N° 2626

--

      ASSEMBLÉE NATIONALE

      CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

      ONZIÈME LÉGISLATURE

      Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 20 septembre 2000.

      AVIS

      PRÉSENTÉ

      AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1)

      SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2001 (n° 2585),

      TOME I

      AFFAIRES EUROPÉENNES

      (ARTICLE 28 : ÉVALUATION DU PRÉLÈVEMENT OPÉRÉ SUR LES RECETTES DE L'ÉTAT AU TITRE DE LA PARTICIPATION DE LA FRANCE AU BUDGET DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES)

      PAR Mme MARIE-HÉLÈNE AUBERT,

      Députée

      --

      (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Voir le numéro 2624 (annexe n° 2)

                      Lois de finances

      La Commission des Affaires étrangères est composée de :

      M. François Loncle, président ; M. Gérard Charasse, M. Georges Hage, M. Jean-Bernard Raimond, vice-présidents ; M. Roland Blum, Mme Monique Collange, M. René Mangin, secrétaires ; Mme Michèle Alliot-Marie, Mme Nicole Ameline, M. René André, Mme Marie-Hélène Aubert, Mme Martine Aurillac, M. Édouard Balladur, M. Raymond Barre, M. Dominique Baudis, M. Henri Bertholet, M. Jean-Louis Bianco, M. André Billardon, M. André Borel, M. Bernard Bosson, M. Pierre Brana, M. Jean-Christophe Cambadélis, M. Hervé de Charette, M. Yves Dauge, M. Patrick Delnatte, M. Jean-Marie Demange, M. Xavier Deniau, M. Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, M. Jean-Paul Dupré, M. Charles Ehrmann, M. Jean-Michel Ferrand, M. Raymond Forni, M. Georges Frêche, M. Michel Fromet, M. Jean-Yves Gateaud, M. Jean Gaubert, M. Valéry Giscard d'Estaing, M. Jacques Godfrain, M. Pierre Goldberg, M. François Guillaume, M. Jean-Jacques Guillet, M. Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, M. Didier Julia, M. Alain Juppé, M. André Labarrère, M. Gilbert Le Bris, M. Jean-Claude Lefort, M. Guy Lengagne, M. François Léotard, M. Pierre Lequiller, M. Alain Le Vern, M. Bernard Madrelle, M. Jean-Paul Mariot, M. Gilbert Maurer, M. Jean-Claude Mignon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, M. Étienne Pinte, M. Marc Reymann, M. François Rochebloine, M. Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, M. René Rouquet, M. Georges Sarre, M. Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, M. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, M. Joseph Tyrode, M. Michel Vauzelle

      SOMMAIRE

      ___

      INTRODUCTION 5

      I - UN BUDGET CONTRAINT PAR LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE ÉTABLIE EN MARS 1999 7

        A - LA RÉVISION DES PERSPECTIVES FINANCIÈRES
        REJETÉE PAR LE CONSEIL DE L'UNION
        7

        B - LE PROJET DE BUDGET COMMUNAUTAIRE POUR 2001 9

        1) Les dépenses communautaires en progression modérée 9

        2) Un budget qui reste essentiellement redistributif 10

        3) L'évolution des recettes 11

        C - LA POSITION DE LA FRANCE DANS LE PROJET DE BUDGET 12

        1) L'évolution des contributions des Etats membres 12

        2) Stabilité de la contribution française au budget des Communautés 12

        3) La France au cinquième rang des pays contributeurs nets 13

      II - L'UNION A-T-ELLE LES MOYENS DE SA POLITIQUE EXTÉRIEURE ? 15

        A - LA RÉORGANISATION DE LA COMMISSION : ASSURER UNE
        MEILLEURE ADÉQUATION ENTRE ACTIVITÉS, RESSOURCES
        HUMAINES ET EFFICACITÉ DES PROCÉDURES
        16

        1) Doter la Commission d'un personnel en nombre suffisant 17

        2) Achever la réforme des procédures financières 18

        B - LA PRIORITÉ DE LA RECONSTRUCTION DES BALKANS OCCIDENTAUX 19

        1) Le projet de programme CARDS 19

        2) La mise en _uvre de l'aide au Kosovo. 20

        3) Quelle aide pour la transition vers la démocratie en Serbie ? 21

        C - LA DIMINUTION DES CRÉDITS CONSACRÉS
        AUX AUTRES ACTIONS EXTÉRIEURES
        22

        D - L'ÉLARGISSEMENT : UNE PRIORITÉ MAINTENUE MAIS DES
        DIFFICULTÉS DE MISE EN _UVRE POUR CERTAINES AIDES
        24

        E - POURSUIVRE LA RÉFLEXION SUR L'EFFICACITÉ
        DE L'AIDE COMMUNAUTAIRE AU DÉVELOPPEMENT
        24

      III . QUELLES PRIORITÉS POUR LES POLITIQUES INTERNES ? 27

        A - UNE PRIORITÉ MAINTENUE EN FAVEUR DE LA RECHERCHE EUROPÉENNE 27

        B - LES ACTIONS POUR L'EMPLOI 28

        C - UN EFFORT INSUFFISANT EN FAVEUR DES RÉSEAUX TRANSEUROPÉENS 28

      CONCLUSION 31

      EXAMEN EN COMMISSION 33

      Mesdames, Messieurs,

      Le budget 2001 est le deuxième inscrit dans le cadre financier pluriannuel, volet budgétaire de « l'Agenda 2000 » adopté par le Conseil européen réuni à Berlin les 24 et 25 mars 1999. Votre Rapporteur rappellera que ce cadre résulte formellement de l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999, par lequel les trois institutions de l'Union intervenant en matière budgétaire ont décidé une programmation sur sept ans, comportant un plafond pour les recettes de l'Union - 1,27 % du PNB communautaire - et un plafond de crédits pour chaque catégorie de dépenses - les perspectives financières -.

      Cette contrainte imposée aux exercices budgétaires suivants a permis la stabilisation des dépenses à un niveau élevé par rapport aux budgets antérieurs, et en même temps considéré comme compatible avec les efforts de rigueur conduits par les Etats membres au plan national. L'accord a aussi permis d'apaiser les tensions récurrentes entre les différentes institutions, pas entièrement cependant, car les perspectives financières sont déjà critiquées à la fois par la Commission européenne et par le Parlement, pour des raisons différentes.

      Le projet de budget diffère peu du précédent. Il est essentiellement redistributif : 47 % des dépenses seront consacrées à la politique agricole commune, 34 % à la politique régionale, tandis que les politiques internes et les actions extérieures, limitées à 6 et 5 % respectivement, continueront de faire l'effet de parents pauvres.

      Pourtant, l'actualité internationale comme les nouvelles missions attribuées à la construction européenne contribuent à solliciter amplement le budget des Quinze. L'issue du conflit au Kosovo a légué à l'Union un rôle majeur dans la reconstruction de la province et il est apparu indispensable de fournir une assistance à l'ensemble des pays de la région des Balkans occidentaux afin de faciliter leur transition politique et économique. Une aide d'urgence devrait être prochainement décidée en faveur de la République fédérale de Yougoslavie. Par ailleurs l'ambition de l'Union de conduire une Politique extérieure et de sécurité commune, et plus récemment de lancer les bases d'une politique européenne de sécurité et de défense a déjà, ou aura à court terme, une traduction budgétaire.

      Votre Rapporteur avait déjà exprimé l'an dernier ses doutes quant à la possibilité de faire face à ces nouveaux enjeux (sans oublier celui de l'élargissement) et à remplir ces nouvelles missions avec un budget aux termes inchangés. Il constate cette année à nouveau que le projet de budget traduit un immobilisme certain, qui correspond peut-être à l'immobilisme politique général que l'on peut constater en suivant le déroulement de la Conférence intergouvernementale.

      Pourtant, le Rapporteur reste convaincu que l'Union européenne doit se donner les moyens d'une action extérieure ambitieuse. Il est toutefois souhaitable que l'Union achève la réorganisation de son outil administratif et financier, afin de parvenir à une gestion efficace, rapide et transparente des fonds dont elle dispose, car il n'est guère utile de renforcer les moyens si ceux-ci risquent d'être peu ou mal utilisés. Cette question est particulièrement aiguë dans le domaine de l'aide au développement. C'est pourquoi ce rapport abordera la question de la réorganisation de la Commission et celle de l'efficacité de l'aide aux pays les moins avancés.

      Enfin, votre Rapporteur exprimera son souhait qu'une nouvelle impulsion soit donnée à certaines politiques internes, ainsi les actions dans le domaine de l'environnement et du développement durable, et surtout le développement des réseaux de transports, pour lesquels les moyens budgétaires doivent atteindre la « masse critique » permettant d'agir sur les avantages et inconvénients respectifs des différents modes de transport en Europe.

      Le projet de budget adopté par le Conseil de l'Union le 20 juillet dernier s'établit à 95,8 milliards d'euros en crédits d'engagement (CE) et 92,5 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Il traduit, par rapport au budget initial 2000, une progression de 2,7 % pour la première catégorie de crédits et une progression de 3,5 % pour la seconde.

      La contribution française inscrite à l'article 28 du projet de loi de finances s'élève à 99,5 milliards de francs en prévision de prélèvement sur recettes, montant correspondant à 6,1 % des recettes fiscales nettes de notre pays.

      I - UN BUDGET CONTRAINT PAR LA PROGRAMMATION PLURIANNUELLE ÉTABLIE EN MARS 1999

      A - La révision des perspectives financières rejetée par le Conseil de l'Union

      Le tableau ci-dessous rappelle la teneur des perspectives financières, actualisées en 2000, exprimées en prix courants pour les deux premières années, en prix 2001 pour les années suivantes.

      Perspectives financières pour l'Union européenne à quinze

      (en millions d'euros)

    CREDITS POUR ENGAGEMENTS

    2000

    2001

    2002

    2003

    2004

    2005

    2006

    1. AGRICULTURE

    Dépenses PAC (à l'exclusion du développement rural)

    Développement rural et les mesures d'accompagnement

    41 738

    35 352

    4 386

    44 530

    40 035

    4 495

    45 674

    41 169

    4 505

    45 538

    41 023

    4 515

    44 488

    39 962

    4 526

    43 624

    39 088

    4 536

    43 344

    38 797

    4 547

    2. ACTIONS STRUCTURELLES

    Fonds structurels

    Fonds de cohésion

    32 678

    30 019

    2 659

    32 720

    30 005

    2 715

    32 106

    29 391

    2 715

    31 503

    28 788

    2 715

    30 785

    28 174

    2 611

    30 785

    28 174

    2 611

    30 343

    27 737

    2 606

    3. POLITIQUES INTERNES (1)

    6 031

    6 272

    6 386

    6 500

    6 614

    6 729

    6 853

    4. ACTIONS EXTERIEURES

    4 627

    4 735

    4 745

    4 756

    4 766

    4 776

    4 787

    5. ADMINISTRATION (2)

    4 638

    4 776

    4 880

    4 984

    5 088

    5 192

    5 296

    6. RESERVES

    Réserve monétaire

    Réserve pour aides d'urgence

    Réserve pour garantie de prêts

    906

    500

    203

    203

    916

    500

    208

    208

    666

    250

    208

    208

    416

    0

    208

    208

    416

    0

    208

    208

    416

    0

    208

    208

    416

    0

    208

    208

    7. AIDES DE PRE-ADHESION

    Agriculture

    Instruments structurels de pré-adhésion

    PHARE (pays candidats)

    3 174

    529

    1 058

    1 587

    3 240

    540

    1 080

    1 620

    3 240

    540

    1 080

    1 620

    3 240

    540

    1 080

    1 620

    3 240

    520

    1 080

    1 620

    3 240

    540

    1 080

    1 620

    3 240

    540

    1 080

    1 620

    TOTAL DES CREDITS POUR ENGAGEMENTS

    93 792

    97 189

    97 697

    96 937

    95 397

    94 762

    94 279

    TOTAL DES CREDITS POUR PAIEMENTS

    Crédits pour paiements en % du P.N.B.

    91 322

    1,12 %

    94 730

    1,11 %

    97 975

    1,12  %

    98 671

    1,10 %

    95 581

    1,04 %

    93 759

    1,00 %

    93 197

    0,97 %

    DISPONIBLE POUR ADHESION (crédits pour paiements)

    Agriculture

    Autres dépenses

       

    4 306

    1 665

    2 641

    6 979

    2 112

    4 867

    9 247

    2 549

    6 698

    11 899

    3 048

    8 851

    14 792

    3 537

    11 255

    PLAFOND DE CREDITS POUR PAIEMENTS

    91 322

    94 730

    102 281

    105 650

    104 828

    105 658

    107 989

    Plafonds des crédits pour paiements en % du P.N.B.

    Marge pour imprévus

    Plafond des ressources propres

    1,12 %

    0,15 %

    1,27 %

    1,11 %

    0,16 %

    1,27 %

    1,17 %

    0,10 %

    1,27 %

    1,18 %

    0,09 %

    1,27 %

    1,14 %

    0,13 %

    1,27 %

    1,12 %

    0,15 %

    1,27 %

    1,12 %

    0,15 %

    1,27 %

(1) Conformément à l'article 2 de la décision n° 182/1999/CE du Parlement européen et du Conseil et à l'article 2 de la décision 1999/64 Euratom du Conseil, le montant des dépenses disponibles au cours de la période 2000-2002 pour la recherche s'élève à 11 510 millions d'euros à prix courants.

    (2) S'agissant des dépenses de pensions, les montants pris en compte sous le plafond de cette rubrique sont calculés nets de contributions du personnel au régime correspondant, dans la limite de 1 100 millions d'euros pour la période 2000-2006.

    Source : Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen, Com (2000) 93 final du 17/2/2000.

      La Commission européenne, dans son avant-projet de budget présenté le 10 mai, proposait une forte augmentation des crédits pour engagement (+3,9 %), et une hausse encore plus forte des crédits de paiement (5 %). Elle faisait observer que dans ce dernier cas de figure, la progression du budget ne serait que de 2,85 % hors financement de la Politique agricole commune.

      L'augmentation allait de pair avec une proposition de révision des perspectives financières, fondée sur les besoins liés à la reconstruction des Balkans. Prenant en considération un chiffrage des besoins à 5,5 milliards d'euros sur la période 2000-2006, la Commission proposait une diminution de 300 millions d'euros du plafond de la rubrique des dépenses agricoles pour relever d'autant le plafond des rubriques correspondant aux actions extérieures. La Commission soulignait que l'accord interinstitutionnel prévoit l'hypothèse de la révision et que l'autorité budgétaire a reconnu, dès le mois de décembre 1999, la nécessité de desserrer la contrainte budgétaire, en faisant appel à l'instrument de flexibilité prévu par cet accord. En effet, 200 millions d'euros supplémentaires avaient pu être engagés pour financer la reconstruction au Kosovo.

      Le Parlement européen s'est également montré favorable à la révision des perspectives financières, à la fois en faveur de la stabilisation des Balkans et de la coopération avec les pays tiers les moins développés. Le président de la commission des budgets, M. Terry Wynn, a souligné, lors de la réunion de concertation tenue avant la réunion du Conseil « budget », que les engagements prévus en faveur des Balkans se faisaient au détriment d'autres dépenses, et notamment des actions en faveur des pays tiers de la Méditerranée.

      Le Conseil a cependant repoussé à l'unanimité la révision des perspectives financières. D'une part, le Conseil a estimé que la dotation envisagée en faveur des Balkans n'avait pas fait l'objet d'une évaluation approfondie des besoins, et, d'autre part, de nombreux Etats membres ont jugé inacceptable la diminution du plafond agricole, élément important de la réforme de la PAC figurant dans « l'Agenda 2000 ».

      La Présidence française ne souhaitait pas que soit remis en cause le compromis résultant des perspectives financières, et ses représentants ont souligné que l'on constate de façon chronique l'existence en fin d'exercice d'un solde excédentaire de plus de 3 milliards d'euros.

      B - Le projet de budget communautaire pour 2001

      1) Les dépenses communautaires en progression modérée

      Le projet de budget adopté par le Conseil « budget » s'établit à 95 860 millions d'euros en crédits d'engagement et 92 498 millions de paiement, ce qui traduit une augmentation de 2,7 % en crédits d'engagement et de 3,5 % en crédits de paiement.

      Le Gouvernement considère que ce projet de budget constitue un compromis équilibré, et qu'il ne pouvait guère s'établir plus haut. Il comporte déjà une augmentation des crédits très largement supérieure à l'inflation communautaire : celle-ci étant évaluée à 1,8 % en 2001, l'évolution du budget en volume serait de 1,7 %, donc supérieure à l'augmentation des budgets nationaux des Etats membres, et notamment en France, où l'évolution des dépenses de l'Etat sera limitée à 0,3%.

      On soulignera qu'il est maintenu une marge sous le plafond autorisé pour chaque rubrique, afin de faire face à d'éventuelles dépenses imprévues au cours de l'exercice.

      Dépenses prévues pour l'exercice 2001 (en millions d'euros)


    Rubriques


    CE


    CP

    Evolution 2000/2001 CE

    Evolution
    2000/2001 CP

    Marge restante (1)

    Agriculture

    43.545

    43.545

    + 6,5 %

    + 6,5 %

    985

    Actions structurelles

    32.720

    31.800

    + 0,1 %

    0

    0

    Politiques internes

    6.064

    5.735

    - 0,2 %

    + 0,7 %

    208

    Actions extérieures

    4.550

    3.796

    - 5,3 %

    + 5,1 %

    185

    Administration

    4.825

    4.825

    + 2,1 %

    + 2,1 %

    114

    Réserves

    916

    916

    + 1,1 %

    + 1,1 %

    0

    Aide à la pré-adhésion

    3.240

    1.881

    + 2,3 %

    + 10.9 %

    0

    TOTAL

    95.860

    92.499

    + 2,7 %

    + 3,5 %

     

      (1) Marge restante sous les perspectives financières

      On notera que Mme Michaele Schreyer, commissaire européen en charge du budget, a critiqué la réduction des crédits de paiement opérée par le Conseil, considérant qu'en relation avec le PNB de l'Union, ce projet de budget serait le plus bas depuis dix ans. Elle a qualifié d'erreur politique la diminution par le Conseil de l'enveloppe consacrée aux Balkans et s'est inquiétée, comme le Parlement de la poursuite du « processus de Barcelone » entrepris avec les pays méditerranéens.

      2) Un budget qui reste essentiellement redistributif

      Les deux principaux postes du projet de budget restent la dépense agricole et les actions structurelles. Dans ces domaines, le projet de budget permet de faire face aux dépenses des politiques en cours.

      Les crédits agricoles augmenteront de 6,3 % afin d'accompagner l'entrée en application de la réforme de la PAC adoptée au Conseil de Berlin : on rappellera qu'il s'agissait d'adapter cette politique aux règles de la concurrence internationale, au moyen d'une baisse des prix agricoles compensée par des aides directes. Le projet de budget du FEOGA-Garantie a été établi à 43,5 milliards d'euros, dont 39 milliards seront consacrés aux mesures de marché et 4 milliards au développement rural. Enfin, une marge de 985 millions d'euros a été préservée sous le plafond de la rubrique 1.

      Ce budget devra accompagner les premiers effets de l'entrée en vigueur de la réforme de la PAC, la première baisse des prix décidée dans le secteur des céréales et de la viande bovine n'étant intervenue qu'en juillet 2000. L'augmentation des aides directes compensatoires dans ces deux secteurs devrait être financée par l'augmentation de 6,5 % en faveur des aides de marché, ainsi que la mise en _uvre de la réforme dans le secteur viti-vinicole. Les dépenses de développement rural, qui constituent le deuxième pilier de la PAC depuis la réforme, progressent de 4,5 %.

      Les crédits de paiement en faveur de l'agriculture représenteront 47 % du budget communautaire en 2001. L'augmentation est conforme aux prévisions établies par le Conseil de Berlin, selon lesquelles la dépense agricole doit progresser sur les années 2001 et 2002 pour commencer à décroître en 2003. Un réexamen de ces crédits doit avoir lieu prochainement, à la suite de la présentation par la Commission de sa lettre rectificative annuelle, qui procède à une nouvelle estimation. Malgré son coût, il reste que la réforme de la PAC adoptée à Berlin ne règle pas les problèmes récurrents du monde agricole : baisse constante des emplois, maîtrise insuffisante des productions, impact sur l'environnement, sécurité alimentaire encore à améliorer...Les Etats européens les plus concernés, dont la France, ne peuvent se contenter à terme de maintenir une position de blocage sur les aspects quantitatifs de la PAC, repoussant toujours plus loin le débat sur ses aspects qualitatifs.

      Le budget des actions structurelles constitue le deuxième poste de dépenses, s'élevant à 34 % de la dépense communautaire. L'année 2001 est la deuxième année d'application de la réforme des fonds structurels adoptée au Conseil de Berlin, et le projet de budget 2001 traduit une stabilisation des crédits à un niveau élevé.

      Il prévoit un montant de 32,7 milliards d'euros en crédits d'engagement et 31,8 milliards en crédits de paiement, les premiers étant en légère augmentation, les seconds stables.

      Ces crédits doivent en fait financer à la fois des projets engagés sous la précédente programmation (1993-1999) et des mesures nouvelles programmées dans le cadre de « l'Agenda 2000 ». En effet, 22 % des engagements des années précédentes n'ont pas donné lieu à paiement - ce sont les « restes à liquider », évalués à 40 milliards d'euros fin 1999 - aussi les crédits de paiement devront-ils les couvrir. Il apparaît à présent que la programmation volontariste des actions de développement structurel menée pendant les années 1993-1999, avec une forte croissance des crédits d'engagement, se traduit aujourd'hui par un « reste à liquider » très important, puisqu'il représente 116 % des crédits inscrits au budget. Ce reste s'explique par la concentration de beaucoup d'engagements en fin de programmation et par le retard pris dans l'exécution des programmes, en particulier dans les régions en retard de développement de l'objectif 1.

      3) L'évolution des recettes

      Les recettes communautaires augmenteront de 3,5 % par rapport à 2000, et devraient évoluer de la façon suivante.

      Evolution des recettes communautaires entre le budget 2000 et le budget 2001 :

    Origine de la recette

    Budget pour 2000

    Projet de budget pour 2001

    Évolution

    Prélèvements agricoles

    991.980.000

    1.062.000.000

    + 7 %

    Cotisation sucre

    1.046.430.000

    905.670.000

    - 13,4 %

    Droits de douane

    11.665.260.000

    12.291.750.000

    + 5,4 %

    Ressource TVA

    34.048.587.740

    33.467.186.127

    - 1,7 %

    Ressource PNB

    37.751.477.947

    44.080.524.139

    + 16,8 %

    Excédents disponibles

    3.209.100.914

    -

    - 100 %

    Recettes diverses

    611.906.962

    691.670.076

    + 13 %

    Total

    83.386.951.293

    92.498.800.342

    + 3,5 %

      Les recettes de l'exercice 2000 prennent en compte le report de solde excédentaire de l'exercice 1999 soit 3,2 milliards d'euros, ce qui avait permis de réduire le montant de la contribution au titre de la ressource PNB pour cette année. A ce stade, aucun report de solde excédentaire n'est inscrit dans le projet de budget 2001, ce qui entraîne une augmentation importante de plus de 16 % de la contribution au titre de la ressource PNB pour 2001.

      C - La position de la France dans le projet de budget

      1) L'évolution des contributions des Etats membres

      La part relative de chaque Etat membre dans le financement du budget communautaire est présentée par le tableau suivant :

     

    1997

    1998

    1999

    2000

    2001

    Belgique

    3,9

    3,8

    3,9

    3,8

    3,8

    Danemark

    2

    2,1

    1

    2

    2

    Allemagne

    28,3

    25,1

    25,5

    25,2

    25,3

    Grèce

    1,6

    1,6

    1,6

    1,6

    1,6

    Espagne

    7,1

    7

    7,6

    7,3

    7,5

    France

    17,5

    16,5

    17

    16,7

    16,8

    Irlande

    0,9

    1,2

    1,3

    1,1

    1,2

    Italie

    11,5

    12,9

    13

    12,7

    12,9

    Luxembourg

    0,2

    0,3

    0,2

    0,2

    0,2

    Pays-Bas

    6,4

    6,2

    6,2

    6,1

    6,3

    Autriche

    2,8

    2,5

    2,5

    2,5

    2;6

    Portugal

    1,4

    1,3

    1,5

    1,4

    1,4

    Finlande

    1,4

    1,4

    1,5

    1,4

    1,5

    Suède

    3,1

    2,9

    2,8

    2,9

    3

    Royaume-Uni

    11,9

    15,2

    13,4

    15,1

    13,9

      2) Stabilité de la contribution française au budget des Communautés

      Le montant du prélèvement sur recettes au profit des Communautés européennes atteindra, en prévision, 99,5 milliards de francs en 2001, soit une augmentation de 1 % par rapport au prélèvement inscrit pour l'année 2000. Ce montant représente 6,1 % des recettes fiscales perçues par l'Etat : l'on peut souligner que cette proportion est stabilisée, un peu au-dessus de 6 %, depuis 1996.

      L'écart entre prévision en loi de finance initiale et contribution en exécution a tendance à se réduire, ce qui montre que les budgets adoptés sont de plus en plus réalistes, laissant une part moindre à la sous-exécution. Ainsi la contribution française au budget 1999 s'est élevée à 91,1 milliards de francs contre 95 initialement prévus, et la contribution pour 2000 pourrait se limiter à 94,2 milliards de francs contre 98,5 prévus en loi de finance initiale. Cette dernière baisse serait imputable à la révision des assiettes des ressources TVA et PNB pour 2000 : la contribution de la France diminuerait à 16,7 % alors que celle du Royaume-Uni par exemple augmenterait en lien avec la forte croissance prévue.

      3) La France au cinquième rang des pays contributeurs nets

      La France est un pays structurellement contributeur net, sa quote-part dans le financement du budget communautaire est évaluée à 16,8 % pour 2001, aussi notre pays est-il le deuxième contributeur en volume derrière l'Allemagne, qui finance 25 % du budget communautaire.

      Le solde budgétaire a été établi par la Cour des comptes européennes pour l'année 1998 : ce solde, résultant de la différence entre les ressources propres versées et les paiements effectués en France, est négatif pour 1,7 milliard d'écus. Ce solde place en réalité la France en position de cinquième contributeur net derrière l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l'Italie.

      Notre pays se situe en effet en deuxième position des bénéficiaires des politiques communautaires, recevant 14,7 % de l'ensemble des crédits derrière l'Espagne, qui reçoit 15,2 % de ces crédits.

      On rappellera que la France devrait rester le premier bénéficiaire de la PAC réformée sur l'ensemble de la période : le montant des aides que notre pays recevra pourrait dépasser 70 milliards de francs en 2006, ce qui équivaut à un taux de retour de 23 %. C'est effectivement à 23,6 % que s'établit le taux de retour dont notre pays a bénéficié en 1999, loin devant l'Allemagne (14,5 %). Le taux de retour en faveur de la France devrait même progresser sur la plupart des secteurs de la PAC, et surtout pour le secteur laitier, les viandes bovine et particulièrement porcine, ainsi que la volaille.

      Notre pays est le premier bénéficiaire de la politique de développement rural, recevant 760 millions d'euros par an, soit 17,5 % de l'enveloppe, au titre de cette politique. On soulignera que sa mise en _uvre peut à présent commencer, le plan de développement rural présenté par la France pour sept ans ayant reçu l'approbation de la Commission le 26 juillet 2000.

      La volonté de concentrer l'aide sur les régions les plus en difficulté manifestée lors de la réforme des fonds structures pour les années 2000 à 2006 a évidemment pour conséquence une diminution de la part relative de la France, qui sera cependant limitée en valeur absolue du fait de la progression de l'enveloppe totale. Le taux de retour prévu pour cette période de sept ans s'établit à un peu plus de 8 % sur les principales actions de la réforme et les programmes d'initiative communautaire.

      Votre Rapporteur a décrit dans ce chapitre la part prise dans le budget communautaire par les deux rubriques quantitativement les plus importantes. Il présentera dans les deux chapitres suivants l'évolution de la politique extérieure et celle de certaines politiques internes, continuant de regretter que celles-ci soient marginalisées au sein du budget.

      II - L'UNION A-T-ELLE LES MOYENS DE
      SA POLITIQUE EXTÉRIEURE ?

      L'Union s'est efforcée, durant la dernière décennie, de répondre aux défis qui ont résulté pour elle des bouleversements politiques internationaux, aussi se trouve t-elle mener aujourd'hui quatre grands desseins à la fois : réaliser l'élargissement, contribuer à la stabilisation dans les Balkans occidentaux, conduire un partenariat ambitieux avec les pays de la Méditerranée afin de développer leur économie et de favoriser leur stabilité politique et, enfin, poursuivre son aide traditionnelle en direction des pays les plus pauvres.

      L'ensemble de ces actions ne figurent pas dans les mêmes rubriques du budget et ne sont pas régis par les mêmes procédures. L'on verra qu'ils entrent cependant en concurrence, dans le contexte contraint qui a été décrit ci-dessus.

      La rubrique 4 consacrée aux actions extérieures est celle sur laquelle s'exercent les plus fortes tensions, qui donnent lieu à des désaccords entre les institutions européennes. Cette rubrique s'était trouvée totalement bouleversée lors de l'établissement du budget 2000, afin de permettre le financement de l'intervention de l'Union dans les Balkans au moyen d'un redéploiement des crédits, et donc au détriment d'autres actions. L'élaboration du budget 2001 voit se poser le problème à peu près dans les mêmes termes, ce qui conduit votre Rapporteur à penser que, même si un compromis est encore dégagé cette année entre les institutions, la pertinence des perspectives financières devra être prochainement réexaminée.

      Par ailleurs l'Union européenne est devenue un des principaux acteurs de la coopération internationale et de l'aide au développement, la Commission soulignant qu'elle gère un dixième de l'aide publique au développement dans le monde. Or cet aspect de ses activités souffre d'un grave déficit de ressources humaines, comme il a été souligné dans les rapports des sages sur le fonctionnement de la Commission. Votre Rapporteur estime que ce problème étant à présent clairement identifié, il doit trouver une solution, au moins partielle, dans le budget 2001. Ensuite seulement pourra-t-on exiger que des moyens financiers accrus soient apportés à l'appui des ambitions extérieures de l'Union.

      A - La réorganisation de la Commission : assurer une meilleure adéquation entre activités, ressources humaines et efficacité des procédures

      Les dépenses administratives de l'Union, inscrites à la rubrique 5 du budget, sont d'une importance comparable à celles des politiques internes et des actions extérieures, puisqu'elles s'élèvent à environ 5 % du budget. Elles sont à présent stables à ce niveau après des années de forte croissance, due à la création de nouvelles institutions et aux conséquences des élargissements. Les effectifs des institutions européennes ont plus que doublé entre 1977 et 2000 : ils comptent aujourd'hui plus de 30 700 personnes.

      Le Conseil a commencé par limiter à 2,1 % la progression des crédits de fonctionnement de l'Union pour 2001 ; ceux-ci s'élèvent à 4,8 milliards d'euros. Cette augmentation suit le niveau de l'inflation en prévoyant des marges pour les dépenses exceptionnelles.

      Mais la négociation sur cette rubrique ne fait probablement que commencer, la Commission ayant présenté le 4 septembre dernier le projet de réorganisation de ses services, dans le cadre d'une lettre rectificative au budget 2001.

      On rappellera tout d'abord que lors de son accession à la présidence de la Commission, Romano Prodi s'est engagé à présenter un schéma global de refonte de la Commission permettant de répondre aux critiques formulées par les rapports des sages ayant abouti à la démission de la Commission Santer. Après avoir mené les consultations nécessaires, la Commission a présenté, le 1er mars dernier, son « Livre blanc » sur la réforme de la Commission, établi sous la direction du commissaire Neil Kinnock, chargé de la réforme. La stratégie de la Commission s'y développe autour de trois thèmes.

      Le premier de ces thèmes consiste à réformer la façon dont les priorités politiques seront établies et les ressources affectées. Le budget 2001 l'a déjà en partie mis en _uvre par la présentation du budget sous la forme d'une gestion par activité. Celle-ci veut que la discussion sur chaque domaine d'intervention de l'Union intègre non seulement les montants financiers, mais aussi la gestion et les ressources humaines. L'affectation des ressources doit alors, selon la Commission, se dérouler en pleine connaissance de l'ensemble des coûts pour chaque domaine d'action. Votre Rapporteur ne mésestime pas l'intérêt d'évaluer le coût complet d'un programme ; il se demande toutefois si cette démarche d'une inspiration libérale britannique très marquée n'est pas réductrice dans le contexte des activités qui sont celles de la Commission européenne.

      Le deuxième thème est celui d'une politique des ressources humaines rénovée, ce qui paraît tout à fait approprié, et le troisième comporte la modernisation des procédures budgétaires et financières, ce que de nombreux observateurs, notamment au Parlement français, suggéraient depuis longtemps.

      1) Doter la Commission d'un personnel en nombre suffisant

      Au cours de cette année, la Commission, par la voix de Mme Schreyer notamment, a fait connaître que, dans plusieurs directions générales, le manque de personnel conduirait à différer plusieurs engagements budgétaires, faute de pouvoir en assumer la gestion dans de bonnes conditions. Ainsi la direction chargée de l'emploi n'a pas mis en _uvre l'action pilote pour l'emploi local, la direction « environnement » n'entreprendra qu'une partie du troisième programme LIFE, se consacrant d'abord à la gestion du « reste à liquider » du programme précédent.

      L'aide extérieure de l'Union, auparavant concentrée dans les pays ACP, a acquis une dimension mondiale. Or l'on se souvient que la pénurie grave de personnel a eu une incidence directe et négative sur la rapidité et la qualité de la fourniture de cette aide. Les ressources humaines n'ont pas suivi l'accroissement du volume des fonds à gérer : le volume de l'aide a été multiplié par un facteur de 2,8 au cours des dix dernières années, alors que les effectifs n'ont été augmentés que selon un facteur de 1,8. Lorsque les Etats membres ou la Banque mondiale disposent de 4 à 9 fonctionnaires pour gérer 10 millions d'euros, la Commission ne dispose que de 2,9 fonctionnaires.

      La mise en évidence de ces problèmes a eu les conséquences suivantes.

      Au cours de l'année 2000, le Président Prodi a procédé à l'inventaire des effectifs de la Commission et à une réorganisation. Les directions générales et leurs services ont été restructurés, ce qui a permis le redéploiement de près de 800 personnes au bénéfice des tâches jugées essentielles ou politiquement prioritaires.

      Dans un second temps, le « groupe de pilotage » présidé par le Président Prodi a recensé les activités qui pouvaient être abandonnées ou réduites au sein de la Commission, et a examiné quelles étaient les actions prioritaires pour lesquelles les ressources humaines étaient insuffisantes. Le groupe a conclu à la nécessité de disposer de 1250 postes supplémentaires pour les activités essentielles. Une partie de ces postes pouvant être pourvue par de nouveaux redéploiements internes, la Commission a demandé, dans une lettre rectificative du 5 septembre, la création de 400 nouveaux postes en 2001 et 317 à compter de 2002. Le coût total de la mesure s'élève à 44,2 millions d'euros en crédits de paiement.

      Ces effectifs permettraient de renforcer les secteurs des relations extérieures, de la concurrence, de l'environnement, de la justice et des affaires intérieures. Les effectifs de la Commission augmenteraient de 2,8 % pour atteindre un total de 17 587 postes de fonctionnaires.

      La lettre rectificative prévoit le démantèlement, en 2000 et 2001, de la plupart des bureaux d'assistance technique (les BAT), dont la gestion, pour certains, avait été caractérisée comme frauduleuse par les sages. Environ 85 bureaux intervenaient pour les actions extérieures, soit 900 personnes. Des emplois permanents replaceront ces postes, mais la Commission n'abandonne pas la méthode de l'externalisation de certaines tâches, au sein d'organismes de type nouveau, ou bien d'agences d'exécutions.

      2) Achever la réforme des procédures financières

      La Commission a entrepris au cours de cette année la réforme de la gestion et du contrôle financiers internes. Elle a créé un service d'audit interne (pour lequel des candidats extérieurs seront recrutés) et un service financier central, qui secondera les directions lorsqu'elles engagent des fonds communautaires, la compétence d'ordonnateur étant transférée du collège des commissaires aux directeurs généraux. La refonte actuellement en cours du règlement financier doit compléter cette modernisation du cadre financier et budgétaire de l'action de la Commission.

      Dans ce contexte, votre Rapporteur estime souhaitable que le Gouvernement, chargé de la Présidence de l'Union, adopte une position favorable aux demandes contenues dans la lettre rectificative. Les dernières années ont en effet montré que l'économie des ressources humaines, jointe à un certain immobilisme dans la gestion du personnel, a conduit à des gaspillages et à des fraudes. Ces phénomènes ont également nui à l'efficacité, et donc à la crédibilité de l'Union dans son rôle international.

      B - La priorité de la reconstruction des Balkans occidentaux

      Comme il a déjà été souligné, le financement de l'aide au Kosovo avait constitué une pierre d'achoppement lors de la discussion du projet de budget 2000. Une enveloppe de 920 millions d'euros avait du être dégagée au sein de la rubrique 4 (représentant près du quart de celle-ci), en grande partie par redéploiement, afin d'éviter la révision des perspectives financières, rejetée par le Conseil.

      Cette année encore, il existe une divergence de vue entre les institutions quant à l'enveloppe qui doit être affectée à cette région. La Commission proposait d'établir le niveau de la rubrique 4 à 4,9 milliards d'euros en crédits d'engagement et 3,9 milliards en crédits de paiement. Le Conseil ayant rejeté l'évaluation des besoins de la région présentée par la Commission, le montant total des actions extérieures s'établit à 4,7 milliards d'euros, avec une marge de 178 millions sous le plafond. Les décisions du Conseil se traduisent par une augmentation de 8,8 % en crédits de paiement.

      La priorité accordée à cette région est manifestée par l'ouverture d'une enveloppe de 614 millions d'euros en crédits d'engagement pour 2001. Le Conseil présente cette décision comme une augmentation de 30% par rapport à l'an dernier, mais l'aide de 472 millions décidée pour 2000 avait en fait été étoffée des 200 millions de l'instrument de flexibilité mis en _uvre par le Parlement européen. Ce montant apparaît conforme aus engagements pris par l'Union à la Conférence des donateurs pour les Balkans.

      1) Le projet de programme CARDS

      Le Conseil européen ayant souhaité la mise en place d'un instrument financier unique en faveur des Balkans occidentaux, la Commission a proposé dans un nouveau règlement, en cours de négociation, la fusion des programmes OBNOVA et Phare en un seul programme dit « CARDS ». Ce programme sera centré autour de trois priorités : le renforcement de la démocratie et des institutions, la reconstruction et le développement économique et la coopération régionale. Son adoption est l'une des priorités de la Présidence française.

      Le montant de 5,5 milliards d'euros sur une période allant de 2000 à 2006, proposé par la Commission, a été rejeté par le Conseil, estimant qu'il ne tenait pas compte des efforts consentis au titre de l'aide bilatérale des Etats membres, ni de la capacité d'absorption des régions concernées. Le Conseil a invité la Commission à présenter un montant révisé susceptible de s'inscrire sous le plafond des perspectives financières. Il est vrai que les lacunes institutionnelles en Albanie, par exemple, ou la nécessité de développer les institutions et le cadre législatif, en Croatie et en Macédoine, freinent la capacité de mise en _uvre des projets.

      Dans l'attente, une enveloppe de 224 millions d'euros est prévue pour l'aide aux républiques issues de l'ex-Yougoslavie, ainsi que 30 millions pour l'aide macro-économique à la région.

      2) La mise en _uvre de l'aide au Kosovo.

      La Communauté consacre 1,2 milliard d'euros à la reconstruction du Kosovo au cours de la période 1999-2006, la majeure partie de cette somme étant engagée entre cette année et 2003. Le Conseil a inscrit 320 millions d'euros au budget 2001.

      La Commission a récusé les critiques portant sur la faible utilisation des crédits au Kosovo. Au contraire, les bilans effectués à ce jour, tant par notre administration que par les rapporteurs du Parlement européen, soulignent que la mise en _uvre de l'aide a été plus rapide au Kosovo que dans tout autre programme communautaire.

      On rappellera que les premières tranches de l'aide ont été mises en _uvre par une « task force » spéciale composée d'experts ; ceux-ci ont rapidement engagé les 127 millions d'euros inscrits au budget 1999, dont la moitié ont fait l'objet de contrats six mois plus tard. L'Agence européenne pour la reconstruction a ensuite pris le relais, et son efficacité, reposant sur des pouvoirs déconcentrés, a été suffisamment remarquée pour inspirer l'idée qu'elle devrait servir de modèle aux agences destinées à remplacer les bureaux d'assistance technique. L'Agence a complètement engagé les 360 millions d'euros inscrits pour cette année dont 75 % feraient l'objet de contrats en cours et la moitié de paiements.

      Les gestionnaires de l'aide sur le terrain ont cependant dénoncé les difficultés et les blocages du processus de décision actuel, appelant à un allégement des procédures afin de renforcer l'efficacité et la visibilité de l'action de l'Union. Les rapporteurs du Parlement européen ont critiqué « la bureaucratie excessive du processus de décision, qui permet aux fonctionnaires des Etats membres d'examiner deux fois les mêmes projets avant qu'une décision ne soit définitivement arrêtée », ce qui autorise l'obstruction. Ils en concluent que le futur règlement CARDS doit accorder une plus grande autonomie à l'Agence, et ne conférer qu'un pouvoir consultatif aux représentants des Etats membres, surtout s'agissant des projets peu onéreux.

      L'évolution de l'aide est la suivante. Les crédits de type humanitaire devraient tout d'abord diminuer l'année prochaine, pour prendre fin au printemps 2003. Les parlementaires européens ont observé que les petits projets pour la reprise des activités courantes changent sensiblement la vie des populations et contribuent à la visibilité de l'aide de l'Union : la réhabilitation des écoles et des établissements de santé, par exemple. L'assistance au retour des réfugiés et le déminage ne sont pas encore terminés.

      Le soutien à l'administration civile provisoire est demandé par les représentants de la population pour encore au moins quatre ans et les services tels que la police n'ont pas encore atteint un effectif et la formation adéquats. La reconstruction économique est le poste budgétaire le plus lourd, et le financement des donateurs couvre encore la moitié des coûts en 2000. La MINUK considère que cette proportion devrait diminuer d'ici deux à trois ans avec la mise en _uvre de la nouvelle fiscalité et des contrôles aux frontières. Enfin, de nombreux secteurs nécessitent encore une aide : les services publics, le logement, le secteur énergétique qui manque d'investissement et de maintenance depuis dix ans, les transports et les communications.

      3) Quelle aide pour la transition vers la démocratie en République fédérale de Yougoslavie ?

      La proposition de la Commission européenne de réserver, dans le budget 2001, 200 millions d'euros conditionnés au départ du Président Milosevic, et de réserver près de 2,3 milliards d'euros en faveur de la Serbie au sein du futur programme CARDS a été rejetée par le Conseil en juillet.

      Comment l'Union peut-elle réagir, à la suite de la victoire de la coalition d'opposition conduite par Vojislav Kostunica, pour encourager la transition démocratique en Serbie et aider à la reconstruction ?

      M. Hubert Védrine, président du Conseil « Affaires générales », a annoncé la levée rapide des sanctions économiques et commerciales qui frappent la République fédérale de Yougoslavie. Les Quinze ont ensuite proposé de conclure avec la RFY un accord de stabilisation et d'association qui lui permettra d'établir des relations privilégiées avec l'Union. Pour l'instant seul le programme de soutien aux municipalités d'opposition et aux médias indépendants, doté de 40 millions d'euros, est prévu au budget pour 2001. L'assistance totale européenne à la société civile depuis 1999 s'élève à 151 millions d'euros.

      On mentionnera enfin qu'à la suite de l'intervention du Conseil européen de Lisbonne en faveur du rétablissement de la circulation sur le Danube, la Commission a proposé une contribution de 22 millions d'euros au projet de déblaiement du fleuve remis par la commission du Danube : ce montant correspond à 85 % des fonds qui seront réunis à cette fin.

      C - La diminution des crédits consacrés aux autres actions extérieures

      L'effort en faveur des Balkans a entraîné des économies sur les autres actions extérieures, qui seront en diminution de 9,2 %.

      Le projet de budget pour la rubrique 4 est actuellement le suivant :

     

    Budget 2000

    CE CP

    Projet-Conseil
    1ère lecture
    CE CP

    Variation en %
    depuis budget 2000
    CE CP

    Préadhésion Chypre et Malte

    15,0

    2,0

    19,0

    13,0

    + 26,0

    + 550,0

    Aide alimentaire et humanitaire


    936,0


    832,3


    928,0


    873,0


    - 0,9


    + 4,9

    Coopération avec l'Asie, l'Amérique latine et l'Afrique australe


    905,5


    634,7


    850,0


    745,0


    - 6,1


    17,4

    Coopération avec les pays tiers méditerranéens


    1127,9


    545,9


    856,3


    459,3


    - 24,1


    - 15,9

    Coopération avec les pays de l'Europe de l'Est


    762,7


    626,0


    1072,4


    876,0


    40,6


    39,9

    Autres actions de coopération


    362,7


    369,2


    359,9


    364,5


    - 0,8


    - 1,3

    Démocratie et droits de l'Homme


    100,3


    85,5


    88,0


    75,0


    - 12,3


    - 12,3

    Volets externes de certaines politiques communautaires


    368,5


    363,6


    340,4


    355,0


    - 7,6


    - 2,4

    Politique étrangère et de sécurité commune


    47,0


    30,0


    36


    35


    0


    0

    Total

    PF
    Marge

    4625,6

    21

    3489,2

    4550,1
    4735,0
    184,9

    3795,9

    - 1,6

    8,8

      La politique méditerranéenne de l'Union, matérialisée par le programme Meda, sera concernée par ces économies : ses crédits seront réduits de 15 % en paiement. Il est vrai qu'il est reproché de façon chronique à ce programme une sous-exécution budgétaire ; le commissaire Chris Patten chargé des relations extérieures a expliqué que pour un engagement d'un milliard d'euros par an, il n'était dépensé que 40 %.

      L'on peut espérer une amélioration de la mise en _uvre de l'aide à ces pays grâce à l'adoption prochaine du règlement Meda révisé, sur lequel un accord est intervenu au Conseil le 18 septembre dernier. La révision comporte en effet de nombreuses mesures susceptibles d'accélérer les interventions communautaires : l'abandon du seuil pour l'examen par les Etats membres des projets individuels à financer, l'amélioration de la coordination sur place entre la Commission et les Etats membres qui disposent d'agences sur le terrain, réaffectation des « engagements dormants » c'est à dire des crédits qui n'ont pu être engagés à l'issue d'un certain délai.

      Les économies porteront aussi sur le programme TACIS d'aide à la Russie et aux Etats indépendants de l'ex-URSS. Ce programme verra son montant quelque peu réduit à 458 millions d'euros, et le Conseil a voulu tenir compte des difficultés persistantes à utiliser les crédits de façon satisfaisante, ce qui a pour conséquence des arriérés importants. La Commission a d'ailleurs pris le parti de virer les crédits non engagés au profit de l'assistance humanitaire et de la formation de la société civile.

      L'on peut regretter enfin que les dotations pour l'aide alimentaire et humanitaire et la coopération avec les pays d'Amérique latine, et l'Asie doivent être réduites pour maintenir les crédits sous le plafond de la rubrique 4.

      En conclusion, votre Rapporteur estimera que cette rubrique risque fort d'être soumise à des tensions dès cette année, d'abord car les Etats membres voudront réagir au changement politique intervenu en Serbie.

      Il observe enfin que de nouvelles dépenses s'inscriront dans la rubrique 4, comme le financement du dispositif de réaction rapide (DDR) proposé en avril dernier par la Commission. Ce dispositif constitue l'un des éléments du plan d'action décidé au Conseil européen d'Helsinki pour la gestion civile des crises, en complément du plan d'action militaire. En fait, l'impossibilité de mobiliser rapidement des crédits pour des interventions civiles d'appui dans le domaine de la politique de sécurité et de défense avec les instruments financiers existants conduit à créer ce nouveau dispositif. Chaque intervention ne pourrait dépasser un montant de 12 millions d'euros, et ne durerait pas plus de neuf mois. Ce dispositif nouveau fait l'objet de négociations, mais on soulignera que s'il venait à se mettre en place, sa dotation de l'ordre de 30 ou 40 millions d'euros, serait aussi financée, selon la Commission, par redéploiement au sein de la rubrique 4.

      D - L'élargissement : une priorité maintenue mais des difficultés de mise en _uvre pour certaines aides

      Le Conseil a fait correspondre les crédits d'engagement de la rubrique 7 consacrée aux dépenses de préadhésion au plafond des perspectives financières.

      Les deux nouveaux règlements destinés à l'accompagnement des réformes dans les pays candidats sont entrés en vigueur en 2000 : il s'agit de l'instrument structurel ISPA et du règlement d'aide agricole SAPARD. Ce dernier instrument rencontre des difficultés de mise en _uvre, et aucun engagement ni paiement n'a encore pu réalisé par la Commission. Aussi le Conseil a t-il modéré la hausse des crédits de paiement, tout de même conséquents car ils augmentent de 10,9%.

      E - Poursuivre la réflexion sur l'efficacité de l'aide communautaire au développement

      L'année 2000 a été marquée par la renégociation de la convention de Lomé arrivée à échéance. Après une année de négociations, un nouvel accord de partenariat liant l'Union à soixante dix sept pays d'Afrique, de la Caraïbe et du Pacifique pour les vingt années à venir a été signé le 23 juin 2000 à Cotonou. Cet accord a l'ambition de remédier aux insuffisances de la coopération communautaire souvent critiquées par les observateurs.

      Sans décrire le contenu de cet accord, votre Rapporteur soulignera seulement qu'après de difficiles négociations, le partenariat a été ouvert aux acteurs de la société civile, qui seront impliqués dans la programmation de l'aide et dans le dialogue sur les politiques de développement. La programmation jouera un rôle plus important et surtout, elle sera révisée à intervalles réguliers pour adapter les ressources à l'évolution des besoins et aux performances des pays bénéficiaires.

      Les Quinze sont par ailleurs parvenus à un compromis, le 19 juillet dernier, sur le protocole financier annexé à l'accord de partenariat. Celui-ci fixe à 15,2 milliards d'euros le montant global des aides allouées par la Communauté aux Etats ACP. Ce montant comprend le 9ème Fonds européen de développement (FED) portant sur la période 2000-2007, qui s'élève à 13,5 milliards d'euros. Il comprend aussi une dotation de 1,7 milliard d'euros à la Banque européenne d'investissement. La contribution française au FED est la plus élevée : 3,3 milliards d'euros.

      Les retards à la mise en _uvre des actions financées par le FED sont connus : les reliquats correspondants aux programmes des 6ème, 7ème et 8ème FED atteignent près de dix milliards d'euros. La Cour des comptes européenne a demandé une clarification en ce qui concerne les « engagements dormants » et que soit envisagée l'application de pénalités de retard.

      Les nouveaux principes permettront-ils de résoudre ces difficultés ? On se félicitera en tout cas du fait que des innovations aient été apportées à la gestion du FED. La procédure écrite habituelle ne sera applicable qu'aux projets d'un financement supérieur à 8 millions, une procédure allégée sera applicable aux petits projets inférieurs à 2 millions, et un droit d'évocation sera ménagé aux Etats membres pour les projets de 2 à 8 millions. Tous les reliquats des fonds précédents seront transférés au 9ème FED et seront utilisés conformément aux conditions fixées dans le nouvel accord. A la demande de la France, une date limite sera fixée pour l'engagement des crédits.

      Enfin, la gestion du FED sur le terrain pourra être déléguée aux Etats membres lorsqu'ils ont des agences nationales d'exécution sur place. La France souhaitait depuis longtemps cette prise en compte de l'expérience des Etats qui mènent une aide bilatérale de longue date, afin de favoriser la complémentarité des actions et d'éviter le recours aux bureaux d'assistance technique.

      Votre Rapporteur ajoutera enfin que dans une nouvelle proposition intitulée « tout sauf les armes », la Commission propose dans un règlement de permettre l'entrée en franchise totale de droits de douane pour tous les produits importés des Pays les moins avancés. L'on doit espérer que les autres pays participant à l'effort en faveur du développement, tels les Etats-Unis ou le Canada, suivront cet exemple.

      Les réorientations qui ont été présentées étaient attendues depuis longtemps : il est souhaitable qu'elles soient mises en _uvre avec volontarisme et rapidité, pour mettre fin à des dysfonctionnements qui discréditent l'aide communautaire au développement alors que la Communauté et ses Etats membres fournissent ensemble 55 % de l'aide au développement dans le monde.

      Il est positif que la Commission ait entrepris une réflexion sur l'efficacité de ses programmes d'aide. Cette réflexion s'est concrétisée pour l'instant par une communication présentée le 26 avril dernier, dans laquelle la Commission donne la primauté à l'objectif de réduction de la pauvreté. Elle décide de se concentrer sur un nombre limité de domaines dans lesquels l'aide européenne est porteuse d'une valeur ajoutée particulière, comme par exemple le commerce, la coopération régionale, le renforcement des secteurs sociaux (santé et éducation), les transports et le renforcement des capacités institutionnelles. La Commission prend à nouveau des engagements pour simplifier et accélérer les procédures administratives.

      L'on doit espérer que ces engagements ne resteront pas lettre morte ; et l'on verra les suites qu'y donnera le Conseil « développement » lors de l'adoption de sa prochaine déclaration commune de politique générale, prévue en novembre prochain.

      III . QUELLES PRIORITÉS POUR LES POLITIQUES INTERNES ?

      La rubrique 3 des politiques internes de l'Union ne bénéficie que d'une très légère progression dans le projet de budget pour 2001. Elle s'élève à 6 milliards d'euros en crédits d'engagement et 5,7 milliards en crédits de paiement. Il restera une marge assez importante de 208 millions d'euros pour renforcer éventuellement des politiques jugées prioritaires.

      Le Conseil européen de Lisbonne, tenu les 23 et 24 mars 2000, a fixé pour l'Union un nouvel objectif qui s'ajoute à ceux qui sous-tendent les politiques internes « traditionnelles ». On rappellera les termes des conclusions adoptées par les Chefs d'Etat et de Gouvernement  : « L'Union s'est aujourd'hui fixé un nouvel objectif stratégique pour la décennie à venir : devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale ».

      Mais l'on soulignera que cette déclaration ne semble pas s'appuyer sur une stratégie de développement concertée et élaborée en associant les forces vives politiques, économiques et sociales des Etats membres. Elle ne semble pas être issue d'un mécanisme intellectuel de préparation des politiques de long terme, qui pourrait rechercher par exemple les éléments qui seraient facteurs de progrès pour l'Europe (faire le choix d'une politique plus ambitieuse de recherche-développement ou travailler à l'amélioration des systèmes d'éducation, par exemple.)

      Cette lacune conduit à souhaiter que l'Union se dote d'une procédure d'élaboration de stratégies au plan européen, qui permettrait d'articuler les efforts et les réflexions menés d'un pays à l'autre. Quelles seront par ailleurs les implications nouvelles des conclusions très ambitieuses du Conseil européen de Lisbonne ? Elles ne sont pas encore connues, la Commission devant proposer une méthode. Le plan d'action « e-europe » adopté par le Conseil prévoit un certain nombre d'actions à entreprendre pour accélérer l'implantation des technologies numériques en Europe.

      A - Une priorité maintenue en faveur de la recherche européenne

      La recherche reste la mieux dotée des politiques internes, avec plus de la moitié du budget de la rubrique, suivie par les réseaux transeuropéens.

      Le 5ème Programme cadre de recherche et développement est doté de crédits augmentés d'environ 8 %. Ses actions devront se regrouper autour de quatre thèmes tels « société de l'information conviviale » ou « croissance compétitive et durable ». On regrettera que le thème intitulé « énergie, environnement et développement durable » soit le moins doté financièrement.

      B - Les actions pour l'emploi

      Le programme en faveur des PME étant venu à échéance, la Commission a proposé un programme « pour l'entreprise et l'esprit d'entreprise », qui serait doté de 230 millions d'euros pour la période 2001-2005. Il devrait être adopté en décembre à la suite de la concertation des institutions. Par ailleurs, la ligne budgétaire « initiative emploi » dotée de 450 millions d'écus créée pour trois ans par le Parlement européen et le Conseil pour aider les PME à créer des emplois durables prend fin cette année. La question de la reconduction de ce programme se pose : le Parlement souhaite sa reconduction, et le Conseil quant à lui attend de prendre connaissance de l'évaluation des instruments d'aide aux entreprises demandé à la Commission afin de ne reconduire que les actions les plus efficaces.

      C - Un effort insuffisant en faveur des réseaux transeuropéens

      Les crédits alloués aux réseaux européens progressent légèrement : ils s'élèveront à 632 millions d'euros en 2001, dont 575 pour les transports, 21 pour l'énergie et 36 pour les télécom.

      Votre Rapporteur considère cependant que le projet de budget ne prend pas suffisamment en compte l'objectif d'établir un meilleur équilibre entre les transports routiers et ferroviaire, en contribuant à revitaliser le transport ferroviaire et à porter remède à la dégradation continue de ses parts de marché dans le transport de marchandises.

      Il est pourtant urgent, comme l'a souligné la résolution adoptée le 16 juin 2000 par l'Assemblée nationale, que les Etats membres développent une politique commune en vue de mettre en place de véritables réseaux transeuropéens de voyageurs et de marchandises. La récente baisse artificielle des prix des carburants a malheureusement eu pour effet de dissimuler cette urgence, ce qui est particulièrement regrettable car ces prix ne pourront que s'élever de nouveau à moyen terme. Aussi le retard qu'accuse l'Union dans la mise en place d'une telle politique ne pourra qu'être préjudiciable à tous. On sait par ailleurs que 22 % des émissions de carbone sont imputables au transport routier de marchandises : à défaut d'une action volontariste et rapide dans ce domaine, l'on sait déjà que les chances d'atteindre les réductions d'émissions de carbone conformes aux engagements pris lors de la Conférence de Kyoto sont inexistantes.

      La traduction budgétaire en faveur des projets ferroviaires est modique : une ligne budgétaire de 200 millions d'euros, prélevés sur les réseaux, a été ouverte par la Commission et devait être utilisée pour la réduction des goulets d'étranglement dans les transports. Votre Rapporteur estime que la mise en _uvre des directives adoptées ou en voie d'adoption dans ce secteur nécessite un accompagnement financier ou des incitations financières beaucoup plus importants. Il considère aussi qu'un emprunt communautaire destiné au financement de transports de voyageurs et de marchandises devrait être émis rapidement. La Présidence française fournit l'occasion de faire progresser ces projets : il faut la saisir absolument.

      CONCLUSION

      Les prochaines étapes de la procédure budgétaire conduiront le Parlement européen a examiner le projet de budget en première lecture lors de la session réunie du 23 au 27 octobre. Le Conseil de l'Union procédera à une deuxième lecture du projet à la fin du mois de novembre, et l'adoption définitive aura lieu en décembre par le Parlement.

      Le Gouvernement français, chargé de la présidence de l'Union, a annoncé sa volonté de mettre en _uvre une coopération étroite et constructive avec le Parlement européen. Les négociations devront en effet se poursuivre dans plusieurs domaines, notamment les mesures proposées par la Commission quant à la création de nouveaux postes, l'enveloppe en faveur des Balkans, les dotations respectives des différents programmes d'action extérieure.

      La commission des budgets proposera au Parlement d'utiliser à nouveau l'instrument de flexibilité de 200 millions d'euros pour dépasser le plafond des dépenses de politique extérieure. Ce « bonus » interviendrait pour compléter les financements de Meda, les dépenses d'administration civile au Kosovo et en Bosnie et pour mettre en place l'instrument de réaction rapide.

      Le Parlement semble par ailleurs renforcer ses exigences envers la Commission européenne : il suggère de mettre en réserve les crédits demandés pour la création de nouveaux postes en attendant que la Commission s'engage à rattraper les retards de paiement avant fin 2003, et à présenter au Parlement, avant toute initiative de politique extérieure, une estimation de son coût.

      L'accord interinstitutionnel de 1999 est probablement devenu un cadre trop rigide pour permettre à l'Union de répondre à l'ensemble des défis qui se sont imposés à elle sur le plan extérieur comme pour pouvoir mettre en _uvre les politiques communautaires dynamiques et prospectives que les citoyens attendent d'elle.

      Comme on l'a vu, les actions extérieures sollicitent le budget de l'Union. Il a pu être contenu l'an dernier sous le plafond des perspectives financières grâce à l'utilisation de l'instrument de flexibilité, qui devra certainement entrer en jeu cette année encore, car l'évolution de la situation politique en République fédérale de Yougoslavie appellera une réponse européenne, et il faut s'en féliciter.

      Les financements prévus au projet de budget pour les politiques internes souffrent d'une inadéquation avec les grandes ambitions et déclarations d'intention proclamées par les Chefs d'Etat et de Gouvernement, ainsi par exemple lors du Conseil européen de Lisbonne. Les crédits affectés à la recherche et aux politiques de l'emploi restent marginaux. Les crédits consacrés au développement des réseaux transeuropéens sont totalement insuffisants. Les engagements pris par l'Union européenne dans le cadre du Protocole de Kyoto risquent fort de ne pas être remplis : ils ne sont pas traduits en politiques lisibles et efficaces.

      Aussi ce cadre financier devra t-il évoluer prochainement, et votre Rapporteur a toujours été favorable à un budget plus ambitieux, donnant un rôle plus significatif à la rubrique des politiques internes et à celle des actions extérieures. Il est néanmoins conscient que l'Union doit d'abord achever la réorganisation de son outil principal qu'est la Commission européenne. Les problèmes d'effectifs doivent être résolus et l'efficacité comme la transparence des circuits financiers doivent être établis. Ensuite devra être envisagée la montée en puissance du budget communautaire.

      En conclusion, votre Rapporteur propose d'adopter le prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget communautaire, tout en regrettant la faiblesse de ce budget et son inaptitude à répondre aux grands enjeux de la politique extérieure de l'Union et au développement des politiques internes les plus indispensables.

      EXAMEN EN COMMISSION

      Au cours de sa réunion du mercredi 11 octobre 2000, la Commission a examiné pour avis l'article 28 du projet de loi de finances pour 2001 (évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes).

      Le Rapporteur a d'abord précisé que le projet de budget communautaire pour 2001 était le deuxième inscrit dans le cadre financier pluriannuel adopté par le Conseil européen réuni à Berlin les 24 et 25 mars 1999. Ce cadre résulte de l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999, par lequel les trois institutions de l'Union intervenant en matière budgétaire ont décidé une programmation sur sept ans, comportant un plafond pour les recettes de l'Union fixé à 1,27 % du PNB communautaire, et, corrélativement, un plafond pour les dépenses.

      Cette contrainte imposée aux exercices budgétaires suivants a été considérée comme souhaitable au regard des efforts de rigueur conduits par les Etats membres au plan national.

      Le projet de budget 2001 diffère peu du précédent. Il est essentiellement redistributif : 47 % des dépenses seront consacrées à la politique agricole commune, 34 % à la politique régionale, tandis que les politiques internes et les actions extérieures, limitées aux alentours de 5 % du budget, continueront de faire l'effet de parents pauvres. Pourtant, tant l'actualité internationale que les nouvelles missions attribuées à la construction européenne contribuent à solliciter amplement le budget des Quinze.

      L'Union mène aujourd'hui quatre grands desseins à la fois : réaliser l'élargissement, contribuer à la stabilisation dans les Balkans occidentaux, conduire un partenariat ambitieux avec les pays de la Méditerranée et, enfin, poursuivre son aide traditionnelle en direction des pays les plus pauvres. L'année dernière, le budget a pu être contenu dans le cadre financier pluriannuel au moyen de redéploiements et grâce à l'utilisation de l'instrument de flexibilité de 200 millions d'euros. Cet instrument devra certainement entrer en jeu cette année encore, notamment pour la raison que l'évolution de la situation politique en République fédérale de Yougoslavie appellera une réponse européenne, et il faut s'en féliciter.

      Le projet de budget traduit donc un immobilisme certain, qui correspond peut-être à l'immobilisme politique général que l'on peut constater en suivant le déroulement de la Conférence intergouvernementale.

      Le projet de budget adopté par le Conseil de l'Union le 20 juillet dernier s'établit à 95,8 milliards d'euros en crédits d'engagement et 92,5 milliards d'euros en crédits de paiement. Il traduit, par rapport au budget initial 2 000, une progression de 2,7 % pour la première catégorie de crédits et une progression de 3,5 % pour la seconde.

      La contribution française inscrite à l'article 28 du projet de loi de finances s'élève à 99,5 milliards de francs en prévision de prélèvement sur recettes, montant correspondant à 6,1 % des recettes fiscales nettes de notre pays.

      La France est un pays structurellement contributeur net, contribuant pour 16,8 % au financement du budget communautaire, et le deuxième contributeur en volume derrière l'Allemagne, qui finance 25% du budget communautaire. Le solde budgétaire calculé pour l'année 1998 place la France en position de cinquième contributeur net derrière l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l'Italie.

      Mais notre pays se situe en deuxième position des bénéficiaires des politiques communautaires, recevant 14,7% de l'ensemble des crédits derrière l'Espagne, qui en reçoit 15,2 % de ces crédits. La France devrait rester le premier bénéficiaire de la Politique agricole commune (PAC) réformée sur l'ensemble de la période 2000-2006, et le premier bénéficiaire de la politique de développement rural, recevant 17,5% de l'enveloppe consacrée à cette politique.

      Il serait souhaitable que la position de la France évolue : au lieu de s'accrocher au maintien de la PAC, politique de plus en plus coûteuse alors que ce secteur régresse en termes d'emploi, notre pays devrait proposer de nouvelles initiatives pour la faire évoluer, avant d'attendre qu'elle ne soit totalement remise en cause par d'autres pays. On sait par ailleurs qu'elle suscite des inquiétudes quant à l'environnement et à la sécurité alimentaire.

      Le Conseil a exprimé sa priorité à la reconstruction dans les Balkans occidentaux. L'an dernier, le financement de l'aide au Kosovo avait constitué une pierre d'achoppement lors de la discussion du budget 2000. Le problème avait été résolu par des redéploiements. Cette année encore, il existe une divergence de vue entre les institutions quant à l'enveloppe qui doit être affectée à cette région. Les propositions de la Commission n'ont pas été suivies, et le Conseil a décidé l'affectation d'une enveloppe de 614 millions d'euros en crédits d'engagement pour 2001, ce qui représente une augmentation de 30%, formellement, mais une stabilité si l'on considère que 672 millions d'euros ont été engagés en 2000 grâce au recours à l'instrument de flexibilité.

      Mme Marie-Hélène Aubert a souligné que la mise en _uvre de l'aide au Kosovo par l'Agence européenne pour la reconstruction avait été très efficace, et beaucoup plus rapide que dans tout autre programme communautaire.

      Mais elle a déploré que la priorité en faveur de cette région entraîne une diminution de toutes les autres actions extérieures d'environ 9%, ce qui est particulièrement regrettable en ce qui concerne la politique constructive que doit mener l'Union en direction des pays de la Méditerranée. Les retards et les lenteurs constatés dans la gestion des programmes Meda sont connus, et il faut souhaiter que les nouvelles procédures adoptées récemment, comme les efforts de réorganisation de la Commission européenne, puissent apporter une amélioration décisive. Néanmoins, ces défauts ne doivent pas être un prétexte pour diminuer les dotations des programmes.

      Enfin, le Rapporteur a évoqué les politiques internes. Elle a critiqué l'inadéquation des financements prévus au projet de budget avec les grandes ambitions et déclarations d'intention proclamées par les Chefs d'Etat et de Gouvernement, ou les autres représentants des Etats membres, lors du Conseil européen de Lisbonne par exemple. Les crédits affectés à la recherche et aux politiques de l'emploi restent marginaux.

      Les crédits consacrés au développement des réseaux transeuropéens sont totalement insuffisants. L'Union doit développer rapidement des réseaux ferroviaires répondant à une logique de complémentarité et d'intermodalité, et les efforts d'accompagnement financier sont loin d'avoir un impact décisif. L'Union a pris des engagements en vue de réduire ses émissions de gaz à effet de serre dans le cadre du Protocole de Kyoto : ces engagements, même s'ils sont faibles, vont plus loin que ceux pris par les Etats-Unis par exemple. Mais les Etats membres ne semblent pas avoir la volonté de traduire ces engagements en politiques lisibles et efficaces : une véritable politique des grands réseaux en constituerait une.

      En conclusion, le Rapporteur a proposé d'adopter le prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget communautaire, mais en déplorant dans le présent avis la faiblesse de ce budget et son inaptitude à répondre aux grands enjeux de la politique extérieure de l'Union et au développement des politiques internes les plus indispensables.

      M. Charles Ehrmann a rappelé que l'Allemagne et les Pays-Bas estimaient que la part du budget européen consacrée à la politique agricole commune, soit 47%, était trop élevée, ce qui pose problème à la France.

      Il a déploré que l'Union européenne se préoccupe plus de la situation dans les Balkans que de la montée de l'islamisme dans les pays méditerranéens. Il a souligné que pour l'Europe du Sud-Est, la liaison Lyon-Turin était d'une importance capitale et s'est demandé comment on pouvait élargir l'Union sans moyens financiers supplémentaires et sans procéder aux réformes nécessaires. Il s'est montré dubitatif sur l'intérêt porté par les Français à l'aide au développement.

      M. Jean-Yves Gateaud a estimé que les Français s'intéressaient à l'aide au développement et qu'ils en comprenaient les enjeux à long terme.

      M. Pierre Brana a partagé les craintes de Mme Marie-Hélène Aubert sur la politique d'aide au développement car, pour faire face à ses obligations, l'Union devra redéployer ces aides alors que la hausse du pétrole aggrave encore la situation des pays en voie de développement. L'aide apportée par l'Union européenne aux Balkans risque de se faire au détriment des pays du Sud.

      Il a souhaité que la faiblesse du budget ne nuise pas aux opérations de démantèlement des centrales nucléaires dangereuses des pays de l'Est, qui restent une menace permanente.

      M. Jean-Bernard Raimond a félicité le Rapporteur pour avoir insisté sur le fossé entre les moyens et les enjeux, qui sont immenses, car, depuis dix ans, le monde a changé dans un sens favorable malgré les crises. Ainsi, il y a dix ou onze ans, les centrales nucléaires potentiellement dangereuses existaient, mais on n'en parlait pas et l'on ne pouvait pas intervenir pour les sécuriser. L'évolution dans les Balkans entraîne des coûts pour l'Union mais elle facilitera la coopération dans de nombreux domaines.

      Le Rapporteur a souligné la nécessité impérative pour l'Union européenne d'amplifier massivement son aide au développement dans toutes ses dimensions afin d'éviter une déflagration générale. Même M. James Wolfensohn, le Directeur général de la Banque mondiale, ne cesse de dénoncer l'indifférence et l'irresponsabilité des Occidentaux face à la pauvreté et à la misère qui sévit dans de nombreuses régions du monde, et qui représente une menace que l'on ne veut pas prendre en considération.

      Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 28 du projet de loi de finances pour 2001.

      2626-I Avis de Mme Marie-Hélène Aubert (commission des finances) sur le projet de loi de finances 2001 : Affaires européennes

- Cliquer ici pour retourner au sommaire général

- Cliquez ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires

- Cliquez ici pour retourner à la liste des discussions budgétaires



© Assemblée nationale

« Community assistance for reconstruction, democratisation and stabilisation »

Rapport de la délégation ad hoc du Parlement européen au Kosovo, 6 juin 2000.

Rapport de M. Göran Färm sur la proposition de règlement CARDS, 5 septembre 2000.