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Commission d’enquête relative aux causes du projet de fermeture de l’usine Goodyear d’Amiens-Nord et à ses conséquences économiques, sociales et environnementales et aux enseignements liés au caractère représentatif qu’on peut tirer de ce cas

mardi 29 octobre 2013

Séance de 17 h 30

Compte rendu n° 17

Présidence de M. Alain Gest Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Catherine Pernette, directrice régionale adjointe, responsable de l’unité territoriale de la Somme, Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) 2

L’audition commence à dix-sept heures trente.

M. Alain Gest, président de la Commission d’enquête. Après l’audition des élus locaux, il y a quelques semaines, nous procédons aujourd’hui à l’audition d’une représentante de l’administration déconcentrée de l’État en Picardie.

Je souhaite la bienvenue à Mme Catherine Pernette, directrice régionale adjointe, responsable de l’unité territoriale de la Somme à la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE).

Nous avons souhaité vous entendre, madame la directrice, car nous connaissons le rôle essentiel que jouent les DIRRECTE pour fixer le cadre dans lequel s’inscrit l’activité des entreprises et vérifier le bon déroulement des relations sociales entre salariés et chefs d’entreprise.

Après avoir été inspectrice du travail dans plusieurs régions, vous exercez vos fonctions actuelles en Picardie depuis décembre 2011. Votre témoignage nous sera particulièrement utile car vous avez vécu la période pendant laquelle le groupe Titan a fait sa première offre de reprise sur les activités agricoles de l’usine Goodyear d’Amiens-Nord, avec la présentation d’un plan de départ volontaire (PDV) pour les salariés travaillant sur les pneus de tourisme. Vous avez également vécu, au début de cette année, la recherche d’un repreneur par l’Agence française des investissements internationaux (AFII), en liaison avec le ministère du Redressement productif.

Nous serons heureux de vous entendre sur la façon dont les événements se sont déroulés, votre action dans ce conflit social et la nouvelle proposition du groupe Titan intervenue la semaine dernière.

Conformément aux dispositions de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, je vais vous demander de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

Veuillez lever la main droite et dire : « Je le jure ».

(Mme Catherine Pernette prête serment.)

Mme Catherine Pernette, directrice régionale adjointe, responsable de l’unité territoriale de la Somme à la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE). Mon propos introductif se déroulera en deux temps. Je commencerai par vous rappeler le cadre juridique d’intervention des services de la DIRECCTE, puis je vous présenterai les principales interventions de nos services depuis deux ans, puisque j’ai pris mes fonctions en tant que responsable de l’unité territoriale de la Somme le 15 décembre 2011.

La DIRRECTE dispose d’un large éventail de missions puisque celles-ci consistent à accompagner le développement des entreprises, agir contre le chômage et les exclusions – le taux de chômage est particulièrement élevé dans la Somme –, garantir les droits des salariés et soutenir le dialogue social, et enfin assurer la loyauté des marchés et la sécurité des consommateurs.

La DIRRECTE de Picardie est organisée autour de trois pôles : le pôle 3E – entreprise, emploi, économie – le pôle C – concurrence, consommation, répression des fraudes et métrologie – et le pôle T – politique du travail.

Le pôle 3E a trait au développement des entreprises, de l’emploi et des compétences. Il s’agit pour notre administration de soutenir la création et le développement des entreprises de tous secteurs et de toutes tailles, par le biais de l’innovation, de la structuration de filière – ce que nous faisons actuellement pour l’automobile – de promouvoir le développement de l’international dans les TPE, les PME et les pépites – entreprises remarquables du département. Notre mission consiste également à contribuer au développement des territoires, par le biais de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) au niveau régional, à parfaire notre connaissance du tissu économique en vue d’anticiper les mutations économiques, dans une approche filière et territoire – ce que nous faisons dans les bassins d’Abbeville, de l’Amiénois et de Péronne. Notre mission nous amène par ailleurs à enregistrer et contrôler les organismes de formation professionnelle et à gérer les fonds européens.

Dans le cadre du pôle T, nous mettons en œuvre la politique du travail en faisant en sorte d’améliorer les conditions de travail et les relations sociales dans les entreprises autour de trois axes stratégiques majeurs : santé et sécurité au travail, qualité et effectivité du droit, dialogue social et démocratie sociale.

Concrètement, les services de l’inspection du travail et l’unité territoriale assurent la protection des salariés en vérifiant la conformité de leurs conditions de travail aux dispositions du code du travail, et vérifient l’accès au droit des salariés et des chefs d’entreprise en leur délivrant conseils et renseignements. Nos services ont également pour mission d’animer le dialogue social et d’encourager la négociation collective, ce que nous faisons sur des sujets d’actualité comme l’égalité professionnelle ou les contrats de génération, et jouent un rôle de médiateur dans les conflits. Enfin, nos services sont en charge du renforcement de la lutte contre le travail illégal, tant en termes de prévention que de contrôle.

En Picardie, la DIRECCTE est organisée à partir de trois unités territoriales, l’Aisne, l’Oise et la Somme. Le département constitue notre échelon opérationnel, ce qui nous place au plus près des difficultés du territoire, et plus précisément du bassin d’emploi et de ses entreprises, chefs d’entreprise, salariés, représentants du personnel et organismes consulaires.

L’unité territoriale de la Somme compte 62 agents, répartis sur trois grands secteurs d’activité.

Le premier concerne l’emploi et l’insertion et a trait à la mise en œuvre des dispositifs suivants : contrats aidés, insertion par l’activité économique (IAE), services à la personne (SAP), alternance, emploi des travailleurs handicapés, animation territoriale, animation des acteurs locaux de l’emploi, Maisons de l’emploi (MDE), missions locales.

Le deuxième secteur est celui de l’inspection du travail, qui regroupe les agents de contrôle, un service de renseignement au public et d’accueil sur les questions de droit du travail, et une section centrale travail qui joue un rôle d’appui en matière d’homologation des ruptures conventionnelles et d’enregistrement des accords d’entreprise.

Le troisième secteur d’activité de l’unité territoriale concerne les mutations économiques. Nos services assurent le suivi des schémas d’intervention pour aider les entreprises en difficulté – par le biais d’actions de formation, de propositions d’activité partielle – ainsi que le suivi des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE). Ce secteur regroupe également la revitalisation des territoires.

En 2012, l’unité territoriale de la Somme était en charge de 11 553 établissements, pour un effectif théorique de 133 510 salariés, 8 inspecteurs et 14 contrôleurs du travail et un certain nombre d’assistantes de section. En 2012, ces agents ont réalisé 2 864 interventions en entreprise et ont dressé 88 procès-verbaux qui ont été transmis au parquet ; le service renseignement a reçu 3 741 usagers et rédigé 540 réponses. Nous avons homologué 1 952 ruptures conventionnelles et enregistré plus de 500 accords d’entreprise.

Dans le domaine de l’Inspection du travail, la DIRECCTE assure le contrôle de l’application du droit du travail dans son intégralité – code du travail et conventions collectives – dans tous les domaines qu’il recouvre : santé et sécurité, fonctionnement des instances représentatives du personnel, durée du travail, contrat de travail.

L’unité territoriale de la Somme est divisée en sept sections d’inspection du travail. Les inspecteurs et contrôleurs du travail ont un statut particulier qui garantit leur indépendance vis-à-vis de l’autorité publique et des partenaires sociaux, leur laisse une totale liberté sur les suites à donner au contrôle, qui vont de la lettre d’observation au procès-verbal en passant par le conseil, la mise en demeure ou l’arrêt des travaux. Ce statut leur assure une protection dans l’exercice de leurs fonctions dans le cas où ils rencontreraient un obstacle à l’accomplissement de leurs fonctions.

Comme tous les fonctionnaires, ils ont également des obligations : confidentialité, discrétion, secret professionnel, impartialité, devoir de réserve, moralité, intégrité et probité. Ils doivent motiver leurs décisions et rendre compte de leur activité.

Un inspecteur du travail dispose de plusieurs outils pour mener à bien ses missions. Il réalise des contrôles en entreprise, vérifie les conditions de travail des salariés et demande à l’entreprise de remédier aux situations de non-conformité ; il peut aussi prendre des décisions, qu’il doit impérativement motiver, sur des questions comme la durée du travail, les équipements, les instances représentatives du personnel. Il a par ailleurs une mission de conciliation et de conseil ainsi qu’un droit d’entrée, de visite et d’enquête, qui lui permet d’auditionner les salariés, et un droit de communication.

L’inspecteur et le contrôleur du travail peuvent donner différentes suites à leur visite : adresser à l’entreprise une lettre d’observation – dans laquelle ils constatent la non-conformité des installations aux dispositions du code du travail – la mettre en demeure de réaliser cette mise en conformité, en demander la vérification, établir un procès-verbal ou ordonner l’arrêt temporaire des travaux – essentiellement dans le secteur du BTP – ou déposer un référé.

En qualité de responsable d’unité territoriale, je représente l’échelon hiérarchique de l’inspection du travail. À ce titre, je garantis l’exercice de ses missions dans un cadre administratif, mais je ne peux ordonner à un inspecteur d’effectuer une visite dans une entreprise puisqu’il est indépendant, conformément à la convention n° 81 de l’Organisation internationale du travail (OIT).

Dans le dossier Goodyear, les inspecteurs du travail ont naturellement effectué de nombreuses visites dans l’entreprise, ce qui est normal s’agissant d’un établissement industriel de grande taille dont l’activité comporte certains risques. En 2012, nous avons effectué 21 visites de contrôles sur des sujets variés comme la formation à la sécurité, le travail en hauteur, les consultations du CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail), le fonctionnement des délégués du personnel, les salaires, les évolutions professionnelles des élus, les principes généraux de prévention, la température des locaux, le budget du comité d’entreprise, les fiches d’exposition aux agents chimiques, l’étiquetage des produits, les vestiaires, le décompte du temps de travail, la fourniture d’équipements de protection individuelle… Au cours de ces visites, les inspecteurs du travail ont rappelé à l’entreprise ses obligations en matière de respect du code du travail.

En dehors de ces visites, les inspecteurs du travail ont la possibilité d’assister aux réunions du CHSCT, la seule instance représentative du personnel au sein de laquelle ils sont représentés. Les inspecteurs du travail successifs qui ont contrôlé l’établissement Goodyear ont donc participé à ces réunions et reçu à de nombreuses reprises les salariés et les employeurs dans le cadre de leur permanence, qui se tient sur le site une demi-journée par semaine. Ils ont adressé à la direction un certain nombre de demandes concernant la vérification d’équipements, plusieurs mises en demeure, et ils ont dressé trois procès-verbaux, en 2012, portant sur les équipements de travail et l’application de la convention collective – mais je ne peux vous en parler puisque ces documents ont été transmis au parquet et font l’objet d’une procédure judiciaire.

Notre administration intervient en outre dans les procédures collectives de suppression d’emplois, et cela en trois temps. Dans un premier temps, nous cherchons à éviter l’engagement d’une procédure de licenciement collectif pour motif économique ; dans un deuxième temps, nous suivons la procédure déclenchée par l’employeur, et dans un troisième temps nous accompagnons les salariés dans le cadre de la revitalisation du territoire. Nos interventions ont essentiellement lieu dans des TPE et des PME, par le biais des aides (essentiellement deux aides FNE formation et activité partielle) et dans les entreprises qui envisagent leur reconversion totale. Nous sommes également amenés à rechercher des solutions alternatives, par exemple la reprise partielle ou totale de l’activité.

En ce qui concerne l’aide au dialogue social, nos services sont intervenus dès le mois de juin 2012 dans le cadre de la négociation du plan de départ volontaire (PDV) qui a donné lieu à pas moins de 14 réunions de négociation entre Goodyear et les partenaires sociaux, essentiellement la CGT. L’État est intervenu dans le cadre de réunions en préfecture, en présence des préfets de la Somme, MM. Delpuech et Cordet, pour essayer de régler les points de blocage et préciser le cadre légal des discussions entre les partenaires sociaux.

Une première réunion s’est tenue le 21 juin en présence de la direction, de la CGT et de l’État en vue de faciliter l’intervention de la CARSAT (Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail) pour établir le bilan des droits à la retraite des 185 seniors de l’entreprise et évaluer le portage par l’entreprise d’un dispositif permettant à ces salariés d’attendre le jour où ils percevront une retraite à taux plein.

Au cours de cette réunion, nous avons également évoqué la disparition de la dispense de recherche d’emploi accordée aux salariés âgés de plus de 57 ans, et avons contacté Pôle emploi à ce sujet.

Enfin, nous avons fait le point sur l’avancement de la négociation et le projet de PDV.

La deuxième réunion de négociation a eu lieu le 9 juillet. La cartographie de la CARSAT nous ayant été remise, nous avons été en mesure d’indiquer que 171 salariés de plus de 57 ans seraient soutenus par l’entreprise par le biais du congé de reclassement jusqu’à ce qu’ils bénéficient d’une retraite à taux plein.

La question de la dispense de recherche d’emploi a été à nouveau posée, mais nous avons acté du fait qu’elle n’existait plus et que Pôle emploi serait vigilant et suivrait la situation de chaque salarié de Goodyear. La CGT nous a fait part à cette occasion de son inquiétude face à l’attitude du groupe Titan, avec lequel les contacts étaient rompus.

Au cours de la dernière réunion, qui s’est tenue le 12 septembre, nous avons considéré que la question des départs des plus âgés était réglée dans le PDV et que la disparition de la dispense de recherche d’emploi obligeait tous les salariés à s’insérer dans le dispositif légal existant.

Il me semble que nous étions sur le point de signer un accord final, mais deux nouveaux points de blocage sont apparus : le premier portait sur la demande faite par l’entreprise à la CGT de renoncer aux actions juridiques individuelles et collectives ; le second portait sur le remplacement progressif des équipements tourisme par les équipements agraires. Le troisième point de blocage, commun à toutes les négociations, vient de l’engagement du groupe Titan de maintenir l’emploi pendant deux ans, durée que la CGT souhaitait fixer à cinq ans.

M. le président Alain Gest. Les représentants de la CGT, que nous avons auditionnés, nous ont parlé de sept ans.

Mme Catherine Pernette. Le 12 septembre 2012, ils demandaient un maintien pendant cinq ans.

Au cours de cette négociation, sur les deux premiers points de blocage que sont la renonciation aux actions juridiques et le transfert progressif des équipements de travail, la direction indiquait qu’une solution serait trouvée. Nous en avons conclu qu’un accord était possible, moyennant quelques négociations concernant sa terminologie. Puis la CGT a demandé à la direction si elle s’engageait à assurer des garanties aux salariés pendant cinq ans, ce à quoi la direction a répondu qu’elle ne pouvait prendre un tel engagement. Je pense pour ma part que sans cette question, les autres points du PDV auraient pu faire l’objet d’un accord.

M. le président Alain Gest. Au cours de cette réunion, le montant des aides prévues a-t-il été acté ?

Mme Catherine Pernette. Oui.

M. le président Alain Gest. Leur montant était donc connu. C’est très intéressant, car lorsque nous avons visité l’usine, il nous a été dit que le montant des aides n’avait jamais été porté à la connaissance des salariés.

Mme Catherine Pernette. Je ne pense pas que ces aides aient été portées de façon claire à la connaissance des salariés, mais elles faisaient partie du projet de PDV négocié entre la CGT et la direction. Je ne sais pas quelles informations ont pu être transmises par l’une ou l’autre des parties aux salariés, mais je peux dire que la négociation concernant les seniors, à savoir les salariés nés au plus tard le 31 décembre 1956, portait sur les montants suivants : les salariés ayant 25 ans d’ancienneté devaient percevoir 125 000 euros bruts, et ceux ayant 35 ans d’ancienneté 178 000 euros bruts. À ces sommes s’ajoutait le portage salarial d’un dispositif permettant aux salariés, dans le cadre du congé de reclassement, de percevoir pendant 24 mois maximum une somme correspondant à 67 % de leur salaire en attendant l’âge de la retraite.

Les salariés porteurs d’un projet de création d’entreprise percevaient 85 000 bruts après 12 ans d’ancienneté, 110 000 euros après 20 ans d’ancienneté, et 138 000 euros après 25 ans d’ancienneté, auxquels s’ajoutait la somme de 20 000 euros au titre de la création d’entreprise et un congé de reclassement de neuf mois pour permettre au salarié de développer son projet.

Selon moi et compte tenu de ce qui nous a été dit, à ce stade de la négociation, les discussions ne portaient plus sur ces chiffres mais sur l’engagement de Titan.

En 2013, la situation a basculé lorsque l’entreprise a engagé une procédure collective. J’attire votre attention sur un point : les PSE qui nous intéressent sont soumis à l’ancienne procédure et non à la nouvelle procédure, issue de l’accord national interprofessionnel et applicable au 1er juillet 2013.

En matière de PSE, la DIRECCTE est destinataire de l’ensemble des éléments de la procédure et elle en vérifie le déroulement. Les convocations aux réunions du comité central d’entreprise, du comité d’entreprise et du CHSCT nous sont transmises. Nous vérifions le contenu de l’ordre du jour, les délais de convocation et ceux fixés entre les réunions, ainsi que les documents joints à l’ordre du jour. Le 12 février 2013, la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) du ministère du Travail a délégué à l’unité territoriale de la Somme, par l’intermédiaire d’une lettre de mission, le suivi de l’instruction du PSE.

J’attire votre attention sur le fait que la DIRECCTE n’a pas le pouvoir de vérifier la réalité du motif économique d’un licenciement, ce pouvoir relevant du juge judiciaire. Nous n’avons donc pas à porter d’appréciation sur les motifs économiques présentés par l’entreprise.

J’en viens au contenu du PSE. Dans son livre 1, Plan de reclassement, il présente l’accompagnement des salariés mis en œuvre par l’entreprise : reclassements internes et externes, aides à la création d’entreprise, formations longues. Son livre 2 contient les données économiques présentées aux représentants du personnel et susceptibles de justifier l’engagement de la procédure.

Pendant tout le déroulement de la procédure, nous donnons priorité à la négociation entre les partenaires sociaux. Celle-ci peut intervenir à deux niveaux. Le premier est celui des instances représentatives du personnel : lors de chaque réunion de CCE ou de CE, les membres élus ont la possibilité de faire des propositions et d’amender le projet présenté par l’entreprise. La seconde voie possible est la négociation d’un accord avec les organisations syndicales. Au niveau national, deux réunions de négociations avec les organisations syndicales ont eu lieu en mars, auxquelles la CGT a refusé de participer.

Notre administration a la possibilité de faire des propositions sur le contenu même du PSE, mais nous attendons pour cela le résultat des échanges qui auront lieu entre les membres élus, du CCE et du CE, et la direction.

J’en viens aux missions de notre administration en matière de revitalisation. En fonction de l’impact du licenciement collectif pour motif économique sur un bassin d’emploi, un département ou une région, nous notifions à l’entreprise une obligation de revitalisation sur la base d’une convention signée avec l’État. Dans le cadre de la procédure précédant celle du 1er juillet 2013, nous avons notifié cette obligation à l’entreprise, mais nous n’avons pas négocié le contenu de la convention puisqu’il reste à définir le périmètre et le montant financier des actions à mettre en œuvre.

Nous avons en outre la possibilité d’anticiper une éventuelle fermeture de l’établissement. Pour cela, nous avons demandé à l’entreprise de réaliser une enquête d’impact social et territorial visant le département de la Somme et la région Picardie afin de vérifier la pertinence des mesures contenues dans le PSE en fonction de la réalité de la situation économique du bassin d’emploi.

Mme Pascale Boistard, rapporteure. Madame la directrice régionale, le contrôle des conditions de travail des salariés du site Goodyear d’Amiens-Nord est l’une des compétences de la DIRECCTE. Quels ont été les résultats des contrôles effectués dans l’entreprise concernant la vétusté des équipements, les machines dangereuses à manœuvrer, la température élevée des locaux, le bruit, les vestiaires ?

Mme Catherine Pernette. Les contrôles permettent à l’inspection du travail de demander à l’entreprise de se mettre en conformité avec le code du travail. Des demandes de mise en conformité ont été adressées à l’entreprise. Plusieurs hypothèses existent : soit les améliorations peuvent être apportées rapidement et l’entreprise satisfait les demandes, soit la mise en conformité nécessite un calendrier – c’est le cas notamment des plans de mise en conformité du système électrique, qui nécessitent un énorme travail de recensement. L’entreprise, en liaison avec l’inspection du travail, a défini des priorités à partir du document unique d’évaluation des risques. Certains points qui nécessitaient une réaction immédiate de l’entreprise ont fait l’objet d’une mise en demeure. Mais les interventions ont été tellement nombreuses que je ne peux vous les citer toutes.

Mme la rapporteure. Nous vous en transmettrez la liste par écrit. Quoi qu’il en soit, votre réponse laisse entendre que vous avez rencontré quelques soucis...

Mme Catherine Pernette. Il s’agit d’un établissement industriel, dans lequel les conditions de travail des salariés nécessitent la surveillance de nos services.

Mme la rapporteure. Nous avons visité les deux établissements, Goodyear Amiens-Nord et Dunlop Amiens-Sud. Cet établissement a-t-il fait l’objet d’autant de remarques ?

Mme Catherine Pernette. Je n’ai pas apporté avec moi les chiffres concernant le site d’Amiens-Sud. Toute entreprise fait l’objet de visites régulières de l’inspection du travail. Je ne peux vous dire combien de visites ont été réalisées sur le site d’Amiens-Sud et sur quelles thématiques. Il est clair que les investissements n’ont pas été les mêmes. Nous sommes plus intervenus, au titre de l’inspection du travail, sur des questions liées à la maintenance et au maintien en conformité d’équipements plutôt âgés, dans le souci de prévenir d’éventuels accidents et autres difficultés liées au fonctionnement de ces équipements.

M. le président Alain Gest. Des manquements graves ont-ils été constatés ? L’entreprise s’est-elle exécutée lorsque vous lui avez fait des remarques ?

Mme Catherine Pernette. Certains éléments ont progressé, mais lorsque manifestement les demandes réitérées de l’inspection du travail n’aboutissent pas, l’inspection du travail établit un procès-verbal qui est transmis au parquet. Celui-ci demande au commissariat de police d’entendre l’entreprise et, sur la base de ces auditions, décide ou non de poursuivre l’entreprise. D’ailleurs, celle-ci a fait l’objet de plusieurs condamnations.

M. le président Alain Gest. Pouvez-vous être plus précise et nous dire combien de poursuites et de condamnations ont été prononcées à l’égard de Goodyear ?

Mme Catherine Pernette. En 2009, après un accident du travail qui a causé la mort par électrocution d’un salarié d’une entreprise extérieure, celle-ci et Goodyear ont fait l’objet d’un procès-verbal qui a donné lieu en 2012 à la condamnation de l’entreprise. Elle a été également condamnée sur la base d’un procès-verbal dressé par l’inspection du travail concernant les fiches de données de sécurité concernant les risques chimiques.

M. le président Alain Gest. Les situations de non-conformité y sont-elles plus nombreuses que dans les autres entreprises industrielles ?

Mme Catherine Pernette. Nous ne sommes pas en mesure de faire de telles comparaisons. Nous ne pouvons même pas comparer l’entreprise avec celle qui se trouve de l’autre côté de la rue, bien qu’elles fassent toutes deux partie de la même filière.

M. le président Alain Gest. Dunlop a réalisé des investissements propres à transformer la nature du travail, mais bien des entreprises, dans la Somme ou ailleurs, se trouvent dans une situation de vétusté, en particulier dans le secteur textile. L’entreprise Goodyear s’est-elle exécutée lorsque vous lui avez demandé d’y remédier, ou a-t-elle fait des difficultés ?

Mme Catherine Pernette. Il m’est très difficile d’établir des comparaisons. Chaque entreprise est unique et les entreprises industrielles ont des process et des équipements totalement différents. L’absence d’investissements et la vétusté des locaux peuvent naturellement provoquer des accidents plus graves. Cela dit, chaque inspecteur du travail choisit les entreprises dans lesquelles il entend effectuer des contrôles et leur fréquence, et cela de sa propre initiative, sur la sollicitation des représentants du personnel ou des salariés. J’aurais du mal à vous communiquer des statistiques précises mettant en évidence que l’entreprise Goodyear a été plus contrôlée que les autres, même si elle l’a été très régulièrement, simplement parce que l’activité industrielle, en particulier dans le secteur de la chimie, entraîne certains risques qui nécessitent une vigilance particulière. C’est également le cas des entreprises du secteur automobile. J’ai longtemps travaillé dans le département des Yvelines : les usines de Poissy et de Flins faisaient, elles aussi, l’objet d’une surveillance particulière de la part de l’inspection du travail.

Mme la rapporteure. Êtes-vous informée de l’étude en cours menée par le CHU d’Amiens en lien avec la direction de l’usine Goodyear d’Amiens-Nord, relative aux conséquences des conditions de travail pour les salariés ?

Mme Catherine Pernette. Cette étude est mentionnée dans un compte rendu, du CCE ou du CE, mais je n’en ai pas connaissance.

Mme la rapporteure. Selon vous, les employés de l’établissement d’Amiens-Nord courent-ils de graves risques psychosociaux ?

Mme Catherine Pernette. Depuis 2007, les salariés vivent une situation difficile car ils sentent que leur emploi est menacé. Chaque année, une nouvelle procédure est enclenchée et de nombreux rebondissements surviennent, qu’ils soient liés à la saisine de l’instance judiciaire par les représentants du personnel ou aux négociations qui n’aboutissent pas, comme le PDV de 2012. Pour être très honnête, je me dois de dire que de nombreux salariés sont en situation de souffrance. Des familles entières sont impactées par cette situation. J’ajoute que les Picards et les Samariens sont attachés à l’établissement. Il était important de le rappeler, car au-delà de la responsabilité de la direction et des organisations syndicales et de l’impossibilité de trouver une issue, il y a des salariés qui vivent avec une épée de Damoclès et se demandent chaque jour, au gré des communications, si oui ou non une partie de l’activité sera reprise, si 537 ou 333 salariés conserveront leur emploi, si Titan quittera ou non la négociation, si la fermeture du site sera totale ou partielle… Il est très difficile pour tout individu de vivre une telle situation.

Cette situation est connue depuis 2009, lorsqu’une expertise demandée par le CHSCT au cabinet Secafi a mis en évidence un certain nombre d’éléments pouvant entraîner des risques psychosociaux. Dès 2013, l’entreprise a renforcé de manière significative son dispositif, notamment en mettant en place une équipe pluridisciplinaire, disponible 7 jours/7 et 24 h/24, composée d’un médecin, de secouristes, d’infirmiers et d’une psychologue.

Nos services avaient déjà alerté l’entreprise sur les risques psychosociaux. En effet, dans une lettre du 4 février 2011, l’inspection du travail attirait l’attention de la direction sur les conséquences de la sous-activité sur la santé des salariés et sur une éventuelle rupture du contrat de travail liée au non-respect par l’employeur de son obligation de fourniture de travail.

Dans une lettre du 15 mars 2012, après avoir constaté au cours d’une réunion du CHSCT que dans certains secteurs le taux d’activité était de 23 %, nous avons demandé à l’entreprise de compléter le plan d’action sur les risques psychosociaux. Dans une lettre du 13 juillet 2012, l’inspection du travail rappelait à l’entreprise son obligation de fournir du travail à ses salariés. Le 14 janvier 2013, j’ai personnellement écrit à l’entreprise pour lui rappeler ses obligations. Enfin, dans une lettre du 6 février 2013, l’inspection du travail rappelait à l’entreprise que la sous-activité est l’une des premières causes de risques psychosociaux et demandait à l’entreprise de compléter les contrats de travail en proposant des formations aux salariés en cas d’insuffisante charge de travail.

Je rappelle que depuis le 25 septembre 2013, une enquête de l’inspection du travail est en cours sur les risques psychosociaux.

Mme la rapporteure. Quelles réponses avez-vous reçues à la suite de ces courriers ?

Mme Catherine Pernette. Chacun de nos courriers a reçu une réponse. Le dispositif d’accompagnement a réellement été conforté à l’annonce du PSE.

J’ajoute que la prévention des risques psychosociaux est l’une des obligations de l’employeur. Mais d’autres acteurs ont aussi un rôle à jouer en matière de prévention, tant au sein de l’entreprise – le CHSCT, les salariés, le médecin du travail – qu’à l’extérieur – l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT), l’inspection du travail.

Bien que l’obligation de prévention pèse juridiquement sur l’employeur, c’est un domaine dans lequel tous les acteurs doivent travailler ensemble. La cellule de veille composée de professionnels permet à l’entreprise d’avoir une vision pluridisciplinaire de la question et de définir les mesures de prévention. Cette fameuse cellule, qui se réunissait auparavant une fois par mois, se réunit à présent tous les lundis à 15 heures et chacune de ses réunions donne lieu à un compte rendu, dont je suis destinataire au même titre que l’inspection du travail, faisant état de l’évolution des salariés qui présentent des risques psychosociaux.

La prévention doit intervenir le plus en amont possible, avant que les personnes se trouvent en situation de souffrance.

M. Jean-Claude Buisine.  Les visites dans l’établissement sont-elles inopinées ou doivent-elles être précédées d’un avis de passage ?

Quelle est la nature de vos relations avec l’entreprise Goodyear, les représentants syndicaux et la direction ?

Mme Catherine Pernette. Il arrive que nous soyons sollicités, pour une demande de dérogation à la durée du travail, ou pour le licenciement d’un salarié protégé – celui-ci faisant l’objet d’une enquête contradictoire – mais les visites classiques sont effectuées de manière inopinée. L’entreprise n’est pas prévenue. L’inspecteur du travail se présente dans l’entreprise, il montre sa carte professionnelle et utilise ses droits – droit d’entrée, droit de visite, droit d’auditionner les salariés, en présence ou non de l’employeur, droit de prélèvement et droit d’accès à certains documents.

Quant à la nature de nos relations avec l’entreprise, je peux dire, pour avoir suivi les négociations, qu’il s’agit de relations habituelles entre une administration et une entreprise. À chaque fois que j’ai demandé une information, je l’ai obtenue. La relation entre l’inspection du travail et l’entreprise se situe dans un contexte de contrôle, ce que les entreprises apprécient généralement peu, mais je n’ai pas entendu parler de difficultés particulières lors des contrôles effectués par l’inspection du travail.

M. Jean-Claude Buisine. Il n’y a pas eu d’opposition aux contrôles de la part de l’entreprise ?

Mme Catherine Pernette. Non, il n’a jamais été fait obstacle aux contrôles.

Mme la rapporteure. Nous avons appris au cours de nos auditions que le statut du site Dunlop d’Amiens-Sud était différent de celui de Goodyear Amiens-Nord puisqu’il est rattaché à une filiale de GDTE (Goodyear Dunlop Tires Europe), située au Luxembourg, et non à la filiale française. Existe-t-il une différence eu égard à l’application du droit du travail ? Le fait que le CCE soit totalement déconnecté de la filière française a-t-il des conséquences ?

Mme Catherine Pernette. Notre contrôle concerne un établissement. Celui-ci appartient à une entreprise, qui elle-même appartient à un groupe. L’appartenance à tel ou tel groupe ne fait aucune différence pour nous. La difficulté apparaît lorsque l’inspecteur du travail souhaite recueillir des informations à un niveau national ou international, mais l’administration se heurte à cette difficulté dans bien d’autres domaines.

Le seul élément que nous ayons pu déceler dans le cadre de la procédure, c’est que le GEICF, le forum européen d’information et de communication de Goodyear, est de droit luxembourgeois et non de droit français. Je n’ai donc pas compétence pour apprécier si, oui ou non, ce comité d’entreprise européen a été correctement consulté.

M. le président Alain Gest. Votre intervention m’inspire un certain nombre de questions.

Vous étiez présente lorsque Titan a fait sa proposition de reprendre 537 salariés affectés à la fabrication des pneus agraires. N’avez-vous pas été surprise de voir qu’un seul syndicat participait à la procédure ?

Mme Catherine Pernette. Sur le plan juridique, l’entreprise se doit d’inviter tous les syndicats représentatifs aux négociations. Nous avons effectivement constaté que l’entreprise engageait la négociation avec la CGT, mais vous n’êtes pas sans savoir que l’audience de ce syndicat atteint 85 % dans l’établissement. Si l’entreprise voulait obtenir un accord, elle ne pouvait pas le faire sans la CGT.

Mme la rapporteure. Nous avons posé cette question à des spécialistes du droit du travail : cet accord aurait-il pu être remis en cause du fait de l’absence des syndicats minoritaires ?

Mme Catherine Pernette. Oui. Sur un plan purement juridique, l’entreprise devait inviter toutes les organisations syndicales, faute de quoi le processus n’aurait pas été engagé de manière équitable. Quoi qu’il en soit, une entreprise qui engage une négociation avec une organisation syndicale a intérêt à la reprendre avec l’ensemble des organisations pour obtenir leur signature et valider l’accord. C’est sans doute ce qu’a fait l’entreprise Goodyear au cours de la réunion du CCE du 4 juillet.

M. le président Alain Gest. Mais vos services et vous-même avez participé à la négociation !

Mme Catherine Pernette. Nous ne participons pas à la négociation en tant qu’acteurs. Nous intervenons dans le cadre de la médiation, pour faciliter la négociation ou répondre à des questions qui font blocage et tenter de dénouer la situation sur le plan juridique. Les seuls acteurs de la négociation sont la direction et les organisations syndicales. Nous sommes là pour faciliter le dialogue social. C’est ce que nous avons fait dans les trois réunions qui ont eu lieu à la demande de l’entreprise ou de la CGT. Les partenaires sociaux avaient besoin d’éclairages juridiques ou pratiques, en particulier sur la question du traitement des seniors, pour faire avancer la négociation engagée.

M. le président Alain Gest. Ma question appelle de votre part une réponse qui ne pourra être que subjective, mais puisque vous avez participé à ces réunions, avez-vous jugé sérieuse la proposition de Titan de reprendre 537 personnes ?

Mme Catherine Pernette. Je ne suis pas une spécialiste, monsieur le président, mais une juriste. Ce que je peux dire, c’est qu’il y a eu, à un moment donné, l’opportunité de sauvegarder 537 emplois. D’ailleurs Titan a réaffirmé par écrit, à la fin du mois de juillet, sa volonté de mettre en place un business plan qui prévoit sur deux ans un investissement de 23 millions d’euros, le développement de l’activité agraire et la reprise des 537 salariés. Il s’agit tout de même de 537 emplois sur 1 173 ! Pour nous qui sommes garants d’un dispositif de reclassement efficace, au bénéfice des salariés, c’était un élément important.

Titan acceptait de ne plus conditionner la reprise de l’activité agraire à la fermeture de la production de pneus tourisme au profit d’une diminution progressive de l’activité de tourisme – je rappelle qu’au départ il exigeait que Goodyear procède à la fermeture de l’activité tourisme avant de s’implanter sur l’activité agraire. Il avait également formulé le projet d’installer un pôle de recherche et développement.

En bref, je vois dans la proposition de Titan une possibilité réelle de sauvegarder 537 emplois. S’agissant de son engagement de maintenir l’emploi deux ou cinq ans, je ne peux pas vous répondre.

M. le président Alain Gest. Vous avez indiqué tout à l’heure que la CGT souhaitait que les emplois soient maintenus cinq ans. Or les représentants du syndicat nous ont affirmé au cours de leur audition qu’ils souhaitaient que Titan garantisse l’emploi pendant sept ans. Qu’est-ce qui, selon vous, a pu motiver un tel changement ?

Mme Catherine Pernette. Nous nous sommes arrêtés à la négociation du 12 septembre. Le 17 septembre, les partenaires devaient se retrouver à Paris pour signer l’accord, or la signature n’a pas eu lieu puisqu’il restait un point de blocage – la durée de l’engagement de Titan. Le 27 septembre, la direction nous a indiqué qu’elle était allée au bout de ce qu’elle pouvait faire, et j’ai lu depuis dans le Courrier picard une déclaration de la CGT indiquant que « tout projet présenté par la direction de Goodyear serait combattu, même si l’entreprise reprend ses engagements du PDV en les appliquant unilatéralement ».

Nous avons compris qu’il n’y aurait pas d’accord en septembre. Le 19 octobre, au cours d’une réunion extraordinaire du CCE, la baisse de la production a été annoncée et il a été fait allusion aux 44 intérimaires. Nous avons appris ensuite que des négociations ont eu lieu entre la direction et la CGT sur trois points encore en discussion, dont la demande de garantie, à l’origine de cinq ans, mais qui est passée le 12 décembre à sept ans à la demande de la CGT.

L’autre point encore en discussion portait sur la sortie de l’activité tourisme. Dans la négociation du PDV, l’activité tourisme était réduite jusqu’au seuil critique de 76 salariés. Il fallait donc accompagner la sortie définitive de ces 76 salariés restants en créant une plateforme de formation. M. Wamen, s’interrogeant sur la fin de la période de dégressivité de l’activité tourisme, a proposé de traiter ces salariés non dans le cadre d’un PSE mais d’un PDV, mais celui-ci avait été retiré par l’entreprise. J’en suis restée là.

M. le président Alain Gest. Dans le contexte d’une éventuelle reprise, le groupe Titan – qui, semble-t-il, a des contacts avec le ministre du Redressement productif – aurait formulé une proposition portant sur 333 salariés. Comment, sur un plan juridique, les choses peuvent-elles se passer en cas d’une reprise d’activité, sachant que ces 333 personnes ne représentent qu’une partie de celles qui sont censées être employées dans le cadre de l’activité agraire ?

Mme Catherine Pernette. J’écoute les informations nationales et je lis attentivement le Courrier picard. Mais en tant que responsable de l’unité territoriale de la Somme, je n’ai pas d’autre information.

M. le président Alain Gest. C’est pourquoi je vous demande d’imaginer ce qui se passerait si Titan faisait une proposition qui ne porterait pas sur la totalité des personnels concernés.

Mme Catherine Pernette. Sur un plan purement juridique, il existe deux hypothèses.

La première consiste à réinscrire cette reprise d’activité dans le cadre du PSE en cours. Sauf que ce matin, le 29 octobre, s’est tenue la dernière réunion de consultation du CHSCT et que, début novembre, auront lieu la troisième et dernière réunion de consultation du CCE ainsi que la dernière réunion du comité d’établissement, celle-ci devant se dérouler au plus tôt le lendemain de celle du CCE. Il s’agirait alors de suspendre la procédure, qui va bientôt prendre fin, pour réintroduire une reprise partielle d’activité.

La seconde hypothèse revient à laisser la procédure aller jusqu’à son terme. Le site ferme, Titan reprend une partie de l’équipement du site et réembauche un certain nombre de salariés.

Mme la rapporteure. Je suppose qu’il est tenu de réembaucher les salariés qui ont été licenciés ?

Mme Catherine Pernette. Il peut les réembaucher, mais il n’y est pas obligé.

M. le président Alain Gest. Je comprends que deux possibilités existent, avant et après la fermeture de l’usine. Mais est-il juridiquement possible que sur les 537 salariés concernés par l’activité agraire, seuls 333 salariés soient réembauchés ?

Mme Catherine Pernette. Le nombre de 537 salariés a été défini par rapport à un objectif cible : une partie de ces salariés devaient être affectés totalement à l’activité agraire, et une partie au support, qui vaut pour les deux activités. Cette définition était mentionnée dans le PDV qui prévoyait de scinder les activités agraire et tourisme et de présenter deux organigrammes distincts dans le cas où les deux activités devaient travailler ensemble et pour que coïncident la dégressivité de l’activité tourisme et la reprise de l’activité agraire.

Je ne sais pas à quoi correspond ce chiffre de 333 salariés, mais je suppose que c’est le nombre d’employés que Titan prévoit dans le cadre de la reprise du site et d’une partie de l’activité agraire.

M. le président Alain Gest. Je comprends fort bien, mais la question que je vous pose est d’ordre purement juridique : dans la première hypothèse, qui consiste à greffer la mesure dans la procédure en cours, est-il juridiquement possible que seulement 333 personnes fassent l’objet d’une reprise ?

Mme Catherine Pernette. C’est la définition par Titan de ses besoins de production qui déterminera le nombre de salariés. Je ne sais pas quel est le nombre de salariés, sur 537, qui dépendront totalement de l’agraire et combien dépendront des services support. Je ne sais pas si l’entreprise sélectionnera 333 personnes, sur la base de certains critères, parmi celles qui travaillent actuellement dans l’activité agraire.

M. le président Alain Gest. Pour vous, cette option est donc juridiquement possible.

Mme Catherine Pernette. Tout à fait.

M. le président Alain Gest. Elle peut donc s’inscrire dans la procédure en cours, à condition toutefois que celle-ci soit prolongée.

Mme Catherine Pernette. Oui, car il faut que Titan dise concrètement ce qu’il souhaite.

M. le président Alain Gest. Nous nous plaçons naturellement dans cette hypothèse.

En 2007, vos services avaient-ils participé aux réunions concernant la création du complexe industriel ?

Mme Catherine Pernette. Je ne sais pas. Les éléments dont je dispose concernent uniquement les médiations intervenues.

M. le président Alain Gest. J’aimerais que vous puissiez éclaircir certains points. Quelles sont les conséquences des risques psychosociaux ? L’utilisation de produits non-conformes à la législation et le non-respect de normes ayant des conséquences sur la santé des salariés font-ils partie de vos prérogatives ? Si oui, en avez-vous concrètement entendu parler ? Avez-vous eu connaissance de graves problèmes de santé touchant les personnels de l’entreprise ?

Mme Catherine Pernette. Oui. Au cours de leurs visites, les inspecteurs du travail ont constaté la non-conformité de certains équipements et décelé des problèmes liés à l’utilisation des produits pouvant les conduire à établir un procès-verbal. La non-conformité des équipements peut également être révélée par un accident du travail. Je rappelle que l’établissement Goodyear est énorme et occupe plusieurs bâtiments. Malgré la vigilance de l’inspection du travail, il peut arriver que des accidents se produisent et dans ce cas, l’enquête révèle la non-conformité des équipements. Cela se produit régulièrement. Des procès-verbaux ont été dressés, liés en particulier à l’exposition aux risques chimiques lorsque des équipements de protection individuelle se sont révélés non-conformes aux produits utilisés, ce qui a provoqué d’importantes brûlures aux mains pour les salariés concernés.

M. le président Alain Gest. Mais vous n’avez pas eu connaissance, ou vos services n’ont pas relevé d’éléments qui pourraient avoir des conséquences gravissimes sur la santé des salariés – je pense au cancer, qui a parfois été évoqué ?

Mme Catherine Pernette. Les risques chimiques existent sur le site. Je ne suis pas une spécialiste de la réglementation en la matière, mais le code du travail fixe des valeurs limites d’exposition pour les produits susceptibles de présenter un danger. Or, pour certains produits nous ne connaissons pas ces valeurs limites, au-delà desquelles les salariés sont exposés à des maladies professionnelles.

Le travail entrepris avec le CHU consiste à déterminer les valeurs limites d’exposition des produits chimiques pour permettre à nos services de sanctionner l’entreprise. Cela dit, dans la mesure où nous savons que ces produits peuvent avoir des conséquences sur la santé des salariés, nous agissons au niveau de la prévention des risques professionnels.

M. le président Alain Gest. Il serait intéressant pour nous de connaître les résultats des travaux du CHU. Il est très gênant, compte tenu de la gravité d’une maladie comme le cancer, de ne pas savoir si les salariés sont exposés ou non à des produits dangereux. Nous ne devons pas laisser planer le moindre doute, dans un sens ou dans l’autre. Je pense toutefois que si un tel risque existait, s’agissant de maladies professionnelles, vos services auraient été sollicités.

Mme Catherine Pernette. Nous avons été sollicités sur des éléments liés aux risques chimiques de manière générale. Mais du fait de l’évolution des connaissances, un produit qui n’est pas réputé dangereux un jour peut le devenir le lendemain. Il est alors expertisé en tant que tel et introduit dans la liste des produits dangereux contenue dans le code du travail, et des valeurs limites d’exposition lui sont associées. À partir de là, détecter sa présence peut amener l’inspection du travail à établir un relevé d’infraction. La connaissance des risques d’exposition aux produits chimiques évolue sans cesse, tout comme le tableau des maladies professionnelles. Mais il s’agit d’un sujet très technique…

M. le président Alain Gest. Certes, madame la directrice, mais vous me permettrez d’insister car cette histoire me préoccupe. S’il existait des cas avérés de personnes qui, après avoir utilisé des produits chimiques présentant un danger, avaient développé des maladies comme celles qui ont été évoquées, je suppose que vous en auriez été informée. Or vous ne l’avez pas été.

Mme Catherine Pernette. Compte tenu des informations dont je dispose et sachant que j’exerce mes fonctions depuis deux ans... Mais j’ai le souvenir de salariés souffrant de graves brûlures aux mains suite à l’utilisation de produits corrosifs. L’entreprise a été sanctionnée par l’inspection du travail par voie de procès-verbal pour non mise à disposition d’équipements de protection individuels.

Mme la rapporteure. Cela s’est produit pendant les deux dernières années ?

Mme Catherine Pernette. Oui, cette exposition aux risques chimiques date de 2012 et concernait 33 salariés, identifiés par l’inspection du travail. Des gants avaient été mis à la disposition des salariés, mais ils ne les protégeaient pas des risques d’attaque chimique. Voilà le travail de fond qu’effectue quotidiennement l’inspection du travail.

L’entreprise a prévu de mettre à la disposition des salariés des protections respiratoires pour éviter l’inhalation de fumée noire. L’inspection du travail vérifiera que cette mise à disposition ainsi que le port des équipements sont effectifs. Il appartient à l’employeur de veiller à ce que les salariés portent ces équipements, ce qui est difficile dans une entreprise qui compte un tel nombre de salariés.

M. le président Alain Gest. Les réunions du CHSCT de Goodyear auxquelles vos collaborateurs ont assisté se sont-elles déroulées dans les conditions habituelles ? Ont-elles été productives ?

Mme Catherine Pernette. Les inspecteurs du travail sont invités à participer aux réunions du CHSCT et ils y assistent en fonction de leur agenda et de leurs disponibilités. Les inspecteurs du travail ont souvent assisté aux réunions du CHSCT de Goodyear, qu’il s’agisse des réunions trimestrielles, des réunions extraordinaires ou de celles concernant un secteur particulier d’activité. Ce que m’ont rapporté mes collaborateurs, c’est que le dialogue social est difficile dans l’entreprise.

M. le président Alain Gest. C’est un euphémisme !

Mme Catherine Pernette. Je ne lis pas tous les procès-verbaux des réunions de CHSCT, mais j’ai suivi de près les quatre réunions du comité qui avaient pour objet les conséquences du plan de sauvegarde de l’emploi.

La première réunion, le 11 mars 2013, relative à l’information et la consultation sur la procédure de PSE, a abouti, après de courtes discussions, à la délibération sur la désignation d’un expert.

La réunion du 24 avril 2013 devait traiter trois sujets : l’information et la consultation sur la procédure du PSE, la désignation d’un nouvel expert et l’impossibilité pour l’expert désigné d’accomplir sa mission. Après avoir commencé en retard, du fait de l’absence d’une partie des membres de la délégation, la réunion a été suspendue à plusieurs reprises et aucune discussion sur le fond du dossier, à savoir l’étude des éléments mis à la consultation du comité, n’a été possible. La discussion a porté sur le contenu de l’ordre du jour, plus précisément sur les points suivants : le président et le secrétaire n’avaient, soi-disant, pas réussi à trouver un accord sur l’ordre du jour – alors même que celui-ci avait été signé – la réunion sur le premier point était prématurée et l’information était insuffisante. Par la suite, une partie de la délégation a quitté la salle.

L’ordre du jour de la réunion du 2 septembre 2013 reprenait l’information du comité sur la procédure du PSE et l’expertise. Après lecture d’une motion, la discussion a porté sur la convocation et sur le jugement du tribunal de grande instance de Lyon concernant l’expertise de Cidecos, mais le compte rendu ne fait pas état d’une discussion sur le contenu même de l’information du CHSCT, c’est-à-dire sur les conséquences en matière de santé et sécurité au travail de l’engagement d’une procédure de licenciement.

L’ordre du jour de la réunion du 17 septembre 2013 était plus chargé : outre la consultation du PSE et l’examen des points qui empêchent le cabinet Cidecos d’être valablement informé, il comprenait un troisième point portant sur la souffrance au travail et les risques psychosociaux à partir des constats réalisés par l’inspection du travail le 25 août 2013 dans le cadre de la reprise de l’activité après les congés annuels. Le débat a porté sur le libellé du troisième point et dix pages du compte rendu sont consacrées à un dialogue stérile entre les parties. Aucun avis n’a été formulé sur le premier point. La seule proposition que j’ai pu trouver concerne le maintien des salariés se trouvant en arrêt maladie.

Voilà ce que j’ai pu lire dans les comptes rendus des réunions de CHSCT en ce qui concerne la procédure de plan de sauvegarde de l’emploi.

Au cours de la réunion qui s’est tenue ce matin, le 29 octobre 2013, les membres élus, considérant qu’ils n’avaient pas suffisamment d’informations, n’ont pas rendu d’avis.

M. le président Alain Gest. Nous recevrons demain les experts nommés par le CCE ou à la demande de la CGT ou du CHSCT. Nous avons entendu dire que les experts avaient rencontré des difficultés pour obtenir des informations. Ce fait a-t-il été porté à votre connaissance ?

Mme Catherine Pernette. Les experts de Secafi, qui sont présents dans l’établissement depuis un certain temps, ne semblent pas avoir rencontré de difficultés, et ni les experts de Cidecos ni la CGT n’ont contacté nos services pour nous faire part de leurs difficultés. Ils ont saisi la juridiction compétente, ce qui a donné lieu au fameux jugement du tribunal de Lyon – où se trouve le siège social de Cidecos – qui énonce que les experts n’ont pas rencontré de difficultés d’accès aux documents et qu’ils auraient dû rendre leur rapport depuis longtemps. Mais il ne m’appartient pas de commenter une décision de justice.

M. le président Alain Gest. Cela ne nous appartient pas non plus, madame la directrice.

Vous avez en partie répondu à la question, mais si nous mettons de côté l’éventualité d’une nouvelle proposition de Titan, qui entraînerait fatalement un retard des procédures, est-il possible d’évaluer le calendrier des procédures en cours et la date à laquelle interviendra une décision définitive ?

Mme Catherine Pernette. Le CCE s’est d’abord réuni le 31 janvier 2013 pour présenter les documents dans le cadre d’une réunion dite « réunion zéro ».

Ensuite une première réunion a eu lieu le 12 février pour désigner les experts du cabinet Secafi.

La deuxième réunion du CCE s’est déroulée en plusieurs étapes : le 7 mars, avec pour ordre du jour la présentation du rapport ; le 22 mars, pour examiner le rapport de Secafi ; le 28 mai, nous avons évoqué la SCOP et le travail de l’AFII ; le 25 juin, nous avons étudié la partie accompagnement du livre 1 ; deux autres rencontres ont eu lieu, les 18 juillet et 30 août.

Nous en sommes à la troisième réunion du CCE. Il fallait attendre la consultation du CHSCT, dont la dernière réunion avait lieu ce matin. Je ne sais pas comment s’est déroulée cette réunion et comment elle a été appréciée. Si l’entreprise considère qu’elle a valablement consulté le CHSCT sur le PSE, après les réunions du 11 mars, du 24 avril, du 17 mai, du 31 mai, du 2 et du 17 septembre, il resterait une troisième et dernière réunion du CCE et une deuxième et dernière réunion du CE, qui pourrait avoir lieu début novembre. Ensuite interviendront la notification et l’envoi des lettres de licenciement, ce qui peut prendre un certain temps.

M. le président Alain Gest. Notre travail a vocation à tirer les conséquences de cette affaire. Compte tenu de votre expérience dans ce dossier, comme dans celui de l’entreprise Gad qui fait parler d’elle en Bretagne, considérez-vous que les capacités d’intervention de l’inspection du travail sont suffisantes, ou doivent-elles évoluer ?

Faut-il, selon vous, faire évoluer le code du travail pour mieux cerner les problématiques que nous avons rencontrées dans un dossier qui dure depuis six ans et a fait l’objet d’un nombre important de procédures judiciaires ?

Mme la rapporteure. La loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi donne à la DIRECCTE un rôle important qui vous amènera à juger du contexte économique du PSE. Si vous aviez été dans le contexte de cette loi, une telle accumulation de procédures aurait-elle pu exister ? Ce texte aurait-il facilité le dialogue ? Aurait-il permis d’aboutir à une solution ou à tout le moins à un traitement plus serein du PSE ?

Mme Catherine Pernette. Dans la mesure où nous sommes dans un contexte de réforme de l’inspection du travail, il m’est difficile de vous donner des informations sur ce point. Je considère qu’à partir du moment où nous n’avons pas à examiner le motif économique – qu’au demeurant la nouvelle procédure ne nous attribue pas non plus – la question des outils mis à la disposition de l’inspection du travail se pose en effet. Nos outils – droit d’entrée, d’accès aux documents, d’audition – nous donnent la capacité, sur la base des textes applicables, d’exercer nos missions relatives à l’application du code du travail.

L’accès des représentants du personnel au système judiciaire, pour des motifs très divers, allonge la procédure. Le CCE peut saisir le juge, tout comme le comité d’entreprise, le CHSCT, voire l’expert, pour peu qu’il rencontre des difficultés d’accès aux documents.

Dans la nouvelle procédure, que je n’ai pas encore expérimentée dans mon département, ayant reçu le premier dossier le 15 septembre – je dois l’homologuer dans un délai de deux mois – les délais sont beaucoup plus courts et incluent toutes les procédures, y compris les expertises, que ce soit au titre du CHSCT, du CCE ou du CE. La procédure ne doit pas excéder quatre mois. Elle est donc beaucoup plus contrainte.

Les questions posées au juge judiciaire, notamment sur les difficultés d’accès des experts aux documents, font l’objet d’injonctions présentées par les représentants du personnel auprès la DIRECCTE, qui doit dans un délai très court valider ou non la demande formulée par le requérant.

Après l’homologation ou la validation du dossier, si un contentieux est déposé devant le tribunal administratif, celui-ci doit le traiter dans un délai de trois mois, ce qui ne correspond pas à son mode de fonctionnement. S’il n’a pas tranché, le contentieux est envoyé devant la Cour d’appel.

Or le juge du tribunal administratif ne va pas trancher sur la procédure développée par l’entreprise, mais sur le travail de l’administration. Il va regarder si l’administration a bien fait son travail, si elle a bien vérifié la procédure, si le plan de sauvegarde de l’emploi a été correctement homologué et si les mesures proposées par l’entreprise sont suffisantes au regard de ses moyens. Ce qu’il validera – ou ne validera pas – c’est l’analyse qu’a faite notre administration du contenu du PSE, et non la procédure présentée par l’entreprise. Cela nous place dans une situation différente de celle que nous connaissions jusqu’à présent.

Enfin, dans les procédures de licenciements collectifs pour motifs économiques, chaque salarié a la possibilité de saisir le conseil des prud’hommes sur l’absence de motifs économiques.

Mme la rapporteure. La situation de Goodyear aurait-elle été différente si vous aviez suivi la nouvelle procédure ?

Mme Catherine Pernette. S’agissant de Goodyear, je ne peux pas vous répondre puisque la procédure n’est pas terminée et que le PSE n’est pas finalisé. Je ne sais pas si j’aurais homologué le PSE. J’attends que la discussion se termine. Le CCE du 30 août, notamment à l’initiative de la CGC, a adopté des éléments susceptibles d’améliorer le PSE comme l’augmentation des aides à la création d’entreprise et l’aménagement de la durée du congé de reclassement en fonction de la typologie des salariés.

Mme la rapporteure. La direction envisageait par ailleurs un grand plan de formation ainsi que la création d’une université de la formation pour aider les salariés à rebondir, ce qui, compte tenu du déficit de formation d’une partie des salariés, risque d’être extrêmement lourd.

Mme Catherine Pernette. Le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) prévoit de croiser, sur la base d’une étude d’employabilité, le savoir-faire des salariés avec l’étude d’impact social et territorial afin de mettre en place des passerelles et des transferts de compétences. Nous avons ainsi identifié entre une dizaine et une vingtaine de métiers, dans quatre domaines particuliers.

Je ne dispose pas de l’historique des actions en faveur de la formation, mais je sais qu’en 2013 un plan de formation a été soumis à la commission de formation, qui l’a amendé au cours de la réunion du CCE du 19 septembre. En consacrant 3,34 % de sa masse salariale à la formation, l’entreprise se situe au-delà du minimum légal.

M. le président Alain Gest. Nous recevrons demain les représentants des trois cabinets d’expertise en charge du dossier Goodyear : Secafi, Cidecos et Alter Expertise. Connaissez-vous ces experts ?

Mme Catherine Pernette. Je connais uniquement le cabinet Secafi.

M. le président Alain Gest. Je vous remercie.

L’audition s’achève à dix-neuf heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission d’enquête relative aux causes du projet de fermeture de l’usine Goodyear d’Amiens-Nord, et à ses conséquences économiques, sociales et environnementales et aux enseignements liés au caractère représentatif qu’on peut tirer de ce cas

Réunion du mardi 29 octobre 2013 à 17 h 30

Présents. – Mme Pascale Boistard, M. Jean-Claude Buisine, Mme Fanélie Carrey-Conte, M. Alain Gest

Excusé. – M. Jean-Louis Bricout