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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2014-2015

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 19 mars 2015

SOMMAIRE

Présidence de Mme Laurence Dumont

1. Approbation de conventions et d’accords internationaux

Accord France-Pays-Bas relatif à la coopération policière à Saint-Martin

Convention internationale de Nairobi sur l’enlèvement des épaves

Avenant à la convention France-Allemagne sur la construction d’un réacteur à très haut flux

Protocole France-Albanie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier

Convention de l’Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche

Suspension et reprise de la séance

2. Exercice de leur mandat par les élus locaux

Présentation

M. Philippe Doucet, rapporteur de la commission mixte paritaire

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique

Discussion générale

Mme Maina Sage

M. Stéphane Saint-André

M. Gabriel Serville

M. Yves Goasdoué

M. Philippe Gosselin

M. Sergio Coronado

Texte de la commission mixte paritaire

Amendement no 1

Vote sur l’ensemble

Suspension et reprise de la séance

3. Biodiversité

Discussion des articles (suite)

Article 64

Amendement no 1081

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Amendement no 1501

Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Article 65

Article 66

Amendement no 1311

Article 67

Amendements nos 1082 , 906

Article 68

Article 68 bis

Amendements nos 1502 , 1083

Après l’article 68 bis

Amendement no 1503

Article 68 ter

Amendements nos 1504 , 502 , 775

Après l’article 68 ter

Amendements nos 500 , 830

Article 68 quater

Amendements nos 776 , 1376

Après l’article 68 quater

Amendement no 1002

Article 68 quinquies

Amendements nos 777 , 1377 , 1450

Après l’article 68 quinquies

Amendements nos 999 , 1003 , 1021 , 1552

Article 69

Mme Danielle Auroi

Amendements nos 1063 , 1110 , 1531 , 1541 , 1176 rectifié , 1532 , 1534 , 1540 , 1533 rectifié , 1432 , 1437 , 1438

Articles 70 et 71

Article 72

Amendements nos 1462 , 1559 (sous-amendement) , 667 , 1319 , 415 , 483 , 501 , 1441 , 1469 , 1539 , 1452

Après l’article 72

Amendements nos 668 , 1044 , 1267 rectifié

Article 73

Amendement no 908

Après l’article 73

Amendements nos 1004 , 1005

Titre

Amendements nos 1574 , 1006

4. Nomination du président du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité

Discussion des articles

Article 1er

Amendement no 1

Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Amendement no 2 rectifié

Article 2

Titre

Amendement no 3

5. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Laurence Dumont

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Approbation de conventions et d’accords internationaux

Procédure d’examen simplifiée

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d’examen simplifié, en application de l’article 103 du règlement, de cinq projets de loi autorisant l’approbation de conventions et accords internationaux (nos 1961, 2649 ; 1238, 2587 ; 2345, 2588 ; 1586, 2560 ; 1888, 2589).

Ces textes n’ayant fait l’objet d’aucun amendement, je vais mettre directement aux voix l’article unique de chacun d’entre eux, en application de l’article 106 du règlement.

Accord France-Pays-Bas relatif à la coopération policière à Saint-Martin

(L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.)

Convention internationale de Nairobi sur l’enlèvement des épaves

(L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.)

Avenant à la convention France-Allemagne sur la construction d’un réacteur à très haut flux

(L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.)

Protocole France-Albanie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier

(L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.)

Convention de l’Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche

(L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble du projet de loi.)

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures deux, est reprise à quinze heures cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

2

Exercice de leur mandat par les élus locaux

Commission mixte paritaire

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, des dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat (nos 2658).

Présentation

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Doucet, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Philippe Doucet, rapporteur de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, madame la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, mes chers collègues, je me félicite de pouvoir vous présenter un texte qui fera beaucoup pour ouvrir, dans les années qui viennent, l’accès à la fonction d’élu local.

Voilà longtemps que les élus ne sont plus à l’image de la société française. Au cours des dernières années, la situation a même empiré chez les élus locaux. Le nombre de maires de moins de quarante ans a été divisé par trois en dix ans, les femmes sont toujours largement absentes des exécutifs locaux et, dans les villes moyennes, près de la moitié des maires sont issus de la fonction publique.

Il était donc primordial de lever certains blocages afin de permettre à chaque citoyen de s’engager.

Le premier enjeu, dont dépend dans une large mesure l’exclusion d’un grand nombre de citoyens de la dynamique démocratique, est la capacité à être candidat, à se présenter à une élection. Faire campagne demande un engagement résolu et nécessite de prendre du temps, y compris au cours de sa journée de travail.

C’est pour cette raison que nous avons décidé d’étendre le congé électif pour les candidats aux élections dans les communes de 1 000 habitants au moins, afin d’inciter davantage de candidats issus du salariat à se présenter.

Le deuxième enjeu est celui des conditions dans lesquelles les élus locaux exercent leur mandat. Partant du même constat que pour le congé électif, nous avons décidé d’étendre le crédit d’heures aux conseillers municipaux des communes de moins de 3 500 habitants, afin qu’ils puissent consacrer le temps nécessaire à l’exercice de leur mandat sans sacrifier leur emploi.

De même, en décidant de fixer par principe l’indemnité de l’élu local au niveau maximal prévu par la loi, nous clarifions la situation de tous les élus qui s’impliquent souvent au détriment de leur carrière professionnelle.

Enfin, pour permettre aux élus de prendre toute la mesure de dossiers qui sont devenus, nous le savons bien, de plus en plus complexes au fil du temps, nous avons décidé de créer un droit individuel à la formation, calqué sur le dispositif existant pour les salariés du privé. Cette mesure répond à une demande forte des associations d’élus locaux que nous avons rencontrées, avec mon collègue Philippe Gosselin, lors des travaux de la mission d’information sur le statut de l’élu, et je suis aujourd’hui satisfait d’avoir pu mener à bien cette réforme importante pour la qualité et l’efficacité de l’action politique locale.

Le troisième enjeu est l’après-mandat, qui est source d’inquiétude pour les élus, et là encore, chacun le comprendra, d’abord pour les salariés du secteur privé.

Nous apportons des réponses importantes, dont, en premier lieu, l’extension du droit à la suspension du contrat de travail et à la réintégration dans l’entreprise à la fin du mandat. Cette mesure concernera désormais les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins, au lieu de 20 000 précédemment, lorsqu’ils ont cessé d’exercer leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat.

Pour les élus qui avaient quitté un emploi précaire et qui se retrouvent sans emploi à l’issue du mandat, nous avons décidé d’allonger de six mois à un an le versement de l’allocation différentielle de fin de mandat.

Le retour des élus locaux sur le marché du travail sera également mieux préparé grâce au système de validation des acquis de l’expérience, que nous avions introduit dans le texte et qui est entré en vigueur, pendant la navette parlementaire, dans la loi du 5 mars 2014 sur la formation professionnelle.

Cet ensemble de mesures permettra, je le crois, de lever les freins à l’engagement politique de bon nombre de citoyens, qui n’auront plus à considérer l’exercice d’un mandat comme un sacrifice au détriment de leur carrière ou, pis, comme un facteur d’exclusion du marché du travail.

Nous avons voulu trouver dans cette loi un équilibre entre droits et devoirs. C’est pourquoi nous avons introduit en première lecture à l’Assemblée nationale la charte de l’élu local, texte qui rappelle les devoirs et les responsabilités des élus locaux et qui instaure un nouveau rite républicain.

Enfin, la proposition de loi créant les conditions pour que les élus locaux puissent disposer du temps nécessaire pour exercer leur mandat, il était logique d’exiger, en retour, une exemplarité en matière de présence. L’obligation de présence dans les assemblées départementales et régionales, sous peine de retenue sur l’indemnité des élus, est désormais inscrite dans la loi. Il reviendra à chaque assemblée, en responsabilité, d’en déterminer les modalités.

Si beaucoup de ces dispositions ont fait l’objet d’un consensus, tant au sein de cet hémicycle qu’avec nos collègues du Sénat, il nous restait cependant cinq points de divergence. À l’issue d’un dialogue efficace et constructif avec le rapporteur du Sénat, Bernard Saugey, nous sommes rapidement parvenus à une solution de compromis.

Ainsi, le texte qui vous est soumis reprend le texte que nous avions adopté en deuxième lecture moyennant les compromis suivants : une réécriture du premier point de la charte de l’élu local ; le maintien du financement de l’allocation différentielle de fin de mandat par les collectivités et non par les élus ; l’adoption du dispositif de financement du droit individuel à la formation des élus tel que prévu par l’Assemblée ; le principe de la modulation des indemnités des élus départementaux et régionaux en fonction de leur assiduité ; enfin, la suppression de toute modification de la définition du délit de prise illégale d’intérêts.

Sur ce dernier point, je salue l’ouverture d’esprit du rapporteur et des sénateurs membres de la commission mixte paritaire, qui a permis que ce sujet ne bloque pas l’ensemble des avancées contenues dans la proposition de loi.

En effet, ces dispositions permettront d’ouvrir de manière pratique l’exercice d’un mandat local à de nouvelles catégories de citoyens, notamment à tous ceux qui ont un emploi salarié, et de permettre à tous les élus de mieux exercer leurs responsabilités, en réglant un certain nombre de problèmes qui existent aussi bien dans les collectivités rurales que dans les collectivités plus urbaines.

Comme en deuxième lecture, j’espère que ce texte permettra l’expression d’un consensus républicain, aussi bien au sein de l’Assemblée nationale qu’entre les deux chambres. Il me semble que nous enverrions un message important aux élus locaux et aux Français si ce texte, qui contribuera, je l’espère, à ouvrir largement l’accès à la fonction d’élu local, pouvait faire l’objet d’un vote à l’unanimité de la part de notre assemblée.

M. Philippe Gosselin. Cela s’annonce plutôt bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, je remercie le rapporteur, Philippe Doucet, d’avoir associé Philippe Gosselin à son travail pour aboutir à ce statut de l’élu qui est un message non seulement aux élus de France, mais aussi aux citoyens. Ce texte va ouvrir des portes à beaucoup de personnes qui estimaient jusqu’alors que leur vie professionnelle ne leur permettait pas d’accéder à un mandat.

Nous sommes en effet réunis pour concrétiser un travail collectif dont l’objectif est d’améliorer les conditions d’exercice des mandats locaux, de diversifier les profils de nos élus et donc de renforcer la vitalité de notre démocratie.

Ce texte, qui s’inscrit dans le cadre de la refondation de la vie politique voulue par le Gouvernement, est le témoignage de la rencontre de deux volontés : en soutenant le travail des parlementaires, nous avons également donné suite aux états généraux de la démocratie territoriale dont cette proposition de loi des sénateurs Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur est issue.

Le Sénat et l’Assemblée nationale ont enrichi le texte tout au long d’un parcours législatif constructif et fructueux. Permettez-moi de saluer la qualité de ce travail parlementaire, trop peu souvent reconnue par les gazettes. À l’issue de la commission mixte paritaire, le texte a, je crois, atteint un point d’équilibre satisfaisant, qui permettra de mettre en œuvre des dispositions importantes pour les élus locaux et pour l’accès de nos concitoyens, dans leur diversité, aux mandats électifs locaux.

Un aspect intéressant de ce texte est qu’il est, dans sa majeure partie, d’application immédiate. Dès les prochaines élections, les élus seront protégés par ce statut et les citoyens sauront quels élus ils ont vraiment, à tous points de vue, même si j’ai pu sentir au Sénat quelques réticences – que je peux comprendre – concernant notamment la charte de l’élu local. C’était faire œuvre de transparence totale que d’adopter le texte en l’état.

Dans la grande majorité des cas, être élu local, c’est d’abord être bénévole. Contrairement aux élus des conseils régionaux et départementaux, les élus communaux et intercommunaux ne perçoivent pas d’indemnités. Nombreux sont ceux qui donnent de leur temps sans en tirer profit. Leur accorder la valorisation des acquis de l’expérience est bien le moins que l’on puisse faire pour eux !

Vous êtes réunis sur ce texte alors que l’exercice d’un mandat électif est de plus en plus exigeant, la vie politique difficile et la démocratie fragilisée. Nous voyons tous la défiance envers les élus s’installer. Il y a danger et la lecture du statut par les citoyens peut briser cette spirale infernale.

On dit souvent qu’il « faut » que les femmes se présentent aux élections. Mais les femmes ne sont pas égales aux hommes dans l’accès aux mandats électoraux. Comment s’engager dans la vie locale lorsque le soutien matériel et moral fait défaut, lorsque le bagage intellectuel, la formation dont on a bénéficié rendront difficile le retour à la vie active ?

Il faut souligner l’investissement des élus, souvent bénévoles, et, quand elles existent, la faiblesse des indemnisations. Il faut garantir à la population qu’elle sera représentée par des élus issus de l’ensemble de la société française, dans sa diversité. N’oublions pas qu’exercer un mandat local, c’est se mettre au service non seulement de ses électeurs, mais aussi de la France tout entière.

Dans le cadre de la refondation de la vie politique, impulsée par le Président de la République, des textes relatifs à la transparence de la vie publique, à la lutte contre l’évasion fiscale, à l’instauration de la parité pour les conseillers départementaux ou encore à la fin du cumul des mandats ont été votés. Ce sont des avancées majeures qui ont pu être accomplies en faveur de l’exemplarité, un édifice que vous consolidez aujourd’hui avec ce texte.

Les dispositions techniques permettront à de nouveaux citoyens d’accéder à un mandat sans pour autant devoir renoncer à leur carrière professionnelle, de bénéficier réellement d’un droit à la formation et de la validation des acquis de l’expérience. Administrer une collectivité locale, c’est acquérir des connaissances importantes en matière de gestion ou de droit de l’urbanisme, c’est comprendre les problèmes sociaux et maîtriser la médiation. Ces acquis méritent d’être validés, pour ouvrir l’accès à une voie professionnelle plus intéressante, si possible, que celle qui a dû être abandonnée après l’élection.

Ces questions sont celles non seulement des élus, mais aussi des citoyens, et je vous remercie d’y avoir répondu. Le texte prévoit aussi que des sanctions seront appliquées en cas d’absence des élus. J’ai entendu récemment qu’il en irait de même dans une autre assemblée. Cela ne choque personne. À chaque fois que l’élu n’est pas là où on l’attend, il ne remplit pas son mandat.

Philippe Doucet l’a rappelé, le délai de six mois après la fin du mandat était insuffisant pour se former, retrouver un travail et, pour une personne travaillant en libéral, se réinstaller, retrouver sa clientèle, rééquilibrer son budget. Je salue aussi la prise en charge des frais de garde d’enfants pendant les sessions des assemblées délibérantes – il est vrai que les séances en commission des finances dépassent parfois les horaires des garderies. C’est un clin d’œil aux femmes, mais surtout aux pères qui doivent désormais partager le temps de garde des enfants. Il n’est pas question de « prendre en otage » ces petits qui, grâce à cette possibilité, apprendront que servir l’intérêt général est un engagement qui se fait non pas au détriment de sa famille, mais dans l’intérêt des futurs citoyens qu’ils sont.

Les solutions pragmatiques que vous avez apportées sont indispensables et permettront une remarquable articulation des droits et devoirs des élus locaux. Sans doute ce texte nous donnera-t-il le moyen d’encourager nos concitoyens à se présenter aux élections. On a les élus que l’on mérite, ai-je coutume de dire en souriant ; encore faut-il que les élus puissent représenter la France, dans la diversité des parcours individuels et professionnels. Je vous remercie d’avoir porté cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP, UDI et UMP.)

M. Philippe Doucet, rapporteur. Très bien !

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Maina Sage.

Mme Maina Sage. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi, déposée à l’initiative de nos collègues sénateurs Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur, contient un certain nombre de mesures qui répondent aux attentes exprimées par les élus. Voilà en effet plusieurs années que les rapports et les propositions de loi sur le sujet se multiplient. Nous sommes ravis d’avoir pu aboutir à un texte consensuel.

Nous savons tous combien la tâche des élus locaux est difficile. Ils sont confrontés à des incertitudes quant à leurs responsabilités juridiques et jugent parfois incohérentes leur rémunération au regard des responsabilités qui pèsent sur eux. Leurs compétences et leur autorité sont parfois incomprises, souvent contestées, et le fossé entre les élus et nos concitoyens se creuse malheureusement chaque jour davantage. Conséquence inévitable, le mandat d’élu local subit une crise des vocations, en particulier dans les communes de taille modeste. Nombreux sont les facteurs qui peuvent décourager ceux qui souhaitent s’engager au nom de l’intérêt général.

Soyons lucides, cette proposition de loi ne répond pas complètement à la question – lancinante dans le débat public – du statut de l’élu local. Mais son objectif est louable, puisqu’il s’agit de faciliter la tâche des élus, de leur donner les moyens d’accomplir pleinement leur mandat, de leur donner la possibilité de s’investir librement dans l’exercice de fonctions exécutives locales, de recevoir une juste compensation pour les contraintes propres à l’accomplissement d’un mandat et de bénéficier d’une formation permettant de mieux servir la collectivité.

Cette proposition de loi apporte des solutions concrètes et nécessaires, sans toutefois mettre en cause cette conviction ancienne, ancrée dans la culture politique française, qui refuse d’assimiler le mandat électif à un métier, et en veillant, bien sûr, à ne pas donner d’avantages particuliers aux élus.

Juste avant l’examen de ce texte en CMP, certaines dispositions étaient déjà actées et avaient été adoptées conformes par nos deux assemblées. Je pense notamment à l’article 1er, relatif à l’indemnité des maires. Il s’agit d’une mesure de bon sens qui avait d’ailleurs fait l’objet de propositions de notre collègue François Sauvadet et des sénateurs Jacqueline Gourault et François Zocchetto. Elle favorisera une meilleure prise en compte des spécificités des petites communes, en accordant aux maires de celles-ci une juste contrepartie pour le temps passé au service de la collectivité. Je pense également à l’article 2, qui met fin à l’ambiguïté du statut juridique des indemnités de fonction versées aux élus locaux.

Le manque croissant d’attractivité du mandat d’élu local s’explique notamment par les obstacles que rencontrent certains élus dans l’exercice de leur mandat. Il est parfois difficile de concilier l’exercice de fonctions électives avec une activité professionnelle et de se réinsérer professionnellement. Certaines dispositions du texte devraient favoriser cette conciliation, notamment par l’élargissement du bénéfice du congé électif et par la reconnaissance du droit à un crédit d’heures pour certains conseillers municipaux. Dans nos collectivités, c’est un point majeur qui facilitera l’exercice des mandats. Nous pouvons également attendre de l’extension du droit à suspension du contrat de travail et de l’octroi du statut de salarié protégé qu’ils aient les mêmes effets bénéfiques, et permettent d’enrayer cette crise des vocations.

Parmi les dispositions qui ont fait l’objet d’un consensus relatif, on notera les garanties de réinsertion à l’expiration du mandat ainsi que les droits accordés, comme le droit à la formation professionnelle ou encore le droit individuel à la formation des élus.

J’appelle votre attention, madame la ministre, sur le fait que ce texte fixe un plafond de 20 % du montant total des indemnités de fonction pour les dépenses de formation, disposition sur laquelle j’ai été saisie par le syndicat pour la promotion des communes. Vous serait-il possible, dans les décrets d’application, de nuancer ce plafond, au regard du coût des transports dans nos collectivités ? En effet, cette limite ne correspond pas à la réalité des communes de Polynésie française, réparties sur un territoire vaste comme l’Union européenne. Pour faire le tour de ma circonscription, je peux mettre jusqu’à trois heures en avion. Sachant que le prix d’un billet aller-retour peut atteindre 600 euros, la limite de 20 % peut être rapidement franchie.

S’agissant du reste des dispositions restant en discussion, nous saluons l’accord finalement trouvé en CMP. L’article 1er A, relatif à la définition de la prise illégale d’intérêts, qui avait été introduit par le Sénat, est finalement supprimé, ce qui est préférable, compte tenu des désaccords dont cette disposition a fait l’objet. Je note par ailleurs que la réduction des indemnités des conseillers généraux et régionaux à raison de leur participation effective aux séances plénières et aux réunions de commissions, supprimée par le Sénat, a finalement été maintenue.

Le texte que nous examinons aujourd’hui est donc relativement proche de celui que notre assemblée avait adopté en seconde lecture. Comme l’ont indiqué Michel Zumkeller et François Rochebloine lors des précédentes lectures, cette proposition de loi est bienvenue. Elle prévoit des mesures concrètes, établies dans l’intérêt des élus locaux, facilitant et promouvant le mandat local.

Pour autant, nous souhaitons qu’un vaste chantier soit mené sur le statut de l’élu local. Ce chantier implique notamment que nous abordions la question de la multiplicité de nos collectivités et du manque de lisibilité du système d’administration territoriale pour nos concitoyens, la difficulté d’identifier les compétences, le rôle et les responsabilités de chacun. Tôt ou tard, nous devrons aborder les questions telles que la pertinence du nombre de strates administratives, la rationalisation de la répartition des compétences et la responsabilité des élus.

En dépit de ces réserves, ce texte remplit l’objectif que nous nous étions fixé : améliorer la situation des élus qui s’engagent chaque jour au service de nos collectivités. Nous vous remercions d’avoir pu trouver en CMP une solution consensuelle. Comme en première et en seconde lecture, le groupe UDI votera cette proposition de loi.

M. Philippe Doucet, rapporteur et M. Philippe Gosselin. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Saint-André.

M. Stéphane Saint-André. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous sommes réunis pour l’examen final de la proposition de loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat. Ce texte résulte d’un consensus qui s’illustre par l’adoption conforme en première lecture de six articles, auxquels s’ajoutent cinq articles votés conformes en seconde lecture par le Sénat. Ce consensus est allé à son terme comme en témoigne l’accord de la commission mixte paritaire réunie ce mardi 17 mars.

La commission ayant repris les principales dispositions du texte que nous avions étudiées le 22 janvier dernier, je reprendrai en partie ce que mon collègue Olivier Falorni avait exprimé en deuxième lecture.

Nous sommes ainsi satisfaits qu’il soit rappelé que l’élu exerce ses fonctions avec impartialité, diligence, dignité, probité et intégrité, qu’il poursuit le seul intérêt général à l’exclusion de tout intérêt particulier, qu’il veille à cesser tout conflit d’intérêts et s’engage à ne pas utiliser les ressources et les moyens mis à sa disposition à d’autres fins que l’exercice de son mandat ou de sa mission, qu’il s’abstient de prendre des mesures lui accordant un avantage personnel, qu’il participe aux réunions avec assiduité et reste responsable de ses actes durant son mandat. Ces règles de bonne conduite vont de soi mais il n’était pas inutile de les préciser.

Pour autant nous déplorons la suspicion jetée sur les élus locaux via le recours à une nouvelle législation en ce domaine, l’instauration d’une charte des bonnes pratiques de mandat pour l’élu local insinuant, à défaut, une mauvaise pratique antérieure de leurs mandats par les élus.

Nous validons le calcul du montant des indemnités perçues par les élus locaux, eu égard à l’indice brut terminal de l’échelle indiciaire de la fonction publique. Pour autant, nous ne sommes pas totalement satisfaits par le barème mis en place.

En effet, les indemnités allouées sont dégressives, en fonction de la population de la commune, passant de 17 % de l’indice 1015 pour les communes de moins de 500 habitants à 145 % du même indice pour les communes de plus de 100 000 habitants. Or, il faut bien le reconnaître, si les problèmes rencontrés par les maires ne sont pas les mêmes en fonction de la taille de la commune, la responsabilité civile et pénale de l’élu peut être engagée quelle que soit la taille de celle-ci, et les risques sont tout aussi importants, si ce n’est plus, dans les petites communes qui ne disposent pas d’un service administratif et juridique conséquent et structuré.

De même, le nombre d’adjoints étant plus faible dans les petites communes, les maires de celles-ci ne sont pas moins sollicités que leurs homologues des grandes villes, bien au contraire mais, dans une logique de réduction du nombre des communes, il peut paraître judicieux de limiter les indemnités allouées aux élus des petites villes.

Nous sommes également favorables à la mise en place d’une égalité de traitement entre les membres des organes délibérants et les élus assumant des fonctions exécutives ou ayant reçu un mandat spécial, pour le remboursement des frais de garde d’enfants et d’assistance à la personne occasionnés par l’exercice des mandats.

En effet, l’exercice effectif d’un mandat par un élu, y compris lorsque celui-ci ne dispose pas d’une fonction exécutive, demande un engagement complet et expose l’élu à supporter des frais subsidiaires liés à l’obligation d’être présent aux réunions et aux conseils. La mise en place d’une dégressivité des indemnités perçues, susceptible d’atteindre la moitié de l’indemnité pouvant être allouée, eu égard à la participation réelle des élus locaux aux séances plénières et aux réunions des commissions, nous semble d’ailleurs être une bonne disposition, la participation de l’élu local aux travaux préalables des commissions et aux séances plénières étant nécessaire à l’exercice effectif du mandat local.

D’autres dispositifs visant à sanctionner la non-participation des élus aux réunions auraient pu être trouvés, mais nous ne nous opposons pas à cette mesure. En effet, il nous paraît tout à fait concevable de conserver un mandat local et un mandat national et de pouvoir exercer les deux de manière effective, la non-participation aux travaux d’une des deux fonctions entraînant alors résolument une baisse des indemnités allouées pour l’exercice de ce mandat, confié par le peuple.

Nous sommes également satisfaits par la mise en place, pour les élus locaux, d’un droit à suspension du contrat de travail pendant l’exercice des fonctions électives, ainsi que d’un droit à la réintégration professionnelle à leur expiration, participant de la conservation de représentants pleinement investis dans leurs missions.

Dans le même temps, nous souscrivons au renforcement des mesures d’adaptation de l’emploi pour les élus.

Ainsi, la reconnaissance d’un congé de formation professionnelle ou d’un bilan de compétences constitue une avancée intéressante pour l’ensemble des élus. Nous saluons d’ailleurs l’abaissement, en première lecture, du seuil de population des communes dont les adjoints se voient reconnaître cette possibilité de 20 000 à 10 000 habitants, car il apparaissait inéquitable de faire bénéficier de ce dispositif les seuls élus des grandes villes.

La proposition permet d’intégrer l’exercice d’une fonction élective locale ou d’un mandat électoral à la liste des activités susceptibles de permettre l’obtention d’un diplôme ou d’un titre délivré, au nom de l’État, par un établissement d’enseignement supérieur, au titre du dispositif de la valorisation des acquis de l’expérience. Mme la ministre vient de nous détailler cette mesure. En coordination avec la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie locale, cette disposition permet de reconnaître les connaissances acquises par les élus dans le cadre de l’exercice de leurs mandats. Nous sommes satisfaits par l’encadrement du montant ouvert pour les dépenses de formation, celui-ci ne pouvant être inférieur à 2 % du total des dépenses des indemnités de fonction.

Toutefois, certaines dispositions de ce texte nous étonnent.

Nous pensons, à l’instar des sénateurs, qu’il aurait été judicieux de redéfinir et préciser la notion de prise illégale d’intérêts pour les élus locaux en introduisant l’élément moral, et en précisant que celle-ci s’entend de la prise d’un « intérêt personnel distinct de l’intérêt général », afin de restreindre le champ d’application de ce délit. La commission des lois de l’Assemblée nationale, sous l’impulsion du rapporteur Philippe Doucet, a supprimé cette précision et en est restée à la définition générale de la prise illégale d’intérêts prévue par l’article 432-12 du code pénal.

En inscrivant dans la charte de l’élu local que l’élu reste responsable de ses actes durant son mandat devant l’ensemble des citoyens de la collectivité territoriale, cette proposition de loi permet également de rouvrir le nécessaire débat sur la responsabilité pénale des élus locaux.

Le dispositif prévu par l’article 5 bis, visant à mettre en œuvre un droit individuel à la formation reconnu aux élus et pouvant concerner les formations sans lien avec l’exercice du mandat de l’élu, nous laisse circonspects. Nous nous sommes, avec constance, opposés à la professionnalisation des fonctions électives car les mandats des élus doivent demeurer une mission reconnue et accordée par le corps électoral à titre provisoire, cette limitation de durée gageant de la bonne application de l’exercice effectif, dont l’objet est la satisfaction de l’intérêt général, contingent d’un État.

Notre collègue Alain Tourret avait pu le dire car le débat est ancien : « Faut-il vivre pour la politique, ou vivre de la politique ? ». Éviter la professionnalisation permet de reconnaître la spécificité des fonctions électorales exercées et nous sommes fermement attachés à cette distinction. C’est pourquoi nous notons que cette proposition de loi permet de reconnaître les droits et garanties des élus locaux.

Pour autant, nous restons attentifs à ce qu’elle n’aille pas à rencontre de ses objectifs en reconnaissant un droit au travail de l’élu et, plus globalement, à une reconnaissance de la profession d’élu local.

Accorder des droits pour plus de sécurité nous semble être un des atouts de cette proposition de loi, mais nous ne souhaitons pas aller plus loin que le texte issu de la commission mixte paritaire. Ce texte représente une formidable avancée pour le statut de l’élu, dont on parle depuis des décennies. Pour toutes ces raisons, le groupe RRDP le votera.

Mme la présidente. La parole est à M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous avons souligné, au cours de la navette, les différentes avancées, certes limitées, de cette réforme tendant à faciliter la situation des élus qui s’engagent chaque jour au service de nos collectivités et de nos concitoyens.

Nous avons ainsi salué les mesures qui améliorent très sensiblement le régime indemnitaire des maires et des présidents de délégation spéciale. De même, nous approuvons l’extension aux conseillers des communautés de communes du bénéfice des indemnités de fonction perçues par les conseillers municipaux des communes de moins de 100 000 habitants. Nous souscrivons, également, à la clarification portant sur la nature fiscale de l’indemnisation des frais d’emploi, ce qui permettra de diminuer le nombre de cas dans lesquels les élus locaux, du fait de la perception d’indemnités de fonction, se voient refuser le bénéfice de prestations sociales soumises à conditions de ressources.

Nous nous félicitons également de l’amélioration des conditions de perception par les élus municipaux, départementaux et régionaux, de l’allocation différentielle de fin de mandat. L’extension du champ d’application de cette allocation, l’allongement de sa durée de perception et sa dégressivité nous paraissent tout à fait opportuns pour faciliter la reprise d’une activité professionnelle dans un délai raisonnable. En revanche, s’agissant des modalités de son financement, nous regrettons que la commission mixte paritaire n’ait pas conservé les dispositions adoptées par notre Assemblée. Il nous semblait plus judicieux d’instaurer une cotisation obligatoire assise sur les indemnités de fonction des élus. Cela aurait en effet permis que l’allocation ne soit plus à la charge des collectivités territoriales, dont on connaît suffisamment les difficultés financières.

Nous approuvons les garanties accordées aux élus dans l’exercice d’une activité professionnelle. Permettre aux personnes insérées dans la vie active, qu’elles soient salariés de droit privé, agents publics ou travailleurs indépendants, d’accéder aux responsabilités publiques sans que leur activité professionnelle ne constitue, par elle-même, un obstacle ou une difficulté à l’exercice du mandat, est en effet indispensable pour garantir l’égal accès de tous au mandat électif. Pour autant, comme cela avait été souligné lors des lectures précédentes, il conviendrait, dans un souci d’efficacité et de lisibilité, que les dispositions proposées soient également inscrites dans le code du travail.

Le renforcement des droits à la formation des élus locaux s’inscrit également dans le cadre de l’affirmation du statut de l’élu. Nous saluons les diverses améliorations portées par ce texte en la matière : la consécration d’un droit individuel à la formation pour l’ensemble des élus locaux, l’instauration d’un plancher de dépenses obligatoires destiné à la formation des élus locaux ou encore le principe de l’organisation obligatoire d’une formation pour l’ensemble des élus locaux au cours de la première année de leur mandat.

Pour autant, afin de rendre effectif ce droit à la formation, il paraît nécessaire, compte tenu du coût des stages de formation et des moyens financiers limités d’un grand nombre de nos communes, d’envisager une forme de mutualisation de ces dépenses. Tout élu, quelles que soient la taille et la richesse de sa collectivité, pourrait ainsi accéder à une formation de qualité. Une véritable réflexion mériterait d’être menée sur ce point.

Nous saluons par ailleurs la consécration d’une charte de l’élu local, qui établit un cadre déontologique destiné à préciser les normes de comportement que les élus locaux doivent adopter dans l’exercice de leurs fonctions, et que les citoyens sont en droit d’attendre de la part de leurs représentants. Elle permettra en effet de favoriser la transparence de la vie publique. Dans ce cadre, nous sommes satisfaits du compromis trouvé par la commission mixte paritaire s’agissant des dispositions contenues dans la charte.

En définitive, cette proposition de loi apporte des réponses concrètes à des problèmes pratiques. En cela, elle représente un petit pas vers la reconnaissance d’un véritable statut de l’élu. C’est la raison pour laquelle, une fois encore, nous voterons ce texte.

Pour autant, nous souhaitons réaffirmer solennellement que seule l’instauration d’un véritable statut de l’élu pourra réellement favoriser une plus grande diversité des titulaires de mandats électifs et assurer un meilleur exercice de la démocratie. Cette réforme, dont on parle depuis plus de trente ans, demeure toujours indispensable, afin que chacun retrouve confiance en nos institutions et soit encouragé à participer plus largement à la vie citoyenne. Cette question devrait aussi, à notre sens, s’inscrire dans une réflexion globale sur la réforme de nos institutions et des modes de scrutin.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Goasdoué.

M. Yves Goasdoué. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous clôturons aujourd’hui un travail d’une importance que ne reflète pas la présence éparse des députés dans l’hémicycle.

M. Philippe Gosselin. Elle sont même inversement proportionnelles !

M. Yves Goasdoué. Sans doute n’est-ce pas entièrement faux, cher collègue.

Je tiens à remercier notre rapporteur, Philippe Doucet – ainsi que Philippe Gosselin – pour sa très fine connaissance du domaine qui nous occupe. Je veux aussi le remercier d’avoir permis, après de nombreux contacts, que la commission mixte paritaire puisse déboucher sur un accord avec nos collègues sénateurs.

Permettez-moi de remettre cette proposition de loi en perspective et de revenir brièvement sur les réformes territoriales qui ont été votées ou qui sont en passe de l’être, et que vous défendez, madame la ministre.

Nous avons adopté la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi MAPTAM. Cette réforme a établi le principe de la clarification des compétences de chaque collectivité locale en instaurant des chefs-de-filats : celui de la région pour le développement économique, les aides aux entreprises et les transports, et celui du département pour l’action sociale, l’aménagement numérique et la solidarité territoriale. Par ailleurs, cette loi crée quatorze grandes métropoles afin de donner à ces entités un plus grand rayonnement économique.

Nous avons ensuite adopté la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions – une grande aventure. Nous avons créé de grandes régions pour les rendre plus efficaces et plus visibles aux niveaux européen et international.

Nous avons également adopté la proposition de loi modifiant et facilitant la création de communes nouvelles, qui rencontre un certain succès.

M. Philippe Gosselin. C’est vrai.

M. Yves Goasdoué. Enfin, chacune des deux assemblées a adopté en première lecture le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, qui prolonge la logique de la loi MAPTAM en spécialisant toujours un peu plus les collectivités locales, mais en conservant au bloc local la clause générale de compétence tout en précisant ses compétences en matière d’aménagement du territoire.

Tous ces textes, chers collègues, visent les collectivités locales, leur spécialisation, leur montée en puissance, leur rayonnement, leur efficience et leur modernisation. Notre proposition de loi n’y est pas étrangère. D’une certaine manière, elle est le corollaire des toutes ces réformes, parce qu’elle vise à donner aux élus les moyens de mettre en œuvre une organisation territoriale certes rénovée, mais pas toujours simple à appréhender.

M. Philippe Gosselin. Rien n’est compliqué !

M. Yves Goasdoué. À mon sens, le texte qui nous occupe est un élément essentiel de la réussite des réformes que vous défendez, car il a pour seule ambition de permettre à un plus grand nombre de personnes de s’investir dans la chose publique, et il garantit sans aucun doute une meilleure représentativité de la société.

N’oublions jamais une évidence : les collectivités locales ne fonctionnent pas sans élus locaux bien formés et respectés, non seulement dans leurs fonctions d’élus mais aussi lorsqu’ils ont à retourner à la vie civile. Notre tradition – qui est bonne – veut que le mandat ne soit pas un métier ; encore faut-il que celui ou celle qui cesse sa fonction d’élu puisse retrouver un travail et réorganiser sa vie alors même qu’il n’est pas protégé par un statut. Encore faut-il que celui ou celle qui postule une fonction d’élu puisse le faire sans craindre ni pour l’équilibre de sa vie personnelle et de celle de ses proches ni, cela va de soi, pour son emploi. Encore faut-il que celui ou celle qui accède à un poste d’élu, en particulier un poste de membre d’un exécutif local, puisse se former et disposer du temps nécessaire.

Tels sont les objectifs que nous nous sommes fixés. Comment les atteindre ? Tout d’abord en renforçant les droits, mais aussi les devoirs : nous avons décidé de fixer au taux maximal l’indemnité de maire en supprimant la faculté pour les conseils municipaux de modifier le montant de l’indemnité des maires des communes de moins de 3 500 habitants. Cette mesure vaut aussi pour les élus siégeant dans les communautés de communes ayant une délégation.

Ce n’est que justice : les maires ruraux qui, dévoués et présents, sont en première ligne, sont le premier maillon de la chaîne démocratique. Soyons clairs : en réalité, ils en sont souvent de leur poche et l’élu rural que je suis sait que l’on discute souvent de leurs indemnités pour de mauvaises raisons. Cela ne sera plus le cas.

Nous avons décidé de modifier les conditions de l’allocation différentielle de fin de mandat. Les discussions avec le Sénat nous ont conduits – je ne sais si c’est une bonne chose mais enfin, il fallait bien discuter – à prévoir de nouveau son financement par la collectivité, mais nous l’avons rendue progressive tout en étendant sa durée à une année et son champ d’application aux adjoints aux maires des villes de plus de 10 000 habitants.

Nous avons décidé une mesure très importante consistant à élargir le champ des bénéficiaires du droit à suspension du contrat de travail aux adjoints des villes de 10 000 à 20 000 habitants. Ce droit vaudra désormais pendant deux mandats au lieu d’un seul jusqu’alors. En outre, les élus – c’est bien normal – qui n’auront pas renoncé temporairement à leur travail bénéficieront du statut de salarié protégé.

Des droits sont donc créés, mais aussi des devoirs, comme cela a déjà été dit. En contrepartie de ces nouveaux droits, notre assemblée a ainsi rendu les indemnités modulables en fonction de la présence effective de l’élu aux réunions des assemblées et des commissions. Des sanctions pourront donc être prononcées : cela tombe sous le sens, mais n’était pas expressément prévu.

Enfin, après d’abondantes discussions, mon collègue Philippe Doucet a introduit dans le texte une charte de l’élu local contenant le rappel des principes déontologiques s’imposant à tout élu. Cette charte sera lue lors de l’installation de l’assemblée délibérante et sera remise à chaque élu.

Il fallait non seulement renforcer les droits et devoirs, mais aussi permettre le déroulement harmonieux et surtout efficace du mandat d’élu local.

La période actuelle nous le rappelle : s’engager, c’est faire campagne. Le congé électif de dix jours sera donc étendu à toutes les communes de plus de 1 000 habitants pour les salariés.

S’engager, c’est aussi être disponible : un crédit d’heures de sept heures par trimestre est créé pour les conseillers municipaux des communes de 1 000 à 3 500 habitants. Et je suis particulièrement sensible à l’instauration, à l’initiative du Gouvernement, du remboursement des frais de garde d’enfants ou d’assistance à personne à charge.

S’engager, ensuite, c’est être formé pour soi-même, mais aussi pour rendre un meilleur service à nos concitoyens. La formation des élus ayant reçu délégation devient obligatoire au cours de la première année de mandat – il me semble que cela n’a pas encore été signalé. Les planchers de dépenses obligatoires en matière de formation passent de 1 % à 2 %, et tous les adjoints de communes de plus de 10 000 habitants ont accès à la formation professionnelle et à un bilan de compétences. Enfin un dispositif de validation de l’expérience est créé.

Madame la ministre, chers collègues, il s’agit là de mesures concrètes.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Tout à fait.

M. Yves Goasdoué. Le texte peut paraître technique, mais je crois que cette technicité sera très appréciée, en particulier dans nos petites villes et dans nos campagnes.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je l’espère !

M. Yves Goasdoué. Je suis convaincu que des mesures de cet ordre permettront à un nombre croissant de femmes et de salariés du secteur privé d’accéder à un mandat électif. Naturellement, le groupe SRC votera ce texte.

M. Philippe Doucet, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Madame la présidente, madame la ministre, cher monsieur le rapporteur, chers collègues, nous voici enfin au terme d’un long parcours. Ce sujet est un véritable serpent de mer et nous en parlons depuis de longues années déjà, selon des procédures et des engagements parallèles au Sénat et à l’Assemblée. Réjouissons-nous de la nette accélération de nos travaux qui s’est produite depuis le mois de janvier 2015 et de l’accord auquel la commission mixte paritaire a abouti mardi dernier.

D’autres l’ont rappelé : nos débats trouvent leur origine dans la proposition de loi que nos collègues sénateurs Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur ont rédigée dans le prolongement des états généraux de la démocratie. De son côté, la commission des lois de l’Assemblée a créé, en mars 2013, une mission d’information dont Philippe Doucet, que je salue, était président et co-rapporteur. Nous avons alors mené des travaux dans l’intérêt général en nous accordant sur l’essentiel, comme en témoigne notre rapport adopté au mois de juin 2013, dont vingt-neuf propositions ont émergé. Le Gouvernement avait alors souhaité accélérer le processus afin que ledit rapport constitue le point de départ de travaux parlementaires visant à prolonger la proposition de loi Sueur-Gourault, mais les arcanes du travail parlementaire ont quelque peu ralenti ce processus, ainsi sans doute qu’un certain attentisme de la part du Gouvernement sur des sujets liés à des conflits d’intérêts.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Nous avons fait notre possible !

M. Philippe Gosselin. Quoi qu’il en soit, je me réjouis que les conclusions d’un rapport trouvent un aboutissement positif dans l’hémicycle, car la chose n’est pas si courante.

Nous voici donc dans la dernière ligne droite, puisque nous examinons le texte en dernière lecture. Tant mieux, car l’attente des élus locaux est forte. Je regrette cependant que le texte n’ait pu être voté plus rapidement, ce qui lui aurait permis d’entrer en vigueur dès l’élection des conseils municipaux au mois de mars 2014, mais c’est ainsi ; ne boudons pas notre plaisir. Mon propos n’est aucunement polémique. Mme la ministre avait beau être très prudente à l’instant, je ne trahirai aucun secret en disant que nous nous acheminons vraisemblablement vers un vote unanime et une application immédiate pour tous les élus au plus tard au 1er janvier 2016.

La présente proposition de loi vise à faciliter l’exercice de leur mandat par les élus locaux. Il ne s’agit pas, comme cela a été dit, d’un statut à proprement parler. Sans doute eût-il fallu aller un peu plus loin, mais la situation n’était peut-être pas assez mûre. Le sera-t-elle un jour ? Je n’en sais rien. Quoi qu’il en soit, les dispositions du texte peuvent sembler relativement modestes, mais elles constituent en réalité de réelles avancées.

Le constat de départ est simple : le mandat d’élu demeure un engagement unique en son genre qui ne saurait être assimilé à un métier – j’insiste sur ce point que vient de rappeler M. Goasdoué et sur lequel nous sommes tous d’accord. Il ne s’agit pas non plus d’un travail salarié. Le « patron », si j’ose dire, c’est le peuple, le citoyen dont le bulletin détermine l’éventuelle capacité et donc la qualité d’élu. Ce n’est pas un employeur quelconque ou anodin !

L’engagement unique et le travail remarquable des acteurs de proximité soucieux du bien commun que sont les élus locaux doivent être encouragés et respectés. Les élus doivent avoir la possibilité de se former, d’assurer leurs missions, de recevoir une protection sociale ou juridique et de percevoir une indemnisation décente – sans qu’elle soit pour autant excessive. Il s’agit de trouver le juste équilibre, en particulier pour les maires de nos petites communes rurales qui, très souvent, accomplissent un véritable sacerdoce. Ceux qui touchent réellement une indemnité sont assez peu nombreux et, comme on l’a dit, beaucoup en sont de leur poche, ce qui n’est pas normal.

En clair, les élus doivent avoir les moyens d’accomplir pleinement leur mandat dans le cadre d’un équilibre satisfaisant entre droits et devoirs, les uns étant intimement liés aux autres, cela va de soi, comme le rappelle d’ailleurs avec force la charte des élus locaux, à laquelle je souscris. Sa lecture lors de l’installation des nouveaux conseils constitue un véritable rite républicain – car nous avons aussi besoin d’un peu de solennité – dont l’intérêt est de rappeler les droits et les devoirs en vigueur, sans bien sûr en créer de nouveaux.

Je l’ai dit : le texte peut sembler modeste par rapport aux enjeux d’un statut véritable et complet de l’élu que nous appelions de nos vœux dans le rapport Doucet-Gosselin. Que l’on ne se méprenne toutefois pas sur le terme de « statut » : il s’agit non pas d’une position d’exception plaçant les élus hors du droit commun et au-dessus de leurs concitoyens, mais simplement de la reconnaissance d’un engagement unique, qui n’est pas un métier et qui, depuis quelque temps, est soumis à rude épreuve compte tenu des changements de mode de scrutin – cela se vérifie encore à l’occasion des prochaines élections départementales dont nous parcourons cette semaine la dernière ligne droite, tant il fut difficile de constituer des binômes. Les dotations sont révisées à la baisse, les compétences seront revues et, sans polémique aucune, je constate que le développement des communes nouvelles et de l’intercommunalité pose évidemment d’importantes questions à nos élus. Nos collectivités vivent un tournant.

En somme, nos élus locaux sont soumis à rude épreuve et l’heure est venue d’améliorer les conditions d’exercice de leur mandat. L’évolution des textes en ce sens était particulièrement attendue, non pour faire des élus locaux des privilégiés au-dessus des lois et de leurs concitoyens, mais pour leur envoyer collectivement le signal que nous les avons compris.

Chers élus locaux, nous vous avons compris : vous attendez des évolutions, vous qui donnez de votre temps, qui vous engagez, qui travaillez, qui bâtissez et qui, en fin de compte, faites la démocratie de proximité jour après jour.

Si le texte qui nous est présenté reste modeste, il n’en comporte pas moins des avancées très notables – je pense à la charte des droits et des devoirs, qui constitue en quelque sorte la synthèse de l’ensemble.

Si quelques éléments intéressants concernent l’entrée dans le mandat, en particulier le congé électif, c’est surtout dans l’exercice du mandat et à la sortie de celui-ci que le texte me semble apporter des modifications substantielles.

Le régime indemnitaire est ainsi précisé sur différents points. Il s’agit pour l’essentiel de reconnaître l’engagement des conseils municipaux afin de mieux tenir compte des spécificités des plus petites communes. En effet, dans celles-ci, les indemnités ne pourront plus être inférieures au taux maximal prévu par la loi. C’est une bonne chose, car nombre d’élus de ces communes n’osaient pas percevoir ces indemnités, dont ils ont pourtant besoin pour assumer leur mandat.

M. Bertrand Pancher. C’est vrai !

M. Philippe Gosselin. Il ne s’agit pas d’offrir aux élus un métier ni leur permettre de vivre dans l’opulence, mais au moins de leur assurer que l’exercice du mandat ne leur coûtera rien.

La contrepartie pour les élus est une responsabilité accrue, car nul ne peut avoir de droits sans avoir aussi des devoirs. Les règlements intérieurs des assemblées départementales et régionales pourront sanctionner financièrement les élus qui ne remplissent pas leurs obligations, c’est-à-dire qui sont absents.

C’est une juste contrepartie. Nos concitoyens comprendront parfaitement que celui qui travaille soit reconnu mais que celui qui ne travaille pas soit sanctionné : cela me paraît juste et équitable.

Le texte comporte aussi des éléments sur la fraction représentative des frais d’emploi dans le calcul des ressources ouvrant droit à prestations sociales. Il s’agit, là encore, d’une mesure de justice et de bon sens.

Des garanties nouvelles sont ouvertes pendant le mandat pour permettre à l’élu d’être plus disponible et plus efficace. Citons le dispositif du crédit d’heures, qui était attendu, le droit à une suspension du contrat de travail et à une réintégration professionnelle, un statut de salarié protégé, le droit à un congé de formation professionnelle et à un bilan de compétences. À ces garanties est associé un droit individuel à la formation, sans oublier le remboursement des frais de garde d’enfant et d’assistance à personne. Il s’agit de mesures de bon sens qui permettront peut-être à d’autres citoyens, à d’autres élus, de mieux assumer leurs engagements.

Enfin, des avancées sont à noter en ce qui concerne la sortie du mandat. On reproche souvent aux élus de s’accrocher à leur mandat ou de s’arc-bouter pour le conserver : c’est peut-être parce que, parvenus à un certain âge, ils s’interrogent sur la suite de leur vie professionnelle – et il est vrai que cette question est importante.

Les conditions d’attribution de l’allocation de fin de mandat sont revues et la validation des acquis de l’expérience professionnelle des élus locaux est réaffirmée. Ce sont des dispositions majeures.

Ces quelques éléments peuvent paraître insuffisants, mais ce texte constitue tout de même une belle avancée qui mérite d’être saluée. Et je me réjouis que nous nous retrouvions cet après-midi pour réaffirmer notre attachement aux élus locaux, qui sont les « bras armés » de la République, de l’hexagone aux plus lointains des territoires d’outre-mer – je salue nos amis de Polynésie et des autres territoires, ces deux millions de km2 grands comme l’Europe – tous ces élus grâce auxquels il fait encore bon vivre dans nos territoires où la proximité n’est pas un vain mot.

Vous l’aurez compris, le groupe UMP votera ce texte.

M. Bertrand Pancher. Très bien !

M. Philippe Gosselin. Nous nous acheminons vers un succès total pour ce texte essentiel qui n’apporte pas un statut aux élus mais qui, je n’en doute pas, sera apprécié. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici rassemblés pour la dernière lecture de cette proposition de loi restée en suspens pendant presque un an pour cause d’élections municipales.

Ce texte est né, cela a été rappelé, de la réflexion issue des états généraux de la démocratie territoriale, organisés en octobre 2012 par le président du Sénat de l’époque et au cours desquels la question du statut de l’élu a été abordée par de nombreux participants. Cela a abouti à une mission, confiée au président de la commission des lois du Sénat et à la présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, chargée de proposer un texte visant à améliorer les droits des élus et l’exercice de leur mandat.

Avec la fin du cumul des mandats pour les fonctions exécutives, nous nous trouvons à un moment clé en matière de rénovation de nos pratiques. La question du statut de l’élu ne peut plus être éludée. C’est à une véritable révolution dans les pratiques que nous devons nous atteler.

Pour beaucoup, l’engagement politique constitue un frein à la carrière professionnelle. L’instauration d’un statut de l’élu doit permettre de créer des conditions et un climat plus favorables à l’engagement des citoyens dans la vie publique. Le cadre législatif est aujourd’hui inadapté. Il brime la diversité des profils et empêche la nécessaire conciliation des fonctions électives avec une activité professionnelle.

Il convient donc de rénover le dispositif normatif en vigueur, afin de le rendre compréhensible par les citoyens et adapté au rôle nouveau des élus, et pour cela de proposer des solutions concrètes.

Au-delà des avancées certaines en matière d’indemnités, l’objectif des auteurs de la proposition de loi est de faciliter les passerelles entre les activités d’élu et les autres activités, publiques ou privées. L’instauration d’un statut de l’élu local qui assure une protection sociale facilitant l’entrée et la sortie du mandat est un corollaire indispensable du non-cumul des mandats et des fonctions.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 avait déjà permis l’assujettissement aux cotisations sociales de l’ensemble des élus indemnisés, y compris pour le volet relatif aux accidents du travail et aux maladies professionnelles. C’est logique puisqu’un élu au service de sa commune peut, comme tout le monde, être victime d’un accident dans le cadre de l’exercice de ses fonctions. Il doit donc bénéficier d’une couverture sociale complète.

Cette mesure et toutes celles contenues dans la proposition de loi, notamment l’obligation pour l’ensemble des maires ainsi que pour les adjoints de percevoir des indemnités, permettront de lutter contre la professionnalisation de la politique.

C’est dans cette optique qu’il faut considérer les mesures indemnitaires car les maires et les élus des petites communes sont souvent ceux qui travaillent le plus, n’ayant à leur disposition que des services municipaux réduits, quand ils n’ont pas qu’un unique secrétaire de mairie.

La charge de travail qu’ils assument, tant en matière d’organisation que sur le terrain, exige qu’ils soient indemnisés. Le mandat ne peut pas, ne doit pas être synonyme de sacrifice, ni de la vie professionnelle ni de la vie personnelle.

C’est pourquoi il convient de faciliter l’exercice de leur mission, notamment par l’extension du congé électif aux communes de 1 000 habitants et plus, l’ouverture du crédit d’heures aux élus municipaux des petites communes et l’abaissement du seuil démographique des communes et communautés de communes dans lesquelles les adjoints au maire et les vice-présidents d’intercommunalité bénéficient du droit à suspension du contrat de travail.

Nous accordons une importance toute particulière à la mesure permettant aux collectivités qui le souhaitent le remboursement des frais de garde pour les élus qui travaillent. Cette mesure avait déjà été votée par le conseil régional d’Île-de-France à l’initiative des écologistes. Sa généralisation ne peut être que bénéfique, pour les pères mais le plus souvent pour les mères célibataires engagées en politique.

Nous accueillons avec satisfaction l’ouverture pour les adjoints au maire de communes de plus de 10 000 habitants, et non plus de 20 000, du droit à la formation professionnelle et à un bilan de compétences.

De même, la validation des acquis de l’expérience pour les élus, le droit individuel à la formation pour les adjoints, l’instauration d’un plancher pour les dépenses de formation, ainsi que la formation obligatoire, la première année, pour les nouveaux élus sont des mesures plus que bienvenues.

S’agissant de la formation, nous avions formulé, en première lecture, des propositions visant à élargir le droit à la formation à tous les nouveaux élus et pas uniquement à ceux ayant reçu une délégation, ce qui serait justifié pour les élus de l’opposition.

Il est en effet souvent difficile aux nouveaux élus d’appréhender leur mandat. Il est à noter que le bureau de l’Association des maires de France s’est montré favorable à des formations en début de mandat, considérant que le caractère obligatoire de la formation permettrait de placer tous les élus sur un pied d’égalité.

Il serait aussi bienvenu de transférer au compte personnel de formation prévu par le code du travail les heures de formation qui n’auraient pas été accomplies durant le mandat de l’élu local.

Il n’est pas inutile de rappeler que les élus locaux sont plus de 500 000 dans notre pays. Malgré le très grand nombre de Français engagés dans la vie publique locale, leur représentation souffre d’un manque de diversité.

En ce qui concerne l’accès des femmes aux fonctions électives, si le nombre d’élues locales a beaucoup progressé, grâce notamment aux lois sur la parité que nous avons votées, elles n’ont toujours pas accès aux fonctions à responsabilités. Selon les données du ministère de l’intérieur, parmi les maires élus aux élections municipales de mars 2014, 16 % seulement sont des femmes, contre 13,5 % en 2008, alors qu’elles représentent plus de 48 % des conseillers municipaux des villes de plus de 1 000 habitants, contre 35 % en 2008.

On ne recense aujourd’hui que six femmes présidentes de conseil général. Nous espérons que l’introduction du binôme paritaire permettra d’influer sensiblement sur le nombre de femmes présidentes de conseil départemental – mais nous aurons l’occasion de le constater dès la semaine prochaine ou dans deux semaines…

M. Philippe Gosselin. C’est sûr !

M. Sergio Coronado. En matière de diversité sociologique et de renouvellement des générations, rappelons que les élus de plus de soixante ans sont largement surreprésentés, tout comme les catégories socioprofessionnelles des fonctionnaires et des professions libérales.

Le renforcement des droits des élus locaux doit aller de pair avec une certaine responsabilisation. L’instauration dans la loi du principe de pénalité pour les élus absentéistes est une avancée à laquelle nous sommes très attachés et dont nous pourrions nous inspirer pour nous-mêmes, les parlementaires.

M. Philippe Gosselin. C’est le cas !

M. Sergio Coronado. En définitive, cette proposition de loi sera bénéfique pour l’exercice de leur mandat par les élus locaux, à défaut de créer un véritable statut de l’élu, comme l’a si bien dit Philippe Gosselin. Les avancées qu’elle comporte méritent que nous continuions à la soutenir largement, comme ce fut le cas lors des lectures précédentes. C’est la raison pour laquelle le groupe écologiste votera cette proposition de loi telle qu’elle est issue des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Texte de la commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.

Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais appeler l’Assemblée à statuer d’abord sur l’amendement dont je suis saisie.

M. Philippe Doucet, rapporteur. Cet amendement de coordination vise à harmoniser les dispositions relatives au financement du droit individuel à la formation des élus applicables à la Guyane et à la Martinique avec les dispositions applicables en métropole.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Favorable.

(L’amendement n1 est adopté.)

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement adopté par l’Assemblée.

(L’ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Mme Marylise Lebranchu, ministre. À l’unanimité ! (Applaudissements sur tous les bancs.)

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures quinze.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

3

Biodiversité

Suite de la discussion d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la biodiversité (nos 1847, 2064).

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente. Ce matin, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement n890 portant article additionnel après l’article 63. Cet amendement n’est pas défendu.

Article 64

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour soutenir l’amendement n1081.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n1081, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, pour soutenir l’amendement n1501.

Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Il vise à mieux articuler les mesures d’évitement, de réduction et de compensation des impacts relatifs aux sites Natura 2000 et aux espèces protégées.

(L’amendement n1501, accepté par la commission, est adopté.)

(L’article 64, amendé, est adopté.)

Article 65

(L’article 65 est adopté.)

Article 66

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n1311.

M. Stéphane Saint-André. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 4 habilitant le Gouvernement à définir le champ des infractions non intentionnelles en droit de l’environnement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission, surtout en vue d’obtenir de Mme la ministre des éclaircissements car le sujet est très compliqué. Il faut clarifier le régime de responsabilité en matière d’atteinte non intentionnelle à l’environnement. Nous attendons donc les explications de Mme la ministre à cet égard.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. L’objet de l’ordonnance est de clarifier quels sont les délits intentionnels et quels sont les délits non intentionnels du code de l’environnement en codifiant bien la jurisprudence. Il ne s’agit pas du tout de considérer tous les délits du code de l’environnement comme nécessairement non intentionnels, je tiens à rassurer les parlementaires sur ce point. Néanmoins, en l’absence de règles claires inscrites dans la loi, la jurisprudence tranche. De fait, selon la jurisprudence, tous les délits du code de l’environnement inscrits dans la loi avant 1994 peuvent être non intentionnels. Dans le cas d’une pollution accidentelle des eaux, consécutive par exemple au déversement d’un camion causant une mortalité piscicole, il n’est pas nécessaire de prouver que l’auteur avait l’intention de polluer les eaux pour le sanctionner. Il s’agit donc de clarifier les choses afin que le lien direct entre une pollution et ses conséquences entraîne une sanction même si l’auteur des faits excipe de leur caractère non intentionnel. Il existera donc un lien direct entre la pollution et celui qui en est responsable. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

(L’amendement n1311 n’est pas adopté.)

(L’article 66 est adopté.)

Article 67

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1082.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n1082, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n906.

M. Stéphane Saint-André. Il est défendu.

(L’amendement n906, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 67, amendé, est adopté.)

Article 68

(L’article 68 est adopté.)

Article 68 bis

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1502 et 1083.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n1502.

Mme Ségolène Royal, ministre. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1083.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement vise à supprimer l’article 68 bis. En effet, des dispositions analogues figurent dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, voté en première lecture au Sénat le 3 mars dernier, qui est soumis à une procédure d’examen accélérée et qui sera donc adopté définitivement avant le présent projet de loi relatif à la biodiversité.

(Les amendements identiques nos 1502 et 1083 sont adoptés et l’article 68 bis est supprimé.)

Après l’article 68 bis

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n1503.

Mme Ségolène Royal, ministre. Il a pour objet la ratification de l’ordonnance du 5 janvier 2012 relative aux réserves naturelles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Favorable ; la ratification de l’ordonnance permettra au Parlement de modifier les dispositions visées par celle-ci.

(L’amendement n1503 est adopté.)

Article 68 ter

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 1504, 502 et 775.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n1504.

Mme Ségolène Royal, ministre. Il s’agit de supprimer la création d’un nouveau statut d’espèces protégées.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n502.

M. Gilles Lurton. Cet amendement vise à supprimer l’article 68 ter. Les espèces animales et végétales les plus sensibles bénéficient actuellement d’un statut juridique spécifique « espèces protégées » qui leur garantit la protection de leurs habitats et de leurs populations. Des plans nationaux sont également mis en œuvre pour les espèces les plus vulnérables. Ces outils n’étant pas remis en cause, il n’est pas utile de créer un autre dispositif juridique pour certaines espèces alors que l’actuel se révèle efficace, ce qui augmenterait la complexité de la réglementation en matière de biodiversité et contribuerait à une application hétérogène des politiques en matière de protection de la faune et de la flore. Nous proposons donc de renoncer à créer un nouveau statut d’espèces particulièrement protégées parallèle à celui qui existe.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Sauvan, pour soutenir l’amendement n775.

M. Gilbert Sauvan. L’article 68 ter prévoit que certaines espèces particulièrement nécessaires à l’équilibre des écosystèmes et à la protection de la biodiversité bénéficient d’une protection particulière interdisant la destruction, l’altération et la dégradation des milieux où elles vivent. L’exemple des abeilles et des services que rend la pollinisation est archétypal. Néanmoins, la rédaction de l’article est trop imprécise pour ne pas receler des risques de dérive au regard de la chasse et des espèces chassées. Par exemple, ne faudra-t-il pas protéger certains nuisibles comme le renard dont le rôle de prédateur est nécessaire à l’équilibre des écosystèmes ou le lapin qui en tant que proie est la clé de voûte de multiples chaînes alimentaires ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Je suis assez consternée et même assez en colère que l’on propose de supprimer l’article 68 ter introduit au cours de nos débats en commission il y a maintenant neuf mois. Si cet article posait problème au Gouvernement, j’estime que l’auteur de l’amendement, en l’occurrence moi-même avec le soutien du groupe écologiste, aurait pu être informé qu’il fallait en revoir la rédaction et qu’un certain nombre de choses ne convenaient pas. Or à aucun moment depuis des mois il n’a été question de supprimer le dispositif ainsi introduit. Voilà pour ma première remarque : je suis surprise et déçue de constater que notre travail sera balayé d’un revers de main.

Quant au fond du sujet, il s’agit d’un dispositif très intéressant dans le cadre de la nouvelle définition de la biodiversité consistant à prendre en compte non pas seulement les espèces, mais les interactions entre elles et donc la dynamique de la biodiversité et des écosystèmes. Il permet en effet d’identifier certaines espèces qui rendent des services ou sont particulièrement nécessaires aux écosystèmes et à la biodiversité et de leur attribuer une protection particulière en conséquence.

En outre, le texte est relativement prudent, prévoyant que la liste des espèces concernées serait fixée par un décret en Conseil d’État et révisée tous les deux ans après consultation du Muséum national d’histoire naturelle et de l’Agence française pour la biodiversité. Je ne pensais spécifiquement ni au renard ni à l’exemple des abeilles, dont on comprendra que je préfère l’éviter même s’il est majeur, mais on peut citer entre autres le ver de terre qui, en certains endroits, est essentiel à la biodiversité des sols. Promouvoir une démarche volontariste à propos des services écosystémiques, du rôle qu’y jouent les espèces et de la dynamique de la biodiversité nous semble essentiel. Nous avons donc adopté en commission l’amendement portant création de l’article 68 ter que vous nous proposez maintenant de supprimer, ce que je regrette vraiment. Je souhaite que nous poursuivions le travail sur ce sujet. Je m’oppose à ces amendements de suppression et déplore une décision un peu brutale.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Nous avions adopté cet article en commission, car nous sommes convaincus qu’il est nécessaire de protéger certaines espèces qui rendent des services à la nature. J’ai le regret de devoir dire que Mme la ministre n’était pas présente à ce moment-là. Nous pensions donc que le débat aurait lieu en séance publique, et qu’il nous permettrait d’aboutir à une autre rédaction, ou tout au moins d’obtenir des assurances de la part du Gouvernement. Nous n’avons pas de réponse à ce jour. J’aimerais donc, madame la ministre, que vos services puissent travailler sur le sujet et nous proposer une solution. Cet article était en quelque sorte un appel, car des mesures s’imposent. J’estime que c’est faisable. Je vous demande donc de vous pencher sur cette question, afin qu’en deuxième lecture, nous puissions trouver le moyen de protéger ces espèces indispensables à la préservation de la biodiversité.

(Les amendements identiques nos 1504, 502 et 775 sont adoptés, les amendements nos 558, 21 et 697 tombent et l’article 68 ter est supprimé.)

Après l’article 68 ter

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 500 et 830.

La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n500.

M. Gilles Lurton. Cet amendement vise à compléter la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L.420-1 du code de l’environnement par les mots : « et des services qu’elle rend ».

En effet, les chasseurs ne sont pas que des utilisateurs de la biodiversité : ils en sont aussi des acteurs et des contributeurs. En tant qu’usagers de la nature, ils contribuent à la préservation de la biodiversité. En particulier, et c’est peut-être ce qui vient le plus immédiatement à l’esprit, la chasse a un rôle de régulation des espèces en surnombre, et elle contribue ainsi à l’un des services écosystémiques reconnus, le service de « régulation des écosystèmes ».

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Sauvan, pour soutenir l’amendement identique n830.

M. Gilbert Sauvan. La chasse est concernée par plusieurs catégories de services écosystémiques. D’une part, elle permet la fourniture de ressources alimentaires « consommables » avec le gibier – la venaison. D’autre part, c’est une activité socio-culturelle, source de bien-être.

Mais les chasseurs ne sont pas que des utilisateurs de la biodiversité : ils en sont aussi des acteurs et des contributeurs. En tant qu’usagers de la nature, ils contribuent à la préservation de la biodiversité. En premier lieu, et c’est peut-être ce qui vient le plus immédiatement à l’esprit, la chasse a un rôle de régulation des espèces en surnombre ; elle contribue ainsi à l’un des services écosystémiques reconnus, le service de « régulation des écosystèmes ». En second lieu, elle peut – si l’on y inclut les actions conduites par les chasseurs en faveur de la conservation d’espèces ou d’habitats – être appréhendée comme contribuant à la fourniture de services écosystémiques. Un exemple est celui de l’entretien des zones de marais, ou des rivières par les pêcheurs. Le fait même d’affecter un territoire à la chasse permet d’éviter sa disparition au profit d’autres valorisations concurrentes.

Il est donc légitime de préciser que les chasseurs contribuent au maintien de la biodiversité et des services qu’elle rend.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Nous avons déjà eu ce débat hier. À cette occasion, j’ai rappelé que la loi de 2012 que nous avions adoptée sur le rapport de M. Jérôme Bignon reconnaît que les chasseurs contribuent au maintien, à la restauration et à la gestion équilibrée des écosystèmes en vue de la préservation de la biodiversité. Cette disposition se suffit à elle-même, et la commission a repoussé ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Même avis.

(Les amendements identiques nos 500 et 830 ne sont pas adoptés.)

Article 68 quater

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements de suppression, nos 776 et 1376.

La parole est à M. Gilbert Sauvan, pour soutenir l’amendement n776.

M. Gilbert Sauvan. L’article 68 quater envisage clairement une extension aux mammifères des principes de la directive « Oiseaux » pour les espèces qui ne seraient pas soumises à plan de chasse ou qui n’entreraient pas dans la catégorie des nuisibles.

L’espèce et le mode de chasse implicitement visés sont le blaireau et la vénerie sous terre, avec ses périodes de chasse : la période générale, du 15 septembre au 15 janvier, et sa période complémentaire, à partir du 15 mai. Ces périodes ont été choisies en fonction de la biologie de l’espèce. Elles ont été validées par les arrêts du Conseil d’État du 20 octobre et du 30 juillet 1997. L’extension envisagée n’a donc pas lieu d’être.

En outre, cette disposition aura probablement des conséquences sur la chasse d’autres espèces telles que le lièvre, qui n’est pas systématiquement soumis à plan de chasse ou classé nuisible. C’est pourquoi l’amendement n776 vise à supprimer l’article 68 quater.

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement identique n1376.

M. Stéphane Saint-André. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Le nouvel article 68 quater prend en compte l’impact direct sur la biodiversité qu’a le fait de chasser les mammifères pendant la période de reproduction ou de dépendance. C’est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit d’animaux à stratégie de reproduction peu dense ou avec une longue période de gestation.

Vous avez parlé de la chasse au blaireau. Vous savez que celle-ci ne répond à aucune nécessité, puisque le blaireau ne se mange pas et qu’on ne fait aucun usage de sa peau. En outre, cette chasse se pratique en général pendant la période de reproduction. Elle est très cruelle : on envoie des chiens dans les terriers des blaireaux, qu’ils abritent ou non une femelle en gestation ou avec ses petits ; au bout de quelques heures de stress, les blaireaux sortent et sont écartelés et éventrés par les chiens. L’impact sur la biodiversité est réel, puisque ce sont souvent les mères et les femelles aptes à se reproduire qui sont visées, et cela – j’ose à peine le dire – pour je ne sais quel objectif. Nous souhaitons donc que ce type de chasse soit interdit pendant la période de gestation et pendant celle où les petits sont allaités. C’est pourquoi la commission a repoussé ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée. Il relève toutefois un problème juridique, une telle disposition n’existant pas pour les mammifères à l’échelle de l’Union européenne.

(Les amendements identiques nos 776 et 1376 ne sont pas adoptés.)

(L’article 68 quater est adopté.)

Après l’article 68 quater

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1002.

Mme Laurence Abeille. C’est un amendement emblématique que je vous propose ici. Nombre de nos concitoyens aspirent aujourd’hui à profiter de la nature et de la biodiversité. Protéger cette nature et cette biodiversité, les prendre en compte et les respecter fait désormais partie de l’éducation à l’environnement comme de notre quotidien. Or les promenades en forêt ou dans la campagne ne sont pas possibles les jours où l’on chasse. Et sauf réglementation particulière, on continue à chasser tous les jours de la semaine en France : il n’existe aucune interdiction de principe tel ou tel jour.

On nous dit que le travail est engagé sur le terrain avec les associations et les chasseurs. Mais cette concertation semble s’éterniser : aucune mesure n’est prise, alors même que le partage de la nature et une meilleure connaissance de ces milieux doivent pouvoir s’opérer en toute sécurité et en toute tranquillité, aussi bien pour les ruraux que pour les urbains. C’est pourquoi nous proposons d’interdire la chasse le dimanche. Cela répond nous semble-t-il à une aspiration populaire, celle de pouvoir profiter de la nature sans risquer de se faire tirer dessus, les accidents de chasse restant fréquents.

J’ai déposé cet amendement pour susciter le débat, et j’espère qu’il recueillera un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Ne souhaitant pas rouvrir le débat sur les jours de chasse, la commission a repoussé cet amendement. Il est vrai que, dans certains départements, la chasse n’est pas autorisée sept jours sur sept, mais nous pensons que les territoires doivent pouvoir en décider eux-mêmes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Je ne suis pas du tout d’accord avec cet amendement. Élu d’un grand département de chasse, celui de la Meuse, je n’ai jamais été témoin de la moindre difficulté entre les chasseurs et les randonneurs – c’est rarissime. Dans tous les cas, les chasseurs mettent en place des protocoles pour faire en sorte qu’il n’y ait pas de chasse là où l’on se promène le dimanche, et il y a une vraie information. Prenons garde à ne pas stigmatiser les chasseurs. À cet égard, les débats sur ce projet de loi nous ramènent parfois des années en arrière, avant le Grenelle de l’environnement, en opposant chasseurs et protecteurs de la nature. Reconnaissons que le sujet est traité en harmonie dans la quasi-totalité des cas. N’oublions pas que le dimanche est souvent le seul jour de la semaine où les chasseurs peuvent se réunir, notamment en milieu rural. L’adoption de cet amendement mettrait les campagnes en émoi pour peu de chose !

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Que ma collègue veuille bien m’excuser, mais nous avons là l’exemple même de l’amendement idéologique. C’est mon cinquième mandat, et c’est toujours le même débat qui resurgit.

M. Sergio Coronado. En fait d’idéologie, vous vous y connaissez !

M. Thierry Mariani. Comme mon collègue, je pensais que ce débat était d’une autre époque. Si je comprends bien, il faut désormais interdire non seulement le travail, mais aussi la chasse le dimanche !

Je dis simplement que, sur le terrain, les choses se passent très bien. J’ai été, pendant vingt ans, député d’un département du sud de la France où la fédération de chasse et les associations de protection de la nature travaillaient ensemble. Les dates d’ouverture étaient fixées pratiquement en commun, et ce genre de problème ne s’est jamais posé. Décider arbitrairement, depuis l’Assemblée nationale, d’interdire la chasse un jour donné dans toute la France, ce serait vraiment se montrer éloigné de la réalité.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Sauvan.

M. Gilbert Sauvan. On ne peut accepter ce genre d’amendement. Contrairement à ce que l’on semble insinuer, les chasseurs ne sont pas tous des viandards ! Les chasseurs ont un droit, en particulier sur leur propriété. Le droit de chasse est lié à la propriété et, aujourd’hui, la plupart des chasseurs ont ce droit. Il faut absolument respecter le droit de chasse.

Au sein de leurs organisations, fédérations et sociétés de chasse, les chasseurs posent eux-mêmes des limites quant à la durée de la chasse, sans que l’on ait besoin de décider pour eux au niveau national. De même que chaque territoire est différent, les chasses ne prennent pas la même forme en tout point de la France. En outre, et les chasseurs sont responsables. C’est pourquoi nous ne pouvons pas adopter un amendement tendant à restreindre de façon générale les droits de l’ensemble des chasseurs.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi.

Mme Danielle Auroi. Pour ma part, en tant que chasseuse de champignons – et alors que, je le précise d’emblée à nos collègues, je n’étais pas encore élue – j’ai connu, un dimanche matin, tôt, des problèmes avec les chasseurs. Certains, en effet, tirent parfois à tort et à travers.

Mme Catherine Quéré. Comment peut-on dire une chose pareille ?

M. Thierry Mariani. Il faut aller à la messe, c’est moins dangereux ! (Sourires.)

Mme Danielle Auroi. Monsieur Mariani, vos réflexions sont toujours aussi déplacées.

Mme la présidente. Poursuivez, madame Auroi.

M. Thierry Mariani. Vous n’avez aucun sens de l’humour !

Mme la présidente. Monsieur Mariani, s’il vous plaît !

Mme Danielle Auroi. M. Mariani souhaite faire de l’humour dans son coin, c’est son droit.

En tant que présidente de la commission des affaires européennes, je rappelle que, dans la plupart des États européens, il existe un jour sans chasse.

Mme Catherine Quéré. En France aussi !

Mme Danielle Auroi. Ce n’est pas pour cela qu’il n’y a pas de chasseurs en Allemagne, en Grande-Bretagne ou dans la plupart des pays européens. En fin de compte, une telle mesure est source de tranquillité. Après tout, les chasseurs disposent de tous les autres jours de la semaine, y compris le samedi. Ce n’est donc pas une si mauvaise idée.

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il n’y a pas de volonté de stigmatisation de la part des signataires de l’amendement, quand bien même certains de nos collègues – il est vrai qu’ils s’y connaissent – le jugent idéologique. En réalité, il est le fruit d’un simple constat : le nombre d’accidents de chasse est en augmentation. Il n’est donc pas raisonnable de prétendre que tout se passe admirablement bien et dans une très grande harmonie. Je ne citerai que quelques chiffres : les accidents ont connu, au cours de la saison 2013-2014, une hausse de 25 % par rapport à la saison précédente, soit une augmentation de 37 % au cours des deux dernières années. Ce n’est pas rien, d’autant que plus de 15 % des victimes ne sont pas des chasseurs. Il ne s’agit donc pas de stigmatiser les chasseurs ni de les désigner comme des viandards à l’opinion publique mais, simplement, de constater que les relations entre usagers de la nature, que nous sommes tous, sont parfois difficiles et compliquées, et peuvent parfois conduire à des accidents graves.

La mesure proposée s’apparente à la circulation alternée : il est des moments où il faut distinguer le public et les usagers. Or, comme l’a rappelé notre collègue Auroi, nous sommes le seul pays où l’on peut chasser sept jours sur sept. Dans beaucoup de pays d’Europe où la chasse est autorisée, elle ne peut être pratiquée le samedi et le dimanche.

Nous proposons une régulation tout à fait raisonnable afin de faciliter les relations entre les différents usagers, chasseurs d’un côté, non-chasseurs de l’autre, ces derniers étant majoritaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Je partage totalement les propos de mes collègues Pancher et Mariani. La chasse est une activité populaire, et beaucoup de ceux qui la pratiquent travaillent toute la semaine. Le dimanche est donc pour les chasseurs un jour de prédilection. En outre, ces derniers sont responsables et respectueux de l’environnement. Ils sont par ailleurs organisés en fédérations : il relève de la concertation locale, et certainement pas de la loi, de décider d’un jour sans chasse.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Quéré.

Mme Catherine Quéré. Je trouve tout à fait normale l’idée de partage mais, en tout état de cause, on n’a pas le droit de chasser tous les jours. Chez moi, il n’y a de battues que le mercredi et le dimanche matin ; les autres jours et l’après-midi appartiennent aux promeneurs. Il n’est donc pas exact de dire que l’on chasse tous les jours en France.

Mme Laurence Abeille. Mais si !

M. Sergio Coronado. C’est autorisé !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Ségolène Royal, ministre. Sans m’appesantir sur le sujet, je voudrais juste apporter quelques petites précisions juridiques. Premièrement, la chasse n’a lieu que de septembre à janvier ou mars, et non pas toute l’année.

M. Thierry Mariani. Exact !

Mme Ségolène Royal, ministre. Il est important de le rappeler à ceux qui ne sont pas chasseurs car, à entendre vos échanges, on a l’impression que l’on chasse tout au long de l’année, y compris pendant les vacances d’été. Ce n’est pas le cas.

Deuxième précision importante : la chasse est déjà interdite le dimanche dans les forêts domaniales d’Île-de-France.

Troisièmement, le cahier des charges de location des chasses de l’Office national des forêts prévoit la possibilité d’une interdiction des chasses le vendredi, le samedi et le dimanche pour protéger les promeneurs du week-end.

Enfin, dans les territoires, les préfets peuvent décider de fermer la chasse certains jours, pas nécessairement le dimanche mais également en semaine : dans le cas où, par exemple, est organisée une randonnée départementale, le préfet peut très bien décider d’un jour de fermeture.

Mme Catherine Quéré. Absolument !

Mme Ségolène Royal, ministre. À titre d’illustration, cela a été le cas le mardi dans le Jura, la Haute-Vienne et l’Ardèche, le mercredi et le vendredi en Haute-Saône, les mardis, jeudis et vendredis dans le Jura.

Notons que ce droit du préfet s’applique en fonction des conditions locales. Il me paraît plus intelligent de laisser les partenaires locaux décider de ce qu’il convient de faire pour résoudre d’éventuels conflits d’usage et de cohabitation et inciter les usagers à se respecter. Jusqu’à présent, nous avons essayé de bâtir un texte équilibré, susceptibles de prendre en compte les aspirations et les convictions des uns et des autres. En l’occurrence, le dispositif juridique en vigueur permet parfaitement d’aplanir les conflits d’usage. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. Thierry Mariani et Mme Maina Sage. Très bien !

(L’amendement n1002 n’est pas adopté.)

Article 68 quinquies

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 777, 1377 et 1450.

La parole est à Mme Catherine Quéré, pour soutenir l’amendement n777.

Mme Catherine Quéré. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n1377.

M. Stéphane Saint-André. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Sauvan, pour soutenir l’amendement n1450.

M. Gilbert Sauvan. Cet amendement vise à maintenir le modèle actuel de chasse à la glu. Cette chasse traditionnelle, sélective et contrôlée, reconnue par le Conseil d’État et la Cour de justice de l’Union européenne depuis 1988, met en œuvre des savoir-faire séculaires qui sont, le long du pourtour méditerranéen, vecteurs d’interactions écosystémiques. Cette pratique, en parfaite adéquation avec la directive « oiseaux » 2009-147-CE, est inspirée par une volonté de gestion durable puisqu’elle articule le suivi des populations de turdidés et la participation des pratiquants à des études scientifiques.

Les adhérents des associations impliquées dans le maintien de cette chasse s’investissent ainsi dans plusieurs programmes. L’Association de défense des chasses traditionnelles de la grive travaille avec l’Observatoire européen cynégétique et scientifique citoyen, sous la direction de l’Institut méditerranéen du patrimoine cynégétique et faunistique. L’Association d’imitation du chant des oiseaux travaille sur l’étude relative à l’âge-ratio des grives musiciennes et mauvis, et collabore, à cette fin, avec le laboratoire ornithologique d’Arosio et l’Institut européen pour la gestion des oiseaux sauvages.

Par ailleurs, l’entretien des postes et des cabanes participe à la sauvegarde de l’environnement et du patrimoine dans une région où les incendies de forêt sont récurrents et ont de sévères conséquences sur les espaces boisés méditerranéens. Le débroussaillage et le nettoyage des abords et des chemins contribuent à l’entretien nécessaire des espaces boisés des collines provençales.

Enfin, il n’y a pas de mise à mort de l’animal. Les grives et les merles prélevés au moyen de gluaux servent d’appelants. Lorsque ces turdidés sont retrouvés collés sur les baguettes enduites de glu, ils sont décollés, nettoyés et, le cas échéant, soignés. Au terme de la saison de la chasse, les appelants sont relâchés, dans le respect de l’animal et des flux des espèces chassées.

M. Bertrand Pancher. Ce n’est pas tenable !

M. Gilbert Sauvan. Les prélèvements font l’objet de quotas et sont très faibles.

De fait, la suppression de la chasse à la glu aurait une finalité inverse à l’objectif affiché par ce texte, étant donné qu’elle s’inscrit dans le cadre d’une chasse durable et se dote de plusieurs outils permettant le maintien de la biodiversité dans les territoires concernés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. La commission a repoussé ces amendements. Même si notre collègue a fait l’apologie de la chasse à la glu, il ne faut pas se leurrer : ce n’est pas une chasse particulièrement douce ; elle est au contraire plutôt cruelle. Par ailleurs, elle présente un gros défaut : contrairement à ce qui a été affirmé, elle n’est pas sélective.

M. Sauvan a insisté sur l’aspect traditionnel de cette forme de chasse. Mais il est des traditions extrêmement cruelles ; nous en connaissons de nombreux exemples, dont l’espèce humaine est elle-même parfois victime. Personne n’est favorable au maintien de telles traditions. Un tel argument ne peut donc nous convaincre de revenir sur la décision de la commission.

Il existe d’ailleurs, madame la ministre, d’autres pièges à caractère non sélectif qu’il faudra sans doute interdire un jour, car leur usage est contraire au maintien et à la préservation de la biodiversité. Car tel est bien l’objectif de ce projet de loi, je le rappelle : la reconquête de la biodiversité. Et pour y parvenir, il faut prendre des décisions qui peuvent paraître anodines mais qui, en réalité, ne le sont pas. Je lisais il y a quelques jours l’article d’un chercheur affirmant que la plus grande part des disparitions d’espèces observées au cours des dernières années étaient dus à des prélèvements inconsidérés ayant perturbé leur reproduction. Tout cela doit être envisagé de façon globale. Il n’y aucune raison de laisser perdurer la chasse à la glu, qui n’est pas sélective. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. Bertrand Pancher. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Sagesse.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Madame la ministre, j’ai été l’élu d’un département, le Vaucluse, où l’on dénombre 2 000 chasseurs à la glu. Je ne vais pas reprendre la démonstration de notre collègue Sauvan, que je partage, même si nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs. Comme il l’a dit lui-même, il s’agit d’un mode de chasse traditionnel qui n’a pas pour but de tuer. Quand ils sont capturés accidentellement, les oiseaux protégés sont immédiatement libérés. C’est donc bien une chasse sélective, de surcroît reconnue par le Conseil d’État.

Et vous envoyez ce message à cinq jours des cantonales ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cela me fait penser à l’interdiction des crèches. Quel rapport avec la chasse à la glu, me demanderez-vous ? Aucun, si ce n’est qu’une fois de plus, on demande à des gens attachés à leurs traditions de modifier leurs habitudes. Je ne suis pas concerné, étant donné ma nouvelle circonscription, mais une fois de plus, on force les gens à abandonner des savoirs transmis de père en fils pendant des générations, et ce alors que la nocivité de la chasse à la glu n’est absolument pas prouvée.

Comme on l’a dit, des fédérations de chasse réglementent leur domaine d’activité. Je me souviens des actions menées par la fédération de chasse du Vaucluse. Ces instances sont extrêmement attachées à la protection du patrimoine cynégétique. Aussi je pense que ce genre de mesures sont perçues par une partie des Français comme une provocation, une atteinte à leurs traditions et, même une atteinte à leur identité. De fait, pour certains, la chasse est le dernier loisir, qui plus est gratuit. Les dispositions que nous nous apprêtons à adopter vont heurter beaucoup de gens.

(Les amendements identiques nos 777, 1377 et 1450 ne sont pas adoptés.)

(L’article 68 quinquies est adopté.)

Après l’article 68 quinquies

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n999, portant article additionnel après l’article 68 quinquies.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à interdire à terme les cirques avec animaux sauvages. L’interdiction ne sera pas d’effet immédiat : il est prévu une phase de transition durant laquelle les responsables des cirques détenant des animaux pourront poursuivre les représentations.

Les animaux sauvages détenus en captivité et utilisés dans les cirques présentent presque systématiquement des déviances comportementales et connaissent un taux de mortalité élevé. La cause est à rechercher dans leurs conditions de captivité, qui sont bien sûr totalement inadaptées à leurs besoins physiologiques naturels.

L’exhibition d’animaux sauvages dans les cirques n’a commencé que près d’un siècle après la création de ce type de spectacles. Les animaux ne font pas partie intégrante du cirque, ils n’en sont pas indissociables. Affirmer le contraire reviendrait à dénigrer les autres savoir-faire du cirque, comme ceux des trapézistes, des clowns, des funambules et autres acrobates. Une interdiction des animaux sauvages dans les cirques ne remettrait aucunement en cause la tradition circassienne.

Plusieurs pays européens ont interdit aux cirques de détenir des animaux capturés dans la nature, notamment la Belgique, l’Estonie, la Hongrie, la Norvège et la Pologne. D’autres ont interdit la détention d’animaux de plusieurs espèces sauvages ; l’Autriche, Malte, la République Tchèque, la Slovaquie, la Suède… Certains ont même déjà interdit toute présence d’animaux sauvages dans les cirques, à l’instar de la Bulgarie, la Croatie, la Finlande et la Grèce.

Je ne m’attarderai pas davantage sur le sujet, mais vous aurez compris que dans le but de protéger la biodiversité, nous souhaitons que les animaux sauvages puissent rester dans leur environnement naturel ou, dans certains cas, dans les zoos, où ils sont bien traités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Ce sujet est intéressant, et je partage votre point de vue sur le fond. Vous aviez cependant reconnu vous-même en commission que cet amendement était peut-être un peu excessif.

Certes, il faut faire en sorte que les spectacles de cirque avec des animaux sauvages disparaissent progressivement, car ce sont surtout les artistes, hommes et femmes, qui confèrent à cette tradition tout son intérêt et satisfont le public.

Mme Laurence Abeille. C’est pour cela que nous prévoyons un délai de trois ans !

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Une telle mesure aurait toutefois un effet néfaste auquel vous n’avez peut-être pas pensé : un décret stipule qu’un animal détenu par un cirque doit travailler ; les propriétaires sont ainsi amenés à se débarrasser d’une façon pas toujours très élégante des vieux animaux qui ne peuvent plus travailler.

Il faudrait donc peut-être poursuivre la réflexion initiée par le groupe de travail sur la protection animale, qui s’était déjà saisi de ce problème, afin de trouver d’ici à la deuxième lecture un moyen de s’engager dans le déclin de ces pratiques, qui ne sont pas de notre temps. La commission a donc repoussé cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. J’ai pleinement conscience que des progrès doivent être réalisés en matière de bien-être animal ; c’est évident, en particulier dans les petits cirques, qui vivotent, mais qui ont de fait de moins en moins d’animaux compte tenu de leur coût d’entretien.

La priorité est de renforcer la réglementation, d’en garantir une meilleure application en multipliant les contrôles. Le vote de cet amendement aurait plutôt pour conséquence la mort économique de nombreux cirques, ce qui n’est pas le but recherché, même s’il faut bien évidemment aller vers l’extinction de ce type d’exhibitions. Dans certains cirques, toutefois, la mise en valeur des animaux est assez remarquable ; je pense notamment aux chevaux du célèbre théâtre équestre Zingaro.

Mme Laurence Abeille et M. Sergio Coronado. Le cheval n’est pas un animal sauvage !

M. Sergio Coronado. Les chevaux sont des animaux d’élevage !

Mme Ségolène Royal, ministre. À quel moment peut-on considérer qu’un animal détenu par un cirque est apprivoisé, et non plus sauvage ? L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Bien entendu, il y a cirque et cirque. J’ai des amis au cirque Bouglione, où je vais régulièrement assister à des spectacles. Cette compagnie ne tourne plus en province depuis longtemps : les animaux restent à Paris et sont particulièrement bien traités. Voilà quelques années, un éléphant est sorti de l’enceinte pour aller s’alimenter chez le fleuriste du coin. Quand on connaît bien la profession, on ne peut que constater à quel point les dresseurs sont attachés à leurs animaux, qui sont très bien nourris.

Dans certains petits cirques qui vivotent, comme le disait Mme la ministre voilà quelques instants, il peut y avoir des problèmes, mais comme partout ailleurs. Allez-vous également interdire l’élevage de lapins au motif qu’ils ne peuvent pas bouger dans les élevages industriels ? Allez-vous interdire les élevages de porcs pour des raisons identiques ?

M. Sergio Coronado. Ce n’est pas le sujet !

Mme Laurence Abeille. Cela n’a rien à voir !

M. Bertrand Pancher. Chez une infime minorité d’agriculteurs, il peut également y avoir des problèmes. Il faut étudier cette question avec pragmatisme. Il conviendrait sans doute de renforcer la réglementation pour certaines catégories de cirques, notamment les plus petits et ceux qui circulent beaucoup. Prenons garde toutefois de ne pas stigmatiser cette belle profession artistique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. J’aimerais apporter quelques précisions. L’interdiction porte non pas sur les chevaux, lesquels sont des animaux domestiques, mais sur les animaux sauvages prélevés dans leur milieu naturel et amenés sur notre territoire pour participer à des spectacles sans pouvoir jouir de bonnes conditions de vie.

Mme Ségolène Royal, ministre. Les chevaux de Camargue sont bien des animaux sauvages !

Mme Laurence Abeille. Vous citiez en exemple le cirque Bouglione, monsieur Pancher, mais l’éléphant qui est sorti pour manger les fleurs du fleuriste du coin avait probablement de bonnes raisons de s’échapper, et n’était sans doute pas si heureux que vous le dites…

La question porte bien sur le prélèvement d’animaux sauvages pour des spectacles. Cette tradition a été importante dans notre pays mais tend à décroître. Je prévois dans mon amendement un délai de trois ans, qui laisserait le temps aux professionnels de se retourner. D’ailleurs, les spectacles sont de moins en moins nombreux à inclure des animaux sauvages, et les jeunes artistes des écoles de cirque proposent des numéros formidables qui n’ont rien à voir avec cette pratique ancienne.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. C’est vrai !

Mme Laurence Abeille. Nous souhaiterions faire cesser celle-ci dans un délai raisonnable afin de mettre un terme aux prélèvements d’animaux sauvages tout en maintenant la tradition du cirque.

(L’amendement n999 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1003, portant article additionnel après l’article 68 quinquies.

Mme Laurence Abeille. Avec cet amendement, je reviens à la chasse, sujet sur lequel je ne nourris aucune obsession ou vision idéologique, et que je n’aborde qu’avec le souci de protection de la biodiversité.

Le présent amendement vise à interdire sans exception la chasse de nuit qui, à l’instar de la chasse à la glu évoquée tout à l’heure, n’est absolument pas sélective. Les conditions de visibilité sont tout de même moins bonnes la nuit qu’en plein jour, et les chasseurs ont plus de difficulté à distinguer précisément ce qu’ils visent.

L’interdiction de la chasse de nuit était inscrite depuis 1844 dans le code rural français. Le tir de nuit sur les oiseaux à partir d’une hutte a été autorisé par la loi à partir de 2000, et depuis 2003 l’Alsace autorise les tirs nocturnes de sangliers.

Une telle pratique est dénoncée par la plupart des scientifiques, car elle perturbe énormément le cycle biologique des oiseaux, en particulier leur alimentation et leur repos. Elle rend impossible le stationnement et le ravitaillement indispensables lors de la migration. Rappelons également qu’aux termes de l’article 8 de la directive Oiseaux, « les États membres interdisent le recours à tous moyens, installations ou méthodes de capture ou de mise à mort massive ou non sélective ou pouvant entraîner localement la disparition d’une espèce ».

La chasse de nuit étant bel et bien non sélective, elle a un impact sur la préservation des espèces protégées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement a été débattu au même titre que celui qui portait sur les jours de chasse. Nous n’avons pas souhaité ranimer le débat qui avait eu lieu voilà quelques années dans notre assemblée et auquel j’avais participé pendant des nuits entières. Nous avons tenté de trouver un équilibre.

Certes, la chasse de nuit n’est pas très sélective, mais le projet de loi relatif à la biodiversité ne doit pas être l’occasion de se focaliser contre les chasseurs. La chasse est une pratique autorisée, et les chasseurs ont d’ailleurs intérêt à respecter la réglementation, car à défaut les générations futures ne voudront plus en entendre parler.

Il conviendrait donc davantage d’adresser un message aux personnes tentées par la chasse de nuit, même si elles disposent d’une autorisation, en soulignant que ces conditions ne permettent pas de déterminer sur quelle espèce d’oiseaux ou d’animaux ils tirent.

La commission a donc repoussé cet amendement avec le souci de ne pas ranimer ces débats. Le texte prévoit déjà des mesures importantes, et l’interdiction de la chasse à la glu et de la chasse des mammifères pendant les stades de reproduction et de dépendance paraissent suffisantes en matière de protection de la biodiversité.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Avis défavorable : la chasse au gibier d’eau de nuit est autorisée dans vingt-sept départements. C’est une pratique traditionnelle, très encadrée et qui fait l’objet d’un suivi des prélèvements réalisés. Elle n’a pas lieu d’être interdite.

Je respecte toutes les opinions, mais il faut se préserver d’une approche idéologique et répressive de loisirs ruraux qui n’importunent personne et ne dégagent aucun gaz à effet de serre. Un certain nombre de pratiques méritent d’être respectées. Notre attention doit se porter sur les activités qui portent réellement atteinte à la biodiversité.

M. Sergio Coronado. Comme la pêche en eau profonde !

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Je n’ai rien à ajouter aux propos de Mme la ministre, auxquels je souscris pleinement.

Ainsi que cela a été dit à propos d’autres articles de ce texte, les fédérations de chasse ont une action de réglementation, de contrôle, de limitation dans les départements qui ont été mentionnés. Là où la chasse de nuit est ouverte elle est strictement encadrée et limitée. Rouvrir ce débat aujourd’hui n’est pas opportun au regard des enjeux du projet de loi. Je ne voterai donc pas cet amendement.

(L’amendement n1003 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1021.

Mme Laurence Abeille. Les chasseurs sont confrontés depuis plusieurs années à une raréfaction du petit gibier de plaine sur de nombreux territoires. Pour compenser ce phénomène, ils effectuent de nombreux relâchés.

Or, en l’absence de recensement et de contrôle réglementaire, aucune estimation précise n’est établie quant aux quantités d’animaux d’élevage appartenant à ces espèces de petit gibier qui sont relâchés dans le milieu naturel. L’impact de ces introductions massives d’animaux d’élevage, tant sur les spécimens sauvages – pollution génétique – de l’espèce considérée que sur les biotopes, sur le plan sanitaire ou sur les populations de prédateurs, n’est de fait pas ou mal connu, ce qui est particulièrement problématique.

Cet amendement propose donc de modifier l’article L. 424-11 du code de l’environnement pour que le dispositif de recensement et de contrôle des prélèvements et relâchés de grand gibier et de lapins soit également applicable à toutes les autres espèces de petit gibier. Il s’agit vraiment d’un amendement de bon sens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Mêmes arguments et même avis que pour le précédent.

Mme Laurence Abeille. Il est pourtant tout à fait différent !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Défavorable.

(L’amendement n1021 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n1552.

Mme Ségolène Royal, ministre. Cet amendement vise à permettre des opérations d’ouverture de milieux forestiers dans les espaces naturels protégés lorsqu’ils sont réalisés en vue de la préservation du patrimoine naturel.

Il a été déposé à la demande des gestionnaires des sites Natura 2000 et de la Ligue de protection des oiseaux pour permettre aux propriétaires forestiers de continuer à réaliser de telles opérations, en application de documents de gestion de sites Natura 2000, de sites classés, de réserves naturelles nationales, de parcs nationaux et de réserves biologiques. Dans certains cas, ces opérations sont en effet réalisées dans le cadre de la mise en œuvre de politiques publiques financées par des crédits européens et permettant une ouverture de milieu favorable à certains habitats naturels ou espèces d’intérêt remarquable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. La commission a accepté cet amendement, qui permet de résoudre une contradiction entre deux codes, le code de l’environnement et le code forestier. Le code de l’environnement demande aux propriétaires forestiers de s’engager à protéger un certain nombre de sites, à accepter volontairement un certain nombre de contraintes et à suivre des politiques de protection qui peuvent impliquer de déboiser des parcelles. Le code forestier, quant à lui, oblige à la compensation des opérations de défrichement par des travaux de boisement ou de reboisement pour une surface équivalente, et parfois même supérieure. Il y avait lieu de remettre tous ces codes d’aplomb pour avoir une politique cohérente. La commission, je le répète, a accepté cet amendement.

(L’amendement n1552 est adopté.)

Article 69

Mme la présidente. La parole est à Mme Danielle Auroi, seule oratrice inscrite sur l’article.

Mme Danielle Auroi. Nous abordons, avec cet article, le chapitre consacré à la politique du paysage. Il faut saluer la présence, dans ce projet de loi, de dispositions spécifiquement consacrées aux paysages, objets à la fois naturels et culturels, dont la beauté, la diversité, la préservation et la mise en valeur constituent un élément essentiel du développement économique, notamment touristique, et tout simplement de la qualité de la vie de nos concitoyens. Chacun sait, par ailleurs, que la beauté des paysages, la protection des espaces naturels et ruraux – les haies, les prairies, les forêts, les rivières – va le plus souvent de pair avec la protection des espèces.

Comme le souligne opportunément l’exposé des motifs du projet de loi, la politique du paysage doit achever sa mutation de la seule protection des sites remarquables à la gestion de l’ensemble des paysages, qui sont notre cadre de vie quotidien. Nous savons bien, madame la ministre, combien vous êtes attachée à la question de nos paysages, vous qui avez fait adopter par notre assemblée à la fin de l’année 1992 la loi sur la protection et la mise en valeur des paysages, qui a constitué une avancée importante. La gestion de nos paysages est une affaire complexe qui requiert des partenariats, et les collectivités territoriales, qui ont des responsabilités essentielles dans ce domaine, doivent s’y investir au premier chef.

Les sites inscrits constituent actuellement un élément indispensable du dispositif de protection du patrimoine dont dispose l’État et représentent 1 600 000 hectares, soit 2,6 % du territoire national. Cet outil souple et apprécié permet notamment de maîtriser l’étalement urbain, qui constitue l’une des principales pressions pesant sur la biodiversité ; il joue également un rôle de protection complémentaire d’espaces naturels fortement protégés. La suppression de ce régime serait, me semble-t-il, dommageable à la biodiversité comme au paysage, d’autant plus qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’outil alternatif.

Nous savons, madame la ministre, l’insuffisance criante des moyens humains consacrés à la protection des sites et paysages dans les services de l’État, au niveau central comme au niveau déconcentré. Le projet de loi souligne d’ailleurs que ce manque de moyens est l’une des raisons qui justifient la suppression de l’inscription au titre des sites – il me semble que c’est ajouter du malheur au malheur. Nous savons aussi que de nombreux sites ne bénéficient pas de la protection qui leur serait réellement nécessaire. Aussi, plutôt que de supprimer la procédure d’inscription, peut-être vaudrait-il mieux procéder à une simple remise à plat des sites, en imposant l’idée que le maintien de l’inscription est un principe positif.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1063.

Mme Laurence Abeille. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement, madame Abeille, et je vous demande de le retirer au profit de l’amendement n1531, qui sera examiné plus tard et dont la rédaction paraît préférable. Celle que vous proposez pose en effet de sérieux problèmes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Madame Abeille, maintenez-vous votre amendement ?

Mme Laurence Abeille. Je le retire.

(L’amendement n1063 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie par Mme Gaillard, rapporteure, d’un amendement rédactionnel, n1110.

(L’amendement n1110, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n1531.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement est issu des travaux de la commission et revient sur la disposition initiale du projet de loi rendant impossible, à compter de l’entrée en vigueur de la loi, toute inscription de monuments naturels ou de sites sur la liste départementale mentionnée à l’article L. 341-1 du code de l’environnement.

Pour dires les choses brièvement, nous avons beaucoup travaillé avec les acteurs de la protection des sites depuis l’adoption du projet de loi en commission, et cela nous a permis d’affiner certaines choses.

S’agissant du flux, la réflexion sur la notion de classement et d’inscription a permis d’aboutir à la notion de « solidarité paysagère » entre un site classé ou en instance de classement et son environnement. Les territoires, en effet, sont de plus en plus confrontés à la création de structures d’activité qui peuvent avoir un impact fort sur un site classé lorsque ces projets sont situés dans une zone de contact avec le site classé.

S’agissant des stocks, des mesures permettront de ne pas les conserver au-delà de dix années. On s’aperçoit en effet que certains sites inscrits de très longue date et n’ayant fait l’objet d’aucun classement sont en train de se détériorer, au point qu’il est parfois impossible de rien y faire. Il faut que les sites, une fois inscrits, fassent rapidement l’objet d’une mesure de classement, afin qu’ils puissent être préservés.

L’amendement vise donc à régler deux problèmes, celui des stocks – les élus ne souhaitant pas mettre fin aux inscriptions – et celui des flux, qui auront un nouveau mode de fonctionnement. Mon exposé était un peu long, mais je crois qu’il importait de s’attarder sur cette question complexe.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n1531 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement n1541.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement tend à modifier la rédaction de l’alinéa 7, afin d’en faciliter la compréhension.

(L’amendement n1541, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie par Mme la rapporteure d’un amendement rédactionnel, n1176 rectifié.

(L’amendement n1176 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie par Mme la rapporteure d’un amendement rédactionnel, n1532.

(L’amendement n1532, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1534.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement vise à préciser les modalités de consultation du public. Il a été adopté par la commission.

(L’amendement n1534, accepté par le Gouvernement, est adopté et les amendements nos 225 et 1064 tombent.)

Mme la présidente. Je suis saisie par Mme la rapporteure, d’un amendement de coordination, n1540.

(L’amendement n1540, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1533 rectifié.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de clarification rédactionnelle.

(L’amendement n1533 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté et les amendements nos 227, 853 et 1065 tombent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1432.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement est en grande partie rédactionnel et tend à faire appliquer les nouvelles règles relatives au code pilote et au code suiveur. Recourir à la technique dite du code pilote et du code suiveur impose au législateur, au rédacteur du texte comme à celui qui le vote, s’il souhaite modifier le code pilote, de modifier aussi le code suiveur.

Cette méthode est aujourd’hui dépassée par les nouvelles technologies de l’information, qui permettent à chacun, d’un simple clic, d’avoir accès au texte. Cette technique est aujourd’hui officiellement abandonnée, au profit du renvoi dans le code suiveur aux articles du code pilote, sans citation. Il est donc proposé de satisfaire à la nécessité de mettre à jour le code du patrimoine en suivant toutes ces recommandations, ce qui simplifiera les choses.

(L’amendement n1432, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1437.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel relatif à la même question.

(L’amendement n1437, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie par Mme la rapporteure d’un amendement rédactionnel, n1438.

(L’amendement n1438, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 69, amendé, est adopté.)

Articles 70 et 71

(Les articles 70 et 71 sont successivement adoptés.)

Article 72

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n1462 qui fait l’objet d’un sous-amendement n1559.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement.

Mme Ségolène Royal, ministre. L’article 72 s’intéresse au paysage, en tant qu’élément du cadre de vie d’hommes et de femmes. Il s’agit ici de prendre en compte, non pas les paysages exceptionnels et protégés, mais le paysage quotidien de nos concitoyens. Nous entendons ainsi reprendre et donner davantage d’ambition à la définition du paysage, telle qu’elle figure dans le texte de la Convention européenne du paysage, dans les termes qui ont valu sa ratification par la France.

Alors qu’il est très souvent fait référence au paysage dans nos textes, ce texte-là n’a jamais été mis en valeur, alors que la définition qu’il propose est fondamentale. Le paysage, tel que le vise la loi, renvoie désormais à une réalité objective : la représentation partagée d’un territoire et un bien commun de la nation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour donner l’avis de la commission sur cet amendement et soutenir le sous-amendement n1559.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Ce sous-amendement tend à ajouter le mot « dynamiques » à l’alinéa 2, afin de souligner l’importance des interrelations et de rappeler que le paysage est, par définition, dynamique et en constante évolution. Sous réserve de son acceptation, la commission émettra un avis favorable à l’amendement du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ce sous-amendement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Favorable.

(Le sous-amendement n1559 est adopté.)

(L’amendement n1462, sous-amendé, est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 667 et 1319.

La parole est à Mme Catherine Quéré, pour soutenir l’amendement n667.

Mme Catherine Quéré. Cet amendement vise à préciser que les paysages qui sont décrits dans les atlas départementaux ne sont pas auto-façonnés et qu’ils pourraient être profondément altérés sans le travail de certains professionnels, tels que les éleveurs, qui élèvent leurs animaux sur l’herbe. Si, demain, les exploitations d’élevage français venaient à disparaître, ce sont 13 millions d’hectares de prairies qui retourneraient à l’état de friches, seraient converties en grandes cultures ou rattrapées par l’urbanisation.

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour soutenir l’amendement n1319.

M. Stéphane Saint-André. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Mes chers collègues, nous venons d’ajouter le mot « dynamiques » à l’alinéa 2 pour signifier que les paysages sont évolutifs. Il est bien évident qu’ils sont aussi façonnés par la main de l’homme, et nous connaissons tous la part qu’y prennent les différentes communautés socio-économiques, dont les éleveurs. Néanmoins, la loi fixe les règles générales et, si l’on commence à faire la liste de toutes celles et de tous ceux qui font évoluer les paysages, on ne va pas s’en sortir ! Cet amendement a été repoussé par la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Même avis. Je pense en outre que ces amendements sont satisfaits, puisque tous les acteurs des paysages seront bien sûr appelés à participer aux atlas du paysage, qui rencontrent d’ailleurs un succès extraordinaire.

(Les amendements identiques nos 667 et 1319 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n415.

M. Gilles Lurton. Les atlas de paysage peuvent constituer un outil de connaissances et de partage de l’expertise au niveau territorial des paysages. Pour ce faire, il est nécessaire d’associer l’ensemble des acteurs socio-économiques ayant participé à la constitution et à l’entretien des paysages, à l’élaboration de ces atlas. Tel est le sens de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Je suggère le retrait de cet amendement, car tous les acteurs du territoire sont amenés à participer à l’élaboration des atlas de paysages.

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. C’est un amendement de groupe : compte tenu du grand nombre de cosignataires, je ne prendrai pas la décision de le retirer.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Ségolène Royal, ministre. Dans ce cas, avis défavorable.

(L’amendement n415 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n483.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 4 de l’article 72, car il ajoute de la complexité à l’élaboration des documents d’urbanisme et se révèle trop difficilement applicable.

En effet, il apparaît difficilement envisageable que les documents d’urbanisme et les chartes des parcs naturels régionaux – qui ont déjà l’obligation de formuler des orientations générales en matière de paysages – précisent en plus, pour chaque type de paysage identifié, les éléments y figurant tels que les haies, bosquets, arbres isolés. Cela rendrait l’élaboration de ces documents très difficile. Pour gagner en souplesse, il est préférable de supprimer cet alinéa.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Vos craintes ne sont pas justifiées, monsieur Pancher, parce qu’il s’agit simplement, pour le projet d’aménagement et de développement durable, de préciser les orientations retenues en matière de protection, de gestion et d’aménagement des structures paysagères et des éléments de paysage pour chacun des types de paysage identifié par l’atlas sur le territoire couvert par le schéma de cohérence territoriale – SCOT. Cela se fait déjà, comme nous l’avons constaté parmi les collectivités qui réalisent déjà un atlas de paysages. Je ne pense donc pas que cela soit trop compliqué, et c’est pourquoi la commission a repoussé cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Même avis.

Mme la présidente. M. Lurton, vous êtes signataire d’un amendement identique, n501. Vous avez la parole pour le défendre.

M. Gilles Lurton. Je partage l’argumentation développée par M. Pancher. Il convient de rappeler que les éléments cités – haies, arbres, bosquets, arbres isolés, mares – sont déjà largement protégés dans la transcription française de la nouvelle politique agricole commune qui entre en vigueur en 2015, grâce à deux outils. D’une part, les règles de conditionnalité des aides du premier pilier rendent le maintien des haies obligatoire à partir de 2015. D’autre part, les surfaces d’intérêt écologique doivent constituer a minima 5 % de la surface en terres arables et situés sur ces terres arables pour bénéficier du paiement vert.

Il est donc préférable de supprimer cet alinéa pour maintenir de la souplesse dans la réalisation des documents d’urbanisme tels que les SCOT.

(Les amendements identiques nos 483 et 501 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1441.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Amendement rédactionnel.

(L’amendement n1441, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n1469.

Mme Ségolène Royal, ministre. Il s’agit d’inscrire dans la loi l’objectif de la politique menée en matière de paysages. En effet, il ne s’agit pas de figer l’ensemble des paysages de notre territoire, mais d’en garantir la diversité et la qualité à l’échelle nationale par des actions d’aménagement, de valorisation, de gestion et de protection. La diversité de nos paysages constitue en effet une richesse patrimoniale, et il convient de lutter contre son appauvrissement au même titre que nous luttons contre l’appauvrissement de la biodiversité. L’une et l’autre sont d’ailleurs étroitement liées.

(L’amendement n1469, accepté par la commission, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n1539.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Il nous a semblé que la rédaction actuelle de l’article ne permet de saisir que partiellement le sens des éléments de paysages, qui n’ont pas uniquement un caractère naturel ou relevant du vivant, mais peuvent concerner également le bâti. Cet amendement de la commission propose donc une nouvelle rédaction des objectifs de qualité paysagère.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Il s’agit d’un complément tout à fait judicieux, tant au fond que du point de vue rédactionnel. Avis très favorable.

(L’amendement n1539 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, pour soutenir l’amendement n1452.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Il serait pertinent d’ajouter à la fin de l’alinéa 4 que toutes les actions, importantes, que nous allons entreprendre sur cette question doivent être en conformité avec la transcription française de la nouvelle politique agricole commune entrée en vigueur en 2015.

Par ailleurs, il me semble que le terme d’infrastructures agro-écologiques, retenu pour désigner les haies, bosquets, mares, vergers et arbres isolés, est très fort. Peut-être pourrions-nous parler de contributions à l’agro-écologie. Mais mon amendement ne porte que sur la référence à l’entrée en vigueur de la nouvelle PAC.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je le retire.

(L’amendement n1452 est retiré.)

(L’article 72, amendé, est adopté.)

Après l’article 72

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Quéré, pour soutenir l’amendement n668.

Mme Catherine Quéré. Le projet de loi relatif à la biodiversité ne rend pas compte des nombreux services écologiques rendus par les éleveurs. J’ai bien entendu les propos de notre rapporteure, mais exclure de ce texte les agriculteurs, qui façonnent nos paysages et jouent un rôle capital pour nos territoires ruraux, me paraît un peu injuste.

Les paysages sont certes des espaces naturels, mais ils ne s’auto-façonnent pas plus qu’ils ne s’auto-entretiennent. Ce texte nie une réalité fondamentale et dévalorise le travail indispensable, pour la protection de la biodiversité et de l’environnement, de plusieurs centaines de milliers de professionnels sur notre territoire.

M. Bertrand Pancher. Très bien !

Mme Chantal Berthelot. Je vous suis !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Il n’a jamais été question d’exclure les éleveurs du façonnement des paysages ! Je ne vois pas comment on peut oser dire des choses pareilles, et c’est faire un mauvais procès à ceux qui essaient d’améliorer la loi, y compris sur le plan rédactionnel. Ce que vous vouliez dire est maintenant inclus dans l’article 72, la commission a donc repoussé cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Avis défavorable. Comme précédemment, je crois que Mme Quéré a satisfaction. Il est vrai que rien n’est plus beau que le spectacle au matin, sur l’herbe pleine de rosée, d’un troupeau de vaches parthenaises que l’on aperçoit au coin d’une rue, dans le canton de La Mothe-Saint-Héray !

Il va de soi que les paysages sont façonnés par les élevages, mais il serait contre-productif d’entreprendre une énumération, nécessairement limitée. Je suggère donc le retrait de cet amendement, mais sur le fond, je partage les préoccupations de ses auteurs.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Quéré.

Mme Catherine Quéré. Je le retire avec beaucoup de regrets.

(L’amendement n668 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 1044 et 1267 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1044.

Mme Laurence Abeille. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Viviane Le Dissez, pour soutenir l’amendement n1267 rectifié.

Mme Viviane Le Dissez. Ce texte évoque les paysages, mais nous avons des professionnels qui oeuvrent sur ces paysages, qu’ils soient urbains ou ruraux. Il me semble important de reconnaître la profession de paysagiste concepteur car elle contribue à la qualité des aménagements urbains ainsi que des paysages ruraux et naturels. Cette reconnaissance s’inscrit dans le processus de rénovation de leur formation qui a abouti à la création du diplôme d’État par un décret de novembre 2014.

Cette question soulève des enjeux économiques importants pour la compétitivité des entreprises françaises, car l’intervention de professionnels spécialisés dans la conception et l’aménagement des paysages constitue aujourd’hui une des conditions d’obtention des marchés européens et internationaux. Je souhaite donc vivement que ces professionnels bénéficient de cette reconnaissance, d’autant plus qu’ils n’interviennent pas dans d’autres domaines spécifiques aux professions d’urbaniste ou d’architecte.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. La commission a repoussé l’amendement n1044, et a accepté l’amendement n1267 rectifié. Elle est en effet très satisfaite de résoudre ainsi un problème auquel sont confrontées les personnes titulaires de certains diplômes en matière de conception paysagère.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Sur l’amendement n1267 rectifié, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. Des compléments techniques restent en effet à examiner, notamment avec les écoles du paysage. Suite à la présentation en conseil des ministres du plan d’action en faveur des paysages, j’ai apporté mon soutien au projet de rénovation du diplôme conduit avec les ministères de tutelle des écoles supérieures du paysage, et une chaire nouvelle a été ouverte au sein de l’école du paysage de Versailles. Nous sommes en train d’examiner les choses, et nous aurons le temps, d’ici à la seconde lecture, après consultation des filières professionnelles concernées, de bien finaliser la rédaction. La création et la reconnaissance de ces métiers liés aux paysages, qui représentent beaucoup d’emplois, vont dans le bon sens. Avis de sagesse sur ces deux amendements.

(L’amendement n1044 n’est pas adopté.)

(L’amendement n1267 rectifié est adopté.)

Article 73

Mme la présidente. La parole est à Mme Geneviève Gaillard, rapporteure, pour soutenir l’amendement n908 tendant à la suppression de l’article 73.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination.

(L’amendement n908, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Après l’article 73

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1004.

Mme Laurence Abeille. Madame la ministre, j’ai beaucoup aimé votre évocation des plaines, de la rosée du matin et des troupeaux. Malheureusement, ces visions merveilleuses sont trop souvent polluées par des panneaux publicitaires. Dans la mesure où le titre VI traite de tous les paysages, y compris les plus ordinaires, les paysages du quotidien – bâtis y compris –, je crois nécessaire d’adopter cet amendement qui tend à interdire sans dérogation possible la publicité en dehors des agglomérations, afin de préserver ces paysages ruraux que nous aimons tant.

Mettre un terme à ces forêts de panneaux qui bordent parfois les entrées de villes serait certainement une excellente chose, une initiative appréciée de nos concitoyens du point de vue paysager. Cet amendement n’a pas de lien direct avec la biodiversité, mais il se rattache à la partie de ce projet de loi consacrée au paysage, qui est très importante.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. J’entends les arguments de Mme Abeille, mais je rappelle qu’une réforme concernant ces problématiques a eu lieu en 2011. Sachant le temps nécessaire pour travailler en amont avec les publicitaires et les annonceurs – j’ai pu le constater moi-même, il faut au moins quatre ou cinq ans pour arriver à un résultat convenable –, il serait souhaitable d’attendre quelques années et de dresser le bilan de cette réforme avant d’aller plus loin. La commission a donc repoussé cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. C’est dommage ! D’ici la deuxième lecture, j’aimerais que nous puissions discuter de ce sujet et peut-être trouver une rédaction et un calendrier qui conviennent. Nous devons nous engager résolument dans cette direction.

Je suis allée dans d’autres pays, en particulier en Angleterre, il y a quelques années, et j’ai trouvé formidable l’absence de ces panneaux publicitaires en dehors des agglomérations : le paysage en était tout à fait transformé.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. C’est vrai ! Tout le monde est d’accord !

Mme Laurence Abeille. Aujourd’hui, une partie du paysage français est défigurée par ces publicités. Je regrette que la commission et le Gouvernement aient donné un avis défavorable à mon amendement, que je maintiens évidemment.

(L’amendement n1004 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1005.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement concerne également les panneaux publicitaires. Il vise à interdire les bâches publicitaires géantes qui fleurissent sur les échafaudages lors des travaux, notamment dans les cœurs de ville. Le paysage, c’est aussi le paysage urbain. Or, depuis plusieurs années, nous avons vu fleurir, si je puis dire, ces bâches géantes.

L’article L. 581-8 du code du patrimoine interdit la publicité à l’intérieur des agglomérations à « moins de 100 mètres et dans le champ de visibilité des immeubles classés parmi les monuments historiques ou inscrits à l’inventaire supplémentaire ». Aujourd’hui, quand on voit ces bâches installées place des Vosges, place Vendôme, le long des quais de la Seine ou sur les magnifiques monuments de Paris, par exemple, on s’interroge sur l’application de cet article. L’adoption de mon amendement permettrait de préserver et d’embellir nos paysages urbains.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Ce que vous dénoncez est temporaire : on peut imaginer que les travaux ne durent pas une éternité ! Lorsqu’ils seront terminés, les bâches disparaîtront.

Par ailleurs, il ne faut pas se voiler la face. Cet argument ne vous fera peut-être pas plaisir, madame Abeille, mais les affichages que vous dénoncez apportent aussi quelques petits subsides pour financer les travaux.

Là encore, il ne faut pas trop déséquilibrer la législation adoptée en 2011, qui doit nous permettre d’avancer. Ni vous ni moi n’apprécions la publicité, et nous convenons tous qu’il faut faire attention au paysage. Mais il ne faut pas non plus vouloir avancer au pas de charge. C’est pourquoi la commission a repoussé votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Je m’associe à l’amendement de Laurence Abeille. Ce sujet avait animé les débats lors de l’examen du projet de loi visant à mettre en œuvre le Grenelle de l’environnement, la loi Grenelle II. À l’époque, sur de nombreux bancs de notre assemblée, nous nous étions mobilisés pour interdire cette publicité. Finalement, cette dernière a été acceptée par une partie du groupe majoritaire, et les publicitaires y sont allés à fond la caisse : lorsqu’on leur ferme la porte, ils reviennent par la fenêtre !

Nous devons quand même nous rendre compte que nos paysages urbains sont défigurés par cette publicité. Certes, des dispositions sont mises en place – Mme la rapporteure en parlait tout à l’heure –, mais à une lenteur épouvantable ! Et je vous donne mon billet qu’on trouvera d’autres dispositifs pour que ces pratiques puissent perdurer. La pollution visuelle par la publicité devient insupportable. A-t-on besoin d’appeler l’attention du consommateur par des campagnes aussi massives ? On ne peut déjà plus supporter les messages publicitaires diffusés à la télévision ; en ville, on en voit tout autant. Je soutiens donc l’amendement de Laurence Abeille. Vraiment, ça suffit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

(L’amendement n1005 est adopté.)

Titre

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 1574 et 1006, visant à modifier le titre du projet de loi et pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n1574.

Mme Ségolène Royal, ministre. Au terme de ce débat tout à fait passionnant sur le projet de loi relatif à la biodiversité, il s’agit de montrer dans le titre une partie de la portée de ce texte. Bien sûr, on ne dit pas tout dans un titre, mais l’ampleur du débat et la qualité des travaux, dont je vous remercie, me conduisent à vous proposer d’intituler ce texte : « projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ».

À cette occasion, je veux à nouveau rendre hommage à Hubert Reeves, le parrain de l’Agence française pour la biodiversité, qui a déclaré : « La reconquête de la biodiversité est impérative, elle est aussi possible, mais elle nécessite la mobilisation de tous les acteurs, publics et privés, à toutes les échelles. »

Nous arrivons donc au terme de notre débat. L’Assemblée nationale vient de réaliser un travail tout à fait remarquable. Je tiens à remercier très chaleureusement votre rapporteure, votre commission et son président, et vous tous et toutes présents dans cet hémicycle au cours de ces longues journées et de ces nuits pour mettre en place cette nouvelle harmonie entre l’homme et la nature.

Ce texte va bien sûr continuer son cheminement parlementaire. Il nous permettra de prendre appui sur le vivant, pour faire de la France un pays d’excellence environnementale, mobilisé pour la reconquête et la mise en valeur de sa biodiversité et de ses paysages. Après le débat et l’adoption, à l’Assemblée nationale et au Sénat, du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, nous avons là deux importants piliers qui placent la France à l’avant-garde, avant la conférence de Paris sur le climat. Au-delà des questions touchant à la biodiversité, à la nature et aux paysages, nous avons les solutions pour lutter contre le réchauffement climatique. Ces deux piliers sont donc étroitement liés.

Longtemps, les ONG ont déploré, à juste titre, que la question de la biodiversité restait en retrait par rapport à celle de la transition énergétique. Or on a bien vu, notamment dans les pays qui subissent le réchauffement climatique et cherchent à s’adapter, qu’une partie des solutions se trouvaient dans la biodiversité, dans la nature et dans les paysages.

Vous avez enrichi le texte du Gouvernement grâce à vos débats. Je veux saluer leur très grande qualité et l’esprit de co-construction qui a présidé à nos échanges. Je pense que nous pouvons être collectivement fiers des avancées que ce texte permettra à notre pays d’accomplir, à l’issue de ces travaux, en nous dotant – rapidement, je l’espère – d’une belle législation avant-gardiste, unique au monde, de partage équitable des ressources génétiques issues de la nature. D’autres pays, notamment européens, pourront, devront ou auront envie de s’appuyer sur vos travaux pour mettre leur législation à la hauteur de ce que leurs territoires méritent.

Vous venez d’adopter une mesure permettant l’accélération de la création de nouveaux parcs naturels régionaux.

Vous avez préservé, restauré et mieux valorisé les paysages du quotidien, qui contribuent à la qualité de vie des Français. L’égalité des chances devant les paysages est une question sociale majeure.

Vous avez pris une décision historique en créant l’Agence française pour la biodiversité, tant attendue, qui va décupler l’efficacité de l’action de toutes les forces vives du pays – citoyens, territoires, entreprises, organismes publics et parapublics –, non seulement pour enrayer la dégradation de notre biodiversité et mieux préserver cette dernière, mais aussi pour tirer le meilleur parti de ce qu’elle nous offre. En matière scientifique et économique, les mesures en faveur de la biodiversité vont stimuler l’innovation, la création d’activités et d’emplois non délocalisables dans des filières d’avenir – le génie écologique, le biomimétisme dont nous avons parlé, ainsi que de nombreux autres secteurs industriels déterminants.

Vous avez également reconnu le rôle stratégique des outre-mer dans la défense de notre biodiversité nationale. Nos territoires ultramarins s’engagent sur le chemin d’un modèle de développement qui va les placer aux avant-postes d’une nouvelle relation, partenariale et fructueuse, avec la nature, ses richesses et son potentiel.

Nous déployons aujourd’hui des moyens importants pour faire de la France un pays capable de jouer un rôle moteur, par son exemplarité et son volontarisme, un pays décidé à ouvrir la voie, pour lui mais aussi pour les autres, car nous sommes citoyens du même monde.

Robert Barbault disait que la biodiversité était le passage du concept de « l’homme et la nature » – et souvent, d’ailleurs, « l’homme contre la nature », comme nos débats l’ont montré – à celui de « l’homme dans et avec la nature ». C’est ce pas que nous avons franchi aujourd’hui.

Ce texte nous permettra d’agir plus fort et plus juste, en favorisant des initiatives et en libérant la créativité de tous les acteurs de la biodiversité, qui vont pouvoir tirer dans le même sens.

La biodiversité, la nature et les paysages constituent la trame et la chaîne de cette toile du vivant dont nous sommes partie intégrante. Ce sont des enjeux qui nous rappellent l’urgence d’agir, pour aujourd’hui et surtout pour demain.

Bien évidemment, nous n’attendrons pas la fin du débat parlementaire et le vote de la loi pour engager très rapidement des actions opérationnelles concrètes, sur les territoires, comme nous l’avons déjà fait en matière de paysages avec les dix chantiers laboratoires de restauration paysagère, avec le troisième plan national « Santé – Environnement », avec la rénovation du grand prix national du paysage, avec l’inscription du patrimoine naturel dans les journées annuelles du paysage, et avec, bien sûr, la préfiguration de l’Agence française pour la biodiversité qui est déjà au travail et qui vous rendra compte régulièrement du résultat de ses travaux.

En guise de conclusion, j’ai envie de vous dire l’éblouissante beauté de la nature et de souligner la part de poésie dans l’action publique à laquelle nous avons contribué. J’ai la conviction que votre œuvre fera date dans l’histoire de cette assemblée et dans celle du pays, car elle est tout entière dédiée à relever les défis majeurs pour le temps présent et les temps à venir. Au sein des instances internationales auxquelles nous allons participer dans le cadre de la conférence de Paris pour le climat, je m’efforcerai d’être à la hauteur de vos travaux, dont je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. Merci, madame la ministre. C’était donc la présentation de l’amendement n1574 du Gouvernement. (Sourires.)

La parole est à Mme Laurence Abeille, pour soutenir l’amendement n1006. Peut-être pourriez-vous présenter votre amendement un petit plus brièvement que Mme la ministre… (Sourires.)

Mme Laurence Abeille. Je serai très brève. Je suis heureuse de voir que mon amendement a été repris par le Gouvernement. La ministre nous a apporté une explication très longue et très bonne, avec laquelle je suis d’accord.

Mme la présidente. Dois-je comprendre que vous retirez votre amendement, madame Abeille ?

Mme Laurence Abeille. Oui, madame la présidente.

(L’amendement n1006 est retiré.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n1574 ?

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. La commission n’a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j’y suis évidemment favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Madame la ministre, vous en faites toujours beaucoup trop.

Mme Ségolène Royal, ministre. Parce que je crois à ce que je fais !

M. Bertrand Pancher. Le lyrisme de vos propos ne suffit pas pour transformer le plomb en or. Votre texte reste une très petite loi.

Mme Françoise Dubois. Ce n’est pas sympa ! C’est méchant !

Mme Catherine Quéré. C’est petit !

M. Bertrand Pancher. Elle est intéressante et elle comporte des avancées – je salue d’ailleurs le travail de notre rapporteure –, mais de là à dire qu’il s’agit d’une grande loi sur la biodiversité… Il ne faut quand même pas exagérer ! La grande agence pour la biodiversité qu’on attendait se transforme en une petite agence pour la biodiversité liée aux milieux maritimes et aquatiques, avec de faibles moyens, contrairement aux promesses faites à l’époque par le Président de la République.

Mme Catherine Quéré. C’est injuste ! Votre intervention est politique !

M. Bertrand Pancher. Vous affirmez que c’est une très grande loi, l’une des meilleures à l’échelle internationale. Il ne faut quand même pas exagérer !

Mme Ségolène Royal, ministre. Si !

M. Bertrand Pancher. C’est sans doute la raison pour laquelle les parlementaires de l’opposition engagés dans le domaine de l’environnement, qui pourraient souvent souscrire à ces projets de loi, finissent toujours par dire : « On en fait tellement que nous ne nous associons pas à ce texte ! »

(L’amendement n1574 est adopté.)

Mme la présidente. Nous avons achevé la discussion des articles du projet de loi.

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l’ensemble du projet de loi auront lieu le mardi 24 mars, après les questions au Gouvernement.

4

Nomination du président du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité

Suite de la discussion d’une proposition de loi organique

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi organique relative à la nomination du président du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité (nos 2055 rectifié, 2629, 2107).

Discussion des articles

Mme la présidente. Ce texte a fait l’objet d’une présentation et d’une discussion générale communes avec le projet de loi relatif à la biodiversité.

J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi organique.

Article 1er

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour soutenir l’amendement n1.

Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Madame la ministre, je vous remercie pour la qualité et la hauteur de vue de votre discours remarquable…

M. Bertrand Pancher. N’importe quoi !

Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure. …qui, à l’occasion de la défense d’un amendement sur le titre, a permis de présenter très largement les enjeux sociétaux et humanistes de ce projet de loi relatif à la diversité, qu’on aurait pu considérer comme limité à la seule biologie. L’arrivée des paysages, c’est l’arrivée de l’homme. Il faut noter la force de l’homme dans les paysages – c’est très important, et vous l’avez souligné, madame la ministre. En modifiant le titre de la loi, vous avez tout changé ! Je voulais vous en remercier.

Dans la version initiale du projet de loi relatif à la biodiversité, l’Agence de la biodiversité devait être une agence comme les autres, et son président devait être élu par les membres de son conseil d’administration. Toutefois, la rapporteure du texte, Mme Gaillard, a proposé, suivie en cela par la commission du développement durable, que le président du conseil d’administration de l’agence soit finalement nommé par le Président de la République, après audition des deux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Une telle évolution exigeait le dépôt d’une proposition de loi organique.

Or, dans le tableau annexé à la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, tout est écrit au masculin : président, directeur, gouverneur, etc. J’ai jugé plus pertinent de désigner la fonction qui allait être exercée, ce qui, pour la moitié de l’humanité qui s’appelle les femmes, change tout.

En dépit d’un accueil très positif de la commission du développement durable, dont je remercie les membres, la commission des lois s’est opposé à mes amendements. Mais à titre personnel, j’y tiens et je souhaite donc les présenter à nouveau.

Je propose, par les amendements n1 et n3, de substituer, dans le tableau de l’alinéa 2 et dans le titre, le mot : « présidence » au mot : « président ». Quant à l’amendement n2 rectifié, il tend à compléter l’article 1er par huit alinéas, qui modifient la dernière colonne du tableau annexé à la loi organique du 23 juillet 2010 précitée en remplaçant les mots « président-directeur général » par les mots « présidence-direction générale », « président » par « présidence », et ainsi de suite pour toutes les fonctions concernées.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, pour donner l’avis du Gouvernement.

Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Quéré.

Mme Catherine Quéré. Je partage évidemment complètement le propos de notre collègue Anne-Yvonne Le Dain. Je souhaite en outre faire observer qu’une grande majorité de femmes était mobilisée sur le projet de loi et la proposition de loi. Il suffit de regarder autour de nous pour le vérifier : à l’exception de M. Pancher et de notre cher président Jean-Paul Chanteguet, il n’y a que des femmes.

Mme Laurence Abeille et Mme Danielle Auroi. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Dubois.

Mme Françoise Dubois. Puisqu’il est question, dans l’exposé sommaire de l’amendement, de directrice d’école maternelle, je me sens visée. Et j’estime que ma fonction a été aussi honorable et importante que celle d’un directeur de grande école. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

(L’amendement n1 est adopté.)

Mme la présidente. Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure, a déjà défendu l’amendement n2 rectifié.

(L’amendement n2 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 1er, amendé, est adopté.)

Article 2

(L’article 2 est adopté.)

Titre

Mme la présidente. Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure, a défendu l’amendement n3.

(L’amendement n3, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure. Merci !

Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi organique.

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l’ensemble de la proposition de loi organique auront lieu le mardi 24 mars 2015, après les questions au Gouvernement.

5

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, mardi 24 mars 2015, à neuf heures trente :

Questions orales sans débat.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinq.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly