N° 2625

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2000.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES (1) SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2001 (n° 2585)

TOME I

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

RELATIONS CULTURELLES INTERNATIONALES ET FRANCOPHONIE

PAR M. Patrick Bloche,

Député.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

    Voir le numéro : 2624 (annexe n° 1).

Lois de finances

La Commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; M. Jean-Michel Dubernard, M. Jean-Paul Durieux, M. Maxime Gremetz, M. Édouard Landrain, vice-présidents ; M. André Aschieri, Mme Odette Grzegrzulka, M. Denis Jacquat, M. Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; M. Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, M. Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, M. Jean-Paul Bacquet, M. Jean-Pierre Baeumler, M. Pierre-Christophe Baguet, M. Jean Bardet, M. Jean-Claude Bateux, M. Jean-Claude Beauchaud, Mme Huguette Bello, Mme Yvette Benayoun-Nakache, M. Serge Blisko, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. Jean-Claude Boulard, M. Bruno Bourg-Broc, Mme Danielle Bousquet, Mme Christine Boutin, M. Jean-Paul Bret, M. Victor Brial, M. Yves Bur, M. Alain Calmat, M. Pierre Carassus, M. Pierre Cardo, Mme Odette Casanova, M. Laurent Cathala, M. Jean-Charles Cavaillé, M. Bernard Charles, M. Michel Charzat, M. Jean-Marc Chavanne, M. Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, M. René Couanau, Mme Martine David, M. Bernard Davoine, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Marcel Dehoux, M. Jean Delobel, M. Jean-Jacques Denis, M. Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, M. Guy Drut, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Yves Durand, M. René Dutin, M. Christian Estrosi, M. Michel Etiévant, M. Claude Evin, M. Jean Falala, M. Jean-Pierre Foucher, M. Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, M. Germain Gengenwin, Mme Catherine Génisson, M. Jean-Marie Geveaux, M. Jean-Pierre Giran, M. Michel Giraud, M. Gaétan Gorce, M. François Goulard, M. Gérard Grignon, M. Jean-Claude Guibal, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M. Francis Hammel, M. Pierre Hellier, M. Michel Herbillon, M. Guy Hermier, Mme Françoise Imbert, Mme Muguette Jacquaint, M. Serge Janquin, M. Jacky Jaulneau, M. Armand Jung, M. Bertrand Kern, M. Christian Kert, M. Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, M. Jacques Lafleur, M. Robert Lamy, M. Pierre Lasbordes, M. André Lebrun, M. Michel Lefait, M. Maurice Leroy, M. Patrick Leroy, M. Michel Liebgott, M. Gérard Lindeperg, M. Lionnel Luca, M. Patrick Malavieille, M. Alfred Marie-Jeanne, Mme Jacqueline Mathieu-Obadia, M. Didier Mathus, M. Jean-François Mattei, M. Pierre Menjucq, Mme Hélène Mignon, M. Pierre Morange, M. Hervé Morin, M. Renaud Muselier, M. Philippe Nauche, M. Henri Nayrou, M. Alain Néri, M. Yves Nicolin, M. Bernard Outin, M. Dominique Paillé, M. Michel Pajon, M. Jean-Pierre Pernot, M. Bernard Perrut, M. Pierre Petit, Mme Catherine Picard, M. Jean Pontier, M. Jean-Luc Préel, M. Alfred Recours, M. Gilles de Robien, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel Rogemont, M. Yves Rome, M. Joseph Rossignol, M. Jean Rouger, M. Rudy Salles, M. André Schneider, M. Bernard Schreiner, M. Patrick Sève, M. Michel Tamaya, M. Pascal Terrasse, M. Gérard Terrier, Mme Marisol Touraine, M. Anicet Turinay, M. Jean Ueberschlag, M. Jean Valleix, M. Alain Veyret, M. Philippe de Villiers, M. Philippe Vuilque, Mme Marie-Jo Zimmermann.

INTRODUCTION 5

I.- LA DIVERSITÉ DES CRÉDITS CONCOURANT AUX RELATIONS INTERNATIONALES CULTURELLES ET À LA FRANCOPHONIE POUR 2001 7

A. LES ÉLÉMENTS MARQUANTS DU BUDGET POUR 2001 7

    1. La progression globale du budget des affaires étrangères 7

    2. Les priorités en matière de relations culturelles extérieures 9

B. LE RÔLE CONFORTÉ DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET DU DÉVELOPPEMENT 10

    1. Une direction unique qui doit créer des synergies dans tous les aspects de la coopération internationale 11

    2. La tutelle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger 11

II.- L'ENSEIGNEMENT ET L'UTILISATION DU FRANCAIS DANS L'ESPACE EUROPÉEN : UN ENJEU MAJEUR POUR LE RAYONNEMENT DE LA FRANCE 13

A. DES SITUATIONS CONTRASTÉES DANS LES PAYS DE L'UNION EUROPÉENNE COMME DANS CEUX CANDIDATS À L'INTÉGRATION 13

    1. Une première approche quantitative fondée sur le nombre d'apprenants de la langue et de francophones 13

    2. Le rayonnement du français en Europe dans les domaines culturel, scientifique et juridique 16

B. LES ACTIONS MENÉES POUR PROMOUVOIR LA PLACE DE LA LANGUE FRANÇAISE DANS LE MONDE ET EN EUROPE 21

    1. Une priorité pour le Gouvernement 21

    2. La nécessité d'intervenir de plus en plus dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et de la communication 25

III.- LE NÉCESSAIRE COMBAT POUR ASSURER LA PLACE DU FRANÇAIS DANS LES INSTANCES INTERNATIONALES ET NOTAMMENT COMMUNAUTAIRES 29

A. UN DÉCALAGE ENTRE LE STATUT DE LANGUE OFFICIELLE DU FRANÇAIS ET SON UTILISATION VÉRITABLE 29

    1. Les tendances observées en matière d'usage effectif du français 29

    2. Un « plan d'urgence » pour préserver la présence du français 32

B. AU SEIN DE L'UNION EUROPÉENNE, UN RECUL QUI VA S'ACCENTUANT 33

    1. Un rang de seconde langue de communication interne aux institutions 33

    2. L'utilisation du français par les fonctionnaires communautaires 37

CONCLUSION 39

TRAVAUX DE LA COMMISSION 41

INTRODUCTION

Les efforts consacrés aux relations culturelles internationale et à la francophonie pour 2001, principalement mis en _uvre par le ministère des affaires étrangères, témoignent de la volonté constante du Gouvernement de favoriser les échanges culturels et scientifiques avec nos partenaires notamment européens et de développer de nouvelles formes d'expression de la francophonie à la fois actives et innovantes.

Jouant un rôle essentiel pour le rayonnement et l'influence de la France sur la scène internationale, ce « budget » possède néanmoins des contours difficiles à appréhender, d'une part, parce que le ministère des affaires étrangères n'est pas le seul acteur de cette politique, d'autres ministères y concourant, et, d'autre part, parce que l'acception de l'expression « relations culturelles internationales » est susceptible de revêtir des réalités différentes selon que l'on considère l'action culturelle internationale de la France à strictement parler ou que l'on prenne en compte également la coopération scientifique, l'aide au développement culturel. De même, certains distinguent l'action culturelle internationale des actions en faveur de la francophonie, d'autres voyant dans ces deux types d'actions des manifestations indissociable d'une seule et même politique.

Le rapport pour avis de l'année précédente avait été centré autour de la question des nouvelles technologies de l'information et de la communication conçues comme un outil de l'action culturelle de la France.

Le présent rapport a comme thème majeur la problématique passionnante de la langue française sous deux aspects puisqu'il s'agit d'analyser, d'une part, les actions concourant pour 2001 à la diffusion et à l'enseignement de la langue française en particulier dans l'espace européen, et d'autre part, de faire le point sur l'utilisation du français au sein des instances internationales et notamment communautaires.

Dans son rapport intitulé Du global à l'universel : les enjeux de la francophonie, M. Yves Tavernier explique bien que si à l'origine, la francophonie, terme polysémique difficile à cerner, était « un mouvement de nature linguistique (promotion et défense de la langue), elle a été amenée, selon la volonté des pères fondateurs, à participer au développement du Sud. Progressivement, la langue est devenue, non pas un objectif, mais un outil de développement. On utilise le français pour faire de la coopération, de la concertation, de la politique, de la coopération économique. » Le présent rapport n'a pas pour objet de traiter de la francophonie « appréhendée comme espace de coopération politique, de solidarité Nord-Sud et de prévention des conflits », mais bien d'analyser la situation d'un point de vue « linguistique ». L'usage du français est-il stable en Europe, recule-t-il au profit de l'anglais ? Que peut-on faire pour tenter d'adapter l'enseignement du français et les moyens de sa diffusion aux nouvelles technologies ? Quelles sont les positions réelles de notre langue dans les instances internationales et communautaires ?

I.- LA DIVERSITÉ DES CRÉDITS CONCOURANT AUX RELATIONS INTERNATIONALES CULTURELLES ET À LA FRANCOPHONIE POUR 2001

Les crédits concourant aux relations culturelles internationales et à la francophonie ne constituent pas à proprement parler un budget isolé mis en _uvre par une structure unique. Ils correspondent au contraire à une série d'actions diverses dont la plupart sont prises en charge par le budget des affaires étrangères.

      A. LES ÉLÉMENTS MARQUANTS DU BUDGET POUR 2001

Avant d'en venir aux crédits intéressant directement le présent rapport, il convient d'analyser la situation d'ensemble du projet de budget du ministère des affaires étrangères, étant précisé que c'est ce dernier qui met en _uvre la très grande majorité des crédits contribuant aux relations culturelles internationales et à la francophonie.

      1. La progression globale du budget des affaires étrangères

Le projet de budget des affaires étrangères pour 2001 s'établira à 22 076 millions de francs, ce qui représente une progression de 5,3 % par rapport à la loi de finances pour 2000.

        a) Les objectifs affichés

La préparation du projet de loi de finances pour 2001 de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) se caractérise par un triple objectif : consolider des priorités géographiques fortes (et notamment les Balkans et la zone du Maghreb), poursuivre les projets culturels et scientifiques lancés en 1999, enfin, renforcer les actions en matière de coopération technique et d'aide au développement.

Ce budget traduit plusieurs grandes priorités : la poursuite de la modernisation du ministère, le renforcement de la coopération technique et le soutien de l'aide au développement, la promotion de notre rayonnement culturel et de la francophonie, enfin, l'affirmation du rôle de la France dans les instances multilatérales. Ces deux derniers aspects se trouvent au centre du présent rapport.

        b) Une clarification des termes utilisés

Afin de clarifier, d'un point de vue budgétaire, les termes utilisés, il convient de distinguer trois types de crédits, même si ceux-ci se recoupent largement. Il s'agit de ceux mobilisés en faveur de la francophonie, de ceux concourant au développement de la langue française, et de ceux destinés à l'action culturelle extérieure de la France à l'étranger.

D'après les chiffres cités dans le « jaune » intitulé « Etat récapitulatif des crédits de toute nature qui concourent à l'action extérieure de la France », les crédits concourant à l'action en faveur de la francophonie sont pour plus de 91 % de l'enveloppe globale mis en _uvre par le ministère des affaires étrangères. Les dépenses imputées sur le budget des affaires étrangères recouvrent principalement :

- 1) une part de la subvention versée à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) calculée au prorata des élèves étrangers dans le nombre total des élèves scolarisés ;

- 2) les dépenses d'intervention concourant à la promotion de la francophonie, à savoir l'organisation des sommets francophones, la subvention versée à Radio France Internationale, la coopération dans le domaine scientifique ;

- 3) les dépenses de personnel des établissements culturels pour leurs actions de promotion et l'enseignement du français.

Les crédits concourant au développement de langue française proviennent du ministère des affaires étrangères, mais également de ceux de la culture et de la communication, de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, de la justice, voire de certains comptes spéciaux du Trésor.

Les crédits concourant à l'action culturelle extérieure de la France à l'étranger sont principalement mis en _uvre par le ministère des affaires étrangères (86,4 % des crédits) et le ministère de l'éducation nationale (6,3 %), ces deux ministères couvrant ainsi près de 93 % des dépenses d'action culturelle. Ces dépenses sont liées au fonctionnement des établissements culturels et des services culturels dans les postes diplomatiques et consulaires. Elles recouvrent également les subventions versées par le ministère des affaires étrangères à l'AEFE, les crédits de coopération culturelle et scientifique ainsi que la contribution de la France auprès de certaines organisations internationales telles que l'UNESCO, l'Agence de la francophonie, l'Union latine. Il faut relever que le ministère de l'éducation nationale occupe une place non négligeable dans l'action culturelle de la France à l'étranger au travers notamment de la rémunération du personnel enseignant et chercheur ou l'attribution de bourses de recherche.

Une mention particulière peut être faite s'agissant du secteur audiovisuel, domaine transversal qui permet à la France de développer une politique de présence internationale et de conforter ainsi les acquis de la francophonie. En la matière, la mission du ministère des affaires étrangères consiste à préserver les conditions juridiques d'une visibilité internationale de programmes français et des opérateurs audiovisuels français. De là l'importance des négociations internationales en la matière. Les différents opérateurs audiovisuels soutenus par le ministère des affaires étrangères -Radio France Internationale (RFI), Canal France International (CFI) et TV5 (chaîne francophone en partenariat avec la Belgique, le Canada et la Suisse) - assurent cette mission de présence mondiale des programmes français. Il faut poursuivre les efforts de modernisation de ces opérateurs.

      2. Les priorités en matière de relations culturelles extérieures

(En millions de francs)

Chapitres

Crédits inscrits en loi de finances pour 2000

Projet de loi de finances pour 2001

Evolution

Entre 2001 et 2000

Centres culturels

(Chapitre 37-95)

459,137

494, 032

+ 34,895 de mesures nouvelles

Coopération culturelle et scientifique

(Chapitre 42-11)

1 866,314

1 806,605

- 51,980 de mesures nouvelles

Coopération technique et au développement

(Chapitre 42-12)

1 712,760

1 621,390

- 90,429 de mesures nouvelles

TOTAL

4 030

3 922

- 3 %

Source : ministère des affaires étrangères, septembre 2000

En matière de relations culturelles extérieures, les grandes priorités politiques retenues pour 2001 concernent le développement de notre coopération avec les pays balkaniques, la réouverture progressive des centres culturels en Algérie, la poursuite du programme « Eiffel » des bourses d'excellence - qui devra atteindre en 2001 sa vitesse de croisière. Ce programme, qui permettra l'accueil de 1 000 boursiers dans nos universités et grandes écoles, nécessite une enveloppe globale de 100 millions de francs. La politique de présence et d'influence de la France devrait donc être renforcée par la mise en _uvre de ces diverses actions.

La volonté d'approfondir la coopération culturelle et linguistique se traduira par une augmentation significative des crédits des établissements culturels, destinée notamment à la réouverture de centres culturels en Algérie.

Il faut relever que l'ensemble des crédits concourant au financement de la francophonie (273,3 millions de francs en 2001), transitant par le Fonds multilatéral unique (FMU), sont désormais regroupés sur un article unique du titre IV individualisé au sein du chapitre des contributions volontaires. On doit se féliciter de ce premier pas vers l'identification budgétaire de l'action francophone de notre pays. Dans le cadre de notre politique de francophonie au sens large, on peut relever que les dotations de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger sont en augmentation de plus de 2 % par rapport à la loi de finances pour 2000, avec 2 035 millions de francs. Quant à eux, les crédits destinés à la coopération culturelle et scientifique seront en légère diminution de 3,2 % par rapport à la loi de finances pour 2000 (avec 1 806 millions au lieu de 1 866). Les crédits de la coopération technique et au développement s'établiront à 1 621 millions de francs, au lieu de 1 712 millions en loi de finances pour 2000, ce qui représente une réduction de 5,33 %.

Au contraire, on note la progression des crédits destinés aux opérateurs de l'action audiovisuelle extérieure (+ 1,22 % avec 1 078 millions de francs).

Pour 2001, les contributions obligatoires bénéficieront à 133 organisations internationales ainsi qu'à 15 opérations de maintien de la paix au moins, pour un montant total de 3 990 millions de francs (soit 18 % du budget des affaires étrangères contre un peu moins de 15 % dans le projet de loi de finances pour 2000).

      B. LE RÔLE CONFORTÉ DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET DU DÉVELOPPEMENT

En administration centrale, c'est la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) qui est chargée de la conception, de la programmation, de la mise en _uvre et de l'évaluation des projets et programmes de coopération internationale, dans les domaines culturel, scientifique et technique ainsi que dans le secteur de l'aide au développement.

      1. Une direction unique qui doit créer des synergies dans tous les aspects de la coopération internationale

La création de cette direction unique a répondu à la volonté de créer des synergies et de valoriser des actions initialement menées en parallèle par deux administrations distinctes, celle des affaires étrangères et celle de la coopération. Après la réforme de 1999, qui a conduit à la création de cette direction générale unique chargée de la coopération internationale et de l'aide au développement, la préparation du budget pour 2000, l'année passée, a constitué le premier véritable exercice de mise en cohérence globale des dépenses en matière de coopération, qu'elle soit culturelle, artistique, audiovisuelle, technique et d'aide au développement.

Notons, en outre, que la DGCID mène, en liaison avec le service des affaires francophones, les actions destinées au développement de la francophonie.

Il est encore trop tôt pour tirer un bilan définitif de la mise en place de cette nouvelle direction générale. L'établissement d'une telle structure susceptible de valoriser l'héritage, la culture et le savoir-faire des deux administrations des affaires étrangères et de la coopération paraît en toute hypothèse très positif.

      2. La tutelle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger

La DGCID exerce la tutelle de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Grâce à un réseau de 267 établissements en gestion directe ou conventionnés, cette Agence permet à 66 554 enfants français résidant à l'étranger de suivre le programme français d'enseignement depuis l'enseignement élémentaire jusqu'aux classes préparatoires post-baccalauréat. 14 800 élèves français ont par ailleurs bénéficié de bourses. L'Agence emploie environ 6 100 enseignants expatriés ou résidents et reçoit du ministère des affaires étrangères une subvention annuelle d'environ 2 milliards de francs.

L'Agence a bénéficié en 2000 d'une dotation de 31,6 millions de francs pour aider les établissements qui ne sont pas logés dans les bâtiments de l'Etat. Ces moyens, comparés au coût de 100 millions de francs d'une construction en France d'un collège de 600 élèves, ne permettent guère d'envisager une politique ambitieuse d'implantations nouvelles.

La politique de l'Agence s'est orientée vers les zones prioritaires définies par son ministère de tutelle : Europe centrale et orientale, Asie de l'Est et du Sud. En ce qui concerne les établissements à gestion directe, l'effort de l'Etat (titre V du ministère des affaires étrangères) s'est nettement accru, et a porté sur de grands projets de construction à Tananarive et à Francfort.

Si les efforts consentis par l'Etat au cours des quatre dernières années ont été importants, ceux des familles concernées l'ont été tout autant, et plus encore si l'on prend en compte, jusqu'à une date récente, la réévaluation du franc français par rapport à la plupart des monnaies. L'augmentation des frais de scolarité, particulièrement en monnaie locale, a été durement ressentie par les parents d'élèves contributeurs. Du moins, tout au long de cette période, deux équilibres ont été respectés. La part de l'Etat dans le financement global de l'enseignement français à l'étranger est restée sensiblement l'équivalent de la part prise en charge par les familles. De même, s'agissant de la rémunération des enseignants résidents, celle-ci est divisée à parts à peu près égales entre la contribution de l'Etat et celle des familles. Le respect de ces deux équilibres constitue une ligne directrice pour l'Agence.

II.- L'ENSEIGNEMENT ET L'UTILISATION DU FRANCAIS DANS L'ESPACE EUROPÉEN : UN ENJEU MAJEUR POUR LE RAYONNEMENT DE LA FRANCE

L'effort en faveur du français à l'étranger s'inscrit dans le contexte d'une société mondiale de l'information où la diversité linguistique devient un élément de la diversité culturelle. Nous devons désormais tenir compte, non seulement du développement de nouvelles formes d'accès au savoir, mais aussi de l'évolution du statut des langues dans le monde en fonction des nouveaux équilibres politiques et économiques. Dans cette double perspective, la promotion de notre propre langue passe par l'encouragement au plurilinguisme, notamment au niveau européen.

      A. DES SITUATIONS CONTRASTÉES DANS LES PAYS DE L'UNION EUROPÉENNE COMME DANS CEUX CANDIDATS À L'INTÉGRATION

Il existe deux manières d'analyser le niveau de l'utilisation et de l'influence d'une langue dans une zone déterminée, en l'occurrence la langue française dans l'espace européen. La première approche, très simple, consiste à observer le nombre d'apprenants de la langue et de francophones dans les divers pays membres de l'Union européenne ou demandant à l'être. La seconde tend à analyser l'usage qui est fait de la langue française pour différentes manifestations qu'elles soient culturelles, d'ordre scientifique ou juridique, dans l'ensemble du continent.

      1. Une première approche quantitative fondée sur le nombre d'apprenants de la langue et de francophones

Il convient de distinguer dans cette première analyse le cas des pays membres de l'Union européenne de ceux qui aspirent aujourd'hui à y adhérer. D'une manière générale, la situation du français dépend principalement de son statut, officiel ou non, et du contexte linguistique, de mono, de bi, ou de multilinguisme. Si en Belgique, la cohabitation entre francophones et flamands pose parfois problème, on peut davantage parler de francophilie pour les pays francophones où le français est employé par des minorités.

        a) Des situations très diverses dans les pays de l'Union européenne

L'allongement de la durée des études et le soutien apporté par les instances communautaires à l'enseignement de deux langues étrangères profitent au français, mais beaucoup moins qu'à l'anglais. Reste qu'un apprenant de français (ou en français) sur cinq, hors de France, se trouve en Europe occidentale. C'est dire tout l'intérêt que la France se doit d'attacher à la mise en place d'un véritable plurilinguisme européen.

Il faut rappeler que l'objectif des instances communautaires est que 10 % des étudiants maîtrisent trois langues de l'Union à l'horizon de 2010.

Les tendances pouvant être aujourd'hui observées sont les suivantes. On note une progression du nombre des apprenants de français en Finlande, en Suède, en Autriche (près de 110 000 apprenants, tous niveaux confondus), à Chypre, et une augmentation particulièrement sensible en Espagne (plus de 800 000 élèves au secondaire). La situation paraît assez stable malgré une tendance à la baisse au cours des dernières années, en Italie et au Portugal, où l'on compte encore, respectivement, 1 700 000 et 400 000 apprenants.

En revanche, le recul, au profit de l'anglais, est très net en Grèce. Les effectifs demeurent stables en Grande-Bretagne (plus de 4 000 000) comme en Allemagne (1 600 000). On peut relever que dans ce dernier pays, des campagnes de promotion, visant à inciter les élèves à s'orienter vers l'étude du français, sont menées de façon intensive depuis deux ans avec le soutien des services de coopération et d'action culturelle de l'ambassade de France. Des brochures d'appel à l'apprentissage de la langue du partenaire sont ainsi diffusées dans les établissements scolaires allemands.

        b) Des positions encore incertaines dans certains pays d'Europe centrale et orientale et dans les pays baltes

Dans les pays d'Europe centrale et orientale on constate qu'en dépit de la forte variabilité des contextes historiques, le statut du français est actuellement relativement homogène d'un pays à l'autre. En effet, ces dix dernières années, le français a bénéficié des initiatives législatives qui, dans tous les pays de la région, ont largement ouvert l'enseignement et les médias aux langues autres que la langue officielle, et ceci à tous les niveaux. Cette législation ne permet cependant pas d'éviter la situation de concurrence de marché entre les différentes langues étrangères. D'une façon générale, l'enseignement du et en français représente encore aujourd'hui la base la plus solide du potentiel francophone, puisqu'il bénéficie d'une longue tradition régionale.

On peut tout d'abord observer la situation dans les pays participant au Sommet de la Francophonie et à la coopération multilatérale francophone. La Roumanie demeure, avec 2 100 000 apprenants, le pays le plus favorable pour le français dans cette région de l'Europe. La langue française reste la première langue étrangère enseignée (50 % de l'effectif scolaire LV1 et 2), même si on note un intérêt croissant accordé à l'anglais (33 %). Dans ce pays, l'intérêt pour la langue française ne cesse de s'accroître, grâce notamment au renouvellement des relations économiques, politiques et culturelles avec la France et d'autres pays francophones. Notons que la XIIème session de la Conférence ministérielle de la francophonie a eu lieu en décembre 1998 à Bucarest. Il s'agissait de la première manifestation de cette envergure accueillie par ce pays.

En Pologne, la volonté politique de rééquilibrer l'apprentissage des langues étrangères dans la perspective de l'intégration à l'Union européenne a eu pour effet d'augmenter les effectifs d'apprenants du français (320 000). Il convient de souligner, à cet égard, l'importance de notre réseau culturel et linguistique caractérisé par la présence active d'assistants et de lecteurs de français sur l'ensemble du territoire polonais, aucune grande ville du pays n'étant aujourd'hui dépourvue d'un relais. On peut signaler que pour accompagner la réforme du système éducatif lancée par les autorités polonaises en septembre 1999, un programme de coopération visant à développer l'enseignement du français dans les collèges a été mis en place cette année.

En Bulgarie, le français est enseigné en tant que langue étrangère à tous les niveaux du système éducatif, traditionnellement dans l'enseignement secondaire mais aussi, depuis deux ans, de façon plus significative dans les écoles primaires. Ainsi, de 500 en 1996, le nombre d'élèves apprenant le français dans les écoles primaires devrait passer à 15 000 d'ici trois ans. En Lituanie, le français bénéficie de bonnes positions grâce entre autres à un héritage francophile encore vivace, ce qui place ce pays en tête parmi les Etats baltes pour le pourcentage d'apprenants de français (30 000 élèves dans le système scolaire lituanien). En revanche, en Slovénie, le français apparaît comme très minoritaire derrière l'anglais, l'allemand et même l'italien (moins de 3 % des élèves du secondaire sont francophones).

Dans les autres pays de l'Europe centrale et orientale, le français reste présent dans les systèmes éducatifs, mais de manière inégale, souvent plus fortement dans le supérieur que dans le secondaire. Les effectifs sont en augmentation en Hongrie en raison du développement de l'enseignement bilingue et de l'introduction du français dans les établissements techniques et professionnels. Le désir du gouvernement slovaque d'adhérer à la Francophonie rejoint les efforts accomplis depuis une dizaine d'années par notre ambassade à Bratislava pour développer l'usage de notre langue dans ce pays.

D'une manière générale, dans l'ensemble des pays d'Europe centrale et orientale, les sections bilingues et les lycées spécialisés constituent une sorte de noyau dur de l'enseignement du français, certes réduit à quelques dizaines de milliers d'élèves, mais de très grande qualité. Ces élèves peuvent ensuite entreprendre des études supérieures dans les filières universitaires francophones mises en place au cours des dix dernières années dans divers domaines : le droit, l'économie, la gestion, l'administration publique ou encore l'agronomie. Il est certain que la formation au français des cadres politiques, administratifs et économiques ainsi que des futurs décideurs constitue une des actions prioritaires de nos ambassades étant donné que ces pays ont vocation à entrer dans l'Union européenne.

      2. Le rayonnement du français en Europe dans les domaines culturel, scientifique et juridique

Plus qualitative que quantitative, une deuxième approche pour apprécier le dynamisme d'une langue peut être basée sur l'analyse des manifestations réalisées dans différents domaines, dans cette langue ou autour de cette langue.

        a) Les positions satisfaisantes du français dans les domaines culturels comme en matière de presse écrite et d'audiovisuel

D'une manière générale, le tissu des manifestations culturelles francophones est particulièrement dense en Europe.

L'Allemagne s'y révèle comme tête de file avec des dizaines de manifestations à dominante ou à coloration francophone tous les ans. De façon plus modeste mais significative, la Lettonie et la République tchèque s'illustrent par l'organisation régulière d'événements culturels francophones. On peut citer également les très nombreux spectacles donnés en langue française en Autriche. La présence du jeune cinéma français reste forte dans les pays d'Europe centrale et orientale comme dans ceux d'Europe du Nord. A titre d'exemple, la 7ème édition du Festival du film français de Varsovie, en avril 2000, a mis l'accent sur les jeunes réalisateurs.

Le théâtre français est particulièrement célébré en Hongrie et en Pologne ; on dénombre plusieurs troupes de théâtre francophones dans les établissements d'enseignement secondaire et supérieur de ces deux pays. On peut également citer, en Grande-Bretagne, la tenue de la « saison du théâtre français ». En Pologne, la demande de chansons françaises est croissante, même si les références culturelles restent avant tout américaines. Dans le domaine du livre et de la bande dessinée, on constate une augmentation notable du public consommateur d'activités culturelles francophones, notamment en Roumanie.

Enfin, des semaines de la culture française sont organisées régulièrement dans de nombreux pays européens. La fréquentation des établissements culturels français est en hausse dans beaucoup de pays. Ce public est jeune, excepté dans quelques pays (Pays-Bas, Grèce, Italie), et manifeste un réel intérêt pour la vie culturelle francophone.

On peut noter l'initiative récente prise à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne par le ministère des affaires étrangères qui a lancé un concours scolaire dans tous les pays candidats intitulé « Allons en France, Europe 2000 ». Ce projet a pour objectif de faire découvrir la France à 60 jeunes élèves et étudiants choisis sur la base de leur excellence en français. Cette démarche vise à la fois à valoriser les filières de formation au français dans ces pays et à aider les jeunes étrangers à mieux percevoir les enjeux de la construction européenne. On peut noter que les épreuves de sélection organisées par nos postes diplomatiques dans les pays concernés ont connu un grand succès auprès du public des jeunes. Cet engouement se manifeste également lors des grandes manifestations destinées à promouvoir la France et la francophonie comme les Fêtes de la francophonie, de la musique, de l'internet, du livre.

· Une mention particulière peut être faite s'agissant de la diffusion de la presse écrite francophone dans les pays européens. Fin 1997 - derniers chiffres disponibles - plus de 68 % des exemplaires de la presse française vendue à l'étranger l'était en Europe.

Quelques actions particulières peuvent être citées pour illustrer les efforts tendant à augmenter la visibilité de cette presse dans l'ensemble des pays européens. Ainsi un programme d'aide à la publication en français, géré par le ministère des affaires étrangères, a été développé en Pologne en vue de soutenir des revues littéraires francophones à mi-chemin entre le magazine et le livre. En Hongrie, le principal distributeur de presse (Hirker) a été racheté par un groupe français (Hachette distribution service). Les principaux journaux et magazines français sont diffusés dans ce pays. De plus, deux mensuels « Le Journal francophone » et « La nouvelle gazette de Hongrie » sont publiés en français. En Pologne, la presse française est diffusée dans les grandes villes et un hebdomadaire en langue française « Le courrier de Varsovie » paraît depuis décembre 1996. En Grèce, la « Tribune Hellénique », bimensuel d'informations générales en français, tiré à 3 000 exemplaires, a été lancé lors de la journée de la Francophonie du 20 mars 1997. Au Danemark, un journal bilingue est publié quatre fois par an, à 4 000 exemplaires.

C'est en Roumanie que le paysage de la presse francophone semble être le plus riche : le nombre de périodiques francophones (trente et un titres dont de nombreux mensuels scientifiques) dépasse celui de la presse locale en langue anglaise et le quotidien francophone « Bucarest matin » paraît depuis juillet 1996. En Lituanie, le centre culturel de Vilnius a lancé en 1997 un bimensuel bilingue tiré à 2 000 exemplaires, à destination des enseignants, des étudiants, des artistes et des intellectuels.

D'une manière générale, dans les pays d'Europe centrale et orientale, la presse écrite francophone s'est particulièrement développée dans des sphères universitaires. On dénombre en Slovaquie cinq revues francophones essentiellement universitaires.

En revanche, les échanges de formations journalistiques entre pays européens restent encore peu développés. Les opérations demeurent très ponctuelles : on peut citer le partenariat entre le Centre de formation professionnelle au journalisme (CFPJ) et l'école danoise de journalisme qui a permis en 1998 à 15 journalistes danois de compléter leur formation à Paris. L'ambassade de France en Bulgarie finance depuis 1994 des échanges entre les étudiants en journalisme de Sofia et l'Ecole supérieure de journalisme de Lille. Plusieurs pays d'Europe centrale et orientale, comme la Pologne ou la Roumanie, entretiennent un partenariat avec l'ESJ (Ecole supérieure du journalisme). En République tchèque, une coopération financée par le ministère des affaires étrangères lie l'Institut de journalisme de l'université Charles de Prague au CFPJ, ce qui a déjà permis la formation initiale de 100 personnes ainsi que la formation continue de 35 personnes par an.

· En matière de diffusion de programmes radiophoniques francophones, la situation demeure très contrastée selon les pays considérés.

En Belgique, outre la reprise des programmes de Radio-France, la radio franco-belge BFM diffuse depuis deux ans des programmes provenant de BFM France à hauteur de 60 %, les productions locales représentants les 40 % restants. En Bulgarie, Radio France Internationale (RFI) diffuse des émissions musicales françaises ; les radios les plus écoutées dans ce pays ont en outre bénéficié de dons de CD de chansons françaises, offerts par notre ambassade. En Pologne, une méthode d'apprentissage du français est diffusée par Radio Bis, à raison de dix-huit minutes par jour. En Hongrie, RFI devrait prochainement bénéficier d'une reprise en FM à Budapest sur fréquence partagée avec la BBC et la Deutsche Welle. Un programme d'enseignement du français, déjà été diffusé à la radio nationale en 1999, a été poursuivi cette année. En Roumanie, l'audience régionale et un taux de pénétration élevé a permis à RFI d'asseoir son réseau.

Dans les pays de l'Union européenne non francophones, les émissions en français sont, en règle générale, musicales ou éducatives. Le Royaume-Uni ne diffuse pas de programmes en langue française sur ses ondes. En Allemagne, seules quelques régions du sud et de l'ouest diffusent des émissions francophones sur leurs stations publiques. En Autriche, les émissions francophones se composent d'actualités, de musique ou de cours de langue. En Suède, RFI est diffusée tous les matins sur la radio nationale depuis 1998. En Grèce, même si RFI ne trouve pas beaucoup d'adeptes du fait de la difficulté à la capter, la musique francophone remporte un certain succès en terme d'audimat. Cet engouement est également perceptible au Portugal où les programmes de chansons françaises se sont développés de façon spectaculaire depuis quelques années.

· La pénétration des programmes télévisuels francophones s'est accrue dans bon nombre de pays européens. En Bulgarie, TV5, M6, Arte et France 2 sont diffusées sur le réseau des chaînes. Les images de Canal France International (CFI) sont reprises à raison de dix heures mensuelles par la télévision nationale (il s'agit essentiellement de films). Au Luxembourg, TF1 est la deuxième chaîne étrangère la plus regardée, avec un taux d'écoute de 8,55 %. En Roumanie, la télévision nationale propose une émission hebdomadaire consacrée à la francophonie et à l'enseignement du français. MCM et M6 sont bien implantées dans le paysage audiovisuel roumain. On observe par ailleurs un essor d'Eurosport et de TV5 dans ce pays.

En Pologne, les réseaux câblés et la réception satellitaire permettent l'accès à la totalité de l'offre française. En Grèce, le nombre de productions françaises diffusées par la chaînes publiques est en sensible augmentation, et on compte une moyenne de dix films français par mois. En Hongrie, TV5 est présente sur le câble, mais l'audience la plus élevée revient aux chaînes allemandes et américaines, devant les chaînes francophones.

La situation est moins favorable dans d'autres pays. Au Pays-Bas, TV5 n'a que 0,1 % d'audience. De même, le public danois manifeste un intérêt relativement faible pour les programmes de TV5, la préférence allant clairement vers les programmes anglophones. En Grande-Bretagne, les émissions de TV5 ne sont reprises que quatre heures par semaine. En Estonie, il n'existe ni chaîne, ni émission en français.

        b) La faible utilisation du français dans le domaine scientifique et plus particulièrement médical

Le constat pouvant être fait aujourd'hui de la place du français dans la sphère scientifique et médicale est peu favorable. Des sources d'informations scientifiques de langue française existent dans beaucoup de pays européens mais elles n'apparaissent pas toujours d'une qualité compatible avec la recherche de haut niveau. Nos ambassades avec, dans certains cas un centre de ressources spécifiquement scientifiques, les centres culturels et les alliances françaises offrent néanmoins un accès à une large sélection d'informations dans les principales disciplines scientifiques.

Il faut plaider pour que soient développées au maximum les possibilités offertes par les nouvelles technologies de l'information dans ce domaine. La mise en place et l'entretien de sites Internet donnant accès en ligne aux grandes banques de données de langue française (partiellement ou entièrement) et la mise à jour de cédéroms remplissant les mêmes fonctions constitueraient une réponse efficace au « tout-anglais ».

En matière de formation supérieure scientifique, dans les pays d'Europe centrale et orientale, la mise en place des filières universitaires francophones depuis le début des années 1990 permet au français d'être présent comme langue d'enseignement au sein de nombreux établissements et facultés. Ces filières, initialement établies avec le soutien de l'Agence universitaire de la francophonie et des services de coopération de nos ambassades, répondent dans la plupart des cas à des besoins particuliers de formation d'excellence ou sont axées vers des technologies de pointe. Cette démarche a suscité un intérêt remarquable de la part du public étudiant ainsi que de la part des employeurs potentiels. Actuellement, dans les pays de cette zone, des élèves s'orientent plus spontanément vers le français à l'école, ou éventuellement en dehors de l'école, dans la perspective d'accéder ultérieurement à un enseignement supérieur francophone.

En Europe occidentale, on peut citer la création d'une université franco-allemande, installée à Sarrebruck, inaugurée le 5 mai dernier, ce qui traduit notre volonté de développer une coopération de haut niveau et fédératrice pour la communauté scientifique.

        c) La place relativement confortable du français dans la sphère juridique

La langue française possède des atouts non négligeables en matière juridique. Plusieurs éléments en attestent.

La Belgique, la Bulgarie et la Roumanie (en tant qu'observateur) sont aujourd'hui membres de l'Association des Cours Constitutionnelles ayant en Partage l'Usage du Français (ACCPUF), créée en avril 1997, dont le but est de favoriser dans l'ensemble des pays membres l'approfondissement de l'Etat de droit grâce à un développement des relations entre les institutions ayant dans leurs attributions la compétence de régler en dernier ressort avec l'autorité de la chose jugée les litiges de conformité à la Constitution. On peut relever que les cours constitutionnelles du Luxembourg et de Slovénie et le Tribunal constitutionnel de Pologne souhaitent se joindre aux travaux de l'Association en qualité d'observateurs.

En Hongrie, un programme de formation au droit français a été mis en place et se traduit par l'établissement d'un module de formation à la terminologie juridique inséré dans le cursus du département de français à l'Université de Budapest. Par ailleurs, un projet de coopération est en cours de préparation entre l'Ecole nationale de la magistrature et le Conseil national judiciaire hongrois dans le but de créer dans ce pays une école nationale de formation des magistrats. On peut relever également qu'une association de magistrats francophones existe d'ores et déjà dans ce pays. En République tchèque, un programme de formation pour les magistrats du pays est lancé dans le cadre de la coopération bilatérale en liaison avec l'Institut tchèque de formation des magistrats. Enfin, l'appui de l'Ecole nationale de la magistrature a été sollicité par son homologue roumaine afin de mettre en place un système de formation initiale et continue pour les magistrats roumains.

      B. LES ACTIONS MENÉES POUR PROMOUVOIR LA PLACE DE LA LANGUE FRANÇAISE DANS LE MONDE ET EN EUROPE

La promotion de la langue française constitue un enjeu majeur pour la politique extérieure de la France. Le Gouvernement français, conscient de l'importance de cette question, mène des actions continues en la matière.

      1. Une priorité pour le Gouvernement

Dans une intervention prononcée au moment de l'installation le 16 novembre 1999 à l'Hôtel Matignon du Conseil supérieur de la langue française, le Premier ministre a précisé les grands axes devant orienter la politique linguistique de la France et inspirer les travaux du Conseil supérieur. Il a déclaré : « Pour garantir son universalité, nous voulons ouvrir la langue française à une pleine modernité ». Selon le Premier ministre, le français doit évoluer et se moderniser par un effort de néologie et de terminologie. « Le français doit tenir toute sa place dans la société de l'information ». Les efforts entrepris dans ce domaine ne doivent pas se relâcher, d'autant que sur le plan international « l'internet est une chance sans précédent pour la francophonie (...) Garantir son universalisme à la langue française, c'est contribuer activement à la nécessaire diversité culturelle du monde ». Cette diversité se décline au sein de l'Union européenne ou « la diversité linguistique est un enjeu majeur », au sein de la Francophonie et dans le monde où le français est, après l'anglais, la langue la plus apprise.

Le rayonnement de la langue française représente une priorité du ministère des affaires étrangères. Cette priorité, manifeste au travers des actions menées par l'ensemble des services de la DGCID, s'est traduite par la création, en 1999, au sein de la direction de la coopération culturelle et du français, d'une entité spécifique, la sous-direction du français.

        a) Les actions coordonnées par la sous-direction du français

La sous-direction du français, s'appuyant notamment sur les services de coopération et d'action culturelle des ambassades, sur les attachés de coopération éducative ou les attachés pour le français, mène un ensemble d'actions bilatérales et multilatérales visant à assurer au français à la fois sa place dans le monde et son rôle de langue internationale. La sous-direction du français fonde son action sur une définition transversale de la politique de rayonnement du français. Sont donc mobilisés toutes les directions de la DGCID ainsi que certains services du ministère de l'éducation nationale. Les orientations qui constituent depuis 1999 les grands axes de cette action peuvent être définies par quatre objectifs principaux. Il s'agit de :

- le maintien de la diversité des langues et des cultures ;

- la défense du statut international du français, en liaison avec les institutions de la Francophonie ;

- l'encouragement à l'enseignement de deux langues vivantes étrangères ;

- le développement de l'usage professionnel de la langue française, notamment grâce aux nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Les professeurs de français à l'étranger sont les interlocuteurs naturels et privilégiés de la sous-direction du français pour les actions qu'elle mène en appui à l'enseignement sur le terrain.

· S'agissant de l'Union européenne, la sous-direction du français met en _uvre un certain nombre d'opérations permettant de répondre de manière très concrète à la demande renforcée de maîtrise du français émanant des fonctionnaires des pays de l'Union et des pays candidats. Dans les pays concernés, des offres de formations linguistiques privilégient donc l'apprentissage du français spécifique à l'administration. Au total, 1 800 fonctionnaires ont pu en bénéficier en 1999/2000. Des sessions de perfectionnement linguistique combinées avec des sessions d'étude des institutions françaises sont en outre organisées à Paris par l'Ecole nationale d'administration (ENA). A Bruxelles, le Centre européen de langue française (CELF) organise des formations spécifiques au bénéfice des fonctionnaires de l'Union européenne et des pays candidats.

        b) Un système rénové de bourses en faveur des étudiants étrangers

L'octroi de bourses aux étudiants étrangers, qui ont vocation à devenir les décideurs dans leurs pays d'origine, constitue un puissant vecteur pour consolider le rayonnement de la langue française. La politique menée en la matière est particulièrement active.

· La bourse du Gouvernement français (BGF) représente une aide soit à la formation des étudiants et stagiaires étrangers, soit aux travaux des chercheurs étrangers en France. Ainsi faut-il distinguer trois catégories de bourses du Gouvernement français : la bourse d'études, la bourse de stage et la bourse de séjour scientifique de haut niveau (SSHN).

La bourse d'études proprement dite concerne les étudiants inscrits dans le cycle régulier d'un établissement d'enseignement supérieur en vue de l'obtention d'un diplôme délivré par cet établissement, ou venus suivre en France une formation linguistique ou pédagogique de courte durée agréée par le ministère de l'éducation nationale. La bourse d'étude dite « de formation à la recherche » concerne les formations de troisième cycle, DEA inclus. La bourse d'études dite « de recherche » est réservée aux étudiants ayant une formation d'un niveau supérieur à celui du DEA. La « bourse de stage », dont la durée varie de trois à douze mois, est accordée si son bénéficiaire a en vue une formation, un perfectionnement ou un recyclage, ou s'il entreprend au cours de son activité professionnelle des études de spécialisation s'y rattachant. Enfin, la « bourse de séjour scientifique de haut niveau », d'une durée généralement comprise entre un et trois mois, est attribuée à un bénéficiaire participant à un programme de recherches et d'échanges culturels, scientifiques, techniques, technologiques ou industriels de haut niveau.

Il convient d'y ajouter une quatrième catégorie, les « bourses locales » attribuées à des étudiants africains pour des études en Afrique, qui sont essentiellement des bourses d'études, accordées en priorité pour les établissements techniques supérieurs à vocation régionale.

Plusieurs prestations peuvent composer la bourse du gouvernement français à savoir, l'octroi d'une allocation d'entretien, la prise en charge de tout ou partie des frais de voyage et de transport de bagages, la prise en charge de couverture sociale, la prise en charge des frais de formation. Une seule de ces prestations suffit à qualifier le bénéficiaire de boursier du Gouvernement français.

Le bilan de cette politique de bourses au cours des années récentes fait apparaître des évolutions diverses. Il faut tout d'abord signaler que le nombre total de boursiers a peu varié depuis dix ans. Il reste stable depuis 1997 (22 000 à 23 000 boursiers environ). En revanche, le nombre total de mensualités n'a pratiquement pas cessé de décroître depuis dix ans. La durée moyenne d'une bourse a donc diminué. Le budget total consacré à ces programmes de bourses a décru en dix ans de 17 % et de 6 % depuis 1997, atteignant en 1999 un montant de 593 millions de francs. Cette diminution globale doit cependant être nuancée car, parallèlement, de nouveaux programmes de très bonne qualité comme le système de bourses Eiffel, se sont développés et ont vocation à bénéficier à un nombre restreint de boursiers bien ciblés.

Quant aux crédits globaux accordés aux programmes de bourses, ils ont globalement décru depuis 1990. Ils sont inférieurs à 600 millions de francs depuis 1998. Les données réelles 2000 ne peuvent être connues puisque l'arrivée des boursiers s'échelonne sur l'année notamment en septembre et en octobre, mois de rentrée universitaire.

La répartition par région fait apparaître la part importante depuis dix ans du nombre de boursiers en provenance de l'Europe de l'Est (de 3 541 à 3 338), soit 14,6 % en 1990 et 15 % en 1999. Cette situation est le résultat de la politique très volontariste de formation des cadres de cette région à l'économie de marché et à la construction d'un état de droit. On note une légère croissance de la part de l'Afrique du Nord (de 24,7 % en 1990 à 29,6 % en 1999), comme de la part de l'Asie, qui progresse encore depuis 1998 (6,5 % en 1990, 6,9 % en 1998, 7,3 % en 1999). Il est vrai que la politique des bourses est volontairement de plus en plus orientée vers cette zone du monde. La part de l'Extrême Orient et du Pacifique progresse légèrement depuis 1998 grâce aux efforts réalisés en direction de la Chine (3,8 % en 1998 et 4,6 % en 1999 dont 2,1 % pour la Chine seule contre 1,8 % en 1998). En revanche, la part de l'Afrique subsaharienne (tous pays confondus) est passée en dix ans de 27,5 % à 25,35 %. Au cours des dernières années, on a enregistré une décroissance de la part de toutes les autres régions, notamment de l'Amérique du Nord et du Sud et de l'Europe Occidentale.

· Il semble aujourd'hui qu'une meilleure promotion de notre enseignement supérieur devrait être menée à l'étranger car c'est vers le monde anglo-saxon que s'orientent de plus en plus fréquemment les étudiants étrangers, notamment dans les disciplines de l'entreprise et de la haute administration. Les programmes de bourses doivent donc être revus pour mieux jouer leur rôle de formation des élites étrangères et d'attraction des étudiants étrangers en France. Le ministère des affaires étrangères a mené plusieurs actions dans ce domaine des étudiants étrangers et des programmes de bourses. On peut rappeler à cet égard que l'année 1998 a été marquée par un événement important dans ce domaine avec la création de l'Agence « EduFrance », groupement d'intérêt public regroupant les ministères des affaires étrangères et de l'éducation nationale ainsi que les universités sur une base volontaire. Principalement soutenue financièrement par ses deux ministères de tutelle, cette Agence, devenue opérationnelle au début de 1999, a pour mandat la promotion de l'enseignement supérieur français. Elle prend donc le relais, à une échelle très élargie et plus professionnelle, des opérations menées depuis quelques années par le ministère des affaires étrangères.

En définitive, la politique rénovée d'attribution des bourses devrait permettre à moyen-court terme de consolider les bases de la francophonie dans le monde puisque sont privilégiés les étudiants auxquels on prête des perspectives d'avenir notamment professionnelles intéressantes dans leur pays d'origine. Ces futures élites formées à un moment ou un autre de leur cursus dans les établissements français devraient en effet constituer des relais très efficace de la politique de rayonnement de la langue française. Il s'agit d'un pari passionnant que nous devons relever.

      2. La nécessité d'intervenir de plus en plus dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et de la communication

Le rapport au Premier ministre remis en décembre 1998 sur la présence internationale de la France et de la francophonie dans la société de l'information partait de la conviction que les nouvelles technologies représentent un outil susceptible de revisiter le concept de francophonie en adjoignant à sa dimension géographique une communauté d'intérêts « maillés » par les réseaux électroniques. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication doivent devenir un puissant levier de l'action internationale de la France.

Ce rapport a ainsi mis l'accent sur la nécessité de développer et de proposer de « nouveaux contenus ». Cet objectif devrait être notre priorité en matière de présence internationale sur les réseaux. Le rapport énonce une série de propositions concrètes dont certaines ont été d'ores et déjà retenues dès janvier 1999, à la suite du deuxième Comité interministériel pour la société de l'information (CISI), à l'initiative du Premier ministre. Dans ce cadre, le ministère des affaires étrangères est chef de file ou participant sur différentes actions.

· Un premier type de projets concerne le développement des contenus et des services d'intérêt général. C'est ainsi que la mise en ligne du site portail pour les professeurs de français dans le monde, www.franc-parler.org, a officiellement été inauguré lors du Xème Congrès de la fédération internationale des professeurs de français à Paris en juillet 2000 dernier. Il permet aux intéressés d'accéder à des ressources pédagogiques régulièrement actualisées, d'acquérir des éléments de formation professionnelle, d'accéder à des informations pratiques, d'établir des communications entre eux. Les postes culturels doivent être associés à l'animation de ce site. L'objectif poursuivi est de créer, en les mettant en contact et en les réunissant autour d'un site qui soit le leur, une véritable communauté des professeurs de français à l'étranger. Il est également envisagé de doter chaque professeur d'une adresse électronique personnalisée. On peut également citer la création d'une grande université française en ligne, projet auquel le ministère des affaires étrangères attache la plus grande importance, et qui fait à l'heure actuelle toujours l'objet de concertation entre différents partenaires dont les ministères de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie et plusieurs universités.

Comme le préconise le rapport Le désir de France déjà cité, « Il faut restructurer l'offre française et francophone. Pour l'heure, dans ce paysage, l'offre de formation française manque de visibilité et d'agressivité alors que celle des universités anglo-saxonnes est devenue plus attractive. Notre système éducatif garde une bonne réputation pour ce qui concerne les cycles primaires et secondaires, mais on constate que beaucoup d'étudiants formés dans les écoles françaises, dans les pays francophones ou non, se détournent des universités francophones pour se diriger vers les universités américaines. »

· Le ministère des affaires étrangères, même s'il ne saurait avoir pour vocation de participer directement à la constitution de contenus commerciaux par les acteurs audiovisuels, contribue à l'effort public global visant à assurer leur promotion auprès des publics étrangers. A ce titre, le développement d'un site portail, véritable bouquet internet regroupant les liens vers les sites des principaux médias français (télévision, radio presse, multimédia) doit être opérationnel à la fin de l'année 2000. Il est prévu qu'il soit promu essentiellement par les sites des postes diplomatiques et culturels français à l'étranger.

On peut également citer le site de TV France International (TVFI), réservé aux professionnels, qui met à la disposition immédiate de tout le réseau de promotion français et étranger les catalogues de programmes audiovisuels. Grâce à un appui financier du ministère, ces catalogues se sont enrichis d'extraits vidéo dans la base de données de TVFI. Ce serveur apparaît désormais comme un véritable « show case virtuel », accessible en permanence, ce qui facilite la présélection de programmes par les acheteurs.

Il est certain que le développement des NTIC permet d'envisager la démultiplication de ces actions, par la création de véritables extranets thématiques et professionnels où les acteurs ont non seulement la possibilité d'assurer la promotion de leurs nouveaux produits mais aussi celle d'acheter et de vendre leurs productions.

· Dans le cadre de sa politique de promotion de la francophonie, la France a enfin, contribué à la création du Fonds francophone des inforoutes (www.francophonie.org/fonds) pour une contribution annuelle fixée à 21 millions de francs. Ce dernier a mis en _uvre, à travers ses trois premiers appels à propositions, des crédits d'un montant total de 30 millions de francs pour le financement d'une soixantaine de projets au service du développement dans les pays en voie de développement.

III.- LE NÉCESSAIRE COMBAT POUR ASSURER LA PLACE DU FRANÇAIS DANS LES INSTANCES INTERNATIONALES ET NOTAMMENT COMMUNAUTAIRES

Les organisations internationales représentent aujourd'hui des lieux de décision essentiels pour la communauté des nations ; c'est pourquoi il apparaît de plus en plus nécessaire de préserver l'indispensable diversité culturelle et linguistique en leur sein. Le combat pour maintenir et renforcer l'usage du français au sein de ces organisations s'inscrit donc dans la lutte contre la tendance à l'uniformisation culturelle et linguistique.

      A. UN DÉCALAGE ENTRE LE STATUT DE LANGUE OFFICIELLE DU FRANÇAIS ET SON UTILISATION VÉRITABLE

Le français a statut de langue officielle dans un très grand nombre d'organisations internationales gouvernementales. On peut notamment citer, parmi les plus importantes d'entre elles :

- le système des Nations Unies ;

- l'Organisation mondiale du commerce ;

- l'OCDE ;

- l'Organisation des Etats américains, l'Organisation panaméricaine de la santé ;

- le Conseil de l'Europe ;

- et bien entendu, l'Union européenne (Parlement européen, Conseil européen, Commission européenne, Conseil de l'Union européenne, Cour de justice des Communautés européennes, etc.) ;

Au niveau parlementaire, on peut citer l'Union interparlementaire (IUP) et les assemblées de l'OTAN et de l'UEO.

      1. Les tendances observées en matière d'usage effectif du français

Afin d'avoir une idée précise sur la place réelle de la langue française dans les organisations internationales, il convient de distinguer la situation selon que l'on considère les réunions de travail, de commissions ou d'assemblées générales (a), la confection de documents de travail, de discours ou de communiqués à la presse (b), la proportion de membres siégeants susceptibles de s'exprimer en langue française lors des réunions, commissions et assemblées générales (c).

        a) La place du français dans les réunions de travail, de commissions ou d'assemblées générales

Au sein du système des Nations Unies, la prééminence de l'anglais se confirme, le décalage entre le statut officiel du français et son usage effectif allant en s'accentuant. Les délégations membres des Nations Unies ont de plus en plus tendance à choisir l'anglais comme langue officielle et de travail. Cette situation est d'autant plus défavorable au français que l'on observe par ailleurs dans le secteur de la traduction et de l'interprétation de grandes difficultés au sein de plusieurs organisations.

D'après les chiffres communiqués par le ministère des affaires étrangères, 79 % des réunions officielles bénéficient systématiquement d'une interprétation en français, 16 % souvent, et 5 % rarement, alors que 21 % des réunions informelles bénéficient d'une interprétation en français, 21 % n'en bénéficient pas, 29 % en bénéficient parfois, et 29 % en bénéficient souvent.

Dans les organisations intergouvernementales proches du système des Nations Unies, comme l'OMC, ou dans les organisations régionales telles que la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie et le Pacifique, l'Organisation des Etats américains, l'Organisation panaméricaine de la santé, l'anglais apparaît nettement prépondérant, l'interprétation en français n'étant assurée de manière réellement satisfaisante que dans les deux dernières organisations citées. Au sein de l'OCDE, l'anglais est également très largement utilisé.

Au Conseil de l'Europe, le français étant une des deux langues officielles de l'organisation, l'interprétation en français est assurée dans la plupart des cas. Les nombreuses réunions informelles ne bénéficient pas toutes, en revanche, de l'interprétation. Il s'avère que l'anglais progresse comme langue de travail, étant de plus en plus spontanément utilisé par les délégations étrangères comme par les fonctionnaires du Conseil.

A l'OTAN, la situation est relativement satisfaisante : l'usage du français y est plus fréquent qu'à l'ONU. L'interprétation simultanée des réunions est assurée ; les documents sont disponibles en français quoiqu'avec retard étant donné leur volume souvent important. Lors de ses interventions au Kosovo par exemple, le secrétaire général de l'Organisation a fait usage de l'anglais ou du français lors de ses rencontres avec la presse. En revanche, lors des opérations militaires extérieures, l'anglais est, à de rares exceptions près, l'unique langue de communication dans les états-majors de forces multilatéraux.

        b) En ce qui concerne la confection de documents de travail, de discours ou de communiqués à la presse

Au Conseil de l'Europe, le bilinguisme anglais/français est globalement bien respecté. Mais les documents officiels sont souvent disponibles en anglais, puis traduits en français. On doit déplorer à cet égard des retards importants de traduction : les documents de travail en français ne parviennent souvent aux délégations que quelques jours avant les réunions, voire le jour même de la séance.

Aux Nations Unies, le pourcentage de documents originaux rédigés en anglais est très largement majoritaire, aussi bien dans les organisations basées à Genève (comme la CNUCED), à New York (comme le Secrétariat général), que dans les organisations dites régionales comme la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l'Asie et le Pacifique (Bangkok). Dans certaines organisations comme l'OMS où l'anglais est prédominant, on ne trouve la majorité des documents (y compris le bulletin officiel de l'organisation) que dans cette langue. Le secteur de la traduction connaît en outre de nombreuses difficultés, dues essentiellement à la baisse des effectifs ; de là des retards dans la traduction des documents en français et la mauvaise qualité des traductions.

Ces difficultés contribuent à éroder les positions du français et encouragent à un recours systématique à l'anglais.

Fait significatif, on peut enfin signaler que si la position de la langue française sur les sites internet des Nations Unies s'est améliorée, l'intranet du Secrétariat général est exclusivement en anglais.

        c) La proportion de membres siégeants susceptibles de s'exprimer en langue française lors des réunions, commissions et assemblées générales

Il n'est pas possible au ministère des affaires étrangères d'apporter de données précises quant à la proportion de membres francophones dans les organisations internationales. Les statistiques ne sont pas disponibles et devraient, même s'il en existait, faire l'objet d'une étude spécifique. Leur valeur serait en effet sujette à caution du fait de la « volatilité » des personnalités concernées. En outre, elles devraient prendre en compte de nombreux critères tels que le niveau en français des personnalités en question, leur agilité et leur propension à s'exprimer en anglais.

Des statistiques éventuellement favorables devraient d'ailleurs être interprétées avec prudence. En effet, il est avéré que lors d'une réunion, un seul membre ne parlant pas le français dans une assemblée francophone peut conduire l'ensemble des participants à s'exprimer en anglais.

On peut toutefois noter qu'en 1998, à l'Assemblée générale des Nations Unies, 25 délégations sur 185 s'exprimaient en français (contre 95 en anglais).

      2. Un « plan d'urgence » pour préserver la présence du français

Les chefs d'Etat et de gouvernement réunis à Hanoï, en 1997, à l'occasion de l'avant-dernier Sommet de la Francophonie, constatant le recul de la pratique du français dans le cadre des organisations internationales, ont décidé de confier à l'Agence intergouvernementale de la francophonie la mise en _uvre d'un « plan d'urgence » destiné à combattre la dérive constatée en faveur de la seule langue anglaise, notamment dans les réunions de travail.

Partant du même constat, le Secrétariat général des Nations Unies a lui-même mis en place des « plans ciblés » en faveur de recrutements francophones. Dans le cadre d'un accord entre l'Agence intergouvernementale de la francophonie et les Nations Unies, un programme, dit de « jeunes experts associés francophones», a été lancé. Ce programme prévoit la prise en charge par l'Agence, pour un délai de un à deux ans, des frais d'affectation et de rémunération de jeunes administrateurs francophones dans l'espoir de faciliter leur recrutement définitif ultérieur. Ces jeunes experts sont envoyés sur des postes sélectionnés, dans la mesure du possible, en raison de leur caractère stratégique ou de leur effet démultiplicateur. L'Agence intergouvernementale a en outre prévu de soutenir, par une dynamisation de ses réseaux, les recrutements francophones seniors au sein des organisations internationales.

D'autres initiatives sont prises par l'Agence, telles que des stages de formation à la fonction publique internationale à destination des agents francophones, afin de permettre aux Etats membres de présenter des candidatures de qualité dans les organisations internationales. Il faut également citer l'existence d'un « fonds d'aide à la traduction et à l'interprétation » (FATI), destiné à peser sur les choix linguistiques, en faveur du français, des organisateurs de manifestations de niveau international.

La France est le principal bailleur de fonds pour le « plan d'urgence » de l'Agence. C'est la sous-direction du français qui gère à cet effet, cette année, environ 6 millions de francs.

      B. AU SEIN DE L'UNION EUROPÉENNE, UN RECUL QUI VA S'ACCENTUANT

Dans les institutions de l'Union européenne, même si l'emploi du français demeure très important, le recul de son usage s'est accentué suite notamment aux dernières adhésions, les pays concernés étant plus anglophones que francophones. L'actuelle présidence française, pendant tout le deuxième semestre 2000, se traduit, logiquement, par une vigilance accrue sur l'usage du français dans les institutions communautaires.

      1. Un rang de seconde langue de communication interne aux institutions

Le régime linguistique de l'Union européenne est régi par le règlement du 15 avril 1958 dont l'article premier, complété à l'occasion de chaque élargissement, pose le principe d'égalité des langues officielles et de travail. Ce texte indique que « les langues officielles et les langues de travail des institutions de l'Union sont l'allemand, l'anglais, le danois, l'espagnol, le finnois, le français, le grec, l'italien, le néerlandais, le portugais et le suédois. » Selon le même règlement, les textes adressés aux institutions par un Etat membre sont rédigés dans l'une des onze langues officielles au choix, et la réponse est rédigée dans la même langue. Les règlements et les autres textes de portée générale, le Journal officiel des communautés européennes (JOCE) sont rédigés dans l'ensemble des langues officielles.

La langue française bénéficiait, au début de la construction européenne, d'une position dominante. L'anglais s'est ensuite développé après l'adhésion de pays anglophones (le Royaume-Uni, l'Irlande, puis le Danemark). Depuis les adhésions en 1995 de la Suède, de la Finlande et de l'Autriche, l'anglais devance le français.

Il semble par ailleurs que l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et orientale se prépare dans des conditions défavorables pour notre langue. La très grande majorité des documents produits en vue de la négociation des adhésions sont transmis au Conseil en anglais, alors même que certains de ces documents sont issus de réflexions ayant fait l'objet d'une rédaction initiale en français par les directions générales concernées. Les traductions françaises n'étant souvent disponibles qu'après plusieurs jours voire plusieurs semaines d'attente, le travail d'amendement s'effectue par conséquent nécessairement en anglais, et ce en dépit des protestations de notre représentation permanente. De leur côté, les représentants des pays candidats à l'adhésion s'expriment en quasi-totalité en anglais, à l'écrit ou à l'oral. Le français est donc très peu utilisé, même s'il vient en seconde position, loin devant l'allemand.

De façon générale, si le français conserve et de loin son rang de seconde langue de communication interne et externe des institutions communautaires, sa situation relative par rapport à l'anglais ne cesse de se dégrader essentiellement au Conseil et à la Commission, ce qui est d'autant plus paradoxal que l'Union montre, dans de nombreux domaines, tout son attachement au principe du plurilinguisme.

        a) Dans les réunions de travail, une tendance défavorable à l'usage du français

Le recul du français affecte moins la sphère officielle (documents légaux et réunions formelles) que les groupes et réunions de travail plus informels.

S'agissant des réunions de travail, on note une dérive vers la langue anglaise. Dans le cas par exemple où un participant à une réunion ne maîtriserait pas ou pas assez le français, il y a de fortes chances pour que l'ensemble de la rencontre se déroule en anglais. Par ailleurs, certaines directions générales traitent de sujets qui sont déjà abordés en anglais par le pays qui les présente. Dans ce cas, la tendance naturelle veut que le sujet continue à être étudié en anglais. Ce peut être le cas de domaines scientifiques, où certains sujets particuliers font l'objet, même en France, de publications ou de communications internationales uniquement en anglais ; on peut citer l'exemple des nouvelles technologies informatiques.

Les documents de travail en provenance de la Commission comme du Conseil sont majoritairement adressés aux administrations françaises en langue anglaise. Ils sont majoritairement rédigés en français lorsqu'ils proviennent du Parlement ou de la Cour de Justice. De même, les deux comités consultatifs de l'Union européenne présentent un bilan favorable au français. Au Comité économique et social et au Comité des régions, le français reste la principale langue véhiculaire des services.

        b) Le recul du français comme langue de rédaction primaire

L'un des indicateurs pertinents des usages linguistiques dans la pratique quotidienne des institutions communautaires est celui de langue utilisée pour la première rédaction des textes produits, avant même toute traduction éventuelle.

Selon le dernier rapport au parlement sur l'application des dispositions des conventions ou traités internationaux relatives au statut de la langue française dans les institutions internationales, la confection en français des premiers documents de travail internes était, à la Commission, de 37 % en 1998, traduisant une baisse de 3,7 % par rapport à 1997. De 1997 à 1998, l'usage de l'anglais a symétriquement crû de 45,3 % à 48 %. A la Commission comme au Conseil, le recul du français comme langue de rédaction primaire, amorcé depuis 1993, freiné lors de la présidence française de 1995, s'est donc poursuivi en 1998. Les documents provenant du Parlement continuent d'être, quant à eux, majoritairement rédigés en français.

Langues de rédaction d'origine des documents à la Commission

Années

Anglais

Français

Allemand

Autres

1996

44,7 %

38,5 %

5,1 %

11,7 %

1997

45,3 %

40,4 %

5,4 %

8,9 %

1998

48 %

37 %

5 %

10 %

Source : Commission européenne

On note que l'écart avec l'anglais a atteint pour la première fois, en 1998, 11 %. Langue de création et de rédaction pendant de nombreuses années, le français est ainsi devenu une langue de traduction.

Au Conseil, une évolution semblable se manifeste.

Langues de rédaction d'origine des documents au Conseil

    Année

    Anglais

    Français

    1997

    41 %

    42 %

    1998

    50 %

    29 %

        Source : Commission européenne

La progression de l'anglais comme langue d'origine des documents en 1998 s'explique en grande partie par l'absence de présidence francophone durant cette année (présidences britannique puis autrichienne).

A ce recul du français comme langue de rédaction primaire s'ajoutent des difficultés de plus en plus notables liées aux délais des traductions en français. Ces délais sont particulièrement longs en ce qui concerne les secteurs de la justice, des affaires intérieures et du marché intérieur de la Commission. Or il s'agit de domaines propices à la création de réglementations abondantes. Les versions en langue rare comme le suédois ou le finnois sont parfois disponibles avant la version française. Il semble que cette situation ait pour origine un sous-effectif de la section française de traduction (évalué à une quinzaine de personnes).

Au Conseil, la situation des services de traduction, assez critique en 1997, tend à s'améliorer. La division française s'est vue doter de postes supplémentaires après 1998. La situation est plus satisfaisante au Parlement qui est doté d'un service de traduction efficace et rapide.

L'interprétation simultanée est généralement assurée dans les réunions de groupe du Conseil ainsi que dans les groupes et comités de travail de la Commission. Cette interprétation n'est pas réalisée dans les instances ou les réunions plus informelles.

Notons qu'à l'occasion des présidences française et belge du Conseil de l'Union européenne (deuxième semestre 2000 et deuxième semestre 2001), le gouvernement français et celui de la Communauté Wallonie-Bruxelles, se sont engagés à réaliser un plan pluriannuel en faveur du développement de l'utilisation de la langue française. Le premier volet de cette démarche concerne l'interprétation de conférences. Les actions conduites dans ce cadre regroupent les autorités nationales (gouvernements français et de la Communauté Wallonie-Bruxelles), le service commun interprétation-conférences (SCIC) de la Commission, des établissements supérieurs d'enseignement de l'interprétation de conférence français et belges ainsi que l'Agence intergouvernementale de la francophonie.

        c) Les « points forts » du français

Le français reste très utilisé dans certains secteurs. C'est notamment le cas au sein du Comité des représentants permanents (COREPER) où les réunions se tiennent, avec interprétation, dans trois langues de travail : l'anglais, le français, l'allemand. Les réunions les plus informelles se déroulent sans interprétation indifféremment en français ou en anglais.

En général, le français reste la langue habituelle des juristes, que ce soit au Conseil, à la Commission et à la Cour de Justice. Le français est la langue de délibéré de la Cour de Justice, même si les procédures se déroulent dans toutes les langues officielles. On peut également relever que ce sont deux Français qui ont aujourd'hui la responsabilité du service juridique de la Commission et du Conseil. Le choix du français a une incidence sur le contenu même du document juridique. Notre langue se réfère en effet à des concepts de droit français. Les termes utilisés par les représentants anglo-saxons renvoient quant à eux à des notions de la « common law » ne couvrant pas le même champ que les mêmes mots en français. On peut donc considérer que la culture juridique des institutions européennes est assez largement inspirée par les fondements du droit français, même si les principes anglo-saxons prennent une place de plus en plus grande s'agissant notamment des règles de la concurrence.

      2. L'utilisation du français par les fonctionnaires communautaires

        a) Au moment du recrutement

Il faut tout d'abord rappeler que les règles concernant le recrutement des fonctionnaires communautaires n'ont pas connu d'évolution notable en matière d'épreuves de langue (écrites et orales) à la Commission.

Il est demandé aux candidats des différents concours de connaître une langue communautaire autre que leur langue maternelle. Les épreuves écrites en langue sont de type QCM. A l'oral, des questions sont posées aux candidats dans la langue étrangère choisie. Au Parlement européen, la difficulté des épreuves linguistiques a été accrue, mais les principes de sélection sont semblables à ceux en vigueur à la Commission.

        b) La place des francophones et des ressortissants de pays latins

Les données sur le nombre des seuls fonctionnaires francophones ne sont apparemment pas connues à ce jour avec précision. En revanche, on sait qu'à la Commission, les francophones et les membres de pays latins restent largement majoritaires dans les services du personnel et de l'administration, y compris dans l'encadrement. Les Français, les Belges, les Luxembourgeois, les Italiens et les Espagnols représentaient, fin 1998, 82 % des effectifs toutes catégories confondues. Le pourcentage s'élevait à 70 % s'agissant des seuls administrateurs. Si l'on considère uniquement le personnel de l'encadrement de la Commission, les pays francophones (la France, la Belgique, le Luxembourg) et du Sud (l'Italie, l'Espagne, la Grèce, le Portugal) représentaient près de 55 % des effectifs. Dans les autres institutions de l'Union, y compris au Conseil où la présence belge et italienne compense la relative faiblesse du nombre de Français, la situation est satisfaisante.

Le français reste, au sein de la Commission, comme au sein du Parlement d'ailleurs, une langue véhiculaire, couramment utilisée. Notre langue est maîtrisée, au moins à l'écrit, par une grande majorité des fonctionnaires communautaires, à qui, s'ils ne sont pas francophones au départ, sont proposées, par la Commission, des formations en langue française devant leur permettre d'atteindre rapidement un niveau « de survie ».

        c) Comment renforcer la pratique du français au sein du personnel ?

Dans le but de renforcer la pratique du français, le ministère des affaires étrangères français a d'ailleurs mis en place à partir de 1994 un programme de formation à destination des fonctionnaires des pays partenaires de la France au sein de l'Union européenne comme des pays candidats à l'adhésion, étant entendu que certains des fonctionnaires bénéficiant de ces formations seront appelés, au cours de leur carrière administrative, à exercer des fonctions dans les missions ou représentations permanentes de leur pays à Bruxelles, ou au sein des instances européennes implantées dans des villes entièrement ou partiellement francophones. Ces programmes tendent également à mieux faire connaître nos institutions, la connaissance de l'administration du pays partenaire devenant une nécessité dans le cadre de la construction européenne.

On peut relever que ce type d'initiatives s'appuie notamment sur le « Centre européen de langue française » (CELF) de Bruxelles dont le rôle principal est de répondre aux demandes émanant des fonctionnaires de la Commission, des missions et des représentations permanentes. Des sessions de formation pour ces fonctionnaires sont par ailleurs organisées à l'Ecole nationale d'administration à Paris. Il convient de rappeler que ces stages étaient initialement destinés à des fonctionnaires originaires des pays nouveaux adhérents - Autriche, Finlande et Suède - dans un deuxième temps à des fonctionnaires (administrateurs, mais aussi traducteurs et interprètes) déjà en poste dans les instances communautaires. Ils peuvent aujourd'hui également bénéficier à des fonctionnaires venant des cinq « pays de la première vague » (Estonie, Hongrie, Pologne, Slovénie et République tchèque) Depuis 1999, en collaboration avec le Grand-Duché du Luxembourg et la Communauté française de Wallonie-Bruxelles, le ministère des affaires étrangères a, enfin, élargi cette action aux douze puis treize pays candidats à l'adhésion à l'Union européenne.

S'agissant des commissaires, si l'on peut estimer que tous ont à des degrés une certaine maîtrise de la langue française, cela ne signifie pas qu'ils acceptent de s'exprimer en français. Ainsi, l'actuel président de la Commission, M. Romano Prodi, qui serait très bon francophone, s'exprimerait presque exclusivement en anglais...

CONCLUSION

La langue française continue d'être enseignée et maîtrisée par un grand nombre d'Européens. Son rayonnement se manifeste dans divers domaines, notamment culturel, audiovisuel, ou juridique. Face à la tendance à l'hégémonie de l'anglais, il apparaît néanmoins essentiel de consolider encore les positions de notre langue en particulier dans les pays d'Europe centrale et orientale qui ont vocation à intégrer, à terme, l'Union européenne. Le français reste une langue phare du continent européen. Il est reconnu partout comme vecteur d'une culture qui continue de séduire, même si la concurrence de l'anglais est forte auprès des jeunes. Ceux-ci considèrent bien souvent le choix d'apprendre le français comme une marque d'adhésion à l'Union européenne. Si la langue française a statut de langue officielle et de langue de travail dans la plupart des organisations internationales, on ne peut que déplorer, néanmoins, le phénomène incontestable du recul de son usage au sein de ces instances au profit de l'anglais. Cependant, la place de notre langue et celle de la francophonie restent plus solides que certains discours alarmistes pourraient le faire croire.

Il faut renforcer la place du français dans ces organisations internationales et notamment au sein de l'Union européenne. L'existence de plusieurs langues officielles et de travail assure indéniablement une liberté et une égalité de parole entre les diverses délégations, tout en favorisant la préservation des différentes cultures et identités nationales. Le français, qui constitue la deuxième langue de travail présente dans les organisations internationales, et parfois la seule langue autre que l'anglais, détient une responsabilité particulière à assumer pour la sauvegarde du plurilinguisme. Au sein de l'Union européenne, la pluralité des langues officielles garantit l'égalité des Etats membres, l'information de tous les citoyens, leur égal accès au droit et aux financements communautaires. Dans cette perspective, l'emploi du français constitue un élément essentiel pour la préservation de notre vision de l'Europe.

En définitive, une des explications de la situation du français dans le monde est à rechercher dans l'attitude développée par les Français eux-mêmes à l'égard de leur langue maternelle. Il est admis dès le plus jeune âge, dans les classes primaires, que cette langue est d'abord difficile, qu'elle est complexe et doit en quelque sorte se mériter. Il convient aujourd'hui de décomplexer les Français vis-à-vis de leur langue qui doit être désacralisée. Cette démythification devrait les inciter à se faire plus volontiers les promoteurs du français à l'étranger.

* * *

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Patrick Bloche, les crédits des relations culturelles internationales et de la francophonie pour 2001 au cours de sa séance du 26 octobre 2000.

Après l'exposé du rapporteur pour avis, M. Denis Jacquat, président, a formulé les observations suivantes :

- Il est tout à fait regrettable que les crédits destinés aux bourses pour les étudiants étrangers soient en baisse régulière depuis plusieurs années. Or aider les jeunes étrangers à venir étudier en France constitue un bon moyen d'assurer le rayonnement de la langue française.

- On ne peut que confirmer la place de plus en plus importante prise par l'anglais dans les débats au Parlement européen.

- Si la langue française est aujourd'hui la langue la plus apprise dans le monde, elle n'est malheureusement pas la plus parlée. Ce décalage est inquiétant.

Mme Hélène Mignon s'est indignée que, la semaine passée, un ingénieur se soit vu refuser l'entrée à une réunion tenue à Toulouse au sein du groupe EADS parce qu'il ne parlait pas l'anglais.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits des relations culturelles internationales et de la francophonie pour 2001.

*

2621-01- Avis de M. Patrick Bloche (commission des affaires étrangères)sur le projet de loi de finances pour 2001 : Relations culturelles internationales et Francophonie

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© Assemblée nationale

Rapport d'information sur les moyens et les structures de diffusion de la francophonie - n° 2592 (enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 21 septembre 2000.)

Notons que la part des crédits des affaires étrangères, coopération comprise, dans le budget de l'Etat sera de 1,28 % en 2001, au lieu de 1,25 % dans la loi de finances initiale pour 2000.

La coopération culturelle et linguistique s'effectue à travers le réseau des établissements culturels implantés dans 85 pays et celui des Alliances françaises dans 90 pays en complément, bien entendu, des services de coopération et d'action culturelle. Elle recouvre des opérations très variées, par exemple l'organisation de manifestations culturelles et artistiques à l'étranger ou encore des sessions de formations de professeurs de français.

On peut citer le soutien financier de l'industrie cinématographique et de l'industrie des programmes audiovisuels.

A l'étranger, la conception et la mis en _uvre de la coopération culturelle et scientifique et des projets de coopération technique sont effectués par les services d'action culturelle et de coopération des postes diplomatiques sous l'autorité des ambassadeurs compétents.

Le rapport pour avis sur le projet de budget pour 2000 avait notamment mis l'accent sur les négociations internationales en matière de nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Il faut ici rappeler que le taux de pénétration de TV5 s'est grandement amélioré, mais cette situation n'induit pas nécessairement des scores homogènes en termes d'audiences.

Le Conseil supérieur de la langue française a été créé par décret du 2 juin 1989 ; il est placé auprès du Premier ministre qui en assure la présidence. Son secrétariat est assuré par la délégation générale à la langue française créée par ce même décret et rattachée au ministère de la culture depuis 1996. Les moyens nécessaires à son fonctionnement et aux actions qu'il propose sont fournis par la délégation et donc inscrits au budget du ministère de la culture. Les membres du Conseil supérieur sont des personnalités qualifiées désignées à raison de leur compétence ou des services rendus à la connaissance, à l'étude, à la diffusion et au bon usage de la langue française. Le vice-président est actuellement M. Bernard Cerquiglini, linguiste et directeur de l'Institut national de la langue française au CNRS.

Cette collaboration s'est concrétisée avec une force particulière en 2000 avec le Xème Congrès de la fédération internationale des professeurs de français (FIPF) qui s'est déroulé à Paris du 17 au 22 juillet 2000. Notons que la FIPF regroupe 130 associations et compte 70 000 adhérents dans plus de 100 pays. La réunion à Paris de 3 300 professeurs de français a connu un grand retentissement. Le congrès de l'association américaine des professeurs de français (AATF) s'est tenu aux mêmes lieux et dates. Ces rencontres ont constitué une véritable relance du soutien que la France apporte aux professeurs de français dans le monde. Une relance qui se manifeste d'ores et déjà dans la restructuration prometteuse de la revue Le français dans le monde : dans le cadre d'un partenariat renforcé et rénové avec la FIPF, cette revue sera désormais mise en ligne. Elle sera pilotée et gérée par les professeurs eux-mêmes, avec l'appui financier de la sous-direction du français et la mise à disposition de deux agents par le ministère de l'Éducation nationale.

Rapport élaboré par votre rapporteur : Le désir de France, La documentation française, 1999.

Page 45.

Ce rapport est rédigé par la délégation générale à la langue française qui dépend du ministère de la culture et de la communication. Le dernier rapport disponible est celui de 1999.

Ces règles ont probablement longtemps favorisé le recrutement de candidats français - qui maîtrisent assez rarement deux langues étrangères à la fois. Elles sont aujourd'hui un atout pour le recrutement de candidats suédois, finlandais, allemands et même espagnols..