Accueil > Documents parlementaires > Projets de loi > Etudes d'impact
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

PROJET DE LOI

pour une République numérique

NOR : EINI1524250L/Bleue

ETUDE D’IMPACT

9 décembre 2015

Sommaire

Introduction générale 5

TITRE Ier La circulation des données et du savoir 6

Chapitre Ier Economie de la donnée 6

Section 1 Ouverture de l’accès aux données publiques 6

Article 1er Communication de données entre administrations publiques 6

Article 2 Communication des décisions prises sur le fondement d’un traitement algorithmique 10

Articles 3, 4 et 5 Elargissement du champ de diffusion par l’administration 13

Article 6 Principe de libre réutilisation des données pour les SPIC 22

Article 7 Rationalisation du régime de réutilisation des informations publiques 25

Article 8 Missions et pouvoirs de la CADA 29

Section 2 Service public de la donnée 34

Article 9 Création d’un service public de la donnée 34

Section 3 Données d’intérêt général 38

Article 10 Ouverture des données par défaut dans les contrats de délégation de service public 38

Article 11 Ouverture des données dans les conventions de subventions 41

Article 12 Transmission à la statistique publique sous forme électronique d’informations présentes dans certaines bases de données d’organismes privés dans le but exclusif de réaliser des enquêtes statistiques 43

Section 4 Gouvernance 46

Articles 13 à 16 Gouvernance 46

Chapitre II Economie du savoir 48

Article 17 Accès aux travaux de la recherche financée par des fonds publics 48

Article 18 Appariement de fichiers à des fins de statistique publique et de recherche scientifique et historique 63

TITRE II La protection des droits dans la société numérique 70

Chapitre Ier Environnement ouvert 70

Section 1 Neutralité de l’internet 70

Article 19 Définition du principe de neutralité de l’internet 70

Article 20 Auto-hébergement 74

Section 2 Portabilité et récupération des données 76

Article 21 Portabilité et récupération des données 76

Section 3 Loyauté des plateformes 84

Article 22 Principe de loyauté vis-à-vis des consommateurs 84

Article 23 Loyauté et régulation des plateformes 88

Section 4 Information des consommateurs 91

Article 24 Information des consommateurs sur les avis en ligne 91

Article 25 Information des consommateurs sur les débits 94

Chapitre II Protection de la vie privée en ligne 95

Section 1 Protection des données à caractère personnel 95

Article 26 Libre disposition de ses données à caractère personnel 96

Article 27 Droit à l’information sur la durée de conservation des catégories de données traitées 100

Article 28 Exercice en ligne des droits relatifs aux données personnelles 101

Article 29 Missions de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) 103

Article 30 Certificats de conformité 106

Article 31 et 32 Droit à l’oubli pour les mineurs et mort numérique 108

Article 33 Procédure de sanction de la CNIL 113

Section 2 Confidentialité des correspondances privées 115

Article 34 Respect des correspondances privées numériques 115

TITRE III L’accès au numérique 118

Chapitre Ier Numérique et territoires 118

Section 1 Compétences et organisation 118

Article 35 Stratégie numérique des collectivités 118

Article 36 Syndicats mixtes ouverts 120

Section 2 Couverture numérique 121

Article 37 Publicité de la qualité des services numériques 121

Article 38 Principe de calcul des redevances d’usage des fréquences 123

Article 39 Qualité du service téléphonique 125

Chapitre II Facilitation des usages 128

Section 1 Recommandé électronique 128

Article 40 Recommandé électronique 128

Section 2 Paiement par SMS 130

Article 41 Paiement par SMS 130

Section 3 Compétitions de e-sport 132

Article 42 Compétitions de jeu vidéo 132

Chapitre III Accès des publics fragiles au numérique 134

Section 1 Accessibilité des personnes handicapées aux services téléphoniques 134

Article 43 Accueil téléphonique des personnes publiques et des entreprises, offre pour les déficients auditifs 134

Section 2 Accessibilité des personnes handicapées aux sites internet publics 137

Article 44 Accessibilité numérique des services publics 137

Section 3 Maintien de la connexion internet 140

Article 45 Maintien temporaire de la connexion 140

TITRE IV Dispositions relatives à l’outre-mer 143

Articles 46 à 48 143

ANNEXE 1 144

Tableau synoptique des consultations 144

ANNEXE 2 147

Tableau synoptique des décrets d’application 147

Introduction générale

Le Gouvernement a présenté le 18 juin 2015 une « Stratégie Numérique » ambitieuse pour la nation : il s’agit de repenser en profondeur l’action publique à l’aune de cette nouvelle révolution industrielle et sociétale, pour faire de la France une République numérique. Intitulé « La République numérique en actes », ce plan d’action se décline en quatre axes principaux, qui font la devise de cette République numérique : Liberté d’innover, Egalité des droits, Fraternité d’un numérique accessible à tous, et Exemplarité d’un état qui se modernise.

Dans le cadre de ce plan d’action global, le présent projet de loi constitue une composante majeure de la démarche du Gouvernement, destinée à poser les jalons législatifs indispensables aux ambitions avancées. Ce projet de loi résulte d’une large concertation engagée avec l’ensemble des parties prenantes et les modes de concertation choisis, délibérément innovants et interactifs (large concertation publique en ligne organisée par le Conseil National du Numérique, puis consultation publique en ligne sur le projet de texte) illustrent l’engagement résolu en faveur d’une nouvelle « République Numérique ».

Le projet de loi pour une République numérique se structure autour de trois piliers essentiels :

- Le développement de la circulation des données : les « données » représentent aujourd’hui un actif stratégique dans la transformation numérique de la société et de l’économie. L’ouverture et la diffusion des données offrent des opportunités considérables de création de valeurs et de nouveaux usages, dont la France doit se saisir. Le titre Ier du projet de loi comporte ainsi des dispositions structurantes en faveur de la circulation des données et du savoir.

- La protection et la loyauté dans l’environnement numérique : l’État doit rester le garant des conditions de confiance et de protection dans lesquelles l’écosystème numérique se développe. De nouveaux défis apparaissent : gestion des infrastructures numériques, rôle des nouvelles plateformes, caractère parfois très intrusif des services et technologies numériques. Au regard de ces nouveaux risques, il importe que le législateur fixe les règles et garantisse aux citoyens les protections et assurances indispensables. Le titre II du projet de loi établit de nouvelles règles sur plusieurs problématiques majeures : neutralité de l’Internet, loyauté des plateformes, respect de la vie privée en ligne.

- L’égalité d’accès au numérique : le Gouvernement entend renforcer les dispositifs destinés à lutter contre toutes les fractures numériques : accès des territoires et accès des populations les plus fragiles. C’est l’objet du titre III du projet de loi.

TITRE Ier

La circulation des données et du savoir

Chapitre Ier

Economie de la donnée

Section 1
Ouverture de l’accès aux données publiques

Article 1er
Communication de données entre administrations publiques

1. État des lieux

Bien que l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration prévoie que les administrations sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, la CADA a toujours considéré que ce droit « d’accès citoyen » n’était pas ouvert aux personnes publiques.

Le 13 septembre 2012, la CADA a confirmé sa doctrine selon laquelle le droit d’accès instauré par la loi du 17 juillet 1978, à l’inverse de celui régissant les informations environnementales sur le fondement des articles L. 124-1 et suivants du code de l’environnement transposant la directive 2003/4/CE du 28 janvier 2003, n’a pas en l’état du droit vocation à inclure la transmission d’informations entre autorités administratives et qu’il ne lui appartenait d’arbitrer, même de façon consultative, des différends entre autorités administratives.

La CADA a identifié ce point et y a consacré un paragraphe dans son rapport d’activité au titre de l’année 2012. Elle a ainsi recommandé une modification de la loi en ce sens.

Cette interprétation, tirée de la rédaction actuelle de l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration, conduit à traiter de manière plus défavorable les demandes de communication émanant des administrations que celles exprimées par des particuliers.

Cette interprétation n’empêche pas, en elle-même, la communication de données entre les administrations, mais elle ne permet pas de disposer d’un cadre législatif harmonisé relatif à cette communication, ce qui peut prêter à des divergences de pratiques entre les administrations.

En particulier, en l’absence de précision dans la loi d’un cadre législatif relatif à ces échanges, certaines administrations ont pu considérer qu’aucun droit de communication n’existait au profit d’autres administrations, ou que ce droit de communication devait être considéré comme une réutilisation de données publiques, pouvant ouvrir droit à tarification, au sens du chapitre II du titre Ier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal.

Enfin, l’imprécision sur le cadre législatif de la communication des données entre les administrations induit souvent une négociation et la signature d’une convention entre l’administration productrice et l’administration utilisatrice sur le cadre juridique, les conditions de transmission, d’usage, voire de tarification des données transmises, qui constituent des coûts administratifs inutiles et une perte de temps.

2. Objectifs poursuivis

Le présent projet de loi vise à donner aux administrations l’accès aux informations publiques d’autres administrations tout en permettant leur utilisation à des fins de service public autres que celles pour lesquelles elles ont été élaborées.

Le projet d’article vise à renforcer la communication des données entre les administrations et à donner un cadre législatif à ces échanges. Cet article a ainsi pour but de favoriser l’échange d’informations nécessaire au bon fonctionnement des administrations, échange qui participe de la modernisation de l’action publique et contribue à améliorer la prise de décision au sein des administrations.

Il a en effet pu être identifié l’existence de nombreux freins à la bonne circulation des données entre les administrations, ces freins pouvant être budgétaires, sociologiques ou juridiques.

Ces freins entrainent des conséquences sous-optimales en termes de qualité, d’efficience, de réactivité de l’action publique, mais peuvent également susciter des effets de renoncement à la donnée (par méconnaissance ou par abandon face à la complexité d’accès ou le refus opposé par l’administration productrice), ou des stratégies de contournement (par exemple par constitution de bases de données équivalentes à celles produites par une autre administration).

De plus, l’introduction dans la loi d’une obligation de transmission des données entre administrations permettrait de réduire les coûts administratifs liés à la négociation des conditions de transmission des données entre les administrations, en supprimant le temps passé par les administrations à expertiser la possibilité juridique de transmettre des données publiques à une autre administration.

En outre, ce projet d’article participe de l’amélioration de la circulation des données entre les administrations. Il est de nature à engendrer plusieurs externalités positives, notamment des externalités de production, des externalités de consommation et des externalités technologiques. En posant un principe d’obligation de communication entre les administrations, il ne peut que développer les effets de réseau entre les administrations permettant un meilleur usage coordonné des données produites par les administrations, un renforcement de la transparence de l’action publique par ce fait, le développement de projets communs, permettant de réaliser des gains de productivité budgétaire et socioéconomiques.

Enfin, ces nouvelles dispositions mettront fin aux situations parfois aberrantes où la personne qui demande l’accès à un document administratif se voit traitée différemment selon qu’elle se présente à titre personnel ou en tant que représentant d’une autorité administrative.

Cette mesure s’inscrit dans la continuité de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit et la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives, et des évolutions récentes liées à l’ordonnance n° 2015-507 du 7 mai 2015 relative à l'adaptation du secret professionnel dans les échanges d'informations entre autorités administratives et à la suppression de la production de pièces justificatives. Dans ce contexte, l’article 16A de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, codifié depuis à l'article L. 114-8 du code des relations entre le public et l'administration, prévoit que les autorités administratives doivent désormais échanger entre elles toutes informations ou données nécessaires pour traiter les demandes présentées par un usager ou les déclarations transmises par celui-ci en application d'un texte législatif ou réglementaire.

Cependant, le présent projet d’article ne se limite pas aux situations dans lesquelles il s’agit d’une nécessité pour traiter la demande d’un usager.

Etant donné le caractère sensible ou confidentiel de certaines informations, cette obligation d’échange s’applique sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, qui excluent la communication de certains documents, ou qui la réduisent, et en conformité avec l’article L. 114-8 du code des relations entre le public et l'administration. De même, ce principe est sans incidence sur le régime juridique des données couvertes par un secret protégé par la loi qui disposent de conditions particulières d’accès.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Le rapport d’Adnène Trojette sur l’ouverture des données publiques1 a très largement démontré que les administrations sont parmi les principaux réutilisateurs des données publiques. Ce nouveau dispositif bénéficie au fonctionnement interne de l’État, des collectivités, des organismes de protection sociale et de leurs établissements publics en ce qu'elle contribue à faciliter la circulation entre les administrations de données, produites en premier lieu dans le cadre d’une mission de service public. La circulation des données au sein des administrations est une condition essentielle de l’efficacité de leur mission, et le préalable à leur exploitation via de nouvelles approches de type sciences de données (datasciences).

Ces dispositions pourraient produire, à court terme, de nombreux effets favorables en termes de qualité et de précision des politiques publiques au moins à trois niveaux : lors de l’élaboration des évaluations préalables de ces politiques ; lors de la mise en œuvre de ces politiques par la constitution d’outils d’aides à la décision fondés sur l’exploitation des données ; lors de l’évaluation ex post de ces politiques publiques.

Un meilleur accès aux données du service hydrographique et océanographique de la marine renforcerait par exemple la qualité des actions de l’État et de plusieurs opérateurs de l’État en matière de protection des milieux marins et littoraux, de biodiversité et de contrôle des pêches.

Impact sur les collectivités territoriales

Ces dispositions faciliteront notamment les demandes d’informations publiques adressées par les collectivités territoriales aux services de l’État et les demandes d’informations publiques adressées par les services de l’État aux collectivités territoriales.

Sans pouvoir augurer avec précision du nombre de demandes de communication qui émaneraient des administrations suite à la mise en œuvre du nouveau dispositif, il ressort de la base des avis de la CADA, que la commission a eu à traiter, sur la période 2012-2015, une dizaine de demandes de droit d’accès émanant d’autorités administratives. Il apparait donc que le nombre de dossiers traités est modeste, ce qui s’explique par l’absence de cadre législatif relatif à ces échanges. Il ressort également de l’examen des dossiers traités par la commission, que les collectivités territoriales sont dans la grande majorité des cas à l’initiative de ces demandes de communication.

Ainsi, les collectivités territoriales seraient les principales bénéficiaires du nouveau dispositif qui facilitera notamment les demandes de communication d’informations publiques adressées aux services de l’État. Dans ces conditions, l’impact apparait plutôt favorable aux collectivités sans que l’on puisse identifier, à ce stade, de charges trop contraignantes sur celles-ci.

A titre d’exemple, la communication des données du Registre Parcellaire Graphique a pu être demandée par les syndicats intercommunaux chargés d'améliorer les pratiques agricoles afin de diminuer les pollutions d'origine agricole, répondant à un enjeu environnemental majeur. L’accès des collectivités territoriales au répertoire national des associations (RNA) du ministère de l'intérieur, créé par l'arrêté du 24 octobre 2009 dans la démarche de simplification des procédures administratives, pourrait également être ainsi facilité. Un accès élargi à ce registre contenant plus de deux millions d’associations permettrait dès lors une meilleure allocation des ressources pour les collectivités territoriales qui interviennent dans le financement des associations,  et une meilleure connaissance du tissu associatif sur leur territoire.

4. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

5. Outre-mer

L’article 46 du projet de loi rend l’article 1er applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Article 2
Communication des décisions
prises sur le fondement d’un traitement algorithmique

1. État des lieux

La transformation numérique de l’administration et la profusion des données rendent de plus en plus fréquents les recours aux programmes informatiques et aux traitements algorithmiques, qui outillent le travail des agents publics et préparent les décisions des administrations. De nombreux systèmes, fondés sur des traitements algorithmiques, aboutissent à des résultats ou à des outils d’aide à la décision qui impactent la vie des individus.

Si l’article 10 de la Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés prévoit qu’« aucune autre décision produisant des effets juridiques à l'égard d'une personne ne peut être prise sur le seul fondement d'un traitement automatisé de données destiné à définir le profil de l'intéressé ou à évaluer certains aspects de sa personnalité », et si le 5° de l'article 39 de cette même loi donne à toute personne physique justifiant de son identité le droit d'interroger le responsable d'un traitement de données à caractère personnel en vue d'obtenir, sous réserve de ne pas porter atteinte au droit d'auteur, les informations permettant de connaître et de contester la logique qui sous-tend le traitement automatisé en cas de décision prise sur le fondement de celui-ci et produisant des effets juridiques à l'égard de l'intéressé, ces dispositions ne permettent pas de garantir une complète information du citoyen.

En effet, de nombreux programmes utilisant des traitements algorithmiques traitent des données qui ne sont pas toujours à caractère personnel, et qui – sans constituer l'unique fondement d’une décision – fournissent des éléments sur lesquels s’appuie la restitution finale des résultats du traitement.

Par ailleurs, les décisions individuelles faisant intervenir des traitements algorithmiques peuvent concerner aussi des personnes morales, lesquelles ne bénéficient pas des dispositions de la loi du 6 janvier 1978.

Ainsi, les seules dispositions de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978, par leur champ, portée et limites, qui sont exposés dans le tableau ci-dessous, ne permettent pas d'assurer une information complète des personnes soumises à des traitements algorithmiques.

Art. 39 de la loi du 6 janvier 1978

Art. 2 du présent projet de loi

Personnes physiques

Toute personne, physique ou morale

Traitements automatisé s'inscrivant dans le cadre d'un traitement de données à caractère personnel

Tout traitement algorithmique fondement d’une décision individuelle

Informations permettant de connaître et de contester la logique qui sous-tend le traitement automatisé

Règles définissant le traitement algorithmique ainsi que les principales caractéristiques de sa mise en œuvre

Le projet d’article vient ainsi utilement compléter le cadre juridique de la loi du 6 janvier 1978.

2. Objectifs poursuivis

Le présent article vise à renforcer la transparence de l’action publique, en ajoutant une possibilité nouvelle pour les citoyens et les personnes morales de comprendre les fondements algorithmiques de décisions qui les concernent. Ainsi, le citoyen qui fait l'objet d'une décision individuelle prise sur le fondement d'un traitement algorithmique, que ce traitement s'inscrive dans le cadre d'une traitement de données à caractère personnel ou non, aura le droit d'interroger l'administration afin de connaitre les règles gouvernant le traitement algorithmique ainsi que les caractéristiques principales de sa mise en œuvre (quel est le fonctionnement du traitement, quelles règles et bases de calcul ont été utilisées, quels paramètres ont été mis en œuvre...)

A titre d’exemple, le système Admission Post Bac (APB) permet d’affecter les étudiants dans des filières d’enseignement supérieur. Le recours à ce logiciel, reposant sur des traitements algorithmiques, peut susciter des interrogations sur les mécaniques et les règles de fonctionnement qui conduisent à un résultat décisif pour l’avenir des étudiants : comment ce système est-il paramétré ? Quelle est la part de tirage au sort dans la procédure d’affectation pour les filières les plus demandées ? Comment s’assurer qu’il n’est pas possible de « tricher » avec le système ? 

Les dispositions combinées du projet de loi et de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 permettront aux personnes tant physiques que morales, d'avoir une information complète sur les règles mises en œuvre dans le cadre d'un traitement algorithmique, les principales caractéristiques de celui-ci : la loi leur permettra ainsi, de façon effective, de connaître et, le cas échéant, de contester la logique algorithmique présidant à la prise de décision.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Si un citoyen en fait la demande, l’administration devra donc être en mesure de communiquer les caractéristiques du traitement, notamment les objectifs, les finalités et les contraintes du système, et communiquer à l’individu concerné par la décision un exposé des paramètres, principales caractéristiques et des règles générales de l’algorithme, ainsi que celles qui lui ont été appliquées particulièrement.

Impact sur les collectivités territoriales

Ces dispositions s’appliqueront similairement aux collectivités territoriales.

4. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

5. Textes d’application et Outre-mer

Il est prévu un décret en Conseil d’État qui fixera les conditions d’application du présent article, afin de vérifier que le dispositif mis en place comporte toutes les garanties nécessaires en matière notamment de respect des secrets protégés par la loi.

L’article 46 du projet de loi rend le présent article applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises. L’article 43 modifie, en conséquence, les articles L. 552-8, L. 553-2, L. 562-8, L. 563-2, L. 574-1, L. 574-5 du code des relations entre le public et l’administration.

Articles 3, 4 et 5
Elargissement du champ de diffusion par l’administration

1. État des lieux

1.1 Eléments juridiques

La loi du 17 juillet 1978, codifiée dans le code des relations entre le public et l'administration, prévoit deux régimes d’accès aux documents administratifs : la communication et la diffusion publique. Cependant, elle ne prévoit pas l’obligation pour les administrations et personnes privées chargées d’une mission de service public de diffuser publiquement les documents qui sont librement communicables. En effet, l’alinéa 1er de l’article L. 312-2 du code précité prévoit une diffusion obligatoire seulement pour certains documents déterminés comportant une interprétation du droit positif, telles que les directives, instructions, circulaires. L'article L. 321-1, quant à lui, prévoit une simple possibilité de diffusion des autres documents administratifs.

1.2 État d’avancement de la politique française d’open data

Le Gouvernement s’est engagé dans une politique ambitieuse d’ouverture et de partage des données publiques (« Open Data »). Cette priorité a été inscrite dans la Charte de déontologie du 17 mai 2012 signée par tous les membres du Gouvernement dès le premier Conseil des ministres du quinquennat. Elle s’est ensuite traduite dans les décisions prises lors des Comités interministériels pour la modernisation de l’action publique des 18 décembre 2012, 2 avril 2013, 17 juillet 2013 et 18 décembre 2013, mais aussi par l’adoption lors du séminaire gouvernemental sur le numérique du 28 février 2013 d’une ambitieuse feuille de route stratégique. C’est également un engagement porté par la France avec l’adoption le 18 juin 2013, par les chefs d’État et de Gouvernement du G8, de la Charte du G8 pour l’ouverture des données publiques. Par ailleurs, la France a rejoint le « Partenariat pour le gouvernement ouvert » dont elle prendra la présidence à l’automne 2016. Dans ce cadre, elle a remis son plan d’action national 2015-2017, qui comprend plusieurs engagements relatifs à l’ouverture des données.

1.3 Eléments de droit comparé

La Finlande est un exemple intéressant d’accès libre et ouvert aux documents administratifs et aux données publiques. L’accès aux archives publiques y est garanti juridiquement depuis la loi Access to Public Records de 1766. La Finlande a ouvert en 1951 le droit d’accès aux documents administratifs avec la loi sur la Publicity of Official Documents. C’est en 1999 que sont établies les bases juridiques de l’ouverture des données par défaut avec la loi sur l’Openness of Government Activities (n° 621/1999), modifiée en 2002 par la loi n° 1060/2002. Cette loi introduit un principe d’ouverture selon lequel tous les documents officiels sont libres de droit sauf indication contraire. Cette qualification déclenche automatiquement non seulement le droit d’accès aux documents, mais aussi l’obligation pour les autorités d’en promouvoir l’accès, la diffusion et de mettre en place de bonnes pratiques de gestion de l’information. La loi prévoit que cette diffusion doit être libre et facile et qu’elle peut avoir lieu en ligne.

La Grèce a consacré dans la loi de 2013 du « Transparency Program » l’obligation pour les autorités de diffuser activement les données publiques, au-delà des demandes individuelles d’accès à l’information. Cette loi oblige ainsi le Gouvernement à publier en ligne un ensemble de données administratives, juridiques, budgétaires et géographiques (22 domaines spécifiques). La loi prévoit que ces actes et décisions administratives ne deviennent valides qu’après avoir été publiés en ligne. Aussi, selon cette législation, les documents téléchargés ont-ils statut de version officielle et prévalent sur le reste des versions disponibles.

2. Objectifs poursuivis

Le présent projet de loi vise à augmenter le volume de documents administratifs mis en ligne par les administrations dans le cadre de la politique d’open data, afin d’accroître la transparence des autorités publiques, d’améliorer les services publics et de stimuler le développement de nouvelles activités économiques.

A cette fin, le projet de loi élargit les obligations de diffusion spontanée des documents administratifs prévues aux articles L. 312-1 et L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration. L’article concerne des documents qui étaient déjà communicables à tous aujourd’hui en application du droit d’accès aux documents administratifs, mais qui devaient être expressément demandés par les citoyens : ces documents devront désormais être publiés d’office par les administrations et seront ainsi plus largement accessibles.

L’article prévoit ainsi quatre nouvelles obligations de diffusion publique en ligne pour les documents administratifs disponibles sous format électronique et qui sont déjà communicables à toute personne en application du droit d’accès aux documents administratifs :

a) Diffusion des documents communiqués par l’administration à la suite d’une demande formulée par une personne privée ;

b) Diffusion des principaux documents détenus par chaque administration, qui doivent déjà être répertoriés aujourd’hui en vertu de l’article 17 de la loi du 17 juillet 1978 ;

c) Diffusion des bases de données produites ou reçues par chaque administration ainsi que de leur contenu ;

d) Diffusion des données dont la publication présente un intérêt économique, social ou environnemental.

Cette avancée aura pour conséquence de limiter la communication sur demande des documents administratifs existant sous format électronique, qui seront rendus librement accessibles par Internet.

Avec le numérique, l’administration entre dans une nouvelle logique, celle de la mise à disposition des données, dans laquelle elle doit avoir l’initiative de la transparence.

Cette politique constitue un axe essentiel de la construction d’un gouvernement plus ouvert et plus efficace. Il s’agit donc d’une dimension importante de la vie démocratique et de la modernisation de l’action publique. C’est aussi un important levier de stimulation du dynamisme économique et de l’innovation.

L’article 3, supprime les dispositions de l’article L. 312-1 du CRPA relatives à la publication de documents administratifs comportant des données personnelles ou des mentions couvertes par les articles L. 311-5 et L. 311-6 : ces dispositions sont remplacées par celles introduites par le II de l’article 4, qui crée un nouvel article L. 312-1-2 du même code, ces dispositions s’insérant ainsi mieux dans le nouveau dispositif mis en œuvre par le projet de loi.

L’article 5 fixe les délais de mise en œuvre du nouveau dispositif et précise que les documents administratifs sont communiqués, et désormais diffusés, sous réserve des droits de propriété littéraire et artistique.

3. Nécessité de légiférer

La démarche suivie jusqu’ici par la politique française d’open data a reposé sur des outils non contraignants pour les administrations publiques. Malgré les succès obtenus, il est nécessaire désormais d’accroître les obligations légales pesant sur les administrations pour franchir une nouvelle échelle dans la diffusion en ligne des informations publiques qu’elles détiennent.

Dans la mesure où ces dispositions modifient la partie législative du code des relations entre le public et l'administration, le recours à la voie législative est nécessaire.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impacts économiques et sociaux

Selon le rapport établi par Graham Vickery2, l’ouverture des données publiques au sein de l’union européenne aurait généré une activité économique directe (réutilisation) de 32 Md€ en 2010. Le même rapport évaluait l’impact économique agrégé direct et indirect d’une ouverture plus large des données publiques et d’un accès facilité à ces données à environ 200 Md€ annuels (soit 1,7% du PIB européen). Au Royaume-Uni, l’un des pays en pointe de l’ouverture des données publiques, une étude indépendante chiffrait à 1,8 Md£ (0,1% du PIB britannique) le gain économique annuel direct du programme gouvernemental « open data », et à 6,8 Md£ les gains directs et indirects (0,4% du PIB britannique)3.

L’ouverture des données (open data) génère de la valeur économique et sociale à travers quatre mécanismes principaux4 : l’efficience par la réduction des coûts de transaction, l’innovation, la réduction des asymétries d’information et la collaboration.

L’open data permet tout d’abord une meilleure utilisation, par les acteurs publics et privés, des ressources disponibles. Toute transaction économique engendre des coûts liés à sa réalisation (coût de recherche d’information notamment). En mettant à disposition librement et gratuitement les données publiques, on réduit ces coûts de transaction, tant dans leur phase amont que dans la transaction elle-même. La gratuité des données et leur mise à disposition dans des formats libres et ouvertes via une plateforme accessible à tous (par exemple data.gouv.fr) est source d’efficience et d’efficacité, tant pour les administrations que pour les acteurs privés. Plusieurs expériences viennent étayer ce mécanisme de création de valeur. En Australie, les coûts de transaction induits par la vente et la distribution des données géographiques australiennes a été évalué, avant leur mise à disposition libre et gratuite en 2002, entre 17% et 33% des revenus. Le gain annuel de cette ouverture a été évalué à 1,7 million de dollars par an pour la seule réduction des coûts de transaction5. Au Danemark, le gouvernement a lancé un programme nommé « Basic Data ». Il s’agit de mettre en place une infrastructure informationnelle autour de trois bases de données de référence (registres-clés), librement et gratuitement disponibles. Les gains de ce projet sont estimés à 35 millions d’euros annuels pour le secteur public (meilleure efficience) et 70 millions d’euros pour le secteur privé6

Le second mécanisme de génération de valeur est lié à l’utilisation, par les secteurs public et privé, des données libres et ouvertes pour créer de nouveaux produits et services (innovation). Aux Pays-Bas, l’ouverture des données météorologiques a permis la création d’un écosystème de ré-utilisateurs professionnels très dynamique: le revenu des acteurs privés a augmenté de 400%, le nombre d’utilisations de ces données de 300%. Au final, ces activités ont généré un retour de 35 millions d’euros pour les finances publiques néerlandaises, sous la forme d’impôts et de taxes additionnels7.

Plusieurs études européennes montrent que la baisse d’une redevance ou sa suppression entraîne mécaniquement une augmentation de la réutilisation des données concernées8. Par exemple, le passage à la gratuité du référentiel à grande échelle de l’IGN pour les organismes chargés d’une mission de service public administrative, a entraîné une multiplication par 20 des volumes de données téléchargées, soit un bénéfice social estimé à 114 M€/an, pour un manque à gagner de 6 M€/an de redevances environ.9

Le troisième mécanisme générateur de valeur est lié à la réduction de l’asymétrie d’information par une plus grande transparence. Il y a asymétrie d’information quand un acteur possède une information plus complète, ou de meilleure qualité, que les autres acteurs participant à une transaction ou une communication. Cela aboutit à des situations non optimales. Les données ouvertes permettent de réduire ces asymétries à plusieurs niveaux. Au niveau macroéconomique, la transparence est un outil de lutte contre la corruption reconnu notamment par la Banque mondiale. Au niveau microéconomique, la mise en ligne de données sur les marchés publics permet à tous les acteurs de disposer du même niveau d’information. Les répondants peuvent connaître le dernier attributaire d’un marché public et les conditions du marché, leur permettant ainsi de mieux dimensionner leur réponse. Le nombre et la qualité des réponses peut être supérieure, ce qui est aussi une condition d’efficacité de l’achat public.

Enfin, l’open data crée les conditions d’une collaboration entre de multiples acteurs, tant publics que privés. La collaboration génère des économies d’échelle. Ainsi, la plateforme data.gouv.fr permet à chacun d’enrichir, d’améliorer et de repartager un jeu de données. Depuis fin 2013, de nombreux exemples d’enrichissement ont été documentés. Le fichier des accidents corporels de la circulation a fait l’objet de multiples améliorations par les ré-utilisateurs : nettoyage, correction des doublons, ajout des codes géographiques (INSEE et codes postaux). De même, les utilisateurs du site ont pu signaler les erreurs aux producteurs et proposer des corrections (signalement d’erreurs de géocodage, d’adresses absentes ou incomplètes, de données manquantes), enclenchant ainsi une dynamique d’amélioration continue de la qualité des données.

4.2 Impacts sur les administrations de l’État

A titre liminaire, il convient de préciser que les nouvelles obligations pour les administrations de diffuser en ligne leurs documents et données ne les contraignent en aucune manière à numériser leurs documents sur support papier. En effet, le projet d’article 4 prévoit expressément que les documents sont diffusés publiquement en ligne uniquement "lorsqu’ils sont disponibles sous forme électronique". Ceci est tout à fait en cohérence avec les règles actuellement en vigueur, le droit d'accès aux documents administratifs n’ayant ni pour objet ni pour effet de contraindre l’administration à établir un document nouveau pour répondre à une demande ou, en l'occurrence, pour en assurer la diffusion. Le document doit ainsi exister en l’état ou pouvoir être obtenu par un traitement automatisé d’usage courant :

- Le document doit exister en l’état : le Conseil d’État, dès le début des années 1980, avait posé le principe selon lequel le droit à communication posé par l’article 2 de la loi du 17 juillet 1978 ne s’appliquait qu’à des documents existants. Par conséquent l’administration n’est tenue, lorsqu’elle est saisie d’une demande tendant à la communication d’un dossier qui n’existe pas en tant que tel, ni « de faire des recherches en vue de collecter l’ensemble des documents éventuellement détenus »10, ni d’établir un document en vue de procurer les renseignements ou l’information souhaités11. La communication peut donc être refusée s’agissant de documents à confectionner, par le biais d’un traitement quelconque, de recherches, d’une synthèse, d’une analyse12.

- ou pouvoir être obtenu par un traitement automatisé d’usage courant : depuis la loi relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (DCRA) du 12 avril 2000, l’article 1er de la loi de 1978 impose la communication lorsque le document n’existe pas en l’état mais peut être obtenu par un traitement automatisé d’usage courant (avis CADA n° 20001636 du 25 mai 2000) : il s’agit des documents obtenus en ayant recours à un programme informatique de maniement aisé et à la disposition du service qui détient la base de données. L’ordonnance de 2005 a modifié la formulation de l’article 1er sans changer le droit applicable : celui-ci mentionne désormais les documents « quel que soit le support utilisé pour la saisie, le stockage ou la transmission des informations qui en composent le contenu ». Cette modification n’a modifié en rien la position de la CADA qui apprécie toujours l’existence du document en vérifiant s’il peut être obtenu par un traitement automatisé d’usage courant. En revanche, dès lors que les informations sollicitées doivent, pour être extraites d’un fichier informatique, faire l’objet de requêtes informatiques complexes ou d’une succession de requêtes particulières qui diffèrent de l’usage courant pour lequel ce fichier a été créé, l’ensemble des informations sollicitées ne peut être regardé comme constituant un document administratif existant (conseil CADA n° 20133264 du 10/10/2013). Le caractère complexe du traitement pourra s'apprécier au regard du temps passé par les agents à le concevoir (conseil 20141989 du 18/09/2014).

L’article 4 du projet de loi s’inscrit pleinement dans le dispositif fixé par cette jurisprudence, qu’il n’a aucunement vocation à modifier.

Ainsi, ne saurait être soumise à l’obligation de diffusion une base de données contenant des données personnelles dont l’anonymisation, qui peut s’avérer parfois extrêmement complexe, excèderait un traitement automatisé d’usage courant. D’autres procédés d’anonymisation, au contraire, n’iront pas au-delà d’un traitement automatisé d’usage courant dès lors qu’il suffira uniquement d’occulter un champ.

A ce propos, concernant l’obligation de publication de documents administratifs dans un standard ouvert aisément réutilisable, et si l’on prend pour exemple les documents créés par un logiciel de traitement de texte, soit le document existe en l’état dans ce standard, tel que le préconise d’ores et déjà le référentiel général d’interopérabilité qui s’impose à l’ensemble des autorités administratives, soit il est dans un format dit “propriétaire”. Dans ce cas, la conversion du format “propriétaire” en standard ouvert aisément réutilisable, pourra très facilement être réalisée de façon unitaire ou par lots (grâce à une macro simple à mettre en œuvre) à l’aide d’un logiciel gratuit, soit à l’aide d’un logiciel payant (quelques dizaines d’euros) qui pourra en quelques clics convertir par lots de nombreux documents. Dans un cas comme dans l’autre, cette conversion devra toujours être regardée comme un traitement automatisé d’usage courant.

En ce qui concerne la publication, les nouvelles obligations des documents administratifs prévues par le présent article seront mises en œuvre facilement au plan technique grâce à la plateforme ouverte des données publiques, data.gouv.fr. Cette plateforme est déjà mise aujourd’hui à disposition des administrations d’État, des opérateurs et des collectivités locales pour la diffusion publique en ligne de leurs données. Quelques minutes suffisent pour créer le compte d’une organisation et mettre en ligne (en l’hébergeant ou en référençant une URL existante) un jeu de données. Data.gouv.fr accueille aujourd’hui près de 21 000 jeux de données, issus de 350 producteurs différents, dont les ministères, les grands producteurs (IGN, INSEE, Meteo-France) et les collectivités territoriales.

Par ailleurs, la diffusion pourra en outre être effectuée par une mise en ligne sur le site internet de l’administration concernée, ou sur une autre plateforme dédiée (telle que les portails open data propres créés par un certain nombre de collectivités locales ou d’organismes publics). La mission Etalab met également à disposition un guide de publication à destination des administrations.

La circulaire du 26 mai 2011 relative à la création du portail data.gouv.fr prévoit, dans son annexe IV, que chaque ministère désigne un interlocuteur unique pour la mission Etalab afin de faciliter le recensement et la transmission des informations publiques de son administration. Cette personne est placée sous l’autorité directe et immédiate du secrétaire général du ministère. Le réseau des correspondants « Open Data » est animé par la mission Etalab, qui les réunit sur une base mensuelle.

De même que les administrations centrales, les services déconcentrés de l’État peuvent aisément partager leurs données sur la plateforme data.gouv.fr en quelques clics seulement. Ces données peuvent être hébergées ou uniquement référencées par le site à partir de plateformes existantes.  

En particulier, une passerelle a été mise en place pour référencer automatiquement les données environnementales et géographiques concernées par les 34 thématiques de la Directive européenne Inspire13, qui pousse les très nombreux systèmes d’information géographique d’Europe à converger vers les mêmes standards pour faciliter la circulation et l’interopérabilité des données. Son large périmètre porte sur de nombreuses données de Directions Départementales des Territoires (DDT) ou de Directions Régionales de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL), qui sont ainsi déjà présentes sur la plateforme.

Enfin on peut considérer que la diffusion progressive des principales bases de données existant au niveau national, généralement alimentées à partir des données collectées ou renseignées par les services déconcentrés de l’État, n’induira pas de charge supplémentaire pour eux. 

Faisabilité de l’utilisation de standards ouverts

En application du présent article, les administrations publiques devront publier des documents dans un standard ouvert aisément réutilisable.

Il convient tout d'abord de différencier le "standard14" de la "norme", cette dernière étant publiée par un organisme de normalisation officiellement agréé par un État, ce qui n'est pas toujours le cas du "standard".

Le présent projet de loi privilégie les termes de "standard ouvert" à ceux de "format ouvert" pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, le terme de "format" apparaît comme plus générique que "standard", qui est plus précis et qui, de plus, bénéficie d'une définition légale dans l'article 4 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. Au sens de cette loi, "On entend par standard ouvert tout protocole de communication, d'interconnexion ou d'échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d'accès ni de mise en œuvre."

Par ailleurs, les termes de "standard ouvert" sont consacrés dans le référentiel général d'interopérabilité (RGI), qui s'applique à l'ensemble des autorités administratives, en vertu de l’ordonnance du 8 décembre 2005 et du décret n° 2007-284 du 2 mars 2007. Les systèmes d’information doivent donc déjà être mis en conformité avec le RGI, qui prévoit notamment le recours à des standards ouverts. La notion de format « réutilisable » ne recouvre pas entièrement celle de format ouvert. En effet, du point de vue du RGI, le PDF est un standard ouvert, mais en pratique la réutilisation des données contenues dans un PDF est très difficile. Par contre, le même RGI recommande l’usage du format Open Document plutôt que le format concurrent proposé par Microsoft.

Enfin, le "standard", qui emporte à la fois les notions d'élément de référence, de règle ou de modèle, sous-entend une large adhésion et l'emploi par une grande communauté d'acteurs et est, en soi, porteur d'interopérabilité et de facilité de réutilisation, là où le "format ouvert" reste extrêmement générique et peut tout à fait n'être utilisé que par une partie marginale de l'écosystème et être, de fait, d'une réutilisation beaucoup moins aisée.

4.3 Impact sur les collectivités territoriales

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, a créé, par son article 106, de nouvelles obligations pour les collectivités territoriales et les communes de Nouvelle-Calédonie relatives à la transparence de leurs données.

Ainsi, les collectivités territoriales, et les communes de Nouvelle-Calédonie, de plus de 3 500 habitants ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre auxquels elles appartiennent sont tenues de rendre accessibles en ligne les informations publiques mentionnées à l'article 10 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, lorsque ces informations se rapportent à leur territoire et sont disponibles sous forme électronique. Il est en outre précisé, que ces informations publiques sont offertes à la réutilisation dans les conditions prévues au chapitre II du titre Ier de la loi du 17 juillet 1978 précité.

Dans ces conditions, et dans la mesure où les dispositions prévues par l'article 106 de la loi NOTRe sont tout à fait à même de répondre aux objectifs fixés par l'article 3 du projet de loi, les collectivités territoriales et les communes de Nouvelle-Calédonie ainsi que les EPCI à fiscalité propres sont exclus du dispositif, le projet de loi ne créant aucune obligation nouvelle pour ces administrations.

En outre, pour tenir compte des difficultés de mise en œuvre que les règles prévues par le projet d’article 4 pourraient présenter pour les administrations dotées de moyens humains limités, une exclusion est également prévue pour les personnes morales publiques ou privées de petite taille, définies comme ayant un nombre d'agents ou de salariés inferieur à 250. Le seuil retenu permet de garantir que seuls des organismes disposant d’un service informatique suffisamment structuré pour mettre en œuvre les nouvelles obligations de publication y seront soumis. Cette disposition permettra notamment de ne pas inclure dans le champ d’application du présent article les établissements publics locaux de petite taille, en cohérence avec l’exclusion des collectivités territoriales les plus petites du champ d’application de l’article 106 de la loi NOTRe. En ce qui concerne les organismes de droit privé chargés d’une mission de service public, le seuil retenu correspond au seuil de déclenchement de plusieurs obligations déjà prévues par le droit du travail ou le droit fiscal (par exemple les dispositions de l’article 230 H du code général des impôts).

5. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

6. Textes d’application et outre-mer

Un décret en Conseil d’État fixera les modalités d’applications de l’article 4.

La date mentionnée à l’article 5 sera fixée par voie de décret.

L’article 46 du projet de loi rend les présents articles applicables en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Article 6
Principe de libre réutilisation des données pour les SPIC

1. État des lieux

L’ordonnance du 6 juin 2005 prise pour la transposition de la directive 2003/98/CE du 17 novembre 2003 avait supprimé le principe d’interdiction de réutilisation commerciale des documents administratifs posé par l’ancien article 10 de la loi du 17 juillet 1978 et créé le chapitre II reconnaissant explicitement le principe de libre réutilisation des informations publiques. La nouvelle rédaction de l’article 10 a affirmé le principe de libre réutilisation de ces informations « par toute personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus ».

Cette formulation exclut du champ d’application de ce principe de libre réutilisation trois types d’informations : celles dont la communication ne constitue pas un droit (sauf si elles font l’objet d’une diffusion publique), celles produites ou reçues par les administrations dans l’exercice d’une mission de service public à caractère industriel ou commercial, enfin celles sur lesquels des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle.

Du point de vue de la communication des données, le régime des SPIC peut donc être qualifié d’hybride. Les organismes chargés de la gestion d’un SPIC font partie, quel que soit leur statut, des « administrations » au sens de l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l'administration, régies par le droit de communication des documents administratifs. Tous les documents produits ou reçus dans le cadre de leur mission de service public doivent être communiqués à quiconque en fait la demande – sous réserve des exceptions énumérées par les articles L. 311-5 et L. 311-6, notamment les documents dont la communication porterait atteinte au secret industriel et commercial, exception qui joue un rôle important pour les SPIC. Alors que pour les services publics administratifs, le droit de communication coïncide avec la liberté de réutilisation, il en est dissocié pour les SPIC en raison de l’exception b) prévue à l’article 10 de la loi du 17 juillet 1978. L’exclusion des données des SPIC limite fortement le champ des réutilisations d’informations publiques, réduisant ainsi les bénéfices potentiels de la politique d’open data.

Par ailleurs, l’article 10 de la loi prévoit que l’échange d’information entre les autorités, aux fins de l’exercice de leur mission de service public, ne constitue pas une réutilisation au sens de la loi du 17 juillet 1978, c’est-à-dire que les conditions de réutilisations posées par le chapitre II de la loi du 17 juillet 1978 ne s’appliquent pas aux autorités.

2. Objectifs poursuivis

Les deux objectifs de l’ouverture des données publiques, la transparence de l’action publique et le développement économique, sont aussi pertinents pour les SPIC que pour les SPA. Pour le citoyen, il est aussi intéressant de savoir comment sont rendus les services publics de transport ou de distribution de l’eau que ceux de l’éducation ou de la police. Du point de vue du développement économique, les données des SPIC ont une valeur certaine, puisqu’elles touchent à des services essentiels utilisés par l’ensemble de la population. En outre, à la différence des SPA, le développement économique entre dans l’objet même des SPIC : si la puissance publique décide de prendre en charge une activité de nature industrielle ou commerciale, c’est parce qu’elle estime que son intervention sera favorable au développement économique de la collectivité. Dans la mesure où l’ouverture des données favorise le développement de nouvelles activités, elle entre pleinement dans la vocation des SPIC. Plusieurs SPIC, comme la SNCF, la RATP ou le Centre des musées nationaux, se sont d’ailleurs engagés de manière volontaire dans des démarches d’ouverture des données.

Le présent article vise donc à autoriser la réutilisation des informations publiques produites ou reçues dans le cadre des missions de service public industriel ou commercial. A cette fin, il prévoit un principe général de libre réutilisation des informations publiques des SPIC.

Champ d’application du dispositif juridique proposé

L’objectif poursuivi par l’ensemble du projet de loi consiste à créer un cadre législatif plus cohérent. Cette simplification se déroule en deux étapes :

- Premièrement, il s’agit d’harmoniser le champ des documents administratifs librement communicables et celui dont l’État, les collectivités territoriales et les personnes morales de droit public ou de droit privé chargées d’une mission de service public doivent, spontanément, assurer la diffusion.

- Dans ce cadre, la suppression de la deuxième exception est justifiée dans la mesure où les documents produits ou reçus par les personnes mentionnées à l’article 1er de la loi dans l’exercice d’une mission de service public à caractère industriel ou commercial revêtent effectivement un caractère administratif (voir par exemple, pour la SNCF, avis CADA n° 20141034 du 10 avril 2014) et doivent donc pouvoir être réutilisés dans les mêmes conditions que les autres documents administratifs.

D’autre part, le projet de loi réaffirme le principe selon lequel l’ensemble des informations publiques qui ont été communiquées ou diffusées sont librement réutilisables à d’autres fins que la mission de service public pour laquelle elles ont été produites ou reçues. Ce principe rappelle que sont réutilisables les informations qui sont accessibles, soit par la communication, soit par la diffusion publique.

Il convient d'ajouter que le nouveau dispositif proposé respecte l’adage Specialia generalibus derogant, non generalia specialibus, selon lequel les règles spéciales dérogent aux règles générales. Même si les règles générales prévues par l'actuel projet de loi sont postérieures à certaines dispositions spéciales préexistantes, le présent projet n'a ni pour objet, ni pour effet de les abroger. Ainsi, l’article 4 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, qui a instauré des règles d'accès aux données nécessaires à l'information du voyageur créant ainsi un régime spécifique de l’open data dans le domaine des transports ne se verra pas impacté par les dispositions du présent article.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1 Impacts généraux

Les SPIC peuvent être assurés par quatre catégories de personnes :

- L’État, les collectivités territoriales ou leurs groupements, qui les exploitent directement sous la forme d’une régie.

- Les établissements publics industriels et commerciaux (EPIC), qui sont placés sous la tutelle de l’État ou d’une collectivité territoriale. Parmi les EPIC nationaux, on trouve certaines grandes entreprises publiques ayant conservé ce statut (SNCF, RATP, les grands ports maritimes), des institutions culturelles (Opéra de Paris, Comédie française, Centre des musées nationaux), des institutions financières publiques (Bpifrance, AFD) et des institutions nationales diverses telles que le CEA, le CNES ou encore l’ADEME.

- Les personnes de droit privé gérant un service public dans le cadre d’une relation contractuelle avec une personne publique. Ce contrat peut être un marché de service public, lorsque la rémunération de la personne privée est assurée principalement par le paiement d’un prix, ou une délégation de service public (DSP), lorsque la rémunération est substantiellement liée aux résultats du service. Dans le cadre de la transposition de la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution des contrats de concession, il est prévu de remplacer la notion de DSP par celle de concession de service public, dont la définition resterait proche.

- Les personnes de droit privé gérant un service public en vertu d’une disposition législative ou réglementaire. C’est notamment le cas d’anciens EPIC devenus des entreprises de droit privé, comme La Poste ou EDF.

Pour toutes ces catégories, le SPIC se distingue du service public administratif, selon la jurisprudence du Conseil d’État (CE Ass., 16 novembre 1956, Union syndicale des industries aéronautiques), par la réunion de trois caractéristiques qui l’apparentent à une entreprise : l’objet du service, l’origine des ressources et les modalités de son organisation et de son fonctionnement.

Le présent article rend possible la réutilisation des informations publiques librement communicables pour l’ensemble des personnes morales exerçant une mission de service public industriel et commercial : ces personnes n’auront plus le droit d’interdire la réutilisation des informations publiques qu’elles communiquent.

Ainsi, cet article permet la totale harmonisation des règles de réutilisation applicables à toutes les autorités chargées d'une mission de service public, qu'elle soit de nature administrative ou industrielle et commerciale.

Toutefois, dans la mesure où ne sont pas concernées les informations dont la communication ne constitue pas un droit en application du chapitre Ier de la loi du 17 juillet 1978, et notamment du fait des dispositions prévues à l'article 6 de ladite loi, la réutilisation est rendue possible sans méconnaitre les secrets protégés par la loi et notamment le secret en matière commerciale et industrielle.

3.2 Impacts sur les collectivités territoriales

Un nombre importants de services publics industriels et commerciaux relèvent des collectivités territoriales :

- La gestion directe par une régie est assez répandue pour un certain nombre de services publics locaux, notamment communaux, par exemple dans les domaines de l’eau, des transports, de la culture ou des pompes funèbres ;

- De nombreux EPIC locaux dépendent des collectivités territoriales : on peut notamment mentionner les offices publics de l’habitat, les établissements publics fonciers locaux, les établissements publics d’aménagement ou encore les offices de tourisme n’ayant pas la forme associative.

Ces SPIC locaux sont inclus dans le champ d’application du présent article, mais son impact sur les collectivités territoriales et leurs organismes est limité par le champ d’application des nouvelles obligations de publication des données publiques :

- Les collectivités territoriales de moins de 3 500 habitants et leurs EPCI à fiscalité propre sont exclus du principe d’open data par défaut en vertu de l’article 106 de la loi NOTRe ;

- Les personnes publiques ou privées de petite taille sont exclues des nouvelles obligations de publication prévues par l’article 1er du présent projet de loi.

En conséquence, de nombreux SPIC locaux ne seront pas soumis à de nouvelles obligations de publication de leurs données publiques, ce qui réduira pour eux la portée du nouveau droit à la réutilisation des informations publiques prévu par le présent article.

4. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

5. Outre-mer

L’article 10 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 est rendu applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna par l’article 59 de cette loi. L’article 46du projet de loi rend applicables en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises les modifications apportées à l’article 10 de la loi du 17 juillet 1978 par le présent projet de loi.

Article 7
Rationalisation du régime de réutilisation des informations publiques

1. État des lieux

1.1 Articulation avec le droit sui generis - Dérogation au droit des bases de données pour les organismes publics

La directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données a été transposée dans notre droit national dans le code de la propriété intellectuelle. La protection spécifique accordée au producteur d'une base de données peut constituer, dans bien des cas, un obstacle rendant impossible la réutilisation des informations issues de ces bases.

En effet, l'article L. 342-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit que : « Le producteur de bases de données a le droit d'interdire :

1° L'extraction, par transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d'une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu d'une base de données sur un autre support, par tout moyen et sous toute forme que ce soit ;

2° La réutilisation, par la mise à la disposition du public de la totalité ou d'une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base, quelle qu'en soit la forme. »

L'article L. 342-2 ajoute : « Le producteur peut également interdire l'extraction ou la réutilisation répétée et systématique de parties qualitativement ou quantitativement non substantielles du contenu de la base lorsque ces opérations excèdent manifestement les conditions d'utilisation normale de la base de données. »

Ces dispositions du code de la propriété intellectuelle peuvent aller à l’encontre du principe de libre réutilisation des données publiques encouragé par le présent projet de loi. La Cour administrative d’appel de Bordeaux dans sa décision du 26 février 2015 « Notrefamille.com » a ainsi jugé qu’un conseil départemental pouvait empêcher la réutilisation d’une base de données détenue par son service des archives au nom du droit sui generis prévu à l’article L. 342-1 du code de la propriété intellectuelle.

1.2 Encadrement des licences pouvant être utilisées par les administrations

La Circulaire du 26 mai 2011 relative à la création du portail unique des informations publiques de l'État « data.gouv.fr » par la mission « Etalab » et l'application des dispositions régissant le droit de réutilisation des informations publiques prévoyait qu’une licence de réutilisation serait élaborée par Etalab et par « un groupe de travail composé de l'Agence du patrimoine immatériel de l'État (APIE), du Conseil d'orientation de l'édition publique et de l'information administrative (COEPIA) et des administrations concernées ». Depuis novembre 2011, la licence ouverte15 s’impose ainsi aux administrations de l’État.

Cette même circulaire prévoyait également que des licences gratuites spécifiques pouvaient être toutefois adoptées dans les cas où la réutilisation d'un jeu de données déterminé ferait l'objet de conditions particulières, et que les administrations concernées les élaboreraient et les soumettraient à « Etalab », qui les validerait et les publierait sur « data.gouv.fr ».

De nombreuses licences spécifiques ont toutefois pu proliférer, nuisant à la facilité de réutilisation et à la compréhension des conditions spécifiques imposées aux réutilisateurs.

2. Objectifs poursuivis

2.1 Articulation avec le droit sui generis - dérogation au droit des bases de données pour les organismes publics

Sans porter préjudice aux droits de propriété intellectuelle détenus par des tiers, le projet de loi prévoit d'adapter, pour les bases de données mises en œuvre par les administrations et qui doivent faire l'objet d'une diffusion publique, les droits que les administrations détiendraient au titre des articles L. 342-1 et L. 342-2 du code de la propriété intellectuelle de façon à ce qu'ils ne puisse constituer un obstacle à la réutilisation des informations contenues dans ces bases de données.

2.2 Encadrement des licences pouvant être utilisées par les administrations

La multiplication des licences accroît l’insécurité juridique lors de la réutilisation de données publiques. Par ailleurs, le type de licences utilisé modifie de manière importante les effets de l’ouverture des données. A titre d’exemple, la licence ODBL permet ainsi, en obligeant à un partage à l’identique, de s’assurer que les données ne sont pas refermées par leurs réutilisateurs et donc de décupler les bénéfices de l’ouverture des données publiques.

L’objet du présent article, en dressant la liste des licences gratuites que les administrations peuvent utiliser, est donc de faciliter la réutilisation des données publiques en rendant plus compréhensibles et conforme aux objectifs visés par la politique d’ouverture et de partage des données publiques les conditions de réutilisations des données, en encadrant les types de licence autorisées et en en limitant le nombre.

3. Nécessité de légiférer

3.1 Articulation avec le droit sui generis - dérogation au droit des bases de données pour les organismes publics

La présente disposition, qui s'applique tant aux administrations d'État, qu'à l'ensemble des autorités administratives constitue une dérogation aux dispositions législatives du code de la propriété intellectuelle concernant la protection accordée aux producteurs de bases de données.

3.2 Encadrement des licences pouvant être utilisées par les administrations

La présente mesure s'applique tant aux administrations de l'État qu'aux collectivités territoriales. Une disposition législative est nécessaire pour préciser un encadrement de l’utilisation des licences.

4. Analyse des impacts des dispositions engagées

4.1 Articulation avec le droit sui generis - Dérogation au droit des bases de données pour les organismes publics

Ces nouvelles dispositions permettront aux administrations de voir la situation de leurs bases de données clarifiée. En effet, beaucoup d'entre elles s'interrogent sur l'articulation du droit sui generis accordé aux producteurs de bases de données avec le droit de réutilisation prévu par la loi du 17 juillet 1978.

Impact sur les collectivités territoriales

Les collectivités territoriales bénéficieront de ce régime simplifié.

4.2 Encadrement des licences pouvant être utilisées par les administrations

Ces nouvelles dispositions permettront aux administrations de choisir aisément parmi les licences gratuites proposées et adaptées à leurs besoins.

Impact sur les collectivités territoriales

Les collectivités territoriales bénéficieront de ce régime simplifié avec la sécurité juridique liée à l'assurance que la licence figurant dans la liste est agréée.

5. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

6. Textes d’application et Outre-mer

Un décret fixera la liste des licences types pour les réutilisations à titre gratuit.

L’article 46 du projet de loi rend le présent article applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Article 8
Missions et pouvoirs de la CADA

Obligation d’actualiser chaque année le répertoire des principaux documents de chaque administration publique

1. État des lieux

L’article 17 de la loi du 17 juillet 1978 fait obligation à chaque administration publique mentionnée à l’article 1er de la même loi de publier un répertoire des principaux documents où figurent les informations publiques qu’elle détient.

La mise en œuvre de cette obligation a été prévue par la circulaire du Premier ministre du 29 mai 2006 (section 2) mais elle reste inégale selon les administrations publiques et trop peu effective de façon générale.

Les choix des différentes administrations pour établir le contenu de ce répertoire sont également hétérogènes, certains se limitant par exemple à des documents qui font déjà l’objet d’un processus de publication16.

2. Objectifs poursuivis

En introduisant une obligation de mise à jour annuelle du répertoire prévu à l’article 17, cet article vise un double objectif :

- Rendre plus effective la publication d’un tel répertoire par chacune des administrations publiques soumises aux règles introduites par la loi du 17 juillet 1978 ;

- Rendre plus pertinent le contenu du répertoire publié, en garantissant son évolution régulière pour inclure les nouvelles informations publiques produites ou reçues l’administration.

3. Nécessité de légiférer

L’obligation introduite par cet article s’impose à toutes les personnes morales mentionnées à l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l'administration : État, collectivités territoriales, autres personnes publiques et personnes privées chargées d’une mission de service public.

Pour étendre cette obligation aux collectivités territoriales, à l’ensemble des personnes publiques et aux personnes privées chargées d’une mission de service public, il est nécessaire de passer par une modification législative.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La réforme permettra d’établir un processus de suivi régulier de la publication et de l’actualisation du répertoire prévu par l’article 17. Elle complète les dispositions du présent projet de loi qui rendent obligatoire la publication des documents contenus dans le répertoire, à compter d’une durée d’un après la promulgation du projet de loi.

La charge de travail pour les administrations publiques mentionnées à l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l'administration  restera très limitée, s’agissant d’une obligation de mise à jour dont la périodicité est annuelle. Il convient de souligner que la nouvelle rédaction de l'article 17 de la loi CADA ne fait que préciser une règle déjà implicite dans la rédaction antérieure, à savoir que le répertoire n'est pas établi de façon immuable et définitive mais doit être mis à jour régulièrement.

Impact sur les collectivités territoriales

Cette disposition n'aura qu'un impact très limité sur les collectivités territoriales, selon les principes exprimés ci-dessus : une mise à jour annuelle pour préciser une obligation qui était déjà sous-jacente à l’actuelle rédaction de l’article 17 de la loi du 17 juillet 1978.

5. Consultations menées

La Commission d’accès aux documents administratifs a été consultée.

Création d’un droit de saisine de la CADA pour refus de publication d’un document administratif

1. État des lieux

Le troisième alinéa de l’article 20 de la loi du 17 juillet 1978 rend possible la saisine de la CADA par une personne à qui est opposé un refus de communication d’un document administratif en application du chapitre 1er de la même loi. Il n’est pas prévu en revanche qu’une personne puisse saisir la CADA pour un refus de publication d’un document administratif : si le document est communiqué mais non publié, la seule voie de recours est de saisir directement la juridiction administrative.

Cette situation se justifie par le caractère limité des obligations de publication des documents administratifs aujourd’hui prévues par le code des relations entre le public et l'administration qui prévoit une obligation de publication restreinte aux directives, instructions, circulaires, ainsi qu’aux notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives.

2. Objectifs poursuivis

Le présent projet de loi élargit les obligations de publication prévues par le code des relations entre le public et l'administration. Les administrations mentionnées à l’article L. 300-2 du même code devront désormais publier :

1° les documents qu’elles communiquent en application du chapitre 1er,

2° les documents mentionnés dans le répertoire prévu à l’article 17 de la loi du 17 juillet 1978,

3° les bases de données qu’elles produisent ou qu’elles reçoivent ainsi que leur contenu,

4° les données dont la publication présente un intérêt économique ou social.

Le présent article vise à faciliter la mise en œuvre de ces obligations nouvelles de publication. A cette fin, il ouvre la possibilité de demander un avis à la CADA en cas de refus de publication par une administration publique. Cette possibilité nouvelle permettra aux personnes privées de bénéficier de l’expertise spécialisée et de la rapidité de réponse de la CADA en cas de refus de publication d’un document. Cette réforme est donc de nature à rendre plus effectives les nouvelles obligations de publication des données publiques prévue par l’article 1er du présent projet de loi.

3. Nécessité de légiférer

Le présent article modifie l’article 20 de la loi du 17 juillet 1978 pour ouvrir un nouveau motif de saisine de la CADA. Le recours à la voie législative est donc nécessaire.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Selon les chiffres du rapport d'activité de la CADA pour 2013, la Commission a été saisie de 5486 dossiers dont 5306 demandes d'avis et 178 demandes de conseil. La nouvelle faculté de saisine de la CADA ouverte par le présent article pourrait théoriquement entraîner une hausse des demandes d’avis adressées à la CADA.

Toutefois, dans le même temps, les obligations accrues de publication des documents administratifs prévues par le présent projet de loi devraient permettre une baisse des demandes de communication de documents administratifs, et donc des saisines de la CADA à ce titre. En effet, conformément aux dispositions de l'article L. 311-2 du code des relations entre le public et les administrations, « Le droit à communication ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique ».

En outre, le présent article prévoit la création d’une procédure simplifiée de réponse de la CADA aux demandes d’avis, qui lui permettra d’absorber une hausse éventuelle de ces demandes à moyens constants.

Aussi, on peut estimer que les différentes dispositions du projet de loi permettront d'aboutir à un point d'équilibre.

5. Consultations menées

La Commission d’accès aux documents administratifs a été consultée.

Possibilité de créer une procédure simplifiée de réponse aux demandes reçues par la CADA

1. État des lieux

La CADA est saisie d’un nombre croissant de demandes d’avis, qui ont le caractère d’un recours administratif obligatoire préalablement à la saisine du juge administratif. Le caractère collégial de la commission contribue à la qualité des avis qu’elle rend sur les questions les plus nouvelles ou les plus délicates.

Un examen collégial n’est cependant pas toujours indispensable, en particulier lorsque la commission ne peut faire autrement que de prendre acte de ce qu’une demande a perdu tout objet ou qu’il s’agit seulement de réitérer dans une affaire une réponse relevant de la doctrine bien établie de la commission, alors que le rythme des séances de la commission ralentit l’examen des demandes.

La commission a donc émis une recommandation de réforme dans son rapport annuel d’activité relatif à l’année 2013.

2. Objectifs poursuivis

Les objectifs poursuivis sont les suivants :

- Alléger la procédure suivie devant la commission et la charge de préparation de ses séances ;

- Raccourcir les délais effectifs de réponse aux demandes d’avis les plus simples ;

- Respecter le caractère collégial de la commission en la laissant maîtresse des délégations qu’elle accorderait.

3. Nécessité de légiférer

La répartition des compétences au sein d’un organe de l’État tel que la commission d’accès aux documents administratifs ne relève pas en principe du domaine de la loi défini par l’article 34 de la Constitution. Cependant, l’intervention du législateur pour donner un caractère collégial à la commission d’accès aux documents administratifs et en définir les attributions interdit que certaines de ces attributions soient exercées par le président de la commission, en l’absence dans la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 de disposition les lui confiant directement ou autorisant la commission à les lui déléguer, comme l’article 15 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 le permet au contraire en ce qui concerne la commission nationale de l’informatique et des libertés.

Sans modification des textes en vigueur, la seule alternative serait d’augmenter la fréquence des séances de la commission. Cette option contribuerait elle aussi à raccourcir les délais mais n’allégerait ni la procédure ni la charge de préparation des séances de la commission. En outre, elle imposerait, pour approcher d’un même résultat en termes de délais, de doubler la fréquence des réunions de la commission, ce qui paraît incompatible avec les moyens actuels de l’institution. Cette alternative paraît donc déraisonnable.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Evaluation des incidences de toute nature

Pour les administrés, qui saisissent la commission : raccourcissement du délai de réponse aux demandes les plus simples, pour environ 20 % de l’ensemble des demandes, dans un premier temps.

Pour les membres de la commission : allègement du même ordre de grandeur de l’ordre du jour des séances de la commission, permettant de consacrer plus d’attention aux affaires qui le méritent.

Pour les agents permanents, les rapporteurs et le rapporteur général de la commission : réorganisation des circuits d’instruction de la même proportion des demandes d’avis, en vue de la simplification de ces circuits, meilleure répartition de la charge de travail par un allègement de la préparation des séances de la commission.

Impact sur les collectivités territoriales

Cette disposition ne crée aucune obligation ou charge nouvelle pour les collectivités territoriales, qui pourront en revanche bénéficier de cette procédure simplifiée.

Conditions de mise en œuvre de la réforme

Un décret d’application, pris en Conseil d’État, doit préciser les critères autorisant la commission à consentir une délégation à son président. La commission pourra prendre dans ce cadre une délibération accordant une telle délégation à son président.

5. Consultations menées

La Commission d’accès aux documents administratifs a été consultée.

6. Outre-mer

L’article 46 du projet de loi rend le présent article applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Section 2
Service public de la donnée

Article 9
Création d’un service public de la donnée

1. État des lieux

Aujourd’hui, dans la législation, la donnée est rarement considérée comme un objet autonome. On parle de « document » administratif, parfois d’information, mais pas de donnée en tant que telle17. Dès lors, la production comme la mise à disposition de ces données importantes pour le fonctionnement d’organisations publiques et privées ne sont aujourd’hui que le sous-produit d'un service public tiers ; par exemple, celui de la statistique publique ou celui de l’information légale.

2. Objectifs poursuivis

De multiples exemples montrent que les données jouent un rôle de plus en plus fondamental dans la création de valeur économique et sociale. C’est une des raisons qui fait que la France a mené, dans les dernières années, une politique active sur le ce plan : remarquée pour son action en matière d’open data (3e pays au monde pour le classement de l’Open Knowledge Foundation, en décembre 2014), elle a été le premier pays européen à se doter d’un administrateur général des données18.

Au sein de l’ensemble des données produites par l’État, il convient d’identifier certaines données qui ont vocation à être érigés en « données de référence ». On entend par « données de référence » des données disponibles, largement diffusées et utilisée par une pluralité d’acteurs publics et privés, et dont la qualité est reconnue par l’État. C’est l’élargissement aux données, ressources immatérielles, d’une logique déjà à l’œuvre pour les ressources foncières, avec le cadastre.

L’enjeu est ici de constituer, dans un univers de données très dense et dont les sources ne sont pas toujours indentifiables ou maîtrisées, une ressource fiable et authentifiée par la puissance publique. A titre d’illustration dans le domaine informationnel, il n’existe qu’un seul identifiant pour une entreprise : son numéro SIRET. Les administrations sont tenues de l’utiliser19. Cet identifiant fait référence parce qu’il est utilisé par l’ensemble des acteurs dans leurs relations avec les entreprises ce qui ne fait que renforcer l’incitation à l’utiliser, confirmant, du même coup, la légitimité de cet identifiant.

L’objectif du service public de la donnée est d’organiser la production, la qualité et la circulation des données de référence en garantissant un niveau de qualité minimale dans leur diffusion.

Les données de référence sont identifiées et régies par des critères cumulatifs, qui reprennent des éléments du « Cadre commun d’architecture des référentiels de données » défini par la DISIC20 :

elles font l'objet d'une utilisation fréquente par un grand nombre d’acteurs tant publics que privés : ces données ne sont pas produites pour une unique finalité d’usage, mais sont réutilisées par une vaste pluralité d’acteurs. Elles peuvent être utilisées par des métiers fondamentalement différents. Certaines données sur les entreprises sont par exemple utilisées aussi bien par les sphères fiscale, sociale, travail, emploi, développement durable, santé, agriculture…

leur disponibilité et leur qualité, notamment leur précision, leur fréquence de mise à jour ou leur accessibilité sont critiques pour un grand nombre de processus pour les acteurs cités au 1° : Ces données doivent ainsi exister (être produites), être précises et complètes (ex : « 64, boulevard Henri 4 » peut être nécessaire, « bd henri 4 » n’est pas équivalent), être disponibles et accessibles à tout moment et facilement, et être mises à jour fréquemment. A titre d’exemple, la mise à jour mensuelle d’une base peut rendre la donnée inaccessible pendant un temps donné, or cette indisponibilité peut mettre en péril des processus métiers qui ont besoin de s’y référer (par exemple des API entreprises utilisant le numéro de SIRET).

Dans le cadre des projets relatifs à la mise en œuvre de la stratégie de l’État Plateforme, plusieurs services utilisent des données considérées comme étant de référence. Les projets « marchés publics simplifiés » (MPS) et « aides publiques simplifiées» (APS) s’appuient sur la base SIRENE, le projet de système d’identification « France Connect » (FC) sur le répertoire national des individus et personnes physiques (RNIPP).

Ces deux référentiels (SIRENE et RNIPP) ont été créés et reposent actuellement sur une logique de fichier statique et fonctionnent sur un modèle de copie de fichier.

Or, les dispositifs MPS, APS ou FC nécessitent la donnée en temps réel et ne peuvent accepter, ce qui est arrivé à plusieurs reprises ces derniers mois, une indisponibilité de ces bases durant des périodes allant jusqu’à plusieurs heures avec des périodes de maintenance programmées durant les heures administratives ouvrées. Ceci est particulièrement sensible pour les matières où la contrainte de respect des délais pour l’utilisateur est primordiale comme c’est le cas pour les marchés publics.

Parmi les principales données de référence pourraient par exemple figurer :

- Le cadastre ;

- La base d’adresses nationale (BAN) collaborative ;

- Le référentiel à grande échelle (RGE) ;

- Le référentiel parcellaire graphique (RPG) ;

- Le registre des entreprises (SIRENE) ;

- Le registre national des associations (RNA) ;

3. Nécessité de légiférer

Dans la mesure où le présent projet de loi prévoit que toutes les autorités administratives concourent à la mission du service public créé par ce même article, et notamment les collectivités territoriales, le recours à la loi est justifié par le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales défini par les articles 34 et 72 de la Constitution.

Le dispositif est complété par des mesures de nature règlementaire. Les modalités d'application de cet article seront fixées par décret en Conseil d'État qui déterminera, le cas échéant, les modalités de coordination entre plusieurs administrations responsables de la production et de la diffusion de données de référence ainsi que les critères qualitatifs de ces données et les modalités de participation des collectivités territoriales au service public de la donnée.

Un décret simple déterminera la liste des données de référence et des administrations chargées de leur production et diffusion. Des arrêtés ministériels pourront, en outre, fixer des règles d'ordre technique relatives aux données de référence.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impacts économiques et sociaux

La diffusion et la réutilisation des données de référence participe, selon le groupement français de l’industrie de l’information (GFII) de la création d’ « un écosystème économique innovant, associant producteurs, diffuseurs et agrégateurs d’informations, laboratoires de recherche, professionnels de la dématérialisation, start-up et nouveaux acteurs de l’économie numérique. »

La liste des données de référence qui est envisagée correspond aux bases de données dont la meilleure diffusion est susceptible d’avoir le plus de bénéfices pour le développement économique, comme l’ont souligné certains acteurs économiques (notamment le GFII)21.

Ces mêmes données de référence bénéficient, comme mentionné précédemment, également à l’amélioration de l’action publique. Cela aura des effets directs sur l’usager de l’administration en termes de simplification de ses démarches administratives. A cet égard, les données de référence viendront s’articuler avec le dispositif d’échange d’informations au bénéfice de l’usager prévu par l’article L.114-8 du code des relations entre le public et l'administration. En effet, en fonction des domaines et procédures concernés les données de référence viendront alimenter les échanges d'informations ou de données. Outre les avancées en termes de simplification mentionnées plus haut, les dispositions de l’article 5 pourront avoir pour l’usager des effets encore plus directs. L’utilisation d’un même référentiel d’adresses permettra notamment une meilleure efficacité et une meilleure coordination de l’intervention des services d’urgence ou de secours, par exemple dans le cas de la Base Adresse Nationale.

Le décret qui dressera la liste des données de référence pourra être mis à jour afin de pouvoir être en adéquation avec les attentes des utilisateurs actuels ou potentiels des données de référence.

4.2 Impact sur les administrations de l’État et sur les collectivités territoriales

Pour ce qui concerne l’impact sur les autorités administratives responsables ou participant à la production de ces données de référence, il convient de souligner que la mise en œuvre du service public de la donnée ne contraint pas les administrations à produire de données nouvelles. Toutefois, celles-ci devront notamment s’engager sur un niveau de qualité, un degré de disponibilité et respecter certaines dispositions techniques qui seront définies par décret en Conseil d’État.

Ce décret fixera également les conditions de participation des collectivités territoriales, qui ont par exemple un rôle dans la constitution et la mise en œuvre de la Base Adresse Nationale. L’objet du service public de la donnée n’est pas d’obliger les collectivités territoriales à produire de nouvelles données, mais simplement d’améliorer la qualité des données qu’elles transmettent déjà à l’État en vertu d’obligations légales ou réglementaires (telles que celles prévues par le décret n° 94-1112 du 19 décembre 1994 pour la transmission à la DGFiP par les communes de plus de 2000 habitants des créations ou modifications d’adresses). C’est donc seulement dans leur fonction de production primaire des données de référence que les collectivités territoriales sont susceptibles de voir leurs obligations renforcées par le présent article, et non dans une fonction de mise à disposition ou de diffusion de ces données.

En conséquence, la participation des collectivités territoriales au service public de la donnée n’est pas accompagnée d’une compensation. En effet, dans la mesure où aucune d'elles ne sera tenue de produire des données nouvelles, cette participation ne pourrait être analysée ni comme un transfert de compétence donnant lieu à une compensation intégrale, ni comme une extension de compétence au sens de l’article 72-2 de la Constitution. Le présent article ne fait qu’aménager les modalités d’exercice de leurs compétences actuelles de production de données, sous la forme de l’approfondissement d’une compétence au sens de la jurisprudence du conseil constitutionnel22.

5. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

6. Textes d’application et Outre-mer

Un décret en Conseil d’État fixera les modalités d’application du présent article.

Un décret fixera la liste des données de référence et désignera les administrations responsables de leur production et de leur publication.

L’article 46 du projet de loi rend l’article 9 applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Section 3
Données d’intérêt général

Article 10
Ouverture des données par défaut dans les contrats de délégation de service public

1. État des lieux

La loi du 8 février 1995 relative aux marchés publics et délégations de service public23, dispose que le délégataire d’un service public remet, chaque année, un rapport à l’autorité délégante, dit « rapport annuel du délégataire ». Ce rapport, dont le contenu a été précisé par un décret du 14 mars 200524, comprend notamment les « comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l'exécution de la délégation de service public et une analyse de la qualité de service »25. Si certaines collectivités mettent volontairement en ligne les rapports annuels, une telle démarche n’a aujourd’hui rien de systématique26.

Par ailleurs, l’obligation de publication concerne des données relatives au contrat, mais ne couvre pas l’ensemble beaucoup plus vaste des données produites dans le cadre de l’exécution de la délégation du service public (DSP). En effet, l’exploitation d’une DSP donne aujourd’hui lieu à la production d’un volume croissant de données. Dans le domaine de l’eau par exemple, l’organisme chargé du service constitue des bases de données sur les consommations des ménages et des entreprises, sur les opérations d’entretien du réseau ou sur les fuites. Pour des services publics de vélopartage et d’autopartage, ce sont des données sur les déplacements, les durées d’utilisation ou encore l’usure du parc qui sont générées.

Les données des contrats de DSP, qu’il s’agisse des données relatives au contrat lui-même ou des données générées durant l’exploitation du service public, ne sont donc, dans le cas général, pas accessibles en ligne.

2. Objectifs poursuivis

A l’ère du numérique, la bonne exécution du service public implique d’assurer la disponibilité, la qualité et la diffusion des données associées aux activités de ce service, notamment dans le cadre des DSP. La place et la légitimité des services publics dans la société seront renforcées si ces services deviennent une source abondante de données pour leurs utilisateurs et vis-à-vis des autres activités économiques. Dans le cas des DSP, l’ouverture des données contribue en outre à ce que la collectivité publique puisse jouer de manière effective son rôle d’autorité organisatrice.

L’article proposé permet donc de prévoir une clause d’ouverture des données par défaut dans les contrats de délégation de service public. Cette disposition permet d’appliquer aux concessions des dispositions similaires à la clause type « open data » des cahiers des clauses administratives générales (CCAG).

Cette disposition n’est pas applicable aux contrats en cours.

3. Nécessité de légiférer

Il n’existe pas pour les délégations de service public de document de référence analogue aux cahiers des clauses administratives générales (CCAG) des marchés publics. Il est donc nécessaire d’introduire la clause « open data » dans la loi pour que sa diffusion se généralise dans les contrats de l’ensemble des délégataires (État, collectivités locales, établissements publics).

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La publication des données des contrats des DSP permettra une meilleure information des citoyens et une transparence accrue. Ces données ont, de plus, une valeur importante pour la collectivité publique, car elles l’aident à faire évoluer l’organisation du service et à conduire ses politiques. Il est toutefois prévu que la personne morale de droit public pourra exempter le délégataire des obligations prévues au premier alinéa par une décision motivée et rendue publique.

La publication des données par les délégantes impliquera une charge de travail pour ces dernières, qui restera néanmoins modérée (à l’instar des charges induites pour les administrations par l’article 3 du présent projet de loi).

La communication des données d’exploitation des entreprises aux autorités délégantes pourra nécessiter l’adaptation de leur système d’information. Les coûts devraient néanmoins être limités et ponctuels. Par ailleurs, afin de renforcer la prévisibilité de la clause « open data », les parties pourraient y faire figurer une liste indicative des types de données concernées.

Impact sur les collectivités territoriales

Le présent article s’appliquera aux collectivités territoriales ayant recours à des délégations de service public, dans la mesure où il modifie l’article L. 1411-3 du code général des collectivités territoriales.

Cependant il ne crée pas en lui-même d’obligation ou de charge nouvelle pour les collectivités territoriales : l’obligation introduite porte sur le délégataire, et ouvre à l’autorité délégante une simple faculté d’exploiter les données fournies et de les publier.

5. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

6. Outre-mer

L’article 46 du projet de loi rend le I et le III de l’article 10 applicables en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

L’article 48 (II) modifie en conséquence l’article 41-1 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques.

Les dispositions du II de l’article 10 n’ont pas fait l’objet d’une extension d’application en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les terres australes et antarctiques françaises dans la mesure où elles concernent des dispositions du code général des collectivités territoriales qui ne sont pas applicables dans ces collectivités.

Article 11
Ouverture des données dans les conventions de subventions

1. État des lieux

L’article 9-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations définit les subventions comme « les contributions facultatives de toute nature, valorisées dans l'acte d'attribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion d'un service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d'une action ou d'un projet d'investissement, à la contribution au développement d'activités ou au financement global de l'activité de l'organisme de droit privé bénéficiaire ». La loi ajoute que « ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires », ce qui les distingue des missions de service public, dont le contenu est défini par la collectivité publique. L’activité subventionnée a, en revanche, ceci de commun avec la mission de service public qu’elle poursuit un but d’intérêt général.

La loi impose que toute subvention d’un montant annuel supérieur à 23 000 euros27 donne lieu à la conclusion d’un contrat, qui détermine l’objet, le montant, les modalités de versement et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée.

Des dispositions sur la transparence financière des subventions existent depuis la loi du 12 avril 2000, qui a notamment prévu que le budget et les comptes de tout organisme de droit privé ayant reçu une subvention étaient communicables à toute personne qui en faisait la demande.

La publication de ces informations n’est cependant pas organisée, sauf dans des domaines particuliers tels que les aides à la presse, la politique agricole commune (PAC) ou l’aide publique au développement.

2. Objectifs poursuivis

L’objectif de la disposition est d’introduire une obligation de publication des données essentielles des contrats de subventions.

L’ouverture des données des subventions présente un enjeu indéniable de transparence démocratique : la subvention relève d’une décision discrétionnaire de la puissance publique et procure un avantage financier direct à son bénéficiaire.

L’article prévoit que la publication des données essentielles des subventions donnant lieu à un contrat est assurée sur le site internet de la collectivité publique qui les verse ; un site national pourrait agréger ces informations.

3. Nécessité de légiférer

En raison du grand nombre et de la diversité des autorités administratives attribuant des subventions, une mesure législative est nécessaire pour assurer une transparence effective des données des subventions.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Concernant la publication des données essentielles des contrats de subventions, la disposition n’entraîne pas de charge de travail particulière pour les organismes subventionnés, puisqu’ils transmettent déjà les informations concernées à leurs financeurs.

Impact sur les collectivités territoriales

Les impacts mentionnés ci-dessus s’appliqueront similairement aux collectivités territoriales attribuant des subventions. Cette charge devrait notamment rester limitée puisqu’elle se limite aux données essentielles de la convention de subvention et qu’elle ne couvre que les subventions d’un montant inférieur à 23 000 € (selon le seuil réglementaire actuellement en vigueur).

5. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes et la Commission d’accès aux documents administratifs ont été consultés.

6. Textes d’application et Outre-mer

Les conditions d’accessibilité visées au présent article seront fixées par voie réglementaire.

L’article 46 du projet de loi rend le présent article applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

L’article 48 (III) modifie en conséquence l’article 41 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

Article 12
Transmission à la statistique publique sous forme électronique d’informations présentes dans certaines bases de données d’organismes privés dans le but exclusif de réaliser des enquêtes statistiques

1. État des lieux

Les statistiques publiques sont aujourd’hui produites soit à partir d’enquêtes statistiques dont la liste est arrêtée chaque année par le ministre chargé de l'économie, soit à partir de fichiers administratifs auxquels la statistique publique peut avoir accès dans le cadre défini par l’article 7 bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l’obligation, la coordination et le secret en matière statistique et l’article 17 bis (1) du règlement européen 223/2009 amendé par le règlement 2015/759 du 29 avril 2015. La réalisation des enquêtes auprès des particuliers ou des personnes morales fait intervenir le cas échéant un nombre important d’enquêteurs employés par la statistique publique, comme par exemple pour l’enquête emploi ou l’indice des prix à la consommation.

La statistique publique dispose de prérogatives contraignantes pour que les personnes privées lui communiquent des données dans le cadre de ses missions : la loi du 7 juin 1951 prévoit pour des enquêtes importantes une obligation de réponse à la charge des personnes privées, assortie de sanctions pécuniaires.

Aux termes de la version en vigueur de cette loi, lorsque le ministre arrête le programme annuel d’enquêtes défini sur proposition du Conseil national de l’information statistique (CNIS)28, il détermine après avis du Comité du Label29 celles de ces enquêtes qui auront un caractère obligatoire. L’absence de réponse ou la réponse sciemment inexacte à ces enquêtes est punie d’une amende prononcée par le ministre après avis du CNIS réuni en comité du contentieux des enquêtes statistiques obligatoires. Le montant des amendes est à ce jour relativement limité, puisqu’il ne peut dépasser 2 250 euros pour chaque infraction.

2. Objectifs poursuivis

L’objectif de cet article est d’autoriser l’accès de la statistique publique à des informations définies au préalable par la loi qui sont présentes dans des bases de données informatiques gérées par des personnes privées.

L’accès du service statistique public à des informations présentes dans des bases de données ne représente pas un changement de nature de l’obligation statistique : les personnes privées sont déjà tenues de transmettre les informations dont l’utilité a justifié l’inscription dans le programme annuel d’enquêtes obligatoires. Il s’agit d’une modalité nouvelle de mise en œuvre de cette obligation, le service statistique public accédant, au terme d’une étude faisabilité et d’opportunité rendue publique, après concertation sur les modalités techniques avec les personnes privées concernées ou leurs représentants au sein de fédérations professionnelles, et après avis du CNIS, à certains éléments de leurs bases de données au lieu de leur demander d’en extraire les informations nécessaires.

Cet accès ne sera envisagé que lorsqu’il permettra des économies pour les personnes privées ou pour la statistique publique, ou une amélioration de la qualité de la statistique publique par rapport aux modes traditionnels de collecte.

Un exemple de l’intérêt de produire une statistique publique à partir de données privées peut être donné pour le calcul de l’inflation. Aujourd’hui, l’Insee assoit ce calcul en grande partie sur des relevés de prix réalisés dans les différents points de vente par un réseau d’enquêteurs. Une partie de ces relevés (environ 20%) pourrait être remplacée par les prix enregistrés lors du passage en caisse des clients dans la grande consommation (« données de caisse »). Cette opération est réalisable (elle fait l’objet d’une expérimentation depuis plusieurs années), et elle rendrait le calcul de l’inflation moins coûteux et la mesure de l’inflation plus précise. Cependant elle requiert deux garanties : pour l’Insee, que la transmission des données de caisse soit pérenne ; pour les enseignes de grande distribution, que les données transmises servent exclusivement au calcul de l’inflation et à aucun autre usage, y compris statistique (comme la réalisation d’études).

Le secret statistique, en vertu duquel les agents du service statistique public sont astreints au secret professionnel sous les sanctions prévues à l’article 226-13 du code pénal, est applicable aux informations obtenues par l’accès aux bases de données des personnes privées. Deux garanties complémentaires, adaptées à ce nouveau mode de collecte, seront instaurées :

- La limitation de l’accès et de la réutilisation aux données nécessaires à l’enquête : les données collectées ne doivent servir que pour répondre aux besoins de l’enquête, préalablement définis dans le projet d’enquête ayant reçu le visa ministériel prévu par l’article 2 de la loi du 7 juin 1951.

- La sécurité des données : les conditions techniques de la collecte des données devront être définies en accord avec la personne privée, de manière à en garantir la confidentialité et à ne pas affecter la bonne marche de l’entreprise.

Par ailleurs, la problématique des conséquences attachées au non-respect d’une obligation de communication des données doit être traitée. Les sanctions définies par l’article 7 de la loi du 7 juin 1951 pour le refus de répondre à une enquête seraient applicables au refus de laisser le service statistique accéder à des données. La faiblesse de leur montant n’assure cependant pas leur caractère dissuasif et le rend sans rapport avec le surcoût induit sur le système statistique public par un non-respect de l’obligation. Le II de l’article 7 bis instaure donc un régime de sanction spécifique avec des montants maximaux plus élevés.

3. Nécessité de légiférer

L’expérience de l’INSEE sur les données de caisse nécessaires à l’établissement de l’indice des prix à la consommation montre que la coopération volontaire des entreprises n’est pas suffisante. En effet, il suffit qu’un acteur économique important refuse de coopérer pour que la valeur statistique de l’indice soit remise en cause.

Les dispositions actuelles du second alinéa de l’article 3 de la loi du 7 juin 1951, issues de la loi du 22 mars 2012, ne comportent pas de garantie suffisante pour les personnes privées concernées. Une nouvelle mesure législative est donc nécessaire pour renforcer ces garanties.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impacts pour les administrations

Les dispositions proposées permettront d’engendrer des économies pour la statistique publique : un accès organisé aux bases de données permet de simplifier les modalités d’interrogation des personnes privées et de réduire le coût de la production des enquêtes statistiques.

L’accès à ces données peut améliorer la qualité des statistiques produites, par l’utilisation de sources plus riches et plus exhaustives. Il peut aussi rendre possible une production régulière de statistiques dont la fréquence est aujourd’hui réduite en raison de leur coût de production élevé. Il pourrait en être ainsi de la population présente sur un territoire, qui permet de dimensionner les infrastructures et les installations de secours, et dont la mesure pourrait reposer sur des données de téléphonie mobile.

4.2 Impacts pour les entreprises

L’accès organisé aux bases de données peut être source de moindres coûts pour les personnes privées, en particulier pour les entreprises. En effet, la réponse aux enquêtes implique la mobilisation de ressources humaines et s’ajoute à d’autres obligations administratives. Ce mode de collecte peut nécessiter certains coûts d’adaptation du système informatique et d’opération de gestion pour permettre la transmission des données à la statistique publique, mais une fois cet effort consenti, il devrait représenter une charge inférieure à celle représentée aujourd’hui par la réponse aux enquêtes.

Par ailleurs cette transmission n’aura pas d’impact économique sur les entreprises : elle devra se faire dans des conditions où l’utilisation des données par la statistique publique ne porte aucune atteinte à leur valeur économique.

5. Textes d’application et Outre-mer

Les conditions de réalisation des enquêtes visées au présent article seront fixées par voie réglementaire.

L’article 46 du projet de loi rend le présent article applicable à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Section 4
Gouvernance

Articles 13 à 16
Gouvernance

1. État des lieux

La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) est une autorité administrative indépendante créée par la loi du 17 juillet 1978. Son rôle principal est de rendre des avis sur les refus de communication des documents administratifs, pour lesquels sa saisine est obligatoire avant tout recours contentieux. Elle peut également être saisie et rendre des avis sur les décisions défavorables des administrations en matière de réutilisation des informations publiques. Elle peut conseiller les administrations sur le caractère communicable d’un document, et peut être consultée par le gouvernement ou proposer des modifications sur des textes législatifs ou réglementaires. Elle assure une fonction de suivi et de soutien auprès des 1800 personnes responsables de l’accès aux documents administratifs (PRADA).

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) est une autorité administrative indépendante créée par la loi du 6 janvier 1978 afin de protéger les données personnelles des individus. Elle a pour missions principales d’informer sur leurs droits et obligations les individus et les responsables de traitements automatisés de données personnelles et d’autoriser certains traitements de données. Elle joue également un rôle de conseil auprès des acteurs privés ou publics en matière de données personnelles.

Il existe aujourd’hui des recoupements entre les missions de la CNIL et de la CADA, qui représentent une part significative de leur activité. La CADA est ainsi amenée à se prononcer sur la publication ou la réutilisation de fichiers de grande taille comportant des données personnelles, parfois sensibles (données individuelles de santé par exemple). La CNIL de son côté est amenée à se prononcer sur des traitements automatisées de données personnelles utilisant des informations issues de documents administratifs.

Ces recoupements représentent une activité croissante pour la CNIL comme pour la CADA et il est prévisible qu’ils vont croître à l’avenir. La section 1 du chapitre 1er du titre Ier du présent projet de loi augmente fortement les obligations de publication des données publiques et le droit de les réutiliser, notamment en ce qui concerne les informations publiques comportant des données personnelles ; corrélativement, ils prévoient de confier à la CADA de nouvelles missions liées à la mise en œuvre de ces dispositions (émettre des avis sur les refus de publication de documents administratifs, mener une politique active pour constater les manquements aux obligations de publication et inciter les administrations à y remédier).

L’article 29 du présent projet de loi prévoit également d’accroître les missions de la CNIL.

Ces recoupements croissants entre l’activité de la CNIL et de la CADA nécessitent une coordination étroite. Or celle-ci apparaît aujourd’hui insuffisante : elle repose principalement sur la présence dans le collège de la CADA d’un membre désigné par le président de la CNIL, sans qu’une disposition symétrique soit prévue pour le collège de la CNIL. Aucune autre disposition juridique n’est prévue pour garantir la coordination des deux autorités.

2. Objectifs poursuivis

L’objectif de la réforme est de garantir une coordination accrue entre la CNIL et la CADA, permettant une convergence de leur doctrine en ce qui concerne la publication et la réutilisation des données personnelles issues des administrations publiques.

Les articles 13 à 16 du présent projet de loi cherchent à atteindre cet objectif par deux moyens complémentaires :

- Garantir une représentation symétrique de la CNIL au sein du collège de la CADA et de la CADA au sein du collège de la CNIL : les articles 13 et 15 prévoient que le président de la CNIL ou son représentant siégera désormais au collège de la CADA et que le président de la CADA ou son représentant siégera désormais au collège de la CNIL.

- Permettre aux deux autorités de siéger conjointement pour traiter des sujets qui les concernent toutes les deux : les articles 14 et 16 ouvrent ainsi la possibilité aux deux autorités de se réunir dans un collège unique, à l’initiative conjointe de leurs présidents, lorsqu’un sujet d’intérêt commun le justifie.

3. Nécessité de légiférer

Dans la mesure où la composition des deux autorités administratives indépendantes est fixée par la loi (article 13 de la loi du 6 janvier 1978 pour la CNIL, et article 23 de la loi du 17 juillet 1978 pour la CADA), une modification législative est indispensable pour introduire la participation du président de chacune d’entre elles au collège de l’autre autorité.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Les présents articles mettent en place des procédures régulières pour garantir la coordination et la concertation entre la CNIL et la CADA. Ils permettront ainsi la constitution d’une doctrine partagée entre les deux autorités et un traitement plus efficace des demandes relatives aux sujets qui leur sont communs.

Ce rapprochement sera bénéfique en lui-même, et constituera également un contexte favorable à une éventuelle fusion de la CNIL et de la CADA, si elle était envisagée à moyen terme.

5. Consultations menées

La Commission d’accès aux documents administratifs et la Commission nationale de l'informatique et des libertés ont été consultées.

6. Outre-mer

L’article 46 du projet de loi rend les présents articles applicables en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Chapitre II

Economie du savoir

Article 17
Accès aux travaux de la recherche financée par des fonds publics

Le présent article du projet de loi appréhende les travaux de recherche financés sur fonds publics et a pour objet d’ouvrir de nouvelles possibilités de diffusion et d’accès aux produits de la recherche scientifique.

1. État des lieux

Le passage au numérique a fondamentalement changé l’équilibre entre éditeurs, auteurs, communautés et institutions scientifiques. En effet, la diffusion numérique des revues s’est accompagnée :

d’une hausse des prix des abonnements qui a contraint les bibliothèques des établissements d’enseignement supérieur et de recherche à réorienter leurs acquisitions, en procédant à des désabonnements et en diminuant leurs achats de livres. En France, entre 2002 et 2014, les dépenses de documentation électronique destinées aux laboratoires ont augmenté de 450 %30,

de la concentration du marché autour de grands groupes éditoriaux proposant des bouquets de revues incontournables pour les chercheurs, tendant à évincer les éditeurs de taille et de bassin linguistique plus limités,

du passage d’un modèle de vente pérenne à celui d’abonnements à des flux, sans possibilité de conservation de certaines publications pour les institutions académiques.

Le développement du numérique dans la diffusion scientifique conduit à cette situation paradoxale où un développement rapide du nombre de revues créées et d’articles publiés chaque année s’accompagne d’un appauvrissement de la diversité et de la profondeur des publications effectivement accessibles pour les chercheurs et à un renchérissement global des dépenses d’acquisitions.

Parallèlement, ces évolutions ont également des effets importants sur les données scientifiques que produisent les chercheurs et qui sont au fondement des raisonnements qu’ils développent dans leurs écrits. Il peut s’agir de données d’observation, capturées en temps réel, comme en neuro-imagerie, en photographie astronomique ou dans le cadre d’enquête ; de données expérimentales obtenues à partir d’équipements de laboratoire, telles des chromatogrammes ; de données computationnelles, générées par des modèles informatiques, par exemple en météorologie ou en économie ; ou encore de données dérivées, issues du traitement ou de la combinaison de données brutes ou de petits jeux de données, comme dans le cas de bases de données génétiques, de résultats de fouilles de texte, ou de collections d’écrits ou d’archives historiques31.

Grâce au numérique, ces données se développent rapidement, en nombre et en sophistication, et leur diffusion joue un rôle toujours plus important dans toutes les disciplines. En y accédant librement, les collègues chercheurs peuvent en effet les explorer, les visualiser et les comparer, et effectuer leurs propres analyses, afin de valider ou d’infirmer les conclusions qu’ont tirées les auteurs. Il est devenu courant, sinon impératif pour les chercheurs de rendre les données accessibles aux côtés des écrits, sur la plate-forme de l’éditeur, sous la forme de fichiers numériques ou par l’intermédiaire de liens hypertexte, en plus d’intégrer certaines des données directement au texte de la publication.

La difficulté réside dans le fait que les éditeurs, en tant qu’opérateurs du service de mise à disposition, tendent, dans les contrats de cession portant sur l’écrit, à demander des licences toujours plus étendues sur l’exploitation de ces données, ce qui n’est pas sans poser de risques sur leur libre circulation, essentielle au bon fonctionnement de la recherche.

La situation est particulièrement problématique pour l’accès aux productions de la recherche publique, dont la plus grande partie des coûts sont pris en charge par la puissance publique. Dans le cas de la publication d’articles, les auteurs-chercheurs ne sont qu’exceptionnellement rémunérés par les éditeurs, sauf dans certains domaines comme le droit. De même, le travail d’évaluation par les pairs est en général réalisé de manière gratuite par les chercheurs32.

2. Objectifs poursuivis

Compte tenu des effets ambivalents de ce contexte sur la circulation scientifique, il importe de favoriser une diffusion étendue des résultats de la recherche, en levant les entraves à leur circulation et en recherchant un nouvel équilibre plus juste entre les intérêts du monde de la recherche et du secteur de l’édition à l’heure du numérique et de la société de la connaissance.

Il s’agit en même temps de mieux valoriser l’investissement public dans la recherche scientifique, en garantissant la possibilité pour les chercheurs dont les travaux sont majoritairement financés par des fonds publics de rendre rapidement leurs travaux disponibles à l’ensemble de la communauté scientifique. A la faculté ainsi ouverte à chaque chercheur de mettre à disposition le fruit de ses travaux répond ainsi la faculté nouvelle pour ses collègues d’accéder librement à l’état le plus avancé de la science dans leurs domaines d’activité.

Il s’agit enfin de reconnaître que les données de la recherche produites par ces chercheurs sont des données d’intérêt public dont la vocation même est de pouvoir circuler dès lors qu’elles ont été rendues publiques. Nul ne doit pouvoir priver autrui de leur usage. Cet objectif rencontre celui de la transparence et de l’intégrité de la recherche, valeurs auxquelles la communauté scientifique est attachée. Il s’agit en même temps de mettre fin aux formes de capitalisation sur les données qui se développent dans le domaine de l’édition scientifique, dès lors que des données accompagnent des écrits qui, pourtant, sont seuls protégés, par principe et sauf nature particulière des données, par des droits de propriété littéraire et artistique.

Deux limites légitimes doivent cependant être posées à ce principe :

a) Il s’agit d’abord d’exclure du périmètre des données concernées les données qui, du fait de leur nature ou du contexte dans lequel elles ont été produites, sont soumises à des droits particuliers, qu’ils soient d’origine contractuelle ou légale. Il faut notamment évoquer à cet égard la protection due au respect de la vie privée, aux données à caractère personnel, et à la propriété intellectuelle. Ces données mises à l’écart, les autres données ont vocation à pouvoir être librement réutilisées ;

b) Il s’agit ensuite de subordonner l’entrée des données dans un régime de libre réutilisation à leur publication effective, afin de préserver les données confidentielles en vertu d’un contrat de collaboration, ou au titre de secrets protégés par la loi, comme le secret professionnel ou le secret défense. Ainsi, une fois que les chercheurs ou leurs établissements ont décidé de rendre leurs données publiques, aucun obstacle ne doit pouvoir entraver leur libre réutilisation.

Une étude récente a ainsi mis en évidence l’effet bénéfique de l’ouverture d’une publication en sciences humaines et sociales sur son audience. Elle montre que l’accès gratuit à une publication auparavant payante provoque un “effet rebond” propice à sa diffusion, et que plus l’accès gratuit est précoce, plus l’audience totale de la publication est importante 33. De même une étude anglaise récente parvient à une estimation tendant à montrer que les bénéfices d’une politique de diffusion et de réutilisation des données de la recherche pourraient être quatre fois supérieurs à son coût, en tenant compte des économies réalisées34.

La visibilité et la compétitivité de la recherche française sur la scène mondiale sont des enjeux primordiaux, dans un contexte international de plus en plus concurrentiel35. A cet égard, l’accès ouvert aux publications et aux données scientifiques françaises contribue au rayonnement de la recherche française, comme à celui de la francophonie. La diffusion du savoir constitue aussi un facteur de développement pour les pays émergents, dont les institutions académiques ne sont pas toujours en mesure de s’acquitter des coûts de la documentation scientifique. A l’échelle nationale, l’accès ouvert aux publications et aux données de la recherche participe d’une démarche d’innovation ouverte, qui permet à chacun de se saisir librement des résultats de la science.

La diffusion libre des résultats de la recherche relève également de la diffusion générale des connaissances dans la société du savoir qui s’ouvre avec la révolution numérique36. Les nouveaux modes d’évaluation de la recherche qui émergent (altmetrics) traduisent en parallèle cette nouvelle approche : il ne s’agit plus seulement de s’intéresser à la circulation des résultats de recherche à l’intérieur des communautés scientifiques mais aussi à la façon dont ils sont reçus par la société tout entière. L’accélération de la mise en accès ouvert des productions scientifiques ne peut que favoriser cette circulation auprès d’un public plus large, y compris auprès des publics empêchés, en favorisant l’adaptation des ressources libres à leurs besoins.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

3.1 Option possible en dehors de l’intervention de règles nouvelles :

La “voie dorée” (ou “Open Access Gold”) constitue une possibilité pour développer l’accès ouvert aux résultats de la recherche à l’ensemble de la communauté des chercheurs et des citoyens. Dans ce modèle, aussi appelé “auteur-payeur”, les coûts de “libération” de l’article (Article processing charge - APC) sont payés dès sa parution par l’institution à laquelle est rattaché l’auteur. L’avantage de ce processus est que l’article ainsi publié est immédiatement accessible à tous sans délai, et que les risques de perte de chiffre d’affaires pour les éditeurs sont parfaitement maîtrisés.

Pour une grande majorité de chercheurs en France, ce modèle, en pleine expansion dans les politiques éditoriales, reste étranger à leur conception de l’édition scientifique : parmi les directeurs d’unités publiantes du CNRS, 83 % de ceux qui n’ont jamais payé pour faire éditer un article en accès ouvert déclarent qu’ils n’envisagent pas de le faire37.

En outre, des interrogations se font jour sur la soutenabilité financière de ce modèle à long terme. A titre d’exemple, si on fait l’hypothèse extrême qu’à terme tous ses articles sont publiés en accès ouvert sur la base d’un montant d’APC de 2 200 € par article (moyenne constatée chez l’éditeur Nature Springer), le coût de la “voie dorée” généralisée supporté par le CNRS serait six fois plus important que son budget d’abonnements actuel38. La publication d’un article dans une revue gold exige en outre plus de temps que le dépôt dans une archive institutionnelle telle HAL, ce qui se traduit par des coûts supplémentaires de nature salariale39.

Enfin, le modèle “auteur-payeur” ne semble pas garantir un facteur d’impact plus important aux revues que les autres modèles de publications en accès ouvert40. De manière générale, sa généralisation risquerait d’accroître les inégalités entre établissements, entre disciplines selon leurs tailles et les capacités contributives de leur audience, et pourrait créer des suspicions sur la qualité de la sélection des articles, compte tenu des nouvelles incitations économiques pour les éditeurs de revues. Dans les cas extrêmes des « revues prédatrices »41 – ces nouvelles revues apparues uniquement pour profiter de l’effet d’aubaine du Gold – il n’y a plus aucune sélection des articles, et y publier n’a donc aucune valeur scientifique : face à leur multiplication, des alertes ont été lancées pour prévenir notamment les jeunes chercheurs qui n’ont pas encore une bonne connaissance du paysage éditorial scientifique.

En ce qui concerne la libre diffusion des données de la recherche, l’absence d’une protection garantie par la loi laisse le champ libre à des formes abusives de capitalisation sur les fruits de la dépense publique par des acteurs privés, en dépit de déclarations de principe contraires exprimées depuis une dizaine d’années42. Dans ces conditions, l’introduction de nouvelles règles paraît nécessaire.

Choix des délais maximaux d’embargo :

La mise en place d’embargos est le résultat d’un compromis entre les intérêts de l’éditeur, soucieux de disposer d’un temps d’exploitation économique exclusive de la publication, et les attentes de la communauté de la recherche, attachée à une diffusion libre de la connaissance la plus rapide possible.

Les délais maximaux d’embargo ont été fixés à 6 mois pour les sciences, la technique et la médecine et 12 mois pour les sciences humaines et sociales. Ces durées sont conformes aux délais préconisés par la recommandation précitée de la Commission européenne du 17 juillet 2012.

Ils sont également comparables ou identiques aux délais choisis par les autres pays ayant pris des mesures législatives ou réglementaires en matière de libre accès aux publications scientifiques, tout comme à ceux choisis par les institutions de financement de la recherche nationales et internationales. Ainsi, par exemple : Allemagne (12/12 mois), Argentine (6/6 mois), États-Unis (12/12 mois), Espagne (12/12 mois), Italie (18/24 mois) ; programme cadre de recherche Horizon 2020 (6/12 mois), Research Council UK (6/12 mois), agences canadiennes (12/12 mois), agences indiennes (6/12 mois).

Parallèlement, les délais d’embargo pratiqués par une grande partie des éditeurs nationaux et internationaux s’étalent aujourd’hui entre 0 et 24 mois, exceptionnellement jusqu’à 48 mois pour certaines revues de sciences humaines et sociales. Il demeure également des éditeurs qui s’opposent à la possibilité d’une rediffusion des publications, même à des fins non commerciales, par les chercheurs.

3.2 Motifs du recours à une nouvelle législation :

Il s’agit d’ouvrir la possibilité d’une diffusion en accès libre des travaux scientifiques financés sur fonds publics, au terme d’une durée dite « d’embargo » préservant les droits exclusifs des éditeurs. Il s’agit en même temps de sécuriser juridiquement des pratiques existantes dans la communauté scientifique et bien tolérées par les éditeurs. La création de ce nouveau droit pour les auteurs des travaux nécessite l’intervention du législateur, afin qu’il s’impose dans l’ensemble des contrats d’édition à venir. Cette disposition crée un nouveau droit pour l’auteur de la publication et promeut un nouvel équilibre dans la relation entre un chercheur et son éditeur.

La mesure proposée suit les recommandations du 17 juillet 2012 de la Commission européenne relatives à l’accès et la préservation des informations scientifiques43, qui appellent notamment à veiller :

- « à ce que les publications issues de la recherche financée par des fonds publics soient librement accessibles dans les meilleurs délais, de préférence immédiatement et, dans tous les cas, au plus tard six mois après leur date de publication, et au plus tard douze mois pour les publications dans les domaines des sciences sociales et humaines » ;

- « à ce que les systèmes d'octroi de licences contribuent, de façon équilibrée, au libre accès aux publications scientifiques issues de la recherche financée par des fonds publics, dans le respect et sans préjudice de la législation applicable en matière de droit d'auteur, et encouragent les chercheurs à conserver leurs droits d'auteur tout en concédant des licences aux éditeurs (…) ».

La mesure vise également à favoriser et à protéger la libre réutilisation des données de la recherche, à partir du moment où elles sont rendues publiques. Elle suit en cela les lignes directrices du programme-cadre de recherche européen Horizon 2020 (2014-2020), qui encourage la diffusion en « open access » de toutes les données nécessaires à la validation des résultats présentés dans les publications. Elle est conforme à l’esprit de la déclaration de Berlin de 2003 sur le libre accès à la connaissance, signée par les plus grands établissements scientifiques mondiaux44, ainsi qu’à la déclaration de Bruxelles précitée, portée par le secteur de l’édition. Elle répond enfin à une forte demande de la communauté de la recherche, exprimée par plusieurs contributions dans le cadre de la mise en consultation du projet de loi en ligne, et particulièrement à l’occasion du « GouvCamp » du 16 octobre 2015, qui a rassemblé les principaux représentants de l’informatique scientifique et technique français45.

Cette libre diffusion et réutilisation des données de la recherche est favorisée de deux manières :

D’une part, la mesure spécifie que les données de la recherche non protégées issues de travaux financés majoritairement sur fonds publics sont librement réutilisables, à partir du moment où elles ont été rendues publiques, posant ainsi les prémices d’une définition positive du domaine commun de la connaissance.

D’autre part, la disposition interdit plus généralement à l’éditeur d’un écrit de restreindre la réutilisation de données liées à des travaux financés majoritairement sur fonds publics dans le cadre d’un contrat d’édition.

Ces mesures sont d’ordre public.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impact pour la puissance publique :

La mise en place de délais d’embargo et la libre réutilisation des données de recherches par les chercheurs autorisent une maîtrise accrue de la puissance publique sur les produits d’une activité de recherche qu’elle a elle-même financée. A l’image de l’évolution constatée dans de nombreux pays, l’adoption par la France de mesures en faveur du libre accès est de nature à favoriser le développement du mouvement de « l’open access » et à instaurer une relation plus équilibrée entre les institutions académiques et le secteur de l’édition scientifique à l’échelle nationale, voire européenne et mondiale. Sur le long terme, cette évolution favorise une meilleure régulation des coûts de l’information scientifique et technique, aujourd’hui largement supportés par la puissance publique.

4.2 Impact économique et social :

En augmentant la productivité de la recherche et en démocratisant leur accès, le partage des données de la recherche concourt au développement économique et social. A titre d’exemple, les bénéfices économiques du projet international de séquençage du génome humain INSDC46, qui repose sur une contribution internationale à une banque ouverte de données, a été estimé à 800 milliards de dollars, s’accompagnant d’une création de 310 000 emplois, pour 3,8 milliards investis par le gouvernement américain47.

4.3 Impacts sur la recherche :

La mise en accès ouvert de publications et la libre réutilisation des données de la recherche favorise le partage des connaissances et des découvertes, anciennes et récentes, au sein de la communauté scientifique. Elle encourage les collaborations et l’interdisciplinarité, limite la duplication des efforts de recherche, contribue à l’amélioration générale de la qualité des travaux. Elle ouvre également la voie à une meilleure prise en compte des attentes de la société civile, favorisant une recherche et une innovation responsables. Elle profite enfin aux entreprises qui cherchent à innover, en particulier aux petites et moyennes entreprises qui n’ont pas les capacités d’investir dans la recherche et développement.

4.4 Impacts sur l’économie de l’édition scientifique :

a) Publications scientifiques

A titre liminaire, il est important de noter que la mesure laisse au chercheur le choix de mettre ses publications en accès ouvert ou de ne pas le faire, laissant aux nouvelles pratiques le temps de se développer librement. Les effets éventuels de la nouvelle législation sur l’économie de l’édition scientifique devraient ainsi être lissés sur plusieurs années48.

En outre, la mesure assigne un périmètre limité aux publications concernées, qui sont celles issues de la recherche publique financées à 50% sur fonds publics.

En choisissant un seuil de 50 % de part de fonds publics dans le financement pour qualifier les activités de recherche visées par la mesure proposée, le Gouvernement a privilégié un critère simple et quantifiable, répondant à la nécessité de distinguer clairement les activités financées essentiellement sur fonds privés, qui n’ont pas vocation à être concernées. Le critère se laisse naturellement insérer et évaluer dans les conventions passées entre les opérateurs publics de recherche et les entreprises. Cette approche est également celle retenue par l’Allemagne et l’Italie, principaux pays à avoir légiféré sur l’open access. La détermination des coûts de financement se fondent sur une analyse en « coût complet », qui intègre notamment les coûts salariaux associés au travail de recherche. 

Afin d’évaluer le risque de baisse de chiffre d’affaires associé à la mesure proposée, il s’agit de distinguer l’effet sur les pratiques d’achat d’articles à l’unité de celui sur l’abonnement aux revues, que les éditeurs commercialisent en général par bouquets de quelques dizaines à quelques milliers de revues. Une étude commandée par le diffuseur Cairn.info, plateforme spécialisée dans les revues en sciences humaines et sociales (SHS), indique que la part de vente à l’unité dans son chiffre d’affaires est très limitée, puisqu’elle n’est globalement que de 3,9%, et que de 2,54% (soit 96.000 € en 2014, sur un chiffre d’affaires de 3,77 M€) si on considère uniquement les ventes d’articles effectuées 12 mois après leur parution49.

Une autre étude, conduite en 2012 aux États-Unis après quelques années d’existence d’une plate-forme d’accès libre en médecine et sous une législation fixant une durée d’embargo d’un an, tend quant à elle à montrer que la mise en accès ouvert des publications se traduit par un recul limité des accès via les sites des éditeurs50.

Enfin, le risque de désabonnement à des revues isolées ou à un bouquet de revues, lié directement à la mise en accès libre d’une partie de leur contenu, est plus difficile à évaluer, mais sans doute très faible, dans la mesure où, quelle que soit la durée du délai d’embargo, la possibilité d’accéder aux publications dès leur parution demeurera toujours une attente majeure de la part des chercheurs, vis-à-vis de leur établissement ou de leur bibliothèque.

En toute hypothèse, l’expérience allemande nous éclaire : au terme d’une année d’application de la loi, 10 % des chercheurs environ ont fait exercice de leur droit sur leurs nouveaux écrits. Il peut ainsi être raisonnablement estimé que la disposition proposée sera d’impact progressif et mesuré.

b) Données de la recherche

S’agissant des données de la recherche rendues publiques après la publication de la loi, le III de l’article L. 533-4 du code de la recherche créé par le présent projet de loi empêche un éditeur scientifique de limiter leur réutilisation par des tiers, sans préjudice de l’utilisation qu’il pourrait en faire lui-même. La mesure n’est par ailleurs d’aucun effet sur l’exploitation de licences qu’il pourrait détenir sur des données de la recherche rendues publiques dans le passé.

Le commerce de données de la recherche reste un secteur d’activités très peu développé, limité à quelques services spécialisés offrant des services d’analyse et de fouille de données sur des corpus très étendus. L’impact d’une disposition limitant l’exclusivité sur le flux, sans porter atteinte au stock, apparaît limité, au surplus très progressif, à l’échelle microéconomique. A l’échelle macroéconomique, la disposition est au contraire source d’externalités positives importantes à moyen-long terme, ouvrant à tout acteur innovant la possibilité de développer des services à haute valeur ajoutée sur des données accessibles à moindre coût, voire à coût nul.

Focus 1 : Impact économique sur l’édition scientifique institutionnelle en France

L'impact de cette mesure sur les équilibres économiques de l'édition scientifique institutionnelle française, essentiellement constituée d’éditeurs de sciences humaines et sociales, doit être relativisé dans la mesure où la majorité de leur chiffre d’affaires est aujourd’hui constitué de subventions apportées par des établissements ou des laboratoires. Les revues ne représentent en outre, en moyenne, que 18 % de leur production éditoriale, et entre 40 % et 60 % du chiffre global des ventes associées ces revues est réalisé grâce aux publications de l'année, qui demeureront sous embargo au terme de la mesure proposée51, garantissant que ces acteurs ne devraient être touchés que marginalement.

Focus 2 : Situation économique de l’édition scientifique mondiale

L’édition scientifique mondiale se caractérise aujourd’hui par une forte concentration, de nature oligopolistique, autour de quelques groupes internationaux. Les 5 premiers éditeurs mondiaux contrôlent ainsi 40 % du marché des revues scientifiques en valeur en 2014. L’information scientifique et technique constitue une activité exceptionnellement rentable, avec un taux de marge opérationnelle moyen de près de 35 % pour les acteurs les plus importants en 201452. Pour cette même année, le premier acteur du secteur, RELX Group (ex-groupe Elsevier) réalise un chiffre d’affaires mondial de 6,1 milliards d’euros (hors expositions) ; Springer Nature, issu de la fusion récente entre Nature Publishing Group, Palgrave Macmillan, Macmillan Education et Springer Science+Business Media réalise pour sa part un chiffre d’affaires de 1,5 milliards d’euros. Leur taux de croissance connaît une progression régulière comprise entre 2 et 4 % par an.

Atteintes aux droits et libertés des chercheurs et éditeurs :

Il n’est pas porté atteinte au droit d’auteur, ni à la liberté de la recherche, la disposition laissant aux auteurs-chercheurs la liberté de ne pas exercer la faculté qui est offerte de mettre leurs écrits à disposition à l’expiration des délais d’embargo, et de ne pas rendre publiques les données issues de leurs travaux.

Il n’est pas porté atteinte aux situations légalement acquises, la disposition ne produisant des effets que sur les contrats d’édition conclus, ou les données rendues publiques postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi, et limitant le champ d’application du II du projet d’article L. 533-4 du code de la recherche, qui pose un principe de libre réutilisation sur les données de la recherche, à des données qui ne font pas l’objet d’une protection particulière.

Une atteinte limitée est portée à la liberté contractuelle des auteurs et des éditeurs, le caractère d’ordre public empêchant l’auteur ou son établissement de renoncer au bénéfice du droit qui lui est conféré en ce qui concerne les publications, et de céder à l’éditeur des licences tendant à limiter la réutilisation des données de la recherche. L’atteinte apparaît équilibrée au regard des finalités d’intérêt général poursuivies et conforme à la mission de diffusion des connaissances scientifiques qui est confiée à la recherche publique par l’article 14 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 modifiée.

Effectivité :

S’agissant des publications, la disposition sera d’un effet immédiat sur les contrats relevant en cas de litige de la compétence des tribunaux français. Compte tenu des nombreux pays ayant déjà pris des mesures législatives tendant à permettre au chercheur ou à imposer la diffusion en accès libre des travaux de recherche financés sur fonds publics53, le risque « d’évasion » des contrats vers des législations moins contraignantes apparaît très limité.

Par ailleurs, il importe de noter que les éditeurs tendent à intégrer les droits nationaux dans les contrats, dans la mesure où l’existence de dispositions nationales interdisant la cession de droits affaiblissent les contrats n’intégrant pas ces dispositions, y compris si ces contrats sont réputés relever d’un droit étranger. Ainsi, les contrats-types des grands éditeurs sont aujourd’hui en mesure de prévoir un périmètre de droits concédés à géométrie variable selon les pays et les institutions de rattachement de l’auteur, qui est interrogé par le contrat-type sur ces points, y compris lorsqu’il s’agit de publications d’agents du gouvernement fédéral américain soumis à un régime de domaine public. Ainsi, la mesure pourra avoir un effet concret sur des contrats régis par un droit étranger. En outre, le risque d’éviction de chercheurs français de revues étrangères paraît par conséquent pouvoir être écarté.

5. Consultations menées

Les principaux représentants de l’édition scientifique opérant en France ont été consultés.

Une consultation large a été menée dans le cadre de la Bibliothèque scientifique numérique (BSN), instance de coordination entre opérateurs de l’enseignement supérieur et de la recherche dans le domaine de l’information scientifique créée en 2009 à l’initiative du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. BSN fédère l’essentiel des acteurs des universités, écoles et organismes de recherche français. Le ministère de la Culture et de la Communication est associé à ses travaux.

6. Outre-mer

L’article 46 du projet de loi rend l’article 17 applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

L’article 47 (II) modifie en conséquence le code de la recherche pour l’application de l’article L. 533-4 dudit code, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

7. Mesure complémentaire à la loi : plan d’accompagnement des revues en sciences humaines et sociales (SHS) à la transition vers le libre accès

a. Contexte du plan d’accompagnement

Malgré le caractère très limité de l’impact économique immédiat induit par la modification du cadre législatif - lequel n’impose aucune obligation de dépôt aux chercheurs -, que les données chiffrées de l’étude Idate, vues ci-dessus (point 4) permettent de vérifier (a contrario de son scénario « maximaliste » d’un passage généralisé de l’ensemble des revues de SHS en libre accès après un an, aux conséquences plus brutales - ), les consultations menées par le MENESR, suivie de la consultation publique sur le projet de loi pour une République numérique, ont laissé apparaître néanmoins une crainte de nombreux éditeurs et directeurs de revues de sciences humaines et sociales (SHS), inquiets pour la viabilité de ces dernières en cas d’adoption de la mesure.

Cette inquiétude se nourrit d’ une fragilité particulière de l’édition française de revues en SHS, marquée par une diminution tendancielle des abonnements papiers, par le resserrement des budgets d’acquisitions des bibliothèques réorientés vers les plateformes de revues en sciences et médecine très onéreuses, et enfin par le recul de la langue française comme langue scientifique dans le monde.

Si le marché global des SHS (revues et ouvrages scientifiques et grand public) est important – le secteur universitaire de ventes de livres en SHS représente à lui seul 243,4 M€ en 201454-, en revanche la part propre au marché des revues de recherche en SHS est très circonscrite (12 à 13 M€ de chiffre d’affaires en 200955). Une caractéristique du secteur des revues en SHS est d’une part la place des éditeurs publics, avec un apport de moyens en amont (financiers et personnels) relativement stable, et d’autre part les caractéristiques des éditeurs privés – en majorité spécialisés, mais sans la concentration qu’on trouve dans l’édition STM (science, technique, médecine) -56, bénéficiant d’ un soutien public significatif.57 Néanmoins, le périmètre de leur marché étant restreint (300 abonnés par revue, donnée médiane58), l’équilibre économique des revues présente une fragilité particulière.

Cet état de fait s’accompagne d’une évolution de fond qui inquiète également de nombreux chercheurs en SHS : le recul du français comme langue scientifique (avec pour corollaire une baisse des abonnements aux revues réalisés à l’étranger, alors qu’ils réalisent pour certaines d’entre elles près de 50% de leur chiffre d’affaires). Ce phénomène de recul, sensible depuis au moins deux décennies, pose un problème spécifique à des sciences où la fécondité et l’acuité de la recherche dépendent pour une bonne part de la relation à la langue « naturelle ». La réduction de la circulation, accentuée par la surreprésentation de revues en langue anglaise sur les grandes plateformes internationales, produit un effet d’éviction au profit de l’écriture en anglais, qui, dans une majorité de sous-disciplines, peut conduire à un appauvrissement qualitatif. Les politiques de stimulation de la circulation sont donc dans ce domaine des politiques d’aide à la qualité et à la reconnaissance de la production scientifique dans l’univers international de la science.

Ainsi, pour permettre à l’ensemble des acteurs scientifiques de prendre au mieux le tournant important vers le libre accès, et selon la demande du Premier Ministre dans sa lettre du 23 novembre 2015 adressée à la Ministre en charge de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, le MENESR propose un plan de transition au libre accès des revues de SHS, en cohérence également avec le juste équilibre entre sciences humaines et sociales et sciences dures, réaffirmé le 19 octobre 2015 par Thierry Mandon lors de son entretien avec Carlos Moedas.

Conjointement à ce plan, le MENESR veillera, avec les acteurs concernés, à fortifier les dispositifs d’observation et d’alerte de l’édition en SHS (mise en place d’un observatoire de l’économie des revues en SHS), avec une attention particulière à l’évolution des politiques des établissements en matière d’incitation des chercheurs en SHS à déposer leurs articles dans des archives ouvertes institutionnelles, et à leur politique d’abonnements. Un tel observatoire est d’autant plus important qu’aucune étude d’envergure sur l’économie des revues en SHS n’a été réalisée depuis les années 2005-200959.

b. Principes du plan de transition

L’objectif du plan, qui sera lancé dès 2016, est d’aider les revues qui le souhaiteraient à mettre en accès libre l’intégralité de leurs numéros, soit sans délai soit au terme d’un délai minimal après leur parution pour continuer d’assurer leur viabilité (un an).

Ce mécanisme de diffusion en libre accès, dénommé « barrière mobile », se distingue, par son caractère global et systématique, de l’embargo posé sur les articles, qui bloque durant un temps déterminé (12 mois) le droit de diffusion gratuite accordé à l’auteur par la nouvelle mesure proposée (liberté qu’il exercera ou non, au terme du délai). Un très grand nombre de revues en SHS usent déjà de ce mécanisme, mais avec des délais longs de 2 à 3 ans (47% des revues hébergées sur la plateforme Cairn appliquent ces délais, par exemple), voire très longs, de 4 ans et plus (41% des revues Cairn).

Le plan leur permettrait donc de raccourcir la durée de leurs barrières, avec pour effet immédiat un accroissement et une accélération de la diffusion des résultats de la recherche française (offrant une visibilité accrue à nos universités et organismes de recherche), et plus globalement une meilleure diffusion des savoirs, au bénéfice de l’ensemble de la société.

Périmètre du plan

Le plan, ciblé sur les revues de recherche de haut niveau, s’adresse aux revues : 

- françaises, voire francophones,

- sélectionnées sur une base scientifique : dans un premier temps, les revues éligibles sont celles labellisées par le HCERES, soit environ 400 revues. Elles pourraient également, ultérieurement, être sélectionnées par un comité idoine élargi à l’Alliance Athéna, l’OST… ;

- existantes et nouvelles : le plan doit permettre de maintenir les conditions d’une pépinière de revues qui s’adaptent aux évolutions de la connaissance et des thématiques de recherche en SHS, dans un écosystème public et privé qui assure la diversité de l’édition de recherche francophone.

Modalités du plan

Le plan comprend un dispositif à deux volets favorisant la diffusion des résultats de la recherche française en SHS :

une aide à l’accélération de la diffusion en libre accès (réduction des barrières mobiles), qui prenne en compte des projets selon des modalités de calcul différentes, s’agissant d’éditeurs publics ou privés,

par une aide à la traduction en anglais (par exemple de résumés longs), afin de favoriser la diffusion des résultats eux-mêmes, établie en coordination avec les aides déjà existantes du CNRS et du CNL.

Le plan associera, dans un comité d’orientation, les principaux acteurs scientifiques et économiques (en tant qu’acquéreurs d’abonnements par exemple, ou financeurs actuels du soutien aux revues) concernés, qui élaboreront avec les éditeurs et directeurs de revue les modalités d’évolution des modèles de financement permettant d’atteindre l’objectif visé. Sont concernés les organismes et établissements de recherche (CNRS – notamment INSHS -, IRD, EHESS…), la CPU, ainsi que le MCC et le CNL. La BnF et l’ADBU (Association des directeurs de bibliothèques de l’ESR) auront également un rôle important, car les bibliothèques de recherche ont déjà l’expérience de modèles économiques nouveaux, notamment le passage d’un mode de financement en aval, par les acquisitions d’abonnements de revues, à un mode de financement en amont, par l’abonnement à des plateformes proposant des revues en accès libre, mais avec un complément payant de services à valeur ajoutée (modèle « Freemium »). Si cette nouvelle offre reste encore limitée à quelques acteurs (OpenEdition en France, Erudit au Canada), elle tend à se développer et pourrait être soutenue par le plan, notamment auprès de nouveaux acteurs pour maintenir la diversité indispensable de l’offre et des vecteurs de diffusion.

Financement du plan

Le plan proposera une montée graduelle des financements reposant notamment sur des appels à manifestation d’intérêt de la part des éditeurs et directeurs de revues. Une impulsion forte sera donnée par le MENESR, mais l’ensemble des acteurs cités ci-dessus membres de l’écosystème global de la publication scientifique (auteurs – comités de lecture – éditeurs – bibliothèques pour la diffusion des revues imprimées et l’accès aux plateformes de revues), sont concernés.

Dès 2016, l’accompagnement des premières revues volontaires pourra démarrer sur la base d’une enveloppe réservée par le MENESR d’environ 500 K€. Pour la suite, selon la cible visée - barrière mobile ramenée à 12 mois, ou libre accès immédiat, options qui peuvent être panachés en fonction du choix des revus -, l’ordre de grandeur des besoins financiers serait le suivant :

- dans le premier cas (barrière mobile de 12 mois), l’étude Idate permet d’évaluer le coût, pour environ 376 revues de recherche, à 3,15 M€, dont la moitié à la charge des établissements, français ou étrangers, via un coût d’abonnement global maintenu à son niveau actuel, voire adapté en une licence nationale (la disponibilité de revues de SHS dans l’ensemble des établissements de l’ESR français favorisant la transdisciplinarité), et l’autre moitié (1,5 M€) en accompagnement direct par l’État des revues sélectionnées60 : ces coûts maximum seraient toutefois diminués à proportion du nombre effectif de revues soutenues, compte tenu de la sélectivité du plan, qui s’adresserait par ailleurs aux revues quelle que soit leur plateforme de diffusion actuelle ;

- dans le second cas, à savoir le passage au libre accès immédiat d’un ensemble sélectionné de revues de recherche en SHS de haut niveau, l’accompagnement serait à hauteur des besoins de financement individuels de chaque revue pour accomplir ce saut, sachant qu’un nombre important d’entre elles sont déjà soutenues partiellement par les pouvoirs publics (universités, CNRS-INSHS…). Le coût de fonctionnement d’une revue est estimé, dans plusieurs études convergentes sur le coût à l’article estimé à 1000/1300 €61, entre 20 K€ et 35 K€, en fonction du nombre d’articles publiés par an. Sur une base de 200 revues sélectionnées, le coût maximum d’accompagnement serait de 4 M€/an, si l’on considère un financement complet des revues, à répartir entre les établissements (dont les coûts d’abonnements aux revues concernées seraient convertis en financement « en amont » aux revues, via un dispositif à élaborer de fonds de soutien) et le Ministère, à hauteur de 1,5 M€/an à inscrire dans le cadre de sa politique de soutien aux SHS.

Par ailleurs, l’accompagnement portant sur l’aide à la traduction a été évalué, pour 50 revues sélectionnées, à environ 200 K€/an.

Article 18
Appariement de fichiers à des fins de statistique publique et de recherche scientifique et historique

1. État des lieux

En France, le service statistique public, défini par la loi comme l’ensemble formé par l’Insee et les services statistiques ministériels, doit fréquemment réaliser des appariements de fichiers pour produire des statistiques et des études statistiques. Les informations de nature administrative permettent de produire davantage d’information statistique de qualité tout en réduisant significativement la charge d’enquêtes auprès des ménages et des entreprises. L’objectif de mettre à contribution autant que possible les sources administratives à des fins statistiques figure pour cette raison dans le code de bonnes pratiques de la statistique européenne, inscrit dans le règlement 223/2009 relatif aux statistiques européennes.

Certains projets de recherche scientifique publics nécessitent également d’apparier des sources de données entre elles. C’est le cas par exemple lorsqu’il s’agit d’étudier les liens entre les revenus salariaux et les revenus de remplacement (chômage, indemnités journalières d’assurance maladie, retraites), les liens entre la trajectoire scolaire et la trajectoire professionnelle ultérieure d’un individu, les liens entre les épisodes de chômage et les trajectoires professionnelles pour mieux comprendre la récurrence du chômage… On peut aussi citer des projets de recherche qui s’intéressent à l’évaluation a posteriori de réformes (comme par exemple celle de la formation professionnelle) ou des projets qui s’intéressent à l’estimation complète des coûts engendrés par la prise en charge de chômeurs. Ces recherches permettraient de répondre à de nombreuses questions que se posent les pouvoirs publics ou les parlementaires au moment de prendre une décision publique ou d’adopter une nouvelle loi (notamment lors de la réalisation d’étude d’impact).

La loi de 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, prévoit, dans son article 27 que l’utilisation du NIR (par exemple pour effectuer un appariement) ne peut être mise en œuvre que si le traitement a été autorisé par un décret en Conseil d’État, après avis motivé et publié de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), dès lors que ce traitement de données à caractère personnel est mis en œuvre pour le compte de l’État, d’une personne morale de droit public ou d’une personne morale de droit privé gérant un service public.

Les administrations de l’État, en particulier celles qui composent le service statistique public, et les organismes de recherche, notamment universitaires, doivent donc obtenir l’autorisation de ce traitement par un décret en Conseil d’État.

Dans la pratique, l’exigence du décret en Conseil d’État s’est révélée insurmontable pour les organismes universitaires ou de recherche, puisque très rares sont ceux qui ont pu obtenir qu’un ministre prenne l’initiative de porter un décret en Conseil d’État pour permettre un appariement dans le cadre d’un projet de recherche.

Seules des administrations appartenant au service statistique public ont pu, grâce à l’appui de leur ministre de tutelle, mettre en œuvre la procédure prévue par la loi. Les démarches sont toutefois très lourdes. Cette situation conduit dans beaucoup de cas à renoncer à engager certains appariements ou à en réaliser de manière dégradée, c’est-à-dire à choisir d’apparier les fichiers en utilisant un ensemble d’autres variables que le NIR (par exemple l’ensemble formé par le nom, l’adresse, la date de naissance etc.). Cette situation administrative entraîne donc une moindre qualité de la recherche française en sciences humaines et de l’évaluation des politiques publiques nationales.

2. Description des objectifs poursuivis

L’article vise à simplifier la procédure d’appariement dans le domaine de la statistique et de la recherche publique tout en garantissant un haut niveau de protection des données personnelles grâce à la mise en place d’un cadre de sécurité organisationnel et informatique très strict.

L’article permettrait de définir deux nouveaux dispositifs d’appariement distincts :

- pour la statistique publique, il s’agit de remplacer les appariements sur la base du NIR, utilisés parfois aujourd’hui, par des appariements sur la base d’une clé d’appariement non signifiante (à l’inverse du NIR, qui est signifiant puisqu’il permet de connaître directement le sexe de l’individu, ainsi que son année, son mois, son département et sa commune de naissance). La clé d’appariement, un code statistique non signifiant (CSNS), sera commune à toutes les sources statistiques. Cette clé sera changée tous les 10 ans. L’objectif est de mieux séparer les usages statistiques (utilisation du CSNS, clé d’appariement non signifiante) des usages administratifs (usage du NIR). Le choix d'un code statistique non signifiant vise à renforcer le principe d'un cloisonnement entre usage administratif et finalités de statistique publique et ainsi circonscrire l’usage des données contenant ce code au sein du seul service statistique public.

- pour la recherche scientifique publique, il s’agit de rendre possible les appariements de données en mettant en place les exigences de sécurité nécessaires pour leurs réalisations. Ceux-ci se feront sur la base d’une clé d’appariement non signifiante obtenue par une opération cryptographique réalisée sur le NIR. La clé associée à l’opération cryptographique sera spécifique à chaque projet de recherche : une nouvelle clé sera produite pour chaque projet de recherche. L’utilisation des données concernées contenant ce code ne sera pas possible en dehors du projet de recherche.

3. Nécessité de légiférer

3.1 Pour la statistique publique

L’article vise à permettre à la statistique publique de remplacer la procédure de décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL par une procédure de déclaration à la CNIL. Pour cela, il est nécessaire de modifier l’article 22 de la loi du 6 janvier 1978, en le complétant par un Ibis permettant de déroger au 1° du I et du II de l’article 27. La dérogation ne sera applicable que pour les traitements n’utilisant pas le NIR lui-même, mais un « code statistique non signifiant » dérivé du NIR : le présent article précise que ce code devra être créé par une opération cryptographique.

Le présent article précise également que les méthodes et le schéma organisationnel utilisés pour l’opération cryptographique devront répondre à un cahier des charges défini par un décret en Conseil d’État, pris avec avis motivé et publié de la Cnil. Le même décret en Conseil d’État précisera que l’organisme ou le service qui a effectué l’opération cryptographique, et qui donc détient la clé associée à l’opération cryptographique, ne peut avoir accès aux données confidentielles indexées par le CSNS. Ce décret sera rédigé en collaboration avec l’ANSSI.

Les données sensibles mentionnées au I de l’article 8 ou à l’article 9 de la loi du 6 janvier 1978 restent exclues du champ de l’article.

Le dispositif de création du CSNS, que le décret en Conseil d’État devra définir, reposera sur une opération cryptographique à clé secrète permettant de faire correspondre à un NIR un CSNS : ce processus permet à chaque NIR d’avoir un correspondant mais ne permet pas de recalculer le NIR d’origine à partir du CSNS en l’absence de la clé. Le CSNS aura une valeur à durée limitée dans le temps car le procédé sera répété tous les 10 ans avec des clés secrètes à chaque fois différentes. La gestion et le stockage des clés secrètes se feront dans des conditions de sécurité élevées (coffre-fort). En outre, Le CSNS resterait strictement confiné au sein du service statistique public.

Les clés secrètes, successives dans le temps, servant à créer le code statistique non signifiant pour les travaux de la statistique publique seront détenues par les seuls gestionnaires du répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP) dont la gestion est confiée à une unité dédiée au sein de l’Insee, soit une dizaine de personnes tout au plus. Elle ne serait donc pas accessible aux statisticiens de l’Insee n’appartenant pas à cette unité, ni à ceux des services statistiques ministériels.

Le schéma ci-dessous présente le processus de réalisation d’appariements sécurisés en utilisant le code statistique non signifiant (CSNS).

Les producteurs A et B transmettent d’une part les variables identifiantes (NIR ou informations permettant d’obtenir le NIR, soit les noms, prénoms, dates et lieu de naissance) ainsi qu’un code d’indexation aléatoire (N0 et N1 sur le schéma) au tiers de confiance « identités », c’est-à-dire le service de gestion du RNIPP. Ce dernier génère un code statistique non signifiant (CSNS) grâce à une opération cryptographique avec une clé secrète unique. Le CSNS est alors envoyé aux unités de gestion des données du SSP A et B. Les producteurs A et B transmettent d’autre part les variables informatives (données statistiques) et le code d’indexation aléatoire (N0 et N1 sur le schéma) aux unités de gestion des données A et B. Ceux-ci vont pouvoir créer chacun une table contenant uniquement le CSNS et les données statistiques, excluant donc les variables identifiantes. Après validation hiérarchique du besoin et déclaration à la CNIL, l’appariement des données A et B selon le CSNS pourra être réalisé.

Bien entendu, en pratique, ceci ne signifie pas que tous les statisticiens publics ont accès à tout moment à toutes les bases de données. Comme aujourd’hui, chaque équipe spécialisée sur un champ de statistiques est responsable et détentrice d’un nombre limité de fichiers. Lorsqu’un appariement entre fichiers de deux équipes distinctes apparaît nécessaire, celui-ci ne s’opère qu’après déclaration à la Cnil, donc validation hiérarchique du besoin.

Par ailleurs, le CSNS est bien sûr supprimé lorsque les données statistiques publiques sont ensuite mises à disposition des chercheurs par exemple.

Cette opération s’effectuera à chaque acquisition de nouvelles sources de données par le service statistique publique (enquête, source administrative…) mais aussi par périodicité de 10 ans pour modifier le CSNS.

3.2 Pour la recherche scientifique

L’article vise à permettre à des travaux de la recherche publique de remplacer la procédure de décret en Conseil d’État pris après avis de la CNIL par une procédure d’autorisation auprès de la CNIL. Lorsqu’il s’agit de données issues de la statistique publique ou de données fiscales, un projet de recherche doit d’abord être soumis au Comité du secret statistique pour obtenir la levée du secret statistique ou fiscal. Celui-ci examine notamment la finalité de la recherche proposée, la qualité des chercheurs, la sécurité mise en place, la pertinence des données dont l’accès est demandé... Cette procédure nécessite entre quatre et neuf mois. En complément du décret en Conseil d’État, un dispositif d’autorisation unique de la CNIL sera mis en place afin d’harmoniser et de sécuriser les procédures de demande et de réalisation.

L’article a pour objet de modifier l’article 25 de la loi du 6 janvier 1978, en le complétant par un 9°) permettant de déroger au 1° du I et du II de l’article 27. La dérogation ne sera applicable que pour les traitements n’utilisant pas le NIR lui-même, mais un code recherche dédié non signifiant (CRDNS) spécifique dérivé du NIR : le présent article précise que ce code devra être créé par une opération cryptographique.

Le présent article indique également que les méthodes et le schéma organisationnel utilisés pour l’opération cryptographique devront répondre à un cahier des charges défini par un décret en Conseil d’État, pris après avis motivé et publié de la Cnil. Ce décret définira les conditions techniques de sécurité pour la réalisation des opérations d’appariement afin de garantir la confidentialité et la traçabilité des données. Ce décret sera rédigé en collaboration avec l’ANSSI.

Comme pour la statistique publique, les données sensibles mentionnées au I de l’article 8 ou à l’article 9 de la loi du 6 janvier 1978 restent exclues du champ de l’article.

Contrairement à ce qui est prévu pour la statistique publique, une clé secrète différente sera créée pour chaque projet de recherche public, aboutissant à des NIR chiffrés différents pour chaque appariement. Il sera créé en conséquence pour chaque appariement, un code recherche dédié non signifiant (CRDNS) spécifique. Celui-ci serait obtenu par un procédé analogue à celui opéré pour la statistique publique, c’est-à-dire par séparation des données identifiantes des données informatives.

Le schéma ci-dessous présente de manière générique le processus de réalisation d’appariements sécurisés selon le code recherche dédié non signifiant (CRDNS).

Les producteurs A et B transmettent les variables identifiantes (NIR ou informations permettant d’obtenir le NIR, soit les noms, prénoms, dates de naissance) au tiers de confiance « identités ». Ce dernier génère un code recherche dédié non signifiant (CRDNS) grâce à une opération cryptographique avec une clé secrète spécifique au projet de recherche conservée dans des conditions de sécurités élevées par le tiers de confiance. Les variables identifiantes et le CRDNS sont alors envoyés aux producteurs. Ceux-ci créent chacun une table avec uniquement le CRDNS et les données informatives et donc suppression des variables identifiantes. Chaque producteur envoie ensuite la table résultante au tiers de confiance « appariement et mise à disposition » afin que celui-ci réalise l’appariement selon le CRDNS. Celui-ci est ensuite supprimé une fois l’opération d’appariement réalisée.

Dans ce schéma, le premier tiers de confiance n’a connaissance que des variables identifiantes et le deuxième tiers de confiance n’a connaissance que de données sans aucune information sur les identités.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impacts pour la statistique publique

Cette mesure permettra, grâce à l’utilisation d’un code statistique non signifiant (CSNS), un meilleur usage des données entre les divers services chargés de la production au sein service statistique public, évitant en particulier des enquêtes complémentaires, coûteuses pour l’État et lourdes pour les enquêtés.

Pour la statistique publique, cette proposition aura au moins quatre impacts bénéfiques :

mieux séparer les usages statistiques des usages administratifs. Le choix d'un code statistique non signifiant (CSNS) vise à renforcer le principe d'un cloisonnement entre données à usage administratif et données traitées à des fins statistiques. Qui plus est, contrairement au NIR, le CSNS est non directement nominatif, ce qui apporte des garanties supplémentaires en termes de confidentialité lors de travaux statistiques sur les fichiers ;

augmenter l’efficience de la production de la statistique publique. L’application de l’article permettra de définir un cadre mutualisé et sécurisé pour la réalisation d’appariement, ce qui augmentera l’efficacité globale de production de statistique ;

augmenter la qualité de certains appariements réalisés aujourd’hui ;

réduire les coûts de réalisation d’étude en limitant le recours à des enquêtes.

La faisabilité technique de ce processus ne présente pas de difficultés dans la mesure où ce type d’opération est déjà aujourd’hui réalisé au cas par cas pour chaque appariement autorisé par décret en Conseil d’État.

4.2 Impacts pour la recherche scientifique

L’impact d’une telle mesure sera considérable pour la communauté des chercheurs publics et par extension pour l’ensemble des pouvoirs publics qui bénéficieront des analyses scientifiques et objectives nouvellement possibles. En effet, cette mesure permettra de réaliser des appariements de fichiers jusqu’alors impossibles en France.

Comme pour la statistique publique, le procédé présenté est déjà mis en œuvre au cas par cas, sans harmonisation des procédures. Il est permis par autorisation de la Cnil ou décret en Conseil d’État, en particulier dans le domaine de la santé (qui restera hors du champ du présent article). La mise en place d’une organisation mutualisée et sécurisée pour la recherche scientifique optimisera les coûts de réalisation des appariements. Les coûts fixes constatés de telles opérations sont faibles et les coûts variables seront facturés aux demandeurs.

5. Consultations menées

L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) a été consultée et ses recommandations ont été prises en compte.

Le présent article a été soumis à la CNIL et ses remarques prises en compte.

6. Textes d’application et Outre-mer

Un décret en Conseil d’État fixera les modalités d’application du présent article.

L’article 46 du projet de loi rend le présent article applicable en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

TITRE II

La protection des droits dans la société numérique

La confiance est un facteur-clé de la croissance de l’économie numérique : confiance des usagers et des citoyens dans les services qui leur sont proposés, confiance des entreprises dans les transactions et la sécurité juridique de leurs activités. La loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique a défini un cadre général qui a permis un développement remarquable des services de la société de l’information. Le projet de loi entend s’inscrire dans cette continuité et, face aux nouveaux défis suscités par la seconde génération de l’internet, poser des jalons supplémentaires en faveur de la protection dans la société numérique.

Il s’agit de consolider des paramètres –clés de protection tels que :

- la neutralité et le caractère ouvert de l’internet ;

- la loyauté des plateformes ;

- la protection des données à caractère personnel et des correspondances privées.

Chapitre Ier

Environnement ouvert

Section 1
Neutralité de l’internet

Article 19
Définition du principe de neutralité de l’internet

L’article 19 inscrit dans la loi le principe déterminant de la neutralité de l’internet : il définit et énonce une règle structurante qui doit gouverner le fonctionnement du réseau numérique. La neutralité de l’internet est une composante essentielle à la confiance et à la protection des usages et de l’innovation dans l’écosystème numérique.

1. État des lieux

1.1 Principe de neutralité

Lors de la révision en 2009 du cadre réglementaire européen des communications électroniques « Paquet télécom », des mesures concrètes ont été adoptées concernant la neutralité des réseaux. Transposées en droit français dans le code des postes et des communications électroniques et dans le code de la consommation par l’ordonnance n° 2011-1012 du 24 août 2011 relative aux communications électroniques, ces mesures s’articulent autour de trois axes :

- le renforcement de la transparence et de l’information des consommateurs concernant les pratiques de gestion de trafic mises en œuvre par les opérateurs de communications électroniques (art. L. 121-83 et L. 121-83-1 du code de la consommation) ;

- la possibilité pour les pouvoirs publics d’intervenir dans les relations entre les opérateurs de communications électroniques et les fournisseurs de services de communication au public en ligne concernant les conditions d’acheminement du trafic (art. L. 32-4 et L. 36-8 du code des postes et des communications électroniques) ;

- la garantie du service et la préservation de l’internet dit « best effort » (art. L. 32-1 et L. 36-6 du même code).

Le règlement (UE) 2015/2120 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 établissant des mesures relatives à l’internet ouvert et modifiant la directive 2002/22/CE sur le service universel et les droits de l’utilisateur concernant les réseaux de communication et les services et le règlement (UE) n° 531/2012 concernant l’itinérance sur les réseaux publics de communications mobiles à l’intérieur de l’Union, dit règlement « Marché unique des télécommunications » ou MUT, précise notamment les règles en matière de neutralité de l’internet.

1.2 Pouvoirs de l’ARCEP

Le pouvoir d’enquête est un des fondements essentiels de la régulation du secteur des communications électroniques par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP).

Le recueil d'informations auprès du secteur permet entre autres à l’Autorité de mettre en œuvre son pouvoir de sanction lorsque cela est nécessaire au respect du cadre réglementaire.

En 2011, le pouvoir d’enquête prévu à l’article L. 32-4 du code des postes et des communications électroniques a été complété dans le cadre de la transposition en droit français des directives 2009/136/CE et 2009/140/CE du 25 novembre 2009 dites « Paquet télécom de 2009 » afin de lui permettre de recueillir des informations auprès des opérateurs mais également auprès des fournisseurs de services de communication au public en ligne, notamment en cas de demande de règlement d’un différend portant sur les conditions techniques et tarifaires d’acheminement du trafic.

S’agissant du pouvoir de sanction, l’ordonnance n° 2014-329 du 12 mars 2014 relative à l'économie numérique a permis le rétablissement du pouvoir de sanction de l'ARCEP en tirant les conséquences de la décision du 5 juillet 2013, par laquelle le Conseil constitutionnel avait estimé que les dispositions législatives relatives au pouvoir de sanction de l'ARCEP dans le secteur des communications électroniques n'étaient pas conformes à la Constitution.

En l’état du droit, l’action de sanctionner intervient à la suite d’un manquement. Or l’ARCEP ne doit pas s’envisager comme un seul juge des manquements, mais un régulateur chargé d’accompagner le développement du secteur. C’est pourquoi l’ARCEP doit pouvoir agir en amont et en particulier vérifier le respect des obligations de déploiement et d’investissement pour s’assurer de la compatibilité des trajectoires de déploiement de réseaux mobiles avec les obligations de couverture prévues dans les autorisation d’utilisation de fréquences des opérateurs.

Par ailleurs, l’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques permet de sanctionner les opérateurs qui ne respecteraient pas une décision prise par l’ARCEP dans le cadre d’un règlement de différends. Dans la mesure où l’ARCEP peut régler non seulement les différends entre deux opérateurs de communications électroniques mais également entre un opérateur de communications électroniques et un fournisseur de services de communication au public en ligne (FSCPL) à la demande de l’un ou l’autre des acteurs.

2. Description des objectifs poursuivis

Afin de consolider l’approche harmonisée de la neutralité de l’internet retenue au niveau européen dans le cadre du règlement « marché unique des télécommunications », le projet de loi inscrit le respect de la neutralité de l’internet, d’une part, dans les objectifs auxquels doivent veiller le ministre chargé des communications électroniques et l’ARCEP (I de l’article 19) et, d’autre part, au nombre des obligations s’imposant aux exploitants de réseaux ouverts au public et aux fournisseurs de services de communications électroniques (III de l’article 19).

Afin de garantir le caractère ouvert d’internet, il est proposé de préciser que les demandes d’informations peuvent porter non seulement sur l’acheminement mais aussi sur la gestion du trafic (II de l’article 19). Cette modification de l’article L. 32-4 du code des postes et des communications électroniques permettra à l’ARCEP de disposer des fondements juridiques lui permettant de demander des informations aux opérateurs sur les pratiques de gestion de trafic qu’ils mettent en œuvre et de s’assurer ainsi qu’ils respectent les dispositions du règlement européen « marché unique des télécommunications ».

Il s’agit ensuite d’assurer l’égalité de traitement dans les droits et obligations des opérateurs et des FSCPL face aux décisions prises par le régulateur dans le cadre d’un règlement de différend.

Il s’agit enfin, relativement aux obligations de déploiement de réseaux d’opérateurs, de permettre une action préventive de l’ARCEP. Cette dernière avait noté dans son rapport annuel pour l’année 2011, que l’attente d’un constat d’échec ou d’une inexécution, à la date à laquelle l’obligation doit être réalisée, pour mettre en demeure l’opérateur, entraine mécaniquement un report du calendrier initial, à l’instar des situations connues dans le passé pour les mises en demeure relatives aux obligations de couverture des réseaux mobiles de troisième génération. Les retards dans les déploiements des réseaux ne doivent pas être constatés mais anticipés. Aussi pour inciter et accompagner les opérateurs à suivre une trajectoire leur permettant d’atteindre les obligations à la date fixée, il convient de permettre à l’Autorité d’user de son pouvoir de sanction pour mettre en demeure l’opérateur concerné, avant l’échéance en cause, de se conformer à ladite échéance. Dans le contexte du déploiement des réseaux mobiles de troisième et quatrième générations, il est particulièrement important que l’ARCEP puisse s’assurer en temps utile du respect par les opérateurs de leurs obligations (4° du VI de l’article 19).

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Avec le développement de services innovants nécessitant une qualité supérieure, il est primordial d’encadrer strictement le principe de neutralité de l’internet, les mesures de gestion de trafic et l’impact que ces services spécialisés peuvent avoir sur la fourniture des services d’accès à Internet. Il ne faut pas qu’un fournisseur de service d’accès à internet puisse mettre en œuvre des mesures non justifiées qui limitent l’accès des consommateurs à l’internet ouvert.

Les modalités d’application du principe de neutralité peuvent s’envisager par un accroissement des pouvoirs de l’ARCEP. Les pouvoirs d’enquête peuvent porter atteinte à des libertés fondamentales garanties par la Constitution. A cet égard, ils doivent être strictement encadrés par la loi, c’est pourquoi la modification de l’étendue des pouvoirs d’enquête ne peut relever que du seul niveau législatif.

Le pouvoir de sanction de l’ARCEP ayant fait l’objet de contestation par le passé, il est désormais décrit dans des dispositions législatives qui garantissent la sécurité juridique de ses décisions. Ce pouvoir est d’ailleurs encadré par des principes issus de la Convention européenne des droits de l'homme. Le niveau de norme attaché au respect de ces principes relève du domaine législatif.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

1. L’ARCEP a déjà largement mis en œuvre ses pouvoirs d’enquête et le recensement des pratiques de gestion de trafic a permis de dissuader les comportements inappropriés si bien que les blocages très répandus auparavant (ex : blocage de la « VoIP » et du « P2P » sur le mobile) ont totalement disparu. L’Autorité n’a donc pas eu, jusqu’ici, besoin de sanctionner un opérateur en raison des mesures de gestion de trafic mise en œuvre. Cependant l’inclusion dans le code des postes et des communications électroniques d’une définition claire de la neutralité de l’internet est de nature à promouvoir l’innovation sans remettre en cause les fondements de l’internet ouvert. 

2. L’extension du pouvoir d’enquête n’engage pas de charge supplémentaire immédiate pour les autorités concernées ou les entreprises en cause. Ces derniers disposeront simplement de la faculté de recueillir davantage d’informations lorsque cela est nécessaire. Les dispositions correspondantes visent surtout à consolider juridiquement ce pouvoir d’enquête.

Le renforcement du pouvoir de sanction de l’ARCEP n’engage pas de charge supplémentaire immédiate pour cette dernière. Il s’agit d’une mesure de bonne administration qui vise à garantir la sécurité juridique des décisions de l’Autorité ainsi que l’égalité de traitement des acteurs du secteur des communications électroniques. Aucune dépense spécifique n’est nécessaire pour ce faire.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Article 20
Auto-hébergement

Le projet de loi introduit dans le code des postes et des communications électroniques une nouvelle disposition qui doit permettre à tout utilisateur d’héberger, par les moyens qu’il entend, ses propres données, en utilisant le réseau fournit par l’opérateur de communications électroniques. L’article est rédigé sous la forme d’une interdiction pour les opérateurs, de mettre en place des mesures techniques visant à empêcher l’utilisateur d’accéder à des données stockées sur un équipement approprié et connecté directement ou indirectement à Internet, via le service d’accès auquel il s’est abonné et via la « box » dont il dispose.

1. État des lieux

De plus en plus d’utilisateurs entendent héberger eux-mêmes leurs données par l’acquisition d’un serveur de donnée personnel. De cette sorte, ils sont maître du stockage et de la conservation de leurs données et peuvent y définir des règles d’accès, notamment à distance. Cette pratique assure un contrôle supplémentaire pour les utilisateurs de leurs données. Pour ce faire, ils doivent connecter ce serveur personnel à la « box » internet fournie par le fournisseur d’accès à internet.

Or certains fournisseurs d'accès à Internet français ne permettent pas d'héberger derrière la « box », un serveur personnel de données. Cette pratique s’observe, par exemple, lorsque des ports internet sont bloqués ou lorsque des adresses IP dynamiques sont allouées. L’installation d’un serveur chez soi requiert d’effectuer des opérations techniques de redirection de trafic de la « box » vers le serveur. L’allocation d’une adresse IP dynamique ou une limitation dans l’usage des ports internet empêchent cette redirection et donc la mise en place d’un serveur personnel. Or un utilisateur final doit avoir la liberté d’héberger par ses propres moyens, les informations qu’il traite, en particulier celles à caractère personnel (les courriels, les calendriers, les contacts, la messagerie instantanée...). Pour garantir cette liberté aux utilisateurs, il convient de s’assurer que les opérateurs ne mettent pas en œuvre des techniques empêchant l’hébergement par l’utilisateur de ses propres données. Aussi, la disposition interdit aux opérateurs de services de communications électroniques de limiter les services que peut mettre en place l’utilisateur pour ses propres besoins.

2. Objectifs poursuivis

La nouvelle disposition doit permettre à l’utilisateur de disposer librement de ses données en lui permettant d’héberger lui-même ses données. L’objectif est de conforter le pouvoir de l’individu de décider lui-même des méthodes de gestion de ses données. L’article s’inscrit ainsi dans le prolongement de l’article 26 qui inscrit le principe de libre disposition de ses données personnelles dans la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Comme pour la neutralité du net, avec le développement de services innovants et du marché des données, il est primordial de garantir strictement la liberté des utilisateurs en interdisant aux opérateurs de mettre en œuvre les mesures techniques de nature à limiter les capacités de contrôle des utilisateurs. La garantie de cette liberté relève du niveau législatif.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Certains opérateurs de communications électroniques, particulièrement attachés à la liberté des utilisateurs n’opposent déjà aucune résistance ni aucun blocage technique pour l’auto-hébergement. Il peut s’agir également d’une voie pour l’innovation en offrant des services supplémentaires à un utilisateur. En revanche, d’autres opérateurs, notamment pour des raisons de gestion de trafic limitent les capacités techniques des équipements chez l’utilisateur (la box).

Pour ces derniers, des développements logiciels seront nécessaires pour rajouter des fonctionnalités ou options. Une mise à jour logicielle sera donc nécessaire. Elles pourront se faire de manière très progressive, car tous les utilisateurs ne possèdent pas leur propre serveur.

Aussi cette mise à jour présente un coût très marginal.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Section 2
Portabilité et récupération des données

L’impératif de protection dans le numérique, c’est aussi l’assurance nécessaire pour les usagers et les entreprises d’être toujours en capacité de changer de fournisseur. Les situations « d’enfermement » où les utilisateurs des services numériques sont prisonniers de leurs fournisseurs sont préjudiciables tout autant à la liberté de choix individuelle qu’à l’efficience du marché. Il s’agit ainsi de garantir le caractère concurrentiel du marché et de réduire les barrières à la mobilité des utilisateurs.

Article 21
Portabilité et récupération des données

Le projet de loi introduit une nouvelle règle destinée à faciliter la fluidité des offres et services numériques en permettant à tout utilisateur de récupérer à tout moment, en toutes circonstances et sans justification les données qui ont été communiquées dans le cadre des services fournis, afin éventuellement de les transférer à tout autre fournisseur alternatif.

L’article vise en tout premier lieu les services de courrier électronique pour le grand public, qui constituent un service de référence essentiel dans les usages numériques. Le dispositif de portabilité est également conçu en faveur des consommateurs et des entreprises déposant des données en ligne.

1. État des lieux

1.1. Eléments économiques

1.1.1 Concernant les courriels

L’envoi et la réception de courrier électronique est l’une des utilisations les plus courantes d’internet : selon une étude Médiamétrie de 2014 43,2 millions de Français utilisent régulièrement Internet, et 95% d’entre eux consultent quotidiennement une messagerie électronique, sur ordinateur personnel mais aussi de plus en plus à partir de leur mobile et de leur tablette.

Deux types d’entreprises proposent des services de courrier électronique, permettant de recevoir, envoyer et stocker des courriels : les fournisseurs d’accès internet (FAI), le service étant lié à l’abonnement, et les « pure players » d’internet (ou OTT : over the top), qui proposent ce service sans lien avec un service d’accès à l’internet. La plupart des services de courrier électronique sont aujourd’hui gratuits pour les consommateurs, ou inclus dans l’offre de base d’accès à l’internet, et ne sont payants que si l’on souhaite dépasser une limite de stockage (100 Go pour Yahoo par exemple) qui concerne presque essentiellement les professionnels. Les opérateurs « pure players » qui proposent ces services le plus souvent gratuitement et se rémunèrent notamment grâce à la publicité.

L’article concerne uniquement les fournisseurs d’un service de courrier électronique comprenant la mise à disposition d’une adresse électronique. Les services de messagerie électronique tels que Skype, ainsi les messageries privées, par exemple celles mises en place par les banques pour communiquer avec leurs clients dans l’espace en ligne ne sont pas soumises aux dispositions de cet article.

1.1.2 Concernant les données stockées en ligne

Le cloud computing (informatique dans les nuages), apparu au cours des années 2000, consiste à délocaliser des données, des fichiers et des utilisations des ordinateurs des particuliers et des entreprises vers le « nuage (cloud) internet », c’est-à-dire vers des serveurs extérieurs, qui hébergent les données, les fichiers et les applications utilisées par le client.

Le cloud intéresse de plus en plus les particuliers et les entreprises. Il permet notamment de disposer de capacités de stockage supplémentaires, réduit les investissements en matériel informatique des entreprises, et permet plus de souplesse dans la gestion des données, ce qui intéresse particulièrement les PME. Il offre de plus la possibilité de confier un certain nombre de tâches (comptabilité par exemple, ou gestion de la clientèle) à des services en ligne, permettant ainsi aux entreprises d’alléger leur gestion informatique.

Le cloud computing est de ce fait en plein essor. En 2014 le marché français du cloud était estimé à près de 5 milliards62 d’euros, contre 2,3 milliards en 2009. Le cloud est d’après toutes les études prospectives appelé à se développer de manière exponentielle dans les années à venir. Il s’agit d’un des rares domaines du numérique où les entreprises européennes (SAP, Orange) conservent pour l’instant une part de marché appréciable par rapport aux géants américains (Google, Amazon et Microsoft en tête). La pénétration du cloud computing en France est pourtant plus lente que dans les autres pays européens : en 2014, 12% des entreprises d'au moins 10 personnes implantées dans l'Hexagone ont acheté des services d'informatique en nuage, contre 19% en moyenne en Europe. La France se classe ainsi loin, à la 21e place, des utilisateurs de cloud dans l'Union européenne63.

1.2. Eléments juridiques

1.2.1. Concernant les courriels

Il n’existe pas de disposition spécifique concernant la portabilité des courriels. Seul l’article L. 44-1 du code des postes et des communications électroniques approche le sujet, en prévoyant que les fournisseurs d’accès à internet doivent permettre à leurs clients qui changent d’opérateur de conserver gratuitement un accès aux messages reçus sur leur boite aux lettres électronique attribuée sous leur nom de domaine durant six mois.

Par ailleurs, la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique a introduit différentes dispositions dans le code civil (articles 1369-1 et suivants), qui confèrent une valeur juridique aux courriers électroniques dans le cadre d’un contrat.

1.2.2. Concernant les données stockées en ligne

Les activités de cloud computing sont soumises en partie à la législation en vigueur concernant les activités numériques, et notamment la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 Informatique et Libertés, en matière de protection des données personnelles, et la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 sur la confiance en l’économie numérique (en particulier son article 19 dressant la liste des informations obligatoirement fournies par le professionnel au consommateur dans le cadre d’un contrat conclu par voie électronique). Les contrats de cloud sont soumis aux dispositions du code civil régissant l’ensemble des contrats, ainsi qu’aux articles L. 121-16 et suivants du code de la consommation concernant les dispositions relatives aux ventes de biens et fournitures de prestations de services à distance.

Aucune mesure spécifique au cloud computing, notamment concernant la récupération des données, n’existe cependant à ce jour.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi a pour objectif principal de réduire la viscosité du marché en instaurant pour les clients de services numériques majeurs tels que le courriel, le cloud computing et les services en ligne associé à un compte utilisateur, un droit de récupérer et transférer leurs données aisément.

La perspective de perdre ses données ou de devoir se lancer dans une fastidieuse récupération manuelle de celles-ci peut en effet inciter le consommateur à renoncer à changer d’opérateur, quand bien même il ne serait plus satisfait de ses services. Le projet de texte permettra de lever cette barrière et améliorer ainsi le fonctionnement du marché, favoriser la concurrence et l’essor de nouveaux services innovants tout en offrant au consommateur une mobilité numérique accrue.

L’article L. 121-120 pose donc le principe d’un droit à la portabilité, à tout moment et sans justification.

2.1 Dispositions concernant les courriels

Le nouvel article L. 121-121  du code de la consommation, créé par le projet de loi, vise à favoriser la portabilité des services de courrier électronique. Il impose à l’opérateur de service de courrier électronique d’offrir au consommateur la possibilité de transférer sur un autre service ses courriels, ainsi que sa liste de contacts. Le dernier alinéa étend en outre l’obligation d’accès gratuit au courrier électronique reçu sur l'adresse électronique attribuée sous son nom de domaine durant six mois qui ne concernait jusqu’à présent que les FAI à tous les opérateurs de services de courrier électronique.

Plusieurs dispositions ont été prévues afin de garantir l’effectivité de cette portabilité :

gratuité de la fonctionnalité ;

référence à une migration « directe » (pour simplifier l’opération en ne se limitant pas à des fonctions d’exportation vers ou d’importation depuis le disque dur) ;

définition d’une obligation dans la limite des capacités de stockage de la boîte de courrier électronique de destination (l’opérateur pouvant toujours proposer un service premium payant avec une capacité plus importante) ;

édiction d’une obligation de transmission des informations techniques nécessaires entre opérateurs (plutôt que l’instauration d’un mécanisme plus lourd de coopération horizontale pouvant soulever des difficultés sous l’angle de la concurrence et de mise en œuvre pour certains opérateurs étrangers).

2.2 Dispositions concernant les données stockées en ligne

Le nouvel article L. 121-122 du code de la consommation, créé par le projet de loi, vise à favoriser la portabilité des données en cloud et celles associées aux comptes utilisateurs des services de communication en ligne.

Le développement de l’économie de l’infonuagique peut rendre les utilisateurs dépendants d’un fournisseur de service. Qu’il s’agisse du stockage de ses fichiers personnels en ligne, notamment de fichiers vidéos sur des plateformes, ou de traitement de données en ligne, l’utilisateur qui a importé une quantité importante de données personnelles peut hésiter à changer de fournisseur si ces données, qu’il n’a par ailleurs pas forcément conservées sur un serveur personnel, sont difficilement récupérables, ou récupérables dans un format incompatible avec un traitement par un autre fournisseur de service.

Par ailleurs la multiplication des services de communication en ligne s’est accompagnée d’une personnalisation croissante de ceux-ci. Beaucoup de services numériques sont désormais associés à un compte utilisateur qui enregistre les données liées à l’utilisation du service. Dans ce cas il est important pour le consommateur pour pouvoir passer d’un service à un autre d’être en mesure de récupérer les données liées à son compte utilisateur et résultant de son usage du service : playlists, albums de photos personnelles, historique de navigation ou d’achat, données de géolocalisation par exemple.

La disposition fait obligation aux fournisseurs d’un service de communication au public en ligne de proposer une fonctionnalité permettant la récupération aisée des fichiers déposés par le consommateur et les données associées à son compte utilisateur. Cette récupération des données doit être possible par requête unique ou au moins par type ou format de fichiers, afin d’éviter une procédure de récupération difficile ou fastidieuse à mettre en œuvre (par exemple effectuée fichier par fichier).

Quand les données sont saisies et traitées en ligne, il n’est pas toujours possible de récupérer les données brutes, qui peuvent être intégrées dans des fichiers d’un format propriétaire (cas par exemple d’un logiciel de comptabilité en ligne ou d’un service en ligne élaborant des plans et visualisations en trois dimensions à partir de cotes saisies par le consommateur). Dans ce cas, le dernier alinéa de l’article L. 121-122 fait obligation au service en ligne d’informer clairement l’utilisateur sur les difficultés éventuelles pour récupérer les données et, si une forme de récupération est possible, sur la procédure et la forme sous laquelle les données sont récupérables.

2.3 Dispositions communes

La sous-section 3 a pour objectif :

- d’étendre aux professionnels l’ensemble des dispositions précédentes. En effet ces obligations de portabilité visent des services à destination des consommateurs, mais également proposés à des professionnels. S’agissant du cloud computing, les barrières de marché dues à la difficulté de récupération ou portabilité des données concernent d’ailleurs notablement les entreprises ;

- de mettre en place des sanctions pour garantir l’effectivité du dispositif ;

- de renvoyer à un décret la fixation d’un seuil d’application des dispositions du présent article. En effet l’obligation de portabilité pourrait créer des contraintes trop lourdes pour des PME à leur création ou des entreprises dont l’activité en ligne n’est que secondaire. Le nouvel article L.121-125 du Code de la consommation confie donc à un décret le soin de définir le seuil en deçà duquel la portabilité n’est pas obligatoire. Ce seuil sera exprimé en nombre de comptes utilisateur actifs, qui est le meilleur moyen de mesurer l’activité d’un site en ligne.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

3.1 Concernant les courriels

Du fait du caractère juridiquement opposable des courriels depuis loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, il est nécessaire pour les consommateurs et les entreprises de pouvoir bénéficier gratuitement de la portabilité des courriers électroniques. Or les opérateurs concernés sont a priori peu disposés à offrir cette fonctionnalité sur simple requête de consommateurs, ce qui demande par ailleurs des échanges d’informations techniques entre eux. De ce fait, seule une intervention des pouvoirs publics semble à même de réaliser cet objectif afin d’en poser le principe et d’en définir les modalités (conditions techniques pour assurer l’interopérabilité, par exemple).

3.2 Concernant les données stockées en ligne

Le choix d’externaliser une solution informatique dans le cloud implique une perte de maîtrise sur cette solution durant la période contractuelle et pose nécessairement la question des modalités de récupération de cette maîtrise à l’issue du contrat. Or le cloud est très utilisé par les PME, qui représentaient en 2014 selon l’INSEE plus des trois quarts des acheteurs de services de cloud.

Les PME n’ont souvent pas les moyens humains et matériels de négocier les contrats avec les opérateurs de service du cloud à leur avantage, et ont du mal à récupérer leurs données lorsqu’elles souhaitent migrer vers un autre service. Ces considérations freinent d’ailleurs la diffusion de l’utilisation du cloud en France par les entreprises. Une intervention des pouvoirs publics se justifie donc parfaitement au regard des potentialités de croissance du cloud et des viscosités actuelles du marché.

Dans le cadre de l’agenda numérique, la Commission européenne s’intéresse à une possible réglementation des contrats du cloud. Un groupe d’experts a été lancé en juin 2013. Compte tenu de l’importance du sujet, et de la vitesse de son évolution, il apparait toutefois préférable d’adopter une réglementation nationale rapidement, dans l’attente d’une éventuelle initiative européenne qui ne saurait prospérer avant plusieurs années.

3.3 Options retenues

Selon l’article 34 de la Constitution : « La loi détermine les principes fondamentaux :

[…] du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ».

La mise en place d’obligations pesant sur les fournisseurs de services numériques est donc du domaine de la loi.

Le projet de loi vise à favoriser la portabilité des services de courrier électronique et des données et fichiers liées au cloud computing. Il s’agit d’une mesure de protection des consommateurs : il semble préférable de l’insérer à titre principal dans le Code de la consommation, au chapitre Ier du titre II du Livre premier, chapitre qui traite des pratiques commerciales réglementées.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Concernant les courriers électroniques

4.1.1 Portabilité des courriels et contacts

Pour les services de courrier électronique

Il est difficile d’évaluer les surcoûts engendrés par cette mesure pour les services de courrier électronique. La migration des courriels et des carnets d’adresse ne devrait toutefois pas nécessiter des dépenses majeures, à l’heure du déploiement du très haut débit. L’on estime que les coûts de développement informatique nécessités par la mesure demeurent dans des budgets accessibles, de l’ordre de quelques dizaines de milliers d’euros, pour des opérateurs très majoritairement de grande envergure (qu’il s’agisse de fournisseurs d’accès à Internet ou de pure players d’Internet).

La fluidification du marché induite par cette disposition doit par ailleurs permettre une plus grande concurrence et donc des gains d’efficience du marché, un meilleur développement économique des acteurs et l’essor de nouveaux services innovants.

Pour les consommateurs

La mesure proposée réduit le risque juridique qu’engendre une migration d’un service de courrier électronique vers un autre du fait de la valeur légale reconnue aux courriers électroniques. L’impact économique est difficile à évaluer mais sans doute faible pour les consommateurs, du fait de la prédominance des services de courrier électronique gratuits.

Les entreprises dont l’utilisation des services de courrier électronique est intensive, et qui ont recours à des solutions payantes, devraient pouvoir bénéficier d’un léger gain, cette mesure diminuant la viscosité du marché et leur conférant un pouvoir de négociation accru face aux opérateurs.

4.1.2 Maintien de l’accès aux services de courrier électronique après résiliation

Le maintien d’un accès gratuit au courrier électronique reçu six mois après résiliation ne devrait avoir qu’un impact limité, les consommateurs disposant d’un service de courrier électronique lié à leur accès internet étant déjà couverts par l’article L. 44-1 du code des postes et des communications électroniques, qui se trouve élargi à l’ensemble des services de courriel par la présente mesure.

En diminuant là aussi la viscosité du marché pour les entreprises, qui verront moins d’obstacles à un changement de service courriel, la mesure pourra améliorer la position des entreprises françaises, notamment les PME, dans leurs négociations d’achat de services informatiques.

4.2 Concernant les données stockées en ligne

4.2.1 La récupération des fichiers et des données utilisateurs en une requête unique

Pour les opérateurs

Les opérateurs devront développer une fonctionnalité permettant au consommateur en une requête unique, ou au moins par fichier ou type de format, de récupérer les fichiers et les données qu’il a déposés ou qui résultent de son utilisation du service. Le coût d’un tel développement dépend des systèmes d’information considérés, mais il devrait être limité, compte tenu du fait que toutes les informations relatives à un compte utilisateur données étant par définition en possession des opérateurs.

En outre, la création d’un seuil d’application permettra de ne pas pénaliser les entreprises à leur création ou celles dont l’activité en ligne est marginale.

La disposition permet d’exclure les cas dans lesquels la portabilité ou la récupération des fichiers sont susceptibles de soulever des difficultés techniques disproportionnées (par exemple pour des questions de format de fichier) ainsi que les possibles atteintes à la propriété intellectuelle.

Pour les consommateurs et les entreprises clientes

En rendant plus facile la rupture d’un contrat de cloud, la mesure proposée permettra de diminuer la viscosité du marché, et favoriser notamment le recours au cloud par les entreprises. Même si, selon une étude d’un cabinet privé64, la sécurité arrive largement en tête des motivations des entreprises n’ayant pas recours au cloud, la portabilité fait partie des préoccupations majeures suscitées par un recours au cloud. La mesure proposée favorisera donc la croissance du cloud computing en France.

4.2.2 L’information sur la restitution des données traitées en ligne

Aucun coût ni impact macro-économique significatif ne semblent pouvoir être associés à cette mesure, mais elle contribuera elle aussi à réduire à la marge la viscosité du marché, en améliorant l’information du consommateur et des entreprises clientes.

5. Consultations menées

Le Conseil national du numérique, à la demande du Premier ministre, a lancé une concertation nationale sur le numérique, afin d’associer les citoyens à la préparation du projet de loi. Cette concertation, menée en ligne et à travers plusieurs rencontres, pendant cinq mois (octobre 2014- février 2015) a conduit à l’élaboration d’un rapport remis au Premier ministre le 18 juin 2015.

Le sujet plus général de la portabilité des données est évoqué plusieurs fois dans les conclusions de la consultation. Parmi les 70 recommandations du rapport, on notera notamment la 4e qui s’intitule : « Favoriser la maîtrise et l’usage de leurs données par les individus ». L’un de ses paragraphes est consacré à « un droit effectif à la portabilité des données ».

6. Textes d’application et Outre-mer

Un décret fixera le seuil du nombre d’utilisateurs ayant fait l’objet d’une connexion au cours des douze derniers mois pour les fournisseurs de service de communication au public en ligne.

L’article 46 du projet de loi rend le 1° du I et le II de l’article 21 applicable à Wallis et Futuna. L’article 47 modifie en conséquence l’article L. 123-1 du code de la consommation.

Section 3
Loyauté des plateformes

Consolider les règles de protection dans la société numérique nécessite aussi de répondre aux nouveaux défis posés par le développement d’acteurs numériques puissants, qui, compte-tenu de leur pouvoir de marché et de leur audience incontournable, sont susceptibles de biaiser à leur avantage le fonctionnement du marché. Ces nouvelles « plateformes numériques » actives sur un grand nombre de segments (réseaux sociaux, commerce en ligne, moteurs de recherche, magasins d’applications, tourisme en ligne…) opèrent sur le marché dans le cadre du droit commun de la régulation économique (essentiellement le code de commerce). Au regard des enjeux critiques en cause, il apparaît aujourd’hui nécessaire de renforcer les obligations de loyauté applicables à ces nouveaux acteurs.

Article 22
Principe de loyauté vis-à-vis des consommateurs

Le projet de loi énonce une nouvelle obligation générale de loyauté de l’information vis-à-vis des consommateurs. Le projet de loi adopte également une définition générique de ces opérateurs de plateforme en ligne qui permet d’appréhender la globalité des évolutions en cours.

1. État des lieux

Comme l’a précisé le Conseil d’État dans son étude annuelle de 2014 « le numérique et les droits fondamentaux », « deux catégories d’acteurs jouent un rôle particulièrement important dans la diffusion des contenus sur internet : les opérateurs de communications électroniques qui les acheminent vers les utilisateurs finaux ; les plateformes qui proposent des services de référencement et de classement indispensables pour faire le tri dans la masse des informations et services disponibles ».

Or, en l’état actuel de la réglementation, les consommateurs ne disposent pas d’informations suffisamment précises et transparentes sur les règles de référencement et de classement mises en œuvre par certains professionnels.

L’article 134 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a toutefois inséré dans le code de la consommation à l’article L. 111-5-1 une nouvelle disposition qui prévoit que « sans préjudice des obligations d’information prévues à l’article 19 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, toute personne dont l’activité consiste à mettre en relation, par voie électronique, plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service est tenue de délivrer une information loyale, claire et transparente sur les conditions générales d’utilisation du service d’intermédiation et sur les modalités de référencement, de classement et de déréférencement des offres mises en ligne.

Lorsque seuls des consommateurs ou des non-professionnels sont mis en relation, la personne mentionnée au premier alinéa du présent article est également tenue de fournir une information loyale, claire et transparente sur la qualité de l’annonceur et les droits et obligations des parties en matière civile et fiscale. « Lorsque des professionnels, vendeurs ou prestataires de services sont mis en relation avec des consommateurs, la personne mentionnée au premier alinéa du présent article est également tenue de mettre à leur disposition un espace leur permettant de communiquer aux consommateurs les informations prévues à l’article L. 121-17 ».

Ainsi, le législateur a-t-il souhaité rendre plus transparente et loyale l’information à destination des consommateurs à l’occasion d’une mise en relation en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service. Ce principe inscrit dans la loi est limité aux mises en relation opérées soit dans le cadre des places de marchés (« marketplace ») soit à l’occasion d’une consommation dite collaborative entre consommateurs. A ce titre, un groupe de travail spécifique aux plateformes et à l’économie collaborative a été mis en place au sein du conseil national de la consommation composé paritairement de représentants d’associations de consommateurs et de représentants de professionnels. Les travaux devront permettre au Gouvernement de prendre le décret d’application mentionné dans la loi du 5 aout précitée.

Toutefois, en dehors de cette disposition, les plateformes ne sont pas précisément définies en droit et relèvent globalement des services de la société de l’information tels que définis par la directive 2000/31 ainsi que par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique sans qu’un principe général de loyauté et de transparence soit inscrit dans le code de la consommation. C’est pourquoi, le présent article propose de définir la notion d’opérateur de plateforme en ligne lorsqu’elle intervient dans le cadre exclusivement de la consommation et d’inscrire un principe de loyauté et de transparence et de préciser certaines informations fondamentales sur lesquelles il convient que l’information des consommateurs soit particulièrement claire.

2. Description des objectifs poursuivis

Dans ce cadre et dans le respect de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects techniques des services de la société de l’information et notamment du commerce électronique, des dispositions améliorant la transparence et l’information vis-à-vis des usagers des plateformes permettront d’améliorer le niveau de protection des échanges.

Il s’agit, notamment, de garantir une exigence de transparence à l’égard des usagers sur les conditions de référencement des offres de vente, achat, prêt, et échanges et sur leurs droits et obligations.

Le projet de loi introduit donc dans le code de la consommation une définition des opérateurs de plateforme en ligne en fonction de leur activité. L’objectif poursuivi est, à l’instar, de ce qui a été adopté dans le cadre de l’article 134 de la loi du 6 août 2015 et de l’article L. 111-5 du code de la consommation sur les sites comparateurs inséré par la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, de mieux informer le consommateur avant qu’il effectue son choix d’achat de biens ou de prestation de services.

Seules les activités consistant à référencer, classer des contenus, des biens ou services proposés ou mis en ligne par des tiers ou de mettre en relation, par voie électronique, plusieurs parties en vue de la vente, de la fourniture d’un bien ou service, y compris non rémunérées, entrent dans le champ de la mesure. Cette limitation permet d’éviter d’imposer une obligation d’information à tous les sites Internet quel que soit leur champ d’activité.

En cohérence avec la disposition adoptée dans le cadre de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, le projet de loi pose le principe d’une d’information loyale et transparente de l’opérateur de plateforme en ligne aux consommateurs sur les conditions générales d’utilisation du service, les modalités de référencement, de déréférencement et de classement des contenus.

La disposition prévoit, en outre, que les opérateurs de plateforme en ligne sont tenus de préciser l’existence ou non d’une relation contractuelle ou de liens capitalistiques avec les personnes référencées, ou l’existence d’une rémunération et son impact sur le classement, ce qui contribue à l’information loyale des consommateurs.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

La consultation du Conseil national du numérique et les contributions de nombreux acteurs du numérique ont mis en évidence la nécessité d’améliorer la clarté et la loyauté de l’information des consommateurs.

La Fédération de la Vente à Distance (FEVAD) a mis en place, il y a plusieurs années, une charte de bonnes pratiques pour le commerce en ligne. Mais cet outil non contraignant et n’est pas applicable à toutes les entreprises intervenant sur Internet. Les contrôles menés par la DGCCRF, qui se sont accrus avec l’essor du commerce en ligne et de l’économie collaborative, confirment les limites de l’information des consommateurs sur les plateformes numériques.

Il apparaît donc nécessaire d’inscrire la mesure dans l’ordre juridique national.

En l’espèce, cette mesure vient compléter les dispositions du code de la consommation relatives aux sites comparateurs, aux places de marché et aux sites œuvrant dans le champ de l’économie collaborative qui sont soumis à une obligation d’information transparente et loyale.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impact pour les consommateurs/particuliers

Les utilisateurs des sites des opérateurs de plateforme en ligne telles que définies par le projet de loi disposeront d’une information claire et transparente sur le classement des offres. Ils seront informés sur les modalités de référencement et déréférencement des annonces.

Ils disposeront en outre d’informations précises sur les conditions générales d’utilisation des sites et critères transparents de classement des offres notamment lorsque ces placements d’offres font l’objet d’une rémunération.

4.2 Impact pour les entreprises

Le projet de texte implique que les opérateurs de plateforme en ligne  modifient l’ergonomie de leurs sites en ligne afin que les informations auxquelles elles sont tenues puissent y apparaitre de manière claire et lisible.

4.3 Impact pour les administrations et impacts budgétaires

La mise en œuvre de la mesure appellera des contrôles par les services habilités par le code de la consommation, donc ceux de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes. Elle entraînera vraisemblablement la création d’un contentieux administratif spécifique lié aux recours formés à l’encontre des décisions d’amendes administratives prises par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, en cas de non-respect des obligations mises à la charge des professionnels. Cette nouvelle disposition engendrera nécessairement une mobilisation des services et des moyens supplémentaires ou une réorientation des priorités.

4.4 Impact sur l’ordre juridique interne/communautaire

Cette mesure introduit dans le code de la consommation des dispositions participant à l’amélioration du niveau d’information précontractuelle du consommateur. Elle s’inscrit dans la réflexion menée par la Commission européenne dans le cadre de l’agenda numérique qui s’intéresse notamment au rôle des plateformes, à la transparence et la loyauté des informations communiquées par ces plateformes à leurs utilisateurs.

5. Consultations menées :

Les entreprises du secteur ont été consultées sur ce projet de texte.

Le Conseil national de la consommation a également été consulté.

6. Outre-mer

L’article 46 du projet de loi rend l’article 22 applicable à Wallis et Futuna. L’article 47 modifie en conséquence le code de la consommation (nouvel article L. 116-2).

Article 23
Loyauté et régulation des plateformes

Cet article a pour finalité d’instituer la mise en œuvre d’une autorégulation des plateformes dont l’activité dépasse un seuil de nombre de connexions et de permettre à l’autorité administrative compétente de disposer d’éléments probants permettant un contrôle pertinent de l’activité de ces plateformes au regard de leurs obligations de loyauté et de transparence.

Il s’agit donc, au-delà des obligations inscrites dans le code de la consommation et définies à l’article 22, d’encourager les principales plateformes, dont l’impact sur l’économie et le pouvoir de marché sont très forts, à formaliser et mettre en œuvre de bonnes pratiques en matière de relations commerciales, à destination des consommateurs (afin de leur permettre de bénéficier d’une information claire et loyale) comme à destination des entreprises ayant des relations contractuelles avec les plateformes (afin de veiller à l’équilibre des conditions contractuelles).

1. État des lieux

Les principales plateformes en ligne, qui correspondent à des services variés (moteur de recherche, place de marché, plateforme d’intermédiation par exemple dans le domaine de l’économie collaborative) se caractérisent par un fort pouvoir de marché, renforcé par des effets de réseau très importants (« winner takes all »). Cette concentration se retrouve aussi bien du côté des consommateurs (par exemple le moteur de recherche de Google dispose d’une part de marché supérieure à 90% en Europe) que du côté des professionnels (annonceurs, etc.) ayant des relations commerciales avec les plateformes (par exemple, dans le domaine de la réservation hôtelière, différentes études suggèrent que les trois quarts des hôtels en France seraient référencés sur le site Booking.com, les réservations par cette agence en ligne représentant 30% de leur chiffre d’affaires). La loyauté de ces grandes plateformes dans leurs relations avec les consommateurs comme avec les entreprises revêt donc des enjeux économiques tout particuliers.

De manière générale, le projet de loi prévoit que toute plateforme en ligne est tenue de délivrer une information loyale, claire et transparente aux utilisateurs.

Il convient d’encourager les principales plateformes (notamment au regard de leur audience ou part de marché) à aller plus loin et de renforcer la transparence en permettant à leurs utilisateurs de mieux comprendre leurs conditions commerciales, et le cas échéant de mieux les comparer. Or, en l’état de la réglementation, les plateformes et notamment celles dont l’audience est importante, ne sont pas fédérées : ceci conduit à la mise en œuvre de pratiques distinctes, qui pourraient faire l’objet d’une mise en commun afin d’évaluer de manière précise la manière dont celles-ci mettent en œuvre leur obligation de loyauté et de transparence.

Il n’existe à ce jour aucune instance spécifique ni lieux d’échanges entre les plateformes les plus importantes et les principales parties prenantes, qui conduirait à développer pour l’ensemble du secteur des bonnes pratiques et permettre aux autorités publiques de contrôler plus aisément ces entreprises.

2. Description des objectifs poursuivis

Pour assurer la pleine effectivité de la mise en œuvre des principes de loyauté et de transparence, la mesure consiste à demander aux plateformes dont l’audience est importante à définir des bonnes pratiques et des indicateurs de référence et à rendre publique, périodiquement, l’évaluation de leurs propres pratiques. L’établissement d’indicateurs de performance et l’évaluation de leur application doivent permettre aux utilisateurs de disposer d’éléments améliorant leur confiance envers cette nouvelle économie numérique.

L’article prévoit, par ailleurs, pour réserver la mesure aux principales plateformes, qu’un décret fixera le seuil de connexions au-delà duquel les plateformes en ligne seront soumises à ces obligations. Ces bonnes pratiques pourront toutefois servir également de référence aux plateformes de plus petite envergure.

Afin de répondre aux attentes des parties prenantes et de rechercher une harmonisation des bonnes pratiques, des indicateurs et des informations transmises (et d’en faciliter la comparaison), il est souhaitable de prévoir une concertation entre les plateformes visées par cette mesure, ainsi qu’avec les parties prenantes.

Afin de disposer d’une concertation efficace et éviter l’écueil d’une collusion entre les acteurs les plus importants du secteur, les modalités d’organisation de cette concertation seront fixées par les pouvoirs publics. Les pouvoirs publics, les organisations professionnelles, les associations de consommateurs ou d’utilisateurs et les personnalités qualifiées y participeront. L’instance de concertation pourra s’appuyer sur des commissions consultatives existantes, notamment le Conseil national de la consommation et le Conseil national du numérique.

L’élaboration et la diffusion de bonnes pratiques, la détermination d’indicateurs pertinents de performance permettront également aux pouvoirs publics de mieux appréhender cette économie et de procéder si besoin à des enquêtes.

La disposition prévoit par ailleurs que l’autorité administrative compétente peut si elle l’estime nécessaire publier la liste des plateformes non vertueuses ne respectant par leur obligation et demander toutes informations utiles. Il s’agit par-là de compléter la possibilité de mener les enquêtes et de permettre à l’autorité administrative compétente de veiller à la bonne efficacité de la concertation et des initiatives des plateformes.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

L’autorégulation des plateformes aurait pu être prise en charge par les acteurs professionnels eux-mêmes (de type labellisation ou charte de bonnes pratiques). Pour autant, en dépit des échanges récurrents sur cette question depuis plusieurs années, aucune initiative n’a véritablement germé pour progresser collectivement sur les principes de loyauté et d’auto-régulation.

Il est apparu plus adapté de formaliser et structurer, dans la loi, l’action attendue des plateformes.

Par ailleurs, la disposition prévoyant la possibilité pour l’autorité administrative compétente numérique de publier la liste des entreprises non vertueuses impose de légiférer tout comme le principe d’une publication des indicateurs et de l’évaluation à la charge des professionnels concernés.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impact pour les consommateurs/particuliers

Les utilisateurs des plateformes telles que définies par le projet de loi disposeront d’une information sur les pratiques exercées par les plateformes en ligne. Le projet de loi prévoit en effet une diffusion publique des indicateurs de performance.

4.2 Impact pour les entreprises

Le projet de texte porte sur les principales plateformes, au-delà d’un seuil de connexions. L’objectif est de viser, par ce moyen, une à quelques dizaines de plateformes structurantes pour l’économie française.

Pour ces plateformes, le projet de loi implique que les plateformes acceptent de participer loyalement et en toute transparence à l’élaboration des indicateurs de suivi de performance et d’évaluer périodiquement leurs pratiques.

4.3 Impact pour les administrations et impacts budgétaires

Ces nouvelles missions nécessitent la mobilisation de moyens humains complémentaires au-delà des attributions de contrôle déjà existantes. En effet, l’autorégulation et son contrôle par l’administration avec l’éventuelle publication de la liste des entreprises non respectueuses des principes de loyauté et de transparence est une nouvelle mission.

4.4 Impact sur l’ordre juridique interne/communautaire

Cette mesure introduit dans le droit français des dispositions visant à déterminer des indicateurs de performance et de résultats des plateformes en ligne en termes de respect du principe d’une information loyale, claire et transparente. L’élaboration des indicateurs viendra alimenter l’évolution en cours au sein de l’Union européenne, notamment l’action menée par la Commission dans le cadre de sa stratégie pour le marché numérique. En effet, la Commission européenne a lancé en septembre 2015 une enquête qui devrait aboutir à d’éventuelles propositions visant à modifier le fonctionnement et l’encadrement des plateformes en ligne.

5. Textes d’application et Outre-mer

Un décret fixera le seuil du nombre de connexions et les modalités d’application du projet d’article L.111-5-2 du code de la consommation.

L’article 46 du projet de loi rend l’article 23 applicable à Wallis et Futuna. L’article 47 modifie en conséquence le code de la consommation (nouvel article L. 116-2).

Section 4
Information des consommateurs

Article 24
Information des consommateurs sur les avis en ligne

Le projet de loi fixe une obligation d’information loyale sur la qualité des avis publiés sur l’internet et renforce l’information des consommateurs concernant les débits proposés dans les contrats.

1. État des lieux

La question de la fiabilité des avis en ligne revêt un enjeu clair tant pour le consommateur que pour les entreprises présentes sur internet. Si imposer une vérification systématique des avis serait de nature à créer une contrainte technique et matérielle excessive pour certains sites internet et à remettre en cause la diversité des sources d’information pour les consommateurs, il n’en demeure pas moins que la confiance du consommateur dans les avis en ligne, et plus largement dans le commerce électronique, doit être protégée.

En France, il existe, en parallèle, depuis juillet 2013, une norme AFNOR portant sur les processus de collecte, modération et restitution des avis en ligne de consommateurs mais celle-ci est d’application volontaire. 43 organisations ont participé à l’élaboration de la norme. Dans le dispositif prévu pour la vérification des avis déposés, l’ambiguïté qui existe entre les notions d’acte d’achat et d’expérience de consommation démontre les difficultés à transcrire de manière générale un système permettant de procéder à la vérification des avis mis en ligne. En outre, le respect de ce dispositif normatif par les professionnels volontaires ne leur permet pas pour autant d’alléguer sur la vérification des avis déposés sur leur site puisque la norme ne fait que certifier un processus.

Au 30 août 2015, 15 entreprises sont certifiées par l’AFNOR sur le fondement de cette norme : 12 d’entre elles sur la base de l’intégralité du processus de contrôle (collecte, modération et restitution) et 3 uniquement sur la partie modération des avis.

Néanmoins, les professionnels peuvent, sans faire mention de certification, préciser que leur processus de contrôle est conforme à la norme. Dans ce cas, elles engagent leur responsabilité, la norme n’étant pas certifiée.

En 2014, sur 118 établissements contrôlés, la DGCCRF a prononcé 15 avertissements, et dressé 6 procès-verbaux. La qualification majoritairement retenue est la pratique commerciale trompeuse.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi introduit dans le code de la consommation une disposition imposant aux sites internet mettant en ligne des avis d’indiquer, de manière explicite, si leur publication a fait l’objet d’un processus de vérification, qu’il soit interne ou externe. Elle précise que, si le site procède à des vérifications, il est tenu d’en préciser clairement les principales modalités et de mettre ces informations à disposition des consommateurs de manière préalable. La mise en place de ce dispositif permettra ainsi au consommateur d’évaluer, par lui-même, le degré de confiance qu’il sera à même d’accorder aux avis disponibles sur le site et, par extension, au site internet qui les publie. Placer ainsi le consommateur en position d’arbitre apparaît de nature à responsabiliser les responsables de site web dans la mise en ligne des avis et à favoriser un assainissement des pratiques existantes.

Le succès du commerce électronique repose sur deux postulats complémentaires : la sécurité de ce secteur assurée par les professionnels et la confiance accordée par les consommateurs en corollaire. Dans le cadre de ce dernier postulat, la question des avis en ligne tient une place de plus en plus prépondérante. En décembre 2014, l’étude de l’IFOP sur l’impact de l’e-réputation sur le processus d’achat montre que le Web est devenu un vecteur d’information incontournable pour les consommateurs puisque plus de 80% des internautes déclare avoir recours à internet pour se renseigner avant d’acheter un produit. Dans ce cadre, 88% des consommateurs consultent les avis en ligne avant de procéder à l’achat sur internet ou en magasin et 85 % d’entre eux indiquent avoir été dissuadés de faire un achat suite à la lecture d’avis négatifs sur des blogs, forums ou sites des consommateurs. Parallèlement, 75 % des français estiment que certains des avis sont faux.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Le projet de loi vient compléter les dispositions du code de la consommation relatives aux sites comparateurs, aux marketplaces et aux sites œuvrant dans le champ de l’économie collaborative qui sont soumis à une obligation d’information transparente et loyale. Compte tenu du principe d’harmonisation maximale fixée par la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 relative à certains aspects techniques des services de la société de l’information et notamment du commerce électronique, il n’est pas envisagé d’imposer une vérification systématique des avis par les professionnels qui les mettent en ligne. Il s’agit essentiellement d’informer les internautes que les avis en ligne qu’ils consultent ont fait ou non l’objet d’une vérification et la nature de celle-ci, afin de leur permettre de déterminer le degré de confiance qu’ils leur accordent dans le cadre de leur décision d’achat.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impact pour les consommateurs/particuliers

Le baromètre 2015 ACSEL-CDC de la Confiance des Français dans le Numérique montre que, parmi les consommateurs interrogés, 89% d’entre eux ont recours aux sites de vente en ligne mais parallèlement, seulement 43% d’entre eux font confiance à ces commerçant en ligne, chiffre qui est en baisse par rapport aux statistiques publiés en 2013.

Les dispositions de l’article 24 permettront aux consommateurs de disposer d’une information claire et transparente sur la vérification des avis, de nature à augmenter le degré de confiance qu’ils sont susceptibles d’accorder au site de commerce en ligne qu’ils consultent.

Les consommateurs qui consultent ces avis n’ont pas toujours conscience que leur vérification n’est pas effectuée systématiquement par le site qui les publie. Les plateformes qui feront cette démarche devront, si elles communiquent sur ces vérifications, en préciser les caractéristiques principales et cela permettra ainsi aux consommateurs d’avoir une vision plus objective de l’information qui leur est délivrée.

4.2 Impact pour les entreprises

La question des avis en ligne dépasse la seule notion de commerce en ligne et s’intègre clairement dans la problématique de l’e-réputation. Ce concept agrège à l’espace numérique les questions d’identité et de notoriété. De nos jours, la « voix » de l’entreprise n’est plus unique et doit composer avec celles d’utilisateurs de mieux en mieux informés, de consommateurs de plus en plus experts et qui bénéficient d’un préjugé de confiance supérieur à celui dont elle bénéficie. Des avis positifs de consommateurs sont des relais puissant du discours commercial de l’entreprise ; à l’opposé, des avis négatifs de consommateurs, un « bad buzz », sont de nature à avoir un impact négatif dans la décision d’achat de clients potentiels.

Dans cette perspective, le dispositif prévu à l’article 24 implique que les sites publiant des avis en ligne, à titre principal ou accessoire, communiquent sur la vérification des avis postés par les consommateurs, que cette vérification soit réalisée en interne par l’entreprise ou externalisée auprès de prestataires spécialisés. Dans le même temps, les professionnels n’effectuant aucune démarche de vérification des avis publiés sur leur plateforme devront également mettre en place une information systématique sur leur site web.

L’obligation inscrite à l’article 24 permet de prendre en compte l’importance et la confiance qu’accordent les consommateurs aux avis de leurs pairs publiés en ligne et a vocation à encourager les professionnels du numérique soucieux de leur e-réputation, à mettre en place un système de vérification des avis en ligne et d’en informer les consommateurs. Pour les professionnels ayant déjà mis en place un système de vérification, les modalités mises en œuvre devront apparaître sur leur site, ce qui impliquera donc une modification de l’ergonomie de celui-ci.

4.3 Impact sur l’ordre juridique interne/communautaire

Cette mesure introduit dans le code de la consommation des dispositions participant à l’amélioration du niveau d’information précontractuelle du consommateur. Elle s’inscrit dans la réflexion menée par la Commission européenne dans le cadre de l’agenda numérique qui s’intéresse notamment au rôle des plateformes et à la transparence et la loyauté des informations communiquées à leurs utilisateurs.

5. Consultations menées

Ont été consultés sur ce projet d’article le Conseil National du Numérique ainsi que le groupe de travail auteur de la norme AFNOR NF Z74-501 pour fiabiliser le traitement des avis en ligne de consommateurs.

6. Textes d’application et Outre-mer

Un décret fixera les modalités d’application des mesures prévues par le présent article.

L’article 46 du projet de loi rend l’article 24 applicable à Wallis et Futuna. L’article 47 modifie le code de la consommation (nouvel article L. 116-2).

Article 25
Information des consommateurs sur les débits

Le projet de loi renforce l’information des consommateurs concernant les débits proposés dans les contrats.

1. État des lieux

L’information des consommateurs en matière de débits de connexion, proposés aujourd’hui dans les contrats, est définie à l’article L. 121-83 du code de la consommation. Les discussions dans le cadre européen du marché unique des télécommunications a fait apparaître un besoin de précision de ces informations.

2. Description des objectifs poursuivis

Ce projet d’article complète les dispositions du code de la consommation par des obligations relatives à l’information contractuelle des consommateurs sur les débits fixes et mobiles. Cette disposition permet une mise en en cohérence avec le règlement européen « marché unique des communications électroniques » et améliore ainsi la lisibilité du droit.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

S’agissant des obligations d’information du consommateur, Ces dernières sont prévues par la proposition de règlement « marché unique des communications électroniques » qui visent à renforcer la transparence sur les pratiques de gestion de trafic, sur la qualité de l’accès à internet complètent le cadre européen issu de la directive 2002/22/CE du 7 mars 2002 modifiée dite « directive service universel » en matière d’information contractuelle des utilisateurs de services de communications électroniques transposé à l’article L. 121-83 du code de la consommation. Elles ont donc vocation à être transcrites dans ce même article, afin d’améliorer la lisibilité du droit.

4. Analyse des impacts des dispositions

Le renforcement de l’information des utilisateurs de services de communications électroniques poursuit les efforts déjà engagés par le Gouvernement pour améliorer l’information des consommateurs sur les débits offerts par les services de communications électroniques dont l’arrêté du 3 décembre 2013 relatif à l'information préalable du consommateur sur les caractéristiques techniques des offres d'accès à l'internet en situation fixe filaire constitue une première étape.

L’inscription à l’article L. 121-83 du code de la consommation de ces nouvelles obligations de transparence contractuelle permettra par ailleurs, si nécessaire, d’en préciser les modalités de mise en œuvre par la simple modification de l’arrêté d’application prévu au dernier alinéa de l’article L. 121-83 (arrêté du 16 mars 2006 relatif aux contrats de services de communications électroniques).

Une fois la loi adoptée, le Gouvernement sera en mesure d’adapter si besoin l’arrêté de 2006 en concertation avec les opérateurs et les associations de consommateurs

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Chapitre II

Protection de la vie privée en ligne

La confiance dans le numérique ne peut durablement prospérer sans de solides protections en faveur de la vie privée et du respect des données à caractère personnel des usagers. Les évolutions constatées montrent à la fois un caractère de plus en plus intrusif des techniques et services numériques, et une préoccupation croissante des citoyens sur cette nouvelle frontière à inventer entre « vie en ligne » et « vie privée ».

Section 1
Protection des données à caractère personnel

La diffusion massive des technologies numériques dans la vie des Français fait apparaître de nouveaux défis pour le respect de certaines de nos valeurs, en particulier le droit au respect de la vie privée. La multiplication des fichiers publics et privés, la diffusion accrue des données à caractère personnel et la sophistication croissante des traitements sont l’un des plus visibles et des plus sensibles de ces défis.

Sur ces questions, la France dispose d’une législation ancienne et robuste aux évolutions technologiques avec la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

L’ampleur des collectes de données ainsi que plusieurs affaires récentes mettent néanmoins en exergue la nécessité d’un cadre renforcé pour la protection des données à caractère personnel.

Pour établir un environnement de confiance dans l’utilisation des outils numériques, le Gouvernement souhaite renforcer les droits des personnes vis-à-vis des fichiers contenant leurs données personnelles, et accorder des pouvoirs plus importants à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Ces évolutions interviendront prioritairement à travers le règlement européen sur la protection des données personnelles, actuellement en cours de discussion et sur lequel les négociations devraient aboutir prochainement. La France promeut aussi au niveau européen, le renforcement des pouvoirs du « Comité Européen de la Protection des Données » (CEPD), instance regroupant les 28 autorités de protection des données européennes.

Toutefois, des évolutions sont également envisageables au plan national, en cohérence avec le projet de règlement. C’est l’objet des articles 26 à 33 du projet de loi.

Article 26
Libre disposition de ses données à caractère personnel

Le projet de loi énonce le principe général de la libre disposition de ses données personnelles.

1. État des lieux

Le droit de la protection des données personnelles est né, dans les années 1970, du développement de l’informatique. Il s’est d’abord formé dans le cadre national, avant d’être reconnu au plan européen et international (directive 95/46/CE, convention n° 108 du Conseil de l’Europe…).

Les textes correspondants reconnaissent aux personnes des droits sur les données qui les concernent, qu’il s’agisse de droits portant sur la constitution des fichiers (droit d’opposition, droit d’information, droit d’accès…) ou de droits relatifs à l’utilisation des données en vue de prendre des décisions.

L’accroissement considérable des usages et de la circulation des données personnelles liés au développement du numérique et la perte de contrôle des individus qui en résulte ont conduit certains à proposer d’inscrire ces droits dans un droit plus général de chacun à contrôler l’utilisation de ses données personnelles, plus précis que le droit au respect de la vie privée dans lequel s’inscrit déjà la protection des données personnelles.

Les principes posés par la loi relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés sont restés pertinents : opposition, accès, et rectification. Toutefois, ces instruments classiques souffrent d’ineffectivité compte tenu de la montée en puissance des services numériques fondés sur l’exploitation des données. Les individus se plaignent des difficultés pour faire valoir leurs droits face aux grands services collecteurs de données. Cette ineffectivité du droit s’illustre notamment par des conditions générales d’utilisation (CGU) longues, éparses et ambigües, ainsi qu’une forte opacité sur le sort des données collectées.

2. Description des objectifs poursuivis

Pour assurer la pleine effectivité des droits à opposition, accès et rectification affirmés par la loi de 1978, il convient de les asseoir sur un nouveau fondement, pour les renforcer et permettre, par exemple, aux individus de faire valoir leurs droits tout au long de la vie de la donnée, après sa collecte initiale.

Le principe de libre disposition de ses données personnelles a été dégagé par la Cour constitutionnelle allemande en 1983. Cette liberté, qualifiée d’ « autodétermination informationnelle », est caractérisé par la Cour comme « le pouvoir de l’individu de décider lui-même [...] quand et dans quelle mesure une information relevant de sa vie privée peut être communiquée à autrui ».

L’introduction dans la législation française du droit, pour toute personne, de « décider et de contrôler les usages qui sont faits de ses données à caractère personnel la concernant, dans les conditions et limites fixées par la loi informatique et libertés » vise à renouveler le sens donné à la protection des données à caractère personnel.

Il s’agit de passer d’une posture uniquement défensive, de protection des données personnelles à une posture plus offensive de maîtrise, de contrôle et plus encore de capacité pour l’utilisateur à mobiliser et utiliser ses données pour ses propres finalités. La consécration du principe de libre disposition de ses données vise en particulier à accompagner un nouveau paradigme : au-delà de la seule protection de leur vie privée, les individus cherchent à maîtriser leur vie en ligne.

Dans un environnement numérique caractérisé par d’importantes asymétries de pouvoir, ce droit à la libre disposition implique qu’ils puissent avoir accès à ces données, qu’ils puissent les lire, les modifier, les effacer, choisir ce qu’ils veulent en faire ; mais aussi qu’ils puissent décider des services qui y ont accès. Certes, la simple proclamation du principe de libre disposition de ses données ne suffira pas à le rendre effectif. Une consécration forte du principe permettra néanmoins de donner à un sens nouveau à la nécessaire transformation des instruments de protection des données : protection, maîtrise, usages. Dans une autre perspective, il s’agit de fournir à la fois au juge et au régulateur un nouveau fondement pour son action.

Selon l’étude annuelle du Conseil d’État de 2014 « le numérique et les droits fondamentaux », quatre avantages sont à en attendre :

- donner un sens au droit à la protection des données personnelles : comme l’indique le Conseil d’État, « il s’agit de donner à l’individu les moyens de demeurer libre de conduire son existence, dans une société où le numérique prend une place croissante, qui l’amène à laisser, de plus en plus souvent, trace de ses données personnelles » ;

- donner un contenu positif au droit à la protection des données personnelles, qui peut, autrement, être perçu comme défensif ;

- marquer l’enjeu que représente pour les libertés publiques, la protection des données à caractère personnelle ;

- formuler un objectif ambitieux, qui « [joue] un rôle d’aiguillon, tant pour les pouvoirs publics que pour les individus ».

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Comme il vient d’être indiqué, pour assurer la pleine effectivité des droits à opposition, accès, rectification et effacement affirmés par la loi de 1978, il convient de les asseoir sur un nouveau fondement, pour les renforcer et permettre, par exemple, aux individus de faire valoir leurs droits tout au long de la vie de la donnée.

Le Conseil d’État, dans son étude annuelle de 201465 précisait qu’il n’était pas souhaitable d’ajouter le droit à l’autodétermination informationnelle à la liste des droits déjà reconnus par les textes existants. Ce droit doit s’entendre comme donnant sens à tous ces droits, « qui tendent à le garantir et doivent être interprétés et mis en œuvre à la lumière de cette finalité. »

Choix du support législatif

Trois supports peuvent a priori être envisagés pour l’inscription dans le droit national du principe de libre disposition de ses données personnelles :

- une disposition autonome, non codifiée, du projet de loi pour une République numérique ;

- le code civil ;

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Le recours à une disposition autonome, non codifiée, ne pose pas de difficulté particulière mais n’est évidemment pas optimal du point de vue de la lisibilité et de l’intelligibilité du droit.

L’inscription de ce principe à l’article 9 du code civil serait plus solennelle et présenterait également l’avantage de rattacher le droit à libre disposition de ses données à la protection de la vie privée, comme l’a fait la jurisprudence lorsqu’elle s’est prononcée sur la protection des données à caractère personnel en se fondant sur l’alinéa 1er de l’article 9 du code civil.

La Cour de cassation a ainsi récemment jugé aux visas des articles 9 et 1382 du code civil que « le choix d’une personne physique comme mot-clé destiné à faciliter le référencement par les moteurs de recherche sur internet des pages qui le supportent n’est pas fautif lorsqu’il n’est associé à aucune autre donnée personnelle, et ne le devient, le cas échéant, que lorsqu’est répréhensible le contenu de la page à laquelle de mot-clé est associé » 66.

La modification de l’article 9 du code civil présenterait cependant l’inconvénient de donner une importance particulière au droit à la libre disposition de ses données personnelles à l’intérieur du droit au respect de la vie privée, alors même que le premier n’est qu’une des facettes du second.

La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 « informatique et libertés » constitue également un support pertinent pour le principe de libre disposition de ses données personnelles, en raison de son objet même mais aussi parce qu’il s’agit du texte fondateur du droit de la protection des données personnelles. Ainsi, une modification du chapitre II de la loi « informatique et libertés » apparaît comme une approche pertinente.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Compatibilité avec le droit de l’Union Européenne

Le principe de libre disposition de ses données personnelle n’est pas explicitement abordé par le projet de règlement européen, mais le texte du projet de loi ne pose pas de difficulté au regard du projet de règlement.

4.2 Impact juridique

Comme le Conseil d’État le rappelait dans son rapport précité un débat existe sur la question de donner à ce droit à la protection des données personnelles un caractère patrimonial ou non.

Accorder un caractère patrimonial à ce droit à l’autodétermination informationnel poserait deux problèmes majeurs.

- Tout d’abord, sauf pour les personnes d’une particulière richesse ou notoriété, la valeur des données personnelles d’un individu est très limitée, de l’ordre de quelques centimes d’euros. C’est le très grand nombre de données traitées qui confèrent leur valeur aux bases manipulées par les acteurs du numérique. Ainsi, le rapport de forces entre l’individu, consommateur isolé et l’entreprise, resterait marqué par un déséquilibre structurel.

- En outre, la reconnaissance du droit de propriété de l’individu sur ses données pourrait poser des difficultés juridiques pour les pouvoirs publics. Ainsi, par exemple, les limites apportées par la loi du 6 janvier 1978 concernant le traitement des données personnelles devraient être justifiées au regard de l’atteinte au droit de propriété en tenant compte des jurisprudences de la Cour Européenne des droits de l’homme et du Conseil Constitutionnel. Reconnaître un droit de propriété de l’individu impliquerait en réalité de renoncer largement à la logique de protection.

Cette analyse est à l’origine du choix fait d’envisager la protection des données personnelles comme un droit à l’autodétermination. Le principe de libre disposition est ainsi considéré comme un droit attaché à la personne.

Une consécration forte du principe permettra de donner un sens nouveau à la nécessaire transformation des instruments de protection des données : protection, maîtrise, usages.

Il convient, à ce titre, de remarquer que la disposition envisagée indique que la protection des données personnelles se fera dans les conditions fixées par la loi informatique et liberté. »

5. Consultations menées

La CNIL, consultée, souligne que le droit de libre disposition de ses données « renforce positivement les principes déjà proclamés à l’article 1er en renforçant la capacité de l’individu à maîtriser les usages qui sont faits de ses données à caractère personnel ».

La libre disposition de ses données a fait l’objet d’une étude approfondie dans le cadre de l’étude annuelle 2014 du Conseil d’État qui portait sur le numérique et les droits fondamentaux.

L’affirmation d’un principe de libre disposition de ses données personnelles est également une proposition phare du Conseil national du numérique (CNN).

6. Textes d’application et outre-mer

En application de son article 72, la loi « informatique et libertés » est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à la loi « informatique et libertés » par l’article 26 applicables dans ces territoires.

Article 27
Droit à l’information sur la durée de conservation des catégories de données traitées

1. État des lieux

La loi « informatique et libertés » décrit, dans son chapitre V, les obligations incombant aux responsables de traitements et les droits des personnes dont les données personnelles font l’objet d’un traitement. Est notamment prévue à son article 32 le droit à l’information portant notamment sur la finalité du traitement auquel les données sont destinées.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi vise à compléter l’article 32 de la « loi informatique et libertés » afin d’ajouter que la « durée de conservation des catégories de données traitées » fait explicitement partie du périmètre des informations sur lesquelles le droit d’information évoqué supra s’applique.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

L’article 32 de la loi « informatique et libertés » définit la liste des obligations des responsables de traitement en matière d’information des personnes auprès desquelles des informations à caractère personnel sont recueillies. Tout ajout à cette liste ne peut donc se faire que par voie législative.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Les modifications proposées permettront de renforcer l’information faite aux citoyens sur la durée de conservation de leurs données

La mesure prévue à l’article 27 du projet de loi est essentiellement sans impact (financier ou autre) pour les responsables de traitement qui n’auront qu’à compléter l’information qu’ils réalisent déjà en vertu de l’article 32 de la loi « informatique et libertés ».

5. Consultations menées

La Commission nationale de l'informatique et des libertés a été consultée.

6. Outre-mer

En application de son article 72, la loi « informatique et libertés » est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à la loi « informatique et libertés » par l’article 27 applicable dans ces territoires.

Article 28
Exercice en ligne des droits relatifs aux données personnelles

1. État des lieux

La loi « informatique et libertés » décrit, dans son chapitre V, les obligations incombant aux responsables de traitements et les droits des personnes dont les données personnelles font l’objet d’un traitement.

Sont notamment prévus :

- une information portant notamment sur la finalité du traitement auquel les données sont destinées (article 32) ;

- un droit d’opposition, pour motifs légitimes, à ce que des données personnelles fassent l’objet d’un traitement (article 38) ;

- un droit d’information permettant notamment d’obtenir des informations sur le traitement lui-même ou les transferts de données à caractère personnel envisagés à destination d'un ÉtatÉtat non membre de la Communauté européenne (article 39) ;

- un droit d’accès et de rectification des données (article 40).

La plupart des responsables de traitement permettent d’exercer ces droits directement via un formulaire en ligne ou via contact par courriel mais cette pratique n’est aujourd’hui pas encore systématique, la loi n’interdisant pas par exemple, le recours à une procédure papier.

2. Objectifs poursuivis

L’article 28 du projet de loi vise à imposer que, dès lors que le responsable du traitement considéré dispose d’un site internet, l’exercice des droits prévus au chapitre V de la loi « informatique et libertés » puisse être exercés par voie électronique.

Cette disposition est destinée à garantir que l’exercice des droits puisse se faire de manière simple et la plus ergonomique possible. Outre l’intérêt évident pour les citoyens en matière d’exercice de leur droit, le recours à de telle pratique est susceptible de constituer un facteur de réductions de coût et de simplification pour les responsables de traitements.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

L’obligation de mise en place d’un moyen électronique d’exercice des droits des personnes appelle également nécessairement une modification législative dans la mesure où elle modifie les modalités de satisfaction d’une exigence légale.

Cette nouvelle modalité devra s’articuler avec l’ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relatives aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Les modifications proposées permettront de faciliter et de simplifier l’exercice par les citoyens de leurs droits vis-à-vis des responsables de traitements de données à caractère personnel. Elles concourent ainsi à la réalisation de l’objectif indiqué à l’article 26.

La mesure prévue à l’article 28 du projet de loi peut nécessiter, pour les responsables de traitement qui n’en disposent pas déjà, la mise en œuvre d’un dispositif en ligne d’exercice des droits. D’une part, il peut être remarqué que la plupart des responsables de traitement disposent d’ores et déjà d’un mécanisme en ligne permettant l’exercice des droits. Pour une large majorité des responsables de traitement la mesure sera donc sans impact financier.

La mesure prévoit en outre que l’obligation de mise en œuvre d’un dispositif en ligne ne s’applique qu’aux responsables de traitement disposant d’un site web. Pour de tels responsables de traitement, le surcoût d’ajout du dispositif restera extrêmement marginal, l’infrastructure numérique pouvant servir de support étant déjà en place et pourra même constituer un facteur de réduction de coûts pour le responsable de traitement en remplaçant un processus papier par un processus électronique (coûts marginaux moindres).

5. Consultations menées

La Commission nationale de l'informatique et des libertés a été consultée sur cette disposition.

6. Outre-mer

En application de son article 72, la loi « informatique et libertés » est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à la loi « informatique et libertés » par l’article 28 applicables dans ces territoires.

Article 29
Missions de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL)

1. État des lieux

La Commission nationale de l’informatique et des libertés est l’autorité nationale de protection des données à caractère personnel. L’article 11 de la loi « informatique et libertés » définit ses missions, qui sont aujourd’hui au nombre de quatre :

- informer les personnes concernées et tous les responsables de traitements de leurs droits et obligations ;

- veiller à ce que les traitements de données à caractère personnel soient mis en œuvre conformément aux dispositions de la loi ;

- émettre des avis sur les règles professionnelles et délivrer des labels ;

- se tenir informée de l'évolution des technologies de l'information.

2. Description des objectifs poursuivis

En vue de moderniser les compétences de la CNIL et de les adapter au développement du numérique, l’article 29 du projet de loi :

- assigne à la CNIL la mission de promouvoir l’utilisation des technologies protectrices de la vie privée, notamment les technologies de chiffrement des données (2° f) de l’article 29) ;

- multiplie les cas de saisine pour avis de la CNIL (1° ° de l’article 29) ;

- confie à la CNIL le soin de conduire une réflexion sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par l’évolution des technologies numériques (2° e) de l’article 29).

2.1 Promotion des technologies protectrices de la vie privée :

Le développement de technologies de nature à renforcer la maitrise par les personnes de leurs données personnelles est un des axes clef d’une amélioration de la protection des données sur Internet (et s’inscrit notamment dans l’approche « privacy by design » dans laquelle la protection de la vie privée est prise en compte dès le début de la conception du produit ou du service). Le champ des technologies concernées comprend par exemple les outils de paramétrage du traçage des données personnelles ou les outils de visualisation et de gestion des données personnelles détenues par des tiers. Ce sont également les technologies de chiffrement des données.

Compte tenu de l’importance que prennent ces technologies, une plus grande implication des pouvoirs publics dans leur élaboration est nécessaire. Il est logique de confier cette mission à la CNIL.

2.2 Consultation de la CNIL sur les projets de loi et de décret :

L’article 11 4° a) de la loi informatique et liberté prévoit que la CNIL est saisie pour avis sur « tout projet de loi ou de décret relatif à la protection des données personnelles », ce qui conduit parfois à des interprétations divergentes, la création d’un fichier par la loi n’étant pas toujours regardée comme relevant de la « protection » des données personnelles au sens de cet article. L’article 29 du projet de loi opère donc une clarification de l’obligation de consultation de la CNIL en prévoyant que celle-ci doit être saisie de tout projet de loi ou de décret « comportant des dispositions relatives à la protection des données à caractère personnel ou au traitement de telles données ».

2.3 Réflexion sur les problèmes éthiques et les questions de sociétés soulevés par l’évolution des technologies numériques :

Les évolutions technologiques liées au numérique soulèvent nombre de questions d’ordre éthique et amènent la société à s’interroger sur les possibles atteintes à la dignité de la personne humaine et sur les valeurs dont il convient d’assurer le respect.

La transparence accrue des individus liée à la collecte massive de données et au développement du big data et les perspectives et enjeux du développement de la robotique et de l’humanité augmentée sont souvent cités comme des sujets sur lesquels un débat démocratique approfondi apparaît nécessaire.

Afin d’organiser ce débat, le Conseil d’État dans son rapport annuel consacré aux droits et libertés numériques, propose de créer une « mission permanente d’animation de la délibération collective sur les enjeux éthiques liés au numérique » (proposition n° 11). Inspiré du Conseil consultatif national d’éthique, ce comité aurait pour vocation d’organiser le dialogue entre les experts et la société sur les enjeux éthiques liés au numérique et d’associer cette dernière à la délibération sur ces sujets.

A priori, trois possibilités peuvent être envisagées pour l’organisation de cette mission :

- la création d’une instance ad hoc ;

- l’adossement au Conseil national du numérique ;

- l’adossement à la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

La création d’une instance ad hoc est l’approche qui a été suivie dans le cas de la bioéthique, avec le Conseil consultatif national d’éthique. Elle ne semble cependant pas opportune dans le cas du numérique, d’abord parce qu’elle nécessite des moyens plus importants que l’adossement à une structure existante, mais, surtout, parce qu’il existe déjà dans le numérique des instances susceptibles d’accueillir cette mission.

Dans ce contexte, le choix de la CNIL, plutôt que du Conseil national du numérique, pour organiser la mission de réflexion sur les problèmes éthiques apparaît assez naturel en raison :

- de l’ancienneté de la commission et de la légitimité qu’elle a acquise avec le temps ;

- de son caractère d’autorité administrative indépendante, qui permettra de doter l’enceinte de réflexion des mêmes garanties d’indépendance ;

- des moyens dont dispose d’ores et déjà la commission.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

De façon générale, la Commission nationale de l’informatique et des libertés dispose de compétences d’attribution qui sont fixées par la loi. Une évolution de ses attributions requiert donc une modification législative.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Impact sur la CNIL : compte-tenu des quelques ressources qui pourraient être dégagées par l’évolution des missions suite à l’adoption à venir du règlement européen sur les données personnelles, la CNIL peut assumer ces missions à moyens constants.

5. Consultations menées

La CNIL a été consultée sur cette disposition.

6. Outre-mer

En application de son article 72, la loi « informatique et libertés » est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à la loi « informatique et libertés » par l’article 29 applicables dans ces territoires.

Article 30
Certificats de conformité

La confiance des entreprises à développer leurs activités et offres numériques est également conditionnée à la sécurité juridique qui s’y attache : le cadre législatif doit fournir des outils concrets afin de permettre aux entreprises désireuses par exemple de développer des usages innovants, de bénéficier d’un cadre juridique sécurisant et stable.

Le projet de loi crée ainsi un nouvel outil, « le certificat de conformité », destiné à assurer les entreprises d’une sécurité juridique pour leurs processus d’anonymisation.

1. État des lieux

Le cadre actuel de la protection des données personnelles repose sur des principes forts et sur un contrôle formel préalable important (déclaration préalable du traitement), mais pour lesquels les procédures de contrôle et les sanctions sont peu dissuasives67.

Le projet de règlement européen prévoit une suppression du contrôle formel ex ante (déclaration) des traitements, la responsabilité de l’application des principes et des règles en matière de protection des données reposant dorénavant avant tout sur les responsables de traitement eux-mêmes. Pour les aider, différents mécanismes sont prévus :

- privacy by design, études d’impact et documentation des traitements réalisés ;

- désignation de personnes responsables de la protection des données dans l’entreprise ;

- mise en place de codes de conduite, de mécanismes de certification et de labels.

Le projet de loi, à travers l’article 37-1 qu’il insère dans la loi du 6 janvier 1978, s’inscrit dans cette démarche, en prévoyant la possibilité pour les responsables de traitement d’obtenir des certificats de conformité pour les processus d’anonymisation des données à caractère personnel.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi a pour objectif de renforcer la sécurité des responsables de traitements, en particulier des entreprises qui mettent en œuvre ou projettent de mettre en œuvre de nouveaux services impliquant des traitements de données à caractère personnel.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Une option possible aurait été la mise en place d’un rescrit en matière de données personnelles. Un rescrit serait en effet un instrument adapté pour renforcer la sécurité juridique des porteurs de projets. Dans le cadre d’un rescrit, un responsable de traitement pourrait solliciter une prise de position de la CNIL sur la licéité de son traitement et la réponse apportée par la commission lui serait opposable, à condition que le responsable de traitement ait communiqué toutes les informations nécessaires.

La mise en place d’un véritable rescrit dans le domaine des données à caractère personnel se heurte cependant à des difficultés considérables.

D’abord, pour être utile, un tel rescrit devrait être simple ; en effet, le besoin de sécurité juridique concerne surtout les traitements « nouveaux », qui sont le plus souvent mis en œuvre par des start-ups du numérique. Or, ces entreprises ne disposent pas de ressources nécessaires pour suivre une procédure lourde de rescrit. Cependant, un rescrit très simple à obtenir provoquerait nécessairement un « appel d’air » (la CNIL reçoit chaque année plusieurs milliers de déclaration) et déboucherait inévitablement sur un engorgement des services de la commission.

Ensuite, le rescrit serait accordé au vu du traitement mis en œuvre, ou prévu, au moment où la demande est effectuée. Or les traitements de données personnelles, notamment ceux mis en œuvre par les start-ups, évoluent rapidement. Dans ce contexte, il y a un fort risque qu’une procédure de rescrit, à l’opposé de son objectif, augmente en réalité l’insécurité juridique, d’une part pour les responsables de traitement (qui pourront se croire protégés par le rescrit alors que celui-ci ne couvrira plus les traitements qu’ils mettent en œuvre) et, d’autre part, pour la CNIL (qui pourrait avoir des difficultés à sanctionner des traitements non-conformes mais pour lesquels elle aura délivré un rescrit au vu d’un état antérieur).

Compte tenu de ces difficultés, la piste du rescrit a été écartée, au profit d’un certificat de conformité de portée plus réduite puisque limitée aux processus d’anonymisation des données.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Cette disposition doit permettre d’améliorer la prise en compte par les entreprises des principes institués par la loi informatique et libertés ainsi que par la présente loi, et ainsi de diminuer leur risque de sanction.

5. Consultations menées

La CNIL a été consultée.

6. Outre-mer

En application de son article 72, la loi « informatique et libertés » est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à la loi « informatique et libertés » par l’article 30 applicables dans ces territoires.

Article 31 et 32
Droit à l’oubli pour les mineurs et mort numérique

Le numérique est aujourd’hui omniprésent dans l’univers des enfants et des adolescents : là aussi, l’impératif de protection et de sécurité est plus qu’ailleurs une exigence sociale forte. Le projet de loi entend renforcer la protection des mineurs sur Internet.

Le projet de loi prévoit ainsi pour les mineurs une procédure accélérée en terme de « droit à l’oubli » renforcé.

Le projet de loi énonce également de nouvelles règles permettant aux usagers de définir, de leur vivant, les consignes à adopter, après leur disparition, à propos de leurs données personnelles mises en ligne.

1. État des lieux

1.1 Droit à l’oubli

De façon générale, le « droit à l’oubli » désigne la possibilité pour les individus d’obtenir la suppression d’information les concernant publiées sur Internet (droit à l’effacement) ou le déréférencement de ces informations par les moteurs de recherche (droit au déréférencement).

En Europe, l’arrêt « Google Spain » de la Cour de Justice de l’Union européenne, largement commenté, a consacré un « droit au déréférencement ». Cette construction jurisprudentielle est prolongée par le projet de règlement européen sur la protection des données à caractère personnel, en cours de discussion, qui prévoit la mise en place d’un véritable droit à l’effacement des données dans certaines circonstances.

La problématique du « droit à l’oubli » concerne toute personne mais se présente de manière spécifique dans le cas des personnes mineures. En effet, bien qu’ils soient souvent familiarisés très jeunes avec l’utilisation des technologies numériques (notion de « digital natives »), les mineurs n’ont souvent pas la maturité nécessaire pour apprécier les répercussions à moyen et long terme des informations qu’ils communiquent ou publient sur Internet. Par ailleurs, l’expérimentation - y compris, aujourd’hui, l’expérimentation numérique - est une composante essentielle du développement de la personne, mais n’a de sens que si elle s’accompagne d’un « droit à l’erreur ». Or, l’Internet n’oublie jamais et ne corrige jamais.

Ceci a conduit un certain nombre d’observateurs à proposer l’établissement de règles spécifiques en matière de « droit à l’oubli » pour les mineurs et à certaines initiatives en ce sens, comme la loi spécifique adoptée par l’État de Californie en 2013 et entrée en application début 2015.

La loi du 6 janvier 1978 ne comporte aucune disposition propre aux mineurs, alors même que l’immense majorité d’entre eux utilise, entre autre, les réseaux sociaux, et que les questions de e-réputation sont régulièrement liées à des données mises en ligne avant l’âge de la majorité.

1.2 Mort numérique

Avec le développement de la « vie numérique », la question du devenir des données des personnes décédées commence à prendre de l’importance.

Différentes questions se posent en effet lorsqu’une personne décède : que devient le profil de cette personne sur les réseaux sociaux ? Les descendants et héritiers du défunt peuvent-ils accéder aux données de celui-ci stockées, par exemple pour conserver des souvenirs du défunt ? Que deviennent les « actifs numériques » (photos, livres électroniques, musique numérique...) du défunt ?

Force est de constater que les réponses à ces questions demeurent très partielles.

En effet, l’ouverture d’un compte de messagerie ou d’un compte sur un réseau social sur Internet confère à son titulaire des droits personnels. Il s’agit du droit au respect de la vie privée, qui comprend notamment le droit au secret des correspondances, et du droit à l’image. Les règles de la dévolution successorale ne sont pas applicables à ces droits qui n’ont pas une nature patrimoniale. Dès lors, dans le silence du contrat, les héritiers ne peuvent pas imposer aux gestionnaires des comptes de leur transmettre les données qu’ils contiennent.

Les fournisseurs de services de communication au public en ligne qui gèrent de nombreux comptes et sont régulièrement confrontés à la question de la « mort numérique » (sur Facebook, un profil sur cent serait celui d’une personne décédée) ont cependant commencé à apporter des réponses.

Ainsi, Facebook a annoncé la création d’une fonctionnalité « Legacy Contact », qui permet à un contact de confiance d’accéder au compte d’un utilisateur décédé pour transformer le profil en « mémorial » virtuel et, le cas échéant, récupérer les photos du profil et des archives des publications. C’est la suite d’un processus amorcé en 2009, date à laquelle un ingénieur de Facebook avait proposé la première fonctionnalité de « mémorial » après avoir été confronté au décès d’un proche.

D’autres services, comme celui de Google, offrent désormais la possibilité pour les vivants d’organiser le devenir de leurs données après leur mort.

En revanche, la législation concernant les données personnelles des personnes décédées reste embryonnaire.

Certains textes existent déjà notamment pour les comptes bancaires inactifs et les contrats d’assurance-vie en déshérence.

Par ailleurs, des possibilités d’accès à certaines informations concernant la personne décédée et de rectification de ces données ont été ouvertes aux ayant-droits par l’article L. 1110-4 du code de santé publique et par l’article 40 de la loi « informatique et libertés » - qui permet aux héritiers d’une personne décédée de demander l’actualisation des données à caractère personnel concernant la personne décédée afin de prendre en compte le décès68 -, mais ces dispositions n’assurent pas un traitement systématique et global de la question.

Enfin, en son état actuel, le projet de règlement européen exclut les personnes décédées de son champ d’application.

2. Description des objectifs poursuivis

2.1 Droit à l’oubli

L’article 32 du projet de loi a pour objectif d’introduire au bénéfice des personnes mineures une procédure accélérée leur permettant d’obtenir, sur demande, dans des délais réduits, l’effacement, en ligne, de leurs données à caractère personnel. La disposition s’inscrit en conformité avec la mise en œuvre à venir du règlement européen, lequel consacre ce « droit à l’effacement ».

Ceci permettra ainsi d’exercer dans des délais rapides un « droit à l’oubli » protecteur de la vie privée des intéressés, qui sont les plus vulnérables dans l’univers numérique.

2.2 Mort numérique

Le projet de loi complète l’article 40 de la loi « informatique et libertés » en prévoyant la possibilité pour toute personne de formuler des directives (générales ou particulières) concernant le devenir de ses données personnelles à son décès.

Les directives générales sont enregistrées auprès d’un tiers de confiance numérique certifié par la CNIL et les directives particulières sont enregistrées auprès des responsables de traitements.

Ces directives « définissent la manière dont la personne entend que soient exercés après son décès les droits qu’elle détient » en application de la loi « informatique et libertés ». Elles ne créent donc pas de nouveaux droits pour les personnes vis-à-vis des responsables de traitement.

Les directives peuvent désigner une personne chargée de leur exécution ; à défaut de désignation, un ordre de priorité entre les héritiers est fixé.

Le projet de loi prévoit toutefois que les prestataires qui stockent des données sur l’internet sont tenus de transmettre les données d’une personne décédée à la personne que le défunt aura désignée préalablement.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

3.1 Droit à l’oubli

Seule la loi peut prévoir une procédure d’exception au bénéfice des mineurs et indiquer les délais impératifs à respecter dans ces cas.

3.2 Mort numérique

La question des données à caractère personnel des personnes décédées n’est pas abordée dans le projet de règlement européen. En l’absence d’initiative européenne, une alternative se présente :

- maintenir le statu quo, c'est-à-dire laisser le traitement de la question de la « mort numérique » entre les mains des fournisseurs de services de communication au public en ligne ;

- légiférer au niveau national.

Le maintien au statu quo n’est pas satisfaisant car il laisse perdurer les difficultés que rencontrent les ayant-droits d’une personne décédée pour accéder aux données et rend les réponses qui sont apportées au problème par trop dépendantes du modèle économique de fournisseurs de service.

L’approche retenue par le projet de loi vise essentiellement à faciliter :

- d’une part, l’expression des volontés du défunt ;

- d’autre part, l’action de ses ayant-droits dans le respect desdites volontés ;

- enfin, en l’absence de directives, la possibilité pour les héritiers d’exercer les droits du de cujus après son décès.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Droit à l’oubli

Compatibilité avec le droit de l’Union Européenne :

L’article 17 du projet de règlement européen69 (droit à l’effacement et à l’oubli numérique) oblige le responsable du traitement à effacer dans les meilleurs délais, les données à caractère personnel, notamment en ce qui concerne les données à caractère personnel qui sont collectées lorsque la personne concernée a le statut d'enfant, dans un certain nombre de cas qu’il détermine.

Le projet de loi s’inscrit en pleine conformité avec le règlement européen à venir, dès lors qu’il fait explicitement référence aux conditions prévues par ce règlement.

4.2 Mort numérique

Compatibilité avec le droit de l’Union Européenne : la question des données à caractère personnel des personnes décédées est explicitement exclue du projet de règlement européen.

Impact sur la CNIL : la CNIL devra certifier les « tiers de confiance numérique » auprès desquels les directives générales pourront être déposées.

Impact sur les responsables de traitement : les responsables de traitement devront créer une procédure permettant de recueillir les directives particulières des personnes. Ils devront également communiquer les données du défunt à la personne que celui-ci aura désignée, le cas échéant. Enfin, ils devront informer l’utilisateur du sort de ces données et permettre à ce dernier de choisir de communiquer ou non ses données à un tiers qu’il aura préalablement désigné.

5. Consultations menées

La CNIL a été consultée sur ces dispositions.

6. Textes d’application et Outre-mer

Un décret en Conseil d’État fixera les modalités d’application des mesures d’effacement des données mentionnées à l’article 32.

En application de son article 72, la loi « informatique et libertés » est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à la loi « informatique et libertés » par les articles 31 et 32 applicables dans ces territoires.

Article 33
Procédure de sanction de la CNIL

Une politique efficace en faveur de la protection de la vie privée en ligne et des données personnelles se mesure aussi à l’aune des sanctions encourues en cas d’infractions. La crédibilité de la régulation est ici en jeu et le projet de loi entend renforcer le volet sanction de la législation en vigueur.

Le projet d’article renforce les pouvoirs et procédures de sanctions à la disposition de la CNIL.

1. État des lieux

La CNIL dispose d’un pouvoir de sanction dont les modalités d’exercice sont fixées par l’article 45 de la loi « informatique et libertés ».

La procédure retenue pour la CNIL, qui distingue les pouvoirs d’instruction (contrôle, mise en demeure, désignation d’un rapporteur pour saisine de la formation restreinte), relevant des pouvoirs propres du président, et les pouvoirs de sanction, relevant de la seule formation restreinte, ont été regardés par le Conseil d’État comme conformes aux exigences constitutionnelles par une décision de mars 2012. Cette procédure est d’ailleurs l’une des références dans les réflexions qui ont conduit à l’évolution des procédures devant d’autres autorités. Elle n’a donc pas vocation à évoluer sur un plan procédural.

En revanche des améliorations peuvent y être apportées afin de renforcer l’efficacité de la procédure.

Il est, par ailleurs, nécessaire de renforcer les sanctions prévues. Ce point est traité dans le cadre du projet de règlement européen en cours de négociation.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi a pour objectif de renforcer l’efficacité et la crédibilité du processus répressif. Il s’agit d’un complément important à la responsabilisation accrue des responsables de traitement prévue par le projet de règlement européen.

Dans cette perspective, l’article 33 :

- permet à la CNIL de fixer le délai imparti à un responsable de traitement pour se mettre en conformité avec la loi à 24 heures en cas d’extrême urgence, au lieu de cinq jours au moins actuellement ;

- élargit le champ du référé judiciaire ;

- autorise la CNIL à prononcer une sanction pécuniaire sans mise en demeure préalable dans certaines circonstances ;

- autorise la CNIL à ordonner qu’une personne sanctionnée informe de cette sanction l’ensemble des personnes concernées.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

3.1 Réduction du délai de mise en demeure à 24 heures en cas d’extrême urgence :

Actuellement, lorsqu’un traitement est mis en œuvre illégalement ou porte une atteinte grave à la vie privée, seule la formation restreinte peut ordonner la cessation de celui-ci, au terme d’une procédure de mise en demeure puis de sanction. Le président de la CNIL peut donc mettre en demeure un responsable de traitement de se mettre en conformité, tout en laissant « vivre » un traitement illégal pendant ce temps.

Il apparait donc utile que dans ce cas de figure et à condition de se trouver face à une situation d'extrême urgence, le délai de mise en demeure soit réduit à 24 heures.

3.2 Elargissement du champ du référé judiciaire :

La CNIL a aujourd’hui la possibilité de saisir le juge des référés, mais uniquement pour que soient mises en œuvre, sous astreinte, les « mesures de sécurité » nécessaires. Cela peut valoir, par exemple, en cas de « faille de sécurité » à combler. Mais la CNIL n’a pas la possibilité juridique, par exemple, de suspendre un traitement de données qui serait particulièrement risqué (ex : un traitement discriminatoire, ou qui révèlerait des données de santé couvertes par le secret médical). Il lui faut en effet engager une procédure répressive, consécutive à une mise en demeure. Il est donc proposé de supprimer les mots « de sécurité » pour que la CNIL puisse, de manière générale, saisir le juge des référés de toute demande tendant, notamment, à la suspension sans délai d’un traitement.

3.3 Possibilité de prononcer une sanction sans mise en demeure préalable :

Actuellement, lorsque la situation est particulièrement urgente ou que le manquement n’appelle plus de correction, le président de la CNIL peut décider de saisir directement la formation restreinte, sans mise en demeure préalable. Toutefois, cette formation ne peut alors prononcer qu’un avertissement, le cas échéant public, alors même qu’il s’agit souvent de cas graves mais limités dans le temps (comme, par exemple, une faille de sécurité ponctuelle qui n’appelle plus de mise en conformité – donc de mise en demeure – mais qui, pour autant, a effectivement causé un préjudice). Pour tenir compte de ces situations, le projet d’article ouvre donc la possibilité pour la formation restreinte de prononcer une sanction pécuniaire sans mise en demeure préalable « lorsque le manquement constaté ne peut faire l’objet d’une mise en conformité dans le cadre d’une mise en demeure ».

3.4 Publicité des sanctions auprès de chaque personne concernée :

La CNIL peut d’ores et déjà rendre publiques les sanctions qu'elle prononce. Elle peut également ordonner leur insertion dans des publications, journaux et supports qu'elle désigne aux frais des personnes sanctionnées. Le projet d’article prévoit en outre que chaque personne concernée puisse être informée individuellement de l’existence de ces sanctions.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Le projet de règlement européen prévoit un renforcement des sanctions en cas de non-respect de ses dispositions mais ne comporte pas de disposition de procédure.

L’article 33 du projet de loi ne pose donc aucune difficulté au regard du projet de règlement. Au contraire, en améliorant l’efficacité et la crédibilité du pouvoir de sanction de la CNIL, il contribue à la réalisation des objectifs du règlement.

5. Consultations menées

La CNIL a été consultée sur ce projet d’article. Elle a estimé que l’article 33 « permet une meilleure réactivité et efficacité des organes compétents de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ».

6. Outre-mer

En application de son article 72, la loi « informatique et libertés » est applicable en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à la loi « informatique et libertés » par l’article 33 applicables dans ces territoires.

Section 2
Confidentialité des correspondances privées

Article 34
Respect des correspondances privées numériques

Le projet de loi réaffirme le principe du secret des correspondances, quel que soit la configuration technique du service de communication utilisé.

1. État des lieux

Le principe du secret des correspondances est le principe cardinal du droit des télécommunications. Le code des postes et des communications électroniques énonce clairement en son article L. 32-1 (5) que « les opérateurs de communications électroniques sont tenus au secret des correspondances ». A ce jour, la règle du secret des correspondances est ainsi directement rapportée au champ des opérateurs de services de communications électroniques.

Or, aujourd’hui, de nombreux services en ligne (services de téléphonie sur IP, réseaux sociaux, services de messagerie en ligne…) sont les supports de correspondances privées mais la plupart d’entre eux tendent à faire valoir que le code des postes et communications électroniques ne leur est pas applicable.

Des évènements récents montrent au surplus que certains services de correspondance privée en ligne offerts aux usagers français ne respectent pas en effet le secret des correspondances et ont occasionné des atteintes massives à l’intégrité de ces correspondances.

2. Description des objectifs poursuivis

Il convient de garantir l’application de la règle du secret des correspondances à toutes les correspondances privées, quel que soit le vecteur ou la technologie de communication utilisé. L’objectif est de lever la controverse en édictant clairement que l’ensemble des services de communication au public en ligne qui permettent d’échanger une correspondance privée sont astreints au respect du secret des correspondances. Il est précisé que le secret des correspondances couvre le contenu de la correspondance, l’identité des correspondants, ainsi que, le cas échéant l’intitulé du message et des documents joints à la correspondance.

Le projet d’article prévoit une exception pour les traitements qui ont pour fonction l’affichage, le tri ou l’acheminement de ces correspondances, la fourniture d’un service bénéficiant uniquement à l’utilisateur ou la détection de contenus non sollicités ou de programmes informatiques malveillants.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Compte tenu de la nature du dispositif envisagé, qui touche aux libertés publiques, le vecteur législatif est requis. Le dispositif devrait être intégré facilement à la partie législative du code des postes et des communications électroniques. Les compétences de contrôle de l’ARCEP permettront de s’assurer du respect et de l’effectivité du nouveau dispositif.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Impact sur les fournisseurs / coûts de mise en conformité :

Les fournisseurs des services en ligne (messagerie, téléphonie, réseaux sociaux …), offrant une fonctionnalité de service de correspondance privée, devront mettre en place les développements nécessaires pour se mettre en conformité avec la règle et présenter, le cas échéant, à l’autorité de contrôle compétente, les garanties appropriées.

4.2 Impact sur les conditions de concurrence :

L’application uniforme de la règle du secret des correspondances, que ce soit pour les opérateurs de communications électroniques ou les fournisseurs de services en ligne, produit un effet positif d’alignement des conditions de concurrence entre des acteurs qui sont effectivement la plupart du temps compétiteurs sur de mêmes segments de marchés.

4.3 Impact Confiance :

Le rappel catégorique par le législateur de la règle du secret des correspondances peut susciter un signal positif dans le mouvement croissant de défiance quant au respect de la vie privée dans les services numériques.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

6. Outre-mer

L’article 46 du projet de loi rend l’article 34 applicable à Wallis et Futuna. L’article 47 (IV) modifie en conséquence l’article L. 32-3 du code des postes et des communications électroniques.

TITRE III

L’accès au numérique

Chapitre Ier

Numérique et territoires

Section 1
Compétences et organisation

Article 35
Stratégie numérique des collectivités

1. État des lieux

Les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique (SDTAN) ont été définis par la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique.

Conformément à l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales, « les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique recensent les infrastructures et réseaux de communications électroniques existants, identifient les zones qu'ils desservent et présentent une stratégie de développement de ces réseaux, concernant prioritairement les réseaux à très haut débit fixe et mobile, y compris satellitaire, permettant d'assurer la couverture du territoire concerné. Ces schémas, qui ont une valeur indicative, visent à favoriser la cohérence des initiatives publiques et leur bonne articulation avec l'investissement privé (...) ».

Un SDTAN correspond à un territoire sur lequel il est unique. Ce territoire doit recouvrir un ou plusieurs départements ou une région. Il a pour objectif de permettre aux différents acteurs, notamment aux collectivités, de définir une stratégie concertée de déploiement des réseaux sur le territoire concerné.

L'élaboration d'un SDTAN constitue un préalable à l'intervention d'une collectivité territoriale en faveur du déploiement du très haut débit sur son territoire.

La démarche des SDTAN a connu un grand succès et, au 15 octobre 2014, seuls cinq département français n’étaient pas concernés par un tel schéma directeur.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi a pour objectif d’étendre au domaine des services numériques la démarche des SDTAN. Il s’agit d’inclure dans le SDTAN, une stratégie de développement usages et services numériques. Cette stratégie deviendra un volet à part entière du SDTAN.

Comme dans le cas des infrastructures numériques, couvertes par les SDTAN, une approche souple est nécessaire. En effet, le développement des services numériques n’est pas une compétence exclusive des collectivités territoriales, mais ressort également à l’initiative privée et à l’État. C’est pourquoi l’exercice de cette compétence est purement facultatif et l’élaboration donne lieu, le cas échéant, à une concertation.

De la même manière, le développement des services numériques n’est pas nécessairement du ressort d’un seul échelon de collectivités territoriales. Ainsi, le projet de loi prévoit que les schémas directeurs territoriaux des usages et services numériques peuvent être établis par les régions ou par les départements. Il n’exclut pas a priori que plusieurs schémas directeurs puissent concerner le même territoire, même si cette situation n’apparaît pas optimale en termes de stratégie de déploiement.

3. Nécessité de légiférer

Pour éviter la multiplication des schémas régionaux, il est proposé de compléter le code général des collectivités territoriales par un article L. 1425-3 qui organise ce nouveau volet du SDTAN. La définition des schémas directeurs territoriaux étant prévue par la loi, la modification de leur consistance doit se faire par la loi.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Le projet d’article a pour objectif d’améliorer la cohérence et la pertinence des choix faits en matière de politique de développement des services numériques dans les territoires. Il n’impose pas de contrainte particulière car la mise en place de la stratégie de développement des usages et services numériques est une faculté à la disposition des collectivités territoriales. Ces dernières demeurent libres de mettre en œuvre ou non ce schéma directeur et d’y affecter ou non les moyens nécessaires. Il convient également de noter que ces schémas directeurs territoriaux n’auront qu’une simple valeur indicative et visent essentiellement à favoriser la cohérence des initiatives publiques.

Le schéma directeur numérique des collectivités est avant tout un outil mis à disposition pour accompagner la montée en compétence numérique des collectivités, sans qu’il soit imposé à ces dernières d’obligation spécifique en la matière.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code, et au Conseil national d’évaluation des normes.

Article 36
Syndicats mixtes ouverts

1. État des lieux

Lancé au printemps 2013, le Plan France Très Haut Débit (PFTHD) a pour objectif la couverture de l’intégralité du territoire en très haut débit d’ici 2022 afin de garantir un accès à internet performant à l'ensemble des logements, des entreprises et des administrations. La priorité politique rappelée par le Président de la République lors du comité interministériel aux ruralités du 14 septembre 2015, invite à mobiliser tous les efforts possibles pour l’atteinte de ces objectifs. Or le dispositif actuel suscite des attentes supplémentaires, notamment s’agissant du rythme de lancement des projets de réseaux d’initiative publique, et de leur dimensionnement géographique.

2. Objectifs poursuivis

Pour inciter la mise en place de grands projets et garantir la cohérence des projets d’implantation des réseaux de communications électroniques à très haut débit sur l’ensemble du territoire de la République, la présente disposition favorise le regroupement de syndicats mixtes ouverts (SMO) et qui ont reçu, de la part des collectivités, la compétence pour développer un réseau de communications électroniques. Il s’agit en outre de permettre à des SMO, qui réalisent a posteriori, l’intérêt d’un regroupement à l’échelle supra-départementale, de permettre ce regroupement et donc de construire un projet de plus grande ampleur.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

La disposition concernant le droit des collectivités territoriales, elle relève par nature du niveau législatif.

Deux options ont été envisagées, soit modifier l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales, soit l’article L. 1425-1 du même code qui traite spécifiquement des réseaux de communications électroniques. C’est cette dernière option qui a été retenue.

La nécessité de faire concorder les objectifs du PFTHD avec le regroupement de syndicat mixte ouvert a été prise en compte. De cette façon, de tels regroupements ne pourront avoir lieu que durant le plan et ne pourra pas être utilisé au-delà. Cette limitation permet de cadrer très strictement ce nouveau mécanisme dans le temps et évite la dilution du consentement des collectivités membres des syndicats mixtes.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Il s’agit d’un nouveau mécanisme offert au syndicat mixte ouvert. S’il décide une mise en œuvre, alors les moyens associés au SMO seront transférés vers le SMO désigné pour un regroupement. Il n’y a pas d’ajout de moyens financiers supplémentaires. Au surplus, le regroupement de SMO pourrait permettre aux collectivités de réaliser des économies d’échelle en partageant des coûts à une échelle supra-départementale. En définitive, cette option laisse entrevoir davantage de synergies que de coûts supplémentaires.

5. Consultations menées

La disposition a été soumise pour avis à l’ARCEP, à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques et au Conseil national d’évaluation des normes.

Section 2
Couverture numérique

Article 37
Publicité de la qualité des services numériques

1. État des lieux

Depuis le 30 juin 2010, en application de la décision n° 2008-1362, les opérateurs ayant plus de 100.000 abonnés au service fixe ont l'obligation de mettre à disposition du public, chaque trimestre, les résultats des mesures des indicateurs de qualité de l'accès aux services fixes (téléphone, internet, télévision) sur leur site internet. Ces publications trimestrielles permettent aux consommateurs de disposer d'informations pertinentes afin de suivre l'évolution dans le temps des indicateurs de qualité de service d'un opérateur donné.

Concernant les services mobiles, l'ARCEP mène régulièrement des enquêtes ayant pour objectif d'apprécier, sur une base comparative, la qualité des services mobiles offerts aux utilisateurs par les opérateurs de réseaux mobiles. L'enquête vise, au travers de mesures techniques réalisées sur le terrain, à refléter de manière parfaitement comparable la qualité des services mobiles proposés par les opérateurs.

Ces dispositifs ne sont pour autant pas totalement satisfaisants. L’article D. 98-4 du code des postes et des communications électroniques ne permet en effet pas au régulateur de garantir la comparabilité des résultats des mesures de qualité de service qui sont réalisées à sa demande par des prestataires choisis par les opérateurs.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet d’article vise au renforcement de la transparence des informations relatives à la couverture du territoire en services de communications électroniques communiquées à l’ARCEP par les opérateurs. Le projet de loi impose en effet à l’Autorité de rendre publics en « open data » les données servant notamment à établir les cartes de couverture. Une telle mesure permettra à des tiers d’exploiter ces informations et contribuera in fine à accroître la transparence pour les consommateurs et à garantir les conditions d’une saine concurrence.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Ce nouveau dispositif est une contrainte pour l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Néanmoins, celle-ci dispose déjà des informations car elles sont transmises par les opérateurs. Il s’agit d’une nouvelle mission donnée au régulateur, c’est pourquoi une telle mesure ne peut relever que du domaine de la loi.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’ARCEP aura pour seule charge de mettre les informations prévues dans cet article à disposition du public. Elle dispose en ce sens d’outils de communication et d’une équipe dédiée qui pourra largement remplir cette mission. Cette mise à disposition d’informations peut d’ailleurs relever d’un mécanisme automatique ne requérant pas d’intervention humaine.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Article 38
Principe de calcul des redevances d’usage des fréquences

1. État des lieux

Les fréquences radioélectriques constituent une ressource rare et relèvent du domaine public. L’article 22 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée dispose que « l’utilisation, par les titulaires d’autorisation, de fréquences radioélectriques disponibles sur le territoire de la République constitue un mode d’occupation privatif du domaine public de l'État ». Cette disposition est reprise dans le code des postes et des communications électroniques dans son article L. 41-1 ainsi que dans le code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP) en son article L. 2124-26.

Le régime de la domanialité publique impose que toute occupation ou utilisation du domaine public donne lieu au paiement d'une redevance en application de l’article L. 2125-3 du CGPPP, « la redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ».

Les opérateurs de téléphonie mobile versent donc une redevance en contrepartie de l’occupation ou de l’utilisation d’une bande de fréquences qui tient compte de tous les avantages procurés à l’occupant.

Dans un arrêt du 29 décembre 2014, le Conseil d’État a annulé un décret qui prévoyait l’augmentation du montant de la redevance visant à prendre en compte la levée des restrictions technologiques dans la bande 1 800 MHz initialement autorisée pour la fourniture du service mobile de deuxième génération au motif que la méthode retenue d’évaluation de la valeur économique des fréquences en cause ne tenait pas parfaitement compte des conditions d’utilisation des fréquences par l’opérateur concerné.

Une lecture trop littérale de cet arrêt ne permettrait plus à l’État de fixer des redevances incitant les opérateurs mobiles à couvrir le plus vite possible le territoire avec les technologies les plus modernes. Aussi, pour tirer les conséquences de cet arrêt, il est nécessaire de compléter le CGPPP afin de permettre au Gouvernement de fixer des montants de redevances qui favorisent la couverture du territoire, le déploiement des technologies les plus efficaces et garantissent ainsi la bonne utilisation des ressources rares que sont les fréquences radioélectriques.

2. Description des objectifs poursuivis

Le projet de loi complète les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP) afin de permettre à l’autorité gestionnaire des fréquences utilisées pour les services de communications électroniques (au sens du 6° de l’article L. 32 du CPCE de considérer la bonne utilisation des fréquences, comme un objectif intervenant dans la définition des redevances dues au titre de l’occupation du domaine public hertzien. Cela permettra de tenir non seulement compte des avantages de toute nature retirés de cette occupation par le titulaire de l’autorisation comme le prévoit l’article L. 2125-3 du CGPPP, mais également de l’objectif d’intérêt général rappelé ci-dessus. En particulier, cet article doit permettre à l’autorité gestionnaire du domaine public hertzien de considérer l’innovation comme un des objectifs intervenant dans la définition des redevances dues, ainsi que le préconisait le rapport de Joëlle Toledano pour « une gestion dynamique du spectre pour l’innovation et la croissance ».

La disposition vient également apporter des précisions pour renforcer la sécurité juridique liée à l’établissement de la redevance due par les opérateurs de communications électroniques. En particulier, elle précise que l’utilisation des fréquences libres demeure gratuite, de même que les utilisations de fréquences autorisées pour des expérimentations.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

La valorisation du domaine public de l’État, en particulier du domaine public hertzien, constitue un outil majeur de politique économique. Il convient de sécuriser juridiquement par la loi le signal-prix favorable à l’investissement et à l’aménagement du territoire que constituent les redevances d’occupation du domaine public hertzien dues par les opérateurs de communications électroniques.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La disposition concernée n’entraine d’impact, ni sur les entreprises, ni sur les collectivités. Cette disposition est un moyen de sécuriser les exercices relatifs à la valorisation du spectre radioélectrique.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Article 39
Qualité du service téléphonique

1. État des lieux

La proposition de loi relative à l'entretien et au renouvellement du réseau des lignes téléphoniques, déposée par Monsieur Chassaigne le 16 décembre 2014, a été adoptée à l’unanimité le 7 mai 2015 en première lecture à l’Assemblée nationale.

L’objectif de cette proposition de loi est d’apporter des solutions face à la dégradation du service téléphonique fixe consécutive au défaut d’entretien des abords des réseaux fixes de communications électroniques ouverts au public.

Le projet de loi reprend les dispositions de cette proposition de loi, parmi celles de ses dispositions en faveur de l’amélioration de la couverture numérique.

Les dispositions de ’l’article 39 :

- qualifient l’entretien des réseaux fixes de communications électroniques et de leurs abords d’utilité publique (alinéas 2 à 3 complétant l’article L. 35 du code des postes et des communications électroniques) ;

- renforcent les obligations de l’opérateur chargé du service universel qui doit dresser un état des lieux détaillé de son réseau fixe avant l’expiration de sa désignation en tant qu’opérateur de service universel (alinéas 4 à 6 rétablissant l’article L. 35-7 du code des postes et des communications électroniques) et est passible de sanctions renforcées en cas de manquement à ses obligations (alinéas 7 à 10 modifiant l’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques) ;

- rétablissent la servitude d’élagage dont bénéficiait France Télécom70 et précise la répartition des responsabilités entre les opérateurs exploitant des réseaux et les propriétaires de terrains en matière d’entretien des abords desdits réseaux (alinéas 11 à 18 modifiant les articles L. 47 et L. 48 du code des postes et des communications électroniques et rétablissant l’article L. 50 du même code).

Le rétablissement de cette servitude d’élagage et la précision du partage de responsabilités entre exploitants de réseaux et propriétaires de terrain constituent la clef de voûte du dispositif.

Par rapport à la version adoptée par l’Assemblée nationale, le projet de loi précise le dispositif en :

- imposant aux propriétaires d’effectuer l’entretien des abords des réseaux, tout en permettant à l’opérateur de le faire à ses frais sur une base volontaire ;

- et prévoyant que, lorsque cet entretien n’est assuré par aucun d’entre eux, le maire peut s’en charger aux frais des opérateurs.

Le principal opérateur concerné par les mesures proposées est Orange dont le réseau fixe de communications électroniques ouvert au public comporte 15,2 millions de poteaux pour 32,5 millions de lignes téléphoniques.

2. Description des objectifs poursuivis

La mesure envisagée tend à améliorer la qualité du service téléphonique fixe :

- en établissant une chaîne de responsabilité entre les propriétaires de terrains et les exploitants de réseaux fixes aériens en matière d’entretien de leurs abords ;

- et en renforçant le pouvoir de sanction de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ainsi que les obligations de transparence du prestataire du service universel.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Les mesures envisagées complètent et modifient les dispositions des articles L. 35, L. 35-7, L. 36-11, L. 47, L. 48 et L. 50 du code des postes et des communications électroniques. C’est pourquoi de telles mesures relèvent du domaine de la loi.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 Concernant l’impact des obligations de qualité de service pesant sur le prestataire de la composante « téléphonie » fixe du service universel des communications électroniques :

Orange fournit la composante téléphonie fixe du service universel dans les conditions prévues par l’arrêté du 31 octobre 2013. Le cahier des charges qui est annexé à cet arrêté comporte des exigences fortes en matière de qualité de service, notamment concernant le temps de réparation d'une défaillance téléphonique. C’est dans le cadre du contrôle du respect de ces exigences que l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a ouvert le 27 mai dernier deux enquêtes administratives constatant que certains indicateurs de qualité de service présentés par Orange n’étaient pas conformes aux objectifs fixés par l’arrêté précité.

Le 28 novembre 2014, Orange s’est ainsi engagée à respecter un plan d’amélioration de la qualité des services offerts sur ses réseaux fixes :

- en accordant des moyens supplémentaires à ses unités d’intervention, notamment afin de résoudre le stock des défaillances en instance ;

- en anticipant les dégradations futures de la qualité de service ;

- en renforçant l’information des collectivités territoriales, notamment sur les évolutions de son réseau, et en intensifiant la collaboration avec celles-ci sur les détections et le traitement des dysfonctionnements, particulièrement en cas de crise (tempêtes, inondations…). 

L’ARCEP a d’ores et déjà annoncée qu’elle veillera à la mise en œuvre effective de ce plan qui consiste donc notamment en la hausse des moyens humains et financiers en vue d’une meilleure maintenance préventive du réseau et notamment au remplacement de 15 000 poteaux chaque mois dans le cadre d’un vaste plan de maintenance du parc sur 8 ans.

La mesure proposée par le présent article contribuera à améliorer la transparence relative à la mise en œuvre de ce plan et si besoin à la modification des objectifs de qualité de service fixés dans le cadre l’appel à candidature suivant.

4.2 Concernant l’impact des dispositions relatives à l’entretien des abords des lignes :

Le réseau de l’opérateur historique qui est constitué de plus de 32 millions de paires de cuivre en distribution est raccordé via 1 000 000 km d’artères dont plus de 50 % sont aériennes et reposent sur 15,2 millions de poteaux.

Le coût des opérations préventives et curatives de la boucle locale cuivre (redressement de poteaux, remise en état des lignes, etc.) correspond aujourd’hui à un budget d’environ 300 millions d’euros par an sur un total de 500 millions d’investissements dans le réseau cuivre. 

Sachant que l’opérateur estime qu’environ 1% des lignes aériennes sont menacées d’agression par des végétaux et que le coût d’une intervention d’élagage se situe entre 200 euros et 400 euros pour 40 m, soit la distance entre deux poteaux, le nombre annuel d’interventions d’élagage serait d’environ 150 000 pour un coût compris entre 40 et 70 millions d’euros par an. Ce montant total concerne pour les deux tiers le domaine public de personnes publiques et pour un tiers leur domaine privé ainsi que les propriétés de personnes privées.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Chapitre II

Facilitation des usages

Section 1
Recommandé électronique

Article 40
Recommandé électronique

1. État des lieux

Les envois recommandés électroniques ne disposent pas actuellement de cadre juridique harmonisé. Deux régimes juridiques coexistent, d’une part pour la conclusion ou l’exécution d’un contrat (article 1369-8 du code civil) et d’autre part pour la saisine de l’administration par voie électronique (article L. 112-15 du code des relations entre le public et l’administration, issu de l’article 5-2 de l’ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005).

Cependant, ces textes ne définissent ni les exigences à respecter par les prestataires de recommandé électronique, ni l’autorité de contrôle compétente en cas de litige. De ce fait, de nombreux prestataires (SSII) offrent des services d’envois recommandés électroniques dont ils promeuvent la valeur probante, mais en cas de litige, se dédouanent de toute responsabilité en cas de non remise au bon destinataire.

2. Description des objectifs poursuivis

Les objectifs poursuivis sont de plusieurs ordres :

- d’une part apporter un cadre juridique harmonisé au service de recommandé électronique, afin que les usagers puissent en bénéficier dans leurs échanges avec les entreprises ou dans d’autres types d’échange, et le cas échéant recourir au même prestataire (objectif de simplification) ;

- d’autre part il s’agit d’assurer au recommandé tout électronique la même valeur juridique qu’au traditionnel recommandé postal. Cette valeur probante est attachée à la valeur de la signature – physique pour le recommandé traditionnel, électronique pour le recommandé dématérialisé. Ce contrôle est prévu comme s’inscrivant strictement dans les conditions fixées par le règlement eIDAS ;

- la désignation d’une autorité de régulation compétente permettra aux usagers d’adresser, le cas échéant, leurs plaintes à une instance dotée de pouvoirs de sanction (objectif de sécurisation juridique) ;

- enfin, apporter des garanties particulières qui ne figurent actuellement pas dans les textes, notamment pour assurer la remise du recommandé électronique au bon destinataire, permettra de développer davantage les usages et de renforcer la confiance des usagers dans ce vecteur de dématérialisation (objectif de développement du numérique).

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Le corpus juridique français se caractérise par le recours fréquent au recommandé traditionnel dans le cadre de nombreuses procédures judiciaires (plus de 17 000 procédures différentes y font référence).

Définir par la loi la portée juridique du recommandé électronique et les garanties qui y sont attachées permettra d’harmoniser le régime juridique.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’impact attendu de ces dispositions est un développement des usages, qui permettra ainsi une dématérialisation efficace de ces services, notamment pour les entreprises.

Le recommandé papier représente encore aujourd’hui pour le groupe La Poste un revenu important (le recommandé traditionnel représente en effet en 2014 plus de 1 milliard d’euros de chiffres d’affaires). Le groupe La Poste fait cependant de la transition vers le numérique un axe prioritaire de sa stratégie à horizon 2020 et enregistre de premiers résultats positifs sur ses offres numériques (23 M€ en 2013 sur le recommandé hybride, collecté sous forme électronique et distribué sous forme papier). Le groupe La Poste dispose donc d’atouts pour mettre à profit le développement du recommandé électronique tel qu’envisagé par l’article 26  du projet de loi. Son implication aura aussi un impact bénéfique pour les usagers et l’administration en terme d’adaptation aux usages du numérique; Len effet les exemples d’autres pays européens comme le Danemark montrent que les ÉtatÉtats ayant réussi leur transition numérique étaient souvent accompagnés par les opérateurs postaux convertis au numérique. En effet, comme le démontrent les analyses de centres de recherche européens (Swiss Economics, TNO – Organisation for Applied Scientific Research) les opérateurs postaux sont des acteurs clés dans la numérisation de l’économie en tant qu’interfaces physiques du monde numérique grâce à leurs infrastructures (réseau postal) ou leurs bases de données (adresses) et à la confiance qu’ils inspirent aux usagers.

5. Consultations menées

L’ARCEP a été consultée sur le projet d’article sur lequel elle a rendu un avis « très réservé ». L’article a été fortement amendé pour tenir compte de ces observations.

6. Textes d’application et Outre-mer

Un décret en Conseil d’État fixera les modalités de mise en œuvre de ces nouvelles dispositions législatives.

Section 2
Paiement par SMS

Article 41
Paiement par SMS

1. État des lieux

Le don par SMS donne lieu à l’encaissement de fonds pour compte de tiers, ce qui suppose effectivement un cadre légal spécifique régi par l’actuelle directive européenne sur les services de paiement. Ce texte permet actuellement aux opérateurs de communications électroniques de collecter des promesses de dons pour le compte d’une association de bienfaisance à condition qu’ils fassent recours à des prestataires de services de paiement (=agréés par l’ACPR) ou qu’ils mettent eux-mêmes en place des établissements de paiement. La directive européenne « services  de  paiement » a été révisée et elle prévoit désormais une exemption concernant la collecte de promesses de dons pour le compte d’une association de bienfaisance. C’est le cas également pour d’autres services comme la billetterie et l’achat de contenus vidéo ou audio.

2. Description des objectifs poursuivis

Cette disposition vise à anticiper la transposition de la directive européenne et permettre ainsi aux clients d’un opérateur de communication électroniques de pouvoir faire un don ou un paiement par sms de façon simple et rapide.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

En tout état de cause, la directive européenne « services de paiement » nécessite d’être transposée en droit national par une loi. La transposition accélérée de cette disposition permettra aux citoyens français de bénéficier d’un nouveau vecteur pour faire certains achats ou un don par SMS.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’adoption de cette disposition n’est pas de nature à engager des charges supplémentaires pour l’administration.

5. Consultations menées

Le Comité consultatif de la législation et de la réglementation financière, consulté, a rendu un avis favorable sur ce projet d’article.

6. Textes d’applications et Outre-mer

Un décret en Conseil d’État fixera le délai de notification par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution mentionné au projet d’article L.521-3-1 du code monétaire et financier.

La date d’entrée en vigueur du dispositif sera fixée par décret.

L’article 46 du projet de loi rend l’article 41 applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis et Futuna.

Section 3
Compétitions de e-sport

Article 42
Compétitions de jeu vidéo

1. État des lieux

Le développement des compétitions de jeux vidéo en ligne (dont la pratique est souvent désignée par l’expression e-sport) est un phénomène mondial, particulièrement en Asie et en Amérique du Nord, et l’on estime à 15 millions le nombre de joueurs qui pratiquent en compétition. Ces compétitions sont de plus en plus médiatisées puisque, à titre d’exemple, la dernière finale des championnats du monde du jeu League of Legends (LoL) a été suivie en direct par plus de 32 millions de spectateurs. Notablement en 2015, alors que la rediffusion était traditionnellement limitée aux nouveaux acteurs de l’internet (Twitch en particulier), de nombreuses chaînes de renom ont annoncé intégrer des programmes de ce type dans leurs grilles (BBC, ESPN, Turner Broadcasting).

En France, il y aurait environ 850 000 pratiquants réguliers et l’on assiste à l’émergence d’une scène professionnelle. Le nombre de joueurs professionnels augmente de façon continue puisqu’environ 50 jeunes français joueraient aujourd’hui en étant rétribués pour leur activité (gains lors des tournois, sponsors, commentaires de parties diffusées en ligne).

En dehors des compétitions en ligne, les saisons sont rythmées par un nombre croissant de tournois organisés soit dans le cadre de circuits internationaux, soit de manière indépendante. Ces tournois (ESWC, Paris Games Week, DreamHack, etc.) réunissent les meilleurs acteurs du circuit en vue de l’obtention de récompenses importantes (cash prize), qui peuvent, comme pour la compétition The International de DOTA2, atteindre 11 M$, avec un financement massif et volontaire des fans.

Du fait de la popularité croissante des compétitions de jeu vidéo, les enjeux économiques deviennent également importants, même si le secteur tarde à traduire ses audiences massives en revenus. D’après une étude de Newzoo de 2014, les revenus combinés des compétitions de jeu vidéo, comprenant la publicité, le sponsoring, les ventes de droits ou les entrées, n’ont représenté l’année dernière qu’environ 200 M$. Le premier frein au développement du segment est que l’audience significative des compétitions n’a pas encore été monétisée efficacement, par frilosité des acteurs traditionnels des compétitions professionnelles, notamment les sponsors et les chaînes de télévision. Le prix qu’a payé Amazon pour la plateforme Twitch (1 Md$), dont une des activités principales est la retransmission de compétitions de jeu vidéo, est toutefois un indicateur intéressant des attentes des géants de l’internet vis-à-vis de ce marché naissant.

Le deuxième frein est l’incertitude juridique qui règne dans de nombreux pays, quant au statut des compétiteurs, des sponsors et des compétitions de jeu vidéo. Si la Corée du Sud a depuis longtemps mis en place une réglementation adaptée et encouragé le développement des compétitions de jeu vidéo sur son territoire, les pays occidentaux commencent à peine à prendre cette nouvelle discipline en considération. En France, notamment, l’absence de statut de l’e-sport freine le développement de ce secteur, en limitant l’impact économique du sponsoring, en compliquant la venue de joueurs internationaux et en faisant peser un risque juridique sur les compétitions elles-mêmes.

2. Objectifs poursuivis

Le présent article vise à clarifier le statut des compétitions d’e-sport vis-à-vis de la réglementation sur les jeux d’argent et de hasard. En effet, depuis l’adoption de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation et de son article 148, qui définit les jeux d’argent comme étant soumis, même de manière partielle, au hasard et qui inclut spécifiquement dans cette catégorie les jeux d’adresse, les compétitions de jeu vidéo, peuvent être considérées comme des loteries, malgré un rôle négligeable du hasard par rapport à l’adresse et à l’entraînement des joueurs.

Afin de permettre le développement de cette activité, il convient d’exempter les compétitions de jeu vidéo des interdictions fixées par les articles L. 322-1 à L. 322-2-1 du code de la sécurité intérieure. Cependant, une définition précise et un encadrement des compétitions de jeu vidéo reste nécessaire afin d’éviter toute dérégulation des jeux de cercle électroniques et de prévenir tout risque en termes de santé publique et de lutte contre la fraude et le blanchiment.

La définition de cet encadrement, en liaison avec l’ensemble des ministères concernés et avec les entreprises du secteur, prendra plusieurs mois et n’est pas compatible avec le calendrier du présent projet de loi. Dans ce contexte, le recours à une ordonnance apparaît approprié.

3. Nécessité de légiférer

L’habilitation prévue à l’article 38 de la Constitution est nécessairement de niveau législatif.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’impact sur les entreprises du secteur serait considérable et diffuserait dans d’autres secteurs économiques. En effet, les revenus directs de l’e-sport pourraient être estimés à 765M$ fin 2018, en forte croissance de 41%. Ces retombées bénéficieraient aux organisateurs (pour la plupart français), aux éditeurs de jeux d’e-sport (parmi lesquels Ubisoft essaie de se positionner) et aux diffuseurs (sur lesquels Dailymotion essaie de gagner des parts de marché face à Twitch et Youtube). Indirectement, c’est l’ensemble du secteur du tourisme qui serait impacté, car les compétitions d’e-sport ont le potentiel, à terme, d’attirer autant de spectateurs que certaines des compétitions sportives les plus populaires.

L’habilitation du gouvernement à modifier le Code de la Sécurité Intérieure et à prévoir une autorisation des compétitions d’e-sport permettra à celui-ci de concevoir un régime particulier de l’e-sport qui réponde au mieux aux exigences en termes de santé publique et de lutte contre la fraude et le blanchiment.

L’impact administratif dépendra des contraintes imposées réglementairement (déclaration, autorisation) aux compétitions d’e-sport. L’impact budgétaire sera strictement positif, en raison des recettes de taxes (TVA sur les manifestations, impôt sur les sociétés, impôts sur le revenu des joueurs ou sur les gains aux jeux) qui découleront du développement de l’e-sport.

Chapitre III

Accès des publics fragiles au numérique

Section 1
Accessibilité des personnes handicapées aux services téléphoniques

Article 43
Accueil téléphonique des personnes publiques et des entreprises ;
Offre pour les déficients auditifs

1. État des lieux

Les personnes sourdes, malentendantes, sourdes-aveugles et aphasiques ne peuvent pas accéder aux différents services téléphoniques dès lors que cela nécessite une traduction / transcription. Afin de mieux évaluer les besoins de ces dernières, l’expérimentation d’un centre de relais téléphonique a été lancée le 2 juin 2014 pour se terminer le 31 mai 2015. Les mesures présentées s’inscrivent dans la continuité de cette expérimentation.

2. Description des objectifs poursuivis

La mesure vise à rendre les services téléphoniques accessibles aux personnes sourdes et malentendantes, en instaurant une obligation de mise en accessibilité des services téléphoniques, quel que soit le terminal utilisé (téléphone fixe ou mobile). Elle concerne les services téléphoniques des services publics, les services client des entreprises ainsi que les services de communications électroniques fournis par les opérateurs.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Le principe d’accessibilité des personnes handicapées dans les domaines structurant de la vie d’un individu (emploi, lieux publics, éducation, etc.) a été introduit au niveau législatif, par la loi du 11 février 2005 dite « handicap » en particulier.

Afin de mettre en œuvre l’accessibilité des personnes sourdes et malentendantes aux services téléphoniques, plusieurs options ont été envisagées, dont la mise en place d’un centre relais généraliste tel que celui expérimenté dernièrement (géré par l’État en propre ou via un appel d’offres), une prise en charge par les opérateurs de communications électroniques via le biais du dispositif de service universel ou encore l’encouragement des prestataires de services actuels à développer un business model permettant d’assurer cette accessibilité. La solution choisie constitue une voie équilibrée, prenant en compte l’impossibilité pour l’État d’assumer financièrement l’entièreté du dispositif, et la nécessité de ne pas faire reposer toute la charge, financière notamment, sur le seul secteur économique des communications électroniques. L’obligation se trouve ainsi partagée entre les administrations, les entreprises de manière générale et les opérateurs de communications électroniques.

Les dispositions présentées, dans la mesure où elles étendent le principe d’accessibilité fixé par la loi du 11 février 2005 aux services téléphoniques des services publics et des entreprises, relèvent également du domaine de la loi.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Deux dispositifs sont envisagés :

- d’une part, une obligation sur les services publics et les entreprises qui devront à terme pouvoir être joints par toute personne sourde ou malentendante, ce qui implique qu’ils se dotent en interne d’interprètes, ou bien qu’ils fassent appel, pour fournir ce service accessible, à un prestataire spécialisé. L’impact financier pour une autorité administrative ou une entreprise diffèrera selon leur taille, la volumétrie des appels à leur service téléphonique, etc. A titre d’exemple, une entreprise de relais téléphonique facture ses services, sur la base d’un forfait annuel illimité, entre 70€ pour une commune de moins de 2 000 habitants, un médecin, un boulanger et 15 000€ voire 20 000€ pour une grande entreprise ou un conseil départemental. A l’instar de ce qui se fait déjà en matière de mutualisation des services d’accueil téléphonique (ex. télé-secrétariat médical) les collectivités territoriales, comme les entreprises, pourront se regrouper et mutualiser les coûts en s’adressant à un même prestataire. Ces regroupements permettront ainsi de jouer à la baisse sur le montant annuel des abonnements et de diminuer l’impact financier de l’obligation sur les différentes collectivités

- d’autre part, une obligation pour les opérateurs de communications électroniques qui devront développer une offre commerciale accessible pour les services fixe et/ou mobile. Un décret précisera les contours minimaux de cette offre dont le tarif devra rester abordable.

La combinaison de ces deux dispositifs permettra d’assurer l’accessibilité des services téléphoniques aux personnes sourdes et malentendantes en complément des dispositifs existants. Les personnes sourdes et malentendantes s’appuient en effet déjà beaucoup sur les nouvelles technologies pour communiquer, notamment les SMS, la visiophonie, les mails, etc. Les progrès technologiques permettent par ailleurs d’espérer le développement de nouveaux outils dans les prochaines années facilitant l’autonomie des personnes déficientes auditives face au téléphone.

Compte tenu de l’absence des ressources en interprétariat et transcription nécessaires pour satisfaire à la mise en accessibilité immédiate des services téléphoniques visés et des délais nécessaires à la formation de personnels qualifiés, une entrée en vigueur différée pour l’application de ces dispositions est requise. Cette entrée en vigueur doit également intervenir de façon progressive, les entreprises les plus importantes devant fournir un service accessible les premières.

Selon l’étude menée par la société Orange Consulting chargée d’évaluer le besoin en matière d’accessibilité des services téléphoniques pour les personnes sourdes et malentendantes, ainsi que les différents scenarios de mise en œuvre envisageables, l’appropriation par les populations concernées sera progressive.

Le nombre d’utilisateurs de centre relais (tous usages confondus : appels personnels et professionnels) devrait atteindre 91 000 en dix ans, répartis de la façon suivante :

54.000 pour le texte

34.000 pour la LSF

3.000 pour le LPC

Le tableau ci-dessous illustre la montée en charge du nombre d’utilisateurs de services relais téléphoniques sur les 10 premières années, selon le mode de communication utilisé :

Année

Cible totale utilisateurs

dont utilisateurs LSF

dont utilisateurs LPC

dont utilisateurs Texte

1

4 000

1 495

132

2 374

2

5 000

1 868

165

2 967

3

8 000

2 989

264

4 747

4

13 000

4 857

429

7 714

5

22 000

8 220

725

13 055

6

33 000

12 330

1 088

19 582

7

45 000

16 813

1 484

26 703

8

62 000

23 165

2 044

36 791

9

79 000

29 516

2 604

46 879

10

91 000

34 000

3 000

54 000

Concernant l’estimation des coûts, un service de relais se décompose en quatre couches structurantes : le service d’interprètes / codeurs / transcripteurs, le fournisseur du service qui élabore, développe et commercialise l’offre, la solution technique et fonctionnelle sur laquelle s’appuie l’offre, et enfin l’infrastructure de réseau télécom.

Pour chacune des couches, les coûts d’investissement et les coûts fixes récurrents ont été pris en compte. Après extrapolation des données de l’expérimentation d’un centre de relais téléphonique menée par le ministère de la santé entre juin 2014 et mai 2015, rapporté en coût à la minute, le service passerait de 6,7 € par minute en année 1 à 3,1 € par minute en année 10.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Le Conseil national d’évaluation des normes a été consulté.

Le Conseil national du handicap a également été consulté.

6. Textes d’application et outre-mer

Le projet d’article nécessite des textes d’application pour sa mise en œuvre.

L’article 78 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est rendu applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna par l’article 93-4 de la même loi.

L’article 46 du projet de loi rend les modifications apportées à l’article 78 de la loi du 11 février 2005 par le I et le IV de l’article 43 applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Section 2
Accessibilité des personnes handicapées aux sites internet publics

Article 44
Accessibilité numérique des services publics

1. État des lieux

Conformément aux dispositions de l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, les services de communication publique en ligne des services de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent doivent être accessibles aux personnes handicapées. Cette obligation concerne l'accès à tout type d'information sous forme numérique quels que soient le moyen d'accès, les contenus et le mode de consultation.

S’agissant des sites internet publics, les règles relatives à l’accessibilité et les modalités de leur mise en œuvre sont précisés par le décret n° 2009-546 du 14 mai 2009 et le Référentiel général d’accessibilité pour les administrations (RG2A), actualisé par l’arrêté du 29 avril 2015. Ces textes se réfèrent en particulier aux recommandations internationales et européennes pour l'accessibilité de l'internet qui doivent être appliquées aux services de communication publique en ligne. Ils définissent notamment la nature des adaptations à mettre en œuvre ainsi que les délais de mise en conformité des sites existants et les sanctions imposées en cas de non-respect de cette mise en accessibilité. La réglementation énonce en outre les modalités de formation des personnels intervenant sur les services de communication publique en ligne.

Conformément à ce dispositif, toujours en vigueur, le contrôle de conformité des sites internet au référentiel d’accessibilité se fait sur la base d’une déclaration en ligne des services publics. La sanction prévue pour les sites non-conformes consiste à les classer dans une liste qui doit être mise en ligne par le ministre chargé des personnes handicapées. Ces deux mesures, en application depuis 2009, se sont révélées inopérantes. En effet, à ce jour, à peine 4% des sites se sont conformés à cette règle.

Les associations de personnes handicapées ont regretté que le dispositif d’accessibilité des sites internet prévu par la loi de 2005 n’ait pu bénéficier des moyens de garantie plus efficace pour sa mise en application.

2. Description des objectifs poursuivis

Le nouveau dispositif proposé à l’occasion de la loi numérique vise donc à répondre aux attentes des associations et à renforcer leur confiance. Il permet également de se conformer au nouveau projet de directive européenne pour l’accessibilité des sites web publics.

Ce dispositif permet de rendre le contrôle plus efficace et est assorti, le cas échéant, de sanctions mieux applicables. Les mesures prévues visent à valoriser les services qui ont fait un effort pour rendre leurs sites accessibles et à encourager les autres pour s’y engager rapidement. Les modalités de mise en œuvre sont plus faciles que les précédentes mesures et l’impact plus efficace notamment en raison de la visibilité de ces mesures.

L’objectif est de conduire les sites publics à une auto-déclaration lorsqu’ils n’ont pas appliqué les mesures d’accessibilité conformément au référentiel d’accessibilité (RG2A). L’obligation d’afficher une mention qui indique la non-conformité du site est le point fort de ce dispositif et un moyen pour conduire les sites publics à une meilleure prise en compte des besoins des personnes en situation de handicap.

3. Nécessité de légiférer

L’ajout d’une nouvelle obligation et de sanctions assorties dans le domaine de l’accessibilité des sites internet publics est régi par l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, et nécessite ainsi une modification législative.

Ainsi, le premier alinéa du projet d’article rend obligatoire la présence d’une mention à l’ouverture des sites publics pour indiquer leur état au regard des règles d’accessibilité. Cette mention est déclinée selon trois catégories :

o pour les sites qui n’ont pris aucune disposition pour se mettre en conformité, un macaron indiquerait, dès l’ouverture de la page, que le site n’est pas conforme avec le RG2A.

o pour les sites qui ont appliqué le RG2A, un macaron indiquerait le niveau pris en compte.

o pour les sites qui ont mis en place un certain nombre de mesures sans appliquer totalement le RG2A, un label les mettra en valeur selon différents niveaux.

Les sites qui n’afficheraient pas le macaron prévu à cet effet sur leur page d’accueil seraient contrôlés et sanctionnés par la DGCCRF, comme tout service et produit de consommation qui ne respecte pas l’étiquetage réglementé. Ce dispositif s’inscrit dans l’esprit du principe de la conception universelle des services et bien de consommation prévus par la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, ratifiée par la France. Le produit des sanctions sera versé au Fonds d’accessibilité universelle crée par l’ordonnance du 26 septembre 2014 et sera réservé au développement de la recherche dans le domaine de l’accessibilité.

Pour les sites non-conformes, le macaron mentionnera, le cas échéant, l’état d’avancement du schéma pluriannuel de mise en accessibilité, prévu par ce nouveau dispositif.

Le schéma pluriannuel d’accessibilité est introduit par le deuxième alinéa du projet d’article. Ce schéma définit le programme et les modalités de mise en accessibilité des sites internet et intranet, ainsi que de l’ensemble des progiciels mis à disposition des utilisateurs des sites. Ce schéma se décline en feuille de route annuelle et prévoit en outre un programme de suivi de la prise en compte de l’accessibilité lors de chaque modification, mise à jour ou changement de contenu des sites.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’objectif étant d’inciter les personnes publiques à respecter les normes d’accessibilité numérique grâce à la mise en œuvre d’un moyen simple à mettre en œuvre mais incitatif au changement, le dispositif principal de l’article consiste en l’ajout d’une simple mention de conformité aux règles d’accessibilité sur les sites internet des personnes publiques (ÉtatÉtat, établissements publics, collectivités locales).

Le coût de l’ajout de cette mention est nul ou marginal pour les personnes publiques concernées : pour les personnes publiques qui gèrent directement leur service internet, l’ajout de la mention sera réalisé par les services techniques compétents ; pour les personnes publiques dont le site est géré par un prestataire, l’ajout d’une mention de conformité sur le site internet ne nécessitera pas de renégociation du contrat relatif à la gestion du site internet.

Par ailleurs, en cas de non-respect de cette obligation d’affichage, la sanction financière propose plusieurs barèmes en fonction du statut de la personne publique concernée et permet ainsi de prendre en compte la spécificité des communes de moins de 5 000 habitants.

Enfin, dans la même logique, l’élaboration d’un schéma pluriannuel de mise en accessibilité, si elle représente une avancée forte pour inciter les personnes publiques à respecter les normes d’accessibilité numérique, représentera une charge modérée : le schéma sera rédigé et mis en œuvre directement par les services concernés des personnes publiques, dans la continuité des actions de mise en accessibilité des lieux physiques entreprises depuis la loi du 11 février 2005 sur le handicap.

5. Consultations menées

Le Conseil national d’évaluation des normes a été consulté.

6. Textes d’application et Outre-mer

Les modalités de mise en œuvre de ce nouveau dispositif d’accessibilité seront précisées par décret en Conseil d’État.

L’article 46 du projet de loi rend le I de l’article 44 applicable dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Section 3
Maintien de la connexion internet

Article 45
Maintien temporaire de la connexion

1. État des lieux

L’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles donne droit à toute personne en difficulté financière à une aide de la collectivité pour disposer de la fourniture d'eau, d'énergie et de services téléphoniques dans son logement. Ce principe est mis en œuvre par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement.

Selon le droit applicable, les factures d’énergie et d'eau doivent être réglées dans un délai de 14 jours suivant leur émission ou date limite de paiement. A défaut d'accord entre le consommateur et le fournisseur sur les modalités de paiement dans le délai de 30 jours et en l'absence d'une demande d'aide déposée auprès du fond de solidarité pour le logement (FSL), le fournisseur peut procéder à la réduction ou à la coupure d'énergie et d'eau. Il en informe le consommateur au moins 20 jours à l'avance par un second courrier. La saisine du FSL a pour effet de suspendre la procédure d'impayé et donc la coupure. Les demandes sont examinées par l’organe compétent défini au niveau départemental, généralement une commission composée de représentants du Conseil départemental, de la Caisse d’allocations familiales, des communes, des bailleurs sociaux et/ou des fournisseurs d’eau et d’énergie.

La nature et le montant des aides sont également fixés par le département, et peuvent par conséquent différer très largement d’un territoire à l’autre. A titre d’exemple, le FSL de l’Essonne accorde jusqu’à 150€ d’aide par an et par ménage pour le paiement des factures téléphoniques. En Gironde, l’aide au paiement des impayés téléphoniques prend la forme d’abandons de créances. Concernant les impayés d’eau, l’assiette de l’aide est déterminée en prenant en compte le montant TTC de l’abonnement et des consommations impayées ; et le montant maximum de l’aide sera limité à 150 € par an et par ménage. L’aide est versée sous forme de subvention, la partie de la facture impayée non couverte par l’aide restant à la charge du demandeur et doit faire l’objet d’un paiement négocié entre le demandeur et le distributeur d’eau. En Gironde, le montant de l’aide varie entre 150€ et 500€, et peut être accordée deux fois dans l’année.

2. Description des objectifs poursuivis

L’accès à internet s’est imposé ces dernières années comme un service essentiel, tant pour les démarches administratives, la recherche d’emploi que pour l’accès à l’information. L’absence d’accès à internet peut ainsi être facteur d’exclusion, et crée une fracture numérique entre ceux qui peuvent se permettre un accès à l'internet et ceux qui ne peuvent pas se le permettre ou que de façon limitée. L’ONU a reconnu en 2012 l’accès à Internet comme étant un droit fondamental.

La mesure proposée vise à inclure l’accès aux services internet dans le périmètre des services pouvant bénéficier d’une aide financière de la collectivité. Ainsi, les personnes rencontrant des difficultés pour s’acquitter de leurs factures auprès de leur fournisseur d’accès à Internet pourront faire une demande d’aide auprès du FSL de leur département de résidence et ainsi bénéficier, dans des conditions fixées par le Conseil départemental en lien avec les partenaires sociaux et les fournisseurs de service, d’une aide au maintien de la connexion.

3. Options possibles et nécessité de légiférer

Les mesures sociales existantes visant à assurer l’inclusion numérique des personnes en difficulté financière, résultent en général de démarches volontaires, à l’instar du partenariat entre Emmaüs Connect et SFR, afin de faciliter l’équipement des ménages en terminaux (mobiles, ordinateurs reconditionnés), et faire bénéficier les clients de conseils en vue de réduire leur facture.

En 2011, un label « tarif social internet » a été institué par convention entre l’État et les opérateurs de communications électroniques afin de proposer des tarifs d’accès à internet fixe et des conditions contractuelles préférentielles à certaines catégories de personnes en raison notamment de leur niveau de revenu.

Néanmoins, ces initiatives restent trop isolées pour pouvoir offrir des solutions satisfaisantes au plus grand nombre, et gagneraient à être généralisées. C’est le sens de cette disposition du projet de loi, qui vise à inscrire l’accès à Internet au nombre des services pouvant bénéficier du FSL. La liste de ces services étant définie par la loi, cette mesure nécessite de modifier les articles en cause, à la fois dans le code de l’action sociale et des familles et dans la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

Des coûts sont à prévoir pour la mise en œuvre de cette mesure, qui pèseront sur les contributeurs départementaux au FSL (conseils départementaux, caisses d’allocations familiales, communes, autres collectivités locales ou EPCI), en fonction de la volonté des départements de s’investir dans le dispositif.

4.1 Concernant le maintien d’un accès restreint à internet durant l’examen de la demande d’aide faite au FSL :

En cas d’impayé, l’opérateur est en droit de résilier l’abonnement. Néanmoins, une demande d’aide faite auprès du FSL a pour effet de suspendre la procédure d'impayé et donc la coupure. La commission d’examen de la demande a deux mois pour rendre son avis, et dans l’intervalle l’opérateur doit maintenir au bénéfice de son client un accès à Internet.

4.2 Concernant l’aide au financement des impayés en matière d’abonnement à internet :

La loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement prévoit les principes du financement du FSL, et dispose que le FSL est financé par convention passée entre le département, d'une part, et les représentants de chaque fournisseur d'énergie ou d'eau livrant des consommateurs domestiques, d'autre part. La loi ne prévoit pas le concours obligatoire des opérateurs pour le financement du fond, et les mesures proposées ici non plus.

En conséquence, les conseils départementaux qui voudront mettre en place une aide pourront :

- négocier avec les opérateurs leur participation volontaire sous forme de contribution financière ou d’abandon de créances comme cela se fait en Gironde par exemple ;

- négocier auprès d’autres contributeurs publics une participation supplémentaire au fonds ;

- abonder sur les fonds du département pour financer l’intégralité de la mesure.

4.3 Estimation du coût de cette nouvelle aide au financement des impayés :

Les aides financières actuellement accordées sont fixées au niveau départemental, et sont plafonnées. Elles sont en général limitées à une aide ponctuelle ou deux par an par foyer. Lorsqu’une aide financière est accordée pour le paiement des factures de téléphonie fixe, elle varie, allant de 50€ (Maine-et-Loire) à 150€ (Essonne), pour un abonnement de 16,90€ auxquelles s’ajoutent le coût, variable en fonction de la consommation, des communications passées.

Le prix d’un abonnement à internet qui inclut la téléphonie fixe est actuellement d’environ 30€. En cas de non-paiement, les conditions générales d’abonnement des opérateurs mentionnent la possibilité de suspendre, puis de couper le service. Le niveau des aides départementales sera fixé par les collectivités désireuses de mettre en place le dispositif.

La mesure permet le maintien de la connexion pendant une durée de deux mois en cas d’impayé, mais n’a pas pour effet d’annuler les créances formées pendant cette période. Ainsi, les opérateurs pourront exiger le remboursement de tout impayé précédent cette mesure instituant un délai supplémentaire de sursis d’impayés de deux mois, le coût pour les opérateurs de communication est égal au coût marginal du maintien d’une connexion pendant ces deux mois, rapporté au nombre de client dans cette situation.

5. Consultations menées

Cet article a été soumis pour avis à l’ARCEP, en application de l’article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, et à la Commission supérieure du service publique des postes et des communications électroniques, en application de l’article L. 125 du même code.

Le Conseil national d’évaluation des normes a également été consulté.

TITRE IV

Dispositions relatives à l’outre-mer

Articles 46 à 48

En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui relèvent, pour les matières abordées dans le projet de loi pour une République numérique, d’un régime d’identité législative, le projet de loi s’applique de plein droit. Aucune disposition particulière, ni aucune adaptation n’est à prévoir.

En revanche, pour son application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, qui relèvent d’un régime de spécialité législative, et ce indépendamment de ses dispositions applicables de plein droit, des mentions expresses d’application sont nécessaires, d’une part pour rendre applicables dans ces collectivités les modifications apportées par la présente loi à des dispositions qui y sont déjà applicables, et d’autre part, pour rendre applicables dans ces mêmes collectivités les dispositions nouvelles. Pour ces dispositions nouvelles, il est, par ailleurs, nécessaire de prévoir des adaptations dans les codes et les lois dans lesquelles elles s’insèrent.

A cet effet, l’article 46 comprend les mentions expresses d’application des dispositions du projet de loi en Nouvelle-Calédonie (I), en Polynésie française (II), dans les îles Wallis et Futuna (III) et dans les Terres australes et antarctiques françaises (IV).

L’article 47 procède aux modifications qu’il est nécessaire d’insérer, dans les codes mentionnés par le projet de loi, pour rendre applicables, dans les collectivités du Pacifique, les dispositions nouvelles qu’il créé.

L’article 48 procède aux modifications qu’il est nécessaire d’insérer, dans les lois mentionnées par le projet de loi, pour rendre applicables, dans les collectivités du Pacifique, les dispositions nouvelles qu’il créé ou modifie.

ANNEXE 1

Tableau synoptique des consultations

Article

Objet

Consultations obligatoires

Autres consultations

Titre I – La circulation des données et du savoir

Chapitre Ier – Economie de la donnée

Section 1 – Ouverture de l’accès aux données publiques

1

Communication de données entre administrations publiques

- Conseil national dévaluation des normes (CNEN)

- Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA)

 

2

Communication des décisions prises sur le fondement d’un traitement algorithmique

3 à 5

Elargissement du champ de diffusion par l’administration

6

Libre réutilisation des données des SPIC

7

Rationalisation du régime de réutilisation des informations publiques

8

Pouvoirs de la CADA

Section 2 – Service public de la donnée

9

Création d’un service public de la donnée

- CNEN

- CADA

 

Section 3 – Données d’intérêt général

10

Ouverture par défaut des données dans les contrats de DSP

- CNEN

- CADA

 

11

Ouverture des données dans les conventions de subventions

Section 4 – Gouvernance

13 à 16

Gouvernance CNIL/CADA 

- CADA

- Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL)

 

Chapitre II – Economie du savoir

17

Accès aux travaux de la recherche financée par des fonds publics

 

Principaux représentants en France de l’édition scientifique

18

Appariement de fichiers à des fins de statistique publique et de recherche scientifique et historique

CNIL

Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI)

Titre II – La protection des droits dans la société numérique

Chapitre Ier – Environnement ouvert

Section 1 – Neutralité de l’internet

19

Définition du principe de neutralité de l’internet

- Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)

- Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques (CSSPPCE)

 

20

Auto-Hébergement

Section 2 – Portabilité et récupération des données

21

Portabilité et récupération des données

 

Concertation nationale diligentée par le Conseil national du numérique

Section 3 – Loyauté des plateformes

22

Principe de loyauté vis-à-vis des consommateurs

 

- Conseil national de la consommation

- Entreprises du secteur

23

Loyauté et régulation des plateformes

   

Section 4 – Information des consommateurs

24

Information des consommateurs sur les avis en ligne

 

Conseil national du numérique

25

Information du consommateur sur les débits

- ARCEP

- CSSPPCE

 

Chapitre II – Protection de la vie privée en ligne

Section 1 – Protection des données à caractère personnel

26

Libre disposition de ses données à caractère personnel

CNIL

 

27

Droit à l’information sur la durée de conservation des données traitées

 

28

Exercice en ligne des droits relatifs aux données personnelles

 

29

Missions de la CNIL

 

30

Certificats de conformité

 

31 et 32

Droit à l’oubli pour les mineurs et mort numérique

 

33

Procédure de sanction de la CNIL

 

Section 2 – Confidentialité des correspondances privées

34

Respect des correspondances privées numériques

- ARCEP

- CSSPPCE

 

Titre III – L’accès au numérique

Chapitre Ier – Numérique et territoires

Section 1 – Compétences et organisation

35

Stratégie numérique des collectivités

- CNEN

- ARCEP

- CSSPPCE

 

36

Syndicats mixtes ouverts

 

Section 2 – Couverture numérique

37

Publicité de la qualité des services numériques

- ARCEP

- CSSPPCE

 

38

Principe de calcul des redevances d’usage des fréquences

39

Qualité du service téléphonique

Chapitre II – Facilitation des usages

Section 1 – Recommandé électronique

40

Recommandé électronique

- ARCEP

- CSSPPCE

 

Section 2 – Paiement par SMS

41

Paiement par SMS

Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières (CCLRF)

 

Chapitre III – Accès des publics fragiles au numérique

Section 1 – Accessibilité des personnes handicapées aux services téléphoniques

43

Accueil téléphonique des personnes publiques et des entreprises, offre pour les déficients auditifs

- CNEN

- ARCEP

- CSSPPCE

Conseil national du handicap

Section 2 – Accessibilité des personnes handicapées aux sites internet publics

44

Accessibilité numérique des services publics

- CNEN

 

Section 3 – Maintien de la connexion internet

45

Maintien temporaire de la connexion internet

- CNEN

- ARCEP

- CSSPPCE

 

ANNEXE 2

Tableau synoptique des décrets d’application

Articles

Textes d’application

Administration compétente

Art 2
Communication des décisions prises sur le fondement d’un traitement algorithmique

Décret en CE

Etalab

Article 4
Elargissement du champ de diffusion par l’administration

Décret en CE

Etalab

Article 5
Délais d’application open data par défaut

Décret simple

Etalab

Article 7
Rationalisation du régime de réutilisation des informations publiques

Décret simple

Etalab

Article 9
Création d’un service public de la donnée

Décret en CE et décret simple

Etalab

Article 11
Ouverture des données dans les contrats de subventions

Décret simple

Etalab

Article 12
Transmission à la statistique publique sous forme électronique d’informations présentes dans certaines bases de données d’organismes privés dans le but exclusif de réaliser des enquêtes statistiques

Décret simple

INSEE

Art 18
Appariement de fichiers à des fins de statistique publique et de recherche scientifique et historique

Décret en CE

MENESR

Art 21
Portabilité et récupération des données

Décret simple

MEIN (DGCCRF)

Article 23
Loyauté et régulation des plateformes

Décret simple

MEIN (DGCCRF)

Art 24
Information des consommateurs sur les avis en ligne

Décret simple

MEIN (DGCCRF)

Art 32
Droit à l’oubli pour les mineurs

Décret en CE

MJ

Art 40
Recommandé électronique

Décret en CE

MEIN (DGE)

Article 41
Paiement par SMS

Décret en CE et décret simple

MEIN (DGE)

Article 42
Compétitions de jeux vidéos

Ordonnance

MEIN (DGE)

Art 43
Accueil téléphonique des personnes publiques et des entreprises, offre pour les déficients auditifs

Décret simple

MAS

Art 44
Accessibilité numérique des services publics

Décret en CE

MAS

1 M. Adnène Trojette sur l’ « Ouverture des données publiques, les exceptions au principe de gratuité sont-elles toutes légitimes ? » remis au Premier ministre le 15 juillet 2013

2 Review of recent studies on PSI re-use and related market developments, Graham Vickery, 2008

3 An independant review of public sector information, Shakespeare Review, 2013

4 « The Generative Mechanisms of Open Government Data », European Conference on Information Systems, Jetzek, Avital, Michel, 2013

5 « Re-use of public sector information. Report for Danish Ministry for Housing, Urban and Rural Affairs », Marc de Vries, 2012

6 « Good Basic Data for Everyone – A Driver for Growth and Efficiency », Digitaliseringsstyrelsen, 2012

7 Marc de Vries, op. cit.

8 «Review of Recent Studies on PSI Re-Use and Related Market Developments» - Graham Vickery, 2010.

9 Mission redevances, Adnène Trojette 2013

10 CE, 27 septembre 1985, Ordres des avocats de Lyon c/ Bertin, n°56543

11 Avis CADA, 8 janvier 1987, Thomas, 5e rapport page 109 - CE, 30 janvier 1995, Min. d’État, min. éduc. nat. c/ Mme Guigue et CE, 22 mai 1995, Association de défense des animaux victimes d’ignominie ou de désaffection

12 CE, Association SOS Défense, 9 mars 1983, Lebon p. 728

13 http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Themes_Inspire.pdf

14 La langue anglaise ne marque pas la différence entre norme et standard (« norme » se dit « standard » en anglais), on parle pour les normes de standards de jure et pour les simples standards de standards de facto. Un simple standard (de facto) est généralement déterminé soit par un industriel pionnier ou en position dominante sur un marché, soit par une association professionnelle ou un consortium d'acteurs industriels (comme IEEE ou OASIS).

15 https://www.etalab.gouv.fr/licence-ouverte-open-licence

16 C’est le cas du répertoire des ministères économiques et financiers, qui recense l’intégralité des publications des ministères : http://www.economie.gouv.fr/cedef/repertoire-des-informations-publiques

17 Premier alinéa de l’article premier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 : « Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par les dispositions des chapitres Ier, III et IV du présent titre en ce qui concerne la liberté d'accès aux documents administratifs. »

18 Décret n° 2014-1050 du 16 septembre 2014 instituant un administrateur général des données.

19 Article R. 123-233 du code du commerce

20  https://references.modernisation.gouv.fr/sites/default/files/Cadre%20Commun%20d%27Architecture%20des%20R%C3%A9f%C3%A9rentiel%20de%20donn%C3%A9es%20v1.0_0.pdf

21 http://www.gfii.fr/uploads/docs/GFII_Donneespivots.pdf

22 Décision n° 2010-56 QPC du 18 octobre 2010, Département du Val-de-Marne [Mesure d'accompagnement social personnalisé - MASP]

23 Loi n° 95-127 du 8 février 1995 relative aux marchés publics et délégations de service public.

24 Décret2005-236 du 14 mars 2005 relatif au rapport annuel du délégataire de service public local et modifiant le code général des collectivités territoriales

25 Article L. 1411-3 du code général des collectivités territoriales.

26 La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (« loi NOTRe »), n’impose pas la publicité de ce rapport : en effet, le principe d’ouverture des données publiques par défaut prévu par son article 106 ne s’étend pas aux informations « produites ou reçues dans l’exercice d’une mission de service public industriel et commercial », ce qui est le cas des rapports annuels du délégataire.

27 Montant fixé par l’article 1 du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 pris pour l'application de l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif à la transparence financière des aides octroyées par les personnes publiques.

28 Le CNIS est défini par la loi comme une instance de concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique. Il comporte notamment des représentants des partenaires sociaux et des organismes consulaires (chambres de commerce et d’industrie, chambres des métiers et de l’artisanat et chambres d’agriculture).

29 Le Comité du Label, défini par la loi du 7 juin 1951 est une instance composée d’experts et de représentants des entreprises, de l’administration et des chercheurs qui évaluent la qualité technique des enquêtes et donnent un avis quant au caractère obligatoire ou non d’une enquête demandé par l’entité en charge de la réaliser.

30 Enquête de l’Association des directeurs de bibliothèques universitaires ADBU sur les budgets d’acquisition des BU : http://adbu.fr/wp-content/uploads/2014/03/Enqu%C3%AAte_ADBU_2014.pdf

31 La définition suivante pourrait être proposée : « les données de la recherche sont l’ensemble des données factuelles issues d’observations, d’enquêtes, de corpus, d’archives, d’expériences ou d’analyses computationnelles, enregistrées sous tout format et sur tout support, dans une forme brute ou après avoir été traitées ou combinées, et sur lesquelles se fondent les raisonnements du chercheur et qui sont jugées nécessaires à la validation des résultats de la recherche ».

32 Dans le secteur particulier de l’édition de sciences humaines et sociales français, le travail de secrétariat de rédaction est assuré principalement par des salariés publics, tandis que les éditeurs se chargent de l’impression et de la diffusion, représentant environ 25 % des coûts de publication (enquête Bibliothèque scientifique numérique : Odile Contat et Anne-Solweig Gremillet, « Publier : à quel prix ? Étude sur la structuration des coûts de publication pour les revues françaises en SHS », Revue française des sciences de l'information et de la communication [En ligne], 7 | 2015, mis en ligne le 13 octobre 2015, consulté le 19 novembre 2015. URL : http://rfsic.revues.org/1716).

33 Rapport de l’Institut des politiques publique IPP n°11, juillet 2015 : Les revues de sciences humaines et sociales en France : libre accès et audience : http://www.ipp.eu/wp-content/uploads/2015/07/revues-shs-rapport-IPP-juillet2015.pdf.

34 Identifying benefits arising from the curation and open sharing of research data produced by UK Higher Education and research Institutes, 2008 : http://repository.jisc.ac.uk/279/2/JISC_data_sharing_finalreport.pdf, page 72.

35 État de l’enseignement supérieur et de la recherche en France, fiche 46 “Les publications scientifiques de la France”, http://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/8/EESR8_R_46-les_publications_scientifiques_de_la_france.php#ILL_EESR8_R_46_04a

36 Vers les sociétés du Savoir, rapport de l’Unesco, 2005, page 181.

37 Mieux partager l’information scientifique et technique, CNRS- Direction de l’information scientifique et technique DIST, mars 2015 [Questionnaire adressée aux directeurs des 1250 unités publiantes du CNRS] : http://www.cnrs.fr/dist/z-outils/documents/Enqu%C3%AAte%20DU%20-%20DIST%20mars%202015.pdf.

38 Financer la publication scientifique, CNRS-DIST, juin 2015 : http://www.cnrs.fr/dist/z-outils/documents/Distinfo2/DISTetude3.pdf

39 Counting the cost of Open Access, London Higher et SPARC Europe, novembre 2014 : http://www.researchconsulting.co.uk/wp-content/uploads/2014/11/Research-Consulting-Counting-the-Costs-of-OA-Final.pdf.

40 Proportion of Open Access Peer-Reviewed Papers at the European and Words levels - 2004-2011, rapport commandé par la Commission européenne, août 2013 :
http://www.science-metrix.com/pdf/SM_EC_OA_Availability_2004-2011.pdf
.

41 Cf. « Revues « prédatrices » : un danger pour les chercheurs ! » : http://openarchiv.hypotheses.org/2044

42 Le principe d’une libre diffusion des données de la recherche est notamment inscrit dans la déclaration de Bruxelles signée en 2007 par les plus grands éditeurs scientifiques mondiaux. http://www.stm-assoc.org/public-affairs/resources/brussels-declaration/

43 https://ec.europa.eu/research/science-society/document_library/pdf_06/recommendation-access-and-preservation-scientific-information_fr.pdf

44 Déclaration de Berlin sur le libre accès à la connaissance en sciences exactes, sciences de la vie, sciences humaines et sociales http://openaccess.mpg.de/Berlin-Declaration http://openaccess.mpg.de/68042/BerlinDeclaration_wsis_fr.pdf

45 http://www.republique-numerique.fr/events/gouvcamp-projet-de-loi-numerique

46 http://www.insdc.org/

47 https://ec.europa.eu/research/science-society/document_library/pdf_06/era-communication-towards-better-access-to-scientific-information_fr.pdf

48 Un article du journal allemand Tagesspiegel du 15 juillet 2015 expose qu’à cette date, même après un an et demi d’effectivité du "second droit" de diffusion libre des Allemands, pas plus de 5 à 10 % seulement des articles des chercheurs berlinois sont accessibles en libre accès.

Cf. http://www.tagesspiegel.de/wissen/open-access-freier-forschen-fuer-berliner-unis/12055836.html

49 L’Open Access et les revues SHS de langue française : Tendances du secteur, évolution de l’environnement réglementaire et perspectives 2018, IDATE / Cairn Info – Octobre 2015 :

http://www.openaccess-shs.info/wp-content/uploads/2015/10/Etude-IDATE-CAIRN-INFO-20151002.pdf

50 Public accessibility of biomedical articles from PubMed Central reduces journal readership retrospective cohort analysis, Philip M. Davis, avril 2013 : http://www.fasebj.org/content/early/2013/04/03/fj.13-229922.full.pdf+html

51 Source : L’édition scientifique institutionnelle en France : état des lieux, matière à réflexions, recommandations, Jean-Michel Henny, AEDRES, 2015.

52 Sources : L’édition de sciences à l’heure du numérique : dynamique en cours (2015), DIST-CNRS : http://www.cnrs.fr/dist/z-outils/documents/Distinfo2/Distetude2.pdfRésultats 2014 des grands éditeurs scientifiques : une croissance satisfaisante, des profits records, DISTinfo14 /mars 2015 : http://www.cnrs.fr/dist/z-outils/documents/Distinfo2/Distinf14.pdf ; rapports financiers annuels des grands éditeurs.

53 Notamment l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas, les Etats-Unis (et spécialement la Californie), le Mexique et l’Argentine.

54 Chiffres SNE : http://www.sne.fr/secteur_edit/universitaire-2/

55 L’édition scientifique française en sciences humaines et sociales, GFII, 2009) : http://www.gfii.fr/uploads/docs/l-edition-scientifique-francaise-en-sciences-sociales-et-humaines.pdf

56 Parmi une offre d’environ 2000 revues SHS, si l’on considère les 500 titres les plus importants, les groupes français généralistes (Hachette, Editis, La Martinière-Le Seuil, Gallimard-Flammarion) en possèdent moins de 40 ; les éditeurs spécialisés francophones que sont L’Harmattan, Erès, PUF, de Boeck en possèdent moins de 150, le CNRS et les presses universitaires portant le reste des titres avec d’autres acteurs variés : en 2009, le GFII évaluait à 1200 le nombre total d’éditeurs d’une seule revue de SHS, allant d’associations et de sociétés savantes, de petits éditeurs privés spécialisés, à des laboratoires de recherche publics. Sources : études citées dans « Les revues de sciences humaines et sociales (1) : une économie fragile », Jean Pérès, décembre 2014 (Acrimed : http://www.acrimed.org/Les-revues-de-sciences-humaines-et-sociales-1-une-economie-fragile).

57 Globalement (ouvrages et revues), les « éditeurs privés, au travers du CNL et autres sources d’aides (apports de budgets de publication par les unités de recherche), perçoivent des aides publiques d’un volume de l’ordre de 4 millions d’euros, soit 29% de leurs chiffres d'affaires en édition de recherche. » Source : Etude GFII 2009

58 « Le nombre d’abonnements payants moyen s’étage entre 150 et 1 200 abonnés avec une médiane de l’ordre de 300 abonnés ». Source : GFII, L’édition scientifique française en sciences sociales et humaines, octobre 2009

59 Marc Minon, Ghislaine Chartron : État des lieux comparatif de l’offre de revues SHS France – Espagne – Italie, Étude réalisée pour le Ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, juin 2005 ; Sophie Barluet, Les revues françaises aujourd’hui : entre désir et dérives, une identité à retrouver, Rapport de mission pour le Centre national du livre, avril 2006 ; GFII, L’édition scientifique française en sciences sociales et humaines, octobre 2009

60 Dans l’étude Idate, ce coût est calculé sur l’hypothèse d’une perte de valeur de l’abonnement estimée à 60% en cas de passage global des revues à une barrière mobile de un an. Le maintien du coût d’abonnement actuel à la plateforme CAIRN (pour les établissements de l’ESR, le marché global est de 1,7 M€TTC/an) permettrait d’éviter une partie des pertes ainsi calculées ; des pertes éventuelles en terme de vente papier seraient compensées par l’accompagnement direct aux revues.

61 Etudes Idate et BSN7, citées précédemment.

62 Source : http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-le-marche-du-cloud-computing-39790256.htm

63 Source : http://www.new.plusquelinfo.com/DisplayService/DisplayService.aspx?pmcrypt=oL3Fq2%2fyJf7Mruvrflj8onu0T0vm8bO8bJkUQRJk6ViQ%2bNmwLYOi%2fiZOEnomZHNafs7CX%2bfwsIry2s7FP66hjWvGgo4G%2f9Ni6SGwkz1Xe2Lb8bFVa8ORnIAuvA0fwUQZ&Referer=0&s=20017718-p-33472181

64 Disponible sur le site cloudindex.fr : http://www.cloudindex.fr/sites/default/files/PAC%20CloudIndex%20-%20Analyse%20de%CC%81cembre%202014.pdf

65 « Le numérique et les droits fondamentaux », pages 264 à 269.

66 Cour de cassation, 1ère chambre civile, 10 septembre 2014, n° 13-12.464.

67 En France, la loi informatique et libertés prévoit des sanctions maximales de 150 000 €.

68 L’article 40 dispose : « Les héritiers d'une personne décédée justifiant de leur identité peuvent, si des éléments portés à leur connaissance leur laissent présumer que les données à caractère personnel la concernant faisant l'objet d'un traitement n'ont pas été actualisées, exiger du responsable de ce traitement qu'il prenne en considération le décès et procède aux mises à jour qui doivent en être la conséquence.

Lorsque les héritiers en font la demande, le responsable du traitement doit justifier, sans frais pour le demandeur, qu'il a procédé aux opérations exigées en vertu de l'alinéa précédent. »

L’article 100 du décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 précise : « Outre la justification de son identité, l'héritier d'une personne décédée qui souhaite la mise à jour des données concernant le défunt doit, lors de sa demande, apporter la preuve de sa qualité d'héritier par la production d'un acte de notoriété ou d'un livret de famille. »

69 Orientation générale adoptée par le Conseil JAI (document 9565/15 du 11 juin 2015).

70 Cette servitude était prévue par l'ancien article L. 65-1 du code des postes et des télécommunications qui a été abrogé par la loi n° 96-659 du 16 juillet 1996.


© Assemblée nationale