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Commission des affaires européennes

mercredi 22 février 2017

17 heures

Compte rendu n° 349

Présidence de Mme Danielle Auroi Présidente

Examen du rapport d’information de Mme Nathalie Chabanne et M. André Schneider sur la nouvelle organisation du marché de l’électricité, dans le cadre du quatrième paquet énergie

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 22 février 2017

Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 17 h 05

Examen du rapport d’information de Mme Nathalie Chabanne et M. André Schneider sur la nouvelle organisation du marché de l’électricité, dans le cadre du quatrième paquet énergie

La présidente Danielle Auroi. Nous allons parler à présent de l’organisation du marché de l’électricité dans le cadre du quatrième paquet énergie avec nos collègues Nathalie Chabanne et André Schneider.

M. André Schneider, co-rapporteur. Madame la présidente, mes chers collègues. Le rapport et la communication que nous vous présentons aujourd’hui porte sur un sujet que j’ai eu l’honneur d’aborder de nombreuses fois dans cette enceinte au cours des quinze dernières années : l’Union de l’énergie. Figurant parmi les dix priorités de la Commission européenne présidée par Jean-Claude Juncker, l’Union de l’énergie a vu récemment son importance croître encore davantage avec l’entrée en vigueur de l’accord de Paris, intervenue le 4 novembre 2016, moins d’un an après la COP 21, et la présentation quasi-concomitante, le 30 novembre 2016, d’un quatrième « paquet énergie » très ambitieux, intitulé « Une énergie propre pour tous les Européens ». Après vingt ans de libéralisation progressive, le marché européen de l’énergie aborde une phase d’accélération notable. Cela dénote la volonté de l’Union européenne de réagir avec célérité face à l’urgence climatique et nous ne pouvons que nous en réjouir.

Je tiens cependant à souligner que le formidable volontarisme dont fait preuve la Commission Juncker dans le domaine de l’énergie ne doit pas faire oublier le chemin parcouru depuis vingt ans. Les deux premiers « paquets énergie » (datant de 1998 et 2003) ont permis l’ouverture complète du marché intérieur à de nouveaux fournisseurs. Le troisième paquet (2009) a poursuivi la libéralisation du marché en instaurant une séparation claire entre les activités de fourniture d’énergie et des gestions des réseaux, en renforçant les compétences et l’indépendance des régulateurs nationaux, en créant l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), en libéralisant le marché de détail et en protégeant davantage les consommateurs. L’Union européenne est parvenue en seulement vingt ans à modifier considérablement le paysage énergétique européen, passant d’un cadre morcelé où se juxtaposaient des politiques nationales à un marché intégré et de plus en plus fluide. Le bilan est donc très positif et il serait injuste de le minorer.

Il reste néanmoins des obstacles persistants dont les principaux sont l’insuffisante coopération régionale des opérateurs sur le marché de gros, les distorsions de prix sur le marché de détail ainsi que les entraves à la mobilité concurrentielle des consommateurs. De plus, des évolutions récentes comme l’entrée en vigueur de l’accord de Paris et l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique, rendent nécessaire l’adaptation du cadre réglementaire. Les propositions de la Commission européenne sont donc bienvenues.

L’ampleur de ce « quatrième paquet » (dix thématiques, trente-sept textes) combiné aux contraintes du calendrier parlementaire et à l’indisponibilité de traductions en français, nous ont malheureusement poussé, ma collègue Nathalie Chabanne, et moi-même à limiter l’objet de notre étude aux quatre propositions législatives relatives à l’organisation du marché de l’électricité. J’attire votre attention sur le fait que le président Juncker souhaite que le Parlement européen procède à l’examen de l’ensemble des propositions législatives contenues dans le quatrième paquet d’ici octobre 2017. Il aurait donc été préférable que l’ensemble des propositions de la Commission européenne soit examiné par notre Commission, d’autant que l’impact que ces dispositions vont avoir sur le secteur de l’énergie sera considérable. Cela n’a hélas pas été possible, compte tenu du calendrier parlementaire. Je formule le souhait que cela puisse l’être très rapidement au début de la prochaine législature.

Je cède maintenant la parole à ma collègue, Nathalie Chabanne, avec qui, je tiens à le souligner, il a été très agréable et très constructif de travailler.

Mme Nathalie Chabanne, co-rapporteure. Merci, cher collègue. Avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à mon tour à remercier André Schneider pour avoir accepté de partager avec enthousiasme tout au long de notre mission son expertise du secteur.

Nous avons examiné les quatre propositions législatives relatives à l’organisation du marché de l’électricité et à la sécurité d’approvisionnement électrique qui témoignent de la volonté de la Commission européenne de finaliser l’intégration de ce marché en proposant la mise en place d’un cadre réglementaire adapté aux évolutions récentes qui ont grandement transformé le secteur : augmentation de la part des énergies renouvelables, développement des modes de production locaux, interconnexion croissante, etc.

Le projet de règlement sur le marché intérieur de l’électricité propose une refonte du règlement (CE) n° 714/2009 du 13 juillet 2009 sur les conditions d’accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d’électricité. Grâce à ce règlement, la Commission européenne souhaite instaurer un cadre adapté à la plus grande flexibilité du marché de l’électricité et au renforcement nécessaire de la coopération régionale.

Le projet de directive concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité propose une refonte de la directive 2009/72/CE du 13 juillet 2009. Ce texte vise à placer le consommateur au cœur du marché en lui permettant d’être mieux informé, de pouvoir jouer un rôle plus actif sur le marché et de maîtriser davantage ses dépenses énergétiques.

Le projet de règlement instituant une Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie propose une refonte du règlement 713/2009 du 13 juillet 2009. Il prévoit un élargissement des missions confiées à l’ACER ainsi qu’un renforcement des pouvoirs règlementaires du directeur de l’agence, favorisant ainsi l’émergence d’un véritable régulateur européen.

Le projet de règlement sur la préparation aux risques dans le secteur de l’électricité remplace la directive 2005/89/CE qui prévoyait un cadre très large quant aux objectifs à atteindre par les États membres dans le domaine de la sécurité d’approvisionnement, mais présentait un intérêt limité sur le plan opérationnel. Afin de s’adapter à la réalité du marché interconnecté de l’électricité d’aujourd’hui, marqué par une probabilité croissante de situations de crise affectant plusieurs États membres simultanément, ce texte propose la mise en place de méthodes communes d’évaluation des risques, l’amélioration de la transparence entre les États membres lors de la phase de préparation et durant les crises et fixe comme objectif de pouvoir garantir la fourniture d’électricité sur les sites prioritaires pendant les crises.

Ces quatre textes ambitionnent de proposer un cadre réglementaire propice à l’achèvement du marché intérieur de l’électricité et adapté aux évolutions rendues nécessaires pour lutter contre le changement climatique. Si l’on peut porter une appréciation globalement positive à leur égard, on peut également relever le degré de précision extrême qui caractérise certaines mesures et s’interroger sur le bien-fondé de la volonté de centralisation très marquée que ce degré de précision dénote de la part de la Commission européenne.

André Schneider et moi-même souhaitons particulièrement attirer votre attention sur trois points qui nous semblent préoccupants et dont il faudrait suivre le cheminement législatif avec vigilance.

M. André Schneider, co-rapporteur. La directive concernant les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité semble exiger la fin des tarifs réglementés de vente. La France a procédé l’an dernier à la suppression de ces tarifs pour les clients professionnels mais les a maintenus pour les particuliers. Nous estimons, tout comme l’État, que leur existence n’est pas une entrave à la concurrence puisque les particuliers ont la possibilité de souscrire à d’autres tarifs moins chers. Les Français sont très attachés à ces tarifs. Nous le sommes aussi et nous pensons que leur suppression serait mal perçue.

Mme Nathalie Chabanne, co-rapporteure. Le nouveau règlement sur le marché intérieur de l’électricité propose de remplacer les centres régionaux de sécurité existants (comme CORESO) par des centres opérationnels régionaux (Regional Operation Centres – ROC). Fondés par les gestionnaires de réseau de transport sur une approche volontariste de la coopération régionale, les centres régionaux de sécurité fonctionnent de manière très satisfaisante. Il n’y a donc pas lieu de les remplacer. De plus, les ROC que la Commission européenne souhaiterait instaurer à leur place seraient placés sous le contrôle de l’ACER et des régulateurs nationaux et ouvriraient la voie au démantèlement des gestionnaires de transport nationaux, comme RTE, ce qui à nos yeux soulève de sérieuses questions d’indépendance énergétique.

M. André Schneider, co-rapporteur. Le nouveau règlement instituant une Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie, sous couvert d’adapter la surveillance réglementaire aux marchés régionaux, propose une modification substantielle des pouvoirs de l’ACER. Actuellement, l’ACER est une agence de coopération qui remplit ses missions de manière très satisfaisante. Les modifications souhaitées par la Commission européenne la transformerait de fait en véritable régulateur européen centralisant les prises de décision sans pour autant exercer de responsabilité finale (notamment en cas de black out) et sans qu’il n’existe de garde-fous qui permettraient de maintenir un équilibre institutionnel entre l’ACER et les régulateurs nationaux. De plus, le remplacement prévu de la majorité qualifiée par une majorité simple diminuerait le poids des grands pays, comme la France, et permettrait qu’une décision soit adoptée quand bien même un ensemble de régulateurs représentant 80 % de la population européenne s’y opposerait, ce qui ne peut pas être considéré comme un mode de fonctionnement satisfaisant.

M. Jacques Myard. La question de la coordination de la circulation de l’électricité dans l’Union européenne est primordiale car la sécurité d’approvisionnement en dépend, mais elle doit être traitée de manière à permettre le maintien des compétences des États membres dans le domaine de l’énergie. Je dis donc oui à la coordination, oui à la sécurité d’approvisionnement, mais non à une « usine à gaz » pour le secteur de l’électricité !

M. Yves Daniel. La question de la diminution de la consommation d’électricité est aussi primordiale car, comme le rappelle souvent la Commission européenne, « l’énergie la moins chère et la plus sûre est celle que l’on ne consomme pas ». Comment cette nécessité est-elle prise en compte dans le quatrième paquet énergie ?

Mme Nathalie Chabanne, co-rapporteure. Nous partageons tous la conviction que le renforcement nécessaire de la coordination en matière de sécurité énergétique ne doit pas se faire au détriment de la liberté et des compétences des États membres.

La question de l’efficacité énergétique figure en tête des priorités du quatrième paquet énergie, notamment dans le secteur de l’électricité pour lequel des mesures favorisant l’effacement sont proposées.

M. André Schneider, co-rapporteur. Le quatrième paquet énergie vise également à améliorer la situation des consommateurs.

M. Jacques Myard. Il faut effectivement que les consommateurs tirent avantage des mesures contenues dans le quatrième paquet énergie mais il faut aussi veiller à ce que les acteurs du secteur puissent continuer à investir.

La présidente Danielle Auroi. La présidence maltaise a décidé d’accorder une place prioritaire au quatrième paquet énergie, ce dont on peut se réjouir. Je vous propose à présent d’approuver la publication du rapport.

Compte-tenu de ce qui précède, la Commission a approuvé les propositions d’acte ci-dessous :

COM(2016) 862 final – E 11749  : Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la préparation aux risques dans le secteur de l'électricité et abrogeant la directive 2005/89/CE

COM(2016) 863 final – E 11759  : Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une Agence de l'Union européenne pour la coopération des régulateurs de l'énergie (refonte)

COM(2016) 861 final – E 11885 : Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur le marché intérieur de l'électricité (refonte)

COM(2016) 864 final – E 11886  : Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité (refonte)

Puis la Commission a approuvé à l’unanimité la publication du rapport.

La séance est levée à 17 h 30

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 22 février 2017 à 17 heures 05

Présents. - Mme Danielle Auroi, Mme Nathalie Chabanne, M. Yves Daniel, Mme Sandrine Doucet, M. Jean-Patrick Gille, Mme Chantal Guittet, Mme Marietta Karamanli, M. Jérôme Lambert, M. Pierre Lequiller, M. Jacques Myard, M. Arnaud Richard, M. André Schneider

Excusé. - Mme Marie-Louise Fort