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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session extraordinaire de 2013-2014

Compte rendu
intégral

Première séance du mardi 01 juillet 2014

SOMMAIRE

Présidence de M. Claude Bartolone

1. Questions au Gouvernement

PLFRSS

Mme Véronique Louwagie

M. Manuel Valls, Premier ministre

Conseil européen

Mme Élisabeth Guigou

M. Manuel Valls, Premier ministre

Rénovation urbaine

M. Laurent Degallaix

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports

Ferme des Mille vaches

Mme Barbara Pompili

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Égalité entre les femmes et les hommes

M. Sébastien Denaja

M. Benoît Hamon, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

Réforme de l’aide juridictionnelle

M. Thierry Robert

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement

Taxe de séjour

M. Damien Abad

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget

Politique du logement

Mme Brigitte Bourguignon

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l’égalité des territoires

Chômage

Mme Virginie Duby-Muller

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social

Conférence sociale

Mme Martine Martinel

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social

Chrétiens d’Orient

M. Claude Goasguen

M. Manuel Valls, Premier ministre

Programme « Grand carénage » d’EDF

M. Christian Hutin

Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Réforme pénale

M. Georges Fenech

M. Manuel Valls, Premier ministre

Rythmes scolaires

M. Dino Cinieri

M. Benoît Hamon, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche

État palestinien

M. François Asensi

Mme Fleur Pellerin, secrétaire d’État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger

Suspension et reprise de la séance

2. Projet de loi de finances rectificative pour 2014

Explications de vote

M. Éric Alauzet

M. Roger-Gérard Schwartzenberg

M. Nicolas Sansu

M. Dominique Lefebvre

M. Hervé Mariton

M. Charles de Courson

Vote sur l’ensemble

M. Manuel Valls, Premier ministre

Présidence de M. Denis Baupin

3. Projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2014 (suite)

Rappel au règlement

M. Marc Le Fur

Levée de la réserve des votes

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget

Rappel au règlement

M. Christian Jacob

Suspension et reprise de la séance

Article 1er (suite)

Rappel au règlement

M. Patrick Hetzel

Article 1er (suite)

Amendements nos 35 rectifié , 221 (sous-amendement)

M. Jean-Pierre Door

M. Bruno Le Roux

Amendements nos 115 , 82 , 95 , 55 rectifié

Rappels au règlement

M. Christian Jacob

M. le président

M. Noël Mamère

M. Jean-Louis Roumegas

M. Philippe Vigier

Suspension et reprise de la séance

Rappels au règlement

M. Francis Vercamer

M. le président

M. Jean-Pierre Door

M. Philippe Vigier

Article 1er (suite)

Après l’article 1er

Amendements nos 138 rectifié , 190 , 54 , 48 , 4 , 16 , 102

Article 2

Mme Véronique Louwagie

Mme Isabelle Le Callennec

M. Michel Issindou

M. Gérard Sebaoun

M. Michel Liebgott

M. Laurent Baumel

M. Pouria Amirshahi

M. Jacques Bompard

M. Gilles Lurton

Mme Jacqueline Fraysse

M. Jean-Pierre Door

M. Jean-Louis Roumegas

M. Christian Jacob

M. Philippe Gosselin

M. Pierre Lellouche

M. Alain Fauré

M. Éric Woerth

M. Roger-Gérard Schwartzenberg

M. Christian Eckert, secrétaire d’État

Amendement no 108

M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Amendements nos 120 , 57 rectifié , 59 , 143 , 160 , 188 rectifié , 145 et 144 , 5 , 17 , 56 , 113 , 176 , 109 rectifié , 161 , 178 , 163 , 162 , 180 , 151 , 94 et 93 , 181 , 119 rectifié

M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

4. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Claude Bartolone

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

PLFRSS

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Véronique Louwagie. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Hier après-midi, a débuté dans notre hémicycle l’examen du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Alors que ce texte risque d’être un coup d’épée dans l’eau, parce qu’il ne répond pas aux défis, et qu’il pèsera, une nouvelle fois, sur le pouvoir d’achat des classes moyennes, vous avez décidé, hier soir, de nous priver de vote sur les articles et les amendements, tant que le Gouvernement l’aura décidé. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Cette mise en réserve des votes est en réalité dictée par la fronde d’une partie de votre majorité, que vous souhaitez priver de micro. Votre entourage, monsieur le Premier ministre, a tenté de justifier cette démarche auprès de l’AFP en soulignant qu’il avait été « décidé de réserver les votes à plus tard, car la volonté du Gouvernement, c’est d’avancer sur ce texte extrêmement important » ; « pour le Gouvernement, il s’agit d’assumer et d’aller de l’avant », a-t-on ajouté à Matignon.

Pourtant, certains de nos collègues de la majorité se sentent mal à l’aise, certains parlant de « crise des institutions », de « décalage entre le Gouvernement et le Parlement » ou d’un « gouvernement qui ne recule devant rien ».

Monsieur le Premier ministre, cette innovation sur un texte d’une importance majeure est contestable et inadmissible. Comment assurerez-vous la publicité de votre catalogue de mesures contenues dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, sans son ni image ? Ne trouvez-vous pas, en tant qu’ancien député, que ce recours bâillonne la voix des représentants de la nation,…

M. Denis Jacquat et M. Philippe Vitel. C’est vrai !

Mme Véronique Louwagie. …sur un projet de loi qui décline le très attendu pacte de responsabilité ?

Autoriserez-vous, oui ou non, le recours à l’article 49-3 demain devant le Conseil des ministres, privant alors définitivement le Parlement de sa liberté d’expression ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Madame la députée, le Parlement débat actuellement de deux textes importants, le collectif budgétaire et le collectif social, dont l’objectif principal est la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité,…

M. Guy Geoffroy. Du blabla !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …un pacte annoncé par le Président de la République le 14 janvier, et dont j’ai rappelé devant vous, et à plusieurs reprises, le contenu, les orientations et les mesures. Il s’agit d’un effort sans précédent…

Mme Marie-Christine Dalloz. Assez !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …en faveur des entreprises, de la baisse de la fiscalité, des ménages les plus modestes et de la réduction des déficits.

Le Gouvernement a une volonté, et cette volonté sera appliquée jusqu’au bout : faire adopter ces textes. Il y a un débat, des discussions au sein de la majorité ou dans cet hémicycle, des amendements ont été déposés. Mais l’essentiel – le contenu de ces deux textes – sera mis en œuvre. Les Français attendent une politique en faveur des entreprises, non pour faire des cadeaux aux patrons, mais pour baisser le coût du travail et faire en sorte que nos entreprises regagnent les marges perdues ces douze dernières années.

C’est autour de cet objectif que nous devons nous rassembler. J’ai grande confiance dans la majorité et dans les votes qu’elle émettra aujourd’hui et mardi prochain. Nous utilisons les moyens que nous donne la Constitution – ce n’est pas nouveau, toutes les majorités l’ont fait !

M. Charles de La Verpillière. Ah ! Ah !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Mais laissez-moi vous rassurer : nous utiliserons les moyens, et le moyen qui existe au sein de cet hémicycle, c’est le vote de la majorité. Ne doutez pas un seul instant du vote de la majorité…

M. Pierre Lellouche. Mais si, justement, on en doute !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …et de la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre les réformes.

Il existe toujours un risque pour le pays, celui de l’enlisement et du blocage.

M. Nicolas Dhuicq. C’est le socialisme !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je veux être un chef de Gouvernement qui ira jusqu’au bout des réformes, car c’est ce dont ce pays a besoin pour être plus fort et affronter demain les grands défis du monde. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe RRDP.)

Conseil européen

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Guigou, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Élisabeth Guigou. Monsieur le président, chers collègues, monsieur le Premier ministre, vendredi dernier, le Conseil européen a enfin fait de la croissance et de l’emploi la toute première priorité de l’Union européenne. Avec un quart des jeunes Européens sans emploi, c’est en effet aujourd’hui toute une génération qui est sacrifiée et la faiblesse de la croissance rend beaucoup plus difficile l’indispensable réduction des déficits et de la dette.

Dès mai 2012, le Président de la République a affirmé sa volonté de réorienter l’Europe vers la croissance avec un engagement pour l’emploi des jeunes et une feuille de route pour la zone euro. La France a ainsi obtenu dès 2012 l’adoption d’un pacte de croissance de 120 milliards d’euros puis celle d’un programme « garantie pour la jeunesse » afin que chaque jeune Européen se voit proposer une formation ou un emploi.

Ces décisions importantes, pourtant, ne suffisent pas, aussi le Président de la République a-t-il pris l’initiative de réunir les chefs de gouvernement sociaux-démocrates et socialistes européens à Paris le 21 juin dernier. Ils ont décidé qu’une nouvelle étape devait être franchie sous la présidence italienne qui commence aujourd’hui. Grâce aux propositions conjointes de François Hollande et de Mattéo Renzi, le Conseil européen, à l’unanimité, a jugé nécessaire d’accompagner le rétablissement des comptes publics et de la compétitivité par une politique d’investissement dans les grands domaines prioritaires : énergie, transport, numérique et éducation. Cette prise de conscience est nouvelle et salutaire.

Monsieur le Premier ministre, quelle sera la contribution de la France à cette nouvelle politique européenne en faveur de la croissance, de l’emploi et des investissements d’avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, madame la présidente Élisabeth Guigou, oui, c’est un Conseil européen très important qui s’est tenu voici quelques jours. Il a en effet adopté les priorités stratégiques pour les cinq prochaines années. Elles doivent constituer le mandat politique pour la nouvelle Commission et son futur président. Cette feuille de route s’inspire largement de l’agenda que le Gouvernement français a proposé, il y a quelques jours, suite au sommet des sociaux-démocrates à Paris.

Elle donne enfin toute sa place à la croissance, aux investissements et à l’emploi. La voix de la France a porté dans ce Conseil et continuera de porter. Nous en parlons avec la présidence italienne qui débute aujourd’hui et le Président de la République s’en est entretenu avec Jean-Claude Junker, proposé à la présidence de la Commission.

Que dirons-nous au prochain président de la Commission européenne et à nos partenaires ? Que nous avons besoin d’un programme d’investissement sur cinq ans en mobilisant d’abord les ressources publiques européennes et nationales ainsi que les ressources de l’épargne privée et les grands investisseurs. Il faut d’abord évaluer les principaux besoins dans les cinq domaines prioritaires que vous avez rappelés, les grandes infrastructures mais aussi l’énergie, le transport et le numérique. Tout le monde s’accorde pour reconnaître que c’est autour de ces priorités que nous devons organiser les investissements : la recherche et l’innovation, l’efficacité énergétique, la formation et la qualification des jeunes, au-delà de ce qui a déjà été engagé depuis 2012, la santé.

Il convient ensuite d’établir un plan de financement public et privé en mobilisant immédiatement les instruments européens qui existent – accélération des programmes engagés sur le budget européen, utilisation renforcée de la BPI en finançant des projets plus difficiles et plus risqués, mobilisation accrue du fonds européen d’investissement.

M. Pierre Lellouche. Vous croyez encore à ces sornettes ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Enfin, le lancement d’une nouvelle phase de project bonds, si nécessaire, et une nouvelle recapitalisation de la BPI doivent être à nouveau mis sur la table. Madame la présidente, nous devons être capables, dans ce domaine comme dans d’autres, d’utiliser toutes les marges, toutes les flexibilités, toutes les souplesses, que donne le pacte de stabilité et de croissance pour soutenir l’activité sans casser cette croissance.

De la même manière que la Banque centrale européenne a été capable de faire un certain nombre d’annonces favorables à un euro moins cher, moins fort, comme je l’avais évoqué dans mon discours de politique générale, et de se tourner davantage vers les banques, les entreprises et les ménages, nous devons être capables d’être plus souples et plus flexibles pour le pacte de stabilité.

Quand la volonté politique est là, quand les voix s’accordent, quand la France, l’Italie mais aussi l’Allemagne parviennent à se mettre d’accord sur ces orientations que demandent les citoyens européens, cette politique est possible mais aussi complémentaire des choix que nous faisons et que le Parlement mettra en œuvre dans quelques minutes à l’occasion du vote du projet de loi de finances rectificative pour 2014. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Rénovation urbaine

M. le président. La parole est à M. Laurent Degallaix, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants, à qui je souhaite la bienvenue dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP ainsi que sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Laurent Degallaix. Merci monsieur le président, mesdames et messieurs les ministres, mesdames et messieurs les députés, chers collègues. Je voudrais tout d’abord adresser une pensée à mon ami Jean-Louis Borloo, qui a quitté il y a quelque temps, le cœur gros, cette assemblée et lui dire toute ma fierté de lui succéder aujourd’hui et de porter après lui la voix de Valenciennes et du Valenciennois. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP ainsi que sur quelques bancs du groupe SRC.)

Monsieur le Premier ministre, vous avez présenté il y a une quinzaine de jours le plan national de la politique de la ville. Or, il me semble que cette présentation n’a pas mis en valeur un pan important, celui de la rénovation urbaine, dont vous connaissez les vertus pour en avoir profité en tant que maire d’Évry. Nous avons le sentiment aujourd’hui que ce plan est à l’arrêt : 1 200 zones prioritaires ont été balayées d’un trait de stylo sans savoir pourquoi, sans obéir à des critères très précis. Aucune information complémentaire ne nous a été fournie sur les financements ou les modalités de répartition.

Vous connaissez aussi bien que moi les grands mérites du plan ambitieux que Jean-Louis Borloo avait lancé et qui va au-delà du fait de rendre de la dignité, grâce au logement, aux populations mais aussi du renouvellement de ces quartiers grâce à l’implantation d’équipements publics structurants.

Monsieur le Premier ministre, quelles mesures fortes souhaitez-vous prendre en termes de méthodologie et de financement pour que la rénovation de ces quartiers puisse se poursuivre au service de leurs habitants ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports. Monsieur le député, je vous félicite pour votre élection.

M. Jean-Pierre Gorges. 72 % !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. C’est vrai, il y a quasiment onze ans, jour pour jour, Jean-Louis Borloo présentait son projet de loi relatif à la politique de la ville et à la rénovation urbaine. En cette année où l’agence nationale pour le renouvellement urbain, qui incarnait sa politique, fête ses dix ans, je veux rendre hommage à Jean-Louis Borloo à qui nous savons ce que nous devons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

Ne vous inquiétez pas, monsieur le député, cette politique est non seulement poursuivie mais aussi améliorée car, de fait, le premier programme de rénovation urbaine, lancé il y a dix ans, a fait ses preuves à certains égards. Beaucoup de quartiers en ont profité, au Val Fourré, à Neuhof ou aux Mureaux, mais là encore, nous pouvons donner davantage de perspectives aux habitants des quartiers concernés par la rénovation urbaine. C’est l’objet du nouveau programme de rénovation que nous allons lancer pour les dix prochaines années. Il mobilisera 5 milliards d’euros d’argent public pour améliorer 200 territoires différents qui souffrent des dysfonctionnements les plus graves. Nous veillerons, au-delà de l’habitat et du bâti, à répondre à la demande des habitants en termes d’équipements sociaux pour qu’ils fonctionnent de façon structurelle avec les moyens nécessaires mais aussi en termes de développement économique. Nous ferons en sorte, avec la Caisse des dépôts et consignation d’y investir pour créer des entreprises et soutenir le commerce.

Enfin, pour corriger un défaut du premier programme de rénovation urbaine, nous tâcherons d’y associer totalement les habitants afin qu’ils s’approprient les mesures proposées et qu’ils ne les vivent pas, comme ce fut parfois le cas, avec davantage d’hostilité et d’incompréhension que de satisfaction.

Voilà les mesures que nous nous apprêtons à prendre, monsieur le député.

Ferme des Mille vaches

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour le groupe écologiste.

Mme Barbara Pompili. Ce matin, monsieur le ministre de l’agriculture, les opposants à la ferme des Mille vaches étaient réunis à Amiens afin de soutenir les militants de la Confédération paysanne qui devaient être jugés pour avoir mené une action spécifique et pacifique de démontage de la salle de traite de l’usine.

Ces citoyens ont en commun la volonté de dire non à l’industrialisation de notre agriculture et, désormais, leur combat dépasse largement les frontières de la Picardie. Partout en France, des voix s’élèvent contre ce projet nuisible qui menace aussi bien l’activité des éleveurs que la santé des habitants, l’environnement et la condition animale.

Ainsi, le Conseil régional de Rhône-Alpes a, voici quelques jours, adopté un vœu appelant le Gouvernement à faire le nécessaire pour arrêter ce projet et pour éviter qu’il en inspire d’autres. Comme nous, il vous demande de défendre les pratiques agroécologiques – une ambition affichée dans la loi d’avenir pour l’agriculture dont nous entamerons la deuxième lecture la semaine prochaine.

C’est bien tout l’enjeu dans cette affaire : vous ne pouvez pas prôner l’agroécologie tout en laissant se développer l’agroindustrie dans notre pays ! Il est possible de renforcer davantage les contrôles de cessions de terres agricoles, d’encourager les méthaniseurs collectifs, d’interdire les cultures alimentaires dédiées et, surtout, d’encadrer la taille des méthaniseurs agricoles pour que les industriels ne puissent plus créer d’usines où ils entassent plus de 1 700 animaux sans autre but que de tirer profit des avantages liés au statut de leur méthaniseur.

Vous ne pouvez plus demeurer dans cette contradiction, monsieur le ministre. Le Gouvernement n’est pas impuissant ! Vous pouvez agir, nous pouvons agir lors de la prochaine lecture de la loi agricole. Quelles garanties comptez-vous donc apporter concrètement pour protéger l’agriculture française de projets industriels comme celui-ci ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Vous avez, madame la députée, fait référence au projet agroécologique : je rappelle que c’est le ministère de l’agriculture et le ministre que je suis qui en ont posé les bases.

M. François Vannson. Bravo !

M. Stéphane Le Foll, ministre. S’il existe un défenseur de ce projet, c’est donc bien le ministre !

Ensuite, vous évoquez le projet de ferme des Mille vaches – qui en abrite en réalité cinq cents – en usant d’arguments qu’il faut manier avec la plus grande prudence. Vous prétendez que ce projet menace le bien-être animal : ce n’est nullement le sujet ! Vous prétendez qu’il met en cause les règles environnementales : idem, ce n’est pas le sujet !

M. Bruno Le Maire. Très bien !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Vous prétendez qu’il met en péril la santé alimentaire : ce n’est pas davantage le sujet !

Mme Barbara Pompili. Si !

M. Stéphane Le Foll, ministre. S’il y a bien un sujet qui me motive, c’est le fait qu’il s’agisse d’un projet industriel et qu’il n’y ait derrière l’industriel investisseur ni agriculteur, ni paysan ni éleveur ! Soyons clairs : voilà le seul enjeu ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SRC et UMP.) Nous avons, avec Mme Duflot, pris toutes les mesures afin que les règles environnementales soient respectées. Ainsi, ce projet ne compte désormais plus mille vaches mais cinq cents vaches.

Troisièmement, en matière d’accès au foncier,…

M. Christian Jacob. Là, les choses vont se gâter…

M. Stéphane Le Foll, ministre. …nous allons avec la loi d’avenir faciliter l’installation, améliorer la transparence et renforcer les capacités grâce à une gouvernance nouvelle ; nous pourrons ainsi identifier ces projets collectifs afin qu’ils soient avant tout pour les agriculteurs et pour les éleveurs.

Voilà l’enjeu ! Il ne change rien au projet de l’agroécologie. L’agroécologie est en marche, et la loi d’avenir, par le vote qui interviendra ici même au terme du débat, apportera la preuve qu’elle est un atout et une chance pour la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Égalité entre les femmes et les hommes

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Sébastien Denaja. Ma question, à laquelle j’associe Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale. Depuis l’élection de François Hollande, les progrès en matière d’égalité entre les femmes et les hommes ont été constants : un gouvernement paritaire, un ministère de plein exercice dédié aux droits des femmes et des mesures fortes, en particulier en matière de parité, d’égalité salariale, de lutte contre la précarité et, surtout, contre toutes les formes de violences faites aux femmes.

Cette politique volontariste pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, trouvera bientôt une nouvelle concrétisation avec la loi Vallaud-Belkacem que nous avons adoptée jeudi dernier en seconde lecture. Ce texte marquera la législature de son empreinte, tant les dispositions qu’elle comporte permettront à la société tout entière d’avancer à la fois vers plus de liberté, mais aussi vers plus d’égalité.

Monsieur le ministre, c’est dès leur plus jeune âge, à l’école, que la République a le devoir impérieux de transmettre aux filles et aux garçons les valeurs d’égalité et de respect. C’est à l’école de la République de lutter contre toutes les discriminations encore trop souvent produites par des stéréotypes sexués d’un autre âge qui ruinent l’idée même d’égalité, à terme, entre les femmes et les hommes.

À ce sujet, après une campagne de désinformation parfois ubuesque, vous avez annoncé hier un plan ambitieux d’action globale pour l’égalité à l’école. Dès lors, monsieur le ministre, pouvez-vous préciser aujourd’hui devant la représentation nationale les mesures que le Gouvernement entend prendre non seulement pour dissiper les mauvaises rumeurs distillées par l’opposition, mais surtout pour que vive enfin le cœur même de la devise républicaine à l’école ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Benoît Hamon, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les « ABCD de l’égalité » ont été expérimentés tout au long de l’année scolaire par 600 enseignants volontaires dans 270 établissements. Je me permets de rappeler de quoi il s’agissait, tant j’ai entendu exprimer des fantasmes et des peurs à ce propos.

M. Philippe Meunier. Comme pour les rythmes scolaires ?

M. Benoît Hamon, ministre. Il s’agissait tout d’abord de former ces enseignants volontaires afin qu’ils déconstruisent un certain nombre de stéréotypes sexistes, d’autre part, de leur proposer des modules pédagogiques pour animer des séances en classe.

M. Charles de La Verpillière. C’est là le problème !

M. Benoît Hamon, ministre. À la demande du ministère de l’éducation nationale, une inspection a été réalisée, au terme de laquelle l’Inspection générale a jugé positif le bilan de ces ABCD.

Qu’avons-nous décidé avec Mme Najat Vallaud-Belkacem ?

M. Julien Aubert. Rien !

M. Benoît Hamon, ministre. Nous avons décidé de mettre en œuvre un plan d’action en faveur de l’égalité entre les filles et les garçons afin que l’on se respecte entre les unes et les autres, que l’on apprenne qu’aucune discipline n’est plus ou moins féminine et qu’aucun métier n’est plus ou moins masculin, et que l’on lutte contre ces préjugés et ces clichés que l’on retrouve parfois au cœur de l’école.

M. Alain Marty. Et du chômage !

M. Benoît Hamon, ministre. C’est la raison pour laquelle ce plan d’action consistera tout d’abord à intégrer la formation initiale de l’ensemble des professeurs en matière d’égalité au tronc commun du premier et du second degré. Ensuite, nous formerons en formation continue tous les enseignants, de la maternelle au lycée, en insistant particulièrement sur les 320 000 enseignants du premier degré. Troisièmement, dans le cadre des conseils d’école, les parents pourront être informés au sujet de ces projets de culture de l’égalité tels qu’ils se déploieront auprès des enfants dans les écoles. Enfin, nous reprendrons un certain nombre des modules pédagogiques jugés les plus adaptés par l’Inspection générale dans une mallette pédagogique qui sera mise à la disposition de tous les enseignants.

Nous ne négocierons pas l’égalité entre les filles et les garçons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Réforme de l’aide juridictionnelle

M. le président. La parole est à M. Thierry Robert, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Thierry Robert. Madame la garde des sceaux, je vous interpelle aujourd’hui sur un sujet qui a trait à l’égalité des citoyens devant l’accès à la justice et à son financement II s’agit bien évidemment de la question de la réforme de l’aide juridictionnelle. En effet, celle-ci est mise en danger par plusieurs facteurs : le poids financier croissant de cette aide et une proportion accrue des justiciables éligibles à celle-ci.

Une réforme est donc nécessaire, mais que la chancellerie envisage d’abonder le budget par un prélèvement sur le chiffre d’affaires des professionnels du droit et de la comptabilité semble bien mal inspiré. Pour certains jeunes avocats, notamment, l’aide juridictionnelle représente la quasi-totalité des dossiers traités et celle-ci les rémunère déjà très en deçà des tarifs habituels.

Nous connaissons la difficulté que peut représenter la régulation d’une activité libérale remplissant des missions de service public. Mais comment pourrait-on leur reprocher de ne pas vouloir de ce dispositif ? Si l’on taxe leur chiffre d’affaires, autant leur dire qu’ils auront un certain nombre de dossiers à traiter gratuitement chaque année.

L’impact d’une telle mesure serait tout à fait dramatique du point de vue de l’égalité dans l’accès à la justice. Un justiciable modeste aurait plus de difficultés à trouver un avocat acceptant son dossier, donc à se défendre.

Dans certains territoires de notre République, tels les outre-mer, l’aide juridictionnelle représente plus de 50 % des dossiers traités. La conséquence d’une telle orientation serait l’avènement d’une justice à deux vitesses, une justice dans laquelle les plus modestes ne pourront pas se défendre comme il se doit. C’est une idée qui est contraire aux valeurs fondamentales de notre pays.

Cela m’amène à vous demander, madame la ministre, de bien vouloir exposer à la représentation nationale vos intentions concernant cette réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le député, depuis plus de dix ans, de nombreux rapports signalent un système à bout de souffle, tant du point de vue financier que de la gouvernance du dispositif administratif.

De nombreux rapports, notamment celui du Conseil national des barreaux, sont intervenus sur ce sujet. Cette question est importante. Il s’agit, d’une part, d’assurer l’accès au droit des justiciables dont les revenus sont inférieurs à 936 euros par mois, d’autre part, d’améliorer la gestion du système, en concertation avec la profession d’avocat. L’activité de nombreux jeunes avocats relève en effet presque exclusivement de l’aide juridictionnelle. Les données relatives à l’impact financier de l’aide sur la profession d’avocat sont pourtant rares et difficiles à établir.

Néanmoins, je relève les chiffres de l’Union nationale des Carpa – la caisse des règlements pécuniaires des avocats – où seulement 7 % des avocats accomplissent 57 % des missions d’aide juridictionnelle, alors que la part de cette aide dans le chiffre d’affaires de la profession est de 2,96 %. Cela révèle une concentration importante des missions de l’aide juridictionnelle sur un petit nombre de cabinets, ce qui pose le problème de la dépendance économique de ces cabinets.

Dans ce contexte d’économies budgétaires, le Gouvernement veut assurer la pérennité de l’aide juridictionnelle et garantir l’accès au droit de tous les justiciables. Il n’exclut aucune piste et le Premier ministre a accepté le principe d’un financement complémentaire par un prélèvement obligatoire. Nous verrons avec vous, monsieur le député, comment le rendre opportun sans les inconvénients que vous signalez.

Taxe de séjour

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Damien Abad. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Alors que les organisations patronales ont tiré la sonnette d’alarme sur l’avenir de notre pays, alors que la dette explose pour atteindre près de 100 % du PIB, alors que vous ne cessez de matraquer fiscalement les Français,…

M. Jean Glavany. Arrêtez !

M. Damien Abad. …alors que le cap des 5 millions de chômeurs a été franchi, vous vous attaquez aux hôteliers et à l’ensemble du secteur du tourisme, l’un de nos derniers fleurons pourvoyeurs d’emplois et de devises étrangères.

En proposant de relever de 500 % le plafond de la taxe de séjour, vous prenez, une nouvelle fois, une mesure anti-économique, qui ne fera qu’affaiblir l’attractivité internationale de la France. Et ceci, une semaine seulement après la clôture des Assises du tourisme, sans même avoir attendu le rapport de nos collègues Éric Woerth et Monique Rabin sur la fiscalité des hébergeurs.

C’est aussi une mesure totalement contradictoire avec l’engagement solennel pris par le Président de la République et vous-même, monsieur le Premier ministre, de stopper l’alourdissement inconsidéré des taxes, que les Français ne supportent plus. Il faut dire qu’en matière de taxation, pas besoin de se rendre au Maracana le 13 juillet prochain pour vous décerner le titre de champion du monde toutes catégories ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Alors, monsieur le Premier ministre, qui, de Laurent Fabius ou de Christian Eckert, sortira vainqueur de cette nouvelle bataille intergouvernementale ? Quel avenir sera réservé à cette nouvelle taxe, votée à l’emporte-pièce par votre majorité décidément bien déraisonnable ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

S’il vous plaît, chers collègues, écoutons la réponse de M. le secrétaire d’État !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Monsieur Abad, je vous remercie de votre question et de la modération de votre propos.

Le Parlement a été conduit à adopter deux amendements, que je voudrais brièvement rappeler.

Le premier consiste, non pas à augmenter la taxe, mais à donner la possibilité aux collectivités qui le souhaiteraient, de le faire. Cela correspond à la demande d’un certain nombre de collectivités.

Le second consiste à donner la possibilité (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.), notamment en Île-de-France, de majorer cette taxe de séjour. Monsieur Abad, cette mesure a été votée à l’unanimité du Parlement et le président Carrez en a été l’un des défenseurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Luc Belot M. Yann Galut et M. Razzy Hammadi. Très bien !

M. Damien Abad. Ce n’est pas la même mesure !

M. le président. Retrouvez votre calme légendaire, chers collègues !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je reprends rapidement les enjeux liés à cette disposition.

Premièrement, ce sont des ressources, notamment pour la capitale, mais aussi pour les collectivités qui le souhaiteraient.

Deuxièmement, une comparaison avec d’autres capitales au niveau international montre que la modération est de mise chez nous.

Troisièmement, on peut concevoir que les touristes contribuent de façon modérée au financement des infrastructures en matière de transports, notamment en région parisienne.

M. Pierre Lellouche. Mais non !

M. Damien Abad. Ce n’est pas la question !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Quatrièmement, il est nécessaire de préserver un certain nombre de petits hôtels et de conditions d’hébergement, notamment pour les populations défavorisées.

Enfin, il est également nécessaire de prendre en compte les nouvelles formes de location qui, la plupart du temps, échappent à la taxe.

Cela étant, monsieur Abad, je vous rejoins dans votre conclusion, même si vous avez donné dans la caricature. Éric Woerth et Monique Rabin travaillent actuellement à l’élaboration d’un rapport sur cette taxe. Le Gouvernement aurait préféré attendre les conclusions de ces travaux. Profitons de la navette parlementaire ou du projet de loi de finances en fin d’année pour peaufiner le travail ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Politique du logement

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Brigitte Bourguignon. Ma question, à laquelle j’associe ma collègue Jacqueline Macquet, s’adresse à Mme la ministre du logement. Au cours des quinze dernières années, le poste budgétaire ayant le plus affecté le pouvoir d’achat des Français est de toute évidence le logement. L’explosion des prix immobiliers, des loyers et des charges locatives a eu un effet considérable sur le porte-monnaie de nos concitoyens. Tous les Français sont touchés par cette tendance qui frappe plus durement encore les jeunes et les habitants des zones denses. Alors que la droite a fait semblant de ne rien voir pendant dix ans, notre majorité s’est attelée à la tâche dès 2012. Des mesures fortes ont été prises pour encadrer les loyers et rééquilibrer le rapport entre l’offre et la demande.

Plus globalement, tout le secteur du bâtiment et de la construction souffre et nous sommes tous interrogés à ce sujet dans nos circonscriptions. L’un des leviers permettant d’agir utilement est la simplification. En effet, pas moins de 3 700 normes régissent ce secteur et leur multiplication a été l’une des causes du renchérissement du prix du logement.

Vous avez annoncé la semaine dernière, madame la ministre, une série de mesures volontaristes allant dans le bon sens qui visent à relancer la construction de logements dont nous avons cruellement besoin et à en réduire les coûts. Le logement est un sujet essentiel pour les Français et le bâtiment un secteur économique important. Pouvez-vous présenter à la représentation nationale le détail des mesures envisagées ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre du logement et de l’égalité des territoires.

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l’égalité des territoires. Vous avez parfaitement dressé le constat de la situation que nous vivons, madame la députée. Le secteur de la construction connaît en effet des difficultés. Les entreprises du BTP peinent à lancer des chantiers et nos concitoyens ont de plus en plus de mal à se loger.

M. Marc-Philippe Daubresse. Rien de surprenant quand la construction baisse de 50 % !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Afin de relancer le secteur de la construction, nous avons présenté mercredi dernier des mesures articulées autour de quatre priorités. Il s’agit d’abord de relancer l’accession à la propriété pour les classes moyennes et modestes, et les jeunes tout particulièrement, au moyen d’un recentrage et d’un meilleur ciblage du prêt à taux zéro. Nous avons également étendu le PTZ à l’ancien dans certaines communes rurales afin de favoriser la revitalisation des centres bourgs.

M. Marc-Philippe Daubresse. Il va falloir toucher aux loyers ! C’est Mme Duflot qui va être contente !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Cinquante mesures de simplification ont été prises, qui visent à réduire les coûts et les délais de construction que vous avez signalés, madame la députée. Enfin, le soutien au logement social, l’amélioration du dispositif d’investissement locatif et du suivi de la mobilisation du foncier seront confiés à Thierry Repentin. La réussite du plan de relance de la construction suppose la mobilisation de l’ensemble des acteurs : élus locaux, bailleurs, promoteurs et investisseurs. Les mesures auront un effet concret et immédiat pour les ménages comme pour les entreprises dès lors que le Gouvernement sera soutenu par tous les partenaires ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)

Chômage

M. le président. La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Virginie Duby-Muller. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Nous déplorons en mai 24 800 chômeurs supplémentaires et atteignons un nouveau record de 3,388 millions de chômeurs. Il ne devrait pas se passer une heure de votre journée, monsieur le Premier ministre, sans que vous pensiez à ces deux chiffres qui résument à eux seuls la détresse de beaucoup de nos compatriotes.

M. Dominique Baert. Démago !

Mme Virginie Duby-Muller. Aucune catégorie n’est épargnée. Jeunes, seniors, ouvriers, cadres : tout le monde est touché par le fléau. Le gouvernement précédent a mystifié les Français pendant une année sur « l’inversion de la courbe » ou « le ralentissement de la hausse » et votre actuel ministre du travail a singulièrement analysé la nouvelle hausse du chômage, se refusant à en commenter les chiffres mensuels au motif, a-t-il dit, « qu’ils ne veulent pas dire grand-chose » ! C’est indécent !

Un député du groupe UMP. Autruche !

Mme Virginie Duby-Muller. Je vais, moi, les commenter. Ces chiffres montrent que la politique économique et sociale que vous conduisez, monsieur le Premier ministre, va dans le mur. Ces chiffres montrent que vous avez cassé la confiance des entrepreneurs qui seuls créent la croissance et l’emploi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Ces chiffres montrent que votre politique dogmatique de destruction de l’apprentissage condamne les jeunes à l’inactivité forcée. Ces chiffres montrent enfin l’étendue des ravages de l’amateurisme au pouvoir. L’heure est grave, monsieur le Premier ministre. Votre majorité, qui n’en est plus vraiment une, se délite et un sentiment de détresse diffus naît chez nos concitoyens.

M. Laurent Furst. C’est vrai !

Mme Virginie Duby-Muller. Après la lettre ouverte des huit principales organisations de chefs d’entreprise et la révision à la baisse par l’INSEE de la prévision de croissance à 0,7 % et non 1 % comme l’escomptait Bercy, comment comptez-vous rétablir la confiance à moins d’une semaine de la conférence sociale prévue les 7 et 8 juillet prochains ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social.

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social. C’est en effet avec sérieux qu’il faut aborder le problème du chômage dont souffre notre pays depuis de nombreuses années. Mes propos, madame la députée, n’avaient pas la provocation pour fondement. Je vous rappelle tout de même que 750 000 chômeurs supplémentaires ont été à déplorer au cours du quinquennat de Nicolas Sarkozy. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Depuis le mois de mai 2012, 450 000 chômeurs supplémentaires s’y sont ajoutés. Notre pays déplore donc 1,2 million de chômeurs supplémentaires depuis 2007 !

M. Philippe Gosselin. Ce n’est pas une réponse !

M. François Rebsamen, ministre. Chacun peut-il en tirer argument pour critiquer l’action ? Sûrement pas !

M. Laurent Furst. Il faut oser le dire !

M. François Rebsamen, ministre. Nous devons tous nous rassembler et c’est ce que nous faisons grâce aux outils économiques mis en place. Ils visent en particulier à reconstituer les marges des entreprises afin qu’elles retrouvent la compétitivité qu’elles ont perdue pendant douze ans au cours desquels elles n’ont pas été en situation d’affronter la compétition internationale. Le crédit d’impôt compétitivité emploi donnera de nouvelles marges à nos entreprises et nous en attendons des emplois qui seront certainement au rendez-vous. J’ai en effet refusé, madame la députée, non pas de commenter les chiffres du chômage mais d’en suivre l’évolution au fil des mois. Ce qu’il faut considérer, ce sont les tendances et nous le ferons ensemble. J’aimerais que vous vous félicitiez de l’action menée par ce gouvernement pour faire baisser le chômage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Conférence sociale

M. le président. La parole est à Mme Martine Martinel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Martine Martinel. Monsieur le ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social, la grande conférence sociale pour l’emploi s’ouvrira lundi prochain. Depuis 2012, la majorité a souhaité, conformément aux engagements de campagne de François Hollande, que se renoue le dialogue social entre organisations syndicales représentatives des salariés et organisations patronales. Les deux précédentes conférences sociales ont chacune permis un travail constructif sur les emplois d’avenir, la lutte contre le dumping social ou l’accord sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Elles ont abouti à des initiatives concrètes sous forme de lois votées par notre Parlement.

Ce dialogue social renouvelé est attendu par tous, à commencer par l’ensemble des partenaires sociaux. C’est d’ailleurs à leur demande, monsieur le ministre, que vous avez introduit pour la conférence des 7 et 8 juillet prochains des tables rondes thématiques animées par les ministres concernés.

M. François Cornut-Gentille. On est sauvés !

Mme Martine Martinel. Si les partenaires sociaux se satisfont de cette initiative, nous ne pouvons que nous étonner de l’attitude de défiance de M. Gattaz. En effet, celui-ci exerce une forme de chantage sur sa venue en y posant de multiples conditions, ce qui entrave la concertation. Or, la conférence sociale repose sur le dialogue. Ce dialogue doit se dérouler dans un climat de respect, un climat constructif, sans volonté de blocage a priori des acteurs concernés.

Monsieur le ministre, quelles sont vos priorités pour faire de cette conférence sociale une réussite ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social. (Ah ! sur les bancs du groupe UMP.) Chers collègues, cachez votre joie, je vous prie !

M. François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social. Madame la députée, vous avez raison de rappeler que le Gouvernement, à travers les grandes conférences sociales, a souhaité renouer avec le dialogue social, qui avait été mis à mal sous le gouvernement de François Fillon et le quinquennat de Nicolas Sarkozy.

Renouer ce dialogue social a permis de grandes avancées. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Éric Woerth. Ah bon ?

M. François Rebsamen, ministre. Vous en avez cité quelques-unes. Je voudrais rappeler que c’est à l’occasion de la première conférence sociale que le problème de la compétitivité a été soulevé et qu’il a été demandé à Louis Gallois d’élaborer un rapport. C’est de même à l’occasion de la deuxième conférence sociale qu’une grande avancée a eu lieu pour les salariés avec la mise en place, traduite ensuite dans la loi, du compte personnel de formation. Vous le voyez, le dialogue social ainsi renoué entre les partenaires sociaux a permis des avancées.

Vous rappelez aujourd’hui qu’avant la troisième conférence sociale, une partie du patronat manifeste une certaine mauvaise humeur. C’est l’occasion pour moi, madame la députée, de lancer un appel aux organisations patronales pour qu’elles prennent, comme elles l’ont toujours fait jusqu’à présent, toute leur place aux tables rondes des 7 et 8 juillet prochains. C’est de l’intérêt des entreprises, de l’intérêt des salariés et de l’intérêt, économique et social, de la France. Je ne doute pas de la volonté des entreprises d’y prendre toute leur part. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Chrétiens d’Orient

M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Claude Goasguen. Monsieur le président, ma question s’adresse au ministre des affaires étrangères. Elle emportera, je l’espère, l’adhésion de l’ensemble des députés. Elle a trait au grand silence qui règne sur le massacre des chrétiens en Orient. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.) J’avais déjà posé une question à ce sujet le 1er octobre dernier et force est, hélas, de constater de depuis, notre gouvernement a fait bien peu de choses, l’ensemble des démocraties occidentales non plus. La situation s’est pourtant incontestablement aggravée. En Syrie, hélas, les images que l’on peut voir sur internet montrent les choix dramatiques qui s’imposent aux chrétiens d’Orient, dont je rappelle qu’ils ne sont pas partie prenante au conflit qui oppose sunnites, chiites et alaouites. Alors que les chrétiens sont un facteur de paix au Moyen-Orient, ce sont eux au contraire qui subissent les graves conséquences de la crise et de la guerre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI ainsi que sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Yann Galut. Tout à fait.

M. Claude Goasguen. Cette situation est encore aggravée depuis les derniers événements en Irak, où les miliciens de l’État islamique en Irak et au Levant ont commis de premiers massacres à Mossoul. Les églises sont systématiquement détruites, tout ce qui est chrétien est massacré, rançonné, crucifié. La ville de Karakoch, qui est la grande ville chrétienne d’Irak, vient de se vider de tous ses chrétiens, créant des milliers de réfugiés. A même été réinventée la jaziah, l’impôt que les États musulmans appliquent sur les chrétiens.

La situation dramatique en Irak ne doit pas faire oublier ce qui se passe au Nigeria, où il en va de même, ni ce qui se passe au Soudan. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Devant le silence des démocraties occidentales, on en vient à se demander ce qu’est devenu l’article de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui prévoit un soutien aux minorités religieuses. (Mêmes mouvements.)

Monsieur le ministre, pourra-t-on accepter longtemps qu’une résolution ne soit pas adoptée aux Nations unies, à l’initiative de la France, réaffirmant qu’avec le sort des chrétiens d’Orient se joue le sort même de la liberté et de la tolérance. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI, ainsi que sur quelques bancs des groupes SRC et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Vous avez raison, monsieur Goasguen : nous devons tous nous retrouver autour de ces minorités, autour de ces chrétiens d’Orient qui vivent au cœur d’une région tourmentée, où la violence et l’horreur aujourd’hui l’emportent. Dans un monde trouble, instable, où la communauté internationale a du mal à imposer un nouvel ordre qui serait pourtant indispensable, la voix de la France se fait entendre.

Je veux rappeler combien, depuis plusieurs années, les initiatives ont été fortes sur le sujet de la Syrie.

M. Alain Marsaud. Avec quel succès !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Si on avait écouté la voix de la France et de sa diplomatie, on n’en serait peut-être pas là aujourd’hui…

M. Alain Marsaud. Sûrement pas…

M. Manuel Valls, Premier ministre. …tant la contagion gagne en Syrie.

Alors que je réponds à la question grave et sérieuse de M. Goasguen, il est difficile d’accepter, monsieur Marsaud, que vous choisissiez ce moment pour essayer de m’interrompre. Nous devrions être tous concentrés sur l’essentiel, la défense de ces minorités. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, Écologiste et RRDP. –Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Monsieur Marsaud, sur ce sujet-là au moins, pouvez-vous faire preuve de dignité un instant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives protestations sur les bancs du groupe UMP. – Bruit.)

M. Alain Marsaud. Inqualifiable !

M. le président. Monsieur Marsaud, calmez-vous et asseyez-vous.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je finis de répondre à M. Goasguen. Le problème posé est en effet celui des chrétiens d’Orient mais, aussi au-delà, celui de l’ensemble des minorités religieuses dans cette région du monde. Le seul moyen de s’en sortir, au-delà de faire entendre la voix de la France et de la communauté internationale, et des initiatives qui peuvent être prises – je ne doute pas que le Président de la République et le ministre des affaires étrangères y travaillent aujourd’hui – est de faire en sorte… (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Je poursuis, mais très honnêtement si, sur des sujets comme celui-là… (Mêmes mouvements.)

M. Hervé Mariton. Votre réponse est creuse !

M. Patrick Devedjian. Vous n’avez rien compris.

M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Si sur un sujet comme celui-là, nous pouvions nous retrouver ! Vous avez gouverné. Aujourd’hui c’est nous qui gouvernons. Nous savons que si la communauté internationale dans son ensemble n’a pas la capacité d’intervenir – regardez ce qui s’est passé en Irak depuis des années –, c’est le sort de toutes les minorités qui est en jeu. Avec ce qui se passe notamment entre sunnites et chiites, avec ce qui se passe après l’avancée de ce groupe terroriste qui prend des otages en Syrie, qui agit de la façon la plus barbare et peut aujourd’hui déstabiliser l’Irak, oui, toute la région peut s’en trouver déstabilisée. Mais ne doutez pas un seul instant de la voix et de l’action de la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, Écologiste et RRDP.)

Programme « Grand carénage » d’EDF

M. le président. La parole est à M. Christian Hutin, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Christian Hutin. Ma question va, je le pense, intéresser l’ensemble des parlementaires, car elle porte sur le chantier probablement le plus important qui ait été mis en œuvre depuis la Libération dans notre pays. Je vais m’efforcer d’aborder ce sujet de manière atavique, en Dunkerquois que je suis, en fils de pêcheur d’Islande, en homme de vigie ou, comme on le dirait aujourd’hui, en donneur d’alerte. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Et la question ?

M. Christian Hutin. Ce grand chantier est quelque chose de très sérieux, mes chers collègues, car il se traduira par des investissements dont le montant pourrait avoisiner 53 milliards d’euros. Pour ceux qui ne le connaissent pas, il s’agit du programme « Grand carénage » d’EDF, qui prévoit la prolongation d’un certain nombre de nos centrales nucléaires et leur adaptation, justifiée au regard des événements de Fukushima.

Ces 53 milliards, ce n’est pas rien pour la croissance, les emplois et notre industrie. Si je veux être donneur d’alerte aujourd’hui, c’est pour dire que l’homme de vigie de Dunkerque a vu ce qui se passait dans le terminal méthanier, à savoir l’attribution d’un certain nombre de marchés, probablement dans le plus grand respect des règles d’égalité, à quelques employeurs étrangers et travailleurs détachés. Dans un bassin d’emploi en difficulté, je peux vous dire – et il n’y a aucune xénophobie dans mes propos, je dis bien : aucune – qu’il est très difficile pour nos concitoyens sans emploi de constater que ces personnes se voient accorder du travail.

Je sais qu’un certain nombre de préfets travaillent déjà sur le sujet, sur ces 53 milliards, qui représentent quelque chose d’exceptionnel. C’est un sujet essentiel.

Pour revenir à mon propos initial, je pense que nous devons sauvegarder notre territoire de chasse ou de pêche. (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Monsieur le député, vous avez souhaité connaître l’avis du Gouvernement sur le programme d’investissement d’EDF appelé « Grand carénage » et sur le potentiel qu’il représente en termes de développement d’activités et d’emplois.

Je veux rappeler que le grand carénage vise deux objectifs, que vous avez d’ailleurs soulignés.

Premier objectif : élever le niveau de sûreté du parc français au plus haut niveau, pour le rendre comparable à celui des réacteurs de troisième génération, par un ensemble d’actions et de travaux intégrant notamment ceux prescrits par l’Autorité de sûreté nucléaire à la suite de l’incident de Fukushima.

Deuxième objectif : préparer les réacteurs qui approchent les quarante ans d’exploitation à un éventuel prolongement, sous réserve, bien évidemment, d’une stratégie énergétique dont votre assemblée aura à débattre très prochainement dans le cadre du plafonnement de la capacité de production d’énergie nucléaire. Un arbitrage devra notamment être rendu entre le coût de la prolongation des réacteurs anciens et la construction de nouveaux réacteurs. Il devra également être statué sur l’investissement d’EDF dans la diversification vers les énergies renouvelables, comme c’est déjà le cas avec le photovoltaïque et l’éolien.

Il faudra aussi de la visibilité sur les coûts de production, donc, sur les factures payées par les Français. L’État, qui détient, je vous le rappelle, 85 % du capital d’EDF, jouera, par l’intermédiaire de ses représentants, tout son rôle au sein du conseil d’administration.

J’attends également beaucoup du débat qui se tiendra à l’Assemblée nationale, dans le cadre du prochain projet de loi de programmation sur la transition énergétique, afin que nous puissions être éclairés sur les meilleurs choix à faire pour l’avenir énergétique des Français. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Réforme pénale

M. le président. La parole est à M. Georges Fenech, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Georges Fenech. Monsieur le Premier ministre, alors ministre de l’intérieur, vous nous aviez habitués aux positions martiales, proclamant que la gauche en avait fini avec l’angélisme en matière de lutte contre la délinquance. Ce n’était hélas qu’une posture, voire une imposture. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Car aujourd’hui, alors que vous êtes le chef du Gouvernement et que vous avez encore plus les moyens d’agir, tout montre que vous cédez au laxisme en soutenant le projet de loi de Mme Taubira.

Vous avez en effet accordé un créneau parlementaire en urgence à Mme la garde des sceaux pour discuter d’un projet de loi qui aboutira à vider les prisons (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), en calquant le régime des récidivistes sur celui des primodélinquants et en supprimant les peines planchers. Vous n’avez même pas réagi la semaine dernière, quand le Sénat a décidé que, s’agissant d’une longue liste de délits, le juge ne pourrait plus prononcer du tout de peines de prison ! Il s’agit des délits de fuite, de l’usage de stupéfiants, de la conduite sans permis, etc.

De fait, sur le terrain, les services de probation ne pourront pas suivre autant d’individus purgeant leurs peines hors les murs. La conséquence pratique sera que des milliers de délinquants vont se retrouver dans la nature sans le suivi nécessaire et pourront récidiver.

M. Yves Fromion et M. Philippe Armand Martin. Eh oui !

M. Georges Fenech. Cela concernera 20 000 personnes, selon vos propres estimations.

Monsieur le Premier ministre, vous devez la vérité aux Français et vous devez l’assumer !

Oui, c’est bien ce texte laxiste que vous souteniez depuis son origine, car nous avons bien remarqué, depuis le début des débats, l’attitude ambiguë de votre garde des sceaux, qui s’était, volontairement, laissé battre par le groupe socialiste en commission, à l’Assemblée et qui a récidivé au Sénat, en acceptant notamment la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs.

Alors, monsieur le Premier ministre, quand prendrez-vous vos responsabilités, quand renoncerez-vous à la procédure d’urgence, quand retirerez-vous de l’ordre du jour un texte dénaturé, inefficace et dangereux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Mesdames, messieurs les députés, monsieur Fenech, combien de fois avons-nous eu ce type de débats et d’interpellations caricaturales ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Yves Fromion. Mais non !

M. Manuel Valls, Premier ministre. L’Assemblée a débattu pendant plusieurs jours de la réforme pénale, dont le seul objectif est l’efficacité, s’agissant d’un sujet où chacun peut constater dans la récidive l’échec jusqu’alors rencontré. Et vous expliquez aux parlementaires et, à travers eux, aux Français que ce texte a pour objet de vider les prisons : c’est un mensonge ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Guy Geoffroy. Non !

M. Manuel Valls, Premier ministre. C’est un mensonge, je le répète, que je veux à nouveau dénoncer.

Le débat l’a bien montré. Il n’est que de regarder les prises de position, tout au moins lorsque l’on peut débattre sérieusement. Votre collègue sénateur UMP, M. Lecerf, ainsi qu’une ancienne ministre, Mme Pelletier, reconnaissent, à cet égard, que le projet de loi pénale a un seul objectif : lutter efficacement contre la récidive, qui est l’un des fléaux majeurs liés à l’emprisonnement et entretenant la délinquance.

Cessez donc de nous invectiver ou de poser ce type de questions, qui visent uniquement, encore une fois, à créer de la polémique et à verser dans la caricature.

S’agissant de la commission mixte paritaire qui va bientôt se tenir, la position du Gouvernement est très claire : le texte adopté à l’Assemblée nationale doit être la base de la future loi pénale qui vise à lutter contre la récidive. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.) Il ne peut pas y avoir de changement par rapport aux équilibres qui ont été trouvés à l’Assemblée nationale et qui correspondent exactement aux arbitrages qui ont été rendus par le Président de la République à l’été 2013.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec et M. Daniel Vaillant. Très bien !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Cet équilibre est en effet nécessaire pour mettre en œuvre une politique pénale qui soit comprise et efficace.

M. Marc-Philippe Daubresse. Vous ne disiez pas la même chose lorsque vous étiez ministre de l’intérieur !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je disais exactement la même chose, monsieur le député.

La politique pénale et la politique de sécurité que mène aujourd’hui Bernard Cazeneuve doivent fonctionner ensemble.

M. Christian Jacob. On ne l’entend jamais, Cazeneuve !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Il faut sortir de ces caricatures que j’ai trop entendues ici ou là, qui visent à opposer la police à la justice, les magistrats aux fonctionnaires de police, le ministre de la justice au ministre de l’intérieur.

Nous, nous visons l’efficacité. Si les politiques pénales que vous avez votées avaient été efficaces, ça se saurait ! C’est pourquoi nous voulons de l’efficacité, rien que de l’efficacité, pas de débats idéologiques, de caricatures ni de polémiques inutiles, car, ce que les Français nous demandent, c’est de l’efficacité pour lutter contre la délinquance ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

M. François de Rugy. Très bien !

M. Philippe Vitel. Ça suffit !

Rythmes scolaires

M. le président. La parole est à M. Dino Cinieri, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Dino Cinieri. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Je tiens à y associer mon collègue Paul Salen car, dans sa circonscription, se déroule un drame.

Hier, nous avons rencontré Mme Évelyne Flacher, maire de Saint-Médard-en-Forez, qui a commencé une grève de la faim…

M. Régis Juanico. Scandaleux !

M. Dino Cinieri. …pour se faire entendre sur la question des rythmes scolaires. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Scandaleux !

M. Dino Cinieri. Comment un État républicain comme la France peut-il s’enfermer dans un mutisme total face à une opposition nationale argumentée et apolitique, mépriser outrageusement ses enfants et manquer à ce point de bon sens ?

Votre ministre Benoît Hamon veut poursuivre les élus qui ne pourraient pas appliquer la réforme. Vous exigez des communes un engagement à long terme alors que la dotation n’est prévue que pour un an. Après, qui paie ? Les contribuables.

Les parents et les enseignants opposés à la réforme sont victimes de pressions et de menaces académiques aussi intolérables qu’inédites. Le Conseil d’État tarde à se prononcer sur les recours. Les délibérations communales sont invalidées sans même être examinées ou jugées.

Bref, cette réforme ne fait que creuser les inégalités entre les écoles privées et les écoles publiques, les communes rurales et les communes urbaines, les communes riches et les communes pauvres.

À l’heure où notre pays vit une situation économique des plus difficiles, où l’État opère des coupes drastiques dans les dotations aux collectivités territoriales, vous engagez nos collectivités vers une course folle aux dépenses sans apporter la moindre garantie que cette réforme bénéficiera aux élèves. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Comment pouvez-vous ne pas réagir à ces cris de désespoir ? Comment pouvez-vous rester si impassibles et inactifs face à l’engagement de Mme Flacher et, en même temps, exempter la Guyane ?

Dans nos deux circonscriptions, 80 % des maires sont contre la réforme. Pourquoi ne répondez-vous pas aux multiples courriers et recours qu’ils ne cessent de vous adresser ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Benoît Hamon, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. J’ai pris connaissance comme vous, monsieur le député, de la décision de la maire de Saint-Médard-en-Forez de commencer une grève de la faim parce qu’elle est opposée à la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires.

Ce n’est pas raisonnable, et d’abord pour sa propre santé, de choisir aujourd’hui de recourir à la grève de la faim quand on ne souhaite pas appliquer la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ce qui laisse pantois, c’est que vous souteniez une grève de la faim pour que ne s’applique pas la réforme des rythmes scolaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Ce qui laisse pantois dans votre attitude, c’est que l’on fasse la grève de la faim pour que les enfants ne travaillent pas le mercredi matin et apprennent mieux.

Je vous demande de vous interroger sur l’impact de cette violence symbolique sur les enfants eux-mêmes. Laissez l’école tranquille. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe RRDP.) Laissez les enseignants tranquilles, laissez-les faire leur travail, donnez-leur les moyens de faire en sorte qu’en français, en mathématiques, on apprenne mieux, et cessez d’utiliser cette violence symbolique pour combattre une réforme qui est dans l’intérêt de l’enfant.

M. Jean-Pierre Barbier. Scandaleux !

M. Benoît Hamon, ministre. Les conseils municipaux qui ont délibéré et choisi de ne pas appliquer la loi se sont vus débouter par la justice administrative. Force reviendra à la loi. Comme le lui ont dit la préfète et l’inspecteur d’académie, nous sommes disposés à discuter avec la maire de Saint-Médard-en-Forez, mais il n’est raisonnable ni pour les enfants de sa commune, ni pour les parents d’élèves, ni pour elle-même qu’elle continue dans cette voie, et je vous encourage à lui demander d’arrêter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe RRDP.)

État palestinien

M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. François Asensi. Monsieur le Premier ministre, le conflit israélo-palestinien n’en finit plus d’être une tragédie. L’assassinat de trois adolescents israéliens est un acte barbare, que les députés du Front de gauche condamnent sans appel.

Parce que leur mort est injuste, elle ne doit pas conduire à d’autres injustices.

Depuis le déclenchement de la riposte israélienne, dix civils sont tombés en Cisjordanie. Le numéro deux de l’ONU redoute une troisième intifada. Il faut dire non à une nouvelle punition collective du peuple palestinien, non aux représailles, non à la loi du talion, qui est illégitime dans un État démocratique et civilisé.

Le fond du problème, c’est toujours la colonisation et les violations du droit international par Israël. Le peuple palestinien n’en peut plus de l’hypocrisie des pays occidentaux.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. François Asensi. Avec le soutien des pays européens, Israël vient ainsi d’être élu à la vice-présidence de la commission de l’ONU en charge de la décolonisation. C’est un comble. C’est une prime à la colonisation, qui s’intensifie dans les territoires occupés. Comment la France a-t-elle pu donner son accord à une telle décision ?

La voie de la paix, c’est inévitablement la reconnaissance d’un État palestinien vivant en paix avec son voisin israélien, dans les frontières de 1967, avec, pour capitale, Jérusalem-Est.

C’est à la France, qui a su défendre la liberté des peuples dans l’Histoire, d’accomplir cet acte fort.

C’est la troisième fois que je pose la question au Gouvernement. La France va-t-elle enfin reconnaître l’État palestinien, comme s’y était engagé le candidat François Hollande ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et plusieurs bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

M. François Rochebloine. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger.

Mme Fleur Pellerin, secrétaire d’État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger. Monsieur le député, le Président de la République a fermement condamné hier soir l’assassinat odieux et lâche de trois jeunes Israéliens, et il importe désormais d’éviter à tout prix que cet événement ne suscite une escalade de violence susceptible de causer de nouvelles victimes.

Nous condamnons les tirs de roquette depuis Gaza sur le territoire israélien. Nous sommes particulièrement préoccupés par la montée des tensions et par la multiplication des incidents causant la mort de civils dans les territoires palestiniens, et nous appelons à faire preuve du plus grand sens des responsabilités pour permettre un retour au calme.

Ce nouvel épisode tragique vient illustrer l’urgence de faire émerger une solution définitive au conflit israélo-palestinien. Le statu quo, on le voit, n’est pas tenable et fait le jeu des extrémismes.

Cette solution, nous la connaissons bien et vous l’avez rappelée, ce sont deux États, un État d’Israël et un État de Palestine, vivant côte à côte en paix et en sécurité, avec Jérusalem pour capitale des deux États.

Nous avons soutenu les efforts de John Kerry et il faut continuer d’encourager les parties à revenir à la table des négociations et à prendre les décisions difficiles qui s’imposent. Le ministre des affaires étrangères s’en est entretenu la semaine dernière avec John Kerry ainsi qu’avec le ministre des affaires étrangères saoudien.

Sur la colonisation, il importe que les parties bâtissent un environnement favorable à la paix et à la négociation. Or la poursuite de la colonisation mine ces perspectives et la viabilité d’un futur État palestinien et c’est pourquoi le Président de la République a appelé devant la Knesset à son arrêt.

La France a condamné les récentes décisions de construction en Cisjordanie et à Jérusalem-Est et nous mettons en garde les entreprises et les investisseurs en soulignant les risques liés au fait de mener des activités économiques ou financières dans les colonies israéliennes.

Du côté palestinien, nous appelons l’Autorité palestinienne à faire usage de façon responsable de son nouveau statut dans les enceintes onusiennes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

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Projet de loi de finances rectificative pour 2014

Vote solennel

M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote au nom des groupes et le vote par scrutin public sur l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2014 (nos 2024, 2049).

Explications de vote

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour une explication de vote au nom du groupe écologiste.

M. Éric Alauzet. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, le collectif budgétaire s’inscrit dans un contexte très particulier, du point de vue économique et politique.

Ce contexte, c’est la situation de nos finances publiques. C’est aussi  les verdicts des élections municipales et européennes.

Nos finances publiques continuent de stagner dans le rouge, faute de reprise de l’activité. Ce budget rectificatif prend acte du défaut de recettes fiscales pour un montant important, de 5 milliards. Il propose, pour y remédier, des annulations de crédits. Nous vous avons dit notre stupéfaction et notre colère de voir le budget de l’écologie amputé, ainsi que plusieurs millions du programme d’investissement d’avenir sur l’écologie reportés au profit du budget de la défense.

Monsieur le ministre, on se demande parfois s’il n’y a pas dans votre ministère des gens qui n’apprennent rien, qui ne comprennent rien, des gens qui ne réalisent pas l’enjeu de la transition écologique et énergétique pour relancer notre économie et préparer notre pays.

Car l’asphyxie budgétaire se nourrit de l’asphyxie économique, elle-même conséquence de la ligne d’austérité qui prévaut dans les choix européens.

C’est pourquoi nous avons apporté au débat des propositions pour cibler les interventions financières de l’État : les cibler en faveur de secteurs intensifs en emplois ; les cibler en accompagnant prioritairement la transition écologique de l’économie ; les cibler en conditionnant les mesures en faveur des entreprises. Elles ne porteront leurs fruits que si elles ont pour corollaires un engagement et des assurances quant à leur utilisation. C’est ça, un pacte, monsieur le ministre : c’est du donnant-donnant, du gagnant-gagnant.

Cela étant dit, il nous faut reconnaître que du message adressé par les Français en mars et en mai, quelques leçons ont été tirées.

Ces leçons tiennent en deux points. Votre texte prévoit, dès 2014, un crédit d’impôts pour les personnes dont les revenus sont inférieurs à 1,16 Smic. Il concerne ainsi des foyers qui sont entrés dans l’impôt ou ont vu leurs impôts augmenter alors que leurs revenus étaient restés stables. Cette mesure de justice montre bien que, dans cette période de réduction des déficits et de soutien aux entreprises, on peut protéger les plus modestes, et ceci, chers collègues de la droite, grâce aux recettes nouvelles de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale.

Par ailleurs, nous notons avec satisfaction l’annulation du gel des allocations logement, preuve que de la place doit être laissée au débat parlementaire, afin de garantir l’intérêt des citoyens dans chacune de nos décisions.

Cela va-t-il assez loin ? Nous ne le pensons pas. Et nous ne pouvons que regretter que le Gouvernement n’ait pas soutenu l’amendement commun à certains collègues du groupe SRC et au groupe écologiste, déposé par ma collègue Eva Sas, qui visait à amplifier et à diversifier les dispositifs d’emplois aidés, tels les emplois d’avenir, notamment en direction des jeunes diplômés qu’il est difficilement tolérable de voir rester sur le carreau.

C’est ce double message – l’urgence à accompagner et à protéger les victimes de la crise ainsi que la nécessité de cibler les interventions publiques – que nous avons voulu porter dans nos débats.

Ce message, nous continuerons de le porter dans le cycle budgétaire qui est le nôtre : je pense à la rectification de la loi de financement de la sécurité sociale. Il faudra, là, d’autres réponses du Gouvernement, car les enjeux pour la vie quotidienne des Français sont d’un autre ordre.

Nous vous l’avons dit, monsieur le ministre : nous doutons profondément de la pertinence et de l’efficacité des choix du Gouvernement qui fondent ce projet de loi de finances rectificative. Mais nous ne parions surtout pas sur son échec.

Que chacun fasse preuve d’humilité : osons dire que la gravité de la situation économique a été sous-estimée. Osons dire que les efforts et les délais nécessaires pour sortir des difficultés ont été minimisés. Osons dire que le temps des certitudes est révolu, pour tout le monde.

Pour le Gouvernement, qui doit comprendre que c’est par le débat, par les échanges internes à la majorité, que nous pourrons construire les solutions dont notre pays a besoin.

Pour l’opposition, qui ne peut se contenter d’incantations sur la baisse des dépenses, quand elle n’a jamais été capable, lorsqu’elle était au pouvoir, que de creuser la dette.

Pour les écologistes aussi : nos analyses convergent quant à la nécessité de réorienter profondément notre politique économique et fiscale et le Gouvernement ne nous rassure pas sur les moyens d’y parvenir.

Nous avons, tous, fait le pari de l’action dans la majorité.

La majorité des écologistes votera ce texte. Il est très insuffisant à nos yeux, mais il doit constituer une étape, tant par les pistes qu’il ouvre, notamment en faveur des ménages, que par les convergences qu’il a révélées dans la majorité.

Monsieur le ministre, c’est de votre responsabilité et de celle du Gouvernement de faire vivre cet esprit de responsabilité et de donner un sens au mot « majorité ». (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Le débat sur le collectif budgétaire, la semaine dernière, a été un débat de fond et de qualité, un débat sans précipitation ni contrainte. Chacun des articles et des amendements a fait l’objet d’un examen et d’un vote, sans recours à la réserve des votes, voire au vote bloqué qui entrave et appauvrit l’initiative parlementaire.

On connaît l’article 44, alinéa 3, de la Constitution : « Si le Gouvernement le demande, l’assemblée saisie se prononce par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion, en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement. » Pourtant, le droit d’amendement est une liberté fondamentale des élus. Sans lui, il n’y a pas de véritable échange entre l’exécutif et les assemblées.

M. Alain Tourret. C’est la République !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Sans lui, celles-ci n’ont plus qu’à voter pour ou contre les textes soutenus par le Gouvernement, sans pouvoir tenter de les modifier. Bref, le vote bloqué constitue une procédure sommaire, contraignante, quand elle est utilisée.

Comme l’estimait l’auteur d’un pamphlet au titre un peu rugueux paru en 1964, Le Coup d’État permanent, (Sourires)…

M. Marc Dolez. Bonne référence !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. « Cela signifie qu’un député désireux d’opposer au Gouvernement une suggestion constructive est privé du moyen d’en saisir l’Assemblée nationale et de l’amener à se prononcer ». Ce livre a été écrit, bien sûr, par François Mitterrand.

Fort heureusement, il n’y a pas eu recours à cette procédure expéditive la semaine dernière, pour l’examen du projet de loi de finances rectificative. Et c’était très bien ainsi. Sauf si l’on vénère les pratiques hégémoniques de la Ve République, sauf si l’on conçoit le Parlement comme un organe d’approbation automatique…

M. Maurice Leroy. Ce n’est pas le cas ?

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. …il paraît normal que les députés débattent réellement et se prononcent sur chacune des dispositions législatives soutenues par le Gouvernement.

Ce débat parlementaire, de lundi à jeudi derniers, a été un débat serein et sérieux. Il a contribué – comme c’est son rôle – à amender, à infléchir ce collectif budgétaire présenté par le Gouvernement.

Il faudra bien s’y faire, ou s’y refaire. La maxime de l’État ne peut plus être, comme dans les années 1960 ou 1970 : « Le Gouvernement décide, le Parlement exécute… »

Rappelons par ailleurs qu’au sein de la majorité, il y a deux groupes ou partis, certes de taille inégale, ce qui s’oublie parfois. Je remercie donc le Premier ministre et les ministres chargés de ce texte de s’en être souvenus, en dialoguant en amont sur ce texte avec notre groupe, en acceptant plusieurs de nos amendements.

J’en mentionnerai seulement trois. D’abord, la fixation à 1 200 euros, et non à 900 comme cela était initialement prévu, du niveau en dessous duquel les pensions de retraite seront exonérées du gel ; ensuite, la prolongation de l’exonération de taxe d’habitation ; enfin, la création d’un Observatoire des contreparties, chargé de suivre l’usage fait par les entreprises des allègements de charges et d’impôts. En effet, le CICE et le Pacte de responsabilité en général ne peuvent être des chèques en blanc délivrés aux entreprises. Le Président de la République l’a souligné dans sa conférence de presse du 14 janvier 2014, en déclarant : « Ces contreparties doivent être définies au plan national et déclinées par branches professionnelles. Elles porteront sur des objectifs chiffrés d’embauches, d’insertion des jeunes, de travail des seniors. Un Observatoire des contreparties sera mis en place et le Parlement y sera associé. »

Je remercie le Gouvernement d’avoir accepté la remise d’un rapport sur la création d’un tel Observatoire des contreparties, comme le demandait un amendement déposé par notre groupe.

Je terminerai en disant que nous souhaitons une certaine sélectivité dans ce dispositif d’ensemble et surtout dans le CICE qui va indistinctement à toutes les entreprises, qu’elles soient industrielles ou non, qu’elles soient exportatrices ou non, qu’elles soient largement bénéficiaires ou non.

Ainsi, la grande distribution a largement bénéficié du CICE : pour Carrefour, son impact aura été de 70 millions d’euros. Il est de plusieurs dizaines de millions d’euros pour le groupe Casino et de 44,8 millions d’euros pour Auchan, qui appartient à la famille la plus fortunée de France, et à un homme très sympathique d’ailleurs, selon le classement établi récemment par Capital.

Pour rester dans le temps qui m’est imparti, je dirai simplement que nous aurions préféré un collectif budgétaire différent. Un collectif plus attractif, moins austère. Et vous aussi sans doute… Toutefois, il ne faut pas omettre deux points.

D’une part, vous êtes tributaire des circonstances, de la nécessité de poursuivre le redressement des comptes publics. D’autre part, vous avez accepté plusieurs amendements qui infléchissent ce texte, en renforçant son équité. Il convient d’en tenir compte. Notre groupe votera donc ce collectif de juillet, mais en espérant pour octobre, pour la loi de finances initiale, d’autres avancées, d’autres progrès plus importants. Bref, en souhaitant paradoxalement que l’automne prochain soit plus lumineux que l’été actuel, en tout cas en matière budgétaire. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Nicolas Sansu. La France vient de dépasser le seuil des cinq millions de personnes privées d’emploi. Derrière la froideur des chiffres, la terrible réalité est celle de familles et de vies brisées, accablées par les difficultés.

Devant une telle situation, le Premier ministre dit refuser le fatalisme et compter « sur les entreprises de France, la baisse du coût du travail, la baisse de la fiscalité, pour inverser la tendance ».

Le Premier ministre a raison sur un point : il faut refuser le fatalisme. Mais il s’agit surtout de poser le bon diagnostic. Il est tout de même incroyable que certains débats soient proscrits jusqu’en cette assemblée même.

Car si certaines entreprises, PME et ETI notamment, peuvent souffrir dans la concurrence internationale, jamais, au grand jamais, le Gouvernement n’accepte de regarder du côté du coût du capital, de ces gâchis de la finance.

Le taux de distribution des profits est passé d’une moyenne de 30 % dans les années 1980 à plus de 50 % aujourd’hui, pour les dividendes et les intérêts. Le montant total de la fortune professionnelle des cinq cents plus riches en France s’élève à 330 milliards d’euros, en hausse de 25  % en un an !

La captation croissante des profits par les actionnaires est une des causes centrales de l’arrêt des investissements. Nous ne pouvons continuer de fermer les yeux sur cette réalité, en accusant à tort les travailleurs.

Le Medef se plaît à dépeindre notre pays comme un enfer fiscal. Mais si les PME subissent en effet des contraintes, nombre de très grandes entreprises continuent d’échapper à l’impôt par le jeu de mécanismes d’optimisation fiscale.

Je voudrais vous donner un seul exemple, monsieur le ministre : celui d’une entreprise dont la part des impôts sur les bénéfices payés en France est passé de 25 à 3 %, alors que son chiffre d’affaire global a augmenté de 27 % entre 2010 et 2013, et que les dividendes versés ont augmenté de 80 % dans la même période. Cette entreprise si peu vertueuse, qui profite de plus de 1 million de crédit d’impôt recherche, de plus de 800 000 euros de CICE, et qui paye uniquement 200 000 euros d’impôt sur les sociétés grâce à l’optimisation fiscale, c’est Radiall, l’entreprise que dirige le patron des patrons, Pierre Gattaz.

Mme Marie-George Buffet. Et il donne des leçons !

M. Nicolas Sansu. De tels exemples, destructeurs de la cohésion économique et sociale, devraient inciter l’exécutif à écouter un peu plus de l’oreille gauche et à ressentir une moindre inclination vers un capitalisme financier qui brise les hommes et les territoires.

En second lieu, nous voulons revenir sur les effets récessifs des réductions de dépenses publiques et sociales. Selon une estimation réalisée par le Trésor, reprise par notre rapporteure générale, le plan d’économies de 50 milliards annoncé en janvier dernier par le chef de l’État pourrait entraîner la destruction de 250 000 emplois ces trois prochaines années.

A titre d’exemple, je souhaiterais citer ces entreprises du BTP qui s’alarment de la baisse des dotations aux collectivités locales avec le risque encouru d’un effondrement de la commande publique. La Fédération nationale des Travaux Publics a ainsi estimé que 60 000 emplois directs risquaient d’être supprimés !

Si nous en sommes là, c’est qu’un constat s’impose : la panne de la croissance, l’INSEE tablant sur une croissance économique de seulement 0,7 % cette année. Cette panne s’explique grandement par le profond déséquilibre de la politique conduite, qui néglige l’importance d’une relance de la demande.

Vous proposez, monsieur le Premier ministre, 41 milliards de baisses d’impôts pour les entreprises mais seulement 5 milliards pour les ménages, les baisses d’impôts sur le revenu et des cotisations salariales ne faisant que compenser le gel des prestations.

Je ne peux que rappeler les propos de M. le secrétaire d’État au budget qui, parlant des baisses des prélèvements sur les entreprises, a considéré que c’était à la fois « fromage et dessert ». Oui, c’est fromage et dessert !

En tournant le dos à toute stratégie de relance, votre politique suscite l’inquiétude et si le débat s’installe aujourd’hui à l’intérieur de la gauche, c’est que votre politique est loin d’être majoritaire chez ceux qui ont élu François Hollande le 6 mai 2012.

Pire, les choix de politique économique et sociale s’appuient sur une base de plus en plus fragile chez les parlementaires, bien sûr, mais surtout chez nos concitoyens. Ils ne comprennent pas, et ils ont raison, que le Président de la République et le Gouvernement aient abandonné les promesses de campagne d’une société plus juste, plus égalitaire, plus forte.

L’honneur de la gauche, ce serait d’ouvrir un autre chemin que celui de politiques libérales surannées qui ne font que diviser nos concitoyens en appliquant des recettes qui font si mal dans d’autres pays, celles d’une Europe libérale en panne.

Tout au long de l’examen de ce collectif budgétaire, nous avons soutenu les amendements qui proposaient d’infléchir votre politique, qu’il s’agisse de la proposition d’encourager l’apprentissage en faisant bénéficier les entreprises d’une réduction d’impôt ou de la restitution du CICE par les entreprises quand son utilisation n’est pas conforme aux objectifs poursuivis.

Dans le même sens, nous avons formulé un certain nombre de propositions visant à promouvoir une nouvelle architecture fiscale plus juste et plus efficace. Ces propositions ont été balayées et, pourtant, le débat est essentiel.

Je reconnais toutefois, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le ministre, madame la rapporteure générale, votre souci de faire vivre un dialogue qui, pour le bien du pays, devra être renoué.

Ce collectif budgétaire, loin d’ouvrir une brèche dans le carcan de l’austérité, aggrave à notre sens la situation économique actuelle.

Les députés du Front de gauche, qui souhaitent porter une voix différente sur la politique et sociale, voteront donc contre ce PLFR. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. Sur l’ensemble du projet de loi, le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Dominique Lefebvre, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Dominique Lefebvre. Faire preuve de courage, de constance et de cohérence dans nos choix pour retrouver la confiance et la croissance, toutes deux indispensables pour relever le défi de l’emploi et de la modernisation du pays, c’est ce à quoi, au nom du Groupe socialiste, républicain et citoyen, je nous avais appelés collectivement la semaine dernière lorsque le débat sur le présent projet de loi de finances rectificative s’est engagé.

Le texte que nous allons adopter dans quelques instants constitue, monsieur le Premier ministre – et je tiens à vous en remercier – l’aboutissement d’un dialogue approfondi et fructueux entre la majorité parlementaire et le Gouvernement.

Il traduit la cohérence et la constance de nos choix de politique économique et budgétaire pour soutenir l’activité économique par des mesures de pouvoir d’achat en faveur de nos concitoyens les plus modestes et pour redonner de la compétitivité et du souffle à nos entreprises tout en poursuivant le redressement de nos finances publiques.

Chacune et chacun connaît l’importance et la signification des votes qui vont intervenir, aujourd’hui sur le PLFR, la semaine prochaine sur le PLFRSS, dont nous avons commencé la discussion hier soir.

Il s’agit de mettre en œuvre le Pacte de responsabilité et de solidarité sur lequel notre Assemblée s’est déjà prononcée à deux reprises, les 8 et 29 avril derniers. Alors, une majorité s’est déclarée, et pas de circonstance, et pas au détour d’une séance de nuit.

L’urgence de la situation économique et sociale exige l’accélération et l’approfondissement des réformes ainsi qu’une mise en œuvre rapide de ce Pacte de responsabilité et de solidarité dont le succès repose et reposera sur la confiance.

Celle-ci ne peut être unilatérale et doit s’appuyer sur des engagements réciproques des acteurs parties prenantes : le Gouvernement et la majorité parlementaire, les acteurs économiques, les partenaires sociaux dans les branches et dans les entreprises.

Raison de plus, ici, aujourd’hui, pour amorcer ce cycle vertueux de la confiance, pour tenir nos engagements et mettre en œuvre les orientations que nous avons approuvées au mois d’avril dernier.

Ce message de confiance, nous l’adressons aujourd’hui aux ménages qui attendent une baisse des prélèvements obligatoires, davantage de justice sociale et fiscale, et qui veulent que notre modèle de protection sociale soit sauvegardé.

Les mesures contenues dans le PLFR – la réduction d’impôt qui interviendra à l’automne et permettra à 1,9 million de ménages de sortir de l’impôt sur le revenu, l’exonération de la taxe d’habitation pour celles et ceux qui en étaient déjà exonérés en 2013 – comme celle que nous voterons la semaine prochaine visant à alléger les cotisations salariales jusqu’à 1,3 SMIC, ainsi que notre engagement de poursuivre la baisse des prélèvements obligatoires sur les ménages en 2015 avec une priorité accordée à la réforme du bas de barème de l’impôt sur le revenu traduisent ce message de confiance en direction des ménages, pour un total de 3,5 milliards.

Le maintien de la revalorisation des aides aux logements va dans le même sens, même si nous savons que leur réforme est indispensable à bref délai.

Ce message de confiance, nous l’adressons également aux acteurs économiques qui, pour investir, innover, embaucher ont besoin de visibilité et de stabilité, tout comme nous l’adressons aux partenaires sociaux à la veille de la grande conférence sociale de ce début du mois de juillet.

C’est le sens des mesures sans précédent d’allégements fiscaux et sociaux en direction des entreprises pour leur permettre de retrouver la compétitivité que nous prendrons dans le cadre du PLFRSS et qui, comme le CICE – dont nous avons longuement débattu à nouveau mais dont nous avons confirmé la logique – doivent permettre un renforcement du dialogue social dans les branches et les entreprises.

C’est un message de confiance vis-à-vis de nos entreprises. Elles doivent le prendre comme tel plutôt que de s’inquiéter des tentatives de remise en question de mesures qui ont été largement rejetées par notre Assemblée durant nos débats. Elles doivent s’engager dans un dialogue social approfondi pour se moderniser et retrouver la compétitivité nécessaire. Avec ce texte, elles en auront les moyens.

Ce projet, par ailleurs, contient les mesures propres à maîtriser le déficit public avec un effort d’économies d’1,6 milliard d’euros et un objectif de déficit public toujours fixé à 3,8% du PIB malgré une conjoncture encore trop peu favorable.

Nous confirmons donc notre choix d’une politique économique qui marche sur ses deux pieds : le soutien à la demande et le soutien à l’offre. C’est bien ce que nous faisons et j’aimerais que personne, dans cet hémicycle, ne l’oublie.

Il ne sert à rien d’opposer politique de l’offre et politique de la demande. Dans le contexte actuel, il serait dangereux et irresponsable de dénier les difficultés que rencontrent nos entreprises et la nécessité de leur donner de l’air. Il serait dangereux et irresponsable de ne pas chercher à rassembler et, pour cela, de refuser d’entrer dans la dynamique du dialogue social dans les branches et dans les entreprises, un dialogue social indispensable à leur modernisation et à celle de notre économie.

Enfin, il serait dangereux de s’installer dans des postures de défiance qui appelleraient la défiance et l’échec.

C’est tout l’enjeu de notre vote sur ce texte aujourd’hui, un vote de confiance pour redresser le pays et lui donner un avenir ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Hervé Mariton. Monsieur le Premier ministre, vous le reconnaissez si bien : vous êtes le Premier ministre d’un Gouvernement qui n’avance pas. Pendant ce temps-là, la France, elle recule, avec 500 000 chômeurs supplémentaires en deux ans, des déficits publics qui, en 2014, représenteront encore 4 % du PIB, une dette qui dépassera les 2 000 milliards d’euros, une croissance atone – 0,7 % en 2014, près du tiers de la croissance allemande et du quart de la croissance au Royaume-Uni.

Alors, monsieur le Premier ministre, vous nous avez dit : Pacte de responsabilité !

Regardons de plus près.

Vous parlez d’allègements de charges. Nos collègues en ont débattu hier dans le cadre de la discussion du PLFRSS. Elles ne sont pas compensées ! Les baisses de dépenses dont vous parlez – les ministres aussi, souvent – ne sont pas au rendez-vous. Il n’y a pas de quoi se flatter des maigres baisses existantes, monsieur le Premier ministre, qui sont dues à la baisse des taux d’intérêt…

M. Philippe Armand Martin. Eh oui !

M. Hervé Mariton. …dont nous profitons provisoirement mais qui peut un jour se retourner gravement contre nous.

Vous-mêmes, vous n’êtes pas au rendez-vous.

Nous l’avons dit hier : nous voterions les articles 1, 2 et 3 du PLFRSS visant à baisser les charges. Vous, pas même ! Le groupe majoritaire n’est même pas au rendez-vous du Pacte de responsabilité !

M. Philippe Armand Martin. C’est vrai !

M. Hervé Mariton. Le PLFR, quant à lui, constitue une double imposture.

Une imposture, tout d’abord, à l’égard des ménages qui – vous le savez, préparez-vous pour l’automne – subiront de nouveau une augmentation massive de l’impôt sur le revenu – en particulier les classes moyennes, avec la mise en cause du quotient familial notamment.

Les quelques mesures que vous avez proposées pour les Français les plus modestes, vous le savez, ne sont même pas cohérentes et s’opposent au travail de qualité préparé par un membre de votre majorité, notre collègue Lefebvre. Vous commandez un travail à un parlementaire de votre majorité, vous n’en tenez pas compte, vous faites le contraire, et vous ajoutez les incohérences aux incohérences !

Imposture, ensuite, à l’égard des entreprises. Vous le savez, monsieur le Premier ministre, et sûrement n’en êtes-vous pas fier : aucune mesure ne leur sera favorable dans ce collectif budgétaire.

Je compte une mesure : le prolongement de la surtaxe exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés. Exceptionnelle ? Tu parles ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Prolongement de la surtaxe ? Sûrement !

Où sont les mesures de baisse à moyen et long terme de l’impôt sur les sociétés que vous aviez annoncées dans le cadre du Pacte de responsabilité ? Pas dans le collectif budgétaire ! Elles n’y sont pas parce que vous avez peur de toute une partie de votre majorité.

Aussi, les entreprises de notre pays ne vous croient pas, ne peuvent pas vous faire confiance car si vous n’avez pas le courage d’introduire ces baisses d’impôt dans ce collectif, par quel miracle auriez-vous le courage de les proposer dans quelques semaines ou dans quelques mois ?

Lorsque vous ne tenez pas même vos promesses quelques semaines après que vous les avez faites, comment voulez-vous que les entreprises et le pays vous croient ?

Vous avez aussi proposé la suppression d’un certain nombre de petits impôts qui coûtent aux entreprises et leur compliquent la vie. Chiche ! Mais ces mesures ne figurent pas davantage dans votre projet.

Nous le constatons, monsieur le Premier ministre : vous n’avez pas la confiance de votre majorité, vous n’avez pas notre confiance, vous n’avez pas la confiance des Français !

Alors, oui, nous voulons une autre politique, avec de réelles baisses d’impôts, avec de réelles économies, permettant ainsi une réelle réduction des déficits dont souffre notre pays !

Nous voulons de réelles réformes structurelles et non pas des propos indignes tenus par le ministre de l’économie qui, se moquant des Français, des entreprises, des salariés, considère qu’il suffirait d’écrire le code du travail en plus petits caractères pour en réduire la complexité !

Alors, monsieur le Premier ministre, nous sommes confrontés à un problème de confiance dans notre pays, une confiance qu’aujourd’hui vous ne méritez pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

M. Charles de Courson. Les députés du groupe UDI voteront contre ce collectif budgétaire pour 2014 (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) alors même que nous avions affirmé être ouverts au dialogue dès l’annonce par le Président de la République, le 31 décembre 2013, du lancement du Pacte de responsabilité et de solidarité qui reposait sur une idée simple : baisser fortement les charges fiscales et sociales des entreprises et financer la baisse des recettes par une baisse des dépenses publiques.

A cette occasion, Jean-Louis Borloo avait annoncé que le groupe UDI pourrait soutenir ce Pacte, à condition qu’il permette de tourner définitivement la page des deux premières années du quinquennat en apportant une réponse puissante à l’urgent problème du chômage.

Nous avions exprimé la même exigence bienveillante lors de votre discours de politique générale, monsieur le Premier ministre, le 8 avril 2014, et lors de la présentation devant l’Assemblée nationale du programme de stabilité budgétaire pour 2015-2017, le 29 avril 2014, en nous abstenant majoritairement.

Plus de six mois après vos annonces, monsieur le Premier ministre, force est de constater que les mesures gouvernementales traduites dans le collectif budgétaire et le collectif social ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Alors que le pacte de responsabilité et de solidarité a été annoncé le 31 décembre 2013, le Gouvernement ne cesse de semer le doute sur ses véritables intentions. Le groupe UDI déplore ainsi que ce projet de loi, comme celui relatif au financement de la Sécurité sociale, ne donne pas une traduction complète des mesures annoncées dans le pacte de responsabilité, à l’exception, pour ce PLFR, d’une mesure concernant l’impôt sur le revenu des ménages les plus modestes.

Sans accélération de ce calendrier, une année de plus aura été perdue dans la bataille pour l’emploi, alors même que le drame du chômage continue de frapper, jour après jour, les Françaises et les Français. En outre, et malgré les annonces répétées du Président de la République, puis de vous-même, monsieur le Premier ministre, les collectifs présentés à la représentation nationale n’offrent aucune perspective au-delà de l’année 2015. Le Gouvernement, en refusant de concrétiser ce qu’il avait annoncé il y a maintenant six mois, avoue lui-même qu’il ne croit pas en son pacte de responsabilité. Cette attitude sème le doute auprès des ménages, comme des entreprises françaises : les entrepreneurs ne croient pas en vos promesses, comme en témoigne la tribune publiée ce week-end par huit organisations patronales dans le Journal du dimanche.

Au-delà du matraquage fiscal sans précédent mis en place depuis deux ans, votre politique et vos reniements ont cassé la confiance. La pause fiscale promise par le Président de la République n’a finalement été qu’un leurre : face aux effets catastrophiques de la politique du Gouvernement, Eurostat a remis à la France la médaille de bronze de la fiscalité la plus élevée en Europe. Le groupe UDI vous demande solennellement d’inscrire dans la loi de finances rectificative et dans la loi de financement rectificative de la Sécurité sociale l’ensemble des mesures de baisse des charges et de baisse des prélèvements obligatoires annoncées, en traçant une perspective claire jusqu’en 2017. Il y va de la crédibilité de votre politique et du retour de la confiance, donc de la croissance, dans notre pays.

Par ailleurs, il est à présent clair que vous n’avez pas la majorité de votre politique, monsieur le Premier ministre ! Nous avions espéré que vous prendriez la mesure de la situation de notre pays et que vous répondriez à l’urgence économique et sociale sans tarder. Force est de constater qu’il n’en est rien et que, face à une majorité qui se fissure, le Gouvernement n’ose plus avancer, et parfois même recule. Le maintien du CICE, auquel s’ajoute la timide baisse des charges salariales et patronales, forme un dispositif trop complexe, donc insuffisamment puissant, qui ne permettra pas de créer le vrai choc de compétitivité dont notre pays a tant besoin. En outre, les 50 milliards d’économies promises par le Gouvernement pour réduire les déficits et financer les mesures du pacte sont aujourd’hui largement non documentées – la Cour des comptes estime à 30 milliards les économies hypothétiques.

Sur le front des recettes, il a manqué 14,6 milliards d’euros au budget de l’État en 2013 et la situation se répète en 2014, avec des pertes fiscales qui, par rapport à vos prévisions, s’élèvent déjà à 5,3 milliards d’euros dans ce collectif, auxquels s’ajouteront 3 ou 4 milliards supplémentaires en exécution, d’après le rapport de la Cour des comptes.

Les conséquences de ces errements sont dramatiques : alors que le candidat Hollande promettait de ramener le déficit public à 3 % du produit intérieur brut dès 2013, ce déficit a atteint 4,3 % en 2013 et vous le laissez filer, puisque vous constatez déjà un dérapage de 1,4 milliard d’euros dans ce projet de loi de finances rectificative. L’objectif d’un déficit public de 3 % fixé par Bruxelles pour 2015 est d’ores et déjà hors d’atteinte. Quant à la dette, elle dépassera 2 000 milliards d’euros à la fin de l’année 2014 et l’on dira de vous, monsieur le ministre de l’économie, que vous êtes « monsieur 2 000 milliards ». C’est la crédibilité de la France que vous mettez à mal !

Mes chers collègues, le groupe UDI espérait que le pacte de responsabilité et de solidarité constituerait une opportunité de redressement pour notre pays. Malgré la faiblesse initiale de ce projet de loi, nous avons fait des propositions constructives tout au long du débat, afin que ce pacte marque un véritable tournant économique et social, mais nous n’avons pas été entendus. Nous avons également demandé au Gouvernement d’engager enfin les grandes réformes structurelles tant attendues par le pays depuis maintenant presque trente ans : réforme de l’État et des collectivités territoriales, réforme de la protection sociale et de la santé, réforme du paritarisme, transition écologique, valorisation de la ressource humaine de notre nation, autant de chantiers sur lesquels la majorité actuelle piétine depuis deux ans, alors qu’ils doivent être engagés sans délai.

Malheureusement, le Gouvernement ne nous a pas entendus. C’est pour cette raison que nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2014.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants553
Nombre de suffrages exprimés539
Majorité absolue270
Pour l’adoption307
contre232

(Le projet de loi est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais d’abord remercier la majorité pour son soutien franc, loyal et massif à un texte qui signe en effet la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Ce vote confirme les orientations du Gouvernement. Et j’ajoute, contrairement à ce que j’ai pu entendre il y a un instant, qu’il s’agit là d’un vote de courage, car le courage consiste à assumer ses responsabilités, à gouverner, à faire des choix pour le redressement du pays et à engager des réformes, notamment la réforme des finances de l’État et la réforme territoriale. Permettez-moi, à ce propos, de me réjouir de la décision du Conseil constitutionnel concernant l’étude d’impact du projet de loi de réforme territoriale : le texte est de nouveau au Sénat et la réforme des régions aura bien lieu, car elle est nécessaire pour le pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.)

Faire preuve de courage, monsieur de Courson, c’est voter pour redresser le pays et pour mettre en œuvre des réformes. Faire preuve de courage, c’est soutenir les entreprises, baisser le coût du travail, soutenir les ménages les plus modestes, baisser la fiscalité et réduire nos déficits.

Je remercie à nouveau la majorité d’être au rendez-vous pour réformer avec courage, cohésion et constance. (Mêmes mouvements.)

(M. Denis Baupin remplace M. Claude Bartolone au fauteuil de la présidence.)

Présidence de M. Denis Baupin

vice-président
3

Projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2014 (suite)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2014 (nos 2044, 2061, 2058).

Hier soir, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’article 2.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour un rappel au règlement.

M. Marc Le Fur. Je souhaite, monsieur le président, faire un rappel au règlement relatif à l’organisation de nos travaux. Hier soir, nous avons été confrontés à une situation totalement inédite, puisque le Gouvernement a demandé l’application du fameux article 96 de notre règlement, qui n’est autre que la traduction de l’article 44, alinéa 3 de notre Constitution.

Depuis cette demande du Gouvernement, nous débattons sans jamais voter ! Nous évoquons des articles et des amendements sans jamais passer au vote ! Il s’agit là d’une situation totalement inédite ! Si le Gouvernement a recouru hier à un tel artifice, ce n’est pas parce que la majorité était incertaine quant à ses effectifs – la majorité était bien là ! –, mais parce qu’elle était incertaine quant à sa composition.

M. Philippe Gosselin. Il n’y a plus de majorité !

M. Marc Le Fur. Il n’y a plus un, mais deux groupes SRC, deux groupes extrêmement clivés, et il faut que la France entière le sache, puisque ce sont deux politiques économiques qui nous sont aujourd’hui proposées par les socialistes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Monsieur Le Fur, êtes-vous sûr qu’il s’agit bien d’un rappel au règlement ?

M. Marc Le Fur. Il s’agit bien d’un rappel au règlement, car aujourd’hui nous ne votons plus ! Et l’on nous imposera bientôt, si cette situation perdure, un vote bloqué sur l’ensemble des amendements et des articles, alors que les positions des uns et des autres, et en particulier celle de notre groupe, peuvent être très différentes selon les amendements et les articles.

Je souhaiterais, monsieur le président, que le Gouvernement nous dise très clairement s’il entend poursuivre nos débats de cette manière, s’il entend nous interdire de voter, s’il entend, enfin, nous interdire de faire notre devoir, c’est-à-dire voter au nom du peuple ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Levée de la réserve des votes

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Le Gouvernement souhaite lever la réserve des votes annoncée hier soir concernant l’article 1er, les amendements à l’article 1er et les amendements portant article additionnel après l’article 1er. Vous voyez, monsieur Le Fur, que vous auriez pu économiser votre voix…

M. le président. Le Gouvernement ayant indiqué qu’il levait la réserve des votes annoncée au cours de la séance d’hier soir… (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Gosselin. La négociation a donc porté ses fruits !

M. le président. …je vais mettre successivement aux voix, en rappelant à chaque fois l’avis de la commission et du Gouvernement, les amendements à l’article 1er, l’article 1er et les amendements portant article additionnel après l’article 1er. Nous reprendrons ensuite le cours normal de la discussion. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Marc Le Fur. Nous n’avons même pas les amendements sous les yeux !

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement. (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Jean Glavany. La procédure de vote est engagée ! Il ne peut pas y avoir de rappel au règlement !

M. Jean-Paul Bacquet. Qu’est ce que c’est que cette histoire ? Quelle incompétence !

M. le président. La parole est au président Jacob.

M. Christian Jacob. Merci, monsieur le président. Hier soir, nous avons eu un débat pour le moins confus, puisque, comme cela a été rappelé à l’instant, tous les amendements ont été réservés. Et à présent, vous voulez que nous procédions au vote. Je me félicite que le Gouvernement ait trouvé un accord avec sa majorité. Je ne sais pas combien de temps il va tenir, sans doute quelques minutes. (Mêmes mouvements.) Mais pour passer au vote dans des conditions normales, il faut au moins, monsieur le président, que nous ayons les amendements sous les yeux, ou que vous en donniez lecture, pour que nous sachions de quoi on parle.

Mme Frédérique Massat. Il fallait être là hier !

M. Christian Jacob. Nous ne pouvons pas voter sans avoir les amendements sous les yeux ! C’est impossible ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Comme je découvre cette situation, je vais suspendre la séance pour quelques minutes, afin que les amendements soient mis à la disposition de tous.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-sept heures dix.)

M. le président. La séance est reprise. (Des liasses d’amendements sont distribuées aux députés.)

Article 1er (suite)

M. Patrick Hetzel. Je demande la parole pour un rappel au règlement !

M. le président. Avant d’en venir aux votes…

M. Patrick Hetzel. Rappel au règlement !

M. le président. Monsieur Hetzel, me permettrez-vous de présider ? Avant d’en venir aux votes sur les différents amendements, je vous indique que sur le vote de l’article 1er, je suis saisi par le groupe UMP d’une demande de scrutin public. Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour un rappel au règlement.

M. Patrick Hetzel. Monsieur le président, je n’ai toujours pas à ma disposition le texte des amendements ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mes chers collègues de la majorité, au lieu de vociférer, il serait tout de même préférable que vous respectiez les droits de l’ensemble des parlementaires. Votre attitude est scandaleuse et elle ne vous honore absolument pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Comme vous le pouvez le constater, j’ai veillé à ce que l’on prenne le temps de faire imprimer l’ensemble des amendements et sous-amendements pour que le vote puisse se dérouler dans de bonnes conditions. Nous en venons donc au vote de ces amendements. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Article 1er (suite)

M. le président. L’amendement n35 rectifié, présenté par la commission, fait l’objet d’un sous-amendement du Gouvernement, n221, qui a reçu un avis favorable de la commission.

Je mets aux voix le sous-amendement n221. (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Nous n’avons pas ce sous-amendement ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC, exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. Ce sous-amendement figure dans la liasse qui vous a été transmise ! (Vives protestations sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Un député du groupe UMP. Ils ne savent même pas sur quoi ils votent !

M. le président. Le sous-amendement n221 ne figure pas dans la liasse ? (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP, exclamations sur tous les bancs.)

M. Sébastien Denaja. Présidez, monsieur le président ! (Le tumulte se poursuit.)

M. Patrick Mennucci. Faites venir M. Bartolone !

M. le président. Calmez-vous chers collègues, les liasses d’amendements et de sous-amendements vont être distribuées, chacun sait comment se dérouleront les scrutins, nous devrions donc pouvoir procéder dans la sérénité. On m’avait indiqué que le sous-amendement n221 était dans la liasse qui vient de vous être distribuée, mais il semble y avoir eu un problème. Je vous entends, et je ne remets pas en question la bonne foi de quiconque. Nous allons faire en sorte que les choses se passent dans l’ordre. (Le tumulte se poursuit tandis que de nouvelles liasses d’amendements sont distribuées aux députés.)

M. Marc Le Fur. Rappel au règlement !

M. Jean Glavany. Le Fur, couché !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Tout le monde est en train de vociférer. Si nous travaillons dans ces conditions, c’est parce qu’hier soir, le Gouvernement nous a mis dans cette situation… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Vives exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Nous étions très peu nombreux hier soir. Aujourd’hui, les débats reprennent, et c’est très bien : nous devons donc pouvoir voter sur les amendements examinés hier, à condition que nous les ayons en main. On ne peut pas voter sans rien !

Il faudrait que chacun se calme et que nos débats retrouvent un peu de sérénité. Sinon, nous n’avancerons pas.

M. Sébastien Denaja. Que le président préside !

M. le président. Monsieur Door, votre appel au calme doit être entendu sur tous les bancs.

La parole est à M. Bruno Le Roux. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Bruno Le Roux. Mes chers collègues, il faut laisser au président de séance le soin d’organiser nos travaux. Ce problème ne dépend ni de la majorité, ni de l’opposition : je vous appelle donc à vous abstenir de certains commentaires.

J’ai entendu un député du groupe UMP nous dire : « Vous ne savez même pas sur quoi vous votez ! »

Plusieurs députés du groupe UMP. C’est vrai !

M. Bruno Le Roux. À la différence des groupes de l’opposition, nous étions là hier soir pour débattre de chacun des amendements. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Gosselin. Vous débattiez entre vous !

M. Bruno Le Roux. Nous connaissons le contenu de ces amendements. Aujourd’hui, nous passons au vote. (Exclamations continues sur les bancs du groupe UMP.)

M. Julien Aubert et M. Patrick Hetzel. Godillots !

M. Bruno Le Roux. Le vote sur le projet de loi de finances rectificative a montré que le groupe SRC et la majorité étaient pleinement mobilisés. Permettez-moi de vous rappeler que, dans l’histoire récente de notre assemblée, le seul groupe qui s’est divisé en deux est, jusqu’à preuve du contraire, le groupe UMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Le sous-amendement n221 a-t-il été distribué à tout le monde ? On me fait signe que oui.

Pour que les choses soient claires, je rappelle que le sous-amendement n221, présenté par le Gouvernement, a reçu un avis favorable de la commission.

(Le sous-amendement n221 est adopté.)

(L’amendement n35, modifié, est adopté.)

M. le président. L’amendement n115 a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement.

(L’amendement n115 est adopté.)

M. le président. L’amendement n82 a été retiré.

M. Christian Jacob. Mme Berger a battu en retraite !

(L’amendement n82 est retiré.)

M. le président. L’amendement n95 a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement.

(L’amendement n95 est adopté.)

M. le président. L’amendement n55 rectifié, déposé par M. Vercamer et d’autres membres du groupe UDI, a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement. Qui est pour ? (Exclamations sur divers bancs.)

De nombreux députés UMP. Il est adopté ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. Excusez-moi, j’ai fait une erreur : l’amendement n55 rectifié a reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement. (Tumulte et claquements de pupitres.)

M. Sébastien Denaja M. Matthias Fekl et M. Patrick Mennucci. Bartolone ! Bartolone !

(L’amendement n55 rectifié n’est pas adopté.)

M. Christian Jacob et M. Philippe Gosselin. Rappel au règlement !

M. le président. Nous en venons au scrutin public sur l’article 1er. (Vives exclamations et quelques claquements de pupitre sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. Marc Le Fur. Le président Jacob demande la parole pour un rappel au règlement !

M. François Loncle. Ça suffit ! L’organisation de la séance est lamentable !

M. Christian Hutin. Tout cela n’est pas très sérieux, monsieur le président !

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

M. Christian Jacob. Ce rappel au règlement porte sur le bon déroulement de nos séances. Celle d’hier soir était déjà inédite. Mais cet après-midi, monsieur le président, vous êtes revenu sur un vote qui était acquis. C’est du jamais vu ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Sur quelle base avez-vous agi ? Qu’est-ce qui vous autorise, monsieur le président, à faire voter deux fois le même amendement parce que le premier vote ne vous convenait pas ? Ce n’est pas acceptable : on ne vote pas deux fois sur le même amendement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean Glavany. Il n’y a eu qu’un seul vote ! La première mise aux voix a été interrompue !

M. le président. Monsieur Jacob, je crois me souvenir que, sur le sous-amendement n221, vous avez vous-même souhaité interrompre un vote.

Sur l’amendement n55 rectifié, j’ai reconnu mon erreur. (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.) Le vote n’était pas acquis, puisqu’il n’était pas terminé : j’avais demandé qui était pour, mais pas qui était contre.

La parole est à M. Noël Mamère, pour un rappel au règlement.

M. Noël Mamère. Monsieur le président, afin d’examiner ces amendements dans la sérénité, je vous propose de suspendre la séance pour dix minutes.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Une minute devrait suffire !

M. Noël Mamère. Je déplore l’attitude de nos amis de la majorité (Protestations sur plusieurs bancs du groupe SRC), qui critiquent le président de séance alors qu’il est obligé de présider dans des conditions absolument insupportables. Pour apaiser nos débats, je demande, au nom du groupe écologiste, une suspension de séance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Dominique Baert. Non, pas maintenant ! Après le vote de l’article 1er !

M. Jean-François Lamour. Ce n’est plus possible, monsieur le président : vous avez déjà annoncé le vote !

M. le président. Sauf erreur de ma part, monsieur Mamère, vous n’avez pas la délégation du président de votre groupe pour demander une suspension de séance. (Exclamations.) C’est M. Roumegas qui détient cette délégation.

M. Jean-François Lamour. Ce sont vraiment des pieds nickelés !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Louis Roumegas. De toute évidence, il y a eu une erreur dans le rappel des avis exprimés hier par la commission et le Gouvernement. Mais si nous sommes dans cette situation, c’est à cause de la procédure imposée par le Gouvernement,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Eh oui !

M. Jean-Louis Roumegas. …que nous avons dénoncée hier soir, et qui ne peut conduire qu’au trouble et à la confusion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Gosselin. Quel désaveu cinglant !

M. Jean-Louis Roumegas. Afin que tout le monde reprenne ses esprits et que le débat ait lieu dans de bonnes conditions, nous demandons une suspension de séance de cinq minutes.

M. le président. Avant de suspendre la séance, je donne la parole à M. Philippe Vigier, pour un rappel au règlement.

M. Philippe Vigier. Le désordre auquel nous assistons est lié à la procédure d’examen des amendements que nous avons dénoncée hier soir. Certains collègues ont affirmé que je n’étais pas là. C’est faux : j’étais présent !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Pas toujours !

M. Philippe Vigier. Les conditions dans lesquelles nous avons travaillé hier soir sont inadmissibles.

Monsieur le président, il vient de se passer quelque chose de grave. Vous avez mis aux voix un amendement de Francis Vercamer avec avis favorable de la commission, avez-vous dit. Des bras se sont levés pour l’adopter : la majorité était incontestable. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Au nom de quoi peut-on, dans cet hémicycle, voter deux fois de suite le même amendement ?

Je vous demande donc, monsieur le président, une suspension de séance de dix minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour un rappel au règlement.

M. Francis Vercamer. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 58-1 de notre règlement.

Je veux rappeler à l’ensemble des groupes que notre amendement n55 rectifié n’est pas anodin puisqu’il s’agit de l’amendement sur le pouvoir d’achat des Français ! Il tend à avancer au mois de septembre la baisse des cotisations sociales sur les salaires, ce qui entraînait immédiatement l’augmentation du pouvoir d’achat.

M. Bernard Roman. Ce n’est pas un rappel au règlement.

M. Francis Vercamer. Pour ma part, monsieur le président, en dépit de l’excellence de votre présidence, j’ai observé qu’une grande majorité s’est prononcée en faveur de l’avancement de la date de la mise en œuvre de cette mesure d’amélioration du pouvoir d’achat des Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Revenir en arrière est une gifle infligée à l’ensemble de ces Français qui pourrait bénéficier de la mesure.

M. Philippe Gosselin. Très bien.

M. Bernard Roman. Ce n’est pas un rappel au règlement.

M. Francis Vercamer. Deuxième remarque. Seul le Gouvernement peut demander une deuxième délibération. À partir du moment où il a été procédé au vote après que les avis ont été demandés,…

M. Alain Fauré. Non !

M. Francis Vercamer. …le vote était acquis, et seul le Gouvernement pouvait demander une deuxième délibération. Pour moi, l’amendement a été voté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Non ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. Philippe Vigier. Oui.

M. Philippe Gosselin. Le Gouvernement gouverne ou non ?

M. Francis Vercamer. Si vous persistez à prétendre le contraire, je demanderai que la Conférence des présidents soit réunie car une telle attitude revient à bafouer les droits du Parlement. Une grande majorité avait voté en connaissance de cause,…

M. Philippe Vitel. Il suffit de regarder la vidéo.

M. Philippe Gosselin. En replay !

M. Francis Vercamer. …les parlementaires socialistes de la majorité s’étant inquiétés des amendements qui avaient été discutés hier soir. Je rappelle que c’est le Gouvernement, socialiste qui a demandé la réserve des votes. Je pense que les députés socialistes et le président Le Roux qui était présent hier soir savaient de quoi il s’agissait.

M. Bruno Le Roux. Oui.

M. Francis Vercamer. Vous étiez en effet dans l’hémicycle et j’avais fait observer que dans mon groupe nous étions tous d’accord, alors que tel n’était pas le cas parmi vous. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

Je demande donc la réunion de la Conférence des présidents.

M. le président. Veuillez, chers collègues, accepter mes excuses pour mon erreur de tout à l’heure concernant l’annonce d’un vote. Pour éviter toute mauvaise interprétation, je tiens à rappeler – et je l’ai vérifié – qu’il y a eu un début de vote, mais que le vote n’a pas été acquis. Nous avons voté et ensuite, j’ai annoncé que l’amendement n’avait pas été adopté. Nous pouvons donc passer à l’article 1er.

M. Philippe Gosselin et M. Philippe Vitel. Non !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door. Pour une explication de vote sur l’article ?

M. Jean-Pierre Door. Il faut retrouver un peu de sérénité. Je veux commencer par dire à M. Le Roux, qui m’a interpellé tout à l’heure, que j’étais dans l’hémicycle jusqu’à une heure du matin. Vous ne pouvez donc pas dire que nous étions absents. Or vous, je ne vous ai pas vu jusqu’au bout de la séance.

S’agissant de l’article 1er relatif à l’allègement des cotisations salariales, on ne peut que constater que l’on a perdu beaucoup de temps depuis plus de deux ans puisque le Gouvernement a supprimé la TVA anti-délocalisation et que l’on va en perdre encore puisque vous refusez l’amendement de l’UDI qui tendait à avancer à septembre 2014 plutôt qu’en janvier 2015 la mise en œuvre des baisses des charges qui pèsent sur les salaires. Bref, on perd toujours du temps. Or les entreprises attendent ces mesures et nous voulons les soutenir.

M. René Rouquet. Ce n’est pas un rappel au règlement.

M. Jean-Pierre Door. Le groupe UMP votera l’article 1er bien que le Gouvernement soit toujours dans le flou intégral. On ne vous entend pas, monsieur le secrétaire d’État, sur le financement de la compensation des allègements de cotisations sociales, nous vous le répéterons régulièrement. Mais sachez néanmoins que nous voterons l’article 1er. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Je ne demande pas grand-chose, monsieur le président. Je veux seulement savoir si oui ou non cet amendement a été voté.

Plusieurs députés du groupe SRC. Non !

Plusieurs députés du groupe UMP. Si !

M. Bruno Le Roux. Écoutez le président !

M. Philippe Vigier. Tout le monde a pu constater qu’il l’a été. Mes chers collègues, avec cet amendement, on améliore le pouvoir d’achat des Français et la compétitivité des entreprises. C’est votre conscience qui vous a guidés à voter en faveur de cet amendement ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Soyez en paix avec votre conscience. Nous vous y aidons !

Monsieur le président, je vous demande que l’on vérifie les opérations de vote avec la vidéo. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Gosselin. Très bien. En replay.

M. le président. Vous pourrez en parler lors de la Conférence des présidents. Vérification a été faite et j’ai annoncé de façon très claire que cet amendement n’a pas été adopté. La sincérité du scrutin ne fait pas de doute.

Article 1er (suite)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants187
Nombre de suffrages exprimés185
Majorité absolue93
Pour l’adoption182
contre3

(L’article 1er, amendé, est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Après l’article 1er

M. le président. Nous en venons à deux amendements identiques, n138 rectifié et n190.

Sur ces amendements je suis par les groupes UMP, UDI et écologiste d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Je rappelle que ces amendements ont reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement. Je les mets aux voix.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants188
Nombre de suffrages exprimés188
Majorité absolue95
Pour l’adoption34
contre154

(Les amendements identiques nos 138 rectifié et 190 ne sont pas adoptés.)

M. Christian Jacob. Les quarante et un sont trente-quatre !

M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n54 qui a reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

(L’amendement n54 n’est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à l’amendement n48, qui a reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

(L’amendement n48 n’est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à l’amendement n4.

L’amendement n16 est identique. La commission et le Gouvernement ont donné un avis défavorable.

(Les amendements identiques nos 4 et 16 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n102.

(L’amendement n102, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Nous pouvons donc reprendre le cours de nos travaux avec l’examen de l’article 2.

Article 2

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 2.

La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Je suis très heureuse que nous soyons sortis de la confusion qui a régné hier soir et que nous soyons « débâillonnés » !

L’article 2 prévoit une réduction du coût du travail pour les salaires inférieurs à 1,6 SMIC ainsi que la réduction des cotisations familiales des travailleurs indépendants. Une fois de plus, quel revirement !

La seconde loi de finances rectificative du 16 août 2012 avait supprimé l’allègement programmé des cotisations patronales d’allocations familiales et de ses incidences sur le calcul de la réduction Fillon. Corrélativement à la remise en cause de la TVA sociale, le dispositif d’allègement des cotisations patronales d’allocations familiales qui avait été programmé pour entrer en vigueur à compter du 1eroctobre 2012 a été abrogé par votre majorité. Aujourd’hui, avec cet article, les cotisations d’allocations familiales sont enfin réduites dès 2015. Quel gâchis d’avoir détricoté ce qui avait été engagé pour « retricoter » maintenant. Mais mieux vaut tard que jamais.

Nous voterons donc l’article 2 même si nous ne connaissons toujours pas les modalités de financement de ces réductions qui, en 2015, représentent 5,4 milliards d’euros.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. Merci de nous avoir redonné notre droit de vote. Depuis ces dernières vingt-quatre heures, il était en effet assez frustrant de débattre sans pouvoir voter le moindre article ni le moindre amendement alors que, s’agissant des trois premiers articles du projet de loi, nous sommes d’accord pour baisser les charges qui pèsent sur les salaires et les entreprises.

L’article 2 prévoit « zéro charges URSSAF » – c’est une bonne chose –, la baisse de la cotisation des allocations familiales, ce que nous souhaitions depuis longtemps – mais vous l’avez abrogée en arrivant aux affaires il y a tout juste deux ans. Seulement, le coût est estimé à 4,5 milliards d’euros et devrait être intégralement compensé. Or nous attendons toujours, ma collègue Louwagie vient de le rappeler, de savoir comment vous allez compenser. On a bien compris que cela figurerait dans le cadre des prochains projets de budget. Nous attendons avec impatience de savoir.

Vous allez baisser les cotisations familiales qui pèsent sur les indépendants. Là aussi, nous sommes d’accord et, depuis vingt-quatre heures, nous voulons voter sur ces articles, ce qui maintenant sera possible. Le coût de la mesure est estimé à 1 milliard d’euros. Une nouvelle fois, nous voudrions savoir où vous trouverez ces sommes.

M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.

M. Michel Issindou. Voilà une bonne mesure qui correspond à ce que nous voulons faire : d’une part, alléger les cotisations patronales pour alléger le coût du travail et d’autre part, donner du pouvoir d’achat à ceux qui n’avaient pas été servis par l’article 1er, si je puis employer cette expression, à savoir les indépendants, agriculteurs, artisans ou commerçants.

Cette mesure, intéressante pour la compétitivité et le pouvoir d’achat, va dans le sens que nous souhaitons donner au pacte de responsabilité et de solidarité. Comme son nom l’indique, il s’agit de servir la compétitivité qui est absolument nécessaire, mais nous n’oublions pas ceux qui en ont besoin. Il s’agit d’un pacte équilibré, cohérent, et nous le soutiendrons. L’article 2 nous convient très bien.

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Cet article vise à mettre en œuvre dès 2015 la baisse des cotisations sociales pour les salaires en deçà de 1,6 SMIC. Il concerne notamment la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, objet de mon intervention.

Comme vous le savez, cette cotisation revêt un caractère particulier : elle obéit à une logique assurantielle à la charge exclusive de l’entreprise. Son calcul, à plusieurs étages, est complexe – je n’y reviens pas. Depuis le PLFSS 2008, elle ne peut faire l’objet d’une exonération totale et depuis celui de 2011, toute imputation d’allégement a été supprimée. Cet article entend revenir sur cette interdiction en extrayant, par un calcul mathématique élaboré pour respecter le « zéro charge », une cotisation dite socle, évaluée à 1 %, qui correspondrait à la part minimale applicable à une entreprise n’ayant eu à déplorer ni accident du travail, ni maladie professionnelle.

À mon sens, nous devons faire face à deux défis.

Premier défi : pérenniser les ressources de la branche. Selon l’étude d’impact, nous nous priverions de 100 millions, qui sont bien utiles. Le rapport de notre collègue Laurent Marcangeli sur la branche AT-MP pointait déjà l’année dernière le risque, souligné depuis longtemps, d’une augmentation future du versement à la CNAM au titre de la sous-déclaration des maladies professionnelles. De même, la contribution du fonds AT-MP au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante a fortement augmenté en 2014.

Deuxième défi : sauvegarder la logique assurantielle spécifique à ce fonds. J’ai bien pris note des arguments que nous avons échangés avec le Gouvernement. Le secrétaire d’État au budget a insisté hier très longuement sur le caractère limité de l’imputation de cet allègement, qui porte essentiellement sur les salaires situés entre 1 et 1,1 SMIC en raison de la dégressivité de l’allègement sur l’AT-MP qui vient en dernier recours. J’ai aussi bien pris note de l’engagement de compensation intégrale.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Sebaoun.

M. Gérard Sebaoun. Je finis, monsieur le président ; je serai moins long lors de la défense des amendements que j’ai déposés.

Néanmoins, je reste persuadé qu’il ne faut à aucun prix déresponsabiliser les employeurs en les dégageant de leurs obligations puisqu’il s’agit de couvrir un risque théorique d’accidents du travail, de maladies professionnelles, d’accidents de trajet pour des millions de salariés.

Pour toutes ces raisons, j’ai déposé des amendements qui visent à conserver cette cotisation socle.

M. le président. La parole est à M. Michel Liebgott.

M. Michel Liebgott. L’article 2 vient compléter un dispositif beaucoup plus général qui, jusqu’à présent, se concentrait particulièrement sur la relance par la demande. Nous avons « mis le paquet » sur les emplois aidés et mis en place la Banque publique d’investissement. Nous avons fait ce qu’il fallait pour que la relance se fasse par la demande. Aujourd’hui, nous sommes bien obligés de constater que le taux de marge des entreprises n’a jamais été aussi bas depuis 1985. Les responsables de petites et moyennes entreprises que nous rencontrons dans nos circonscriptions nous laissent d’ailleurs entendre combien la faiblesse de leurs marges les met en difficulté.

Il est apparu évident qu’il fallait que nous pensions aux salariés de ces PMI-PME. La disposition proposée dans cet article concernera plus de 10 millions de salariés, avec ce que cela implique en termes de pouvoir d’achat retrouvé mais aussi d’emplois créés. Si la reprise se précise, elle profitera aux salariés français et non pas surtout aux salariés étrangers comme cela a pu être le cas dans les années quatre-vingt lorsque trop d’insistance a été mise sur la relance de la demande.

Il faut donc un équilibre subtil entre relance par l’offre et relance par la demande. Et ces dispositions de l’article 2 répondent, je crois, à cet impératif. Le plus important est de penser aux salariés qui bénéficieront indirectement de ces augmentations salariales. À cet égard, la conférence sociale qui se déroulera les 7 et 8 juillet prochains sera l’occasion ou jamais de discuter entre partenaires sociaux de ce que l’on pourra faire des apports tant du CICE que de ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, étant entendu que, pour l’heure, les PME et les PMI n’ont pas vu grand-chose du CICE. C’est dire que nous sommes au commencement d’une démarche.

M. Pierre Lellouche. Il est lucide sur ce point !

M. le président. La parole est à M. Laurent Baumel.

M. Laurent Baumel. Avec cet article, nous avons enfin à connaître de ce pacte de responsabilité décidé unilatéralement par le Président de la République le 14 janvier dernier.

M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales. « Unilatéralement » : heureusement que nous sommes assis !

M. Laurent Baumel. Ce ne sera plus unilatéral dans peu de temps !

Cette mesure répond à un credo idéologique, qui était jusqu’ici celui de la droite, et qui va devenir celui de la gauche à la faveur de ce débat. (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Louis Gagnaire. Rends donc ta carte ! Une telle attitude est insupportable !

M. Bernard Roman. C’est scandaleux !

M. Laurent Baumel. Ce credo, le voici : une baisse générale du coût du travail a des effets massifs favorables à l’emploi. Un tel lien peut exister, certes, dans les situations – la théorie économique l’a établi – où l’appareil de production est saturé et où le taux de marge des entreprises devient un élément central. Un tel lien peut encore exister pour les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale.

Mais qu’en est-il actuellement ? Je ne suis pas sûr que Michel Liebgott et moi-même rencontrions les mêmes chefs d’entreprise. Ceux que je rencontre sur le terrain se plaignent d’abord d’une absence de commandes et des difficultés qu’ils ont à investir, en l’absence de perspectives de développement.

D’autre part, le moins que l’on puisse dire, c’est que cette politique générale non ciblée et non conditionnée générera beaucoup d’effets d’aubaine, comme c’est déjà le cas pour le CICE.

Tel quel, le pacte de responsabilité dont nous initions la mise en œuvre à travers cet article 2 m’apparaît pour ce qu’il est : un choix fondamentalement idéologiquement et, si vous me le permettez de le dire également, un pari un peu naïf du Président de la République sur l’engagement du patronat français dans une politique de développement de l’emploi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe écologiste. – Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.)

M. Pierre Lellouche. Avec des amis comme ça, pas besoin d’ennemis !

M. le président. La parole est à M. Pouria Amirshahi.

M. Pouria Amirshahi. Je ferai quelques remarques générales sur la philosophie de cet article.

Il mise une fois de plus – je ne sais pas si c’est la fois de trop – sur une vieille recette éculée de baisse permanente du coût du travail. Cette dernière concerne des millions de salariés, des travailleurs, des ingénieurs, des techniciens : ils ne coûtent pas cher à notre pays, ils ne sont pas un boulet à porter et, en matière de politiques sociales, ils méritent d’être considérés autrement que du point de vue du coût ou du surcoût qu’ils représenteraient pour la société. À bien des égards, ils contribuent à la capacité productive, notamment industrielle, de la France, à travers leurs métiers, leurs compétences, leurs savoirs. Nous sommes trop souvent mis en présence de leur intelligence pour ne pas sombrer dans cette vulgate libérale qui les dévalorise alors qu’il faut, au contraire, les valoriser.

Ensuite, il faut insister sur les conséquences d’une philosophie de ce type car 4,5 milliards de baisse des cotisations patronales, c’est aussi un manque à gagner pour le financement de la protection sociale. On nous a expliqué qu’il y aurait une compensation. D’accord, mais comment ?

Mme Véronique Louwagie. Très bonne question !

M. Pouria Amirshahi. À cette question, nous n’avons pas eu tous les éléments de réponses.

Enfin, en matière de baisse continue des cotisations sociales notamment sur les bas salaires, il faut faire attention à ne pas favoriser seulement les recrutements à bas salaire, attention à ne pas créer de trappes à bas salaires, attention à cibler les politiques d’exonération des cotisations patronales ou salariales et à les mettre en œuvre intelligemment, de manière qu’elles ne favorisent pas le recours aux bas salaires et n’aggravent pas les écarts de rémunération au sein des entreprises, ce qui est un risque, car les inégalités ne séparent pas seulement ceux qui ont du travail et ceux qui n’en ont pas, elles existent aussi au sein même des entreprises. Il faut veiller aussi à ce les employeurs soient exonérés du paiement de cotisations à condition de réinvestir dans l’appareil de l’entreprise lui-même et dans la valorisation des salariés, en améliorant leur déroulement de carrière et leurs conditions de travail.

M. le président. La parole est à M. Jacques Bompard.

M. Jacques Bompard. Le Gouvernement a décidé de s’engager dans la réduction des charges pesant sur les entreprises de notre pays : c’est une bonne idée. On ne peut cependant que regretter que cet allègement ne se fasse pas plus rapidement puisqu’il ne sera effectif qu’à partir du mois de septembre.

On doit également regretter la méthode employée par le Gouvernement dans l’ensemble des négociations traitant du pacte de responsabilité et de solidarité. L’annonce de la compensation du coût de ces réductions dans les lois de finances pour 2015 laisse présager le retour d’autres dispositifs fiscaux compensatoires, qui vont peser sur des pans entiers de l’économie française. Encore une fois, les appels à un changement de cap complet dans la réduction de la pression fiscale par la réalisation de véritables économies, émis par la société civile comme par la Cour des comptes, sont ignorés.

En somme, cet article 2 résume à lui seul la faiblesse du Gouvernement devant le drame des finances publiques françaises. Quelques vagues dispositions de réduction des charges sont annihilées et rendues peu crédibles par le refus d’annoncer de manière transparente leur financement.

Enfin, chacun notera qu’une nouvelle fois, c’est à la solidarité familiale que vous attentez en choisissant de concentrer l’effort sur la réduction des cotisations finançant les allocations familiales. Le gel des prestations familiales à compter du 1er avril 2015 n’est certainement pas un bon indicateur. En effet, si l’on considère qu’il s’agit, par cette réforme, de relancer l’économie française en la libérant de prélèvements confiscatoires, il ne peut être que dommageable d’infléchir cette volonté en privant les familles d’un soutien à la consommation.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. L’article 2 prévoit d’exonérer l’ensemble des cotisations versées aux URSSAF pour les salaires équivalents au SMIC. Les cotisations familiales seront réduites de 1,8 point en 2015 pour les salaires inférieurs à 1,6 SMIC annuel puis en 2016 pour les salaires inférieurs à 3,5 SMIC annuels. Les cotisations d’allocations familiales des travailleurs indépendants et des exploitants agricoles dont le revenu ne dépasse pas un certain seuil, à fixer par décret, seront également réduites de 3,1 points.

Le Gouvernement a pris des engagements en faveur de la baisse du coût du travail et de la hausse de la compétitivité des entreprises françaises. Le présent texte traduit une partie de ces engagements, se limitant aux baisses de charges concentrées sur les bas salaires et renvoyant à 2016 la réalisation des baisses de cotisations familiales annoncées pour les salaires allant jusqu’à 3,5 SMIC.

Il s’agit donc d’un texte d’affichage puisqu’il ne donne aucune piste de financement du pacte de responsabilité, pistes qui sont attendues dans le PLFSS pour 2015.

Si je suis favorable à l’exonération des charges qui pèsent sur les entreprises, et donc à cet article 2, je déplore qu’il ne comprenne aucune perspective de concrétisation financière.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet article élargit le champ des exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires en l’étendant aux cotisations URSSAF, aux cotisations d’allocations familiales, à la contribution au Fonds national d’aide au logement et, de façon résiduelle, aux cotisations AT-MP pour les salaires compris entre 1 et 1,6 SMIC.

L’étude d’impact ne tarit pas d’éloges sur ces exonérations qui coûtent chaque année plus de 20 milliards d’euros aux finances publiques, soit 1 % du PIB, et sans lesquelles, selon cette même étude, 400 000 à 800 000 emplois auraient été détruits entre 1998 et 2009. Je passe sur la précision de cette évaluation, qui varie du simple ou double. En retenant l’estimation la plus optimiste, soit 800 000 emplois créés ou sauvegardés – ce qui n’est pas prouvé –, on aboutit à un coût brut par emploi de 25 000 euros. Or cette somme de 20 milliards d’euros permettrait de financer plus de 1,2 million emplois au SMIC.

Enfin, comparées aux emplois aidés, dont l’impact, plus facilement évaluable, conduit à réduire fortement les effets d’aubaine, et dont le coût par emploi est estimé à 10 000 euros, les exonérations de cotisations sociales apparaissent pour ce qu’elles sont : un dispositif peu efficace, impossible à évaluer et terriblement coûteux.

C’est pourquoi nous ne pouvons pas soutenir les dispositions de cet article 2.

Pour terminer, je précise que je m’associe pleinement aux observations de mon collègue Gérard Sebaoun au sujet des cotisations AT-MP : elles doivent être sanctuarisées, au moins pour ce qui concerne leur socle.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Cet article 2 est effectivement une bonne mesure pour l’emploi, réclamée par l’UMP depuis longtemps, réclamée aussi par les entreprises, particulièrement par les milliers de petites et moyennes entreprises. Nous considérons que ce dispositif va dans le bon sens, qu’il s’agisse des allégements Fillon, recalibrés et augmentés, de la baisse des cotisations familiales ou des cotisations d’allocations familiales des indépendants et des exploitants agricoles. Pour ces raisons, nous voterons cet article.

Reste une question, toujours la même : comment sera financée la compensation de l’exonération de toutes ces allocations ?

Monsieur le secrétaire d’État au budget, vous ne nous donnez toujours pas de réponse. Toute la journée de demain se tiendra le séminaire du Haut conseil du financement de la protection sociale : il indiquera des pistes pour le financement de tous les allégements de cotisations sociales.

Je vous engage donc à étudier demain toutes les conclusions de ce séminaire car c’est extrêmement important : M. Bapt et moi en avons les comptes rendus, et je peux vous dire que vous pourriez déjà nous annoncer les pistes qui seront les vôtres avant la fin de l’année. Nous réclamerons donc toujours les pistes que vous comptez utiliser.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Le groupe écologiste est extrêmement interrogatif – le mot est faible – sur le contenu de cet article qui s’inscrit dans la logique souhaitée par le MEDEF : celle d’une baisse inconditionnelle du coût du travail. Cela pose problème car on voit bien qui bénéficiera de ces baisses du coût du travail : des entreprises qui n’ont aucunement besoin de compétitivité ! Les emplois dans les supermarchés vont être exonérés alors qu’on ne voit absolument pas quel en sera le gain en termes de compétitivité ; idem pour les emplois dans les banques. On peut même aller beaucoup plus loin : les multinationales qui versent déjà des dividendes énormes à leurs actionnaires en bénéficieront elles aussi. Mais, en face, a-t-on le moindre engagement ? Non, bien au contraire : le MEDEF, qui réclamait cette baisse, ne cesse de répéter qu’il ne s’engage sur aucune contrepartie !

Notre logique consiste donc à exiger des conditions – tel sera l’objet de nos amendements – en termes de taille des entreprises, de qualité des contrats signés avec les salariés ou de secteur d’avenir. Nous devons passer de cette logique de baisse inconditionnelle du coût du travail à une logique d’investissement et de création d’emplois : ainsi, tout le monde serait d’accord.

Le pari du Gouvernement paraît un peu naïf car, dans le passé, ce type de mesure n’a malheureusement pas donné de résultat. Rappelons-nous ce qu’il s’est passé en 2013 : les dividendes versés par les entreprises du CAC 40 à leurs actionnaires ont augmenté de 6 %, pour un montant de 39 milliards d’euros, sans la moindre création d’emploi ! C’est vraiment là que réside le problème. La majorité devrait se rassembler sur cette question des conditionnalités car, pour beaucoup de nos concitoyens, à qui on va demander de se serrer davantage la ceinture – nous le verrons encore tout à l’heure avec le gel des prestations sociales –, les cadeaux sans condition aux entreprises sont inacceptables. Tout le monde peut se retrouver sur de vraies créations d’emplois mais personne ne peut accepter des cadeaux sans lendemain.

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Ainsi que mes collègues l’ont annoncé, nous allons voter cet article 2 car nous sommes ravis que le Gouvernement nous ait rejoints sur cette logique de baisse des charges pesant sur les entreprises.

J’ai toutefois entendu un certain nombre de choses qui me font réagir : ce que les entreprises demandent, c’est un carnet de commandes, ce n’est pas une baisse de charges. Nous sommes dans une économie de marché, mes chers collègues ! Si nous ne nous plaçons pas dans une logique de compétitivité et d’abaissement du coût du travail, il n’y aura pas de marché ! Un carnet de commandes, ça ne se décrète pas ! Mais, si nous ne pouvons pas ici décréter les carnets de commandes des entreprises, nous pouvons en revanche alléger les charges pesant sur les entreprises : c’est pour cela que nous sommes dans cette logique.

Par ailleurs, je partage les propos tenus tout à l’heure par nos collègues MM. Amirshahi et Baumel sur un point : comment finance-t-on ces baisses ? C’est là toute la difficulté, selon nous : nous allons certes voter les amendements de baisse de charges, mais nous ne voterons pas l’ensemble du texte parce que ces baisses de charges ne sont gagées par aucune baisse de dépenses ! Le PLFRSS est en fait un outil de communication, dans lequel on annonce des mesures qui ne s’appliqueront qu’à partir du 1er janvier 2015 et qui auraient donc tout à fait pu figurer dans le PLFSS 2015 : il n’y avait pas besoin de loi rectificative pour cela ! Il s’agit d’un numéro d’enfumage complet, qui consiste à faire des effets d’annonce sans les financer !

De même, j’entendais dire tout à l’heure qu’il fallait veiller à ce que ces baisses de charges soient consacrées à l’investissement ; mais, mes chers collègues, foutons la paix aux entreprises ! Laissez-les vivre !

Mme Jacqueline Fraysse. Ah ça, c’est sûr ! Il faudrait tout leur donner !

M. Christian Jacob. À chaque fois, vous avez ce souci d’imposer des contraintes. Si vous voulez orienter les résultats d’une entreprise, créez-en donc une : ainsi vous pourrez décider de leur affectation ! Mais laissons aux chefs d’entreprise la possibilité d’affecter les résultats où ils le souhaitent ! Ces baisses de charges leur permettront d’accrocher des marchés supplémentaires, et c’est bien là l’important !

M. le président. Merci de conclure, monsieur le député.

M. Christian Jacob. Un dernier mot, monsieur le président, concernant les actionnaires : on reproche aux entreprises de distribuer des dividendes aux actionnaires, mais on a besoin de ces actionnaires ! Encore heureux qu’ils existent, sinon il n’y aurait pas d’entreprises ! Allez donc au bout de votre démarche en vous inscrivant complètement dans cette logique de compétitivité et de baisse du coût du travail, mais gagez en contrepartie les financements par de vraies baisses de dépenses publiques : il n’y en a aucune dans votre texte !

M. le président. La parole est à M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Aujourd’hui, les entreprises rencontrent de nombreuses difficultés, nous le savons tous : d’abord la crise économique, que personne ne conteste, même si le Gouvernement porte une part de responsabilité dans ce qui arrive aujourd’hui ; puis le choc de simplification, annoncé, différé, de nouveau annoncé, mais que l’on attend toujours vainement ; enfin, des rigidités salariales persistantes. Tout ce qui permettra de simplifier et d’alléger le coût du travail va évidemment dans le bon sens ; c’est pour cela que nous nous retrouvons dans cet article 2.

Cela étant, nous en gardons tout de même un goût amer, une fâcheuse impression d’un numéro de claquettes, d’un numéro de communication qui pour le moment n’est pas financé. Bien sûr, des réductions du coût du travail sont annoncées : ce n’est pas pour n’importe quoi, mais pour gagner de la compétitivité, pour gagner éventuellement des parts de marché ou tout au moins, dans le contexte actuel, ne pas en perdre, ce qui est déjà évidemment important. Nous nous réjouissons donc des propositions contenues dans cet article 2 qui pourrait être voté ; mais quel dommage d’avoir perdu près de deux ans et demi ! Quel dommage d’avoir supprimé par la loi du 16 août 2012 ce qui avait été voté précédemment !

Par ailleurs, j’ai les mêmes interrogations que mes collègues : quelles modalités concrètes, précises, de financement ? Quelles compensations ? Nous ne voulons pas signer un chèque en blanc sans savoir ce qui serait mis en regard : nous craignons en effet un marché de dupes, et que les compensations ne soient pas au rendez-vous. Pour conclure, la branche famille sera la plus exposée dans cette affaire : aussi je m’inquiète pour le devenir de la politique familiale en France compte tenu du manque de précision sur les modalités de financement. Si le vote est maintenant « débloqué », j’aimerais bien que la situation le soit aussi et que l’on nous donne des explications précises sur ces points.

M. le président. La parole est à M. Pierre Lellouche.

M. Pierre Lellouche. Permettez à quelqu’un qui est beaucoup moins expert que bien des personnes ici présentes d’exprimer tout de même quelques observations sur la tenue de nos débats. Ce texte est fondamental, si j’ai bien compris, pour la politique nouvelle annoncée par le Président de la République le 31 décembre dernier, par laquelle il bascule d’une politique de la demande à une politique de relance par l’offre : c’est le fameux pacte de responsabilité. C’est bien aujourd’hui, six mois plus tard – nous sommes le 1er juillet ! – que doivent être décidées les fameuses baisses de charges sur les entreprises. Or il s’avère que non seulement il s’est écoulé six mois, mais surtout que la majorité est totalement divisée sur le sujet : j’ai entendu un réquisitoire contre la politique du Président de la République d’une violence à laquelle on ne s’attendait pas de la part de certains intervenants sur les bancs socialistes ! À se demander s’il s’agit du même groupe ou bien de deux groupes différents ! Contrairement à ce que disait M. Le Roux tout à l’heure, la division idéologique est très profonde.

Deuxième point : si j’ai bien compris, aucune de ces mesures n’est financée et l’on est en train de reporter à 2015 un exercice qui devait être immédiat, car le pacte de responsabilité devait commencer maintenant : c’est maintenant que l’économie en a besoin et c’est maintenant que les chiffres du chômage sont catastrophiques. Or, tout cela est reporté en 2015 et, si j’ai bien compris, il reste à trouver 5,5 milliards d’euros pour financer les mesures de baisses de charges que vous proposez, et qui ne sont d’ailleurs que la reprise de propositions anciennes de l’UMP, mais qui aujourd’hui ne sont pas financées.

Troisième point : M. Roumegas a justement fait remarquer que ce type de mesures posait un problème d’efficacité. Si c’est pour faire des cadeaux à des entreprises non exposées à la compétition internationale, comme c’est le cas du CICE – voire du crédit d’impôt recherche : je vous renvoie à lecture du rapport de l’OCDE sur ce sujet –, ces questions méritent d’être posées.

Dernière remarque : ce débat se tient sous l’œil des Européens. Nous sommes observés en ce moment à Bruxelles : on nous explique, à l’issue d’un conseil européen, que nous avons réorienté l’Europe grâce à la magie de François Hollande. Mais l’Europe nous regarde ! Si nous ne sommes pas capables de prendre rapidement les mesures de baisse de charges, si nous ne sommes pas capables de les financer, si nous ne sommes pas capables d’être efficaces, alors perdez toute illusion : nous n’aurons aucun poids sur les décisions prises aujourd’hui par Mme Merkel sur la base, en effet, d’une politique de l’offre, politique qui fonctionne. Nous nous contenterons de courir derrière pour tenter de la rattraper, et même de la singer.

M. le président. Merci, monsieur Lellouche.

M. Pierre Lellouche. Je regrette de devoir dire tout cela parce que, malheureusement, cela démontre la gravité de la situation dans laquelle nous nous trouvons.

M. le président. La parole est à M. Alain Fauré.

M. Alain Fauré. Je tenais à rappeler que le Gouvernement a pris ces décisions parce que plus de 98 % des entreprises en France comptent moins de cinquante salariés : c’est une particularité dont il faut tenir compte. Nous devons donc aider ces entreprises en diminuant les cotisations sociales.

Par ailleurs, quand j’entends sur les bancs adverses que nous n’aurions rien fait depuis deux ans,…

M. Philippe Gosselin. Nous sommes des parlementaires, et non des adversaires !

M. Alain Fauré. …je rappelle que des décisions ont été prises, telles que le CICE, pour accompagner les entreprises en diminuant les cotisations : l’effort était assez conséquent !

Concernant les modalités de financement, si nous ne commençons pas par décider des diminutions des cotisations, comment enclencherons-nous la création d’emplois ? Ces emplois assureront à leur tour des recettes nouvelles finançant la Sécurité sociale ; c’est ainsi que les choses pourront avancer. Il faut lancer la machine pour que celle-ci ait à son tour un effet positif sur les recettes. Par ailleurs, le Gouvernement a pris des engagements de diminution des dépenses : je suis surpris que certains les aient oubliés alors qu’ils nous les ont rappelés à plusieurs reprises en les présentant de manière négative.

M. le président. La parole est à M. Éric Woerth.

M. Éric Woerth. Mes collègues ont déjà évoqué tous ces points, mais je dirai d’un mot que nous sommes au cœur du dispositif dit « pacte de responsabilité ». Même si nous voyons bien qu’il y a beaucoup de débats dans la majorité, nous sommes évidemment favorables à une baisse des charges pour les entreprises – nous l’avons dit, répété, et même fait voter. Cela étant, l’absence de clarification sur le financement est tout de même un vrai problème.

Par ailleurs, autre problème qui revient lui aussi régulièrement dans nos débats, on ne voit pas très bien pourquoi on vote un projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale qui vaut pour l’année 2015 : on aurait pu attendre le PLFSS de l’année 2015 ! Tout cela est assez évident : vous voulez afficher un geste symbolique sur le plan politique ; mais si vous affichez ce geste politique, alors il faut afficher tout à la fois les dépenses et les recettes, sinon il manque quelque chose – au moins la moitié du symbole ! Je remarque en outre que les entreprises n’en sont pas satisfaites, si j’en crois la lecture de la presse ce week-end, et qu’une partie de votre majorité ne l’est pas non plus, demandant plus de donnant-donnant, moins de réductions de charges pour les entreprises – bref, ayant leur opinion sur le sujet, qui n’a rien à voir avec l’opinion du Gouvernement. Tout cela mérite une entreprise de clarification de votre part.

Deuxième point, concernant les accidents du travail : cela pose un certain nombre de questions. Peut-être certaines finesses techniques m’ont-elles échappé ; mais la logique des accidents du travail et des maladies professionnelles est une logique réellement assurantielle, qui aurait donc nécessité un traitement différent.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Juste un mot : M. Lellouche a dit tout à l’heure que nous annonçons des décisions qui ne sont pas mises en œuvre. Si l’on regarde le CICE, qui fait partie d’une certaine manière du pacte de responsabilité puisque François Hollande le qualifie de premier chantier du pacte de responsabilité, la loi de finances rectificative pour 2013, votée le 29 décembre 2012, est intervenue tout à fait à temps de manière que le système du CICE puisse entrer en vigueur au 1er janvier 2013 – et il l’a été, par préfinancement.

En 2013, beaucoup d’entreprises ont bénéficié du CICE. On ne peut donc pas nous accuser d’annoncer des mesures mais de ne les appliquer que plus tard.

M. le président. Mes chers collègues, je vous annonce d’ores et déjà que sur l’amendement n108 que nous allons examiner dans quelques instants, je suis saisi par le groupe UDI d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Monsieur le président, je souhaite répondre aux longues interventions tout à fait légitimes qui viennent d’avoir lieu sur l’article 2.

Monsieur Woerth, vous nous reprochez d’inscrire dans le PLFRSS des mesures qui ne s’appliqueront qu’en 2015. Nous nous sommes clairement expliqués sur ce point, hier, dans le cadre de la discussion. Nous souhaitons mettre en place de la lisibilité pour l’ensemble des acteurs économiques. C’est ce que nous réclament les entreprises. Certains, y compris sur vos bancs, auraient même voulu que nous inscrivions les mesures prévues pour 2016 et 2017.

Effectivement, nous aurions pu attendre. Mais, dès lors que nous le faisions pour les entreprises, je ne vois pas pourquoi nous ne l’aurions pas fait pour les salariés. C’est notre choix, nous l’assumons et nous vous l’expliquons.

Je me suis longuement exprimé hier soir sur l’annexe A et les éléments du rapport qui fixent la trajectoire des finances publiques, et je vous donne acte, monsieur Door, que vous étiez présent comme d’ailleurs certains de vos collègues. Je le dis très clairement : un certain nombre de gouvernements – ils se reconnaîtront – ont financé leurs mesures de réduction de charges et d’impôts par la dette, tandis que ce Gouvernement les finance par des mesures d’économies.

M. Dominique Baert. Ce qui fait une sacrée différence !

M. le président. La parole est à M. Gérard Sebaoun, pour soutenir l’amendement n108.

M. Gérard Sebaoun. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 2 de l’article 2, c’est-à-dire à supprimer la fameuse cotisation « socle », calcul mathématique dont le taux pourrait être fixé par arrêté ministériel dans la limite d’un taux applicable à une entreprise où aucun accident du travail ou maladie professionnelle n’est jamais survenu.

Je pense que nous sommes dans une logique assurantielle depuis toujours. Nous participons à la prévention des accidents du travail et maladies professionnelles. Ce n’est pas une bonne idée que de revenir sur la cotisation socle AT-MP.

J’ai noté une vraie contradiction entre les propos de M. Woerth et ceux de ses collègues. En effet, voici ce que la précédente majorité écrivait à propos de la loi de financement de la Sécurité sociale de 2011 : « Introduit par l’article 22 de la loi de financement pour 2008, le dernier alinéa de l’article L. 241-5 du code de la Sécurité sociale pose le principe selon lequel les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles ne peuvent faire l’objet d’une exonération totale, y compris lorsque celle-ci ne porte que sur une partie de la rémunération. La valeur de ce principe est capitale au regard de la vocation préventive et assurantielle de la branche des accidents du travail (…) » Je demande donc à l’ancienne majorité de faire preuve d’un peu de cohérence par rapport à ce qu’elle a voté hier. Pour ma part, je défends le maintien de cette cotisation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales. La commission a repoussé l’amendement de M. Sebaoun tout en en comprenant le sens. Il part de la même logique que M. Woerth selon laquelle les cotisations AT-MP sont de nature assurantielle. Or la part de la cotisation dont il s’agit à l’article 2 concerne la part socle, la part mutualisée, celle qui n’est pas assurantielle puisqu’elle est supportée par l’ensemble des entreprises. Elle est donc plutôt solidaire.

La part socle représente une cotisation de 1 %. Elle sert à prendre en charge les frais relevant des accidents de trajet, les accidents de la circulation – qui ne sont pas de la responsabilité d’une entreprise en particulier –, les dépenses de rééducation fonctionnelle. Elle sert également à financer le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, auquel toutes les entreprises ne contribuent pas, ainsi que le compte handicap voté dans le cadre de la loi Fillon par l’ancienne majorité.

Il n’existe d’ailleurs aucune branche professionnelle pour laquelle le taux de cotisation soit inférieur à 1,4 % – taux auquel cotisent les agences de voyages et les offices de tourisme. En revanche, là où la sinistralité est importante, le taux de cotisation est plus élevé. C’est le cas dans le secteur du bâtiment où il est de l’ordre de 8 à 10 %, dans la fonderie où il est de 14 à 16 %. Le maximum est atteint en ce qui concerne la fabrication des produits de fibrociment puisqu’il est de 59 %. Si l’on baisse la cotisation de 1 % pour les salariés au SMIC, on tombe de 59 % à 58 %. La responsabilisation des entreprises est donc totalement préservée par cette disposition.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. J’émets, comme la commission, un avis défavorable sur cet amendement.

Si la branche AT-MP est effectivement une branche assurantielle puisque c’est la première branche de Sécurité sociale qui a existé dans notre pays, il y a deux natures de contribution des entreprises : l’une qui n’est pas à proprement parler responsabilisante puisque la contribution est la même quel que soit le taux d’accident qu’il y a dans une entreprise – c’est ce qu’on appelle la part mutualisée – ; l’autre est une part variable qui dépend de la situation de la branche et de l’entreprise. J’insiste sur ce point parce qu’il est essentiel : il n’est absolument pas question de toucher à la part variable car cela déresponsabiliserait les entreprises. Le Gouvernement veut clairement rappeler qu’il y a une part qui est payée par toutes les entreprises et qui peut être revue à la baisse et une autre qui n’est en rien concernée par le texte du Gouvernement. Les entreprises dans lesquelles il y a des taux d’accidents du travail plus élevés qu’ailleurs doivent payer des contributions à la branche AT-MP plus élevées que les autres. Ce principe de responsabilité assurantielle n’est pas remis en question et ne saurait l’être.

Tout en émettant un avis défavorable sur cet amendement, le Gouvernement entend la préoccupation qui a été portée. Mais elle n’a pas de raison d’être dans le texte qui vous est proposé.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Je soutiens cet amendement pour plusieurs raisons.

Je comprends l’idée du Gouvernement d’aboutir à une exonération totale de cotisations patronales pour les salaires au niveau du SMIC. Cela fait des années que cette question est étudiée, mais elle était limitée, pour ce qui concerne les charges sociales, à 28 points d’exonération sur 30, précisément en raison d’une volonté commune des gouvernements de droite comme de gauche, de préserver la branche AT-MP. C’est une branche qui fonctionne bien. Augmenter cette exonération de 2 points pour les salaires au SMIC aurait un coût très élevé, sachant qu’il reste tout de même 10 % de cotisations pour les régimes complémentaires au titre de l’assurance chômage et des cotisations patronales. Le gain en termes de coût du travail, au regard des arguments fort bien développés par M. Sebaoun quant au faible effet que l’on peut attendre en termes d’emploi, ne mérite donc pas que soit déstructurée cette branche-là.

Au-delà des arguments techniques que je viens de développer, on voit bien que les employeurs sont très attachés à cette branche qui touche la protection du salarié, c’est-à-dire sa santé au travail.

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Avec cet amendement, apparaît la différence d’appréciation entre le Gouvernement et le groupe UDI.

Nous estimons en effet que le travail ne peut pas supporter l’ensemble de la solidarité nationale de la protection sociale. C’est pourquoi nous allons présenter des amendements qui visent à diminuer la charge sur le travail, celle qui concerne tous les Français.

Le présent amendement ne vise que la sphère professionnelle. Il ne me paraît donc pas du tout aberrant que l’entreprise paye la solidarité entre entreprises, que ce soit de manière mutualisée ou assurantielle. On est bien dans le cadre de la maladie professionnelle, de l’accident du travail, voire de l’accident de trajet.

Nous sommes souvent en désaccord avec le groupe socialiste, et surtout avec son aile gauche. Mais là nous voterons cet amendement que nous considérons comme de bon sens.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Je voudrais saluer le groupe UDI qui est cohérent sur cette question. A son tour, le groupe écologiste soutiendra cet amendement.

Nous avons bien entendu la réponse du rapporteur et du Gouvernement, nous avons bien compris qu’il ne s’agit pas d’une exonération totale mais partielle. Mais peut-on exonérer, même partiellement, certaines entreprises des cotisations AT-MP ? On donne là un mauvais signal. La notion de maladie professionnelle et même d’accident du travail est en train de s’élargir, puisque l’on parle désormais de pénibilité au travail, vrai phénomène de société en ces temps de crise. Nous défendons par principe la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, notamment en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous soutiendrons cet amendement. Au-delà des arguments qui ont déjà été développés et sur lesquels je ne reviendrai pas, je considère qu’il s’agit là d’un très mauvais signe donné dans un domaine essentiel puisqu’il concerne la santé, la sécurité des salariés.

Vous nous dites que c’est un problème résiduel, mais c’est un premier pas.

Comme j’ai eu l’occasion de le dire en commission, une brèche a été ouverte. Le pied est dans la porte, il ne suffira que de pousser pour aller un peu plus loin. Cette disposition est mauvaise ; le groupe GDR votera l’amendement n108.

M. le président. La parole est à M. Denys Robiliard.

M. Denys Robiliard. Il ne faut pas mettre les doigts dans certains engrenages. Avec cette disposition, une logique assurantielle est en train de s’immiscer, au nom de la baisse du coût du travail. Pourtant, comme l’a remarqué avec pertinence M. Vercamer, il ne s’agit que d’une sinistralité liée au travail.

C’est bien la raison pour laquelle la possibilité d’imputer les allégements sur les bas salaires sur les cotisations accidents du travail et maladies professionnelles a été supprimée par le PLFSS voté le 20 décembre 2010. L’étude d’impact indique que ce qui a présidé à cette mesure est la logique de responsabilisation des entreprises face aux risques liés à la sécurité au travail.

J’entends bien l’argumentation qui nous est donnée : il s’agit de la cotisation socle, et non des cotisations majorées en fonction du secteur d’activité de l’entreprise ou de la sinistralité de l’entreprise. Cela étant, il faut bien voir que le taux moyen, d’après l’étude d’impact, est de 2,44 %, tandis que le taux de la cotisation mutualisée est de 1 %. La baisse porte donc sur deux cinquièmes de l’ensemble : la masse n’est pas négligeable !

Par ailleurs, ce n’est pas parce qu’une cotisation n’est pas mutualisée qu’elle ne participe pas du système global assurantiel. Nous sommes bien en train de changer de logique, et je ne vois pas au nom de quoi l’on pourrait justifier que ce soit désormais l’impôt qui vienne abonder la branche AT-MP et qui prenne en charge les accidents du travail et les maladies professionnelles.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. De quoi parle-t-on au juste ? Le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, s’est engagé à ce qu’il y ait « zéro cotisation URSSAF au niveau du SMIC ». Cela nécessite de mordre sur la part obligatoire des cotisations AT-MP – celle qui n’est pas représentative de l’accidentalité.

Le dispositif a été conçu de la façon suivante : lorsque l’on s’écarte du SMIC, les allégements de charges sont dégressifs ; lorsque c’est possible, la totalité des allégements de charges est imputée sur d’autres cotisations que la cotisation AT-MP. Cela signifie, ainsi qu’il est indiqué dans l’exposé des motifs – et les auteurs de l’amendement ne le contestent pas – que nous ne touchons à cette part que pour les salaires compris entre 1 et 1,02 fois le SMIC.

Mme Jacqueline Fraysse. C’est encore trop !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. La part des cotisations représentative de la sinistralité – la plus importante de la contribution AT-MP – n’est alors pas en cause.

Zéro cotisations URSSAF au niveau du SMIC est un dispositif de simplification. La question que pose l’amendement concerne les salaires entre 1 et 1,02 fois le SMIC, et encore, pour partie. Je souhaitais que la représentation nationale soit éclairée, mais l’Assemblée est souveraine.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n108.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants101
Nombre de suffrages exprimés99
Majorité absolue50
Pour l’adoption36
contre63

(L’amendement n108 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement rédactionnel, n120, du rapporteur.

(L’amendement n120, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n57 rectifié.

M. Francis Vercamer. Nous proposons de faire exactement l’inverse de ce qui vient d’être évoqué, en supprimant ce que l’on appelle les « cotisations patronales familiales », afin d’alléger le coût du travail. En effet, nous considérons que l’entreprise n’est pas la seule entité habilitée à financer, par le travail, la branche famille.

Pour financer cette baisse des cotisations – équivalente, ainsi que M. le rapporteur ne manquera pas de le rappeler, à 35 milliards –, nous proposons de supprimer le CICE, un dispositif compliqué à gérer administrativement, difficile à mettre en œuvre, et complexe pour les petites entreprises.

M. Dominique Baert. Il n’y a pourtant rien de plus simple !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Fait assez rare pour être souligné, monsieur Vercamer, le gage ne vise pas les fameux articles 575 et 575 A du code général des impôts ! Le problème est que vous proposez de compenser la suppression des allocations, à hauteur de 35 milliards, par une économie qui correspond au coût prévisionnel du CICE, 16 milliards. Il manque donc encore 19 milliards d’euros, que vous proposez de trouver grâce à l’augmentation du taux de la taxe sur la valeur ajoutée. La commission a rejeté cet amendement, qui ne lui a pas paru suffisamment sérieux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Défavorable, pour les raisons que M. Vercamer a lui-même exposées. D’une grande ampleur financière, cet amendement vise un basculement complet d’un système de crédit d’impôt vers un système d’allégements de charge. Cela ne pose pas seulement le problème du volume mis en jeu mais aussi de la temporalité. L’imputation budgétaire, pour un crédit d’impôt, se fait avec une année de décalage. L’adoption d’un tel amendement présuppose une année double, en termes de paiements pour l’État, ce qui serait insupportable, surtout pour des volumes aussi importants !

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Il est vrai que j’ai gagé cette baisse de cotisations par la suppression du CICE et une augmentation du taux de la TVA. Cela vaut toujours mieux que de ne rien gager du tout, comme vous l’avez fait avec ce projet de loi !

Mme Marie-Christine Dalloz. Tout à fait !

Mme Véronique Louwagie. Très bien !

M. Francis Vercamer. On ne sait même pas comment vous allez financer les mesures, dont le coût est estimé à 10 milliards d’euros. Je prends donc en compte ces 10 milliards d’économies et y ajoute les 20 milliards du CICE – je constate que vous annoncez un coût du CICE de 16 milliards, soit 4 milliards de moins. Pour la compensation des 5 milliards restants, j’ai pensé à l’augmentation du taux de la TVA, une des pistes proposées – Jean-Pierre Door l’a rappelé hier – par le Haut Conseil de financement de la Sécurité sociale.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Depuis qu’a débuté l’examen de ce texte, nous vous avons interrogé, monsieur le secrétaire d’État, sur la manière dont le financement des diverses mesures de réduction des charges sociales allait être organisé. Vous venez, pour la première fois, de parler d’économies pour 2015. Pouvez-vous nous en dire plus ? De quelle nature sont les économies que vous envisagez ? Il est important que nous le sachions avant le vote de l’ensemble des mesures proposées, dont le coût, substantiel, atteint les 10 milliards d’euros !

(L’amendement n57 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n59.

M. Francis Vercamer. L’amendement, similaire au précédent, vise à supprimer les cotisations patronales familiales pour les travailleurs indépendants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable, d’autant qu’il existe une erreur d’écriture : la rédaction de l’amendement laisse penser que vous supprimez à nouveau l’intégralité des cotisations patronales familiales.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis.

(L’amendement n59 n’est pas adopté.)

M. le président. Sur les amendements identiques nos 143, 160 et 188 rectifié, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n143.

M. Marc Dolez. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 8 et 9 de l’article 2, qui prévoient une baisse des cotisations famille payées par les employeurs. Je rappelle, au passage, qu’une étude de mai 2013 de la Caisse nationale des allocations familiales a montré que ces cotisations permettaient de verser des prestations à 11,5 millions de foyers allocataires, pour un total de 30,5 millions de personnes.

Il existe selon nous au moins trois raisons de voter cet amendement : d’abord, cette diminution de cotisations, qui vise les salaires inférieurs à 1,6 fois le SMIC, constitue un encouragement à maintenir de faibles salaires. Il s’agit d’une nouvelle trappe à bas salaires, qui va à l’encontre de la croissance. Par ailleurs, cette baisse de cotisations se fait sans conditions, et quelle que soit l’entreprise. Il y a là un effet d’aubaine indéniable. Enfin, cela a déjà été dit mais il convient de le répéter : nous n’avons aucune précision sur la façon dont ces exonérations seront compensées.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n160.

M. Jean-Louis Roumegas. À l’occasion d’un projet de loi de financement rectificative, nous nous engageons dans une réforme de nature structurelle, alors qu’il y avait consensus depuis la création même de la Sécurité sociale, en 1946, sur le choix d’une politique familiale universaliste. La cotisation, qui était alors de 16,75 % a progressivement décru, pour atteindre 5,4 % en 1991.

D’après le rapport de la Cour des comptes de mai 2013 relatif au financement de la branche famille, ce taux serait, depuis, resté inchangé en apparence mais en réalité il a très sensiblement diminué suite à la mise en œuvre d’un dispositif d’allégements généraux de cotisations qui s’est traduit par le transfert de ce financement vers d’autres assiettes, et par conséquent vers les ménages.

Pourtant, les entreprises bénéficient largement de la politique familiale telle qu’elle est menée dans notre pays. Une grande partie du budget total de la branche permet de financer la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle. Selon la Cour des comptes, ces actions ont un effet positif sur le taux d’activité et contribuent ainsi au dynamisme global du marché du travail et à l’augmentation de la croissance potentielle. Les entreprises bénéficient directement, au premier chef, de la politique ainsi conduite.

Par le dispositif de réduction spécifique des cotisations familiales à la charge des employeurs, le Gouvernement s’engage dans une réforme structurelle de la protection sociale et de la branche famille. Le moins que l’on pourrait espérer serait d’avoir un débat sur cette politique familiale : qu’en attendons-nous et qui doit la financer ?

En attendant un tel débat, nous voterons ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain, pour soutenir l’amendement n188 rectifié.

M. Jean-Marc Germain. Deux volets sont prévus dans la politique d’allégement des charges. Nous avons déjà émis quelques réserves quant au premier, qui vise à ramener à zéro les charges de Sécurité sociale pour les salariés au SMIC. Le second consiste à baisser de 1,8 point les cotisations d’allocations familiales.

Nous évoquions hier l’éventualité de faire un geste significatif en faveur du pouvoir d’achat des ménages : une façon de le financer serait justement de réduire la voilure sur ces allégements de charge. Le Gouvernement a d’ailleurs envisagé un dispositif en deux étapes : 4,5 milliards en 2015 et 4,5 milliards en 2016. Or, il a dit aux partenaires sociaux que la deuxième étape dépendrait du niveau de baisse du chômage enregistré en mai 2015. N’enclenchons pas, dès lors, la baisse de 1,8 point des cotisations familiales. Si nous adoptions ces alinéas 8 et 9, nous mettrions le doigt dans l’engrenage, pour reprendre les propos de Gérard Sebaoun à propos de l’amendement précédent.

Tel est l’objet de notre amendement : proposer de réelles contreparties et ne pas enclencher l’étape 2016 avant d’avoir vérifié que l’étape 2015 était franchie correctement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Défavorable. Monsieur Roumegas, nous avons pris en compte votre argumentation puisque l’abaissement n’est que de 1,8 point, ce qui laisse à l’entreprise une responsabilité dans l’articulation entre la vie familiale et la vie professionnelle au travers d’un taux de 3,45 %.

Monsieur Germain, votre exposé témoigne d’une position d’ensemble opposée au fondement même des allégements. Elle est en rupture avec l’orientation générale du texte gouvernemental.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Défavorable à ces amendements qui posent le problème de la logique contributive d’un certain nombre de cotisations ou de leur logique universelle. Concernant la branche famille, l’ensemble des salariés bénéficient des allocations. Le Haut Conseil de financement de la protection sociale a mené toute une réflexion autour de ces questions. Ces cotisations ne sont ni totalement contributives ni totalement universelles, car il est bien évident que les entreprises bénéficient, elles aussi, du fait qu’un certain nombre de prestations familiales rendent les salariés plus « productifs » – pardonnez-moi ce terme excessif – et créent les conditions de l’emploi grâce à l’accompagnement des familles. C’est un débat de fond, mais il me semble préférable d’envisager plutôt un financement diversifié de la branche famille. Les mesures que nous avons prises vont dans ce sens et contribuent par ailleurs à la logique de simplification en posant le principe « zéro charge URSSAF au niveau du SMIC ».

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je suis très étonnée de constater la présence, ce soir, de pas moins de quatre ministres ! Quel honneur ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales. C’est pour vous, madame Dalloz !

Mme Marie-Christine Dalloz. Les membres de la commission des affaires sociales sont vraiment très bien traités ! Quatre ministres pour un texte de loi ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

La semaine dernière, lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative, une partie de la majorité a demandé, au cours d’un long débat nocturne, que le CICE soit supprimé. Aujourd’hui, cette même partie demande que soient supprimés les allégements prévus dans le cadre de ce projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale.

M. Jean-Marc Germain. Lisez donc les amendements !

Mme Marie-Christine Dalloz. Il semble bien que cette majorité soit confrontée à un grave problème ! Et le Premier ministre de nous déclarer, tout à l’heure, que ce n’est pas une majorité de circonstance ! Ses propos pourraient vraiment prêter à sourire si la situation n’était aussi grave. Sincèrement, votre majorité est de bric et de broc. Un accord a été passé avec les partenaires sociaux, monsieur Germain : allez au moins jusqu’au bout de la démarche ! Respectez cet accord plutôt que de conditionner sa poursuite à des preuves ! Il est aberrant d’entendre de tels propos. Je ne sais pas ce que vous a fait le milieu économique et pourquoi vous nourrissez une telle haine à l’endroit des entreprises !

M. Philippe Vigier. Elle a raison !

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Il est assez amusant d’entendre Mme Dalloz gloser sur les divisions de la majorité quand on sait dans quel état se trouve le parti auquel elle appartient, l’UMP. On ne sait plus qui est sarkozyste, qui est filloniste, qui est juppéiste. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Vous devriez observer ce que font un certain nombre de vos collègues lorsque vous accusez la majorité de nourrir une haine quelconque contre les entreprises. Je constate pour ma part que certains maires, en particulier celui de Nice, n’ont pas la haine des entreprises, mais de ceux qui se trouvent sur notre territoire, dont certains ne peuvent toujours pas voter aux élections locales et qui sont stigmatisés de la même manière qu’ils pourraient l’être par le Front national. Nous n’avons pas de leçon à recevoir en la matière. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je soutiens les amendements présentés par Mme Fraysse, M. Germain et M. Roumegas car, si nous ne sommes pas opposés aux aides aux entreprises, nous voulons les rendre conditionnelles. Si un certain nombre d’entre nous se sont battus dans le cadre du projet de loi de finances rectificative à propos du CICE, nous nous sommes battus pour la conditionnalité du CICE. Nous n’acceptons pas que le MEDEF impose aujourd’hui sa loi, sans aucune contrepartie. Qui a demandé l’exonération des cotisations familiales ? Le MEDEF. Nous aurions pu discuter ici de cette question qui mérite bien un débat. On nous propose de baisser les cotisations sociales de 1,8 point, mais nous considérons que la cotisation famille des entreprises contribue à créer des emplois et qu’elle doit perdurer. En l’absence de contrepartie, il nous semble qu’il s’agit là encore d’un cadeau fait aux entreprises. Nous n’approuvons pas cette politique qui ne répond pas aux engagements de la gauche en faveur des plus modestes.

M. le président. La parole est à M. Michel Issindou.

M. Michel Issindou. Il ne s’agit pas de cadeaux faits à l’entreprise, mais à l’emploi. C’est pourquoi nous choisissons aujourd’hui de mener cette politique qui, espérons-le, fera ses preuves. N’ayons pas cette défiance immédiate envers le patronat. Essayons de faire confiance, à partir du pacte de responsabilité. Faisons confiance d’abord, quitte à poser des barrières de temps en temps. Le CICE est en cours d’évaluation. Nous tirerons les conséquences du bilan, et rectifierons le tir si cela est nécessaire. Commençons par faire confiance à ceux qui sont les seuls à même de créer des emplois durables : les entreprises. Ce ne sont pas les patrons que nous visons. Les patrons et le MEDEF ne sont pas notre souci ni notre affaire.

Nous choisissons de mener une politique de compétitivité pour améliorer la marge des entreprises, aujourd’hui trop faibles pour leur permettre d’entrer dans la compétition européenne et mondiale. Tout le monde a en tête le rapport Gallois. Nous avons choisi d’utiliser le levier de la cotisation famille, dont beaucoup considèrent qu’elle n’est pas directement liée au travail et qu’elle pourrait être universelle et financée autrement. Nous l’allégeons sensiblement sans la faire disparaître pour autant. Cette disposition va dans le bon sens et je voterai contre les amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 143, 160 et 188 rectifié.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants106
Nombre de suffrages exprimés106
Majorité absolue54
Pour l’adoption21
contre85

(Les amendements identiques nos 143, 160 et 188 rectifié ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 145 et 144, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour les soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. Aujourd’hui, les employeurs paient des cotisations qui permettent de financer les prestations familiales ainsi que les cotisations URSSAF et accidents du travail-maladies professionnelles. Vous proposez d’abaisser ces cotisations pour les salaires inférieurs à 1,6 fois le SMIC, de façon dégressive. Nous contestons ces dispositions. Outre le fait que ces baisses de cotisations représentent une perte de recettes de 4,5 milliards d’euros pour la seule année 2015 et encouragent les employeurs à maintenir de faibles salaires, elles sont non ciblées et sans condition.

Ces deux amendements visent à les cibler, sur les contrats à durée indéterminée pour les favoriser et améliorer le pouvoir d’achat – amendement n145 – et sur les contrats à temps plein pour dissuader le recours abusif aux contrats à temps partiel qui concerne tout particulièrement les femmes – amendement n144.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Avis défavorable à ces deux amendements qui obéissent à la même logique. La loi de sécurisation de l’emploi a déjà prévu un certain nombre de mesures pour alourdir les charges en faveur du salarié dans ce type de contrat, notamment lorsqu’il arrive à son terme. Dans un contexte où il est devenu impérieux de favoriser la création d’emploi, il ne faut pas trop pénaliser les entreprises qui peuvent offrir un CDD ou un emploi à temps partiel, d’autant plus que ces contrats pourront déboucher ensuite sur des CDI à temps plein si la situation de l’entreprise le permet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Défavorable.

(Les amendements nos 145 et 144, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 5 et 17.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l’amendement n5.

M. Jean-Pierre Door. Le Gouvernement a pris des engagements en faveur de la baisse du coût du travail et de la hausse de la compétitivité de nos entreprises : nous ne pouvons naturellement que les soutenir. Cela étant, le présent texte ne traduit qu’une partie de ces engagements puisqu’il se limite à des baisses de charges concentrées sur les bas salaires, tandis que vous renvoyez à 2016 les annonces concernant la baisse des cotisations familiales pour les salaires allant jusqu’à 3,5 fois le SMIC.

Je le répète : il s’agit d’un chèque en blanc, puisque nous ne connaissons toujours pas – c’est très regrettable – les pistes de financement du pacte de responsabilité qui sont attendues dans le PLFSS 2015, c’est-à-dire en octobre prochain. Rien n’empêchera alors le législateur d’y traduire l’ensemble du dispositif de baisse des cotisations familiales annoncé par le Gouvernement et, ainsi, d’améliorer la visibilité juridique et sociale à moyen terme des entreprises, car celles-ci veulent savoir quel est leur cap. Autant leur indiquer dès aujourd’hui quelles seront les pistes que vous envisagez : c’est l’objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement n17.

Mme Véronique Louwagie. Dans la situation économique où nous sommes, il faut provoquer un véritable choc de compétitivité, redonner confiance aux entreprises et retrouver la croissance. Je rappelle la dernière prévision de croissance de l’INSEE : elle ne dépasse pas 0,7 % en 2014. Nous savons que les entreprises françaises ont un problème de marges qui continuent de se réduire, entraînant du même coup une baisse du niveau d’investissement des entreprises de 1,9 % en 2012 puis de 2,3 % en 2013.

« Redonner de la force à notre économie, c’est indispensable ! Ce sont les entreprises qui créent les emplois et nous devons tout faire pour qu’elles y parviennent. » Ces propos ont été tenus le 31 mars 2014 par François Hollande. Or, la cote d’alerte est atteinte : le taux de marge des entreprises françaises continue de baisser de manière importante. En 2013, il était de 28,1 % contre 28,3 % l’année précédente. Les causes de cette faiblesse sont connues : le niveau des charges sociales est relativement élevé et le taux de prélèvements obligatoires frôle 46 % du PIB. Cette dégradation est importante car elle pénalise les entreprises françaises par rapport aux entreprises concurrentes, qu’elles soient d’Europe ou d’Asie. Je rappelle que le taux de marge des entreprises de l’ensemble de l’Union européenne est de 37 %, qu’il atteint 40,14 % en Allemagne et 39,25 % en Italie.

C’est pourquoi le présent amendement vise à réduire les charges sociales de manière assez substantielle pour provoquer un véritable choc de compétitivité et apporter une aide considérable à nos entreprises afin qu’elles investissent de plus en plus, qu’elles innovent et surtout qu’elles embauchent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Défavorable. Ces amendements visent à brûler les étapes, en quelque sorte, puisqu’une mesure souhaitée par le Gouvernement et prévue pour entrer en vigueur en 2016 serait appliquée dès 2015.

Mme Véronique Louwagie. Ce serait un message fort !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Une fois de plus, monsieur Door, vous nous demandez de vous citer les économies que nous souhaitons faire,…

M. Jean-Pierre Door. Exact !

M. Gérard Bapt, rapporteur. … tout en gageant la dépense induite par votre amendement grâce à une augmentation de taxe !

Mme Véronique Louwagie. Nous vous expliquons comment faire !

M. Christian Jacob. Vous n’ignorez pas l’article 40…

M. Gérard Bapt, rapporteur. Quelle contradiction entre nous, d’une part, qui proposons des mesures de bon sens – vous en convenez vous-mêmes – tout en maîtrisant les finances publiques et vous, d’autre part, qui voulez une fois de plus augmenter des taxes au lieu de réaliser des économies !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Vous n’ignorez pas l’obstacle législatif que constitue l’article 40 de la Constitution, monsieur le rapporteur. Nous étions dans l’obligation de gager la mesure pour que notre amendement soit recevable. Or, il consiste à aller plus vite que vous pour envoyer dès que possible un message aux entreprises ! N’interprétez donc pas faussement le gage.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Ce débat est central. Nous voulons accélérer la mise en œuvre du pacte de responsabilité et du pacte de compétitivité. Vous devriez vous réjouir que nous vous y aidions ! Mme Louwagie l’a très bien dit : le taux de croissance ne sera pas celui que vous espériez. On nous disait il y a quelques mois que la courbe du chômage s’inverserait. La prévision de croissance retenue pour 2013 était de 1 % ; la croissance effective ne dépassera pas 0,7 %.

Vous savez bien, monsieur Bapt, que les amendements non gagés sont irrecevables. Puisque vous connaissez bien les affaires sociales, permettez-moi de vous rappeler que lors de la réforme des retraites, nous vous avons proposé de réaliser des économies en procédant à de véritables réformes structurelles, mais vous avez balayé ces suggestions d’un revers de main. Nous ne serions pas aujourd’hui en train de chercher de l’argent dans des conditions impossibles afin d’améliorer la compétitivité des entreprises si vous aviez tout simplement entendu votre opposition ! Vous voulez des réformes structurelles ? Nous vous les proposons, mais vous les écartez ! Elles auraient pourtant permis de provoquer ce choc de compétitivité pour les entreprises et d’améliorer le pouvoir d’achat !

M. Michel Issindou. Que c’est facile, a posteriori !

M. Philippe Vigier. Les Français ont bien vu que vous avez tout à l’heure voté en faveur de notre amendement avant de vous dédire. Je regrette que nous n’en soyons pas restés à son adoption car il permettrait de renforcer la compétitivité tout en améliorant le pouvoir d’achat de nos compatriotes !

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Vous n’avez répondu par aucun argument de fond, monsieur le rapporteur. Vous avez étayé votre avis défavorable à l’amendement en expliquant qu’il n’entraînait aucune économie – nous en prenons acte – et en évoquant le gage, dont vous savez bien qu’il est obligatoire. Vous ne vous êtes donc pas prononcé sur le fond, alors même que cet amendement contribue à une véritable diminution des charges sociales. J’aurais pourtant voulu savoir si vous êtes d’accord avec cette diminution importante pour les entreprises mais, encore une fois, vous ne vous êtes pas prononcé. Nous sommes pourtant là pour débattre de ces questions sur le fond !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Pardonnez le ton peut-être un peu brutal de mon propos, chers collègues, mais je tiens à ce que nous relevions les contradictions des uns et des autres. M. Woerth nous reprochait tout à l’heure d’inscrire dans un PLFR présenté en milieu d’année des mesures qui ne s’appliqueraient qu’au 1er janvier 2015 ; aujourd’hui, vous nous demandez d’inscrire le double de mesures qui s’appliqueront encore plus tard !

M. Michel Issindou. Quelle incohérence !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. De surcroît, vous ne cessez de nous parler du financement des mesures. Nous vous avons déjà expliqué plusieurs fois comment elles sont financées. J’ai bien écouté vos propos : jamais vous n’avez proposé un financement susceptible de couvrir le coût considérable des mesures que vous prônez !

En politique, le moment vient où chacun doit prendre ses responsabilités. Vous aurez beau commenter toutes les statistiques de telle ou telle revue de presse, la responsabilité consiste à couvrir les dépenses que l’on propose. Pourquoi ne pas décider d’une dépense aussi massive, nous demandez-vous ; et pourquoi pas, dans ce cas, cent kilomètres supplémentaires d’autoroute gratuite ?

M. Philippe Vigier. Tout ce qui est excessif est insignifiant…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Les notions d’équilibre et de responsabilité vous obligent à argumenter en évitant toute caricature. Nous nous engageons dans la réduction massive et inégalée des cotisations sociales et patronales. Vous pouvez certes en demander davantage. En tout état de cause, certains financent leurs mesures par la dette – dont il suffit de constater l’évolution depuis dix ans – et d’autres par des mesures d’économie !

M. Olivier Véran. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Vous aurait-il échappé, monsieur le secrétaire d’État, que c’est vous qui êtes aux responsabilités ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. C’est chacun d’entre nous !

M. Christian Jacob. Dites-nous donc où sont les baisses de la dépense publique ? Depuis le début de ce débat tout comme en commission, vous avez été incapable de justifier la moindre baisse de la dépense publique ! Nous avons évoqué les mesures structurelles au fil des différents textes. Lors du débat sur les retraites, nous avons été très clairs : prenons des mesures concernant l’âge plutôt que de faire ce que vous avez fait, c’est-à-dire augmenter les pensions et baisser les cotisations ! De même, lors du débat sur les jours de carence, nous vous avons dit sans ambiguïté qu’il ne fallait pas revenir sur le jour de carence mais plutôt traiter le secteur public comme le secteur privé !

Mme Bérengère Poletti. Eh oui !

M. Christian Jacob. Concernant l’UNEDIC, nous vous avons également dit que nous étions prêts à prendre nos responsabilités !

Les mesures structurelles sont donc parfaitement claires dans notre esprit. Au contraire, vous ne nous présentez qu’un texte d’affichage qui n’est pas autre chose qu’un tract, un document de communication.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. C’est tout de même un peu trop simple !

M. Christian Jacob. Prenez donc le micro pour me répondre plutôt que de bougonner, monsieur le secrétaire d’État ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Les baisses de cotisations interviendront le 1er janvier 2015. Où sont donc les économies ? Pourquoi ce projet de loi de financement rectificative, si ce n’est pour diffuser un tract politique ? C’est son seul intérêt, puisque vous reportez de toute façon les baisses de dépense ! Vous auriez dû le faire lors du PLFSS : c’eût été plus cohérent ! Vous êtes incapables de financer les mesures que vous proposez, et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle la situation de votre groupe est aussi tendue ! Les uns et les autres se rendent en effet bien compte qu’il y a là un leurre !

(Les amendements identiques nos 5 et 17 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 56 et 113.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l’amendement n56.

M. Francis Vercamer. Depuis deux ans, le Gouvernement n’a cessé d’attaquer les services à la personne : plafonnement global des avantages fiscaux, augmentation de la TVA, suppression du forfait. Depuis, le secteur est en perdition. Le nombre d’heures déclarées en 2013 est inférieur de 29,5 millions à celui de l’année précédente, ce qui représente la destruction de 16 500 emplois en équivalent temps plein.

À une question d’actualité, monsieur le secrétaire d’État, vous aviez répondu qu’un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2013 avait permis de maintenir un allégement de 75 centimes par heure des cotisations patronales que les particuliers versent pour l’emploi d’un salarié, et vous aviez indiqué que le Gouvernement était prêt à examiner avec le Parlement la possibilité d’amplifier cette mesure.

M. Philippe Vigier. Nous y sommes !

M. Francis Vercamer. Par cet amendement, je vous permets de respecter votre promesse – avec un an de retard, certes. Je vous propose en effet de relever le montant de cet allégement de 75 centimes à deux euros. J’espère que vous l’accepterez car le secteur des services à la personne est en crise : il perd un très grand nombre d’emplois alors même qu’il est extrêmement utile à un certain nombre de Français, notamment les personnes âgées et celles qui sont en situation de handicap. Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d’État, de ne pas considérer qu’il s’agit d’un amendement de l’opposition, mais simplement d’un amendement de bon sens !

M. Philippe Vigier. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l’amendement n113.

Mme Bérengère Poletti. J’irai dans le même sens que mon collègue Vercamer.

M. Dominique Baert. Ce n’est pas une surprise !

Mme Bérengère Poletti. Le secteur de l’emploi à domicile, qui est loin de concerner exclusivement les catégories favorisées, est complètement sinistré. Il connaît une dégradation inédite, ainsi qu’une recrudescence du travail non déclaré, dans des proportions considérables. Ce sont environ 16 500 emplois détruits en équivalents temps plein, soit un plan social d’une très grande ampleur.

Pour la première fois en 2013, la masse salariale nette du secteur des particuliers employeurs recule en rythme annuel – de 2,2 %. Porter à 2 euros la déduction forfaitaire pour les ménages français qui emploient un salarié à domicile, ce serait l’opportunité de leur adresser un message fort de confiance dans leur capacité à créer de l’emploi.

Les périodes fortes en matière de recrutement d’emploi à domicile sont les mois de juillet à septembre. La question de la reconquête du travail non déclaré dépend donc du message adressé aujourd’hui – il faut le faire le plus tôt possible – aux ménages français concernés. Car ce qui coûte cher à notre pays, mes chers collègues, c’est le travail non déclaré et le chômage.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements,…

Mme Bérengère Poletti. C’est un tort !

M. Gérard Bapt, rapporteur. …jugeant que porter la réduction de 0,75 euro à 2 euros l’heure était intenable en l’état actuel de nos finances publiques.

M. Francis Vercamer. Vous pouvez sous-amender !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cela étant, je reconnais que la question de l’emploi à domicile fait partie des préoccupations de la commission. Nous attendons que le Gouvernement rende un arbitrage sur cette question, à l’occasion de ce texte ou d’un texte à venir.

M. Élie Aboud. C’est précisément l’occasion !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je ne vais pas refaire l’historique des mesures concernant les emplois familiaux, même si, parfois, la politique consiste à faire de la pédagogie, et donc, de la répétition. J’ai eu l’occasion de m’exprimer sur l’ensemble des mesures qui ont été prises par les uns et par les autres, et qui ont, d’une certaine façon, pénalisé le secteur. Je pense notamment à celle que vous avez prise lorsque vous avez supprimé, sans aucun motif, la réduction de 15 points pour les particuliers employeurs.

M. Philippe Vigier. Il fallait la rétablir !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Nous avons pris une deuxième mesure consistant à supprimer la possibilité de cotiser au forfait, car cela réduisait les droits des salariés. Nous avons donc rétabli les droits sociaux des salariés et pris une mesure de compensation, que vous avez bien voulu rappeler, cette réduction de charges de 0,75 euro l’heure ayant été adoptée, à mon initiative, par le Parlement.

S’agissant des amendements, la législation en vigueur prévoit que le montant de la réduction de cotisation est fixé par un décret. Le ministre des finances, en lien avec les autres ministres concernés – un certain nombre de déclarations ont été faites ici, en cette même place, par d’autres ministres que votre serviteur – pourra fort bien envisager une majoration. C’est ce que nous sommes en train de calibrer, en fonction de l’avancement du texte et des équilibres ou déséquilibres budgétaires qui sortiront de la discussion parlementaire. Nous verrons alors si cette réduction, fixée aujourd’hui à 0,75 euro, sera portée à 1 euro, 1,25 euro, 1,50 euro, 1,75 euro ou 2 euros.

Cela peut paraître peu, mais vous ne cessez d’additionner les dizaines, voire les centaines de millions d’euros de dépenses. Même si chacun est conscient que cela peut engendrer des recettes et des retours, tels que la déclaration d’heures ou d’emplois aujourd’hui dissimulés, le rendement de la mesure n’est pas automatique, alors que tous les employeurs bénéficieront de la réduction.

C’est un vrai sujet, mais il faut éviter les caricatures et nous laisser le temps – cela ne durera pas des lustres – de calibrer la compensation financière à apporter, car nombre d’amendements coûteux ont été déposés sur ce texte. En fonction de cet équilibre qui reste à trouver, le Gouvernement prendra ses responsabilités, dans le droit fil des réponses que j’ai faites par deux fois à des questions d’actualité.

M. le président. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Lors d’une séance de questions au Gouvernement, nous vous avions interrogé sur ce sujet. Vous savez l’attachement du groupe UDI – et sans doute sur l’ensemble de ces bancs – aux emplois en matière de services à la personne.

Monsieur le secrétaire d’État, vous dites qu’il faut faire de la pédagogie. Lorsque nous étions dans la majorité, nous étions opposés à la suppression du forfait comme à la réduction de 15 points pour les particuliers employeurs. Comme je ne doute pas que vous ayez parfaitement en tête que nous y étions opposés, je peux le dire avec force. Je vous rappelle également que ce n’est pas nous qui avons supprimé l’Agence nationale des services à la personne.

Lorsque cette question vous a été posée, monsieur le secrétaire d’État, vous avez dit que vous alliez faire un effort. C’est un sujet sur lequel nous essaierons peut-être, ce soir, d’avancer ensemble. Mais, puisque cela relève d’un décret, allez-vous en prendre, oui ou non, l’engagement devant la représentation nationale ? C’est un engagement très important, qu’il ne faut pas prendre à la légère, car des dizaines de milliers d’emplois sont en jeu. Il y a vraiment urgence en matière d’emploi, j’en veux pour preuve que M. Rebsamen nous a expliqué, la semaine dernière, qu’on allait doubler le montant de l’aide consacrée au fameux contrat de génération – qui ne marche pas – parce que le chômage continuait à augmenter et que les seniors avaient besoin de ce dispositif.

En réalité, monsieur le secrétaire d’État, nous voulons vous aider à tenir votre engagement, qui appelle des mesures d’urgence. Allons au bout du chemin !

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Monsieur le secrétaire d’État, si nous débattons aujourd’hui, ce n’est pas pour regarder vers le passé, même si l’on peut y trouver des explications.

Nous sommes réunis aujourd’hui afin de trouver des solutions pour l’avenir. Vous avez dit à plusieurs reprises qu’il fallait trouver des solutions rapides. Nous ne faisons pas une loi de financement rectificative pour les mettre en place six mois après, mais pour envoyer très rapidement des signaux à nos concitoyens. De surcroît, c’est la bonne période pour envoyer un signal aux personnes qui vont employer des salariés à domicile – je pense notamment à la rentrée des classes où l’on peut avoir besoin de se faire aider à la maison. Il ne faut pas attendre le mois de novembre !

Notre amendement est extrêmement important. Nous ne vous demandons pas, monsieur le secrétaire d’État, de le soutenir, mais nous avons besoin de vous entendre prendre l’engagement de faire passer par décret cette déduction forfaitaire à 2 euros.

(Les amendements identiques nos 56 et 113 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Sur l’amendement n176, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n176.

Mme Jacqueline Fraysse. Par rapport aux droits existants, les alinéas 11 et 12 étendent les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires à la cotisation au Fonds national d’aide au logement, à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et, nous en avons beaucoup parlé, aux cotisations d’accidents du travail et maladies professionnelles.

Nous avons expliqué à plusieurs reprises pourquoi nous étions opposés à ces exonérations, qui ne donnent pas de résultats sur les chiffres du chômage. Ces exonérations, je le rappelle, sont appliquées depuis des années. Ce n’est donc pas nouveau. Malgré cela, vous proposez de les élargir encore. Notre amendement vise donc à supprimer les alinéas 11 et 12, qui proposent d’étendre ces exonérations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement revient à laisser à leur niveau actuel les allégements de charges sur les bas salaires. Ce qui prouve que vous n’en contestez pas l’utilité.

Mme Jacqueline Fraysse. Bien sûr que si ! C’est ce que je viens de dire !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Alors, il eût fallu proposer d’en supprimer l’ensemble.

Les travaux du Conseil d’orientation pour l’emploi avaient montré que la suppression des allégements de charges au niveau des bas salaires conduisait à la disparition de 300 000 à 400 000 emplois, sur une courte période.

La commission est défavorable à cet amendement qui est contraire à l’esprit du texte.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je constate que je n’ai pas été claire. Je vais donc, monsieur le rapporteur, répéter mes explications.

M. Marc Dolez. Voilà ! vous avez gagné !

Mme Jacqueline Fraysse. Nous sommes contre les exonérations de cotisations sociales, qui sont appliquées depuis des années. À l’évidence, elles ne favorisent pas l’emploi puisque le chômage ne cesse d’augmenter ; elles n’aident pas non plus l’investissement puisque nos entreprises sont en difficulté, et l’économie est en berne.

Dans notre amendement, nous proposons, en toute logique, de ne pas en étendre le champ puisque celles qui existent depuis des années sont inutiles.

Par ailleurs, monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous dire que je voterai sans hésiter contre l’article 2 dans sa totalité, car c’est un article assassin ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Door. Vous avez tort !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n176.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants74
Nombre de suffrages exprimés74
Majorité absolue38
Pour l’adoption14
contre60

(L’amendement n176 n’est pas adopté.)

M. le président. Sur les amendements identiques nos 109 rectifié, 161 et 178, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement n109 rectifié.

M. Denys Robiliard. L’objectif de cet amendement, qui concerne les cotisations AT-MP, a été parfaitement expliqué. Je me bornerai à répondre à ce qu’a dit M. le secrétaire d’État sur le texte. Il a indiqué qu’il avait été construit de façon que les baisses de cotisations soient imputées uniquement par défaut sur les cotisations AT-MP, l’idée du Gouvernement étant qu’il n’y ait plus de cotisations de Sécurité sociale sur le SMIC, et que, par conséquent, n’était concernée qu’une faible partie des salaires. Je rappelle tout de même qu’environ 700 000 personnes sont payées au SMIC, ce qui n’est pas rien.

Puisque cette mesure ne s’applique qu’au socle, celui que paient toutes les entreprises, quels que soient leur secteur d’activité et leur sinistralité, cela signifie que, pour les entreprises dont le secteur d’activité sort de ce socle, ce seront bien des cotisations de Sécurité sociale et qu’elles devront être payées.

Si j’ai bien compris les propos du Gouvernement, il y aura des entreprises qui devront payer des cotisations de Sécurité sociale, uniquement sur la branche AT-MP, dès lors que cela dépassera le « pourcent », et bien qu’il s’agisse de Sécurité sociale. On ne peut donc pas dire que ces entreprises, qui emploient des personnes au SMIC, seront exonérées de cotisations de sécurité sociale.

Il y a bien une exception à la règle définie par le Gouvernement. Dès lors que cette exception existe, rien ne s’oppose à ce qu’on la généralise à la branche AT-MP. Il sera plus simple d’expliquer que l’impôt n’a pas à financer la branche AT-MP. De toute façon, toutes les entreprises du bâtiment ne bénéficieront pas d’une exonération, même quand elles paient au SMIC.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n161.

M. Jean-Louis Roumegas. Il s’agit d’un sujet dont nous avons déjà discuté mais dont il importe de discuter à nouveau, car il s’agit d’une affaire importante ! Le droit actuel prévoit qu’une exonération de cotisation ne peut porter sur la part de base des cotisations AT-MP. Le Gouvernement propose dans le texte un changement qui est important, non par son montant mais d’un point de vue culturel. La baisse de cotisation devrait être compensée par des abondements en provenance du budget de l’État. C’est surtout le message symboliquement adressé aux entreprises qui importe à nos yeux, car elles ne seront plus nécessairement tenues de contribuer au financement des risques intrinsèquement liés au travail et donc à leur activité. L’AT-MP est la branche dont le caractère assurantiel est le plus affirmé. La prise en compte de la pénibilité du travail faisant actuellement débat et le MEDEF attaquant le compte de pénibilité créé par la réforme des retraites, il importe de réaffirmer les valeurs qui ont prévalu à la création de cette branche !

Mme Isabelle Le Callennec. Le MEDEF ne l’attaque pas, il dit simplement qu’il est difficile à mettre en œuvre !

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n178.

M. Marc Dolez. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Le débat a eu lieu et la commission, pour les raisons exposées tout à l’heure, a voté contre les amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Avis défavorable, comme tout à l’heure. Je signale à M. Robiliard qu’une entreprise dont le taux de sinistralité serait non nul ne bénéficierait pas du « zéro charge », car elle aurait à payer une contribution pour cette raison. Je tenais à vous apporter cette précision et vous rassurer sur ce point, monsieur le député. Cela découle de la différence entre la part mutualisée et la part liée à la sinistralité de l’entreprise ou de la branche.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. Je souhaite éclairer le vote de nos collègues, car il s’agit d’un sujet extrêmement important. Le régime des accidents du travail est issu du programme du Conseil national de la Résistance et a été confié aux partenaires sociaux. Il est extrêmement important, en particulier à un moment où autant de salariés souffrent d’accidents du travail, de maladies professionnelles et d’exposition à des risques de toute nature. Nous débattons d’un dispositif « zéro charges au SMIC » assorti d’une précision sémantique ajoutant « zéro charges de Sécurité sociale ». Mais que les choses soient claires, la protection sociale compte aujourd’hui pour 40 % des charges patronales, dont 10 % au titre des retraites complémentaires et de l’assurance chômage et 2 % au titre des accidents du travail et de la cotisation au Fonds national d’aide au logement.

On ne touche pas aux 10 % de protection complémentaire. Dont acte, mais c’est ce qui aurait été un vrai « zéro charges au SMIC ». Les entreprises paieront toujours des charges à hauteur de 10 %. On passe donc de 12 % à 10 % tout en remettant en cause une branche qui fonctionne et plus largement le principe fondamental selon lequel les entreprises doivent contribuer à la protection de leurs salariés. Même pour ceux qui croient dur comme fer que les allégements de charge peuvent avoir des effets massifs même sans demander la moindre contrepartie, le rapport coût-avantage de la suppression de la branche est très mauvais. C’est la raison pour laquelle je soutiendrai aussi les trois amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 109 rectifié, 161 et 178.

(Il est procédé au scrutin.)

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants78
Nombre de suffrages exprimés77
Majorité absolue39
Pour l’adoption17
contre60

(Les amendements identiques nos 109 rectifié, 161 et 178 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir l’amendement n163.

Mme Eva Sas. Il s’agit, une fois de plus, de travailler à la conditionnalité des exonérations que nous nous apprêtons à accorder aux entreprises et en particulier de les réserver aux contrats de travail à durée indéterminée. Je rappelle que le code du travail dispose que « le contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale de la relation de travail ». Malheureusement, cela devient de plus en plus théorique. On a constaté au cours des dernières années un recours accru aux contrats à durée déterminé, qui sont par nature précaires. D’après la DARES, l’embauche en CDD a dépassé 83 % en 2013.

Le dispositif d’exonération de cotisations patronales qui nous est proposé sans distinctions, conditions ni contreparties suscite de nombreuses inquiétudes que nous avons clairement fait connaître. Il faudrait au moins éviter que les exonérations favorisent le recours systématique au CDD. Nous proposons donc de réserver les baisses de cotisation employeur au recours à des contrats à durée indéterminée, ce qui incitera les employeurs à choisir ce type de contrat de travail et favorisera la qualité et la stabilité de l’emploi et donc la qualité de vie de nos concitoyens.

M. Christophe Cavard. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable. Nous avons déjà eu ce débat tout à l’heure. Je rappelle que les CDD sont grevés d’une prime de précarité et que la loi de sécurisation de l’emploi a augmenté la cotisation chômage pesant sur les CDD. J’ajoute à l’attention particulière de Mme Sas, qui sera très sensible à l’argument, que l’on ne saurait comment faire, si l’on adoptait son amendement, en cas de remplacement d’une collaboratrice partie en congé de maternité ! (Sourires.)

M. François André. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis.

(L’amendement n163 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir l’amendement n162.

Mme Eva Sas. L’amendement vise à conditionner les baisses de cotisation employeur au recours à des contrats à temps plein. D’après l’INSEE, plus de la moitié des faibles rémunérations annuelles découlent du travail à temps partiel. Par ailleurs, les femmes sont deux fois plus touchées par le travail à temps partiel que les hommes. Surtout, la proportion de contrats à temps partiel a progressivement augmenté au cours des années pour atteindre en 2012 18 % des contrats en cours. Le dispositif d’exonération de cotisation patronale, proposé sans distinctions, a été fortement mis en question lors de cette séance. L’amendement vise à réserver l’exonération à des contrats à temps plein en vue d’inciter les employeurs à choisir cette durée de temps de travail afin de favoriser la qualité de l’emploi et surtout l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que celles qui ont mené au rejet de l’amendement précédent. À propos du temps partiel, je rappelle que la loi de sécurisation de l’emploi, dont le rapporteur était notre excellent collègue Jean-Marc Germain, impose un socle minimal hebdomadaire de travail à temps partiel de vingt-quatre heures, un principe de majoration des heures complémentaires et une obligation de négociation sur l’organisation du temps de travail à temps partiel dans l’ensemble des branches d’activité dans lesquelles au moins un tiers de l’effectif salarié travaille à temps partiel.

Mme Jacqueline Fraysse. Mais rien n’est appliqué !

M. Christian Jacob. Tout cela n’est pas très cohérent !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis que le rapporteur.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. Je profite du débat sur l’amendement pour poser une question au Gouvernement. Depuis aujourd’hui, tout nouveau contrat de travail ne peut porter sur une durée inférieure à vingt-quatre heures, ce qui est une déclinaison de la loi de sécurisation de l’emploi. Vous aviez alors voté, chers collègues de la majorité, mais nous pas, que cette mesure s’appliquerait à partir du 1er janvier. Face à la difficulté d’établir des contrats portant sur une durée aussi courte démontrée par les branches professionnelles, vous avez ensuite reculé l’échéance au 1er juillet, c’est-à-dire aujourd’hui. J’aimerais que l’on fasse le point. J’ai lu dans la presse, car c’est dans la presse qu’on apprend beaucoup de choses, malheureusement, …

M. Gérard Bapt, rapporteur. Pourquoi malheureusement ?

Mme Isabelle Le Callennec. On préférerait les apprendre ici ! J’ai lu dans la presse qu’il demeure des exceptions à l’obligation faite à tout contrat de porter sur une durée minimale de vingt-quatre heures. Je tiens à ce que la représentation nationale le sache. Vous votez des lois, chers collègues de la majorité, à grand renfort de communication, mais en fait rien ne se passe comme vous l’aviez imaginé. Nous savons, nous, que rien ne se passe comme vous l’aviez imaginé, car les responsables d’entreprise nous font savoir qu’il s’agit d’usines à gaz ou de mesures difficiles à mettre en œuvre en raison de l’existence de cas particuliers. J’aimerais donc que nous fassions le point, à cet instant, sur ces fameuses exonérations. Quelles sont les professions dont les contrats ne sont pas soumis à une durée minimale de vingt-quatre heures ?

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Notre groupe soutiendra l’amendement, d’ailleurs très semblable à l’amendement n144 que nous avons défendu tout à l’heure et qui procède de la même préoccupation et de la même philosophie. Nous rappelons l’impérieuse nécessité de limiter par la loi la durée du travail à temps partiel et exigeons évidemment que la loi soit appliquée. Faut-il le dire ici ? Peut-être !

(L’amendement n162 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n180.

Mme Jacqueline Fraysse. J’ai déjà fait savoir notre opposition aux exonérations de cotisations sociales et particulièrement à leur extension. Je n’insiste donc pas sur les raisons pour lesquelles nous y sommes hostiles. Vous n’avez pas accepté, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, notre amendement réclamant que l’on n’étende pas davantage les exonérations. L’amendement n180 est donc un amendement de repli. Dès lors que les exonérations sont maintenues, il conviendrait au moins d’en moduler le montant en fonction de l’évolution des effectifs de l’entreprise, puisque vous affirmez, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, vouloir favoriser l’emploi. Il s’agit donc de faire en sorte que les exonérations favorisent à proportion les entreprises créant des emplois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission n’a pas adopté l’amendement. Je tiens à faire remarquer à Mme Fraysse que son adoption pénaliserait singulièrement les entreprises en difficulté dont il faut néanmoins assurer l’existence. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Même avis.

(L’amendement n180 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n151.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Cet amendement de la commission vise à supprimer l’avantage lié à la neutralisation d’une partie de la rémunération dans le calcul des exonérations dans certains secteurs d’activité. Il rejoint d’ailleurs l’esprit, mais l’esprit seulement, de l’amendement présenté en commission par M. Accoyer qui proposait, non sans excès, d’exclure la grande distribution du bénéfice des allégements de cotisations.

Mme Isabelle Le Callennec. Et qui n’avait rien d’excessif !

M. Gérard Bapt, rapporteur. Il s’agit de modifier ce qui crée aujourd’hui un avantage injustifié pour les entreprises des secteurs concernés, soit les entreprises couvertes par un accord collectif étendu en vigueur au 1er octobre 2007. L’amendement propose de modifier le mécanisme de calcul neutralisant certaines rémunérations liées aux temps de pause, d’habillage et de déshabillage dans le calcul des exonérations de cotisations, ce qui permet en réalité d’augmenter à niveau de salaire inchangé le montant de l’exonération dont bénéficie l’employeur.

Une telle modification ne porte évidemment pas atteinte au droit des salariés de bénéficier de temps de pause, d’habillage et de déshabillage ni d’ailleurs à celui d’être rémunérés à ce titre. Il est néanmoins normal que cette rémunération entre bien dans le calcul des exonérations de cotisation. Les secteurs principalement concernés par un tel avantage sont la grande distribution, la sécurité, les abattoirs et la biscuiterie qui ont par ailleurs largement bénéficié de la mise en œuvre du CICE dont la montée en charge compensera largement en 2015 la suppression de la possibilité de maximiser l’avantage retiré des exonérations de cotisation. En particulier, l’optimisation réalisée par le plus grand fournisseur d’emploi qu’est la grande distribution doit être corrigée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui ne remet pas en cause les droits des salariés, tout en mettant fin à un effet d’aubaine pour un certain nombre d’employeurs. Le rapporteur l’a dit, et j’y insiste, cela concerne à 80 % le secteur de la grande distribution.

(L’amendement n151 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements rédactionnels, nos 94 et 93, du rapporteur.

(Les amendements nos 9493, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Marc Dolez, pour soutenir l’amendement n181.

M. Marc Dolez. L’alinéa 26 de cet article supprime le quinzième alinéa de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale qui traite des exonérations de cotisations sociales patronales et dispose notamment que l’employeur doit tenir à la disposition des organismes de recouvrement des cotisations un document, afin de permettre le contrôle du respect des dispositions de cet article. Nous proposons de revenir sur cette suppression dont nous ne comprenons pas les raisons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. Le problème que vous soulevez est réel. Après avoir interrogé l’ACOSS, je puis vous indiquer les raisons conduisant à supprimer, à mon sens à juste titre, la référence à ce document.

Un décret du 31 décembre 2010 a précisé les modalités de calcul de la réduction dégressive consécutive à la mise en place de l’annualisation et supprime l’obligation de remplir ce document justificatif du calcul des allègements. En effet, avec l’annualisation et la mise en place d’une procédure de régularisation en fin de période ou de régularisation anticipée, ce document n’avait plus de raison d’être. À compter du 1er janvier 2011, seules les informations utiles au contrôle des exonérations relatives aux heures supplémentaires et complémentaires y étaient recensées. Enfin, les dispositions réglementaires relatives au document justificatif sur ce point ont été supprimées en application de la loi de finances rectificative du 16 août 2012, qui a quasiment supprimé tous les avantages à ce titre, lesquels découlaient de la loi TEPA. La référence à ce document justificatif est donc devenue sans objet. Il est donc tout à fait possible de la supprimer.

Bien qu’il ait retenu son attention, la commission n’a pas adopté cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Même avis défavorable.

(L’amendement n181 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Karine Berger, pour soutenir l’amendement n119 rectifié.

Mme Karine Berger. Cet amendement vise à instituer, pour la baisse des cotisations patronales que nous votons aujourd’hui, les mêmes mécanismes de contrepartie que ceux qui avaient été prévus pour les allégements dits Fillon de 2008. Il avait été précisé en 2008 que les allégements de cotisations pouvaient être annulés au bout de trois ans si, entre temps, aucun accord d’entreprise sur les salaires n’avait été signé. Il existait donc bien des contreparties.

Deux décrets ont ensuite été pris, en 2009 et en 2010, précisant la façon dont était assuré le suivi de ces contreparties. Le dispositif a été appliqué puisqu’aussi bien en 2010 qu’en 2011 et en 2012, plus de deux cents entreprises ont dû rembourser les baisses de cotisations dont elles avaient bénéficié, parce qu’elles n’avaient toujours pas signé d’accord d’entreprise sur les salaires.

L’amendement que nous proposons aujourd’hui vise à ce que, en cas d’absence d’accord de branche, le même mécanisme s’applique aux baisses de cotisations patronales prévues dans cet article 2, avec dans un premier temps une diminution de 10 % des allégements, puis une annulation si, au bout de trois ans, un accord de branche organisant l’utilisation de cette diminution de cotisations patronales n’a pas été conclu.

Tel est bien l’esprit du pacte de responsabilité et de solidarité visant à ce que les baisses de cotisations patronales décidées à hauteur de 10 milliards d’euros dans ce PLFRSS soient utilisés en priorité pour favoriser le dialogue social et les accords, dans les entreprises, – tel était déjà l’esprit des mesures de 2008 –, mais aussi, aujourd’hui, de manière plus large, dans les branches. Le Président de la République n’a-t-il pas appelé de ses vœux la création d’un observatoire des contreparties le 14 janvier dernier ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Bapt, rapporteur. La commission n’a pas adopté cet amendement. Je fais tout d’abord observer à Mme Berger qu’il est question dans l’exposé sommaire d’une négociation au niveau de la branche et dans le texte de l’amendement d’une négociation au niveau de l’entreprise.

Vous souhaitez, madame Berger, que des contreparties concrètes aux exonérations de cotisations décidées dans le cadre du pacte soient exigées. La commission partage cette préoccupation. Elle a d’ailleurs adopté, sur ma proposition, un amendement tendant à intégrer à la négociation annuelle de branche sur les salaires le sujet de l’impact des avantages fiscaux et sociaux sur l’emploi et les salaires dans la branche. Cet amendement devrait donc vous satisfaire.

Mais vous souhaitez conditionner les exonérations à la conclusion d’un accord sur les priorités à retenir dans l’utilisation des sommes résultant de l’avantage accordé. S’il est normal que les instances représentatives du personnel soient consultées sur les orientations stratégiques de l’entreprise, cela ne va néanmoins jamais jusqu’à ce que la stratégie soit définie de façon collective. Aujourd’hui, c’est l’employeur qui décide seul des choix de gestion et de la stratégie de son entreprise, même s’il est souhaitable et logique que les IRP en soient informées. Voilà pourquoi la commission a donné un avis défavorable à cet amendement. Mais je l’ai dit, je présenterai un amendement allant lui aussi dans le sens de la transparence sur l’utilisation par les entreprises des allégements de cotisations octroyés dans le cadre du pacte de responsabilité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ce sujet n’est pas nouveau pour le législateur. Il a notamment eu à en connaître au sujet du respect de certaines obligations posées dans le cadre des allégements Fillon.

On a progressé au fil du temps puisque, initialement, aucune condition n’était exigée. C’est peu à peu que des conditions ont été posées, l’objectivité commande d’ailleurs de dire qu’elles l’ont été par nos prédécesseurs – sous une forme qui n’est pas celle que vous reprenez, madame la députée, puisque vous subordonnez l’obtention de la totalité des baisses de cotisations à la conclusion d’un accord, alors qu’il n’est question aujourd’hui que de la négociation annuelle obligatoire, du respect de la parité, etc. – j’en oublie certainement car je ne suis pas spécialiste du droit du travail.

Il n’est pas possible de conditionner l’octroi d’allégements de charges à la conclusion d’un accord. On peut recommander à une entreprise de s’engager dans une négociation en vue d’un accord, voire l’obliger à s’engager dans cette voie. Mais il serait, à mon sens, inapplicable et sans doute peu constitutionnel, le juge constitutionnel demeurant bien entendu souverain, que de lui imposer de parvenir à la conclusion d’un accord.

Cet amendement soulève un deuxième problème, celui de la proportionnalité des sanctions. Dans le cas des allègements Fillon, il était prévu tout d’abord une réduction de 10 % des allègements puis leur annulation au terme de trois ans de non-respect des obligations. Le dispositif que vous proposez est plus sévère – je ne porte pas là de jugement, je me fonde sur des éléments purement factuels.

Se pose ensuite le problème de fond : faut-il ou non prévoir des contreparties ? Le Gouvernement s’est, à maintes reprises, exprimé sur le sujet : il ne le souhaite pas. Dans le cadre du pacte de responsabilité, il subordonne la poursuite de la mise en œuvre des mesures à des analyses, des observations de la part des partenaires sociaux. Il a également été demandé que soit créé un observatoire ou mis en place des dispositifs d’évaluation. L’avenir dira comment tout cela évolue. Mais ce que vous proposez, madame la députée, serait inapplicable, sans compter que la sanction prévue risquerait d’être disproportionnée par rapport à l’infraction, si j’ose utiliser ce terme.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Dominique Lefebvre, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. La commission des finances n’a malheureusement pas pu examiner cet amendement, mais je voudrais m’associer aux propos du rapporteur de la commission des affaires sociales et du ministre.

On perçoit bien l’objectif de cet amendement. Il s’agit de faire en sorte que la baisse du coût du travail favorise la compétitivité des entreprises et le dialogue social. Mais, outre que subordonner l’octroi des allègements à la conclusion d’un accord reviendrait probablement à donner un droit de veto aux partenaires sociaux, aux organisations syndicales dans l’entreprise, cela ralentirait beaucoup l’entrée en vigueur de ces allégements, au moment même où la situation économique impose d’agir vite, comme cela est d’ailleurs demandé dans cet hémicycle. Nous avons déjà eu à débattre ici d’un sujet analogue lors de l’instauration du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

S’agissant des conditions du dialogue social dans l’entreprise, certains plaident pour une conditionnalité stricte, ce qui soulève des problèmes juridiques, le secrétaire d’État l’a mentionné ; d’autres pensent que ce peut être un support au dialogue social, sachant que ces obligations de négocier annuellement existent d’ores et déjà.

Dans ces conditions, je pense qu’il faut en rester au cadre existant.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault. N’ayant pas assisté aux débats de la commission des affaires sociales, dont je ne suis pas membre, j’ai une question à poser au rapporteur. L’amendement qu’il va nous proposer prévoit-il qu’en cas de non-respect des conditions, les allégements de cotisations patronales seront supprimés ? Je ne comprends pas pourquoi ce gouvernement ne pourrait pas faire dans le cadre du pacte de responsabilité ce que le gouvernement Fillon est parvenu à faire.

J’ai pu me procurer des données tout à fait intéressantes concernant les contrôles effectués en 2011, 2012 et 2013 sur le respect des contreparties exigées dans le cadre des allégements Fillon. En 2013, plus de deux cents entreprises ont été redressées, à hauteur de près de 20 millions d’euros, et ont dû rembourser les allègements dont elles avaient bénéficié, pour n’avoir pas respecté les conditions posées. Monsieur le rapporteur, votre amendement dispose-t-il que, comme cela est prévu dans d’autres dispositifs adoptés antérieurement, en cas de non-respect des conditions, les allégements devront être remboursés – éventuellement de façon échelonnée, pour que le couperet ne tombe pas immédiatement ?

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. Nous sommes là au cœur du sujet. Quand on interroge les entreprises sur la façon dont elles mettront à profit les allégements de cotisations, celles qui ne vont pas très bien répondent que cela leur permettra peut-être d’assainir leur situation financière, voire d’éviter un dépôt de bilan ou une liquidation judiciaire, et celles qui vont bien disent qu’elles s’en serviront, dans une stratégie offensive, pour la formation, l’innovation ou l’export.

Si nous sommes, bien évidemment, partisans de la baisse des charges patronales et salariales pour les entreprises de notre pays, c’est tout simplement pour qu’elles soient au niveau de compétitivité de leurs principaux concurrents : il est important de le rappeler. Il faut, tout simplement, leur permettre de créer des emplois – c’est ce à quoi nous aspirons tous – et, surtout, lorsque c’est possible, qu’elles cessent d’en supprimer.

J’entends bien les messages que vous adressez à l’aile gauche de votre majorité, consistant à demander sans arrêt des contreparties. À ce propos, j’aimerais savoir ce qu’est cet observatoire des contreparties : mettez-vous aussi à la place des organisations patronales qui se demandent si elles retourneront à votre conférence sociale.

S’agissant de la baisse des cotisations et des charges, je crois que les choses sont claires : elles sont destinées à permettre à nos entreprises de gagner en compétitivité par rapport à leurs principaux concurrents, y compris européens ; c’est aussi simple que cela.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Germain.

M. Jean-Marc Germain. On touche avec cet amendement au sujet essentiel. On a évoqué des questions de rééquilibrage des politiques économiques, tout en ayant un débat très important à propos du CICE, au cours duquel a été formulée une exigence d’efficacité économique autant que « morale », ce dernier mot ayant été employé par l’un de nos collègues. On demande des efforts très importants aux Français, pour aider les entreprises à réussir, ce que tout le monde souhaite. Si l’on ne veut pas que ces aides soient des « cadeaux » aux entreprises, pour reprendre le terme employé par notre collègue Issindou, il faut nécessairement qu’il y ait des contreparties.

Ce n’est d’ailleurs pas nouveau, comme l’a rappelé à l’instant Valérie Rabault. Cela avait été mis en place par le gouvernement Fillon, à propos de l’exigence d’ouverture de négociations salariales. Cela a également été institué à propos de l’égalité entre les femmes et les hommes : à défaut d’accord sur l’égalité professionnelle, une pénalité peut être infligée à l’employeur, qui porte sur un pourcentage des cotisations reçues. Voilà qui répond à l’objection qui avait été soulevée à l’égard de la constitutionnalité de ce mécanisme, qui a été jugé conforme à la Constitution.

Par ailleurs, des contreparties ont également été mises en place par le gouvernement actuel s’agissant des contrats de génération : les entreprises de plus de 300 salariés qui ne concluent pas de tels contrats se voient appliquer une pénalité, qui porte sur 10 % des réductions de charges ou 1 % de la masse salariale.

Mme Isabelle Le Callennec. Mais, monsieur Germain, ils ne fonctionnent pas, les contrats de génération !

M. Jean-Marc Germain. C’est donc un mécanisme qui existe, qui est robuste et qui permet de faire œuvre de bon sens : pour que ces aides aux entreprises soient véritablement des aides et non des cadeaux, il faut, je le répète, des contreparties.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Pour répondre à Mme Rabault, l’amendement qui viendra en discussion dans le cours de la soirée concerne les négociations annuelles obligatoires au niveau de la branche. Ce n’est donc pas du tout une disposition de la même nature que celle contenue dans l’amendement de Mme Berger, qui contient des obligations de contrepartie au niveau de l’entreprise. Il s’agit, par l’amendement à venir, d’ajouter, dans les négociations annuelles par branches relatives à l’emploi et aux salaires, une information, qui sera donnée par les employeurs, concernant l’impact du pacte de responsabilité et de solidarité sur l’emploi et les salaires. Tel est l’objet de cette disposition, qui entre dans le champ du code du travail.

Bien entendu, j’imagine que les organisations syndicales souhaiteront également en juger, s’agissant, notamment, des dépenses d’investissement et de recherche-développement, en dehors de l’impact que cela peut avoir sur l’emploi ou sur les conditions salariales.

(L’amendement n119 rectifié n’est pas adopté.)

4

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2014.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Nicolas Véron