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PROJET DE LOI ORGANIQUE

relatif à la transparence de la vie publique

ETUDE D'IMPACT

23 AVRIL 2013

SOMMAIRE

I. dispositions relatives à la transparence de la vie publique applicables aux parlementaires et aux anciens ministres 4

I.1. L’extension aux parlementaires des dispositions applicables aux membres du Gouvernement, personnes titulaires des principales fonctions exécutives locales et députés européens (article 1er) 4

I.1.1. Etat du droit 4

I.1.2. Eléments de droit comparé 5

I.1.3. Dispositif juridique proposé 7

I.2. De nouvelles règles d’incompatibilité professionnelle applicables aux parlementaires (article 2) 9

I.2.1. Etat du droit et options 9

I.2.2. Evolution juridique proposée 11

I.3. Une réforme des règles relatives à l’indemnité des anciens ministres (article 3) 14

I.3.1. Etat du droit 14

I.3.2. Evolution juridique proposée 14

II. Modalités d’application 14

II.1. Application outre-mer 14

II.1.1. Collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution 14

II.1.2. Le projet de loi organique s’appliquera dans les collectivités de l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie 15

II.2. Textes d’application 15

II.3. Entrée en vigueur 15

III. Consultations 16

Introduction

À la suite de l’intervention du Président de la République du 3 avril 2013, le Premier ministre, lors du conseil des ministres du 10 avril, a présenté une communication sur la transparence de la vie publique et le renforcement des moyens de lutte contre la grande délinquance économique et financière et les paradis fiscaux. Il a annoncé à cette occasion un projet de loi organique et un projet de loi visant, conformément à la demande du Président de la République, « à s’attaquer à la racine de la défiance de l’opinion, qui demande des garanties sur l’intégrité de ceux qui exercent des responsabilités politiques, et une plus grande efficacité dans la lutte contre la corruption et l’évasion fiscale ».

Délibérés en conseil des ministres le 24 avril 2013, le présent projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique et le projet de loi de même intitulé qui l’accompagne, d’une part, et le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, d’autre part, ont pour ambition de répondre à ce double objectif.

Le présent projet de loi organique, pour ce qui le concerne, prévoit des dispositions relatives à la transparence de la vie publique applicables aux parlementaires et aux anciens ministres.

I. dispositions relatives à la transparence de la vie publique applicables aux parlementaires et aux anciens ministres

1.1. L’extension aux parlementaires des dispositions applicables aux membres du Gouvernement, personnes titulaires des principales fonctions exécutives locales et députés européens (article 1er)

1.1.1. Etat du droit

• La loi organique n° 2011-410 du 14 avril 2011 relative à l’élection des députés et sénateurs a fixé les obligations liées à la déclaration de situation patrimoniale pour les parlementaires.

Les articles LO. 135-1 et LO. 297 du code électoral dans leur rédaction issue de la loi organique de 2011 susmentionnée prévoient les conditions dans lesquelles les députés et les sénateurs doivent déposer auprès de la commission pour la transparence de la vie financière de la vie politique une déclaration de situation patrimoniale certifiée sur l’honneur comme étant sincère et exacte. Les parlementaires communiquent à la commission pour la transparence financière de la vie politique, pendant l’exercice de leur mandat, toutes les modifications substantielles de leur patrimoine, chaque fois qu’ils le jugent utile.

La déclaration de situation patrimoniale est déposée auprès de la commission pour la transparence financière de la vie politique deux mois au plus tôt et un mois au plus tard avant l’expiration du mandat de député ou de sénateur ou, en cas de dissolution de l’Assemblée nationale ou de cessation du mandat parlementaire pour une cause autre que le décès, dans les deux mois qui suivent la fin des fonctions. Le parlementaire peut joindre à sa déclaration ses observations sur l’évolution de son patrimoine.

Actuellement, aucune nouvelle déclaration n’est exigée du parlementaire lorsqu’il a établi depuis moins de six mois une déclaration de sa situation patrimoniale.

• Les parlementaires sont soumis à l’obligation de déclaration d’activités, prévue par les articles LO.151-2 et L.O. 297 du code électoral. Tout parlementaire doit ainsi déposer sur le bureau de son assemblée une déclaration, certifiée sur l'honneur exacte et sincère, comportant la liste des activités professionnelles ou d'intérêt général, même non rémunérées, qu'il envisage de conserver, ou attestant qu'il n'en exerce aucune. Cette déclaration d’activités n’est cependant pas tenue de mentionner les activités visées à l’article LO. 148 du code électoral.

Cette dernière disposition prévoit les cas dans lesquels les parlementaires, s’ils sont membres d’un conseil régional, général ou municipal, peuvent être désignés par ces conseils pour représenter la région, le département ou la commune dans des organismes d'intérêt régional ou local, « à la condition que ces organismes n'aient pas pour objet propre de faire ni de distribuer des bénéfices et que les intéressés n'y occupent pas de fonctions rémunérées ». Elle précise que les parlementaires, par ailleurs, peuvent exercer les fonctions de président du conseil d'administration, d'administrateur délégué ou de membre du conseil d'administration des sociétés d'économie mixte d'équipement régional ou local, ou des sociétés ayant un objet exclusivement social lorsque ces fonctions ne sont pas rémunérées.

• La loi, actuellement, n’impose pas de déclaration d’intérêts aux parlementaires. Cette exigence a cependant d’ores et déjà été mise en pratique par le Sénat. En effet, le comité de déontologie du Sénat a adopté en décembre 2011 une communication demandant aux sénateurs de présenter une déclaration d'intérêts. Ces déclarations sont publiées depuis juillet 2012 sur le site du Sénat.

1.1.2. Eléments de droit comparé

• Déclarations de patrimoine et d’intérêts des membres du Gouvernement et des élus

Les déclarations rendues publiques sont mentionnées par un astérisque.

 

Membres du Gouvernement

Membres du Parlement

Autres élus

Déclaration de patrimoine

Déclaration d’intérêt

Déclaration de patrimoine

Déclaration d’intérêt

Déclaration de patrimoine

Déclaration d’intérêt

Andorre

-

-

-

-

-

-

Monaco

-

-

-

-

-

-

Chypre

-

-

-

-

-

-

Danemark

-

-

-

-

-

-

Belgique

oui

oui

oui

oui

-

-

Grèce

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Slovénie

oui

oui

oui

oui

oui

oui

Afrique du Sud

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Allemagne

-

-

oui*

oui*

-

-

Canada

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Croatie

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Etats-Unis

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Italie

oui*

oui*

oui*

oui*

oui

oui

Japon

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Lituanie

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Norvège

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Pays-Bas

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

République tchèque

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Roumanie

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Suisse

oui*

oui*

oui*

oui*

-

-

Suède

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

Espagne

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

oui*

• Déclarations de patrimoine et d’intérêts des membres du Parlement européen et de la Commission européenne

Parlement européen

Commission européenne

Déclaration de patrimoine

Déclaration d’intérêts

Déclaration de patrimoine

Déclaration d’intérêts

Une déclaration de patrimoine est établie et adressée dans les deux mois de l'entrée en fonction au président de la commission pour la transparence financière de la vie politique.

En vigueur depuis le 1er janvier 2012, le code de conduite des députés 2011/2174(REG) est depuis le 15 avril 2013 assorti de mesures d'exécution précisant les règles sur les cadeaux et les sanctions1 en cas de fausse déclaration d'intérêts financiers.

Déclaration des députés : les députés doivent présenter sous leur responsabilité personnelle une déclaration d'intérêts financiers2 au Président avant la fin de la première période de session consécutive aux élections au Parlement européen.

Un député ne peut être élu à des fonctions au sein du Parlement ou de ses organes, être désigné comme rapporteur ou participer à une délégation officielle, s'il n'a pas présenté sa déclaration d'intérêts financiers.

Comité consultatif sur la conduite des députés : un comité consultatif - composé de cinq membres nommés par le Président parmi les membres des bureaux et les coordinateurs de la commission des affaires constitutionnelles et de la commission des affaires juridiques est institué. Ce comité consultatif donne, à titre confidentiel, à tout député qui en fait la demande des orientations sur l'interprétation et l'application des dispositions du code de conduite. Sur demande du Président, le comité consultatif évalue également les cas allégués de violation du code de conduite et conseillera le Président quant aux éventuelles mesures à prendre.

Le code de conduite des commissaires prévoit au sein d’une déclaration d’intérêts à la fois les dispositions relatives à la déclaration d’intérêts, ainsi qu’au titre des revenus et du patrimoine. Les déclarations d’intérêts, financiers et déclaration de patrimoine figure à l'annexe 1 de ce document. La déclaration d’intérêts et de patrimoine est à remplir par chaque commissaire et est accessible sur le site de la Commission.

Cette déclaration comprend tous les intérêts financiers dont les membres de la Commission sont tenus de faire état au titre de leur Code de conduite. Elle comprend par conséquent des informations sur les activités extérieures passées et présentes, sur les intérêts financiers et sur les éléments de patrimoine, ainsi que sur les activités du conjoint. Elle doit être faite lors de l'entrée en fonctions des membres de la Commission et révisée en cours de mandat en cas de modification des données.

1.1.3. Dispositif juridique proposé

a) Le contrôle de la déclaration de situation patrimoniale

L’article 1er du projet de loi organique prévoit que la déclaration de situation patrimoniale est désormais contrôlée par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui rendra publiques ces déclarations. Ces déclarations étaient auparavant contrôlées par la commission pour la transparence financière de la vie politique.

Les déclarations de situation patrimoniale doivent également être assorties d’une déclaration sur l’honneur attestant de la sincérité, de l’exactitude et de l’exhaustivité des renseignements fournis de la même manière et dans les mêmes conditions que celles prévues par le projet de loi ordinaire. Elles obéissent aux mêmes règles de dépôt et de renouvellement.

Les articles LO.135-1 et LO. 297 du code électoral prévoient qu’aucune nouvelle déclaration n'est exigée d’un parlementaire lorsqu'il a établi depuis moins de six mois une déclaration de sa situation patrimoniale en application des articles 1er et 2 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique. Cette dispense est abrogée par le présent projet de loi.

b) La déclaration d’intérêts et d’activités

Les parlementaires seront désormais obligés de déposer une déclaration d’intérêts auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique ; ce document sera fusionné avec celui de leur actuelle déclaration d’activités, et comme tel sera également transmis au bureau de l’assemblée à laquelle ils appartiennent. L’étude d’impact relative au projet de loi ordinaire de même intitulé que le présent projet de loi organique expose le droit existant en matière de déclaration d’intérêts.

La déclaration d’intérêts et d’activités fera état :

- d’une part, des intérêts détenus par le parlementaire à la date de son élection ou acquis par lui au cours des trois ans précédant cette date ;

- d’autre part, des activités professionnelles, ou d’intérêt général, même non rémunérées, que le parlementaire envisage de conserver.

Les parlementaires devront informer la Haute autorité de toute modification substantielle des intérêts qu’ils détiennent au cours de leur mandat. Cette déclaration sera rendue publique par la Haute autorité dans les conditions prévues au II de l’article 1er du présent projet de loi organique, qui sont les mêmes que celles que prévoit l’article 4 du projet de loi ordinaire de même intitulé pour les déclarations des membres du Gouvernement.

Les sanctions en cas de manquement au respect de ces obligations déclaratives sont renforcées. Ainsi, dans les cas où la Haute Autorité aura relevé le caractère incomplet d’une déclaration prévue par les dispositions du présent projet de loi organique ou des évolutions de patrimoine pour lesquelles elle ne disposerait pas d’explications, la Haute autorité, aura, dans un premier temps, la possibilité d’adresser une injonction au parlementaire concerné,, afin que la déclaration soit complétée ou des explications fournies. Dans un second temps, elle pourra saisir le bureau de l’assemblée concernée.

c) Des peines renforcées en cas de manquement

Le fait pour un parlementaire d'omettre sciemment de déclarer une part substantielle de son patrimoine ou d'en fournir une évaluation mensongère qui porte atteinte à la sincérité de sa déclaration était auparavant puni de 30 000 euros d’amende et de l’interdiction des droits civiques.

Le projet de loi alourdit les peines prévues, en punissant désormais le fait d’établir une déclaration fausse de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Sont également encourues à titre complémentaire la peine d’inéligibilité à titre définitif ou d’une durée d’au plus dix ans, telle qu’elle résulte de l’article 131-26 du code pénal et du nouvel article 131-26-1 du code pénal inséré par le projet de loi ordinaire, la peine de privation du droit de vote demeurant encourue pour une durée d’au plus cinq ans, et la peine d’interdiction d’exercer une fonction publique à titre définitif ou pour une durée d’au plus cinq ans, comme le prévoit l’article 131-27 du code pénal.

Par ailleurs, le fait de ne pas se soumettre aux injonctions de la Haute autorité de la transparence pour la vie publique est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

d) Entrée en vigueur du dispositif

A compter de la désignation du président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie politique, les parlementaires disposeront d’un délai de deux mois pour transmettre leur déclaration de situation patrimoniale et leur déclaration d’intérêts.

1.2. De nouvelles règles d’incompatibilité professionnelle applicables aux parlementaires (article 2)

1.2.1. Etat du droit et options

a) Les incompatibilités professionnelles applicables aux parlementaires sont mentionnées dans le code électoral et font l’objet d’une liste précise

Les incompatibilités professionnelles applicables aux parlementaires reposent aujourd’hui sur une logique de compatibilité a priori des activités professionnelles, sauf incompatibilité prévue par la loi organique.

Les incompatibilités professionnelles sont régies par les articles L.O. 142 à L.O. 149 du code électoral. Elles sont identiques pour les sénateurs puisque l’article L.O. 297 renvoie au chapitre relatif aux incompatibilités des députés.

Ainsi, le mandat de parlementaire est incompatible avec :

• l’exercice d’une fonction publique non élective à l’exception des professeurs titulaires de chaires à la date de leur élection et des fonctions de ministre des cultes dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, de la Moselle et de Guyane (article L.O. 142)  ;

• l’exercice de fonctions conférées par un Etat étranger ou une organisation internationale (article L.O. 143) ;

• les fonctions de direction, de membre de conseil d’administration ou de conseil dans les entreprises nationales et dans les établissements publics nationaux, sauf si le parlementaire est désigné en sa qualité de parlementaire ou d’élu local conformément au statut de ces entités (L.O.  145) ;

• les fonctions de direction dans les entreprises privées ayant un lien avec le secteur public (article L.O. 146) ;

• les fonctions de membre de conseil d’administration dans les entreprises privées ayant un lien avec le secteur public, sauf si le parlementaire exerçait cette activité avant le début de son mandat (L.O. 147) ;

• les activités de conseil (sauf si le parlementaire exerçait cette activité avant le début de son mandat), à l’exception des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire qui sont toujours autorisées (article L.O. 146-1).

Tout parlementaire peut continuer à exercer les fonctions de président du conseil d'administration, d'administrateur délégué ou de membre du conseil d'administration des sociétés d'économie mixte d'équipement régional ou local, ou des sociétés ayant un objet exclusivement social lorsque ces fonctions ne sont pas rémunérées.

b) De nouvelles incompatibilités doivent être créées pour éviter tout conflit d’intérêt

L'adaptation du régime des incompatibilités professionnelles a déjà fait l'objet de plusieurs travaux au sein des assemblées. Par exemple, dans le rapport du Sénat « prévenir les conflits d’intérêt pour les parlementaires » de mai 20113, M. Hyest proposait de rendre incompatible avec le mandat de parlementaire l'exercice de nouvelles fonctions de conseil, même lorsque ces fonctions sont exercées dans le cadre d'une profession réglementée. Cette proposition a été reprise par la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique 4(dite « commission Jospin »).

Ces travaux ont permis de souligner qu’il existait un consensus assez fort sur la nécessité d’élargir le champ des incompatibilités professionnelles. En particulier, étendre les incompatibilités aux fonctions de direction dans les sociétés mères ou rendre l’exercice de nouvelles fonctions de conseil incompatibles avec le mandat de parlementaire, même lorsque ces fonctions sont exercées dans le cadre d’une profession libérale réglementée, apparaît souhaitable aux auteurs de ces travaux.

c) Deux options se présentent pour étendre ces incompatibilités

• 1e option : Rendre incompatible l’exercice d’un mandat parlementaire avec toute activité professionnelle

Une première option pourrait consister à interdire toute activité professionnelle, dès lors que l’on exerce un mandat de député ou de sénateur. Cela constituerait la meilleure garantie qu’un parlementaire ne peut se trouver en situation de conflit d’intérêt du fait d’une activité professionnelle exercée simultanément à son mandat de député ou de sénateur.

Cependant, tant les rapports Hyest que Jospin ne préconisent pas à court terme de rendre incompatible a priori, sauf exceptions, l’exercice d’un mandat parlementaire avec une activité professionnelle. La commission Jospin souligne notamment qu’ « une telle réforme de fond devrait être précédée d’une réflexion beaucoup plus large sur le rôle et les moyens des parlementaires ».

Par ailleurs, le rapport Hyest souligne que « le mandat est par nature temporaire et [qu]’il n’est pas une profession ». A cet égard, et sous réserve qu’il n’y ait pas de conflit d’intérêts, le fait qu’un parlementaire puisse maintenir une continuité dans son activité professionnelle, en continuant de l’exercer à temps partiel pendant son mandat, peut permettre dans certains cas de préserver une meilleure assise professionnelle lorsque s’achève son parcours en tant qu’élu.

• 2e option : Identifier les professions dont l’exercice est incompatible avec l’exercice d’un mandat parlementaire

La réflexion engagée par le Gouvernement a conduit à identifier les professions qui, à la lumière des pratiques observées durant ces dernières années, doivent être ajoutées à celles déjà mentionnées dans le code électoral. Le Président de la République a ainsi rappelé récemment la nécessité « d’étendre l’interdiction du cumul d’un mandat parlementaire avec l’exercice de certaines activités professionnelles pour prévenir tout conflit d’intérêts ».

A cet égard, la démarche du Gouvernement vise à étendre la liste des incompatibilités figurant déjà dans le code électoral, en reprenant la logique ayant présidé jusqu’alors afin de la compléter.

L’extension des incompatibilités devra permettre d’éviter le risque que des intérêts financiers priment sur la défense de l’intérêt général. Durant ces dernières années, plusieurs parlementaires ont en effet cumulé leur activité d’élu avec des professions qui, bien qu’étant exercées à temps partiel, leur permettaient de percevoir des rémunérations largement supérieures à leurs indemnités de parlementaires, dans des domaines régulièrement évoqués par la représentation nationale (industrie pharmaceutique, droit des affaires). Il en résulte le risque, pour ces élus, de se sentir contraint de faire primer les intérêts défendus dans le cadre de leur activité la plus rémunératrice. La commission Jospin rappelait à cet égard qu’« un conflit d’intérêts est susceptible de naître lorsqu’un intérêt particulier influence ou paraît influencer le service de l’intérêt général ». L’article L.O. 146-1 du code électoral s’inscrit déjà en partie dans cette logique, en interdisant à tout député de commencer à exercer une fonction de conseil qui n’était pas la sienne avant le début de son mandat. Dans le même temps, cet article prévoit toutefois que cette interdiction n’est pas applicable aux membres des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ; il convient de revenir sur cette exception.

Par ailleurs, l’article L.O. 146 du code électoral prévoit l’incompatibilité des fonctions de dirigeant d’une entreprise lorsque l’activité de cette dernière est principalement fondée sur des prestations pour le compte ou sous le contrôle de l’Etat. Dans cette même logique, il convient de s’interroger sur les incompatibilités à prévoir lorsqu’il ne s’agit pas de la principale activité d’une société, mais que cette activité n’en demeure pas moins importante.

1.2.2. Evolution juridique proposée

Pour compléter la première catégorie d’incompatibilités mentionnées précédemment, le Gouvernement propose d’interdire le cumul d’un mandat parlementaire avec l’ensemble des activités de conseil, sans exception. En outre, il ne sera plus possible aux parlementaires d’exercer des fonctions au sein de sociétés ou d’entreprises dont une part substantielle de l’activité commerciale est entretenue avec l’administration.

À compter de la publication de la présente loi, les parlementaires exerçant les fonctions visées par ces nouvelles incompatibilités disposeront d’un délai de six mois pour y mettre fin.

1.3. Une réforme des règles relatives à l’indemnité des anciens ministres (article 3)

1.3.1. Etat du droit

L’article 5 de l’ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 portant loi organique pour l'application de l'article 23 de la Constitution prévoit que « lors de la cessation de ses fonctions gouvernementales le membre du Gouvernement (…) perçoit une indemnité d'un montant égal au traitement qui lui était alloué en sa qualité de membre du Gouvernement. Cette indemnité est versée pendant six mois, à moins que l'intéressé n'ait repris auparavant une activité rémunérée. »

1.3.2. Evolution juridique proposée

Le projet de loi prévoit la réduction du délai pendant lequel cette indemnité est versée aux anciens membres du Gouvernement. L’indemnité est désormais versée pendant 1 mois, contre 6 mois prévus auparavant. La durée d’un mois correspond à la période à l’issue de laquelle les anciens membres du Gouvernement peuvent retrouver, le cas échéant, leur mandat parlementaire. Cette disposition répond à une exigence d’exemplarité des titulaires de fonctions gouvernementales dans un contexte où tout un chacun est appelé à participer aux efforts de redressement des finances publiques.

L’indemnité ne sera en outre pas due lorsqu’un ancien membre du Gouvernement aura omis de déclarer tout ou partie de son patrimoine ou de ses intérêts.

II. Modalités d’application

2.1. Application outre-mer

2.1.1. Collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution

Le projet de loi organique s’appliquera de plein droit, en vertu du principe d’identité législative, dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution :

- les départements et régions d’outre-mer (Guyane, Martinique, Guadeloupe, Réunion) ;

- les futures collectivités uniques de Guyane et de Martinique à compter de 2015 ;

- le département de Mayotte.

2.1.2. Le projet de loi organique s’appliquera dans les collectivités de l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie

a) Les dispositions de droit commun sont directement applicables dans ces territoires dès lors qu’ils sont régis par le principe de l’identité législative. Tel est le cas des articles 1er, 2 et 3 pour Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon.

b) Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et Polynésie française

Les dispositions organiques du code électoral modifiées par les articles 1er et 2 du projet de loi organique sont applicables à l'élection des députés et des sénateurs dans ces collectivités, en application des articles LO 394-1 et LO 438-2 du même code.

Il convient donc de rendre ces articles 1er et 2 applicables par mention expresse en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna. Tel est l’objet de l’article 5 du projet de loi organique. S'agissant d’appliquer le droit commun sans adaptation, la consultation des collectivités concernées n'est pas requise.

L’article 3 du projet de loi organique (modifiant l'ordonnance du 17 novembre 1958 sur l’indemnité des anciens ministres) relève du fonctionnement des pouvoirs publics constitutionnels. A ce titre, il est applicable de plein droit dans les collectivités de l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie.

2.2. Textes d’application

Articles du projet de loi organique

Objet du décret

Article 1er I 6°

Décret en Conseil d’Etat fixant le modèle, le contenu et les conditions de mise à jour et de conservation des déclarations de situation patrimoniale et d’intérêts.

Article 1er II

Décret en Conseil d’Etat fixant les modalités d’application de l’article L.O. 135-2 du code électoral relatif aux conditions de publication des déclarations des parlementaires (dans sa nouvelle rédaction proposée par le présent projet de loi organique).

2.3. Entrée en vigueur

Les dispositions relatives aux déclarations de patrimoine et d’intérêts des parlementaires (article 1er) entrent en vigueur à compter de la nomination du président de la Haute autorité, soit à la date de publication du décret de nomination. A compter de cette date, les parlementaires disposent d’un délai de deux mois pour établir leurs déclaration de situation patrimoniale et d’intérêts (VI de l’article 1er).

Les dispositions relatives aux incompatibilités professionnelles (article 2) entrent en vigueur le lendemain de la publication de la loi organique. Le parlementaire en situation d’incompatibilité dispose d’un délai de six mois pour mettre fin à l’exercice de sa profession ou de sa fonction incompatible avec son mandat (VII de l’article 2).

L’article 3, relatif à l’indemnité des anciens ministres, et l’article 4, ayant pour effet de soumettre la nomination du président de la Haute autorité à l’avis préalable de la commission chargée des lois constitutionnelles de chacune des deux assemblées, entrent en vigueur le lendemain de la publication de la loi organique.

III. Consultations

Aucune consultation n’était requise, du point de vue constitutionnel, sur les dispositions du présent projet de loi organique.

1 Contrôle et sanctions : Si un rapporteur enfreint les dispositions du code de conduite des députés en matière d'intérêts financiers et de conflits d'intérêts, la commission qui l'a nommé pourra mettre fin à ce mandat, à l'initiative du Président et sur proposition de la Conférence des présidents. Par ailleurs, le Président, après consultation éventuelle du comité consultatif sur le code de conduite, aura la possibilité de donner un blâme voire de suspendre temporairement des activités du Parlement un député qui aurait déclaré de fausses informations.

2 La déclaration d'intérêts financiers, rendue publique sur le site du parlement, doit contenir, entre autres, les informations suivantes, fournies d'une manière précise:

•les activités professionnelles du député durant les trois années ayant précédé son entrée en fonction au Parlement, ainsi que sa participation pendant cette même période aux comités ou conseils d'administration d'entreprises, d'organisations non gouvernementales, d'associations ou de tout autre organisme ayant une existence juridique ;

•toute activité régulière rémunérée exercée par le député parallèlement à l'exercice de ses fonctions, que ce soit en qualité de salarié ou de travailleur indépendant ;

•toute activité extérieure occasionnelle rémunérée (y compris les activités d'écriture, de conférence ou d'expertise), si la rémunération totale excède 5.000 EUR par année civile ;

•tout soutien financier, en personnel ou en matériel, venant s'ajouter aux moyens fournis par le Parlement et qui lui sont alloués dans le cadre de ses activités politiques par des tiers, avec indication de l'identité de ces derniers.

Tout changement influant sur la déclaration devra être signalé au Président du Parlement dans les 30 jours suivant ledit changement.

3 Rapport d'information de MM. Jean-Jacques HYEST, Alain ANZIANI, Mme Nicole BORVO COHEN-SEAT, MM. Pierre-Yves COLLOMBAT, Yves DÉTRAIGNE, Mme Anne-Marie ESCOFFIER et M. Jean-Pierre VIAL, fait au nom de la commission des lois n° 518 (2010-2011), 12 mai 2011.

4  Rapport de la commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, « Pour un renouveau démocratique », novembre 2012.


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