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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2014-2015

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 06 mai 2015

SOMMAIRE

Présidence de M. Marc Le Fur

1. Questions sur la politique des transports

M. Bertrand Pancher

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche

M. Bertrand Pancher

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Olivier Falorni

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche

M. Olivier Falorni

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche

Mme Eva Sas

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche

Mme Véronique Massonneau

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Patrice Carvalho

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Gaby Charroux

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

Mme Catherine Beaubatie

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Jean-Yves Caullet

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Philippe Duron

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

Mme Valérie Lacroute

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Gilles Lurton

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Frédéric Reiss

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Frédéric Reiss

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Rémi Pauvros

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Jean-Louis Bricout

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Bertrand Pancher

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

M. Bertrand Pancher

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Le Fur

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Questions sur la politique des transports

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions sur la politique des transports. Je vous rappelle que la Conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question et de chaque réponse.

Nous commençons par deux questions du groupe UDI.

La parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, ma première question concerne l’augmentation des péages autoroutiers à la suite des accords conclus avec les sociétés d’autoroutes, que l’on pourrait résumer ainsi : « Les automobilistes, dindons de la farce ? »

Après l’abandon de la taxe poids lourds, Ségolène Royal s’est livrée à une attaque en règle contre les sociétés autoroutières, expliquant un jour qu’il suffisait de les taxer pour renflouer les caisses exsangues de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France – l’AFITF – et, un autre jour, qu’il fallait rendre les autoroutes gratuites, notamment le week-end, sans vérifier que toutes les dispositions de ce type étaient contraires aux contrats passés entre l’État et ces mêmes sociétés lors de la privatisation des autoroutes.

Face à la menace d’un contentieux, d’une part, et à l’absence de moyens, d’autre part, le Gouvernement a trouvé un accord avec les sociétés d’autoroutes il y a quelques semaines. Celui-ci doit se traduire par un décret un Conseil d’État en septembre prochain, entérinant un plan de relance fondé sur l’augmentation des durées de concession de deux à quatre ans, mais aussi sur une augmentation des péages autoroutiers ces prochaines années.

Il faudra en effet compenser à l’euro près le gel des tarifs des péages de cette année et l’augmentation de la redevance payée par les sociétés d’autoroutes. Ces augmentations s’ajoutant aux traditionnelles indexations à l’inflation et aux travaux réalisés, les automobilistes sont bien les dindons de la farce !

Ainsi, François Poupard, votre directeur général des infrastructures, nous a indiqué hier soir, lors de notre dernière rencontre au ministère de l’écologie, que les augmentations supplémentaires de tarifs interviendraient en deux temps : de 2016 à 2019, augmentation de 0,7 à 0,8 % par an pendant trois ans afin de tenir compte de la hausse de la redevance domaniale ; puis de 2019 à 2023, augmentation d’environ 0,4 % par an pour tenir compte des blocages des tarifs.

Ma question est simple, monsieur le secrétaire d’État : confirmez-vous ces chiffres ? Cela reviendrait à faire payer aux générations futures les dettes d’aujourd’hui, ce qui me semble une conception un peu particulière du développement durable !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Vous venez de retracer l’historique d’un dossier que vous connaissez parfaitement, ayant participé au groupe de travail parlementaire consacré à ces questions, mais vous auriez pu remonter plus loin et rappeler la privatisation de ces autoroutes et surtout le prix auquel elles ont été vendues !

M. Rémi Pauvros. Eh oui ! Scandaleux !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. M. Bussereau lui-même a reconnu il y a quelques semaines qu’on avait probablement vendu les autoroutes à un prix qui aurait mérité d’être majoré de quelques milliards. C’est peut-être l’une des raisons des difficultés que nous connaissons aujourd’hui : quitte à faire de l’histoire, autant remettre les choses à leur juste place !

Dès lors, tous les débats sont légitimes, et vous y avez d’ailleurs contribué. Je pense en particulier aux questions qui ont été posées par la Commission ou aux observations de l’Autorité de la concurrence et au débat auquel elles ont donné lieu. Ce débat de vérité a permis aux Français de savoir ce qui s’était exactement passé et pourquoi on s’est retrouvé dans cette situation,…

M. Rémi Pauvros. Absolument !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. …tout en faisant le constat que notre réseau autoroutier est de qualité.

L’accord que vous évoquez est certes un compromis, mais il contient des apports non négligeables dans le contexte actuel : 3,2 milliards d’investissements, ce qui est essentiel pour la France et pour les entreprises ; 200 millions versés dans un fonds spécial de la Caisse des dépôts ; 100 millions versés à l’AFITF, ainsi que des engagements dans le domaine du développement durable dont nous aurons à reparler, notamment en matière de covoiturage.

Sur la question du gel des tarifs annoncé pour cette année, je vous répondrai très précisément. L’ordre de grandeur de la compensation sera, pour la hausse de la redevance domaniale, de 0,2 à 0,8 % entre 2016 et 2018 et, pour le gel des tarifs cette année, de 0,1 à 0,4 % entre 2019 et 2023.

M. le président. La parole est à nouveau à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour cette première réponse.

Ma deuxième question concerne le financement des infrastructures de transport. Disposeriez-vous d’un manuel de magie, monsieur le secrétaire d’État ? Après le schéma national des infrastructures de transport, vous avez installé la commission « Mobilité 21 », animée par notre collègue Philippe Duron,…

M. Rémi Pauvros. Notre excellent collègue Duron !

M. Bertrand Pancher. …qui a fait un excellent travail afin d’établir des priorités que vous vous engagiez à mettre en œuvre. Cette commission, à laquelle je participais, a dressé la liste des infrastructures qu’il était indispensable de réaliser au cours de la période 2014-2030 et que devait financer le produit de l’écotaxe poids lourds.

Alors que beaucoup d’autres projets, pourtant reconnus nécessaires par le schéma des infrastructures de transport, ont été repoussés à après 2030 faute d’une mobilisation de la totalité de la taxe poids lourds au profit de l’AFITF, et alors que la commission « Mobilité 21 », en partie composée par de hauts fonctionnaires, notamment de votre ministère, a considéré qu’elle n’avait pas les moyens de traiter deux chantiers hors normes pour lesquels il convenait de trouver des financements spécifiques – la liaison ferroviaire Lyon-Turin et le canal Seine-Nord –, les décisions prises par votre gouvernement rendent impossible l’engagement de la plupart des projets décidés.

L’abandon de l’écotaxe prive l’agence de financement d’au moins 400 millions par an, alors que cette somme n’est pas compensée en totalité par l’augmentation, d’ailleurs non pérenne, de la hausse de la fiscalité sur le gasoil de quatre centimes pour les camions et de deux centimes pour les voitures. Cette même agence est maintenant taxée de près d’un milliard d’euros pour financer l’indemnisation d’Écomouv’, pourtant une dette de l’État. Alors qu’elle ne peut plus financer les projets déjà prévus, voilà que vous lancez des chantiers gigantesques, non prévus par la commission Duron : le canal Seine-Nord, dont le coût est évalué à cinq milliards, et la liaison Lyon-Turin, dont la première tranche est évaluée à huit milliards d’euros.

Vous y ajoutez des projets considérés comme non prioritaires, tels que la ligne à grande vitesse Poitiers-Limoges et, sans vous soucier des moyens, vous relancez les enquêtes publiques ou les débats publics sur d’autres projets, tel celui qui concerne l’A 31 dans ma région.

Quels montants comptez- vous consacrer à l’ensemble de ces projets ? Sur la base de quelles ressources fiscales et selon quel calendrier ?

M. le président. Sans commentaire aucun, je vous donne la parole, monsieur M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Merci, monsieur le président, mais je vous aurais volontiers laissé une partie de mon temps de parole pour répondre à la première partie de la question !

Votre question est légitime, monsieur le député. Les engagements de l’État sont précis : nous assurons à l’AFITF un financement d’1,9 milliard sur les trois prochaines années. Ce montant provient de ressources que vous connaissez puisqu’elles existent déjà : la redevance domaniale et une partie des ressources propres de l’État.

Il est vrai que l’abandon de l’écotaxe a perturbé, pour cette année du moins, le financement de l’AFITF. Nous avons mis en place une recette de substitution aux péages de transit pour les poids lourds, à hauteur de 350 millions, et nous avons entamé un travail de réflexion avec les transporteurs pour trouver les moyens de pérenniser cette recette. Deux solutions sont aujourd’hui discutées : une vignette, solution défendue par une association, ou la pérennisation. À la fin du mois de juin, quand ce travail de concertation sera achevé, j’annoncerai le choix du Gouvernement. En tout état de cause, il pérennisera une recette qui viendra se substituer aux péages de transit.

Concernant les grands projets, leur réalisation dépendra pour l’essentiel de la réponse que l’Europe nous donnera – avec 40 % de subventions, on ne s’engage pas de manière irresponsable !

Pour le financement complémentaire, la réponse n’est probablement pas la même pour le canal Seine-Nord – cela représente environ un milliard, ce qui n’est pas complètement incompatible avec le budget de l’AFITF – et pour le Lyon-Turin, dont le financement peut effectivement poser problème.

Nous avons donc confié à deux parlementaires, l’un de la majorité et l’autre de l’opposition, MM. Destot et Bouvard, le soin de réfléchir aux conditions dans lesquelles la France pourrait, dans le cadre de la mise en œuvre de la directive « Eurovignette III », instaurer un surpéage afin de financer certaines infrastructures.

Telle est ma réponse : nous nous engageons sur le financement et nous réfléchissons sur l’eurovignette. Quoi qu’il en soit, les financements seront au rendez-vous.

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe RRDP. La parole est à M. Olivier Falorni.

M. Olivier Falorni. Monsieur le secrétaire d’État, ma première question est d’une importance primordiale, non seulement pour La Rochelle et ma circonscription mais plus largement pour un bassin de vie de plus 600 000 habitants, concernés par ce dossier.

Alors que la ligne à grande vitesse Sud-Europe-Atlantique, dite LGV SEA, doit voir circuler son premier TGV début juillet 2017, un certain nombre de collectivités ont décidé de suspendre leur participation au financement de la construction de cette ligne. C’est une action symbolique forte, mais qui se justifie pleinement.

En effet, la contribution de la communauté d’agglomération de La Rochelle au financement de la LGV SEA a été contractualisée en tenant compte d’un gain de temps de seize minutes sur le parcours La Rochelle-Paris et ce, grâce à la construction du raccordement de Fontaine-le-Comte, qui devait éviter au train de passer par Poitiers.

Alors que cette infrastructure a été réalisée, conformément au programme initial, nous avons appris de la bouche même des représentants de SNCF Mobilités que la branche Niort-Surgères-La Rochelle ne serait pas desservie par les TGV dits « bolides », provenant directement de Paris, mais que ces derniers passeraient par Poitiers.

Il n’est pas acceptable que les 600 000 habitants des agglomérations de La Rochelle, de Rochefort et de Niort ne puissent pas bénéficier d’une réduction de leur temps de trajet à l’occasion de la mise en service de la LGV SEA. Nous sommes victimes d’une vision parisianiste qui considère La Rochelle comme une station balnéaire. Que la SNCF nous donne des trains et nous les remplirons ! Nous les remplirons de chefs d’entreprise, de cadres, de congressistes qui veulent pouvoir faire l’aller-retour Paris-La Rochelle dans la journée. En 2017, Nantes sera à moins de deux heures de Paris, Bordeaux à deux heures : il est impératif que La Rochelle soit à moins de deux heures trente de la capitale.

Jean Auroux, médiateur mandaté par la SNCF, que j’ai rencontré ce matin encore avec les autres acteurs politiques locaux, s’est dit prêt à défendre nos intérêts auprès des dirigeants de la SNCF.

Je souhaite, monsieur le secrétaire d’État, que vous puissiez intervenir auprès de la SNCF pour que la mise en service de la LVG SEA soit enfin conforme aux engagements pris.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Rappelons tout d’abord le contexte. Le projet d’une liaison à grande vitesse mettant Bordeaux à deux heures et dix minutes de Paris était un bon projet mais la formule de financement qui a été choisie est singulière : un partenariat public-privé négocié avec l’établissement public qui s’appelait Réseau ferré de France RFF avant l’adoption de la loi ferroviaire, à quoi s’ajoutent des engagements des collectivités locales, amenées à participer au financement en échange d’engagements de desserte quasiment contractuels.

Tout cela aboutit aujourd’hui à un système dont je voudrais que chacun reconnaisse le poids, si ce n’est la singularité. L’établissement public SNCF Mobilités, qui n’était pas à l’origine partie à la négociation, soutient que plus il fait circuler de trains plus il perd de l’argent dans ce grand projet. Nous devons composer avec ce contexte en essayant de respecter les engagements des uns et des autres. C’est ce que je fais. J’ai demandé à Frédéric Saint-Geours de négocier au nom de l’État pour parvenir à une solution de compromis. De son côté, la SNCF a chargé Jean Auroux de faire le même travail pour son compte.

Je dois tenir compte de l’ensemble de ces paramètres, ainsi que des attentes des élus locaux, dont vous-même, monsieur le député. Nous allons devoir trouver une solution d’ici fin juin ou début juillet puisque tout devra être en place le 1er juillet 2017. Nous serons bien obligés de trouver un compromis : je ne veux pas d’une application sans réserve des clauses contractuelles. Les engagements de chacun méritent d’être respectés, et ceux de La Rochelle le seront.

M. le président. La parole est à nouveau à M. Olivier Falorni.

M. Olivier Falorni. Cinq ans après la réforme portuaire de 2008, le Gouvernement a lancé la stratégie nationale portuaire en mai 2013. L’État a ainsi souhaité réaffirmer son ambition de donner à la France une place de premier rang dans le commerce international. Situés à l’interface de routes maritimes et de réseaux de transport multimodaux, les ports français sont au cœur de la chaîne logistique d’approvisionnement des territoires.

À ce titre, je ne vous surprendrai pas en évoquant le grand port maritime de La Rochelle qui connaît un remarquable développement – le Premier ministre viendra d’ailleurs le visiter le 22 juin prochain. Ce développement reste cependant entravé par le fait qu’il est le seul grand port maritime à ne pas être relié au réseau autoroutier. C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, nous avons absolument besoin de l’autoroute A 831.

Je veux aussi saluer l’initiative portée conjointement par les grands ports maritimes de La Rochelle et de Nantes Saint-Nazaire à travers l’opérateur de fret ferroviaire portuaire « Atlantique ». Il s’agit là d’un véritable succès du report modal, récompensé du quinzième prix de l’innovation 2015 du meilleur service et transport logistique.

La stratégie a donné un cap clair au secteur portuaire. Nous devons à présent transformer l’essai en assurant à cette stratégie la mise en œuvre la plus concrète de façon à permettre aux ports de jouer leur rôle d’acteurs économiques accueillant des activités essentielles à la croissance dans le secteur logistique ou contribuant au développement industriel, notamment dans le domaine énergétique.

Monsieur le secrétaire d’État, comment les ports mettent-ils en œuvre aujourd’hui cette stratégie ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Depuis 2012, la continuité républicaine est exemplaire en ce domaine puisque nous mettons en œuvre la réforme portuaire de 2008, qui allait dans le bon sens en créant les grands ports maritimes. Leurs premières années d’existence ont donné des résultats encourageants. Le trafic de conteneurs connaît une croissance annuelle moyenne de 5,3 points depuis 2012. Les instances de gouvernance ont été renouvelées et des projets stratégiques ont été adoptés, en lien étroit avec les collectivités et l’ensemble de la place portuaire.

En préparation depuis un an, ces projets précisent notamment le positionnement stratégique de chaque port. Le calendrier de mise en œuvre des projets stratégiques est parfaitement aligné sur le calendrier européen de financement du RTE-T, le réseau de transport transeuropéen. La nouvelle génération des contrats de plan État-région pour la période 2015-2020 financeront les principales opérations d’investissement prévues dans les projets stratégiques. Ces projets posent aujourd’hui les bases d’un modèle économique portuaire solide. Ils ont pour ambition de contribuer au développement industriel et économique de la France et de faire des ports des acteurs de la transition énergétique pour renforcer l’indépendance énergétique de la France en permettant un meilleur équilibre entre ses différentes sources d’approvisionnement.

Ce que vous avez rappelé du projet du port auquel vous êtes très attentif s’inscrit dans cette démarche. Grâce à la loi de 2008 et à ce que le Gouvernement met en œuvre depuis 2012, nous sommes sur la bonne voie.

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe écologiste.

La parole est à Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault saluait en 2013 le travail et la justesse des recommandations de la commission « Mobilité 21 », mais force est de constater que les décisions récentes du Gouvernement vont à l’encontre de ses préconisations.

La première de ces recommandations était d’augmenter l’investissement dans les transports en France et le Premier ministre avait adopté le scénario d’investissement le plus ambitieux proposé par la commission, ce qui supposait de porter le budget de l’AFITF à 2,5 milliards d’euros par an.

M. Bertrand Pancher. Eh oui !

Mme Eva Sas. Or, non seulement le budget de l’AFITF n’est que de 2,3 milliards en 2015, mais surtout 529 millions d’euros sont prélevés sur ce budget pour financer l’abandon de la taxe poids lourds. On demeure loin des ambitions alors affichées.

La deuxième préconisation du rapport « Mobilité 21 » était de donner priorité aux transports ferroviaires et fluviaux sur les projets routiers, auxquels elle recommandait de ne consacrer que 13 % des financements. Or que constate-ton ? Le Gouvernement abandonne l’autoroute ferroviaire entre le Pas-de-Calais et les Landes, dont le projet et le tracé étaient sans doute à revoir mais en aucun cas à annuler, puisqu’il aurait permis de transporter 85 000 camions par an sur des trains de fret.

Surtout, le plan de relance autoroutier est mis en œuvre, avec 3,2 milliards d’euros d’investissements au bénéfice des infrastructures routières, plan de relance d’autant moins acceptable que la contribution des sociétés d’autoroutes à l’effort public n’a pas réellement augmenté malgré leurs bénéfices anormalement élevés. Enfin, ce même plan prolonge la durée des concessions alors même que l’intérêt général commanderait de faire revenir dans le giron de l’État ce patrimoine public et les recettes qu’il génère.

Faut-il citer encore la signature de la déclaration d’utilité publique de la LGV Poitiers-Limoges le 10 janvier 2015, alors que la commission avait clairement exprimé qu’il fallait donner priorité à la rénovation des réseaux existants plutôt que de lancer de nouvelles LGV ?

Ma question sera simple. Comptez-vous réellement mettre en œuvre une politique des transports cohérente, sur la base des préconisations de la commission Mobilité 21 que je résumerais ainsi : augmentation de l’investissement dans les transports en France, priorité à la rénovation des réseaux existants et aux modes alternatifs à la voiture individuelle ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche. En ce qui concerne l’autoroute ferroviaire, je partage votre appréciation. Ce n’est pas son principe qui est remis en cause mais celui qui avait été choisi – je donnerai des précisions ultérieurement.

S’agissant de la commission « Mobilité 21 », nous sommes en train de mettre en œuvre ses recommandations, notamment en ce qui concerne les priorités : les projets de lignes de TGV qu’elle avait jugé prioritaires le restent, ceux dont elle avait considéré qu’ils pouvaient être reportés l’ont été.

J’ai annoncé à mon arrivée qu’il convenait d’accorder la priorité aux transports du quotidien. Certes les mots ne suffisent pas et seuls les actes comptent, mais il n’est pas évident d’agir en la matière. La contrainte budgétaire nous conduit ainsi à renoncer à un certain nombre de projets d’investissements, par exemple dans la construction de gares, si nous voulons financer la maintenance du réseau ferroviaire.

La question du transport au quotidien ne se résume pas à la mobilité : c’est d’abord une question sociale. C’est à travers ce prisme qu’il faut envisager tous les grands projets de développement que nous mettons en œuvre, tels que le Grand Paris. Ces projets considérables répondent à vos attentes en termes d’investissement dans le transport au quotidien. Les trains d’équilibre du territoire, sujet que nous aborderons au cours de ce débat, posent des problèmes de même nature.

Les résultats du dernier appel à projet « transports collectifs et mobilité durable », que nous avons rendu publics, sont de nature à atténuer la sévérité de votre critique. Ces projets, qui représentent 5,2 milliards de travaux et bénéficieront de 450 millions de subventions, s’inscrivent complètement dans la démarche de transport modal et du transport de demain.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau.

Mme Véronique Massonneau. Monsieur le secrétaire d’État, la desserte de la gare de Châtellerault par le TGV est essentielle pour toute la circonscription du Nord Vienne où je suis élue. Elle irrigue le bassin industriel du Châtelleraudais, les nombreuses entreprises implantées en milieu rural, l’établissement thermal et l’unité de production de cosmétiques de La Roche-Posay ou encore le futur Center Parcs dans le Loudunais. Le tissu économique local dépend fortement de cette liaison directe avec Paris ainsi que Bordeaux, désormais métropole de notre grande région. Les acteurs de l’économie locale, et plus largement l’ensemble des citoyens du territoire sont concernés et doivent être parties prenantes des réflexions actuellement menées sur ce projet et ses conséquences.

Comme l’a récemment souligné la Cour des comptes, la grande vitesse ferroviaire est un modèle qui a été porté au-delà de sa pertinence. En effet, ces grands projets aspirent beaucoup d’argent public, souvent, malheureusement, au détriment des infrastructures existantes et de leur entretien. La dégradation des dessertes serait une triple peine pour les habitants et les entreprises des territoires traversés, qui ont été parmi les premiers contributeurs au projet.

Alors que de nombreux citoyens expriment dans les urnes un sentiment d’abandon, particulièrement sensible en milieu rural, n’est-il pas temps de les écouter, de comprendre leurs préoccupations et leurs attentes ?

Monsieur le secrétaire d’État, la disparition de la desserte de Châtellerault par le TGV est l’une des inquiétudes des habitants du Nord Vienne. Pourriez-vous nous garantir que la desserte du Nord Vienne par le TGV ne jouera pas le rôle de variable d’ajustement au profit des grandes villes desservies par le nouveau projet de LGV qui contournera Châtellerault ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Madame la députée, je conçois que vous vous interrogiez quant à la desserte de Châtellerault, même si je vous ai en partie répondu en répondant à la question concernant La Rochelle. Le contexte particulier est là encore le même – plus il y a de trains en circulation, plus on perd d’argent. C’est une situation dont nous avons hérité – je n’y reviens pas.

Vous avez également fait référence au rapport de la Cour des comptes. Il faut mettre fin à une ambiguïté probablement inscrite dans la conception de la LGV ou dans nos propres aspirations : la grande vitesse ferroviaire ne peut pas assumer les missions des trains d’équilibre du territoire.

S’agissant de votre commune, je ne pourrai pas vous apporter ici de réponse puisque la procédure est en cours. J’essaie de prendre en compte l’ensemble des attentes, y compris les vôtres, qui me paraissent légitimes. Jean Auroux, que vous avez peut-être rencontré et que je salue, fait le même travail pour le compte de la SNCF– et il le fait bien. Il reviendra ensuite à la SNCF de formuler des propositions. M. Saint-Geours sera certes un acteur déterminant dans cette négociation, mais il va de soi que je prendrai mes responsabilités le moment venu.

Comme je viens de l’indiquer à M. Falorni, nul n’ignore le poids des contraintes qui pèsent aujourd’hui sur ces décisions ; malgré cela, je n’ignorerai ni la situation et l’engagement des collectivités, ni les attentes de nos concitoyens.

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho. Le devenir des trains d’équilibre du territoire, les TET –   plus connus sous le nom de trains « Intercités » – suscite les inquiétudes des usagers, des cheminots et des élus.

La convention entre l’État et la SNCF relative à leur exploitation arrivera à échéance le 31 décembre 2015, après avoir été prolongée de deux ans. La commission sur l’avenir des trains d’équilibre du territoire, présidée par notre collègue Philippe Duron, doit rendre ses conclusions très prochainement et clarifier l’articulation entre les TET et les trains express régionaux, les TER.

Néanmoins, nul n’ignore plus désormais que la SNCF projette de tailler dans ce service. Rappelons que chaque jour 325 TET desservent 330 villes. La perspective de supprimer entre 160 et 180 rames a été évoquée avec, à la clef, la fermeture de six lignes et la réduction d’un grand nombre d’autres – dans ma région, le Paris Nord-Amiens-Boulogne-sur-Mer et le Paris Nord-Saint-Quentin-Maubeuge-Cambrai.

M. Rémi Pauvros. Surtout Maubeuge !

M. Patrice Carvalho. En invoquant l’insuffisante rentabilité de ces lignes, la SNCF à l’évidence perd de vue toute notion de service public. Surtout, elle omet de préciser que ces lignes ont été délibérément négligées. les voies et le matériel roulant n’ont pas été entretenus ni renouvelés…

M. Rémi Pauvros. Absolument !

M. Patrice Carvalho. …tandis qu’elle a réduit le personnel ferroviaire, supprimé des guichets ou limité leur ouverture, tout en augmentant les tarifs de 26 % entre 2002 et 2009 et de 16 % depuis 2010, tout cela pour un service qui s’est dégradé. Le développement des autocars prévu par la future loi Macron ne fait qu’assombrir le tableau.

J’attends naturellement de prendre connaissance des préconisations de la commission Duron et de découvrir les suites que l’État leur donnera. Je crains néanmoins que nous n’aboutissions à un désengagement de l’État et un report de ses missions sur les TER, c’est-à-dire sur les régions, auxquelles on ne cesse de transférer des charges qu’elles peinent de plus en plus à couvrir.

Sur ce sujet, je souhaite donc connaître les intentions du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. La notion même de « train d’équilibre du territoire » recouvre des réalités pour le moins disparates, puisqu’elle englobe aussi bien les trains de nuit que les trains de longue distance, par exemple. Au fond, elle résulte davantage d’une compilation que d’une définition.

C’est pour cette raison, mais aussi en raison du déficit de ces lignes – de l’ordre de 300 millions d’euros par an – et de l’insatisfaction profonde des élus locaux et des usagers que j’ai demandé à une commission, dont j’ai confié la présidence à Philippe Duron, le soin de réfléchir à l’avenir de ce réseau. Celle-ci a accompli en toute indépendance un travail considérable et s’apprête à me remettre son rapport. Je m’étais engagé – et je m’y tiendrai – à ce que ce rapport soit d’abord soumis, si le Parlement le souhaite, à l’examen de ses commissions compétentes ; ce n’est qu’ensuite que le Gouvernement fera connaître sa décision.

Si je rappelle cette procédure, c’est pour vous dire avec la plus grande clarté que je ne valide à ce stade aucun document, quelle qu’en soit l’origine : il ne faut y voir aucun engagement de l’État.

M. Rémi Pauvros. Très bien !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Vous avez rappelé les contraintes, monsieur le député ; s’agissant des possibilités, je serai plus nuancé que vous. Compte tenu du caractère très disparate du réseau, certaines liaisons pourront, une fois les nouvelles grandes régions créées, être assurées par les TER, mais il sera difficile de les maintenir toutes. Si le déficit global atteint 300 millions d’euros par an, la situation varie grandement d’une ligne à l’autre, certaines n’étant absolument pas déficitaires quand d’autres le sont sévèrement. D’autre part, certaines rendent d’authentiques services en matière d’aménagement du territoire, notamment en raison de leur situation géographique.

L’objectif existe : il faudra conclure un nouveau conventionnement. L’État étant en l’espèce autorité organisatrice, j’avais pris la décision de prolonger l’ancienne convention d’un an. Il nous faut désormais travailler ensemble. En dépit de l’impératif financier, l’État et le Gouvernement ont pour principal objectif que ces trains conservent demain leur caractère de trains d’équilibre du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Gaby Charroux.

M. Gaby Charroux. Le tribunal de commerce de Marseille a ordonné le 22 avril 2015 la prolongation du redressement judiciaire de la SNCM, jugeant insuffisantes les trois offres présentées. Trois jours plus tard, monsieur le secrétaire d’État, vous exprimiez votre refus de la liquidation judiciaire de la SNCM et je vous en remercie.

La décision du tribunal de commerce nous offre une nouvelle occasion de croire dans un avenir qui préserverait la continuité de la compagnie. En effet, la continuité de la SNCM est la seule solution susceptible de garantir un projet industriel, le maintien du maximum d’emplois et la préservation de l’intérêt public grâce à la délégation de service public dont elle doit bénéficier au titre de la continuité territoriale. Toute autre solution aboutira à la liquidation de la compagnie et au renforcement des sociétés à bas coût – lesquelles semblent avoir trouvé un soutien dans un amendement déposé lors de l’examen de la loi dite Macron.

Aujourd’hui, j’apprends par voie de presse que la Commission européenne serait prête à abandonner sa créance de 440 millions d’euros à condition que la SNCM soit liquidée ! Si cette information est avérée, il s’agirait d’une forme de chantage. En effet, cette créance est issue d’une condamnation : soit la Commission européenne peut y renoncer, comme nous le disons depuis des mois, soit elle ne le peut pas. En tout état de cause, assortir l’abandon de cette créance d’un chantage libéral est inacceptable, pour la compagnie mais surtout pour la France !

Monsieur le secrétaire d’État, comment comptez-vous mettre fin à cet immense gâchis qui dure depuis plus de dix ans, battre en brèche cette fausse idée selon laquelle la compagnie serait en déficit chronique alors qu’elle subit sur notre territoire une concurrence déloyale, et utiliser le répit, peut-être bref, laissé par le tribunal de commerce pour écrire un nouvel avenir pour la SNCM ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le député, la SNCM est en situation de redressement judiciaire. J’ai déjà eu l’occasion de vous répondre sur ce point : les objectifs du Gouvernement sont clairs et précis. Le Gouvernement souhaite la reprise de la SNCM, le sauvetage d’un maximum d’emplois et la mise en œuvre d’un plan social exemplaire pour les employés qui ne pourraient malheureusement pas conserver leur poste. Tel est mon objectif depuis des mois et je n’en ai jamais dévié.

Pour y parvenir, il faut passer par la solution juridique dite de discontinuité, de sorte que le ou les repreneurs de cette activité ne soient pas contraints de payer la créance de 440 millions, laquelle correspond, selon les décisions rendues par la Commission, au remboursement d’aides publiques indues. Or, son maintien entraînerait nécessairement la liquidation de la compagnie, que nous voulons éviter.

Il est vrai que j’ai dans un premier temps négocié sur la base d’une proposition haute pour tenter de contourner cette obligation. Mais la négociation a été largement perturbée par la décision du tribunal administratif de Bastia d’annuler la délégation de service public. Deux repreneurs ont ensuite formulé des propositions qui tenaient compte des effets de cette décision. Ce nouveau cadre juridique explique les reports d’audience.

Je ne valide aucun des propos tenus aujourd’hui dans la presse. La décision revient désormais au tribunal de commerce, qui devrait la rendre dans les prochains jours. Je vous l’assure : depuis des mois, mon équipe et moi-même avons pour seul but de trouver un repreneur et d’obtenir une décision « de confort » qui éviterait d’avoir à rembourser les aides de la Commission et de mettre en œuvre un plan social exemplaire.

S’agissant du plan social, précisément, j’ajoute que les actionnaires actuels ont d’ores et déjà avancé la somme de 85 millions d’euros, ce qui n’est pas négligeable. Nous pouvons aboutir, mais la décision appartient désormais au tribunal de commerce qui, en toute indépendance, devrait sans doute se prononcer dans les prochains jours.

M. Jean-Louis Bricout. Très bien !

M. le président. Nous en venons à des questions du groupe socialiste, républicain et citoyen. La parole est à Mme Catherine Beaubatie.

Mme Catherine Beaubatie. Ma question porte sur l’aménagement des infrastructures routières et plus particulièrement du tronçon Limoges-Poitiers de la route nationale 147.

Depuis plus de quarante ans, la RN 147 souffre d’un grave sous-investissement qui a de lourdes conséquences en termes de congestion routière, d’enclavement du territoire et, surtout, d’insécurité – pour preuve le nombre élevé d’accidents, dont un mortel, qui se sont produits sur ce tronçon au premier trimestre 2015.

Les concertations, les études d’impact et les tracés divers et variés se sont multipliés au fil des ans, mais aucun gouvernement n’a vraiment pris ses responsabilités. Seul le gouvernement de Lionel Jospin s’était fermement engagé à aménager cet axe structurant. Malheureusement les gouvernements de droite qui lui ont succédé ont sacrifié la desserte de notre région sur l’autel des priorités budgétaires et du Grenelle de l’environnement.

M. Jean-Yves Caullet. C’est vrai !

Mme Catherine Beaubatie. Aujourd’hui les lignes bougent, et je vous en félicite. À preuve, l’État s’engage enfin, dans le cadre du contrat de plan État-région 2015-2020 pour le Limousin, à financer l’aménagement de la partie haut-viennoise de la RN 147. Le montant des crédits budgétaires est désormais connu : 46,5 millions d’euros de la part de l’État et 10,5 millions de celle de la région. Le conseil départemental de la Haute-Vienne est prêt lui aussi à participer à cet investissement en sus de ses compétences obligatoires.

La mise à deux fois deux voies de cet axe routier long de cent-vingt kilomètres est essentielle à la redynamisation démographique des communes rurales et suburbaines d’une grande partie de la Haute-Vienne. Elle favorisera l’établissement de connexions rapides et sécurisées au sein de la grande région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, ainsi que la liaison entre la façade atlantique et les autoroutes de l’Est de la France.

Les intentions sont là ; nous comptons désormais sur la mobilisation des services de l’État aux côtés des collectivités territoriales pour démarrer ce chantier le plus rapidement possible. Ce sera un signal positif pour nos entreprises de travaux publics et la création d’emplois dans notre département.

Monsieur le secrétaire d’État, quelles garanties pouvez-vous donner aujourd’hui aux élus, aux entreprises et surtout aux Haut-viennois, qui attendent ce projet depuis si longtemps ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Les crédits routiers prévus dans les CPER représentent trois milliards d’euros d’investissements de l’État. Les projets retenus l’ont été au terme d’un long processus impliquant représentants de l’État dans les territoires et collectivités. La priorité de l’État était de retenir les projets satisfaisant les besoins les plus importants en termes de trafic constaté, d’accidentologie et de congestion.

Vous avez, madame la députée, rappelé que la RN 147, comme tant d’autres axes en France, a connu des années de sous-investissement. C’est pourquoi les CPER 2015-2020 signés avec les régions Limousin et Poitou-Charentes prévoient de mobiliser pas moins de 150 millions d’euros pour cet axe. En Limousin, 57 millions d’euros, dont 46,5 millions proviennent de l’État, seront alloués à l’aménagement de la RN 147 au nord de Limoges. Cette enveloppe permettra, d’ici la fin de la période de contractualisation, la mise à deux fois deux voies du tronçon au nord de Limoges, et de réaliser un créneau de dépassement au-delà.

Les CPER sont d’ores et déjà mis en œuvre dans le cadre de la programmation routière. Ainsi, les crédits nécessaires à la section Poitiers-Limoges sont déjà mis à disposition, et les services de l’État sont à l’œuvre en région Limousin, comme dans les autres régions de France.

En ce qui concerne l’enquête publique relative à l’aménagement du tronçon situé au nord de Limoges, elle sera lancée d’ici la fin 2017, car il reste encore du travail à accomplir sur cet axe, qu’il s’agisse d’études à réaliser ou de procédures à lancer. Il va de soi que je veillerai – tout comme vous, je le sais – à ce que les engagements pris par l’État et les collectivités se traduisent par des actes forts et concrets. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Catherine Beaubatie. Je vous remercie.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Caullet.

M. Jean-Yves Caullet. La question des infrastructures ou celle de la modalité des transports sont essentielles car elles sont au cœur des enjeux logistiques de notre pays. À ce propos, je ne manque pas cette occasion de vous demander quelle suite vous comptez donner au rapport sur le canal Seine-Nord que notre collègue Rémi Pauvros vient de rendre.

Certains experts estiment le gain de l’optimisation logistique pour notre économie dans sa structure actuelle à environ 30 milliards d’euros, ce qui est déjà considérable ! Pourtant, il nous faut encore anticiper, conduire et organiser la révolution logistique que vont imposer la transition énergétique d’une part et le développement de l’économie circulaire d’autre part. En effet, les nouvelles ressources énergétiques sont dispersées sur le territoire. Pour qu’elles soient valorisées, il faut une logistique performante et optimisée. C’est par exemple le cas de la biomasse, qui représente 60 % du futur mix énergétique de notre pays et qui, avant d’être transformée en gaz, en chaleur ou en électricité, doit être acheminée en grande quantité et à un niveau élevé de qualité vers des sites de transformation proches des lieux de consommation ou des réseaux qui les desservent.

L’économie circulaire, quant à elle, imposera la logique de la logistique inverse afin d’optimiser les coûts de transport et de faire face avec efficacité à la

concurrence du vieux modèle économique qui cherche un sursis dans les importations à bas coût et dans les produits à courte vie.

Les régulations numériques de type smart grid ne resteront pas confinées au domaine de l’électricité ; elles se développeront aussi pour assurer l’optimisation des circuits matières.

Le développement de l’e-commerce crée, quant à lui, des besoins logistiques de plus en plus complexes.

Ces évolutions, qui impactent toute la chaîne de la production à la consommation, vont structurer notre territoire. Or aujourd’hui ces différents éléments relèvent de politiques, d’administrations, de collectivités et d’acteurs économiques distincts. Il faut assurer une cohérence entre celles-ci pour éviter que des populations ou des territoires soient tenus à l’écart. Il convient de saisir toutes les opportunités économiques sans pour autant laisser dériver l’empreinte carbone de cette nouvelle croissance qui, ne pouvant être que verte, doit être liée à un transport et à une logistique efficaces.

Quelles sont, selon vous, l’organisation, les incitations et la coordination qu’il faudrait mettre en place pour que notre politique de transport soit à la hauteur de ce défi logistique et permette d’en saisir toutes les opportunités économiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le député, permettez-moi de féliciter Rémi Pauvros pour l’excellent rapport qu’il m’a remis hier. Nous attendons la décision de l’Europe pour franchir un pas déterminant dans la mise en œuvre de ce grand projet.

Je ne crois pas, monsieur le député, être capable de répondre à votre question en deux minutes tant elle soulève de problèmes, même s’il s’agit là d’un débat passionnant. La réponse, vous la trouverez dans l’initiative inédite qu’a prise le Gouvernement et qui part d’un constat que vous avez fait vous-même, à savoir que l’approche de ces questions est souvent séquentielle et que chaque mode est traité séparément, sans prendre en compte la chaîne logistique dans son ensemble.

Après que le professeur Savy m’a remis le rapport qu’il a consacré à la situation de la logistique en France et dont les conclusions sont plutôt positives, en tout cas nuancées, nous avons organisé une consultation en ligne, qui se déroule actuellement et prendra fin le 15 mai, sur la performance de la logistique et de la supply chain en France. Cette consultation porte sur quatre points, qui rejoignent les questions que vous posez : la performance logistique, l’emploi, les compétences et la formation, l’insertion des activités logistiques dans le territoire, et enfin la recherche, l’innovation et le partage des connaissances. La question de l’économie circulaire est naturellement au cœur de ces préoccupations. J’ai confié la présidence de de cette conférence à votre collègue François-Michel Lambert, dont l’expertise en matière logistique est parfaitement reconnue.

Cette procédure nous permettra de répondre à vos questions.

M. Jean-Louis Bricout. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. L’AFITF a dix ans. L’affectation de ressources régulières à l’agence a permis de mettre en place 32,5 milliards d’euros d’engagements, au travers de plus de 500 conventions en faveur des infrastructures, en privilégiant à hauteur de 70 % celles qui offrent une alternative à la route – le rail, le fluvial, le portuaire, les TCSP, ou transports collectifs en site propre. À ce jour, 19,7 milliards d’euros ont été versés par l’agence. Il restera à investir 12,8 milliards d’euros, notamment au titre des concessions ou des partenariats public-privé qui représentent 30 % des engagements et 58 % des restes à financer par l’AFITF.

Les vicissitudes de l’écotaxe poids lourds ont réduit les engagements pendant deux ans et entraîné des retards de paiement importants vis-à-vis de RFF, devenu SNCF Réseau.

M. Bertrand Pancher. Et voilà !

M. Philippe Duron. Le plafonnement des dépenses d’intervention à 1,9 milliard d’euros pour les années à venir constitue par ailleurs une contrainte quand le Gouvernement décide de lancer des projets nouveaux et de grande envergure comme le canal Seine-Nord Europe, Lyon-Turin, et d’autres projets, à l’origine de besoins de financement excédant largement ce plafond.

M. Bertrand Pancher. Très bien !

M. Philippe Duron. Le Gouvernement a pallié très efficacement la disparition de l’écotaxe et du péage de transit en augmentant la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, sur le gazole de deux centimes pour les voitures particulières et les poids lourds, et en suspendant par ailleurs l’exonération de deux centimes par litre qui avait été accordée aux professionnels de la route au titre de la contribution climat énergie. Cette mesure, toutefois, a été annoncée comme exceptionnelle.

Aussi, monsieur le secrétaire d’État, comment envisagez-vous le financement des infrastructures de mobilité et du matériel ferroviaire à court et à moyen terme ? Pensez-vous qu’il soit possible de pérenniser, voire d’optimiser cette recette de TICPE ?

Vous avez indiqué à Bertrand Pancher que vous ferez connaître au mois de juin les conclusions du groupe de travail que vous avez chargé de réfléchir à des ressources de substitution au produit de l’écotaxe, mais qu’en est-il du milliard d’euros annoncé par le Premier ministre à l’issue de l’accord passé avec les sociétés d’autoroutes ? Comment sera-t-il affecté aux infrastructures ? Bénéficiera-t-il à l’AFITF ? Viendra-t-il en sus ou sera-t-il inclus dans l’enveloppe de 1,9 milliard d’euros qui a été définie comme le plafond de financement pour les années à venir ? Je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Valérie Lacroute. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur le président Duron, je vous remercie tout d’abord pour le travail que vous accomplissez sur toutes ces questions.

Comme vous l’avez rappelé, le Gouvernement s’est engagé, et je réitère cet engagement, à sécuriser les ressources de l’AFITF – redevances domaniales, taxes d’aménagement du territoire, produits des amendes radar et une fraction de la TICPE. S’y ajoute désormais ce qui aurait dû être la ressource du péage de transit poids lourds, pour laquelle nous avons trouvé une recette de substitution. C’est sur le montant de celle-ci que je m’engage.

Il n’y a en apparence que deux solutions : soit une vignette poids lourds, soit le maintien de ce qui a été décidé l’année dernière. Pour certains la vignette permettrait de faire payer davantage les camions étrangers que la taxation du gazole. J’ai fait réaliser des études sur ce sujet et nous disposons désormais de tous les éléments nécessaires pour poursuivre la discussion.

L’accord intervenu avec les sociétés d’autoroutes porte sur une somme d’un milliard d’euros : 100 millions les trois premières années, puis 60 millions par la suite seront versés à l’AFITF, en plus des recettes dont j’ai parlé précédemment et de la somme de 1,9 milliard. Je ne peux pas être plus précis. C’est une redevance dédiée, qui servira à ces financements. Sera-t-elle suffisante, je ne sais pas, mais, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, je ne m’exonère pas de cette contrainte. Une réflexion est en cours, alimentée par Rémi Pauvros. Michel Bouvard et Michel Destot me remettront leur rapport et nous étudierons ensemble comment optimiser les recettes déjà affectées à hauteur de 1,9 milliard et les 100 millions d’euros et trouver d’autres ressources pour mener à bien les projets exceptionnels auxquels notre pays aspire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

La parole est à Mme Valérie Lacroute.

Mme Valérie Lacroute. Monsieur le secrétaire d’État, l’Île-de-France et ses cinq millions d’usagers quotidiens ont besoin d’un grand service public ferroviaire qui réponde aux exigences des territoires et des populations, tout particulièrement ceux de la grande couronne.

L’offre Intercités est actuellement en pleine restructuration et un scénario drastique de réduction des lignes et des dessertes se profile, alors que le rapport Duron n’a pas encore été remis. Or ces lignes sont vitales pour la grande couronne. Mises en place avant le Transilien, elles structurent l’offre de transport en grande couronne.

À l’heure où le Gouvernement multiplie les discours sur sa volonté de réduire les inégalités territoriales, il serait incompréhensible de laisser ce projet se réaliser. Si ces intentions étaient confirmées, on assisterait à la formation de véritables déserts ferroviaires et à la mise en place d’une desserte à deux vitesses de la région Île-de-France.

La grande couronne souffre également d’un manque d’aménagements sécuritaires. Le récent accident survenu à Nangis nous rappelle combien il est indispensable de concentrer toutes les énergies sur la sécurisation des passages à niveau. En l’espace de quelques mois, deux accidents mortels ont endeuillé le sud de la Seine-et-Marne. En 2014, à l’occasion de la Journée nationale de sécurité routière aux passages à niveau, j’ai rappelé l’importance et l’urgence de supprimer le passage à niveau de la gare de Saint-Pierre-lès-Nemours. Ce passage à niveau présente un risque jugé très préoccupant en raison de la combinaison de plusieurs facteurs : un trafic routier élevé, une très grande vitesse des trains et la configuration difficile du site. Mais ce dossier est sans cesse repoussé depuis trente ans en raison du coût des travaux, estimé à quarante millions d’euros.

Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous me confirmer que ces crédits, en tout cas une partie d’entre eux, ont été prévus dans le cadre du contrat de plan État-région signé le 16 février dernier, et que la grande couronne peut compter sur la mobilisation de votre ministère pour faire face à ces enjeux majeurs ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. J’ai déjà répondu sur la question des TET, madame la députée. Je ne reviendrai donc pas sur l’ensemble de la procédure : vous en connaissez les termes. Nous devons étudier la façon dont nous pourrions réorganiser les trains d’équilibre du territoire, mais sachez que je n’oublie pas l’objectif : la mobilité, de mon point de vue, est d’abord et surtout une question sociale et c’est à travers ce prisme que, le moment venu, nous prendrons des décisions, tout en prenant en compte les contraintes financières.

Vous avez également évoqué l’importante question des passages à niveau. Priorité est donnée à la sécurité ferroviaire, qui impose la mobilisation de tous les acteurs. Je vous confirme celle du Gouvernement.

Le 1er juillet 2014, une nouvelle instruction a été adressée aux préfets de sécuriser les passages à niveau existants. Cette sécurisation comporte quatre axes : mieux contrôler l’accès aux passages à niveau pour en finir avec les passages en force, répondre aux besoins spécifiques des poids lourds et des autocars en privilégiant pour ceux-ci les itinéraires sans passage à niveau, améliorer l’information des usagers de la route et sécuriser en premier lieu les passages à niveau prioritaires, enfin mettre en place des mesures temporaires adaptées à chaque cas.

Le 3 juin prochain, à l’occasion de la Journée nationale de sensibilisation à la sécurité aux passages à niveau, j’identifierai les autres mesures nécessaires afin que cessent des drames qui coûtent la vie chaque année à de très nombreuses personnes.

Le passage à niveau n8 de Saint-Pierre-lès-Nemours figure sur la liste du programme national de sécurisation. Sans attendre des travaux qui seront prochainement programmés, un radar de franchissement sera installé d’ici le mois d’août afin de sensibiliser les conducteurs aux risques encourus lors du franchissement du passage à niveau.

Je vous remercie, madame la députée, pour votre investissement dans ce domaine car chaque jour des drames se produisent sur les passages à niveau. Nous avons, ensemble, un défi à relever pour que cela cesse.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Je vais faire souffler un peu d’air marin dans cet hémicycle…

Notre pays est riche de plus de 3 000 kilomètres de côtes littorales et de ports régionaux qui ne demandent qu’à se développer, mais l’État les a peu à peu abandonnés alors que nous possédons le deuxième plus grand espace maritime au monde. De tels atouts auraient dû nous conduire à poursuivre une véritable politique de transport maritime sous pavillon français. C’était du moins l’ambition du registre international français, le RIF, créé il y a tout juste dix ans et censé enrayer le lent déclin de la flotte française.

Dix ans après, le bilan est mitigé. La création du RIF n’a pas relancé le pavillon national français comme cela était espéré. Avec 292 navires sous registre international français au 1er mars 2015, notre flotte continue, malheureusement, de régresser. Malgré tout, le RIF a permis de conserver une flotte sous pavillon français.

Une politique de la mer, quasiment inexistante jusqu’à présent, nous permettrait d’aller au-delà et de redonner à notre littoral et à nos ports les moyens de se développer autour d’une flotte nationale. Pour cela, il nous faut une administration des ports et de la mer modernisée et réactive. Nous pouvons nous inspirer du pavillon danois, qui connaît une croissance sans précédent grâce à la création d’un registre international exonéré totalement de charges sociales et exempt des nombreuses contraintes administratives en vigueur en France.

Nous avons proposé au ministre du budget, dans le cadre du projet de loi de finances, d’appliquer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, au transport maritime, mais cela nous a été refusé. Pourtant, avec un surcoût de plus de 40 % par rapport à nos concurrents européens, la situation de nos armements devient insoutenable.

Dix ans après son entrée en application, quel bilan, selon vous, peut-on dresser de la création du registre international français ? De quels moyens comptez-vous doter notre pays pour que notre marine marchande gagne en compétitivité et que nous puissions profiter pleinement de nos atouts géographiques, grâce à la mise en place d’une véritable politique de la mer ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Disposant des mêmes chiffres que vous, monsieur le député, je ne peux que partager votre constat. Le RIF bénéficie des dispositions mises en place pour assurer la compétitivité du pavillon français, telles que l’exonération de charges patronales des navires soumis à concurrence internationale ou la taxe au tonnage. Il bénéficiera des dispositions récemment votées et en cours de mise en œuvre, notamment la simplification du rôle d’équipage, la protection privée des navires ou les exonérations des plus-values de cessions d’actifs. Selon la même logique de renforcement de la compétitivité de notre pavillon, nous réfléchissons avec toutes les parties prenantes aux moyens de concrétiser le plus tôt possible, une fois promulguée la loi relative à la transition énergétique, la réforme de la loi du 31 décembre 1992 relative au régime pétrolier garantissant un volume de produits pétroliers transporté sous pavillon français.

Conscients de la forte exposition de nos armements à la concurrence internationale, nous cherchons constamment à améliorer l’adaptation du service fourni aux armateurs et aux marins afin d’améliorer l’attractivité du RIF. Ainsi, des travaux sont en cours en vue de moderniser le guichet unique du RIF, qui sera désormais chargé de plusieurs procédures administratives auparavant dispersées entre des services distincts, telles que l’immatriculation et la délivrance des fiches d’effectifs, des certificats d’assurance et des rôles d’équipage. La mission du guichet unique sera également renforcée en matière d’accompagnement des armateurs dans leurs démarches d’obtention des titres de sécurité.

Je n’ai ici évoqué que quelques facteurs de compétitivité mais le Gouvernement mène d’autres actions, par exemple en matière d’enseignement maritime et de politique maritime intégrée. Le Gouvernement est attentif à toutes les propositions susceptibles d’être profitables à nos armements et à nos marins. Je partage avec vous, monsieur le député, l’aspiration à une grande politique maritime au profit de nos marins et de nos bateaux. Les mesures que j’ai évoquées montrent que le Gouvernement s’inscrit quotidiennement dans cette perspective.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Monsieur le secrétaire d’État, ma question concerne le volet transport de la conférence environnementale annuelle et porte sur un sujet déjà évoqué par notre collègue Eva Sas. L’un des axes forts en faveur d’une amélioration du transport de marchandises consistait en une politique de soutien au report modal de la route vers le rail. Depuis six ans, l’État travaille sur l’un des projets du Grenelle de l’environnement voté à l’époque à l’unanimité, l’autoroute ferroviaire Atlantique. Il s’agit d’un transport combiné rail-route fondé sur le savoir-faire industriel ferroviaire d’un groupe français, Lohr Industries, dont le siège social est en Alsace et qui travaille depuis cinquante ans sur la conception et la réalisation de systèmes de transport.

Le projet concerne plus de 1 000 kilomètres et prévoit de charger des camions dans le Nord de la France à Dourges puis de les convoyer à Tarnos dans le pays basque. Mais la semaine dernière, tout a été arrêté, malgré six ans d’études et de concertation entre vos services, RFF et la SNCF, monsieur le secrétaire d’État, et ce n’est sûrement pas la réforme ferroviaire entrée en vigueur le 1er janvier 2015 qui en est la cause. Cet arrêt serait dû à de graves problèmes : lesquels ?

Tandis que le projet de loi relatif à la transition énergétique revient à l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, j’aimerais connaître la stratégie du Gouvernement en matière de report modal. Je rappelle que ce seul service ferroviaire permettrait d’économiser en quatre aller-retour quotidiens un million de tonnes de CO2. Alors même que des fleurons du transport français sont rachetés par des groupes étrangers, comment comptez-vous soutenir l’expertise et la compétitivité de l’industrie ferroviaire française ?

M. Bertrand Pancher. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. L’autoroute ferroviaire Atlantique était et reste une bonne idée, mais le projet de 1 000 kilomètres de Dourges à Tarnos concerne un site complètement inadapté et présente un risque juridique majeur.

Ce choix, qui est un choix économique, impose d’utiliser des trains de 1 000 mètres, jusqu’ici inconnus en France et qui posent d’énormes problèmes en matière de retournement. Plusieurs des sites initialement envisagés, dont Mouguerre au sud de Tarnos, se sont avérés inutilisables parce qu’on ne peut y retourner les trains on parce qu’ils étaient trop éloignés. Le site de Tarnos a donc finalement été retenu, mais il est situé en milieu urbain dense, pratiquement à l’intérieur de l’agglomération complètement urbanisée de Bayonne-Anglet-Biarritz qui compte 150 000 habitants. Les inspecteurs du Conseil général de l’environnement et du développement durable font observer dans leurs conclusions que la zone comporte deux passages à niveau urbains qu’il faudrait fermer seize fois par jour pendant sept à huit minutes à chaque fois. Ce problème, qui n’avait pas été soigneusement pesé lors de l’enquête publique, constitue selon eux un risque majeur d’annulation par le juge administratif. Pour l’État, le risque se chiffre à 175 millions d’euros d’indemnités. Je regrette d’autant plus qu’on ait pris ce risque que l’Espagne a lancé un projet similaire non loin de là à Victoria, de l’autre côté de la frontière.

Il y a désormais deux possibilités. Ou bien nous trouvons un autre site sur le territoire national qui satisfasse aux contraintes du projet : ce ne sera pas simple mais nous y travaillons. Ou bien je recherche avec mon homologue espagnole les moyens de résoudre les deux problèmes du site inadapté et du risque juridique. Je préfère réaliser ce bon projet dans de bonnes conditions, plutôt que de signer un contrat voué à l’annulation, au détriment de cette bonne idée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Ma seconde question concerne l’association « Autocars anciens de France » basée à Betschdorf dans le nord de l’Alsace, qui éprouve des difficultés à transporter des passagers dans ses véhicules de collection rénovés selon les règles de l’art. Un décret du 8 juillet 2014 prévoit que tout autocar doit être équipé en ceintures de sécurité à compter du 1er septembre prochain. Une exception est prévue pour les véhicules dont le certificat d’immatriculation porte la mention « véhicule de collection », l’équipement en ceintures y étant techniquement impossible. Ces dispositions posent cependant problème car en vertu d’un arrêté du 9 février 2009, les véhicules dont la carte grise porte cette mention ne peuvent être affectés au transport de personnes hormis lors de manifestations exceptionnelles, à titre historique ou patrimonial et sous réserve d’une déclaration préalable en préfecture.

À la suite de contacts entre les associations et le ministère, une autorisation de transport de passagers serait envisagée, mais limitée au département d’immatriculation des véhicules concernés, ce qui rend impossible par exemple la découverte de la route des vins entre le Bas-Rhin et le Haut-Rhin. De même, lors de la rencontre européenne des autocars de collection prévue à Haguenau en octobre prochain, les autocars français viendront à vide alors que les autocars étrangers transporteront des passagers !

Une harmonisation européenne constituerait une solution. Comme la plupart des pays voisins autorisent les véhicules de collection à effectuer du transport de personnes, les structures basées en France sont incitées à faire immatriculer les véhicules à l’étranger et contourner ainsi la réglementation nationale. J’ajoute qu’il existe une demande réelle pour des déplacements touristiques en véhicules d’époque. L’objet du transport de passagers ne devrait pas déterminer l’autorisation préfectorale car seule la sécurité routière importe.

Comment assouplir le transport de personnes dans des véhicules de collection et soutenir ainsi la valorisation de ce patrimoine ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Vous posez une question très ciblée et très spécifique, monsieur le député, à laquelle je répondrai en deux temps. D’abord, en matière d’exigences de sécurité applicables à ces autocars envers lesquels vous manifestez beaucoup d’attention et qui sont des véhicules historiques, les dispositions relatives aux véhicules de collection sont dérogatoires sur deux points. En raison de leur valeur patrimoniale, ils sont exonérés de l’éthylotest antidémarrage, dont la généralisation est prévue en raison d’objectifs de sécurité que tout le monde comprend et approuve. Ils bénéficient de la même dérogation en matière d’équipement en ceinture de sécurité.

Si j’ai bien compris votre question, monsieur le député, elle ne porte pas simplement sur ces dérogations mais sur la possibilité de transporter des passagers dans ce cadre. Je vous adresserai ultérieurement une réponse plus complète car je ne voudrais pas que des propos prononcés à l’Assemblée nationale fassent l’objet d’une interprétation erronée, mais il me semble que le transport de passagers est possible à titre privé. En cas d’activité commerciale en revanche, si ces passagers sont des clients, le droit commun s’applique, ce qui n’est pas sans cohérence car la dérogation applicable aux véhicules de collection leur interdit d’entrer dans le système concurrentiel. Il s’agit là me semble-t-il d’une réponse cohérente mais si vous aviez besoin de précisions supplémentaires, mes services et moi-même serons naturellement à votre disposition pour la compléter.

M. le président. La parole est à M. Rémi Pauvros.

M. Rémi Pauvros. Monsieur le président ayant gardé le meilleur pour la fin, je suis malheureusement obligé de revenir sur un sujet que notre collègue vient d’évoquer, celui de l’autoroute ferroviaire Atlantique !

Je rappelle au préalable que le fret en général et le fret ferroviaire en particulier constituent dans notre pays un enjeu considérable. Le déficit de 500 millions d’euros cumulés dont souffre ce secteur est venu aggraver les trente-cinq milliards d’euros de dettes dont nous héritons aujourd’hui. Une amélioration s’est déjà produite car le déficit du fret ferroviaire s’élevait l’année dernière à seulement 100 millions d’euros. On voit là que l’action du Gouvernement et en particulier de M. le secrétaire d’État donne déjà des résultats.

Les autoroutes ferroviaires sont nécessaires et la solution est à rechercher au niveau européen. Olivier Faure, Gilles Savary, le président Duron et moi-même avons rappelé hier dans Les Échos la nécessité de consolider notre industrie ferroviaire au niveau européen. La décongestion du réseau routier, la réduction des risques routiers et l’endiguement de la pollution atmosphérique due au transport routier de marchandises sont autant de défis que nous devons impérativement relever.

Si l’autoroute ferroviaire alpine et l’autoroute ferroviaire Perpignan-Luxembourg voient aujourd’hui leur capacité de transport progresser et leur viabilité économique consolidée, le projet d’autoroute ferroviaire Atlantique reliant Dourges à Tarnos fait l’objet d’attentes très fortes que vous venez de rappeler, monsieur le secrétaire d’État. Elles sont d’autant plus légitimes que l’axe Atlantique reste un axe de transit privilégié des poids lourds en provenance d’Espagne ou de Belgique. De nombreux élus du Nord de la France appellent à trouver une solution rapide à la saturation notoire de l’autoroute A1. La décision récente du Gouvernement de ne pas signer le contrat de mise en œuvre de l’autoroute ferroviaire entre le Pas-de-Calais et les Landes ne peut donc pas signifier, ni pour nous ni pour vous, un abandon pur et simple de ce projet indispensable à l’équilibre de notre territoire.

Quelles sont les pistes envisagées pour donner forme à un véritable corridor de fret à dimension européenne répondant aux exigences premières d’une politique de transport véritablement moderne, c’est-à-dire compétitive, intermodale et assurant la transition énergétique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je vous confirme, monsieur Pauvros, mon attachement à cette bonne idée, mais la nécessité de développer le report modal et le fret ferroviaire n’exclut pas la prise en compte par chacun du problème particulier de la dimension des trains car cette contrainte d’emploi de trains de mille mètres n’existait pas dans les autres projets.

Les conclusions extrêmement précises des inspecteurs que j’avais missionnés sont significatives quand on connaît la prudence des formulations administratives. Je ne citerai que deux phrases : « le passage des trains VIIA Atlantique entraînera des perturbations majeures dans cet environnement urbain » – il faudrait avoir bien peu d’expérience en la matière pour imaginer que des conclusions qui évoquent le risque de perturbations majeures dans un environnement urbain n’attireront pas l’attention d’un juge administratif ! Ils concluent que « ces impacts illustrent la difficulté à accueillir des trains de marchandises de 1050 mètres dans un environnement urbain dense. »

Il ne faudrait cependant pas que cette difficulté, certes majeure et qui entraîne un vrai risque juridique, nous fasse oublier l’objectif et la bonne idée d’origine.

Sachant qu’il existe un projet de même nature du côté espagnol, qui est un projet à moyen terme, à cinq ans, deux choses doivent être dites dans le cadre du dialogue avec les autorités espagnoles. D’une part, comme vous l’avez rappelé, et j’en suis le témoin depuis des dizaines d’années, ce sont principalement des camions espagnols qui empruntent cet axe. S’il y avait demain un projet concurrent espagnol, peut-être choisiraient-ils de circuler sur des trains espagnols – je rappelle que le fret ferroviaire est ouvert à la concurrence. Mieux vaut donc que nos deux pays se parlent. Et puisque ce projet existe, l’accélérer nous permettrait de reprendre la bonne idée d’origine, tout en l’inscrivant dans une politique européenne et dans un corridor de report modal. Nous ferions dès lors de cette bonne idée une excellente réalisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’associe à ma question mon collègue du Nord Rémi Pauvros.

Chacun conviendra que lorsqu’on parle de notre politique des transports, il est important de parler de nos routes nationales.

Je voudrais illustrer mon propos en évoquant la RN 2 qui traverse ma circonscription, touchée économiquement et souvent écartée des projets structurants en matière de voies de communication. Pourtant, la RN 2 demeure, malgré l’existence des autoroutes A l et A 2, un axe privilégié pour relier Paris à Bruxelles.

C’est pourquoi il me semble indispensable que cet axe constitue une priorité du Gouvernement, tant pour améliorer les voies existantes que dans l’objectif de désenclaver les territoires en difficulté.

Certes, le secteur entre Laon et Paris va bénéficier de crédits inscrits au contrat de plan État-région. Cependant, le tronçon entre le nord de Laon et le département du Nord a été complètement délaissé, malgré les interventions répétées de mon prédécesseur Jean-Pierre Balligand depuis maintenant plus de trente ans. Cette partie non aménagée et non sécurisée dans les traversées de bourgs marque une rupture dans cette logique d’axe de communication entre les deux pôles dynamiques que sont Paris et le Benelux.

L’attente est forte d’une amélioration de la traversée de ma circonscription. Cela concerne bien sûr le secteur industriel, encore bien présent, notamment dans l’agro-alimentaire et la parfumerie, mais aussi les habitants et les commerçants des villes traversées, confrontés à une certaine insécurité et à des nuisances sonores.

Amélioration de la qualité des bandes de roulement, projets de requalification urbaine intégrant esthétique et sécurité en partenariat avec les collectivités : voilà ce dont nous avons besoin !

Lorsqu’il était candidat en 2012, le chef de l’État s’était emparé de cette problématique et s’était rendu à Hirson, où il avait suscité un espoir d’amélioration.

Monsieur le secrétaire d’État, voilà aujourd’hui trois ans que le Président de la République a été élu. Quelles annonces pouvez-vous nous faire afin de répondre à cet espoir toujours présent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. C’est vrai, monsieur le député : s’agissant de la RN 2 en Picardie, la concertation entre les acteurs locaux – région, département et État – a abouti à donner la priorité, dans le cadre du contrat de plan, à sa portion la plus fréquentée, au sud de Laon. Très attentif aux territoires ruraux, le Gouvernement a néanmoins orienté le volet territorial des CPER sur de nombreux projets de requalification de centres bourgs. En outre, il est conscient du rôle de l’investissement public dans l’activité économique des territoires. C’est pourquoi je ferai une annonce – ce sera la seule ce soir – relative à l’action économique du Gouvernement.

Je vous annonce la mise en place d’un plan gouvernemental pour l’investissement dans les réseaux existants, doté de 100 millions d’euros. Ce plan permettra de réaliser 150 chantiers de remise en état de routes nationales et voies navigables partout en France. Ces chantiers seront des chantiers à bons de commande, prêts à être lancés, qui impliqueront les PME locales et maintiendront l’emploi. Ils doivent être engagés immédiatement, c’est-à-dire dans les trois mois. C’est à la fois une réponse à votre question et une initiative de relance, que le Premier ministre m’a autorisé à vous annoncer ce soir.

En ce qui concerne le territoire de la Thiérache, 600 000 euros vont être débloqués pour des travaux de reprise d’accotement et d’amélioration de la couche de bitume autour de La Capelle. Ils impliqueront une agence basée à Laon, au plus près de vos préoccupations touchant à l’emploi et au maintien de l’activité locale. Ce chantier se déroulera cet été. C’est ainsi que le Gouvernement soutient les zones rurales, donne la priorité à la maintenance et à l’entretien des réseaux dans tous les territoires et s’inscrit dans la relance de l’activité économique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Nous en revenons aux questions de M. Pancher. Vous avez la parole, mon cher collègue.

M. Bertrand Pancher. Ce débat est intéressant, car les masques tombent. Prenons garde de ne pas voir les nez s’allonger ! Vous avez confirmé tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, que les recettes affectées au budget de l’AFITF ne seraient pas supérieures à ce qu’elles auraient dû être avec l’écotaxe, et qu’elles seraient même légèrement inférieures. Vous ajoutez à cela des dépenses nouvelles : un milliard d’euros pour le canal Seine-Nord, un milliard d’euros pour Ecomouv’. Enfin, vous venez de confirmer que la ligne Poitiers-Limoges, qui ne faisait pas partie des priorités retenues par la commission Mobilité 21, est désormais prioritaire. Comment tout cela pourra-t-il être financé ?

J’en viens à ma troisième question, qui concerne le démontage des portiques installés dans le cadre de l’écotaxe, et pour lequel vous avez lancé un appel d’offres. Selon les chiffres circulant actuellement, le coût de ce démontage se situerait entre un et sept millions d’euros. Il convient d’y ajouter les 403 millions d’euros d’indemnités versés à Ecomouv’ et les 400 millions de créance d’Ecomouv auprès des banques. Quel sera finalement le coût réel de ce démontage ?

Et puis qu’est-ce qui sera démonté ? Dans les déclarations que j’ai pu lire, vous expliquez que ce sera aux collectivités territoriales de demander ou non le démontage de ces structures. Mais l’appel d’offres – je l’ai relu ce matin encore – prévoit que tout sera démonté. Si cependant le démontage est partiel, qui va décider ? Les départements, les régions, les communes ?

Enfin, quels nouveaux usages de ces équipements sont prévus ? Si une reconversion du matériel semble enfin envisagée afin de limiter le gâchis, pourquoi ne pas tout conserver en attendant une expertise ? C’est notre proposition. Les portiques pourraient être réutilisés pour évaluer avec précision le trafic, les flux routiers sur certains axes, pour contribuer à la sécurité routière, ou encore pour faire respecter la circulation alternée en cas de pic de pollution par exemple.

Par ailleurs, quel calendrier de mise en œuvre est envisagé ? Et où en est l’appel d’offres lui-même, qui devait expirer le 30 avril à midi ?

Après la renonciation à l’écotaxe, prenons garde qu’un démontage trop hâtif des portiques ne vienne aggraver les conséquences de cette grave faute politique, économique et environnementale.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je vais être très précis dans ma réponse, monsieur Pancher, car votre question est légitime.

Si nous avons lancé cet appel d’offres c’est qu’il était impensable de laisser ces équipements en l’état. Le coût de cet appel d’offres est public. Il s’agit d’un marché à bons de commande dont le montant est compris entre 1,6 et 7 millions d’euros, en fonction du nombre de portiques qui seront démontés.

La recette attendue de la réutilisation des équipements est de l’ordre de 50 millions d’euros, chiffre que je vous livre avec toute la prudence qui s’impose. C’est une opération nécessaire pour la défense du patrimoine de l’État.

Vous le savez, les portiques contiennent des équipements qui pourront être réutilisés ou revendus : balises, radars, caméras avec lecture de plaques, viseurs laser. Les nouveaux usages, en cours de définition, pourraient concerner le repérage des véhicules, le comptage de la circulation et l’identification des véhicules, notamment pour les dispositifs veillant à l’amélioration de la qualité de l’air ou pour la comptabilisation du trafic de transit, la surveillance du trafic et la protection contre la délinquance par les services des douanes, ou encore des services aux usagers de la route. Bien entendu, cette énumération n’est pas exhaustive. L’État sera à l’écoute d’autres propositions d’utilisation, notamment des collectivités locales. Si celles-ci le souhaitent, les portiques situés sur leur voirie seront démontés – l’opération est simple.

Il s’agit de préserver des actifs dont la valeur globale est très supérieure au montant du marché. Étant donné la situation, cela relève d’une démarche logique de protection du patrimoine de l’État.

M. le président. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour poser sa dernière question.

M. Bertrand Pancher. Je ne regrette pas que le groupe UDI ait provoqué ce débat à travers ces questions sur la politique des transports, qui vous permettent de nous éclairer dans un certain nombre de domaines.

Permettez-moi néanmoins de revenir sur ces fameux portiques. Alors que cela fait un an qu’on a décidé d’abandonner l’écotaxe, il est surprenant que l’on n’ait pas réfléchi plus tôt à une autre utilisation de ces portiques. Cela aurait peut-être permis d’éviter de les démonter pour les réutiliser aussitôt.

Ma dernière question concerne le transport ferroviaire des marchandises.

On se demande si le nouveau slogan à la mode ne serait pas « Vive le camion » !

Cela n’est certes pas nouveau, mais comment se fait-il que l’on se résolve à délaisser totalement nos voies de chemin de fer secondaires, alors que ce réseau capillaire est fondamental, notamment pour le tissu économique de nos territoires ? C’est en effet 20 % du fret qui emprunte ces lignes, dont 70 % du trafic ferroviaire des carrières et 40 % des céréales qui viennent des lignes capillaires. Le prix à la tonne de ces produits étant relativement faible, le prix du transport est d’autant plus important pour ces industries qui, si elles se voient contraintes de passer par la route, perdront toute compétitivité notamment au niveau mondial. Ainsi dans ma région, le groupe Vivescia, première coopérative agricole française, risque de payer très cher l’abandon du réseau capillaire. Il m’a indiqué le nombre de camions qu’il devra faire circuler suite à l’abandon de ce mode de transport, notamment pour desservir les silos. Veut-on définitivement tuer ces activités locales et les emplois non délocalisables qu’elles induisent ?

J’en profite pour déplorer à nouveau, et de manière plus générale, le peu de cas que l’on fait du fret ferroviaire dans notre pays : alors que nous restons au point mort, la tendance inverse s’observe dans le reste de l’Europe, où le trafic ferroviaire a plutôt tendance à augmenter.

Alors que seuls 30 millions d’euros sur trois ans sont prévus pour le réseau capillaire, ce qui est insuffisant pour entretenir ce qui reste, que comptez-vous faire pour empêcher que tout disparaisse, sachant qu’en réalité, seuls 2000 kilomètres de voies sont effectivement exploités, faute de moyens ?

Qu’en est-il du décret pris en application de la loi du 4 août 2014 sur la réforme ferroviaire, qui permet à SNCF Réseau de sous-traiter la maintenance des infrastructures locales ? Et puisque des lignes sont définitivement abandonnées, pourquoi ne pas les déclasser et les rendre au secteur privé ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Monsieur Pancher, je partage votre constat et vos objectifs. Je considère que les lignes capillaires de fret représentent un enjeu économique majeur pour les territoires qu’elles traversent ainsi que pour certaines filières. Cette question du fret capillaire n’est pas d’abord une question ferroviaire : c’est avant tout une question économique. Vous avez cité des exemples, on pourrait en mentionner beaucoup d’autres : c’est un enjeu essentiel pour les territoires. Il faut n’avoir jamais eu la responsabilité de la gestion d’un territoire pour ignorer que tout part de là et que, pour beaucoup d’industriels et de coopératives, le fret ferroviaire doit absolument être au rendez-vous dans tous les secteurs d’activité que vous avez mentionnés. J’ai rappelé ces objectifs lors de la conférence sur le fret ferroviaire du 12 décembre 2014.

Il existe tout un éventail de possibilités. La compétence économique appartenant aux régions, il faut leur conférer la possibilité de devenir gestionnaires de ce réseau et le texte  en cours de discussion ouvrira une telle faculté aux régions : libre aux élus locaux de s’en saisir ou non. D’autres formules impliquent les opérateurs ; il existe également des solutions de proximité que vous connaissez. D’autres initiatives sont possibles du côté des grands ports maritimes – la situation de Bordeaux me paraît pouvoir trouver une réponse dans des initiatives de ce type.

Je partage complètement votre préoccupation. Je ne pense pas qu’il y ait une réponse unique. Eu égard aux contraintes budgétaires actuelles, trente millions ce n’est pas rien, même si on peut toujours juger que c’est insuffisant. Il faut vraiment poser la question comme vous l’avez fait, offrir des réponses diversifiées et se dire que c’est là que ça commence. C’est d’abord une question économique. Ne poser la question qu’en termes d’activité ferroviaire reviendrait à se tromper sur le rôle essentiel du fret capillaire en matière d’aménagement du territoire et donc de développement économique. Je ferai tout ce qui sera possible de faire pour que le fret capillaire soit au rendez-vous du développement économique des territoires.

M. le président. La séance de questions est terminée.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :

Proposition de résolution européenne relative à la dette souveraine des États de la zone euro ;

Proposition de loi relative au droit de préemption des salariés ;

Proposition de loi relative à l’entretien et au renouvellement du réseau des lignes téléphoniques.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures.)

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly