent une transposition quasi-mécanique puisqu’elles ne laissent pas de marge de manœuvre aux États membres » (p. 103).

Les éléments figurant dans l’étude d’impact ainsi que les tableaux de concordance entre les directives et l’avant-projet d’ordonnance transmis par le Gouvernement et reproduits en annexe accréditent globalement cette idée. Il existait cependant, pour un certain nombre de dispositions du paquet, plusieurs options de transposition, quoique proches : celles-ci sont signalées dans l’étude du contenu de l’avant-projet d’ordonnance, dans la troisième partie de ce rapport.

► Le Gouvernement a mis par ailleurs en avant, dans son étude d’impact, le fait que les États membres disposaient d’une marge de manœuvre sur deux thèmes : le service universel et la neutralité. Dans les deux cas, le choix a été fait dans l’avant-projet d’ordonnance d’une transposition a minima, justifiée de la manière suivante :

– sur la neutralité, le Gouvernement note que « les réflexions […] se poursuivent », qu’« à ce stade des réflexions, les dispositions prévues par le nouveau cadre européen constituent un cadre adapté »  et qu’« il n’apparaît pas nécessaire d’introduire de dispositions législatives supplémentaires » (p. 104). Le Gouvernement, l’ARCEP et la Commission européenne ont engagé des travaux sur ce sujet. La Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a constitué une mission d’information relative à la neutralité de l’internet et des réseaux, dont les travaux sont codirigés par Mme Corinne Erhel et votre rapporteure. Au regard de la complexité du sujet, il n’apparaît pas souhaitable de prendre des mesures complémentaires à la transposition du « paquet télécoms » avant que la réflexion n’ait abouti, d’abord au niveau européen (parution d’un livre blanc par la commission européenne d’ici fin 2010) et ensuite, au sein de la Commission des affaires économiques (fin des travaux de la mission en janvier 2011) ;

– sur le champ du service universel, l’étude d’impact note qu’une modification est intervenue dans la réglementation communautaire, « aboutissant à laisser aux États membres le soin de définir […] les débits nécessaires à l’accès fonctionnel à internet après qu’a été supprimée la référence à un débit spécifique (en l’occurrence 56 Kbits) » mais qu’une « ambiguïté subsiste quant à la portée réelle de cette modification » et que dans ces conditions « il n’était pas opportun de toucher au périmètre du service universel » (p. 104).

Sur ces deux aspects, des précisions complémentaires seront apportées dans le commentaire des dispositions de l’avant-projet d’ordonnance, dans la troisième partie de ce rapport.

C.— LES MESURES COMPLÉMENTAIRES (3°, 4° ET 5° DE L’ARTICLE 11)

► Selon les éléments fournis par le Gouvernement, trois séries de mesures complémentaires à la transposition sont envisagées dans le cadre de l’ordonnance, ce qui se traduit par les habilitations visées au 3°, 4° et 5° de l’article 11.

– Mesures concernant la gestion des fréquences (3°). Les orientations générales sont présentées pages 108 et 109 de l’étude d’impact. Ces mesures concernent pour l’essentiel l’extension des pouvoirs de lutte contre le brouillage de l’agence nationale des fréquences (ANFR) et subsidiairement le développement du marché secondaire, c'est-à-dire les possibilités de reventes des autorisations d’utilisation des fréquences.

– Mesures concernant la sécurité des réseaux (4°). Les grands traits des mesures envisagées sont présentés pages 109 et 110 de l’étude d’impact mais ne figuraient pas dans l’avant-projet d’ordonnance. Il s’agit exclusivement de renforcer les pouvoirs de l’agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI), afin de lui permettre de mieux lutter contre les interceptions de communications illégales et contre les attaques informatiques.

– Corrections d’erreurs et des clarifications (5°).

Les dispositions détaillées que le Gouvernement entend prendre dans ce cadre par voie d’ordonnance sont commentées dans la troisième partie de ce rapport.

► Ces dispositions complémentaires apparaissent utiles et de portée limitée.

L’habilitation à corriger les erreurs (5°) ne pose pas de difficultés puisqu’elle ne permet d’opérer des modifications législatives qu’à droit constant. Il en va de même de l’habilitation pour accroître l’efficacité de la gestion des fréquences radioélectriques (3°) dont le champ est circonscrit, tant au niveau des objectifs qu’en ce qui concerne les dispositions modifiables, limitées au code des postes et des communications électroniques.

En revanche, l’habilitation permettant de prendre des mesures nouvelles en matière de sécurité (4°) paraît trop large par rapport aux objectifs visés :

– premièrement, les deux objectifs mentionnés – renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques ; répondre aux menaces et prévenir et réparer les atteintes à la sécurité des systèmes d’information des autorités publiques ainsi que des opérateurs – sont vastes ;

– deuxièmement, le champ des modifications que le Gouvernement est autorisé à réaliser n’est pas limité, alors que les modifications envisagées ne concernent que le code des postes et des communications électroniques et l’article L. 226-3 du code pénal.

Il faut souligner que les mesures que le Gouvernement envisage de prendre sont de portée beaucoup plus restreinte et apparaissent entièrement justifiées au regard des risques d’interceptions illégales des communications électroniques ou d’attaques informatiques. Le champ de l’habilitation ne présente pas ce caractère limité et a suscité des inquiétudes.

Afin d’apporter toutes les garanties sur les intentions du Gouvernement, l’ancien président de la Commission des affaires économiques, M. Patrick Ollier, ainsi que votre rapporteure s’étaient montrés très favorables à la restriction du champ de l’habilitation à ce qui est strictement nécessaire pour prendre les mesures envisagées. Le Gouvernement a donné suite à cette demande en déposant un amendement qui devrait lever toutes les inquiétudes.

III.— L’AVANT-PROJET D’ORDONNANCE

Un avant-projet d’ordonnance a été mis en consultation publique le 25 mai 2010. La consultation avait pour objet de recueillir des suggestions de modification. Logiquement, les services de l’État ont continué à travailler suite à cette consultation pour faire évoluer le texte. À l’heure où ce rapport est présenté, ce travail n’est pas terminé. Pour des raisons de simplicité, le commentaire des dispositions que le Gouvernement entend adopter par voie d’ordonnance se fondera sur le texte de l’avant-projet et signalera le cas échéant les évolutions intervenues suite à la consultation publique. L’avant-projet d’ordonnance mis en consultation publique ainsi que les tableaux de concordance avec les dispositions de la directive sont reproduits en annexe.

Afin que le rôle du Parlement soit respecté, il paraît indispensable que le Gouvernement finalise l’ordonnance et puisse s’engager sur un texte stabilisé avant l’examen du projet d’habilitation en séance. À défaut, votre rapporteure sera favorable au dépôt d’amendements en séance pour garantir certains principes, devant absolument être précisés dans l’ordonnance.

A.— NEUTRALITÉ

Principales dispositions de l’avant-projet d’ordonnance :

– définition de l’accès étendu à la fourniture de « services de communications au public par voie électronique » ; 8° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques ;

– objectif d'une concurrence effective et loyale entre exploitants de réseaux et fournisseurs de services de communications électroniques « y compris pour la transmission de contenu » ; 2° de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques ; et objectif fixé à l’ARCEP et au ministre de « favoriser l'accès des utilisateurs finals à l'information et préserver leur capacité à diffuser ainsi qu'à utiliser les applications de leur choix » ; 15° de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– pouvoir de l’ARCEP de « fixer, dans des conditions prévues à l’article L. 36-6, des exigences minimales en matière de qualité de service » ; article L. 36-15 du code des postes et des communications électroniques ;

– nouvelles mentions obligatoires figurant dans les contrats de services de communications électroniques, devant figurer « sous une forme claire, détaillée et aisément accessible » : procédure de gestion de trafic (g), restrictions à l’accès à des services ou à des équipements (i), réactions pour assurer la sécurité et l’intégrité du réseau (l) ; article L. 121-83 du code de la consommation.

Le « paquet télécoms » contient trois séries de dispositions relatives à la « neutralité » des réseaux qui peut-être définie, suivant l’introducteur du concept Tim Wu, comme le principe « selon lequel un réseau public d’utilité maximale aspire à traiter tous les contenus, sites et plateformes de la même manière, ce qui lui permet de transporter toute forme d’information et d’accepter toutes les applications » :

– la consécration du principe de neutralité comme objectif de la régulation, à la fois dans sa dimension économique (concurrence effective entre FAI et PSI « y compris pour la transmission de contenu) et dans sa dimension sociétale (« favoriser l’accès des utilisateurs finals à l’information… ») ;

– des obligations de transparence imposées aux opérateurs en matière de gestion de trafic et de restrictions à l’accès au réseau, pour assurer la protection du principe de neutralité par le jeu de la concurrence ;

– de nouveaux pouvoirs accordés au régulateur afin de lui permettre d’empêcher la violation du principe de neutralité : pouvoir de fixer des exigences minimales en termes de qualité de service ; pouvoir de règlement des différends étendu aux litiges sur l’acheminement du trafic des fournisseurs de contenus par les opérateurs.

L’avant-projet d’ordonnance transpose pour l’essentiel mot à mot ces trois séries de dispositions. Les nouveaux pouvoirs accordés aux régulateurs appellent cependant quelques commentaires.

1. Le pouvoir donné à l’ARCEP d’imposer des exigences minimales en matière de qualité de service

Le pouvoir conféré au régulateur de « fixer des exigences minimales en terme de qualité de service » n’est pas explicitement limité à l’internet puisqu’il s’applique potentiellement à tous les réseaux. Mais l’introduction de cette disposition au cours de l’examen du « paquet télécoms » s’est faite par précaution et afin d’anticiper l’éventuelle volonté des opérateurs de financer leurs futurs investissements dans les nouveaux réseaux en développant la discrimination tarifaire et les services gérés, ce qui risque de nuire à l’accès de base à internet. C’est donc bien l’internet public qui est visé au premier chef par cette disposition.

Comme la compétence confiée à l’ARCEP, la procédure de mise en œuvre de ce pouvoir est atypique : l’ARCEP a l’obligation de notifier les mesures envisagées à la Commission et à l’ORECE et de tenir compte des recommandations de ces deux entités. À ce titre, elle se rapproche de la procédure d’analyse de marché prévue à l’article L. 37-3 du code des postes et des communications électroniques, tout en étant allégée par rapport à celle-ci.

D’après les informations communiquées, deux types d’application de ce nouveau pouvoir seraient envisageables : une utilisation ponctuelle, visant à interdire des pratiques définies, et une utilisation générale, visant à imposer une qualité de service minimale en tant que telle.

La détermination d’un instrument de mesure de la qualité de service nécessitera, de l’avis de tous les acteurs, un travail technique considérable et pourtant indispensable.

2. L’extension du pouvoir de règlement des différends de l’ARCEP

Le « paquet télécoms » contient deux dispositions dont la portée juridique est relativement ambiguë : la modification de la définition de l’accès et celle du pouvoir de règlement des différends. L’alternative qui s’offrait à la France en terme de transposition était dès lors soit de transposer mot à mot le texte de la directive en privant potentiellement d’effet utile les nouvelles dispositions communautaires, soit de prendre des dispositions plus interprétatives du « paquet télécoms » en se fondant sur l’intention du législateur européen.

L’avant-projet d’ordonnance se contentait pour ce faire de modifier la définition de l’accès qui figure au 8° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques en l’étendant à la mise à disposition de divers éléments de réseaux en vue de permettre des services de communications électroniques (i.e. téléphone ou accès à internet) mais aussi des services de communication au public en ligne (i.e. des services sur internet).

Il est apparu que ce choix initial risquait d’avoir des effets corrélatifs indésirables, du fait de l’utilisation de la notion d’« accès » dans un grand nombre de dispositions du code des postes et des communications électroniques. Dans le cadre des travaux en cours, il a été décidé de revenir sur cette modification et d’étendre directement le pouvoir de règlement des différends de l’ARCEP organisé à l’article L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques. Les dispositions envisagées prévoient que l’ARCEP pourra se prononcer sur tout litige entre un opérateur de communications électroniques et une autre entreprise portant sur les conditions techniques et tarifaires d’acheminement. Une incertitude subsiste, qui doit être levée, sur le champ exact des différends couverts et sur la possibilité pour une entreprise en relation indirecte avec un opérateur d’accéder à la procédure de règlement des différends, ce qui serait souhaitable car de nombreuses entreprises, fournisseurs de contenu, passent par des intermédiaires pour négocier l’acheminement de leur trafic et n’ont donc pas de lien direct avec les opérateurs

Il faut rappeler à cet égard que dans le cadre des règlements de différends, l’ARCEP dispose d’un délai de quatre mois pour se prononcer ; elle se prononce en équité, à charge pour le demandeur d’apporter la preuve du caractère non équitable des conditions d’accès qui lui sont proposées. Dans les faits, ce pouvoir de règlement des différends dont dispose l’ARCEP incite les opérateurs à trouver des conditions équitables mais l’absence de conditions équitables est difficile à prouver par les petits opérateurs.

3. Le débat sur la neutralité des réseaux

Au-delà de ces dispositions, il convient de noter que le « paquet télécoms » a suscité un vrai débat non seulement au niveau européen, mais aussi dans la plupart des États membres, sur la question de la neutralité. Des réflexions ont notamment été lancées par la Commission européenne, l’ARCEP et le Gouvernement français. La Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a mis en place une mission d’information sur la neutralité de l’internet et des réseaux, qui devrait rendre ses conclusions au début de l’année prochaine, dans la foulée de la publication par la Commission européenne de son livre blanc. S’il apparaît à ce moment nécessaire de prendre des mesures complémentaires par rapport aux directives et à l’avant-projet d’ordonnance, elles pourront être intégrées par voie d’amendement au projet de loi DDADUE.

B.— CONSOMMATEURS

Principales dispositions de l’avant-projet d’ordonnance :

– « fourniture gratuite aux services d’urgence » des informations relatives à la « localisation de l’équipement du terminal de l’utilisateur » f) de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– obligation faire aux opérateurs de « mettre à disposition du public d’informations claires, actualisées et facilement accessibles » sur les services ; n) de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques et L. 121-84-9 du code de la consommation ;

– établissement et exploitation des réseaux ouverts au public soumis au respect de règles portant sur « l’accès des utilisateurs finals handicapés en vue de fournir à ces utilisateurs un accès… équivalent » ; o) de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– « délai de portage d’un jour ouvrable » et indemnisation de l’abonné en cas de « retard ou d’abus dans la prestation de conservation du numéro » ; I de l’article L. 44 du code des postes et des communications électroniques ;

– nouvelles mentions obligatoires figurant dans le contrat de communications électroniques « sous une forme claire, détaillée et aisément accessible » : frais de résiliation et de portabilité, modalités de paiement (c), procédure de gestion de trafic (g), services après-vente (h), restrictions à l’accès à des services ou à des équipements (i), annuaire (j), tarifs promotionnels (k), réactions pour assurer la sécurité et l’intégrité du réseau (l), droits associés au suffrage universel (m) ; article L. 121-83 du code de la consommation.

Le nombre des dispositions nouvelles adoptées dans le cadre du troisième paquet est symptomatique de l’évolution de la protection des consommateurs, qui passait à l’origine de la définition du service universel fourni par l’opérateur historique et qui repose désormais sur des mesures s’appliquant à tous les opérateurs. Ces dispositions ont suscité des débats importants et détaillés avec les opérateurs.

Quoique les dispositions nouvelles de l’avant-projet soient transcrites a minima sur ce point, il faut faire plusieurs remarques.

1. Portabilité en un jour

La portabilité du numéro en un jour sur le fixe comme sur le mobile a été assortie de possibilités de dérogations. Le délai semble pourvoir être tenu pour le mobile sans difficultés techniques insurmontables, mais il n’en va pas de même pour le fixe : dans certaines situations, en effet, une intervention physique sur le réseau est nécessaire. Il faut signaler en outre que la portabilité en un jour entre en conflit avec d’autres dispositions, notamment celles qui concernent les délais de rétractation en matière commerciale. En pratique, il s’agira donc plus d’un objectif que d’une norme juridique dont les consommateurs pourront directement se prévaloir. L’ARCEP disposera néanmoins d’un pouvoir supplémentaire pour imposer aux opérateurs des conditions techniques concernant la portabilité.

2. Transmission des données de localisation des appelants aux services d’urgence

La transmission des données de localisation des appelants aux services d’urgence semble soulever des difficultés techniques. Le « paquet télécoms » et l’ordonnance prévoient que cette transmission devra être effectuée dès que l’appel arrive au service d’urgence, ce qui suppose de mettre en place de nouveaux systèmes d’information dans les services d’urgence aujourd’hui. Il peut par ailleurs exister des cas dans lesquels l’opérateur ne dispose pas des informations de localisation, notamment en cas de déports de lignes dans le cadre de l’utilisation de réseaux privés virtuels.

3. Accès des personnes handicapées aux services de communications électroniques

Concernant l’accès des personnes handicapées aux services de communications électroniques, il faut signaler que la rédaction retenue initialement disposant que les pouvoirs publics favorisent l’accès à des services de communication électroniques « équivalents » a été révisée. Il est en effet apparu qu’une telle rédaction aurait impliqué la mise en place systématique, pour les personnes malentendantes, de centres d’appels. Or d’autres mesures utiles pourraient être envisagées, comme l’adaptation des terminaux ou des forfaits aux différents types de handicaps.

4. Positionnement des dispositions

Enfin, il existe un débat sur le positionnement des nouvelles dispositions relatives à la protection des consommateurs. Il est en effet envisageable de placer les nouvelles dispositions soit dans le code des postes et des communications électroniques, soit dans le code de la consommation, soit dans les deux codes. L’ARCEP n’est fondée à intervenir que sur le fondement des dispositions du code des postes et des communications électroniques, notamment pour en sanctionner le manquement en application de l’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques.

C.— PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE

Principales dispositions de l’avant-projet d’ordonnance :

– obligation faite aux opérateurs de mettre en œuvre des procédures internes permettant de répondre aux demandes des autorités et de transmettre les informations sur ces procédures ; III de l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– autorisation des traitements de données réalisés par les opérateurs dans un but commercial « si les abonnés y consentent expressément et pour une durée déterminée » : IV de l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– interdiction de la prospection directe au moyen d’un automate d’appel « ou de communication », à destination d’un abonné « qui n’a pas exprimé son consentement préalable » ; article L. 34-5 du code des postes et des communications électroniques ;

– obligation d’indiquer dans les mails commerciaux « une adresse valable à laquelle le destinataire peut transmettre une demande visant à obtenir que ces publicités cessent » ; article L. 121-15-1 du code de la consommation ;

– obligation d’informer l’utilisateur et d’obtenir son « accord qui peut être valablement exprimé par l’utilisation de paramètres permanents appropriés de son dispositif de connexion » avant d’installer des cookies ; III. de l’article 32 bis de la loi de 1978 ;

– obligations de prendre les mesures appropriées pour garantir la sécurité des services de communication électroniques accessibles au public ; IV. de l’article 32 bis de la loi de 1978 ;

– obligation de notifier les failles de sécurité à la CNIL et aux utilisateurs ; V. de l’article 32 bis de la loi de 1978.

1. Protection des données personnelles

Le paquet de 2002 imposait déjà aux opérateurs des obligations spécifiques en matière de protection des données personnelles. La directive de 2009 renforce ces obligations préventives et institue des nouvelles obligations curatives.

Concernant les obligations préventives, il s’agit pour l’essentiel de préciser les mesures qui doivent être prises par les opérateurs en matière de protection des données personnelles - comme le contrôle de l’accès à ces données – et de nouveaux moyens de contrôle. Il paraît naturel que ce soit la CNIL qui soit chargée du contrôle de ces mesures. En pratique, ces nouvelles dispositions obligeront les opérateurs à mettre en place de véritables politiques de protection des données personnelles sur lesquelles elles auront des comptes à rendre.

Pour les mesures curatives, la directive impose l’obligation de notifier les violations de données personnelles, définies en un sens large : destruction, altération, transmission, etc. Toutes les violations devront être notifiées à la CNIL et seules les plus graves devront être notifiées aux utilisateurs. Des précisions seront apportées par voie réglementaire sur les violations concernées par la seconde obligation de notification, sans doute en fixant dans un décret des critères qui seront ensuite précisés par la CNIL. La notification aux personnes privées leur permettra de réagir correctement pour se prémunir contre l’usage qui pourrait être fait de la divulgation de leurs données personnelles. La notification à la CNIL permettra à celle-ci de faire de la prévention et de mieux contrôler que les fournisseurs de services de communication au public en ligne respectent l’obligation de mettre en œuvre de dispositifs de sécurisation des traitements de données à caractère personnel et qu’ils réagissent correctement aux failles de sécurité. La CNIL devra tenir un registre des failles de sécurité et des sanctions pourront être infligées aux opérateurs qui ne respectent pas l’obligation de notification.

La directive, comme les mesures de transposition qu’il est prévu d’adopter, n’impose ces mesures nouvelles qu’aux fournisseurs de services de communications électroniques (opérateurs) et non, par exemple, aux fournisseurs de services de communication au public en ligne (fournisseurs de contenus). Pourtant, le « paquet télécoms » reconnaît qu’un intérêt important s’attache « à généraliser le dispositif à tous les responsables de traitement » (considérant 59 de la directive 2009/136/CE).

La mission d’information commune à la Commission des affaires culturelles et à la Commission des lois de l’Assemblée nationale sur « les droits de l’individu dans la révolution numérique » travaille sur ce problème et devrait s’efforcer de trouver un compromis équilibré entre le renforcement de la protection des données personnelles et la préservation de la compétitivité des entreprises françaises innovantes. Il faut noter que si des dispositions législatives complémentaires étaient adoptées, elles ne s’appliqueraient que sur le seul territoire français, contrairement aux mesures incluses dans le « paquet télécoms » qui s’appliquent à toute l’Europe.

2. Prospection automatique

Concernant la publicité non sollicitée, la directive organise le passage d’une logique de désabonnement à une logique de consentement préalable. Ce consentement n’aura toutefois pas à être exprimé dans chaque cas, mais pourra l’être de manière générale, par la définition de paramètres de connexion appropriés (paramétrage du navigateur par exemple). Il était nécessaire de trouver un équilibre permettant de protéger la vie privée des consommateurs européens sans imposer aux entreprises européennes d’obligations excessives par rapport aux obligations qui pèsent sur leurs concurrents étrangers.

D.— RENFORCEMENT DU RÉGULATEUR

Les dispositions du « paquet télécoms » concernant les autorités de régulation nationales peuvent être réparties en trois catégories.

– Indépendance accrue. La plupart des dispositions européennes nouvelles étaient déjà effectives en droit français.

– Nouveaux pouvoirs de régulation. La directive accorde aux autorités de régulation nationales des pouvoirs nouveaux qui pourront s’avérer utiles à l’avenir.

– Renforcement de l’échelon européen. Il s’agit essentiellement de la transformation du groupement des régulateurs européens en ORECE et de l’intervention de la Commission dans la mise en œuvre de mesures de régulation nationales.

1. Objectifs fixés à l’ARCEP et au ministre en charge des communications électroniques

Principales dispositions figurant dans l’avant-projet d’ordonnance ;

– objectif de « promotion d'une concurrence fondée sur les infrastructures lorsque cela est approprié » ; 2° de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– objectif de développement de l'investissement efficace dans les infrastructures « notamment dans les nouveaux réseaux » ; 3° de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– objectif de « prise en compte du risque encouru par les entreprises qui investissent » ; 3° bis de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques

– objectif de « prise en compte de la diversité des situations en matière de concurrence » ; 3° ter de l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques.

L’avant-projet d’ordonnance enrichit la liste des objectifs visés à l’article L. 32-1 du code des postes et des communications électroniques sur lesquels doivent s’appuyer le ministre chargé des communications électroniques et l’ARCEP pour prendre leurs décisions. Ces nouvelles dispositions reflètent les orientations du « paquet télécoms » : flexibilité accrue de la gestion du spectre, renforcement des autorités de régulation nationales et des outils de régulation dont elles disposent, amélioration de la protection du consommateur ; adaptation de la régulation aux nouveaux réseaux et accroissement de la neutralité technologique.

En filigrane, ces évolutions sont le symptôme d’une évolution assez substantielle de la régulation, qui n’a plus tant pour objet d’ouvrir à la concurrence les monopoles nationaux que d’éviter que ne réapparaissent des monopoles dans les nouveaux réseaux (d’où l’objectif « d’assurer la concurrence par les infrastructures lorsque cela est approprié »). Elles reflètent aussi le fait que s’estompe un peu la séparation stricte entre transport et application (d’où les dispositions relatives à la neutralité commentées précédemment).

Sont ici commentés les nouveaux objectifs ne se rattachant pas à d’autres thèmes :

– l’objectif de prise en compte de la diversité des situations en matière de concurrence devrait avoir pour effet essentiel d’obliger l’ARCEP à justifier explicitement dans ses analyses de marché le traitement retenu, soit uniforme sur le territoire métropolitain soit distinguant entre zones géographiques, alors que l’analyse de ces choix était jusqu’ici menée à titre informel ;

– le nouvel objectif dont la portée apparaît la plus importante est la « prise en compte du risque encouru par les entreprises qui investissent ». Là aussi, l’ARCEP prenait déjà en compte le risque – ainsi la décision n° 09-1106 sur la mutualisation de la partie terminale des réseaux de fibre mentionnait une décision « en cohérence avec les travaux européens tendant à favoriser le partage du risque et à conférer une prime de risque à l’opérateur qui investit ». Mais la reconnaissance explicite de ce principe fournira une base juridique à d’éventuelles contestations des décisions réglementaires par les opérateurs.

2. Mutualisation

Principales dispositions figurant dans l’avant-projet d’ordonnance :

– définition des ressources associées ; 19° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques ;

- faculté offerte à l’ARCEP « d’imposer à un opérateur de faire droit aux demandes raisonnables d’accès aux équipements et installations [établis] en application du droit de passage » ou aux lignes à l’intérieur d’un immeuble lorsque « leur duplication serait économiquement inefficace ou physiquement irréalisable » ; article L. 34-8-4 du code des postes et des communications électroniques.

Le « paquet télécoms » renforce considérablement les pouvoirs de mutualisation dont doivent disposer les autorités de régulation nationales, à la fois sur les équipements et installations établis en application d’un droit de passage et sur la partie terminale des réseaux. Ces dispositions sont transposées dans un nouvel article L. 34-8-4 du code des postes et des communications électroniques.

Or à travers la loi de modernisation de l’économie et la loi relative à la lutte contre la fracture numérique, la France avait anticipé les mesures nouvelles concernant la mutualisation de la partie terminale des réseaux de fibre optique (cf. article L. 34-8-3 du code des postes et des communications électroniques). Les nouvelles dispositions qu’il est prévu d’adopter en matière de mutualisation de la partie terminale excluent donc, logiquement, la fibre optique et, à l’heure actuelle, il est difficile de préciser les cas dans lesquelles elles pourraient s’avérer utiles.

En revanche, les nouvelles dispositions relatives à la mutualisation des équipements et installations établis en application d’un droit de passage devraient compléter utilement les pouvoirs dont dispose l’ARCEP, d’autant qu’elles pourront être appliquées aux « ressources associées » nouvellement définies à l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, par exemple des pylônes ou des antennes.

3. Pouvoirs de sanction

Principales dispositions figurant dans l’avant-projet d’ordonnance ;

– possibilité d’assortir une mise en demeure d’une astreinte ; article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques ;

– possibilité de prononcer « la suspension ou l’arrêt de la commercialisation d’un service » en cas de non conformation à une mise en demeure ; article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques.

La Commission européenne souhaitait que tous les régulateurs nationaux disposent des moyens nécessaires pour faire respecter leurs décisions par les opérateurs. Les pouvoirs dont dispose l’ARCEP à l’article L. 36-11 lui permettent déjà de sanctionner les manquements des opérateurs à leurs obligations de façon efficace : ainsi, la mise en demeure préalable est très généralement suivie d’effets rapides, et seules quelques sanctions pécuniaires ont été prononcées depuis la mise en place de l’ART, précurseur de l’ARCEP.

Plusieurs remarques :

– parmi les nouveaux outils de sanction dont doit disposer l’ARCEP figure la possibilité de prononcer la suspension de la commercialisation d’un service : cela apparaît comme un outil utile de sanction, intermédiaire entre l’amende et le retrait de l’autorisation d’exploitation ;

– il existe un débat sur la transposition des dispositions communautaires prévoyant que la mise en demeure peut être assortie d’une astreinte. Il faut souligner que l’ARCEP dispose déjà du pouvoir de saisir le juge pour faire prononcer une astreinte.

4. Pouvoirs de régulation asymétrique

Principales dispositions figurant dans l’avant-projet d’ordonnance ;

– en matière d’extension des remèdes aux marchés connexes : 3° de l’article L. 37-2 du code des postes et des communications électroniques ;

– en matière de séparation fonctionnelle : article L. 38-1 du code des postes et des communications électroniques.

En application des articles L. 37-1 à L. 38-4 du code des postes et des communications électroniques, la procédure d’analyse de marché se déroule en trois temps :

– définition du marché, sur le fondement de la recommandation de la Commission ;

– identification des acteurs exerçant une influence significative ;

– détermination des « remèdes », c’est-à-dire des obligations portant sur les acteurs exerçant une influence significative.

Le « paquet télécoms » introduit plusieurs modifications dans cette procédure :

– au niveau des deux premières phases, avis formalisé de l’ORECE en amont de l’intervention de la Commission, alors que jusqu’ici le groupement des régulateurs européen n’intervenait qu’à titre informel ;

– au niveau de la troisième phase, la Commission interviendra désormais en formulant des recommandations sur les prescriptions des autorités de régulation nationales. Cette évolution ne devrait pas modifier substantiellement la pratique de l’ARCEP, qui élaborait déjà ses remèdes en concertation avec la Commission européenne. Les délais seront néanmoins allongés et des obligations de consultation supplémentaires introduites ;

– la séparation fonctionnelle est introduite comme remède dans des circonstances exceptionnelles en cas de carence complète de concurrence au niveau d’un pays. Les cas d’application de cette solution paraissent théoriques, tant en France que dans les autres États membres de l’Union ;

– enfin, une disposition nouvelle, figurant au 3° du L. 37-2 du code des postes et des communications électroniques, a pour effet de permettre l’extension des remèdes imposés à un opérateur exerçant une influence significative sur un marché à un marché connexe qui risquerait d’être affecté par la position de l’opérateur sur le premier marché, mécanisme dit d’« effet de levier ». L’introduction de cette disposition correspond à une demande forte exprimée par les régulateurs nationaux, dont l’ARCEP, au cours des négociations du paquet.

Concernant l’analyse de marché, il faut signaler qu’au cours de la négociation du paquet, la Commission a modifié sa recommandation, faisant passer de 15 à 7 le nombre de marchés pertinents et envoyant ainsi un signal fort aux autorités de régulation nationale pour qu’elles se concentrent sur les marchés de gros. Les 7 marchés sont :

– l’accès au réseau téléphonique public en position déterminée pour la clientèle résidentielle et non résidentielle ;

– le départ d’appel sur le réseau téléphonique public en position déterminée ;

– la terminaison d’appel sur divers réseaux téléphoniques publics individuels en position déterminée ;

– la fourniture en gros d’accès (physique) à l’infrastructure du réseau (y compris l’accès partagé ou totalement dégroupé) en position déterminée ;

– le marché de la fourniture en gros d’accès à large bande ;

– la fourniture en gros de segments terminaux de lignes louées, quelle que soit la technologie utilisée pour fournir la capacité louée ou réservée ;

– la terminaison d’appel vocal sur les réseaux mobiles individuels.

5. Pouvoirs en matière de téléphonie

Principales dispositions figurant dans l’avant-projet d’ordonnance ;

– en matière de prix des numéros surtaxés : faculté de l’ARCEP de « fixer les principes de la tarification et les prix maximums applicables » aux numéros surtaxés ; article L. 44 du code des postes et des communications électroniques ;

– en matière de blocage de certains numéros : faculté de l’ARCEP d’exiger des opérateurs qu’ils bloquent l’accès à certains numéros « lorsque cela se justifie pour des raisons de fraude ou d’abus » ; article L. 44-2 du code des postes et des communications électroniques.

Concernant la faculté donnée à l’ARCEP de fixer les tarifs maximums des numéros surtaxés, il faut signaler qu’il s’agit de la transposition d’une option offerte aux États membres de doter leur autorité de régulation nationale de ce pouvoir, qui aurait pu ne pas être transposée ou être étendue à tous les numéros.

Concernant la faculté de bloquer certains numéros, un changement a eu lieu depuis la mise en consultation publique de l’avant-projet d’ordonnance. Un mécanisme similaire à celui prévu pour le filtrage des jeux en ligne est envisagé, avec saisine du juge pour qu’il ordonne de stopper toute communication avec le numéro incriminé et rétention éventuelle des recettes liées à ce numéro (cf. article 61 de la loi du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence des jeux en ligne). Ces dispositions pourraient notamment permettre de lutter contre les « puits d’appels » qui jouent sur la différence entre coût de connexion et terminaison d’appel.

E.— GESTION DU SPECTRE

1. Mesures de transposition

Principales dispositions figurant dans l’avant-projet d’ordonnance ;

– renforcement de certaines sanctions : articles L. 39-1, L. 39-3, L. 41-3 du code des postes et des communications électroniques ;

– renforcement des pouvoirs de contrôles de l’ANFR : article L. 42 du code des postes et des communications électroniques ;

– modification de la gestion des fréquences par l’ARCEP : article L. 42 du code des postes et des communications électroniques.

Les nouvelles mesures concernant la gestion des fréquences peuvent être présentées selon trois axes.

– Passage d’un régime fondé sur l’attribution de licences à un régime fondé sur l’autorisation générale : le principe avait déjà été posé en 2002. Il s’agit d’un axe sur lequel la Commission a beaucoup insisté. Les objectifs de prévention du brouillage et d’efficacité dans la gestion du spectre ont toutefois conduit à introduire un nombre important de dérogations, qui limitent considérablement la portée des dispositions concernées.

– Consolidation du principe de neutralité technologique : l’idée de la Commission était de permettre une gestion plus réactive et moins administrative, afin d’autoriser les opérateurs à faire évoluer les technologies qu’ils utilisent. La neutralité technologique est cependant peu compatible avec une bonne gestion du spectre, qui nécessite de définir, notamment pour des raisons industrielles, des bandes de fréquences permettant de normaliser les terminaux.

– Développement du marché secondaire.

Les dispositions adoptées dans le « paquet télécoms » sont très en recul par rapport à la proposition initiale de la Commission. Celle-ci proposait d’ouvrir de manière beaucoup plus importante le spectre. Elle s’est heurtée à l’opposition des États membres, qui ont fait valoir que la banalisation de la totalité du spectre, y compris les bandes de fréquences dédiées à l’audiovisuel ou à la défense, ne paraissait pas justifiée. En application du compromis qui a été trouvé, le paquet pose le principe de la flexibilité, mais assortie d’une liste d’exceptions qui fait que cela ne devrait pas entraîner des modifications à court terme dans la gestion du spectre en France.

2. Mesures complémentaires

L’article 11 du projet de loi DDADUE habilite le Gouvernement à transposer les deux directives du « paquet télécoms » par voie d’ordonnance (1° et 2°) mais aussi à modifier par cette voie « toutes dispositions modifiant la partie législative du code des postes et des communications électroniques, autres que celles mentionnées au 1° et au 2°, afin d’accroître l’efficacité de la gestion des fréquences radioélectriques notamment en encourageant le développement du marché secondaire des fréquences et en renforçant le dispositif de contrôle des brouillages et de lutte contre les brouillages préjudiciables » (3°).

En appui de l’étude d’impact jointe par le Gouvernement, il paraît utile de fournir des précisions sur les modifications envisagées.

a) Extension des pouvoirs de sanction de l’ANFR

En application de l’article R. 20-44-11 du code des postes et des communications électroniques, l’ANFR est chargé du contrôle de l’utilisation des fréquences. Le 2° de l’article L. 39-1 du code des postes et des communications électroniques lui confère déjà à cette fin des moyens de sanction ; sont punis de 6 mois d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende les faits suivants :

– exploitation interdite d’un réseau ;

– perturbation en utilisant une fréquence, un équipement ou une installation radioélectrique ;

– utilisation d’une fréquence, d’un équipement ou d’une installation radioélectrique dans des conditions non-conformes ou sans posséder d’autorisation ;

– commercialisation de dispositifs de brouillages de téléphone mobile non autorisés.

Cette liste n’inclut pas diverses pratiques pouvant conduire à des brouillages : perturbations causées par des installations électriques (la rédaction actuelle étant limitée aux installations radioélectriques) ; non respect des conditions d’utilisation d’une fréquence fixée dans l’autorisation (la rédaction actuelle étant limitée à la possession de l’autorisation) ; commercialisation de brouilleurs de communications électroniques non autorisés et publicité pour ces matériels (la rédaction actuelle étant limitée aux brouilleurs de téléphones mobiles et n’incluant pas la publicité).

Le Gouvernement a projeté d’inclure ces pratiques dans la liste des faits passibles des sanctions prévues à l’article L. 39-2 du code des postes et des communications électroniques.

b) Possibilité de céder à l’intérieur d’une même bande de fréquence les autorisations délivrées pour certains services de radio

Cette modification a pour objet d’encourager le développement du marché secondaire. Elle se traduit dans l’avant-projet d’ordonnance par la modification de l’article L. 43-3.

c) Faculté accordée à l’ANFR de réaliser des contrôles a priori

Comme mentionné ci-dessus, l’article R. 20-44-11 donne compétence à l’ANFR pour réaliser des contrôles à la demande des administrations, autorités affectataires, ou en cas de brouillage, à la demande de tiers. Il est envisagé dans l’avant-projet d’ordonnance d’étendre cette compétence en permettant à l’ANFR de réaliser des contrôles a priori.

d) Pouvoir accordé à l’ANFR de suspendre ou retirer son accord sur l’implantation des antennes de téléphone mobile

L’article L. 43 du code des postes et des communications électroniques dispose dans sa rédaction actuelle que l’ANFR coordonne l'implantation sur le territoire national des stations radioélectriques de toute nature afin d'assurer la meilleure utilisation des sites disponibles, et veille au respect des valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques. Pour ce faire, l’ANFR autorise les décisions d’implantation des antennes à l’exception des stations de télévision qui sont autorisées par le CSA, sauf exposition trop importante.

Dans le cadre de la libération des fréquences du dividende numérique et de leur utilisation pour des services de communications électroniques mobiles (4G), le Gouvernement envisage, afin d’éviter tout brouillage des canaux de télévision diffusés sur des bandes de fréquence jouxtant celles du dividende numérique, de fixer, dans les licences des opérateurs, les paramètres techniques des stations de base du réseau 4G. Afin de donner à l’ANFR des moyens de contrôle du respect de ces obligations, l’avant-projet d’ordonnance modifie l’article L. 43 du code des postes et des communications électroniques afin de donner à l’ANFR le pouvoir de suspendre ou retirer son autorisation.

Cette modification apparaît problématique à certains acteurs car elle accroîtrait l’asymétrie qui existe entre la diffusion hertzienne de la télévision et des communications électroniques.

3. La transposition de la directive GSM

L’objectif de la directive 2009/114/CE, adoptée le 16 septembre 2009 en marge du « paquet télécoms », est de « permettre de tirer un meilleur profit de la bande des 900 MHz en permettant qu'elle soit utilisée non seulement par la technologie de communications mobiles GSM, mais aussi par la technologie UMTS. » (3). Sa transposition en droit français devait se faire dans un délai de six mois. Elle nécessitait une mise à jour du tableau national de répartition des bandes de fréquences (TNRBF), élaboré par l’ANFR et approuvé par arrêté du Premier ministre, qui précise pour chaque bande de fréquences le ou les services de radiocommunication autorisés et le ou les affectataires correspondants.

Un arrêté a été publié le 4 août 2010 afin de mettre à jour le TNRBF, pour les fréquences de la bande cœur du GSM (890-915 MHz). N’ayant pas reçu notification des mesures de transpositions adoptées, la Commission a adressé à la France une mise en demeure le 20 septembre 2010, ce qui a conduit à une notification de l’arrêté du 4 août 2010 le 29 septembre 2010. Il faut toutefois signaler que les bandes d’extension 880-890 MHz et 925-935 MHz n’ont pas fait l’objet d’une mise à jour. Selon l’avis n° 2010-0539 rendu par l’ARCEP sur le projet d’arrêté, l’origine de la transposition incomplète de la mesure serait à chercher dans les « utilisations du ministère de la défense dans les sous-bandes 880-890 MHz et 925-935 MHz, qui ne sont pas conformes aux dispositions communautaires et qui rendent difficile l'utilisation de l'UMTS dans certaines zones géographiques dans ces portions de bande ». Le Gouvernement envisagerait une nouvelle modification.

F.— SÉCURITÉ

Principales dispositions figurant dans l’avant-projet d’ordonnance ;

– établissement et exploitation des réseaux ouverts au public soumis au respect de règles portant sur les conditions « de sécurité et d’intégrité » ; a) de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques ;

– faculté du ministre chargé des communications électroniques « d’imposer à l’opérateur de se soumettre à un contrôle de sécurité effectué par un organisme qualifié indépendant » ; article L. 33-10 du code des postes et des communications électroniques ;

– obligation de prendre les mesures appropriées pour garantir la sécurité des services de communication électroniques accessibles au public ; IV du 32 bis de la loi de 1978.

1. Mesures de transposition du « paquet télécoms »

Les principales nouveautés contenues dans la directive sont l’obligation de mettre en place des plans de prévention visant à assurer la résilience des réseaux et de notifier certaines failles de sécurité aux autorités. En matière de notification, il avait initialement été envisagé de transposer l’intégralité des dispositions nouvelles directement au niveau réglementaire, mais les discussions ont fait apparaître la nécessité d’en remonter le principe au niveau législatif ; un nouvel alinéa devrait à cette fin être ajouté à l’article L. 33-7. Des précisions seront apportées par voie réglementaire sur l’autorité à laquelle devront être notifiées les failles et sur les critères permettant de déterminer les failles importantes devant être notifiées.

2. Mesures complémentaires

L’agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) est une agence technique de l’État rattachée au secrétaire général de la défense et de la sûreté nationale (SGDSN). Elle a été créée par un décret du 7 juillet 2009, suite au constat fait par le Livre blanc sur la sécurité et la défense nationale que les menaces les plus importantes qui pèsent sur la France, concernent, après les armes de destruction massives, les attaques visant les systèmes d’information. L’ANSSI a plusieurs missions : maîtrise d’ouvrage pour des produits de haute sécurité, expertise à la demande pour les ministères et les opérateurs d’infrastructures critiques, délivrance de labels et centre opérationnel de veille, d’alerte et de réaction contre le piratage informatique. Son personnel, composé à 90 % d’ingénieurs, est en forte croissance : dotée de 110 emplois à sa création, l’agence comptera 250 personnes en 2012.

► Aujourd’hui, les opérateurs mettent bien en place des procédures visant à prévenir les attaques contre les réseaux et réagissent à ces attaques lorsqu’elles se produisent, notamment à la demande de l’ANSSI. Mais l’État ne dispose pas actuellement de moyens juridiques pour imposer des normes de sécurité, ou des mesures de réaction appropriées en cas d’attaques.

La transposition permet d’abord de soumettre les opérateurs à des règles en matière de sécurité, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui : le droit français pose bien des exigences en matière de défense ou d’interception, mais pas de « résilience » c’est-à-dire de capacité des réseaux à résister à des attaques (article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques).

La transposition permet ensuite de contrôler le respect de ces exigences par les opérateurs en faisant effectuer des contrôles par un organisme qualifié indépendant (article L. 33-10 du code des postes et des communications électroniques).

Ces deux dispositions viennent combler un vide juridique en donnant à l’État la possibilité de prendre les mesures appropriées en matière de sécurité des réseaux. L’utilité de ces dispositions reste aujourd’hui théorique mais elles apparaissent comme des mesures de prudence.

► Des mesures complémentaires à celles prévues dans les directives ont été ajoutées dans l’avant-projet afin de remédier à deux problèmes plus précis, qui concernent l’ANSSI.

a) Autorisation, sanction et contrôle des matériels d’interception

Projet de loi DDADUE :

Article 11. I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi : […]

4° Toutes dispositions de nature législative, autres que celles mentionnées au 1° et au 2°, de nature à :

– renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques, notamment en ce qui concerne la recherche, la constatation et la répression des infractions.

La loi du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des télécommunications a posé le principe de l’interdiction, sauf autorisation ministérielle, de la détention, fabrication, commercialisation et publicité pour des matériels d’interception. Cette autorisation est en pratique délivrée au nom du Premier ministre par le directeur de l’ANSSI après avis d’une commission dont l’existence est prévue à l’article R. 226-2 du code pénal. L’autorisation peut être assortie de prescription portant sur les conditions d’utilisation des matériels (cf. article R 226-9 : « Elle [l’autorisation] peut subordonner l'utilisation des appareils à des conditions destinées à en éviter tout usage abusif »).

La répression des interceptions non autorisées est aujourd’hui organisée aux articles L. 226-1 et L. 226-3 du code pénal, qui prévoient :

Article L. 226-1. « Est puni d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui :

1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ;

2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé.

Lorsque les actes mentionnés au présent article ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu'ils s'y soient opposés, alors qu'ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé. »

Article L. 226-3. « Est punie des mêmes peines la fabrication, l'importation, la détention, l'exposition, l'offre, la location ou la vente, en l'absence d'autorisation ministérielle dont les conditions d'octroi sont fixées par décret en Conseil d'État, d'appareils conçus pour réaliser les opérations pouvant constituer l'infraction prévue par le deuxième alinéa de l'article 226-15 ou qui, conçus pour la détection à distance des conversations, permettent de réaliser l'infraction prévue par l'article 226-1 et figurant sur une liste dressée dans des conditions fixées par ce même décret.

Est également puni des mêmes peines le fait de réaliser une publicité en faveur d'un appareil susceptible de permettre la réalisation des infractions prévues par l'article 226-1 et le second alinéa de l'article 226-15 lorsque cette publicité constitue une incitation à commettre cette infraction. »

Autrefois, les matériels d’interception étaient essentiellement des dispositifs physiques à brancher sur les commutateurs téléphoniques de France Télécom. L’évolution technologique et le développement d’internet ont rendu la situation beaucoup plus complexe : l’interception peut reposer sur des solutions entièrement logicielles, activables dans des éléments de réseaux sophistiqués destinées à d’autres fonctions, comme le routage, que produisent une multitude d’acteurs économiques. Des cas ont été rapportés, à l’étranger, d’activation illégale de dispositifs d’interception dissimulés sur des terminaux mobiles. La demande de l’ANSSI de pouvoir contrôler les installations d’interception et le respect des préconisations effectuées lors de l’autorisation répond donc à une préoccupation très concrète.

Le droit français n’était, selon l’ANSSI, pas entièrement satisfaisant, ce qui explique l’ajout d’un alinéa dans l’article d’habilitation, autorisant le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance des mesures visant à « renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques, notamment en ce qui concerne la recherche, la constatation et la répression des infractions ».

Il s’agit d’apporter trois modifications au droit actuel :

– l’alignement des sanctions prévues à l’article L. 226-3 pour fabrication, détention, utilisation, commercialisation et publicité pour du matériel d’interception non autorisé sur les sanctions prévues à l’article L. 226-16 du code pénal pour les traitements de données illégaux. Cet alignement ferait passer la sanction maximale d’un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende à cinq ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende ;

– la sanction du non respect des prescriptions d’utilisation dont est assortie l’autorisation d’utilisation, sera aussi soumise aux peines mentionnées ci-dessus. Aujourd’hui, l’ANSSI a bien le droit d’édicter des prescriptions d’utilisation mais pas de sanctionner, en cas de non respect ;

– l’habilitation des agents de l’ANSSI pour réaliser des contrôles in situ de la bonne utilisation des matériels autorisés, alors qu’aujourd’hui ils ne disposent pas de moyens de contrôle.

b) Protection des infrastructures critiques

Projet de loi DDADUE :

Article 11. I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi : […]

4° Toutes dispositions de nature législative, autres que celles mentionnées au 1° et au 2°, de nature à : […]

– répondre aux menaces et prévenir et réparer les atteintes à la sécurité des systèmes d’information des autorités publiques ainsi que des opérateurs mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense ;

En cas d’attaque informatique, les opérateurs prennent en pratique les mesures qui s’imposent pour protéger les systèmes d’information dont ils assurent des communications électroniques, et répondent aux demandes des services de sécurité de l’État. Cependant, aujourd’hui, ni l’ANSSI ni aucun autre service de l’État n’a le pouvoir juridique d’obliger les opérateurs de communications électroniques à mettre en œuvre des mesures de protection spécifiques pour protéger les infrastructures les plus importantes.

Cet état de fait est particulièrement dommageable pour les administrations et les infrastructures d’importance vitale, comme les centrales électriques, les moyens de transport, etc. Ces infrastructures sont visées aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense.

Article L. 1332-1. « Les opérateurs publics ou privés exploitant des établissements ou utilisant des installations et ouvrages, dont l'indisponibilité risquerait de diminuer d'une façon importante le potentiel de guerre ou économique, la sécurité ou la capacité de survie de la nation, sont tenues de coopérer à leurs frais dans les conditions définies au présent chapitre, à la protection desdits établissements, installations et ouvrages contre toute menace, notamment à caractère terroriste. Ces établissements, installations ou ouvrages sont désignés par l'autorité administrative. »

Article L. 1332-2. « Les obligations prescrites par le présent chapitre peuvent être étendues à des établissements mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ou comprenant une installation nucléaire de base visée à l'article 28 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire quand la destruction ou l'avarie de certaines installations de ces établissements peut présenter un danger grave pour la population. Ces établissements sont désignés par l'autorité administrative. »

La protection de ces infrastructures n’est pas théorique : l’ANSSI a récemment été amenée à collaborer avec France Télécom pour mettre fin à une attaque en déni de service visant le système d’information central d’un ministère utilisant une petite passerelle de ce ministère au niveau déconcentré.

C’est pourquoi il est envisagé de compléter l’avant-projet d’ordonnance et de modifier le e) de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques afin de soumettre l’établissement et l’exploitation des réseaux ouverts au public et la fourniture au public de services de communications électroniques au respect de règles portant sur les « prescriptions nécessaires pour répondre aux menaces et prévenir et réparer les atteintes graves à la sécurité des systèmes d’information des autorités publiques et des opérateurs mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 ».

Votre rapporteure estime que, si les modifications envisagées sont parfaitement justifiées, la rédaction proposée pour répondre à ces objectifs dans le projet de loi d’habilitation est trop large et pourra être précisée utilement lors des débats parlementaires.

G.— SERVICE UNIVERSEL (ARTICLES L. 35-1, L. 35-2, L. 35-2-1)

Il faut noter qu’il avait été décidé, au moment du lancement de la révision du cadre réglementaire européen, que l’évolution du service universel ferait l’objet d’une réflexion séparée. Les modifications adoptées sont donc marginales.

On peut retenir deux modifications.

– La première, visée à l’article L. 35-1 du code des postes et des communications électroniques, transpose l’article 4 de la directive qui oblige les États membres à distinguer dans les appels d’offre pour l’attribution du service universel entre le service téléphonique et le raccordement au réseau. En pratique, cela devrait alourdir les procédures de désignation des prestataires du service universel.

– Ensuite, le considérant 5 de la directive a été modifié par la suppression des dispositions qui limitaient explicitement le débit de connexion à 56 Kbits et remplacé par la référence à un débit suffisant au regard des technologies les plus utilisées. D’après les éléments d’analyse juridique disponibles, cette modification n’obligera les États membres à inclure le haut débit (> 512 Kbits) dans le service universel qu’à partir du moment où une très grande partie de la population l’utilisera, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, et elle ne permet pas de financer une offre sociale haut-débit par un fond de péréquation de service universel.

H.— CORRECTIONS D’ERREURS ET CLARIFICATIONS

Le 5° de l’article 11 du projet de loi DDADUE habilite le Gouvernement à corriger et à clarifier les dispositions législatives du code des postes et des communications électroniques. La liste des modifications envisagées sur cette base dans l’avant-projet d’ordonnance est reproduite en annexe X.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 30 novembre 2010, la Commission a examiné, sur le rapport pour avis de Mme Laure de La Raudière, l’article 11 du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques (n° 2789).

M. le président Serge Poignant. Le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques a été renvoyé pour examen au fond à la Commission des affaires sociales. La Commission des affaires économiques s'est saisie pour avis de son article 11, qui habilite notamment le Gouvernement à transposer par voie d'ordonnance le troisième « paquet télécoms ».

Je tiens à insister sur l'importance du sujet.

L'essentiel des modifications à apporter à la législation française est technique. Les deux directives à transposer ne représentent pas une mutation majeure du cadre réglementaire européen. Leur précision laisse peu de marge de manœuvre – voire aucune – aux États membres. C'est pourquoi le Gouvernement a fait le choix d'une transposition par voie d'ordonnance.

Mme Laure de La Raudière, rapporteur pour avis, détaillera dans un instant les dispositions qu'entend prendre le Gouvernement dans le cadre de cette transposition et son exposé devrait, me semble-t-il, accréditer cette analyse.

Pour autant, le nombre de modifications qu'il est nécessaire d'apporter au code des postes et des communications électroniques, ainsi que l'habilitation du Gouvernement à effectuer des modifications complémentaires à la stricte transposition rendent nécessaires une complète transparence du processus d'élaboration de l'ordonnance.

Cette volonté est sans doute partagée par tous les membres de la Commission. La présence ce soir du ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique témoigne d'ailleurs du souci du Gouvernement d'associer la représentation nationale au travail de transposition.

Peut-être l'engagement du ministre à transmettre aux membres de la Commission un projet d'ordonnance finalisé avant l'examen du texte en séance publique et à tenir compte des remarques que nous pourrions lui adresser sur cette base serait-il à même de lever toutes les inquiétudes qui pourraient subsister.

Je signale que quatre amendements ont été déposés sur le projet de loi : un du Gouvernement, deux du groupe SRC et un du groupe UMP. Les débats devraient donc être relativement brefs.

M. François Brottes. Je voudrais être certain, monsieur le ministre, d’avoir bien compris que, comme vous me l’avez indiqué par lettre à la suite des débats que nous avons eus dans l’hémicycle, le Gouvernement accepte qu'une partie de la transposition des directives relatives au marché intérieur de l’électricité soit débattue dans le cadre d'une loi normale, le reste étant transposé par ordonnance.

M. Éric Besson, ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique. Je vais donner lecture, à l'intention des membres de la Commission, des deux derniers paragraphes de la lettre que j'ai adressée à M. Brottes après l'échange que nous avions eu dans l'hémicycle :

« Je m'engage à ce que les services compétents de mon département ministériel viennent vous présenter le détail de ce projet d'ordonnance dès que vous en ferez la demande. Je m'engage également à ce que ce texte fasse l'objet d'un débat contradictoire avec la Commission des affaires économiques si son nouveau président le sollicite. »

Monsieur le président, vous avez déclaré en séance que vous le solliciteriez.

M. le président Serge Poignant. En effet !

M. le ministre. Je poursuivais ainsi :

« Par ailleurs, je souhaiterais que la finalisation de ce projet puisse se faire en totale concertation avec les commissions parlementaires compétentes et, le cas échéant, dans ce cadre, amendée par les parlementaires, notamment sur les sujets que vous avez ciblés : prérogatives nouvelles de la CRE [Commission de régulation de l’énergie] relatives à la certification de l'indépendance des réseaux de transport, ainsi que les sanctions afférentes, le plan décennal d'investissement, ses conditions d'élaboration et le contrôle de son exécution par la CRE, les conditions de fixation des tarifs de transport et de distribution pour le gaz et l'électricité. »

L’adverbe « notamment » ouvre à d'autres membres de la Commission la possibilité d’aborder d'autres sujets que ceux, du reste cruciaux, que j’ai énumérés.

M. le président Serge Poignant. Je vous solliciterai en effet, monsieur le ministre, afin que nous ayons un débat contradictoire en Commission sur le projet d’ordonnance. Sur la base des différentes positions exprimées, un groupe de travail pourrait alors formuler des propositions sur la rédaction du texte. Il n'est pas certain, en effet, qu'une commission parlementaire puisse à proprement parler amender un projet d'ordonnance.

M. le ministre. M. Brottes craignait que l’ordonnance puisse être adoptée sans avoir fait l’objet d’un débat contradictoire…

M. François Brottes. Je le crains encore !

M. le ministre. Je lui ai donc confirmé que ce débat pourrait avoir lieu, même s'il n'est pas certain qu’il puisse donner lieu à des amendements au sens formel du terme. C’est en effet l'habilitation du Gouvernement à prendre cette ordonnance, et non l’ordonnance proprement dite, qui fera l’objet du projet de loi soumis au Parlement.

M. le président Serge Poignant. Accepteriez-vous qu’un groupe de travail se réunisse pour évoquer le texte de l’ordonnance ?

M. le ministre. Avec grand plaisir. En tout état de cause, le projet d'ordonnance vous sera présenté par anticipation et, lors de l'examen du projet de loi d'habilitation en séance publique, M. Brottes et son groupe pourront, s'ils le souhaitent, présenter des amendements.

M. François Brottes. Certains sujets méritent d'être traités dans le cadre d'une loi ordinaire, et non d'être adoptés par ordonnance. De fait, la procédure d'habilitation – dont tous les gouvernements ont malheureusement été coutumiers – laisse au Parlement une marge de manœuvre quasi nulle. En l’occurrence, certains points de la transposition devraient donc être sortis du cadre de l'habilitation et traités au moyen d’un véhicule législatif plus classique, qui permettrait un débat. Cela s’est déjà fait à l’occasion d'autres ordonnances.

M. le ministre. Si M. Brottes et son groupe ont des propositions d'amendement à formuler, le Gouvernement est prêt à les étudier et à les discuter lors de la présentation du projet d’ordonnance devant votre commission ou de la discussion du projet de loi d'habilitation en séance publique.

Monsieur Brottes, hors de toute considération politique, j'entends bien que vous souhaitez exprimer vos préoccupations et présenter vos analyses dans l'hémicycle et les voir consignées au compte rendu officiel. Or c’est bien ce que vous permettra le débat sur le projet de loi d'habilitation.

M. le président Serge Poignant. Je propose, monsieur le ministre, que nous poursuivions ce dialogue avec votre cabinet, afin de trouver la meilleure solution possible.

M. le ministre. Je ne doute pas que nous y parvenions.

L'article examiné aujourd'hui par votre Commission vise à autoriser le Gouvernement à transposer par voie d’ordonnance la directive dite du troisième « paquet télécoms ». Permettez-moi de rappeler brièvement les conditions de cette transposition.

Entré en vigueur depuis 2002, le « paquet télécoms » est le cadre réglementaire communautaire qui définit le régime juridique applicable au secteur des communications électroniques. Les directives « Mieux légiférer » et « Droits des citoyens », adoptées le 25 novembre 2009, forment le nouveau « paquet télécoms ». Comme vous le savez, elles doivent être transposées en droit national le 25 mai 2011 au plus tard. En cas de non-respect de cette échéance, notre pays pourrait faire l'objet d'un recours en manquement introduit par la Commission européenne.

Ces nouvelles directives ne modifient pas profondément les principes généraux du cadre juridique de 2002, même si plusieurs avancées peuvent être notées : une régulation soucieuse de préserver l'avenir et de favoriser l'harmonisation des pratiques des régulateurs ; des dispositions destinées à promouvoir une gestion du spectre plus souple et plus efficace, pour mieux prendre en compte sa rareté ; une protection renforcée en faveur des consommateurs et du respect de leur vie privée.

Je vous confirme que le Gouvernement souhaite que la transposition se fasse par voie d'ordonnance, et cela pour trois raisons principales.

D'abord, l'obligation de respecter l'échéance de transposition nous laisse un délai très bref et expose notre pays à des sanctions significatives, en particulier financières, en cas de retard dans la transposition au-delà du 25 mai 2011.

Ensuite, ce « paquet » s'inscrit dans la continuité du précédent. Les règles et principes majeurs applicables au secteur des communications électroniques, adoptés dans les directives de 2002 et transposés par la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques, restent valides et n'appellent pas de changement particulier.

Enfin, pour cette transposition, la marge de manœuvre laissée aux États membres est extrêmement faible.

Les dispositions des directives ont de surcroît un caractère technique prononcé.

Tout cela ne laisserait que peu de place à un débat parlementaire.

L'article 11 compte dix alinéas. Les alinéas 2 et 3 portent sur la codification des directives dans le code des postes et des communications électroniques. Les cinq alinéas suivants visent à amender ce code sur trois points techniques : favoriser un meilleur usage des fréquences, garantir la sécurité des réseaux et corriger certaines rédactions du code. Le Gouvernement a déposé un amendement modifiant les alinéas 5 à 7, concernant la sécurité des réseaux.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure pour avis. Le « paquet télécoms » comporte d’abord une mesure importante prise par la Commission européenne pour encadrer la suspension de l'accès à l'Internet, qui ne nécessite pas de transposition spécifique. Cette disposition, l'une de celles qui ont été le plus discutées au niveau européen, limite la capacité des États membres de suspendre ou de restreindre l'accès à l'Internet eu égard aux enjeux.

Certaines des autres mesures prévues visent à garantir la neutralité des réseaux, la protection des consommateurs et la protection de la vie privée. D'autres encore sont consacrées au renforcement des pouvoirs des régulateurs, à la gestion du spectre hertzien et au service universel. Nous n'entrerons pas dans le détail de toutes ces dispositions, que vous pourrez consulter en consultant les directives.

Le Gouvernement a soumis à consultation publique depuis mai 2010 un avant-projet d'ordonnance. Des tableaux de concordance ont été transmis, ainsi qu'une fiche sur les principaux points restant en débat. Ces documents seront intégrés dans le rapport qui vous sera transmis à la fin de la semaine ou au début de la semaine prochaine, soit avant l'examen par la Commission des affaires sociales, saisie au fond.

Il ne me semble pas illogique que la transposition se fasse par ordonnance. En effet, les sujets traités sont majoritairement techniques, les deux directives transposées comportent un très grand nombre de modifications – elles comptent respectivement 33 et 26 pages – et elles ne modifient pas l'architecture de la réglementation. L’essentiel de la transposition consiste donc à répliquer en droit français les nouvelles dispositions de droit européen, ce qui justifie précisément le recours à l'ordonnance.

Les auditions réalisées dans le cadre de la mission d'information sur la neutralité de l’Internet et des réseaux, que j'ai l'honneur de coprésider avec Mme Corinne Erhel, ont fourni l'occasion d'interroger les acteurs concernés. Si certains demandent des mesures complémentaires, notamment en matière de neutralité, il n'a pas été fait état de difficultés majeures liées à la transposition du « paquet ». Il faut cependant constater que le projet d'ordonnance n'est pas stabilisé à ce jour. Si cette situation est acceptable à ce stade de l'étude en commission, je demande que vous vous engagiez, monsieur le ministre, à ce que les arbitrages interministériels aient lieu avant l'examen de l'habilitation en séance publique. Les députés doivent pouvoir connaître avec précision les décisions prises, concernant notamment les différentes mesures encore en discussion en matière de neutralité des réseaux.

La rédaction initiale des alinéas 5 à 7 de l'article d'habilitation avait suscité beaucoup d'inquiétudes. Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de nous proposer, comme vous vous y étiez engagé, un amendement tendant à préciser le champ de l'habilitation.

Le recours à une ordonnance supprimant une partie du débat politique sur les articles de loi, je voudrais évoquer certains points et vous poser quelques questions.

En matière de neutralité, la rédaction permettant d'étendre le pouvoir de règlement des différends de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), en particulier aux différends entre opérateurs et fournisseurs de services, a été modifiée pour des raisons techniques par rapport à l'avant-projet. Nous avons besoin, sur ce point essentiel, d'une rédaction stabilisée, négocié avec le Parlement.

D'autre part, des mesures complémentaires pourront être proposées en séance publique en vue de garantir la neutralité, issues de la mission d'information sur la neutralité de l’Internet et des réseaux, en particulier afin de préciser certains aspects définis « en creux » dans le « paquet télécoms » – je pense notamment à tout ce qui touche à la non-discrimination dans les réseaux.

En matière de régulation, il semblerait que les analyses du Gouvernement et de l'ARCEP divergent sur la possibilité et l'obligation d'étendre le pouvoir d'astreinte de l'ARCEP. Pourriez-vous nous apporter quelques explications sur ce point, sinon ce soir, du moins avant l'examen du texte en séance publique ?

Enfin, je préciserai que mon rapport comportera une annexe présentant l'avant-projet d’ordonnance et un tableau comparatif des dispositions du « paquet télécoms » et de l’avant-projet d'ordonnance.

M. le ministre. Je n'insisterai pas sur l'importance de la neutralité du Net ni sur notre attachement à cette neutralité. La France n'est pas en retard en la matière et le Gouvernement a contribué à ouvrir un débat sur ce sujet, avec le lancement d'une consultation publique, des auditions menées en début d'année et un rapport remis au Parlement cet été.

Pour l'instant, le Gouvernement a choisi de s'en tenir aux dispositions du « paquet télécoms » avant de procéder à une éventuelle évolution de la doctrine.

D'abord, ce nouveau « paquet » apporte de nouveaux outils, notamment un accroissement de la transparence vis-à-vis des utilisateurs sur les pratiques des opérateurs, ainsi qu’un pouvoir renforcé de l'ARCEP pour traiter des différends entre un opérateur, comme Orange, et un fournisseur de services, comme Google, et pour assurer aux utilisateurs une qualité standard minimale. L'ARCEP prévoit d'ailleurs d'engager dans les mois qui viennent des travaux approfondis avec les acteurs du secteur.

Ensuite, la Commission européenne nous a indiqué qu'elle devrait communiquer au printemps sur le sujet. Nous avons donc tout intérêt à travailler ensemble sur celui-ci. S’il est pleinement légitime que le Parlement s'intéresse à la neutralité du Net, il me semble que nous devrions attendre un peu avant de débattre à nouveau ici de toute évolution doctrinale.

J’aurai la semaine prochaine une réunion de travail avec l’ARCEP, ce qui me permettra de vous apporter toutes les précisions nécessaires avant l'examen du texte en séance publique, selon le souhait de votre rapporteure.

Mme Corinne Erhel. Le projet de loi que nous examinons vise à accorder une habilitation au Gouvernement afin qu'il puisse légiférer par voie d'ordonnance dans des domaines très variés, comme l'indique le titre même de ce texte.

Au nom du groupe socialiste, et comme l'a fait tout à l'heure M. François Brottes, je tiens à exprimer notre désaccord sur la procédure d'examen du projet de loi, qui regroupe des sujets très différents.

La Commission des affaires économiques n'est saisie que pour avis d'un sujet qui est une composante essentielle du secteur des technologies de l'information et de la communication. Nous ne pourrons que « discuter » de cette question, et non pas en « débattre » à proprement parler car, compte tenu de l'objet réel du projet de loi, le Parlement ne peut amender sur le fond la transposition, mais seulement modifier le périmètre des habilitations accordées au Gouvernement. Celui-ci nous opposera, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, l'impérieuse nécessité d'éviter que la Commission européenne n'engage contre la France un recours en manquement si notre pays ne transposait pas la directive dans les délais, soit avant le 25 mai 2011, ce qui nous exposerait à des sanctions pécuniaires. Face à l'inflation législative, nous sommes en droit de regretter que la surcharge du calendrier législatif puisse être invoquée pour justifier un recours aux ordonnances, ce dont ne peuvent se satisfaire des parlementaires, quel que soit leur bord.

La transposition par voie législative, en procédure accélérée, du « paquet télécoms », qui a été possible en 2004, ne l’est plus en 2010. Pourtant, la modification des textes européens intervenue en 2009 traite de sujets qui concernent directement nos concitoyens : il est en effet question de service universel, de traitement des données à caractère personnel et de protection de la vie privée. Notre Commission risque ainsi d'être privée de débats sur des points qui ont des échos importants, notamment sur le plan international.

Pour ce qui est de la neutralité des réseaux, il semblerait que vous souhaitiez procéder à une transposition a minima, alors même que la mission d'information, comme l'a rappelé Mme de La Raudière, montre bien que les différents acteurs ont des approches différentes de la neutralité et des apports du « paquet télécoms ». Le Gouvernement souhaitera-t-il rouvrir ce débat une fois la transposition effectuée a minima ? Il me semble que vous avez déjà répondu sur ce point. Cette question complexe touche cependant au fondement même de l'Internet, avec des implications sociétales, économiques et techniques. Un vrai débat parlementaire sur ce sujet, certes complexe, mais essentiel, serait un moment propice de discussion, car une prise de conscience s'impose.

Il semble également qu'il ait été décidé d'exclure de cette transposition les dispositions relatives à l'inclusion de l'accès Internet à haut débit dans le champ du service universel, à l'heure où le cadre de déploiement du très haut débit soulève encore de nombreuses questions.

Nous avons été nombreux, comme l'a rappelé Mme de La Raudière, à nous inquiéter des alinéas 5, 6 et 7 de l’article 11. Il semblerait en effet que vous souhaitiez légiférer par voie d’ordonnance sur des sujets touchant aux télécommunications, mais en dépassant le cadre de la transposition proprement dite des directives. Autoriser le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance « toutes dispositions de nature législative » propres à « renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques » est une habilitation très large et peut-être imprécise. Vous semblez disposé, monsieur le ministre, à améliorer cette rédaction, car vous avez déposé un amendement de précision. Néanmoins, si nous comprenons la nécessité d'assurer la sécurité des infrastructures de communications électroniques, nous ne comprenons pas pourquoi de telles mesures pourraient être prises hors des procédures législatives habituelles. Au risque de me répéter, je rappellerai que la sécurité des réseaux est un sujet crucial, mais qu’une grande prudence s'impose.

M. Lionel Tardy. L'article 11 habilite le Gouvernement à transposer le « paquet télécoms » par voie d’ordonnance. Le recours aux ordonnances ne pose pas de problème lorsqu'il est justifié et que le travail est mené correctement, ce qui est en l’occurrence le cas.

Dans le cas dont nous débattons, le recours à des ordonnances est justifié par le caractère technique des dispositions. À quoi sert un débat dans l'hémicycle lorsque moins de cinq députés comprennent exactement de quoi il est question ? En effet, les aspects techniques des télécoms et des réseaux ne sont pas une question simple et de nombreux parlementaires ont du mal à en saisir le détail.

Le recours aux ordonnances ne me dérange pas non plus quand il est mené en collaboration avec le Parlement et que les projets d'ordonnance sont connus assez longtemps à l'avance. Sur le « paquet télécoms », entre toute la littérature publiée lors de l'examen du texte par le Parlement européen et les documents produits par l'ARCEP depuis plusieurs mois, tout est dit : il suffit de se procurer la documentation et de la lire. Je fais toute confiance au Gouvernement, et particulièrement au ministre chargé du dossier, pour associer les parlementaires spécialistes du sujet à la rédaction des ordonnances.

Sur le fond, nous nous acheminons vers une transposition a minima, qui colle au texte des directives. C'est à mes yeux une bonne option car, sur un sujet qui avance tellement vite, il ne faut pas chercher à être trop ambitieux, sous peine d'être pris à contre-pied par les évolutions en cours à Bruxelles.

Je conclurai en rappelant qu'une ordonnance doit être explicitement ratifiée, les parlementaires ayant à cette occasion un pouvoir d’amendement. Au lieu de se plaindre d'un recours aux ordonnances, mieux vaudrait travailler pour être prêt au moment de la ratification et exercer un contrôle « à la sortie », choses que nous ne faisons pas assez – voire pas du tout – en ce qui concerne les ordonnances.

M. François Brottes. Je crois utile de rappeler à mes jeunes collègues, notamment à M. Tardy, que nous sommes les représentants du peuple et que c'est à nous qu'il revient de donner au Gouvernement l'autorisation de prendre certaines mesures. Le caractère technique d'un texte ou le fait que nous soyons pressés ne saurait justifier que nous ne prenions pas le temps d'en débattre.

En outre, il est ici question de biens publics : les fréquences sont un bien rare et nous sommes, en qualité de représentants du peuple, garants de leur bon usage.

Madame la rapporteure pour avis, même s'il est vrai qu'une directive est un texte qui s'impose aux États membres de l'Union européenne, nous conservons une marge de manœuvre pour fixer l'emplacement des curseurs lors de sa transposition dans le droit positif de notre pays – faute de quoi nous ne serions qu'une chambre d'enregistrement. Je formulerai donc trois demandes.

Tout d'abord, quelles sont, point par point, les modifications par rapport à l'état précédent du droit ? Pourriez-vous présenter un tableau comparatif par sujet ?

En deuxième lieu, où était-il possible de placer les curseurs, et où le Gouvernement les a-t-il placés ?

Quelle est, enfin, la compatibilité de la directive avec la loi HADOPI ?

M. Daniel Fasquelle. On ne peut que se réjouir du souhait de la France de transposer la directive dans les délais, même si l’on peut aussi regretter que Bruxelles produise parfois, comme c’est ici le cas, des directives très techniques et très précises qui laissent très peu de marge de manœuvre aux États.

Le caractère global de la directive dont il est ici question, qui traite de diverses matières, ne permet pas une grande lisibilité. Notre Commission, qui n'est saisie que d'un article du projet de loi, aurait pu l'être de l'ensemble du texte, car il est question de la directive « Services » et de la directive « Reconnaissance des qualifications professionnelles », qui l’intéressent directement.

Ma question portera sur la sécurité. Alors que des données personnelles de plus en plus nombreuses sont stockées sur les outils électroniques que nous utilisons, il est très facile aujourd'hui de prendre le contrôle de ces appareils. Le texte aborde-t-il ce problème et quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour protéger réellement les données personnelles ?

Mme la rapporteure pour avis. Je comprends les remarques sur la transposition par voie d’ordonnance. Toutefois, étant donné la complexité des dispositions concernées et la nécessité de procéder à une transcription mot à mot pour la plupart des thèmes, le recours à cette procédure ne me semble pas injustifié. Nous sommes, en outre, tenus par un délai : la transposition doit être achevée avant le 25 mai 2011.

Mon rapport comportera deux comparatifs, l’un sur les deuxième et troisième « paquet télécoms », l’autre sur les dispositions de la directive et leur traduction dans le projet d’ordonnance. Je veillerai à préciser les marges de manœuvre à notre disposition – nous en avons dans certains domaines, mais pas dans d’autres.

J’ajoute, monsieur Brottes, que ces dispositions sont tout à fait « HADOPI-compatibles ».

Le « paquet télécoms » comprend des dispositions permettant de soumettre l’exploitation des réseaux à des mesures spécifiques de sécurité. Voilà qui répond, en partie, à la question de Daniel Fasquelle sur la sécurité.

Je précise que c’est l’utilisateur final qui donne l’autorisation à un ordinateur distant de prendre la main sur son propre ordinateur, et l’utilisation des données personnelles doit, de plus en plus, se faire de manière explicite – c’est peut-être par ce biais que l’on peut aller vers une plus grande sécurité.

M. le ministre. Je comprends très bien ce que vous pouvez éprouver à l’égard de cette transposition, mais il faut avoir conscience que l’adoption des directives est de plus en plus souvent un processus extrêmement long, exigeant d’âpres négociations entre les États, mais aussi, depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, entre ces derniers et le Parlement européen, c’est-à-dire des représentants des nations. Les délais d’adoption des directives sont donc longs, alors que ces textes, créateurs de droits nouveaux, suscitent de fortes attentes dans l’opinion publique. Nous devons en outre respecter des délais relativement courts pour transposer ces directives qui s’imposent à nous, même si nous disposons de certaines marges de manœuvre.

Le « paquet télécoms » comporte effectivement des dispositions destinées à renforcer la sécurité des équipements, tels que les téléphones. Il est notamment prévu de renforcer l’accord préalable des utilisateurs en ce qui concerne les communications non sollicitées et les informations stockées. Certains éléments répondent donc aux préoccupations exprimées par M. Fasquelle. Nous aurons l’occasion d’y revenir à propos de l’ordonnance.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

Article 11

La Commission examine d’abord l’amendement CE 2 de Mme Corinne Erhel.

Mme Corinne Erhel. N’étant pas d’accord avec la transposition par voie d’ordonnance, nous proposons de supprimer purement et simplement l’article 11.

Un rapport du service juridique du Sénat constatait déjà, en 2008, une banalisation du recours aux ordonnances : 29 lois d’habilitation ont été adoptées de 1984 à 2004, contre 38 de 2004 à 2007. L’augmentation devient donc exponentielle.

J’entends bien les arguments concernant ce projet de loi en particulier, mais il me semble que des sujets d’une telle importance mériteraient un débat de fond.

Mme la rapporteure pour avis. Je suis défavorable à cet amendement pour les raisons évoquées précédemment.

M. le ministre. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements CE 3 de Mme Corinne Erhel et CE 1 rectifié du Gouvernement.

Mme Corinne Erhel. La rédaction initiale du projet de loi nous paraît beaucoup trop imprécise et trop large. On pourrait en effet penser qu’elle laisse au Gouvernement la possibilité de contrevenir à certains principes, tels que le respect de la vie privée et le secret de la correspondance. L’amendement CE 3 tend en conséquence à supprimer les alinéas 5 à 7.

M. le ministre. Afin de répondre aux craintes exprimées par Mme Erhel et par d’autres parlementaires, l’amendement CE 1 rectifié vise à modifier la rédaction de ces alinéas en restreignant plus explicitement le champ de l’habilitation.

Il est ainsi précisé que les infractions et les peines concernées sont celles prévues par l’article 226-3 du code pénal. Il s’agit de renforcer les peines pour défaut d’autorisation et de publicité de matériels très sensibles – en matière de brouillage et d’interception, par exemple –, de créer une sanction pénale en cas de non-respect des conditions fixées par l’autorisation, et d’habiliter les agents des services de l’État à contrôler l’application de la loi. Compte tenu de l’arrivée de nouveaux équipements, de plus en plus interconnectés à Internet et parfois vulnérables, il paraît nécessaire et urgent de renforcer le dispositif en vigueur.

Une seconde modification rédactionnelle précise que l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques sera complété et adapté pour prescrire des mesures exceptionnelles de sécurité aux opérateurs. Nous devons, en effet, nous protéger contre des attaques susceptibles de rendre indisponibles des systèmes d’information vitaux pour la nation et de mettre en cause notre sécurité. Nous avons pu constater la nécessité d’une telle évolution à l’occasion du dernier exercice qui a été réalisé en juin dernier au plan national et lors des trois derniers exercices internationaux menés depuis le mois de septembre.

Cet amendement permettra de rassurer tous les parlementaires qui s’inquiètent du champ de l’habilitation. Dans ces conditions, Mme Erhel pourrait retirer le sien.

M. François Brottes. J’ignore si nous avons besoin d’être rassurés, monsieur le ministre, mais je sais en revanche que nous avons besoin d’être éclairés sur certains points.

Dans le dernier alinéa de votre amendement, je comprends assez bien la référence à « l’établissement et l’exploitation des réseaux ouverts au public », qui renvoie à une question de nature technologique, mais je m’interroge sur la notion de « fourniture au public de services de communications électroniques ». Ira-t-on jusqu’à contrôler le contenu des données ? La notion de fourniture de services de communications électroniques n’ayant pas de définition consacrée, quel sera le périmètre retenu ?

M. le ministre. La réponse à votre première question est très clairement non. Il s’agit des activités des opérateurs telles qu’elles sont définies à l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques.

Mme Corinne Erhel. Je maintiens mon amendement.

Mme la rapporteure pour avis. Je suis défavorable à l’amendement CE 3.

Nous avions demandé au Gouvernement de préciser le champ de l’habilitation, car la rédaction initiale du projet de loi était effectivement trop large. Ce que nous propose le Gouvernement dans son amendement, auquel je suis favorable, est très précis : il s’agit de permettre à l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) de réaliser ses missions. Lors de l’audition à laquelle nous avons procédé avec Mme Erhel, l’ANSSI a d’ailleurs précisé quels étaient les cas de figure envisagés.

La Commission rejette l’amendement CE 3.

Puis elle adopte l’amendement CE 1 rectifié.

La Commission émet ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 11 modifié.

Après l’article 11

La Commission est saisie de l’amendement CE 4 rectifié de M. Lionel Tardy, qui fait l’objet d’un sous-amendement de la rapporteure pour avis.

M. Lionel Tardy. Sans action de notre part, les noms de domaine en « .fr » ne seront plus protégés à compter du 1er juillet 2011. Le 6 octobre dernier, le Conseil constitutionnel a, en effet, censuré l’article L. 45 du code des postes et des communications électroniques, et donné au législateur jusqu’au 1er juillet pour adopter une nouvelle rédaction.

Cette décision s’explique par des raisons essentiellement formelles : le législateur a renvoyé au pouvoir réglementaire des dispositions qui auraient dû figurer dans la loi. Puisque le texte dont nous sommes aujourd’hui saisis comporte un chapitre consacré aux communications électroniques, il peut sans difficulté abriter une disposition relative aux noms de domaines sur Internet. Tel est l’objet de mon amendement, qui vise à corriger l’article L. 45 a minima, en y insérant des dispositions relatives à la protection de la liberté d’expression et de la dignité des personnes, dont l’absence avait conduit à la censure du Conseil constitutionnel.

Cet amendement a été rédigé à l’issue d’une large concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. J’ai souhaité le déposer dès le début du processus législatif afin que nous ayons le temps d’en débattre sereinement et de l’améliorer si besoin est.

Mme la rapporteure pour avis. La question est importante. Cela étant, l’amendement de M. Tardy comporte des dispositions allant au-delà de ce qui était prévu à l’origine. Mon sous-amendement tend à nous en tenir à l’aspect technique du problème : avant la fin du mois de juin, nous devons faire « remonter » au niveau législatif des dispositions initialement renvoyées au pouvoir réglementaire.

M. le ministre. Avis favorable à l’amendement CE 4 rectifié, sous réserve de l’adoption du sous-amendement de la rapporteure pour avis.

M. François Brottes. Le Conseil constitutionnel nous a rappelé notre devoir de légiférer dans le respect de la Constitution – ce qui démontre, au demeurant, que nous gagnerions à solliciter systématiquement le Conseil.

En ce qui nous concerne, nous nous abstiendrons sur cet amendement, long de trois pages, car nous le découvrons à l’instant. Or nous aurions besoin de temps pour l’étudier. Il y a certes une carence à traiter, mais nous devons analyser en détail l’impact de ce qui nous est proposé. Il semble que le ministre ait eu connaissance de l’amendement au préalable, mais ce n’est pas notre cas – nous n’avons pas participé à cette « coproduction législative » qui se limite visiblement à la majorité.

M. Lionel Tardy. J’accepte le sous-amendement.

La Commission adopte le sous-amendement de la rapporteure pour avis.

Elle adopte ensuite l’amendement CE 4 rectifié sous-amendé.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CE 1 rect. présenté par le Gouvernement :

Article 11

Rédiger ainsi les alinéas 5 à 7 :

« 4° Toutes dispositions de nature législative, autres que celles mentionnées au 1° et au 2°, de nature à :

- renforcer la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques en adaptant et complétant les infractions et les peines prévues par l'article 226-3 du code pénal, et les dispositions selon lesquelles sont recherchées et constatées ces infractions ;

- soumettre l'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public et la fourniture au public de services de communications électroniques au respect des règles portant sur les prescriptions nécessaires pour répondre aux menaces et prévenir et réparer les atteintes graves à la sécurité des systèmes d’information des autorités publiques ainsi que des opérateurs mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense, en adaptant et complétant les dispositions de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques et en modifiant toute autre disposition à des fins de mise en cohérence. » 

Amendement CE 2 présenté par Mmes et MM. Corinne Erhel, François Brottes, Jean Gaubert, Frédérique Massat, Geneviève Fioraso, Annick Le Loch, Jean Grellier, Catherine Coutelle, Jean-Michel Villaumé, Henri Jibrayel, William Dumas, Jean-Louis Gagnaire, Daniel Goldberg, Pascale Got, Jean-Yves Le Bouillonnec, Louis-Joseph Manscour, Jean-Yves Le Déaut, Serge Letchimy, Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, Jean-René Marsac, Kléber Mesquida, Germinal Peiro, François Pupponi, Chantal Robin-Rodrigo, Michel Lefait et les membres du groupe SRC :

Article 11

Supprimer cet article.

Amendement CE 3 présenté par Mmes et MM. Corinne Erhel, François Brottes, Jean Gaubert, Frédérique Massat, Geneviève Fioraso, Annick Le Loch, Jean Grellier, Catherine Coutelle, Jean-Michel Villaumé, Henri Jibrayel, William Dumas, Jean-Louis Gagnaire, Daniel Goldberg, Pascale Got, Jean-Yves Le Bouillonnec, Louis-Joseph Manscour, Jean-Yves Le Déaut, Serge Letchimy, Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, Jean-René Marsac, Kléber Mesquida, Germinal Peiro, François Pupponi, Chantal Robin-Rodrigo, Michel Lefait et les membres du groupe SRC :

Article 11

Supprimer les alinéas 5 à 7.

Amendement CE 4 rect. présenté par M. Lionel Tardy :

Après l’article 11

Insérer l’article suivant :

L'article L. 45 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :

« Art. L. 45. – I. – L'attribution et la gestion des noms de domaine rattachés à chaque domaine de premier niveau du système d’adressage par domaines de l’Internet correspondant au territoire national sont centralisées par un office d’enregistrement unique.

« Le ministre chargé des communications électroniques désigne, après consultation publique, les offices d’enregistrement.

« Chaque office d’enregistrement adresse au ministre chargé des communications électroniques un rapport d'activité annuel.

« Le ministre chargé des communications électroniques veille au respect par les offices d’enregistrement des principes énoncés au II. Il peut procéder au retrait de la désignation d'un office, après avoir mis ce dernier à même de présenter ses observations, en cas de méconnaissance par celui-ci des dispositions du présent article ou d’incapacité financière ou technique à mener à bien ses missions.

« En cas de retrait d’une désignation, de cessation d’activité d’un office ou de changement de l'office désigné, l'État dispose du droit d'usage de la base de données des noms de domaine que l’office d’enregistrement gérait.

« La décision du ministre chargé des communications électroniques tendant à la désignation, ou au retrait de la désignation, d'un office d’enregistrement peut faire l'objet d'un recours devant le Conseil d'État.

« II. – A. – Au sein des domaines de premier niveau du système d’adressage par domaines de l’Internet, correspondant au territoire national, l’enregistrement des noms de domaine ne peut être limité que dans la mesure requise par le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, par la sauvegarde de l’ordre public et par la protection des noms réservés aux pouvoirs publics et par les contraintes techniques inhérentes au système de nommage Internet.

« B. – Le nom de la République française, de ses institutions nationales et des services publics nationaux, seul ou associé à des mots faisant référence à ces institutions ou services, ne peut être enregistré comme nom de domaine au sein des domaines de premier niveau du système d’adressage par domaines de l’Internet correspondant au territoire national que par ces institutions ou services, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi.

« Sauf autorisation de l'assemblée délibérante, le nom d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, seul ou associé à des mots ou abréviations faisant référence aux institutions locales, peut uniquement être enregistré par cette collectivité ou cet établissement public comme nom de domaine au sein des domaines de premier niveau du système d’adressage par domaines de l’Internet correspondant au territoire national, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi.

« Le nom d'un titulaire d'un mandat électoral, associé à des mots faisant référence à ses fonctions électives, peut uniquement être enregistré par cet élu comme nom de domaine au sein des domaines de premier niveau du système d'adressage par domaines de l'Internet correspondant au territoire national sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi.

« Les dispositions du présent B ne font pas obstacle au renouvellement des noms de domaine enregistrés avant le 9 février 2007 :

« - par une société ayant une dénomination sociale identique au nom enregistré et ayant déposé ce nom en tant que marque avant le 1er janvier 2004 ;

« - par une association de défense et de promotion de l'appellation d'origine dont le nom est enregistré.

« C. – Le choix d'un nom de domaine au sein des domaines de premier niveau correspondant au territoire national ne peut porter atteinte au nom, à l'image ou à la renommée de la République française, de ses institutions nationales, des services publics nationaux, d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales, ou avoir pour objet ou pour effet d'induire une confusion dans l'esprit du public.

« D. – Sous réserve du principe de spécialité, un nom identique ou susceptible d'être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle par les règles nationales ou communautaires ou par le présent code ne peut être choisi pour nom de domaine, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi.

« E. – Un nom identique à un nom patronymique ne peut être choisi pour nom de domaine, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi.

« III. – L’attribution des noms de domaine aux personnes physiques et morales respectant les conditions d’éligibilité définies dans la désignation prévue au I est assurée par les offices d’enregistrement, par l’intermédiaire de bureaux d’enregistrements, selon des règles non discriminatoires, rendues publiques et conformes aux principes de la liberté d’expression et de la liberté d’entreprendre et aux principes mentionnés au II. Les offices d’enregistrement rendent publics les prix de leurs prestations d’attribution et de gestion des noms de domaine.

« Les offices d’enregistrement publient quotidiennement les enregistrements de noms de domaine auxquels ils procèdent. Ils collectent les données nécessaires à l’identification des personnes physiques ou morales titulaires de noms. La fourniture de données inexactes par le titulaire peut emporter suppression de l’enregistrement du nom de domaine correspondant.

« La suppression de l’enregistrement ou le non-renouvellement d’un nom de domaine ne peut intervenir qu’après que l’office d’enregistrement a mis le titulaire en mesure de présenter ses observations et, le cas échéant, de régulariser la situation.

« L'exercice de leur mission ne confère pas aux offices d’enregistrements des droits de propriété intellectuelle sur les noms de domaine.

« IV. – Pendant un délai de deux mois suivant l’enregistrement d’un nom de domaine, toute personne démontrant un intérêt à agir peut demander la suppression de cet enregistrement auprès de l’office d’enregistrement compétent.

« Dans un délai de deux mois suivant la réception d’une demande de suppression, l’office statue sur cette demande, dans le respect des principes définis au II, selon une procédure contradictoire fixée par décret en Conseil d’État.

« Les décisions prises par l’office sur les demandes de suppression sont susceptibles de recours devant les Cours d’appel désignées par le pouvoir réglementaire.

« V. – Un décret en Conseil d'État précise en tant que de besoin les conditions d'application du présent article.

« VI. – Sans préjudice de leur application de plein droit à Mayotte en vertu du 8° du I de l'article 3 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, les dispositions du présent article sont applicables à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

« Les organismes chargés d'attribuer les noms de domaine en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française ne détiennent pas de droits de propriété intellectuelle sur ces noms. »

Sous-amendement CE 5 présenté par Mme Laure de La Raudière, rapporteure au nom de la commission des affaires économiques saisie pour avis, à l’amendement CE 4 rect. présenté par M. Lionel Tardy :

Après l’article 11

1° Aux alinéas 9, 10 et 11, supprimer les mots : « sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi ».

2° À l’alinéa 24, remplacer les mots : « le pouvoir » par le mot : « voie ».

ANNEXES

– Annexe 1 : directive 2009/140/CE

– Annexe 2 : directive 2009/136/CE

– Annexe 3 : règlement 1211/2009/CE

– Annexe 4 : avant-projet d’ordonnance mis en consultation publique

– Annexe 5 : tableau de concordance transmis par le Gouvernement – directive « cadre »

– Annexe 6 : tableau de concordance transmis par le Gouvernement – directive « autorisation »

– Annexe 7 : tableau de concordance transmis par le Gouvernement – directive « accès »

– Annexe 8 : tableau de concordance transmis par le Gouvernement – directive « vie privée »

– Annexe 9 : tableau de concordance transmis par le Gouvernement – directive « service universel »

– Annexe 10 : corrections d’erreurs et clarifications dans le code des postes et des communications électroniques

Ces annexes sont uniquement disponibles
sur la version PDF du rapport

© Assemblée nationale

1 () http://www.assemblee-nationale.fr/12/dossiers/service_public_telecom.asp.

2 () http://www.assemblee-nationale.fr/12/dossiers/communications_electroniques.asp.

3 () Cf. la fiche de procédure du Parlement européen :

http://www.europarl.europa.eu/oeil/FindByProcnum.do?lang=fr&procnum=COD/2008/0214