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le 14 novembre 2000

N° 2624

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

    ONZIÈME LÉGISLATURE

    Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2000.

RAPPORT

FAIT

    AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1) SUR
    LE PROJET DE
    loi de finances pour 2001 (n°2585),

PAR M. DIDIER MIGAUD

Rapporteur Général

Député

--

ANNEXE N° 35


OUTRE-MER


DÉPARTEMENTS d'OUTRE-MER

Rapporteur spécial : M. François d'AUBERT

Député

____

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Lois de finances.

                      La commission des finances, de l'économie générale et du plan est composée de :  M. Henri Emmanuelli, président ; M. Didier Migaud, rapporteur général ; MM. Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Yves Tavernier, vice-présidents, MM. Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jégou, Michel Suchod, secrétaires ; MM.  Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Christian Bergelin, Éric Besson, Alain Bocquet, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Yves Cochet, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Arthur Dehaine, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, Maurice Ligot, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Alain Rodet, José Rossi, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Georges Tron, Jean Vila.

INTRODUCTION 7

I.- LA SITUATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIERE NE S'AMÉLIORE QUE TRÈS LENTEMENT 11

A.- DES ÉCONOMIES PEU DYNAMIQUES 11

1.- Les productions naturelles demeurent fragiles 11

    a) La banane : une nouvelle année de crise 11

    b) La filière canne - sucre - rhum : une bonne campagne 14

    c) La survie menacée des productions traditionnelles de Mayotte 16

    d) La pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon : des résultats globalement stables 17

2.- Le secteur du bâtiment et des travaux publics ne connaît pas de reprise significative 18

3.- L'évolution du tourisme est globalement positive mais irrégulière 19

B.- DES INDICATEURS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX SANS RÉELLE AMÉLIORATION 20

1.- L'évolution des prix ne pose pas de problème 20

2.- La croissance du chômage n'est toujours pas jugulée 21

3.- Les échanges commerciaux marquent une forte dépendance
vis-à-vis de la métropole
22

4.- Les départements d'outre-mer face à leurs voisins 23

C.- LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DES FINANCES LOCALES 25

1.- Les budgets des collectivités locales 25

    a) Des régions connaissant des situations contrastées 25

    b) Des collectivités territoriales toujours très endettées 27

    c) Des départements en situation financière très dégradée 29

    d) Des communes en difficultés récurrentes 33

2.- Les dotations globales 34

    a) La dotation globale de fonctionnement 34

    b) La dotation globale d'équipement 36

    c) La dotation générale de décentralisation 37

3.- Les subventions aux collectivités locales inscrites au budget de l'Outre-mer 39

    a) Les subventions de fonctionnement 39

    b) Les subventions d'investissement (chapitre 67-51) 41

D.- LES NOMBREUX SOUTIENS PUBLICS SPÉCIFIQUES 42

1.- Les subventions d'investissement 42

    a) Le Fonds d'investissement des départements d'outre-mer 42

    b) L'importance des contrats de plan pour les départements d'outre-mer 44

    c) Les infrastructures de la Guyane (chapitre 58-01) 47

3.- Les aides européennes aux départements d'outre-mer 48

    a) Des montants élevés pour des aides inégalement utilisées 48

    b) Une réforme destinée à favoriser une meilleure gestion 52

II.- UN BUDGET DE MISE EN _UVRE DU VOLET ÉCONOMIQUE ET SOCIAL
DE LA FUTURE LOI D'ORIENTATION QUI S'AVÉRE DÉCEVANT
57

A.- LE VOLET ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DE LA FUTURE LOI D'ORIENTATION POUR L'OUTRE-MER 57

B.- L'EMPLOI EST LA PRIORITÉ DE LA LOI D'ORIENTATION 59

1.- Le Fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer
et à Saint-Pierre-et-Miquelon financera les nouveaux dispositifs
59

2.- Bilan et perspectives pour 2001 61

    a) Les actions du Fonds : de forts contrastes entre les départements 61

    b) Les perspectives pour 2001 : le financement simultané d'une douzaine
    de dispositifs
    62

C.- LE REVENU MINIMUM D'INSERTION EST EN VOIE D'ALIGNEMENT
SUR CELUI DE LA MÉTROPOLE
63

1.- L'évolution non maîtrisée du nombre de bénéficiaires 63

2.- L'insertion des allocataires du revenu minimum d'insertion 64

    a) Vers la disparition du mécanisme de la créance de proratisation 65

    b) Le rôle des agences départementales d'insertion 66

    c) Une réforme enfin achevée, mais incomplète 67

3.- L'exception de Mayotte : les « chantiers de développement local » 68

D.- LE LOGEMENT, GRAND ABSENT DE LA LOI D'ORIENTATION, RESTE UNE PRIORITÉ AFFICHÉE 69

    a) Des crédits en forte augmentation apparente 70

    b) Une augmentation seulement destinée à compenser la réduction
    de la créance de proratisation
    71

E.- LA POLITIQUE SOCIALE ET CULTURELLE SE POURSUIT SANS LIGNE DIRECTRICE CLAIRE 72

1.- Des actions diversifiées 72

2.- L'insertion en métropole : l'agence nationale pour l'insertion
et la promotion des travailleurs d'outre-mer
74

    a) Les ressources 74

    b) Des actions aux résultats incertains 75

F.- LE SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ SUBSISTE 76

1.- Le service militaire adapté contribue à l'effort en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle 76

2.- Le financement 78

III.- DES PROBLÈMES GRAVES NÉGLIGÉS PAR LA LOI D'ORIENTATION ET PAR LE PRÉSENT BUDGET 79

A.- UNE JUSTICE IMPUISSANTE FACE AU DEVELOPPEMENT
DE LA DÉLINQUANCE ET DE L'INSÉCURITÉ OUTRE-MER
80

1.- Le développement continu du trafic de stupéfiants 80

    a) La présence toujours plus forte de stupéfiants 80

    b) La hausse inquiétante de la consommation de drogue 81

    c) Un trafic de stupéfiants difficile à combattre 81

2.- L'immigration clandestine nourrit la délinquance et l'insécurité 82

    a) Les Antilles sont de plus en plus fortement touchées 82

    b) La Guyane, malade de ses clandestins 84

    c) La Réunion commence à être concernée par ces problèmes 86

3.- La criminalité et la délinquance sont en forte hausse 87

    a) Une évolution générale inquiétante 87

    b) Des crimes et délits graves 87

4.- La justice s'avère impuissante 88

    a) L'intolérable état des prisons ultramarines 88

    b) Les dysfonctionnements de la justice en Guyane 89

B.- DES DÉPARTEMENTS MINÉS PAR DES SCANDALES FINANCIERS 91

1.- La mystérieuse disparition du fonds de garantie de la Société
de développement régional Antilles-Guyane
91

2.- La mauvaise gestion de l'office départemental de tourisme
de la Guadeloupe
93

3.- La mise en cause des dirigeants du Crédit Martiniquais dans sa débâcle financière 94

C.- DES SITUATIONS FISCALES DÉROGATOIRES QUI OTENT TOUTE CRÉDIBILITÉ À LA FRANCE DANS SA LUTTE CONTRE LES PARADIS FISCAUX 95

1.- Une fiscalité largement dérogatoire, au coût exorbitant 95

2.- La question de l'avenir de la défiscalisation sur le point d'être tranchée sans grand changement 97

    a) Un dispositif coûteux à l'efficacité incertaine qui a besoin d'être remplacé 97

    b) Vers un nouveau dispositif d'aide à l'investissement outre-mer 98

3.- La situation fiscale très exceptionnelle des îles du Nord de la Guadeloupe 101

    a) Un régime fiscal très particulier 101

    b) Des préconisations qui visent à maintenir une fiscalité allégée 103

EXAMEN EN COMMISSION 105

INTRODUCTION

Le projet de loi de finances pour 2001 fixe le budget du secrétariat d'État à l'Outre-mer à 6.815 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, ce qui représente une hausse de près de 6,94 % par rapport à la loi de finances pour 2000, après une hausse de 13,8 % entre 1999 et 2000. Le budget de l'Outre-mer retrouve ainsi, en apparence, le rythme de progression qui était le sien avant 2000 : entre les lois de finances pour 1998 et pour 1999, il avait crû de 7 %.

Il faut néanmoins nuancer la progression apparente de la dotation proposée pour 2001 : elle intègre, en effet, une série de transferts entre sections. Sur le titre III, plusieurs transferts d'emplois et de cotisations sociales conduisent à un solde de 3,295 millions de francs au profit du budget du secrétariat d'État à l'Outre-mer ; sur le titre IV, le solde atteint 45,32 millions de francs, provenant pour l'essentiel du transfert depuis le ministère de l'Éducation nationale de la dotation de construction des collèges mise en place dans le cadre de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie. Les transferts atteignent donc plus de 48,6 millions de francs, ce qui réduit l'augmentation des crédits entre 2000 et 2001 à 6,17 %. Cette hausse hors transfert s'avère supérieure à celle opérée en 2000, qui n'était que de 1,76 % à structure constante entre 1999 et 2000.

Les autorisations de programme connaissent une progression très forte de 21,24 % entre le projet de loi de finances pour 2001 et la loi de finances pour 2000. En revanche, les crédits de paiement correspondant enregistrent une baisse de 0,82 %, ce qui est paradoxal.

L'état récapitulatif de l'effort budgétaire consacré aux départements d'outre-mer (document annexé au projet de loi de finances, conformément à l'article 85 de la loi de finances pour 1969) évalue à près de 50.115 millions de francs de dépenses ordinaires et crédits de paiement le total des crédits budgétaires nationaux qui seront consacrés à l'Outre-mer en 2001, en hausse de près de 9,6 %. Seuls 11 % transitent par le budget de l'Outre-mer, le plus gros contributeur étant le ministère de l'Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie, qui apporte 29 % du total.

L'examen du projet de budget de l'Outre-mer pour 2000 se limite ici aux départements d'outre-mer et aux deux collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette analyse est donc centrée sur les crédits budgétaires qui leur sont directement consacrés. La présentation du budget de l'Outre-mer ne permet pas de connaître exactement la part des crédits consacrée aux DOM : si le partage est impossible pour ce qui est relatif à l'administration centrale, il est souvent malaisé pour les autres dotations, dans la mesure où certains articles sont communs aux DOM et aux TOM : il serait certainement facile pour le secrétariat d'État à l'Outre-mer et pour le ministère des Finances de modifier la présentation des crédits en scindant en deux les dotations afin de distinguer clairement la part revenant aux DOM et aux collectivités territoriales d'une part, et celle revenant aux territoires et pays d'outre-mer d'autre part. Une autre possibilité consisterait à constituer un agrégat pour les uns, un second pour les autres.

L'état récapitulatif de l'effort budgétaire fait apparaître une dépense totale du secrétariat d'État à l'Outre-mer pour les DOM et les collectivités territoriales de 5.431 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement pour 2001, contre 4.950 millions de francs en 2000, soit une hausse de 9,7 %, plus forte que la progression de l'ensemble des crédits consacrés aux DOM et aux TOM. Surtout, les autorisations de programme devraient passer de 1.339 millions de francs en 2000 à 1.715 millions de francs pour 2001, soit une progression de 28 %. L'accent est donc mis sur l'investissement, ce qui est logique alors que la loi d'orientation pour l'outre-mer va bientôt entrer en vigueur et que les contrats de plan sont sur le point d'être signés.

Le budget des DOM pour 2001 se place dans le cadre dessiné par ces deux engagements : loi d'orientation d'une part, nouveaux contrats de plan d'autre part. La première se traduit par un financement spécifique de 325 millions de francs, dont 290 millions de francs sur le Fonds pour l'emploi dans les DOM (FEDOM). Elle renouvelle donc la place de l'emploi comme priorité du budget. Les contrats de plan entraînent l'augmentation des dotations du Fonds d'investissement dans les DOM (FIDOM), de 55 % en autorisations de programme et 15 % en crédits de paiement. Enfin, en marge de ces deux engagements, l'effort est poursuivi en faveur de ce qui est censé favoriser l'insertion : le service militaire adapté, les crédits consacrés à la culture et l'action sociale et la politique du logement.

La priorité en faveur de l'emploi et de l'insertion, qui est soulignée depuis plusieurs années par le secrétariat d'État à l'Outre-mer, s'impose comme une évidence lorsque l'on connaît la situation économique et sociale des DOM. Il s'avère en effet que ces derniers ne semblent guère tirer partie de l'amélioration de la conjoncture en France et dans le monde.

Pourtant, les années 1999 et 2000 ont plus été marquées par les débats institutionnels que par le souci de relancer l'économie. Le Gouvernement a tendance à croire que transférer quelques pouvoirs supplémentaires aux élus locaux et mettre en place une nouvelle « assemblée » les réunissant aidera les Français d'outre-mer à se sentir mieux et à retrouver un dynamisme économique et social. Le faible intérêt que les domiens ont témoigné à ces projets de réforme et les vives oppositions qu'ils ont déclenchées parmi leurs représentants ont montré à quel point cette analyse était fausse.

Ainsi, le volet institutionnel du projet de loi d'orientation finalement a été mis au second plan, sans être pour autant abandonné malgré les fortes pressions en ce sens, tandis que les mesures en faveur de l'activité économique étaient étoffées. Le projet devrait être définitivement adopté avant la fin de l'année et entrer en vigueur au tout début de l'année 2001. Il ne faut pas en attendre de résultats miraculeux.

En effet, malgré la nouvelle augmentation importante des crédits du secrétariat d'État à l'Outre-mer, la volonté politique ne semble pas à la hauteur des enjeux. Aussi, si le présent rapport est avant tout budgétaire, il est impossible de ne pas y aborder l'ensemble des maux qui gangrènent les DOM, sinon d'une manière exhaustive, du moins en soulignant les questions les plus brûlantes que le loi d'orientation laisse de côté.

La présentation de la situation économique et sociale des DOM est moins noire que celle de l'année dernière, notamment grâce à des conditions climatiques plus favorables, mais elle est loin d'être rose : le chômage ne cesse de progresser, tout comme le nombre de RMIstes, les actes de violence se multiplient.

Certes, les dotations budgétaires progressent et les efforts accomplis par l'ensemble de la collectivité nationale au profit des DOM, complétés par les interventions communautaires, sont énormes, mais bien des dispositifs sont, sinon tout à fait contestables, du moins clairement perfectibles et ne donnent pas les résultats attendus.

A côté de cela, les DOM souffrent de manques de moyens : l'immigration clandestine, le trafic de drogue, l'insécurité s'y développent sans que l'État soit en mesure de les combattre et alors que la justice n'a pas les moyens d'agir efficacement. Ils jouent pourtant un rôle certain dans l'approfondissement du malaise et l'exacerbation des tensions qui agitent les DOM.

Par ailleurs, la loi de la République s'applique de manière plus nuancée que la Constitution ne le prévoit. Bien des normes théoriquement en vigueur dans les DOM n'y sont pas respectées, qu'il s'agisse de la loi fiscale à Saint-Martin ou des règles des finances publiques, bafouées par de nombreux scandales. C'est l'ensemble de ces problèmes, au-delà de celui, réel, du chômage et de l'exclusion, que votre Rapporteur spécial souhaite voir pris en compte.

Présentation synthétique des crédits des départements
et collectivités territoriales d'outre-mer pour 2001

      Le projet de loi de finances pour 2001 fixe le budget du secrétariat d'État à l'Outre-mer à 6.815 millions de francs (1.038,94 millions d'euros) en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une hausse de 6,94 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2000, et de 6,17 % à structure constante.

      Cette progression est plus marquée pour les dépenses de fonctionnement et les interventions publiques que pour les crédits de paiement : les premières augmentent de 9,65 % (les dépenses de personnel progressant de 3,44 %), quand les seconds diminuent de 0,82 %. En revanche, les autorisations de programme enregistrent une hausse de 21,24 %, à 2.242,9 millions de francs (341,93 millions d'euros).

      Ce projet de budget est marqué par la mise en place de la nouvelle génération de contrats de plan État-régions et par l'entrée en vigueur de la loi d'orientation pour l'outre-mer.

      La mise en _uvre de la nouvelle génération des contrats de plan dans les DOM, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte est inscrite sur le Fonds d'investissement dans les départements d'outre-mer (FIDOM) et sur le chapitre consacré aux infrastructures de la Guyane. De manière globale, la dotation du FIDOM est portée à 340,5 millions de francs (51,91 millions d'euros) en autorisations de programme (+ 55 %) et 250,15 millions de francs (38,14 millions d'euros) en crédits de paiement (+ 15 %).

      La loi d'orientation pour l'outre-mer se traduit par une dotation supplémentaire de 325 millions de francs (49,55 millions d'euros), dont 290 millions de francs (44,21 millions d'euros) sur le Fonds pour l'emploi dans les DOM (FEDOM), destinés au financement de projets initiatives jeunes, de l'allocation de retour à l'activité, de la prime à la création d'emploi, du congès-solidarité et de la compensation de la baisse de la créance de proratisation consécutive de l'alignement progressif du revenu minimum d'insertion sur son niveau métropolitain. Les autres dispositifs en faveur de l'emploi sont par ailleurs poursuivis, si bien que le FEDOM voit sa dotation augmenter de 25,6 %.

      Les autres politiques visant à favoriser l'insertion sont maintenues et bénéficient d'un effort supplémentaire : service militaire adapté (pour les DOM, suppression de 790 postes d'appelés et création de 774 postes de volontaires), logement (la diminution de la créance de proratisation conduit à doter la ligne budgétaire unique de 250 millions de francs (38,11 millions d'euros) supplémentaires) et action culturelle, sociale et de coopération (20 millions de francs (3,05 millions d'euros) doteront les trois fonds de coopération régionale mis en place par la loi d'orientation).

      Outre la transformation de 56 emplois, le projet de budget prévoit la création de douze emplois pour les préfectures de la Réunion et de la Guyane et huit postes pour renforcer certains services des départements.

I.- LA SITUATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE NE S'AMÉLIORE QUE TRÈS LENTEMENT

Dans un contexte marqué par la reprise de l'économie métropolitaine, les économies des DOM restent peu diversifiées et marquées par un chômage très important. Cette situation économique défavorable se reflète dans la situation des finances de nombreuses collectivités locales.

Si les économies des départements et des collectivités territoriales d'outre-mer sont structurellement peu dynamiques car reposant sur des productions naturelles très sensibles aux conditions climatiques et aux aléas de la demande internationale et dépendant étroitement des importations venues de métropole, elles ne sont pas pour autant imperméables à l'amélioration de la conjoncture européenne et mondiale.

Pourtant, l'année 1999 n'a pas été marquée par une embellie aussi importante qu'on aurait pu l'espérer : la filière canne-sucre-rhum a connu une excellente campagne, le tourisme progresse globalement, mais le chômage ne diminue pas et le nombre d'allocataires du RMI continue à croître. Les difficultés structurelles sont toujours dominantes.

    A.- DES ÉCONOMIES PEU DYNAMIQUES

      1.- Les productions naturelles demeurent fragiles

En 1999, les différentes productions agricoles ont eu des résultats contrastés, mais globalement meilleurs que ceux de 1998, qui étaient particulièrement décevants pour toutes les filières.

      a) La banane : une nouvelle année de crise

·   Une situation conjoncturelle délicate

Le 20 juin 1997 est née l'Association des planteurs de banane des Antilles qui fédère les quatre groupements martiniquais et les deux groupements guadeloupéens qui défendent les intérêts des planteurs. Cette association a pour objet leur défense auprès des pouvoirs publics nationaux et européens. Cette action est relayée auprès des instances communautaires par EURODOM.

En Guadeloupe, alors que la campagne de 1997 avait été prometteuse, le cyclone Georges qui a détruit 85 % de la bananeraie en septembre 1998 a anéanti les efforts des planteurs, déjà confrontés à la sécheresse du premier semestre et à de multiples conflits sociaux pénalisant l'expédition des bananes. En novembre 1999, c'est le cyclone Lenny qui a entraîné une dégradation de la qualité des produits commercialisés au début de l'année 2000. L'année 1999 a finalement été mitigée : les exportations sont en hausse de 6 % par rapport à 1998 mais elles restent très inférieures à celles de 1997. 93 % sont exportés vers la métropole, le solde vers l'Italie.

En Martinique, les surfaces consacrées à la culture de la banane augmentent régulièrement, notamment grâce à la nouvelle Organisation commune de marché (OCM) de 1993. Comme en Guadeloupe, les exportations ont progressé en 1999, après la chute enregistrée en 1998, mais sans retrouver leur niveau de 1997. Cette situation est la conséquence de la grève des ouvriers de la banane et du blocage du port de Fort-de-France entre le 24 novembre 1998 et le 12 janvier 1999, qui ont provoqué une contraction des exportations au premier trimestre 1999.

Ces difficultés ont des conséquences particulièrement graves dans la mesure où on estime à 30.000, en Guadeloupe et en Martinique, le nombre d'emplois dépendants du secteur de la banane, qui fournit une grande partie des recettes d'exportation de ces deux régions. Le tableau ci-après récapitule les exportations de bananes de la Martinique et de la Guadeloupe entre 1995 et 1999 :

EXPORTATIONS DE BANANES DE GUADELOUPE ET DE MARTINIQUE

(en tonnes)

 

1995

1996

1997

1998

1999

Martinique

193.865

246.415

280.459

243.363

265.524

Guadeloupe

63.573

60.249

97.601

78.658

83.508

Source : Rapport annuel de l'IEDOM pour 1999.

Afin de pérenniser la culture de la banane, la Guadeloupe a lancé un certain nombre de chantiers : mise en place du groupement d'intérêt économique Agroservice pour l'encadrement technique, préfinancement de l'aide compensatoire, mise en conformité des groupements de producteurs avec les règlements européens et l'irrigation de la zone bananière. Mais l'avenir demeure incertain, toujours menacé par un cyclone ou un conflit social et subordonné au maintien de l'organisation commune du marché de la banane, de ses contingents par origine et de son aide compensatoire.

·   La « guerre de la banane » ne connaît pas de cessez-le-feu

Or le devenir de cet OCM est profondément remis en cause.

L'Union européenne est le premier consommateur mondial de bananes. Depuis la signature du Traité de Rome, le marché communautaire de la banane fait l'objet de dissensions entre les États membres. Certains, comme l'Allemagne, souhaitent consommer des bananes à moindre prix. D'autres, comme la France, veulent garantir à leurs producteurs des DOM un niveau de vie suffisant et maintenir des liens privilégiés avec certains pays producteurs d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP).

Mais la crise s'est intensifiée depuis 1997, conduisant à une véritable « guerre de la banane » qui oppose l'Union européenne aux États-Unis.

Le règlement CEE n° 404/93 a mis en place une Organisation commune du marché de la banane (dite « OCM-banane »). Le schéma est entré en vigueur le 1er juillet 1993 pour une durée de dix ans. Le volet interne de ce règlement fixe des normes communes de qualité et un mécanisme d'aides à la production prévoyant une aide compensatoire à la perte de recettes, dans la limite d'un quota global de 854.000 tonnes. Le volet externe fixe des seuils d'importation et des contingents tarifaires sur les « bananes dollars ».

Certains pays producteurs ont alors saisi le GATT. L'organe d'appel de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), le 25 septembre 1997, n'a pas remis pas en cause les fondements de l'OCM-banane, mais en a invalidé certaines dispositions, notamment le régime d'attribution automatique d'une partie des licences d'importation de bananes provenant des pays tiers (« bananes dollars ») aux producteurs communautaires - les licences B. Cette condamnation imposait certaines modifications, la réforme du marché de la banane devant entrer en vigueur le 1er janvier 1999.

Le « marathon agricole » du Conseil agricole européen de juin 1998 a finalement donné lieu à un accord entre les quinze ministres de l'agriculture. Le nouveau système ouvre davantage le marché européen aux « bananes dollars ». En compensation, les planteurs originaires des Antilles, de Madère et des Canaries obtiennent une revalorisation de 8 % du plafond de référence servant à calculer les subventions européennes. Cette revalorisation était pour la France une condition sine qua non de son accord, les professionnels de la banane réclamant quant à eux une hausse de 20 %.

Lors de l'été 1998, les États-Unis ont fait part de leur souhait de rouvrir le dossier devant l'OMC, affirmant que la réforme était discriminatoire à l'égard des bananes d'Amérique latine exportées par les sociétés américaines, à un prix inférieur à celui des bananes ACP. De possibles mesures de rétorsion américaines ont été officiellement évoquées. L'Europe a alors supprimé les licences d'importation de « bananes dollar » dont disposaient les groupements des bananiers communautaires.

En avril 1999, l'OMC a condamné à nouveau la Communauté et lui a imposé des sanctions au profit des États-Unis d'un montant de 77 millions d'euros. Ces derniers ont quant à eux dressé une liste de produits européens faisant l'objet de sanctions douanières. Victimes de ces sanctions, plusieurs entreprises européennes ont décidé d'attaquer la Commission européenne au motif que cette dernière tarde à trouver une issue à ce conflit, toutes les propositions de solutions consensuelles ayant échoué. Il devient donc urgent d'élaborer une solution acceptable par tous : d'elle dépendent à la fois l'avenir des planteurs antillais et la mise en cause de la responsabilité de la Commission.

Dans ce contexte, à l'automne 1999, les producteurs de bananes antillais ont fait appel à l'aide d'urgence du Gouvernement afin de pérenniser leur production malgré les maux qui les accablent : outre les attaques à répétition contre l'OCM-banane et les concessions successives faites aux Américains, ils évoquent les catastrophes naturelles, le surapprovisionnement du marche et les insuffisances du cadre financier. En visite aux Antilles, le Premier ministre a annoncé un « plan d'urgence pour la banane » comprenant 50 millions de francs de subventions, un dispositif d'avances de 120 millions de francs et un mécanisme d'allégement de la dette. Si ces dispositions peuvent aider temporairement les producteurs, et détendre un peu la situation sociale, elles ne sauraient permettre le maintien durable d'une production qui souffre de problèmes évidents de compétitivité.

Depuis, le mécanisme d'aide compensatoire a été amélioré, les échéances du prêt de trésorerie de 43 millions de francs accordé par l'ODEADOM début 1997 ont été reportées et la moitié a été transformée en subvention, les exploitations ont reçu 37 millions de francs comme aide au désendettement et 9,88 millions de francs ont financé un plan de relance de la bananeraie guadeloupéenne. Il ne semble pas, à ce jour, que ces mesures aient eu des résultats très probants.

      b) La filière canne - sucre - rhum : une bonne campagne

La culture de la canne à sucre joue un rôle important dans les économies des DOM. C'est la deuxième activité agricole et la deuxième source de devises pour la Guadeloupe et la Martinique, où le secteur emploie 2.400 personnes.

LA FILIÈRE CANNE - SUCRE - RHUM (1998-1999)

(en milliers de tonnes ou hectolitres d'alcool pur)

 

1998

1999

Canne

   

Guadeloupe

431,2

713,5

Guyane

6,2

(nd)

Martinique

188,7

204,3

Réunion

1.676

1.938

Sucre

   

Guadeloupe

38,3

65,2

Martinique

6,5

6,3

Réunion

180

216

Rhum

   

Guadeloupe

62.679

82.428

Guyane

2.753

2.843

Martinique

68.716

79.485

Réunion

68.169

74.350

Source : Rapport annuel de l'IEDOM pour 1999.

En Martinique, la canne à sucre est destinée à la production directe de rhum à partir du vesou et non pas à la fabrication de sucre. Après une forte régression au cours des trois dernières décennies, les surfaces cultivées restent stables. La campagne 1999 a été caractérisée par des conditions climatiques relativement favorables, qui font suite à deux années de sécheresse : la production a augmenté de 8 %. L'industrie du rhum reste rentable et bien intégrée au marché national et régional. L'attribution au rhum agricole de la Martinique d'un label d'appellation d'origine contrôlée, depuis novembre 1997, a eu un rôle bénéfique. La production 1999 est en progression de près de 16 % par rapport au niveau de 1998 et atteint 20 % pour le rhum agricole. Les distillateurs cherchent en effet à développer des produits à haute valeur ajoutée. Les ventes ont augmenté de 6 %.

En Guadeloupe, après une décennie particulièrement difficile sur le plan climatique, la récolte de 1999 a été bonne. La récolte de cannes a enregistré une hausse de 65 % par rapport à 1998, où la campagne avait été très mauvaise. L'année a été marquée par une progression des surfaces plantées de cannes dans le Nord qui a connu des difficultés avec la banane. La production de rhum est en hausse 31 %, la commercialisation de seulement 1 %, tandis que les exportations reculent de 1 %.

À la Réunion, la canne à sucre demeure la culture dominante, bien que la surface agricole consacrée à cette culture diminue. La campagne 1999 est l'une des meilleures de la décennie : le volume de canne est en hausse de 15,6 %, ce qui représente la plus forte progression depuis 1982. Cette augmentation a été rendue possible par la sauvegarde des terres agricoles et la mise en culture de terres en friche. La production de sucre a progressé de près de 20 % La Réunion fabrique également un rhum (rhum agricole et rhum industriel) qu'elle exporte : la commercialisation a augmenté de 9 %, mais les exportations sont en recul de 9 % et la consommation locale a diminué de 16 %.

Tant la culture et l'exploitation de la canne que le produit final (rhum) bénéficient d'aides importantes, non seulement dans le cadre national, mais aussi dans le cadre communautaire. Le prix de la canne comprend une part industrielle (appelée « part usine ») et une part payée aux planteurs par l'État, fonctionnant comme une garantie de prix. Une « aide au complément de prix » peut s'y ajouter pour les petits et moyens planteurs. Les rhums traditionnels vendus en France sous contingent bénéficient d'une protection fiscale ; ils ne donnent lieu au paiement de droits d'accises qu'à un taux minoré, dans la limite d'un contingent. La France a obtenu, dans le cadre communautaire, l'autorisation d'appliquer un taux d'accises réduit de 50 % au maximum à un volume annuel de 90.000 hectolitres d'alcool pur de rhum traditionnel jusqu'en 2002. Des négociations ont d'ores et déjà commencé pour trouver un nouvel accord fiscal pour l'après 2002.

      c) La survie menacée des productions traditionnelles de Mayotte

Les cultures d'exportation sont de deux ordres : l'ylang-ylang et la vanille. Selon le rapport 1998 de l'IEDOM, les jeunes délaissent ces « cultures de rente » ; elles représentent pourtant un atout économique certain qui pourrait être étendu à d'autres cultures telles que les épices et les plantes aromatiques.

      · L'ylang-ylang

C'est un arbre de la famille des annonacées dont les fleurs jaunes donnent, après distillation, un produit très apprécié de l'industrie de la parfumerie. La production de cette plante a constitué, en 1999, 91 % des recettes d'exportation de la collectivité, contre 78 % en 1998. Plusieurs problèmes se posent à la filière : marché offrant peu de débouchés, coût élevé de la production, vieillissement des plantations et des techniques de préparation, concurrence des produits de synthèse. L'ylang-ylang a connu un tassement de ses ventes et les stocks invendus se sont amplifiés depuis quelques années. En 1998, les exportations ont connu une contraction de 20 % en volume et 28 % et les prix ont chuté de 10 %. L'année 1999 n'a pas été marquée par un réel redressement : si les exportations en valeur ont crû de 13 % et le prix moyen pondéré de 19 %, la quantité exportée continue de diminuer de 5 %.

Face à la crise que traverse le secteur et à l'augmentation des stocks d'invendus, la collectivité territoriale a décidé depuis 1996 de racheter les stocks en confiant cette mission à la Gestion des coopératives agricoles de Mayotte (GECOPAM). Elle a dû procéder à de nouveaux achats en cours d'année 1998 et en 1999, qui maintiennent ses stocks à un niveau élevé. Ces opérations de rachat n'empêchent pas le recul de l'intérêt des producteurs pour ce type de cultures : ils se tournent progressivement vers les cultures vivrières.

      · La vanille

C'est la seconde culture d'exportation de la collectivité, représentant 6,4 % des recettes d'exportations. Le marché mondial de la vanille noire se monte à 2.000 tonnes et il est dominé à 85 % par Madagascar et l'Indonésie, qui bénéficient de faibles coûts de main d'_uvre. Là aussi, les cours mondiaux chutent. Entre 1998 et 1999, les exportations ont chuté de 49 % en volume, de 62 % en valeur, tandis que le prix au kilo a perdu 25 %.

La situation de cette filière est de plus en plus préoccupante : la coopérative en charge de la collecte et de la commercialisation de la vanille noire a connu d'importantes difficultés financières, qui ont nécessité l'intervention de la Collectivité en 1998 et 1999. L'écoulement des stocks en 1999 n'a pu se faire que par la baisse drastique des prix. L'année 2000 s'annonce difficile puisqu'il faudra attendre un an avant que la prochaine récolte ne soit commercialisable.

      d) La pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon : des résultats globalement stables

Ce secteur indispensable à l'équilibre économique de la collectivité se compose de la pêche artisanale et de la pêche industrielle.

L'importance de la pêche artisanale (moules, crabes, oursins...) reste relativement marginale en termes d'emplois et de tonnage pêché mais elle croît d'année en année : 27 bateaux ont pris 1.672 tonnes de poissons en 1999, soit une production multipliée par cinq depuis 1996.

La pêche industrielle est une activité plus importante mais soumise à des conditions d'exercice parfois handicapantes (quotas, dates d'ouverture de la saison, conditions météorologiques éprouvantes...). En 1999, les produits de la pêche industrielle s'établissaient à 3.093 tonnes, résultat similaire à celui de 1998. Au cours du dernier trimestre 1999, les tonnages réalisés par les armements canadiens ont représenté près de 55 % du tonnage annuel. La dépendance de certaines entreprises face aux navires canadiens demeure inchangée.

      2.- Le secteur du bâtiment et des travaux publics ne connaît pas de reprise significative

Le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) occupe une place importante en terme d'emplois et de richesse produite au sein des départements d'outre-mer. En 1999, sa situation varie selon les départements, essentiellement en fonction de l'importance des commandes publiques, mais il ne connaît nulle part une reprise très forte.

Alors que 9 % des actifs martiniquais occupés travaillent dans le BTP, les résultats du secteur en 1999 sont très contrastés, l'activité étant restée stoppée au premier trimestre à cause du blocage du port. La commande publique, soutenue, stimule le secteur par de nombreux chantiers : terminal conteneur de la Pointe des Grives, palais de Justice de Fort-de-France, nouveau collège, projets de lycées... Depuis septembre 1999, la réduction à 2,1 % du taux de taxe sur la valeur ajoutée sur les travaux d'entretien des logements de plus de deux ans constitue un élément favorable à l'activité du secteur.

Le secteur du BTP, en Guadeloupe, a traversé des années difficiles à cause de la baisse de la demande publique. Après la légère augmentation observée tout au long de l'année 1998 et ponctuée par une dégradation au premier semestre 1999, les entreprises ont vu leur niveau d'activité s'améliorer sensiblement au cours de l'année, grâce à une demande soutenue en logements.

En Guyane, les commandes publiques ont relancé l'activité du bâtiment et des travaux publics depuis 1998. La construction de logements progresse de 15 % entre 1998 et 1999 tandis que les perspectives de travaux publics sont favorables, les routes devant être rénovées après les pluies importantes du début de l'année 2000.

A la Réunion, la situation du bâtiment s'est affichée en retrait dans l'ensemble, par rapport à 1998, malgré un niveau record concernant le logement social. Mais le nombre de logement en chantier en fin de mois a continué à baisser en 1999, la raison étant la baisse des programmations des années précédentes. L'activité a également été modérée dans le secteur des constructions publiques et des investissements routiers, les entreprises ayant subi de nombreux retards ou reports d'opérations. Par contre, l'activité dans les secteurs de la construction de logements privés et du génie civil a été soutenue.

      3.- L'évolution du tourisme est globalement positive mais irrégulière

Comme en 1998, l'activité touristique continue sa progression et constitue le principal moteur d'un développement économique endogène. Cette activité relativement récente au sein des DOM est vite devenue un secteur indispensable à l'équilibre de ces territoires. Il convient de l'encourager et de ne pas entraver son développement.

En Guadeloupe, on estime à 20.000 le nombre d'emplois directs et indirects concernés par l'activité touristique. A la Réunion, le nombre d'emplois induits par le tourisme est estimé à 15.400. Cette activité représente 7 % du PIB marchand de la Martinique.

Le développement du tourisme est encouragé par la baisse des tarifs aériens, les mécanismes de défiscalisation des investissements réalisés outre-mer et la croissance des capacités hôtelières.

Le tourisme est l'une des principales activités économiques de la Martinique, avec près de 1,73 milliard de francs de recettes directes en 1999, soit 2,5 % de plus qu'en 1998. Ce constat globalement favorable dissimule cependant une situation plus nuancée, en raison notamment d'événements ayant contribué à ternir l'image de cette destination en 1999 : conflits sociaux, annonce du départ en 2000 d'un armateur de croisière au profit de Sainte-Lucie. De manière diffuse mais récurrente, la destination Martinique a aussi fait l'objet de critiques, relatives par exemple à la qualité de l'accueil et du service. Afin d'y mettre un terme, une enveloppe de 810 millions de francs a été dégagée pour la période 2000-2006, financée à parité par les opérateurs privés et par les pouvoirs publics, dans le cadre des contrats de plan État-régions. Elle sera utilisée notamment pour améliorer les structures d'accueil et la formation du personnel.

En Guadeloupe, l'activité reste soutenue : elle a crû de 140 % en 12 ans. On constate une érosion de la durée moyenne des séjours et la part croissante prise par les touristes nord-américains. La fréquentation hôtelière aurait augmenté d'environ 10 % entre 1998 et 1999, pour l'échantillon d'hôtels pris en compte par l'office départemental du tourisme. L'année a en revanche été médiocre pour le tourisme de croisière : le nombre de navires en escale continuant à baisser depuis plusieurs années (- 42 % entre 1998 et 1999), tout comme celui des passagers accueillis, même si c'est dans une moindre proportion (- 9 %).

L'activité touristique rencontre en Guadeloupe des difficultés de développement liées à la très vive concurrence qui règne entre hôteliers - ce qui nuit à la promotion de la destination -, au niveau élevé des charges, aux faiblesses persistantes dans l'aménagement des sites, à la concurrence d'autres destinations et au caractère récurrent des conflits sociaux. Enfin, la défiscalisation a engendré des effets pervers qui ont conduit certains investisseurs à privilégier l'aspect fiscal des projets au détriment de leur intérêt social et de leur équilibre financier.

Générant plus de 1,85 milliard de francs de recettes directes en 1999, en croissance annuelle de 18,4 %, et plus de 15.400 emplois directs et indirects, l'activité touristique ne cesse de croître à la Réunion. Il convient néanmoins de distinguer les flux de touristes, dont la progression est ralentie, du nombre de clients dans les établissements hôteliers, qui a enregistré une nouvelle hausse exceptionnelle de près de 21 % en un an, qui succède à une augmentation de 30 % entre 1997 et 1998.

La Guyane tente de mieux exploiter ses richesses touristiques, malgré une image qu'il convient d'améliorer et une situation géographique particulière. L'activité touristique a enregistré une nette amélioration en 1999 grâce à l'intensification des tirs d'Ariane et à l'organisations de congrès et séminaires qui ont attiré un clientèle d'affaires venue de métropole et des Antilles.

En dépit de son immense lagon et d'un climat favorable, le développement du tourisme à Mayotte reste à l'état embryonnaire, avec 21.000 touristes en 1999. Entre 1992 et 1997, leur nombre a crû de 11 % par an, mais ce tourisme est majoritairement affinitaire tant les obstacles au développement du tourisme sont grands (coût élevé du transport aérien, obligation de transiter par la Réunion en provenance de métropole, faiblesse de la capacité hôtelière...).

L'activité touristique a enregistré une réelle baisse en 1999 à Saint-Pierre-et-Miquelon ; le nombre de touristes de croisière est passé de plus de 2.000 en 1998 à moins de 300 en 1999.

Au vu de la concurrence très forte qui règne dans le secteur des Antilles-Caraïbes et dans l'océan Indien, les DOM devront fournir des efforts importants, notamment dans l'aménagement des sites et le niveau des prix pratiqués.

    B.- DES INDICATEURS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX SANS RÉELLE AMÉLIORATION

      1.- L'évolution des prix ne pose pas de problème

En 1999, les prix (hors tabac) ont progressé de 1,3 % en métropole. L'inflation est inférieure à ce taux dans tous les DOM. Elle est négative en Guadeloupe et à Mayotte et inférieure à un dans les autres départements.

Après une baisse de 0,8 % en 1998, les prix ont augmenté de 5,3 % à Saint-Pierre-et-Miquelon en 1999 en raison de la hausse du dollar canadien et de l'augmentation du prix des hydrocarbures.

      2.- La croissance du chômage n'est toujours pas jugulée

Alors que la reprise économique entraîne une réduction du chômage en métropole, l'amélioration de la situation de l'emploi dans les départements d'outre-mer n'est guère sensible. Les taux de chômage diminuent peu, voire augmentent encore.

DEMANDEURS D'EMPLOI ET TAUX DE CHÔMAGE AU 31 DÉCEMBRE

 

1996

1997

1998

1999

 

Nombre de demandeurs d'emploi

Taux
de chômage

(en %)

Nombre de demandeurs d'emploi

Taux
de chômage

(en %)

Nombre de demandeurs d'emploi

Taux
de chômage

(en %)

Nombre de demandeurs d'emploi

Taux
de chômage

(en %)

Guadeloupe

47.056

26,8

49.765

27,8

52.425

28,8

54.255

29,5

Martinique

44.541

27

44.919

27,2

49.993

30,3

48.667

29,2

Guyane

10.782

19,2

12.555

21,4

13.073

21,4

12.791

22

Réunion

94.072

40,2

100.055

42,8

95.769

35,7

94.921

35,4

Métropole

3.147.900

12,3

3.209.800

12,5

3.064.600

11,9

2.914.800

11,2

Source : Rapports d'activité successifs de l'IEDOM.

A la Réunion, le niveau du chômage est très élevé. Le dynamisme démographique et l'élévation du taux d'activité des femmes conduit à l'augmentation rapide de la population active. Le seuil de 100.000 chômeurs a été dépassé durant l'année 1997 : une diminution du chômage de 4,3 % a permis de le franchir dans l'autre sens au cours de 1998. Une nouvelle baisse a été enregistrée en 1999, mais dans une moindre proportion. Malgré les 2.666 emplois jeunes, le chômage des moins de 25 ans n'a diminué que de 400 personnes. Cela témoigne du fait, d'une part, que l'activité économique ne peut résoudre à elle seule le problème de l'entrée des jeunes dans le monde du travail, et, d'autre part, que le dispositif « emplois jeunes » atteint une limite quant à sa capacité à juguler le chômage des nouveaux adultes. De plus, si les offres d'emplois sont plus nombreuses, elles concernent toujours plus d'emplois de courte durée.

Le taux de chômage en Guyane, à 22 %, bien qu'élevé, est stabilisé et reste inférieur à celui des autres DOM. Le nombre de chômeur a diminué en 1999, même si le taux de chômage semble en hausse à cause d'une révision à la baisse de l'estimation de la population active. Il apparaît pourtant que le marché de l'emploi guyanais se rapproche progressivement de celui des autres départements d'outre-mer.

En Guadeloupe, malgré la reprise économique enregistrée au second semestre, le marché du travail a connu une nouvelle dégradation de 0,7 %. Cette situation serait due à la hausse de la population active (en particulier féminine) de plus de 1 %, conséquence de la croissance du nombre d'emplois. La situation des moins de 25 ans continue à s'améliorer progressivement mais la part des chômeurs de longue durée augmente.

La progression du chômage a marqué une pause en 1999 en Martinique, grâce à la bonne orientation de la conjoncture économique, même si la pertinence des chiffres du chômage est nuancée par l'importance de l'économie informelle. La baisse du chômage des jeunes (- 7% en un an) est largement lié aux 3.000 bénéficiaires du dispositif « nouveaux services emplois jeunes ».

Il semble donc que la reprise de la croissance économique ne se soit pas encore traduite par une baisse globale du chômage outre-mer. Les premiers chiffres connus pour l'année 2000 apparaissent plus encourageants. Une enquête de l'INSEE portant sur la Guadeloupe fait apparaître une baisse sensible du chômage entre juin 1999 et mars 2000, qui porte le taux de chômage à 25,7 %. La hausse de 10 % du nombre de personnes qui travaillent peut être attribuée en partie à un effet saisonnier, mais le marché du travail semble plus tonique : le taux de chômage a baissé de cinq points environ par rapport à mars 1998 et de quatre points par rapport à mars 1999. En mars 2000, le solde des demandeurs d'emploi en fin de mois aurait baissé en Martinique de 3,4 % par rapport à mars 1999 et de 2,1 % par rapport au trimestre précédent.

En attendant une éventuelle confirmation de ces tendances positives, la lutte contre le travail illégal doit être la priorité du Gouvernement. Or, votre Rapporteur spécial ne peut que constater que, malgré le rapport Fragonard de 1999 qui s'efforçait de mesurer l'emploi illégal et qui dénonçait des services de contrôle démobilisés et la frilosité des parquets, rien de sérieux n'a été entrepris dans ce domaine. Il déplore le manque de volonté politique à mettre en place une lutte cohérente contre le travail illégal, alors qu'il constitue un coût élevé pour la collectivité.

      3.- Les échanges commerciaux marquent une forte dépendance vis-à-vis de la métropole

Comme les années précédentes, les résultats du commerce extérieur traduisent l'extrême dépendance économique des DOM et des collectivités territoriales d'outre-mer vis-à-vis de l'extérieur, et tout particulièrement envers la métropole.

Les taux de couverture sont compris entre 2 et 20 %. Le commerce extérieur de ces départements et collectivités territoriales se caractérise par son asymétrie.

En effet, ces collectivités importent en grande quantité des biens de consommation (généralement le premier poste d'importation), des produits des industries agro-alimentaires et des biens d'équipement. Les exportations sont concentrées sur quelques produits de base.

LA BALANCE COMMERCIALE DES DOM (1999)

(en millions de francs)

 


Importations


Exportations


Solde

Taux de couverture
(en %)

Guadeloupe

10.366

944

- 9.422

9,1

Guyane (1)

3.405

694

- 2.711

20,4

Martinique

10.598

1.714

- 8.884

16,2

Mayotte

848

17

-   831

1,94

Réunion

15.828

1.267

- 14.561

8

Saint-Pierre-et-Miquelon

371

50

-   321

13,6

(1) hors activité spatiale.

Source : Rapport d'activité de l'IEDOM pour 1999.

Bien qu'on note une augmentation régulière des échanges entre la Guadeloupe et la Martinique, et même entre la Guyane et les Antilles françaises, la métropole tient une place prépondérante dans ces échanges, comme en témoigne le tableau ci-après :

EXPORTATIONS ET IMPORTATIONS DES DOM EN VALEUR :
RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE (1999)

(en %)

 

Exportations

Importations

 

Vers la métropole

Vers le reste de l'Union européenne

De la métropole

Du reste
de l'Union européenne

Guadeloupe

61,6

5,4

61,3

20,6

Guyane

63,7

12,6

54,4

10,6

Martinique

47,0

19,1

63,6

15,7

Réunion

62,1

12,8

63,3

16,2

Saint-Pierre-et-Miquelon

6,9

43,9

Source : direction générale des douanes.

      4.- Les départements d'outre-mer face à leurs voisins

Les DOM se situent dans des zones de grande pauvreté. Les indicateurs en termes de PNB par habitant des pays voisins (Porto Rico, Trinidad et Tobago, Maurice, Seychelles...) sont très inférieurs à ceux des DOM. Le tableau de la page suivante illustre ce décalage.

LES DOM ET LES PAYS VOISINS EN 1997

 

Population

Superficie
(km2)

Densité
(hab/km2)

PIB
(millions de dollars)

PIB/habitant
(dollars/hab)

Antilles

La Dominique

73.640

751

98

238

3.232

Barbade

264.300

430

615

1.110

4.200

Sainte Lucie

151.000

616

245

575

3.808

Porto-Ricco

3.783.000

8.959

422

35.834

9.472

Cuba

11.019.000

110.860

99

8.120

737

Haïti

7.336.000

27.750

264

3.097

422

Jamaïque

2.546.620

10.991

232

4.790

1.881

Guadeloupe

415.000

1.780

233

5.179

12.480

Martinique

377.000

1.128

334

5.411

14.352

Guyane

Guyana

775.000

215.083

4

743

959

Surinam

415.000

163.820

3

470

1.133

Guyane

147.00

86.504

2

1.979

13.465

La Réunion

Madagascar

13.704.620

587.041

23

3.450

252

Maurice

1.134.000

2.040

556

4.180

3.686

Seychelles

76.670

454

169

520

6.782

Comores

504.680

1.862

271

20

40

Réunion

685.000

2.512

273

7.824

11.421

Afrique du Sud

37.643.000

1.223.200

31

128.230

3.406

Sources : ATLASECO 1999 pour les pays voisins, secrétariat d'État à l'Outre-mer pour les DOM.

Les écarts de rémunérations, accrus avec l'alignement du SMIC dans les DOM sur le SMIC métropolitain au 1er janvier 1996 et le prochain alignement du revenu minimum d'insertion, prévu par la future loi d'orientation pour l'outre-mer, augmentent l'attractivité des départements français pour les populations environnantes. En revanche, ces écarts aggravent leur compétitivité-prix vis-à-vis des concurrents immédiats.

La loi d'orientation pour l'outre-mer vise à renforcer la coopération régionale des départements d'outre-mer en instaurant un fonds de coopération régionale pour chacun d'entre eux. Ces fonds succèdent au Fonds interministériel de coopération (FIC) qui était limité à la zone caraïbe et à la Guyane. Alimentés par les crédits de l'État sur le nouvel article 35 du chapitre 46-94 - Fonds de coopération régionale, ils pourront recevoir des dotations du département, de la région et de toutes autres collectivités ou organismes et seront gérés par un comité paritaire comprenant les représentants de l'État et des collectivités.

Leur dotation sera de 20 millions de francs en 2001, dont 7 millions de francs transférés du budget du ministère des Affaires étrangères et 13 millions de moyens nouveaux. Cette augmentation des crédits, sensible par rapport au montant du FIC, témoigne de la volonté de l'État de contribuer à l'insertion des départements d'outre-mer dans leur environnement régional, notamment par l'échange d'informations entre les DOM et leurs voisins et la réalisation de projets concernant le développement économique, la culture, la formation, l'agriculture, la santé, le tourisme, la protection contre les catastrophes naturelles.

    C.- LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DES FINANCES LOCALES

Ces difficultés sont une des conséquences d'une conjoncture économique qui a récemment été défavorable. Les collectivités territoriales manquent de ressources propres mais sont confrontées à d'énormes besoins, notamment sociaux.

      1.- Les budgets des collectivités locales

      a) Des régions connaissant des situations contrastées

L'examen des budgets des quatre régions montre néanmoins que la situation reste marquée par les conséquences des difficultés financières de ces dernières années.

·   Guadeloupe

Le budget primitif pour 2000 atteint 1.592 millions de francs en recettes comme en dépenses, soit une hausse considérable de 9,5 % par rapport au budget primitif 1999. Les dépenses de fonctionnement augmentent de 14,5 %, un peu plus fortement qu'en 1999 (11 %).

La capacité courante de financement de la région augmente de 8,6 % grâce à la réduction des intérêts de la dette (- 10 %) et à une évolution modérée de la masse salariale.

L'épargne brute progresse de 12 % mais l'encours de la dette demeure élevé : 3.564 francs par habitant, contre 960 francs en moyenne nationale et 2.300 francs de moyenne dans les DOM.

La collectivité régionale bénéficie d'une situation financière saine. Toutefois, la chambre régionale des comptes a précisé, lors de son dernier contrôle de gestion, que la région Guadeloupe se place en deuxième position, derrière la Corse, mais loin devant la Martinique et la Guyane, pour le nombre d'agents pour 1.000 habitants. Un effort de maîtrise s'impose donc.

·   Guyane

A la suite de la dégradation des comptes de la région en 1993, un protocole de restructuration financière a été signé avec le Crédit local de France et l'Agence française de développement (AFD). Il a pour conséquence le blocage des dépenses de fonctionnement, la stabilité des dépenses d'investissement et de lourdes annuités de la dette qui courent jusqu'en 2002.

Le budget primitif 2000 est arrêté à 467 millions de francs en recettes et en dépenses, en baisse de 13,3  % par rapport à 1999, après une hausse de 15,7 %. Les dépenses de fonctionnement (194 millions de francs) sont en régression (- 6,6 %). Les frais de personnel sont stabilisés après une hausse de 17 % en 1999 : ils représentent 13 % des dépenses de fonctionnement, contre moins de 6 % en métropole.

Les dépenses d'investissement (273 millions de francs) retrouvent leur niveau de 1998 en perdant 17,5 % et sont en partie financées par une épargne nette en progression de 9,3 %. Néanmoins, pour combler la réduction des recettes propres, la région a accru son recours à l'emprunt, qui constitue désormais 42 % de ses recettes réelles d'investissement.

L'encours de la dette est de 3.157 francs par habitant, contre 960 francs de moyenne nationale et 2.300 francs dans les DOM et son annuité atteint près du double de la moyenne des DOM.

·   Martinique

Le budget primitif pour 2000 a été voté à hauteur de 1.557 millions de francs, en progression de 20 %, taux d'évolution sans commune mesure avec les taux habituellement constatés. Il s'explique pour l'essentiel par le financement de constructions scolaires nouvelles.

Les dépenses de fonctionnement sont inscrites à hauteur de 622 millions de francs, en augmentation de 3,9 %. Les frais de personnel augmentent de 8 % et représentent 12,3 % des dépenses de fonctionnement. Les intérêts de la dette ont sensiblement diminué (- 63 %) en raison du remboursement anticipé, en 1999, du capital d'un emprunt contracté en 1994. La section de financement peut ainsi dégager un autofinancement de 407 millions de francs, en progression de 14,5 %.

Les dépenses d'investissement (935 millions de francs) augmentent de 33 %. Plus du quart bénéficie au secteur de l'enseignement, dont les crédits de paiement croissent de 76 %. Près de 28 % reviennent au secteur des transports, dont la dotation augmente de 24 %.

L'emprunt de 150 millions de francs a été multiplié par quatre pour asseoir les engagements financiers souscrits par la région dans le cadre des contrats de plan 2000-2006.

Après avoir connu de grandes difficultés financières, la région Martinique semble donc parvenue à redresser durablement sa situation.

·   Réunion

Le budget primitif 2000 est arrêté à 2.547 millions de francs en recettes et en dépenses, soit une hausse de 3,3 % par rapport au budget primitif 1999. Cette augmentation se répartit entre l'accroissement de 4,6 % des dépenses de fonctionnement (42,3% des dépenses totales) et celui des frais de personnel qui représentent 11 % de cette catégorie de dépenses, enregistrant une hausse de 10 %. 46 % des dépenses de fonctionnement sont consacrées à la formation professionnelle.

Les dépenses d'investissement (1.437 millions de francs) devraient progresser de 2,3 %, après deux hausses successives de 8 %. Elles atteignent ainsi près de 58 % de l'ensemble des dépenses. En 2000, elles concernent les transports et les télécommunications à hauteur de 40 %, tandis que l'enseignement, en perte de 10 %, constitue encore 28 % des dépenses. Le niveau de remboursement des emprunts est stable et bas (11,6 %, contre 18,1 % de moyenne nationale et 24,8 % de moyenne dans les DOM).

Le recours à l'emprunt diminue de 46 %. En effet, les premiers éléments de programmation relatifs aux travaux routiers prévoient un doublement des réalisations à l'horizon 2003. La région aura besoin de toute sa capacité de financement d'emprunt afin de financer cette montée en puissance. A l'heure actuelle, la situation de la région est donc saine.

      b) Des collectivités territoriales toujours très endettées

·   Mayotte

La situation financière de la collectivité de Mayotte s'est dégradée depuis 1992. Afin d'éviter une dérive pouvant se traduire par un financement de dépenses de fonctionnement par des ressources à long terme, un protocole financier a été signé en 1995 avec l'AFD, principal bailleur de fonds de la collectivité.

Un audit des comptes administratifs 1992-1996 a mis en évidence l'extrême fragilité financière de la collectivité : réduction de la capacité d'épargne, forte progression de l'encours de la dette, capacité de désendettement dégradée.

Le budget principal primitif pour 2000 a été adopté en équilibre à hauteur de 1.050 millions de francs, soit une hausse de 7,5 % par rapport à 1999. Les recettes propres de la collectivité, qui constituent près de 53 % des recettes de fonctionnement, progressent de 11,75 %.

Les dépenses de fonctionnement doivent être maîtrisées alors que la collectivité subit les conséquences d'une politique de recrutement : les frais de personnel progressent encore, mais à un rythme ralenti (+ 7 % en 2000, contre + 8 % en 1999 et + 15,4 % en 1998). La capacité d'épargne dégagée par la section de fonctionnement est suffisante pour assurer le financement des dépenses d'investissement obligatoires et notamment le remboursement des emprunts (46,1 millions de francs).

On ne connaît pas encore l'ampleur des transformations qui vont toucher Mayotte à la suite de sa transformation en collectivité départementale. L'accord sur l'avenir de Mayotte, signé le 27 janvier 2000 à Paris et approuvé par la population mahoraise le 2 juillet 2000, doit conduire au dépôt d'un projet de loi statutaire avant la fin de l'année 2000. C'est lui qui clarifiera le partage des compétences entre la collectivité départementale et l'État et qui déterminera le calendrier du changement de statut. Celui-ci devrait être progressif et n'entraîner aucun coût supplémentaire pour l'État. Les règles budgétaires notamment qui s'imposeront à Mayotte seront certainement modifiées, ce qui risque de conduire à une période transitoire difficile pour les finances locales. En attendant, 2 millions de francs d'autorisations de programme sont ouverts sur le nouvel article 90 du chapitre 57-91 pour financer le début des travaux de construction de la préfecture.

·   Saint-Pierre-et-Miquelon

La situation budgétaire de la collectivité territoriale est préoccupante. En effet, les recettes douanières provenant du transbordement ont permis de lancer des programmes d'investissements soutenus en 1998 et 1999. L'arrêt du transbordement fin 1999 a fortement réduit les recettes alors que les programmes de travaux étaient lancés. Les problèmes de trésorerie ont conduit à différer le remboursement d'un emprunt à l'AFD et d'autres créanciers pour plus de 20 millions de francs. En 1999, le déficit était déjà de 22 millions de francs.

Le budget primitif pour 2000 a été élaboré sur des bases optimistes dans l'espoir d'une reprise du transbordement, qui n'aura pas lieu du fait de la décision des autorités de la Communauté européenne. Il s'élève à 244,5 millions de francs, en diminution de 1,2 % par rapport à 1999. On observe une nouvelle croissance des dépenses de fonctionnement (+ 5 %), alors que les dépenses d'investissement baissent fortement (- 10,8 %).

Les dépenses de personnel augmentent encore de 6 % du fait de l'intégration du personnel dans la fonction publique territoriale et représentent 8,7 % des dépenses de fonctionnement. Les dépenses d'investissement brut diminuent sensiblement. En revanche les subventions devraient doubler en 2000. Le remboursement des emprunts représente 16 % des dépenses d'investissement, en hausse de 13 % en un an.

      c) Des départements en situation financière très dégradée

La situation financière des départements est souvent encore moins satisfaisante que celle des régions. Les budgets primitifs pour 2000 sont décrits de manière synthétique dans les trois tableaux suivants :

 

DÉPENSES RÉELLES TOTALES PAR HABITANT EN 2000

(en francs)

 
   

Dépenses totales

Dépenses de fonctionnement

Dépenses d'investissement

 
 

Guadeloupe

7.163

3.911

3.252

 

Guyane

5.863

4.879

984

 

Martinique

5.646

3.740

1.906

 

Réunion

5.698

3.620

2.078

 

Métropole (hors Paris)

4.229

2.610

1.619

 

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

 

RECETTES RÉELLES TOTALES PAR HABITANT EN 2000

(en francs)

 
   

Dépenses totales

Dépenses de fonctionnement

Dépenses d'investissement

 

Guadeloupe

7.201

4.647

2.554

 

Guyane

5.863

4.958

905

 

Martinique

5.646

4.364

1.282

 

Réunion

5.698

4.327

1.371

 

Métropole (hors Paris)

4.229

3.276

953

    Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

 
 

L'ENDETTEMENT DES DÉPARTEMENTS EN 2000

(en francs)

 
   

Dette/recettes de fonctionnement

(en %)

Dette par habitant

Annuité
de la dette
par habitant

 
 

Guadeloupe

56,3

2.598

651

 

Guyane

40,1

1.986

431

 

Martinique

56,6

2.472

537

 

Réunion

82,6

3.709

844

 

Métropole (hors Paris)

70,1

2.288

333

 

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

      · Guadeloupe

Devant la chambre régionale des comptes depuis 1996, la collectivité territoriale est sous tutelle financière : le représentant de l'État règle et rend exécutoire le budget départemental depuis 1997 dans le cadre de la mise en _uvre d'un plan pluriannuel de redressement visant à l'équilibre du budget.

Dans ses conclusions rendues en 1999, la chambre régionale des comptes relève que « la présentation systématique des documents budgétaires insincères ne permet pas d'apprécier la situation réelle de finances départementales et qu'il appartient à l'exécutif départemental de présenter les résultats d'engagements du budget sans masquer délibérément son déficit par une sous-évaluation des engagements du département ». Sont notamment concernées les cotisations d'assurance personnelle des bénéficiaires du RMI dues à la caisse générale de sécurité sociale pour un montant total de 425 millions de francs, que le département doit rembourser sur 8 ans.

Le montant du budget primitif pour 2000 a été voté par le conseil général puis corrigé par la chambre régionale des comptes. Il est considéré avoir été voté à hauteur de 3.026,43 millions de francs en dépenses et de 3.042,47 millions de francs en recettes, soit une forte augmentation de 3,7% pour les dépenses et 4,2 % pour les recettes par rapport au budget primitif pour 1999.

Les dépenses réelles de fonctionnement diminuent de 3,3 % grâce à la suppression de l'aide médicale départementale et la réduction des intérêts de la dette. Mais les dépenses sociales obligatoires représentent encore 54 % des dépenses de fonctionnement, notamment à cause de la forte progression des dépenses d'insertion. Les charges de personnel continuent leur progression pour atteindre 21,3 % des dépenses de fonctionnement, contre 17,5 % en moyenne nationale et 26,2 % dans les DOM.

Les dépenses d'investissement, en hausse de 16 %, financent la voirie, les collèges et les opérations d'investissement des communes. Les remboursement des emprunts constitue 15 % des dépenses d'investissement. L'encours de la dette du département est en constante diminution depuis 1996, mais le recours à un emprunt de 190 millions de francs en 2000 va modifier cette tendance positive.

La situation du département n'évolue donc guère favorablement.

·   Guyane

Le conseil général de la Guyane se trouve dans une situation financière précaire liée à des dépenses de fonctionnement importantes (83 % du budget total, consacrés pour 43 % aux dépenses de personnel), à une dette vis-à-vis du centre hospitalier de Cayenne due aux dépenses d'aide médicale (23 millions de francs par an à rembourser pendant 7 ans) et à des charges peu compressibles (transport scolaire fluvial, construction régulière de collèges à cause de la pression démographique, entretien des voiries...)

Le budget primitif pour 2000 connaît une forte baisse de 9,7 %, à 921,8 millions de francs en recettes et en dépenses, baisse qui succède à une hausse de même proportion en 1999. Il se décompose en 767 millions de francs pour la section de fonctionnement et 154,7 millions de francs pour la section d'investissement. Les dépenses d'investissement enregistrent une baisse de 30,6 % contre seulement 3,9 % pour les dépenses de fonctionnement.

La composition des recettes de fonctionnement est spécifique à la Guyane. Les dotations de l'État, réduites de 28 % en 2000, constituent seulement 24 % des recettes de fonctionnement, alors qu'elles atteignent 46,3 % en Guadeloupe et 64 % à la Réunion. Les ressources fiscales (545,8 millions de francs) représentent 74 % des recettes de fonctionnement, ce qui est très proche de la moyenne nationale et très différent de la situation des autres DOM.

Son épargne nette est négatives et se dégrade de 78 % par rapport au budget primitif pour 1999. Cette diminution réduit la capacité du département à rembourser sa dette et le conduit à accroître ses emprunts pour financer ses investissements. Il envisage ainsi de recourir à nouveau à l'emprunt en 2000, à hauteur de 50 millions de francs, comme il l'avait déjà fait en 1999.

·   Martinique

Le budget primitif pour 2000 s'élève en recettes comme en dépenses, à 2.153 millions de francs, en diminution de 3 % par rapport au budget primitif pour 1999.

Les dépenses de fonctionnement (1.426 millions de francs) perdent 9,3 %. Cette baisse a été rendue possible par la mise en place de la couverture maladie universelle qui supprime l'aide médicale des compétences départementales. Les dépenses d'aide sociale obligatoire, en chute de 25 %, atteignent encore 44 % des dépenses de fonctionnement. Les frais de personnel représentent 30 % de ces dernières.

Les dépenses d'investissement (727 millions de francs) enregistrent une hausse de 12 %, du fait notamment des travaux de voirie indispensables à la suite des dégâts causés par l'ouragan Lenny. Le département a adopté une politique prudente d'investissement et d'emprunt et a recentré son action autour des compétences qui lui sont dévolues. Selon l'AFD, il est un emprunteur fiable. Il ne devra pourtant pas relâcher sa vigilance car son ratio d'endettement (21,47 %) est assez élevé.

Au total, les grands équilibres financiers ont pu être consolidés et l'appel à l'emprunt limité.

·   Réunion

Le budget primitif pour 2000 a été voté à hauteur de 4.024 millions de francs, en baisse de 13,6 % du fait de la mise en place de la couverture maladie universelle au 1er janvier 2000.

Les dépenses de fonctionnement enregistrent donc une forte baisse de 18,2 %, à 2.557 millions de francs, soit 63,5 % des dépenses. Si les intérêts de la dette sont réduits de plus de 13 %, les frais de personnel continuent leur progression pour atteindre plus de 22 % des dépenses de fonctionnement.

Les dépenses d'investissement diminuent moins fortement, de 4 %. Le département prévoit de faire porter ses efforts sur les équipements ruraux et agricoles pour 264 millions de francs, l'équipement des collèges pour 118 millions de francs et les programmes de subventions et d'avances pour les communes et leurs établissements publics à hauteur de 158 millions de francs.

Au 1er janvier 2000, l'encours de la dette du département s'élevait à 3.709 francs (contre 2.230 francs de moyenne nationale et 2.925 francs de moyenne dans les DOM), ce qui classe la Réunion parmi les départements les plus lourdement endettés. Toutefois, l'annuité de la dette représente 19 % des recettes de fonctionnement et l'encours de la dette équivaut à 2,5 années de recettes fiscales et 5,2 années d'épargne brute : cet endettement reste donc supportable pour les finances de la collectivité.

La question principale est aujourd'hui relative au déroulement de la division en deux du département de la Réunion, désormais prévue au 1er janvier 2001 : quel sera son coût ? quelles seront ses conséquences sur les finances locales ? Aucune information précise n'est disponible à ce jour.

      d) Des communes en difficultés récurrentes

Nombreuses sont les communes de l'outre-mer connaissant des difficultés financières, souvent depuis plusieurs années. Le contrôle des chambres régionales de comptes est, à cet égard, indispensable, mais le caractère récurrent de ces difficultés montre ses limites.

Si les communes de Martinique ont sensiblement amélioré leur situation financière, cinq communes sur vingt-quatre à la Réunion, onze sur trente-quatre à la Guadeloupe, une sur deux à Saint-Pierre-et-Miquelon et onze sur vingt-deux en Guyane (dont cinq pour déséquilibre du budget et six pour déséquilibre significatif du compte administratif) ont fait l'objet d'une procédure devant la chambre régionale des comptes en 1999.

Les déficits observés sont souvent dus à des dépenses de personnel trop élevées, et au lancement de programmes de travaux sans maîtrise des financements.

La commune de Cayenne a stabilisé sa situation depuis 1995 au prix de l'arrêt de toute politique d'investissement. Le préfet a d'ailleurs saisi la chambre régionale des comptes de son budget primitif pour 2000.

L'ensemble des collectivités locales ultramarines souffre ainsi, à de rares, et souvent brèves, exceptions près, des mêmes maux : dépendance croissante des dotations de l'État, qui ne cessent d'augmenter, part écrasante des dépenses de personnel parmi les dépenses de fonctionnement, faiblesse de l'investissement, rareté de l'épargne. Cette situation est résumée dans le tableau suivant, pour 1998.

LES CHARGES DE FONCTIONNEMENT DANS LES DOM EN 1998

 
 

Frais de personnel

Intérêts de la dette

Transferts versés

Travaux fournitures services

Total
dépenses de fonctionnement

 

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

Part
(en %)

Francs/
habitant

DOM

887

21

220

5

2.607

62

282

7

4.187

Métropole

406

16

142

6

1.719

67

158

6

2.573

Source : les budgets primitifs des départements en 1998, direction générale des collectivités locales.

      2.- Les dotations globales

Ces dotations ne sont pas inscrites dans le budget de l'outre-mer mais apparaissent dans l'état récapitulatif de l'effort de la Nation consacré aux départements d'outre-mer.

Il est à noter que, à ce jour, et alors que la bidépartementalisation de la Réunion doit être effective au 1er janvier 2001, aucune évaluation du coût supplémentaire du deuxième département en termes de dotations globales n'a encore été effectuée. Les moyens budgétaires, inscrits sur la section de l'Intérieur, ne sont pas prévus dans le présent projet de loi de finances.

      a) La dotation globale de fonctionnement

Dans les DOM, les communes aussi bien que les départements sont éligibles à la dotation globale de fonctionnement (DGF).

·   Les communes

Les textes applicables sont les articles L. 2563-1 à 4 et L. 2334-13 du code général des collectivités territoriales. Conformément à ces dispositions, toutes les communes d'outre-mer bénéficient de la dotation forfaitaire et de la dotation d'aménagement :

· Leur dotation forfaitaire est égale à la somme des dotations perçues en 1993, majorée en 1994 de 30 millions de francs répartis au prorata de la population. Cette majoration a été consolidée dans la base de calcul de la dotation forfaitaire pour 1995. Pour 2000, elle s'élève à 2.100 millions de francs pour les DOM.

· Le montant de la dotation d'aménagement des communes d'outre-mer est une quote-part prélevée sur la masse globale en appliquant un rapport majoré de 10 % entre la population des départements d'outre-mer et la population nationale. Cette quote-part évolue de façon telle que le total de leur DGF progresse au moins comme l'ensemble des ressources affectées à cette dotation. La dotation d'aménagement est ensuite répartie proportionnellement à la population des communes. Elle atteint 177,1 millions de francs en 2000.

· La loi du 26 mars 1996 portant diverses dispositions relatives au concours de l'État aux collectivités territoriales et aux mécanismes de solidarité financière entre les collectivités territoriales a modifié le régime de la DGF des communes :

      - la modification de la clé de répartition entre la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale ne concerne pas la dotation d'aménagement des communes d'outre-mer, car ces deux dotations ne sont pas individualisées mais globalisées au sein de la dotation d'aménagement ;

      - le taux de progression de la dotation forfaitaire peut être fixé entre 50 et 55 % du taux de progression de la DGF. Le comité des finances locales a décidé de porter ce taux à 52 % pour l'année 1997, 53 % en 1998, 54 % en 1999 et 55 % en 2000 (le taux de progression de la DGF est de 0,821 % en 2000).

Enfin, les groupements à fiscalité propre reçoivent une quote-part de la dotation d'aménagement dans les conditions de droit commun.

Le tableau ci-après retrace l'évolution de la DGF des communes d'outre-mer de 1998 à 2000. L'impact du recensement effectué en 1996 dans les territoires d'outre-mer a conduit à défavoriser à l'intérieur de la « quote-part outre-mer » les départements dans la répartition de la dotation d'aménagement. L'incidence est particulièrement forte pour la Martinique et la Réunion.

DGF DES COMMUNES 1998-2000

(en millions de francs)

Départements

1998

1999

Progression

1999/1998

(en %)

2000

Progression

2000/1999

(en %)

Guadeloupe

585

597,6

2,2

612,7

2,2

Guyane

168,5

172,9

2,6

183,3

6

Martinique

524,7

540,6

3

549,3

1,6

Réunion

881,9

934,2

5,9

958,2

2,8

Total

2.160,1

2.245,3

4

2.303,6

2,6

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

La dotation forfaitaire par habitant en 2000 est en moyenne de 1.304 francs (1.316 francs en 1999) et la DGF par habitant de 1.412,7 francs (1.401 francs en 1999) pour les quatre DOM.

·   Les départements et les collectivités territoriales

Conformément aux articles 35, 36 et 37 de la loi n° 85-1268 du 29 novembre 1985, les DOM perçoivent une DGF, constituée d'une dotation forfaitaire, d'une dotation de péréquation et d'un concours particulier, la dotation de fonctionnement minimale (DFM). A partir de 2000, les départements bénéficient d'un deuxième concours particulier qui compense la suppression des contingents communaux d'aide sociale (359,9 millions de francs équivalant au montant prélevé sue la dotation forfaitaire des communes).

Les crédits réservés à la dotation forfaitaire des quatre départements d'outre-mer s'élèvent à 220,66 millions de francs et ont évolué comme la masse totale affectée à la dotation forfaitaire (- 0,22 %). Ceux réservés à la dotation de péréquation des DOM s'élèvent à 5856,5 millions de francs et progressent fortement en raison de la prise en compte du recensement général de la population (+ 9,99 %).

Au total, la DGF des quatre départements d'outre-mer pour 2000 est de 868,9 millions de francs, en progression de 6,9 % par rapport à 1999, alors qu'elle n'avait crû que de 2,7 % entre 1998 et 1999.

DGF DES DÉPARTEMENTS 1998-2000 (1)

(en millions de francs)

Départements

1998

1999

Progression 1999/1998
(en %)

2000

Progression 2000/1999
(en %)

Guadeloupe

201,8

207,1

2,61

222,7

7,5

Guyane

65,6

67,5

2,44

68,7

1,8

Martinique

201,4

206,7

2,65

222

7,4

Réunion

322,2

331,3

2,85

355,5

7,3

Total

791,3

812,6

2,7

868,9

6,9

(1) hors concours particulier destiné à compenser le contingent d'aide sociale.

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

      b) La dotation globale d'équipement

Dans les départements d'outre-mer, les communes et les départements bénéficient également de la dotation globale d'équipement (DGE).

·   Les communes

Créée par la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 afin de financer les travaux d'équipement des communes et de globaliser les subventions spécifiques d'équipement des différents ministères, la DGE des communes, dont la gestion est déconcentrée, a vu ses modalités de répartition et d'attribution sensiblement modifiées par la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995 portant loi de finances pour 1996 et par la loi n° 96-241 du 26 mars 1996 portant diverses dispositions relatives aux concours financiers de l'État aux collectivités territoriales et aux mécanismes de solidarité financière entre collectivités territoriales.

En effet, à la suite de l'adoption du pacte de stabilité dans la loi de finances pour 1996, il a été nécessaire de supprimer la première part de la DGE des communes (2,1 milliards de francs en 1995). Dans le même temps, la deuxième part de la DGE a été étendue, sous condition de ressources et de population. Les communes d'outre-mer sont désormais éligibles à la DGE avec des seuils plus favorables que les communes de métropole.

Parallèlement, la loi a modifié la composition de la commission départementale d'élus, formée désormais des maires des communes et des présidents de groupements dont la population n'excède pas 20.000 habitants (35.000 dans les départements d'outre-mer) et chargée dorénavant de déterminer les catégories d'opérations prioritaires ainsi que les fourchettes de taux de subvention correspondantes, dans la limite de 20 % à 60 % du montant de l'investissement hors taxe.

Enfin, la DGE a de nouveau été modifiée par l'article 104 de la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale qui a rendu éligibles les établissements publics industriels et commerciaux de plus de 20.000 habitants (35.000 dans les DOM) dont toutes les communes membres sont elles-mêmes éligibles à la DGE.

DGE DES COMMUNES 1998-2000

(en millions de francs)

Départements

1998

1999

Progression 1999/1998

(en %)

2000

Progression

2000/1999

(en %)

Guadeloupe

19,9

20,6

3,5

20,9

1,4

Guyane

6,2

6,4

3,9

6,2

- 3

Martinique

12,1

13,6

11,9

13,4

- 1

Réunion

17,1

17,4

1,8

17,5

0,7

Total

55,3

58

4,9

58

-

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

·   Les départements

La DGE d'un exercice est chiffrée à partir des investissements financés dans l'année. La DGE effectivement perçue par chaque département en 2000 ne sera connue qu'à la fin du premier semestre 2001.

DGE DES DÉPARTEMENTS 1998-1999

(en millions de francs)

Départements

1998

1999

Progression

1999/1998

(en %)

Guadeloupe

18,7

2,1

12,3

Guyane

7,8

7,2

- 6,9

Martinique

15,9

13,8

- 12,8

Réunion

36,6

37,7

3,2

Total

78,9

79,8

1,2

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

      c) La dotation générale de décentralisation

La dotation globale de décentralisation (DGD) évolue comme la DGF en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages (hors tabac) de l'année de versement, et de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année en cours. Une collectivité locale ne perçoit une DGD que lorsque les transferts de fiscalité ne compensent pas les transferts de charges.

La DGD n'est pas une dotation unique et globale ; elle s'accompagne de divers concours particuliers destinés à couvrir des charges particulières, notamment dans les domaines des dépenses d'équipement.

      · La dotation générale de décentralisation des départements d'outre-mer

Dans le domaine de l'enseignement, les compétences en matière de fonctionnement, d'entretien et de construction des collèges ont été transférées aux départements. Les charges de fonctionnement sont compensées en totalité dans la DGD. Les dépenses d'investissement sont compensées par la dotation départementale d'équipement des collèges.

Les autres transferts de compétence au profit des départements (action sociale, santé, ports maritimes de commerce et de pêche, transports scolaires, bibliothèques départementales de prêt...) ouvrent droit à compensation financière, soit au moyen d'impôts transférés (vignette automobile, droit d'enregistrement), soit au moyen de la DGD.

Depuis le 1er janvier 2000, les départements n'ont plus compétence en matière d'aide médicale. La loi du 27 juillet 1999 portant création de la couverture maladie universelle a transféré à l'État cette compétence. Son article 13 prévoit, pour compenser le transfert de charges, de prélever sur le montant de la DGD et, s'il y a lieu, sur le produit des impôts affectés aux départements, un montant égal aux dépenses consacrées à l'aide médicale en 1997 diminuées de 5 % et actualisées selon la progression de la DGF en 1998, 1999 et 2000. Les modalités financières de ce transfert ont été vivement contestées par de nombreux départements mais surtout par les départements d'outre-mer. Au total, le litige porte sur 155 millions de francs.

DOTATION GÉNÉRALE DE DÉCENTRALISATION DES DÉPARTEMENTS 1998-2000

(en millions de francs)

Départements

1998

1999

2000

Guadeloupe

554,7

593,3

323,6

Guyane

152,5

161,1

98,1

Martinique

654,8

687,7

466,7

Réunion

1.828,8

1.901,1

1.277,7

Total

3.190,8

3.343,2

2.165,6

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

·   La dotation générale de décentralisation des régions d'outre-mer

Les montants de la DGD des régions d'outre-mer intègrent depuis 1998 un concours particulier, finançant le développement culturel des régions d'outre-mer. La DGD des régions d'outre-mer a connu donc un taux élevé de croissance (+ 15 %). En 2000, elle progresse seulement de 0,8 %.

La DGD des régions d'outre-mer, pour les années 1998, 1999 et 2000, est la suivante :

DOTATION GÉNÉRALE DE DÉCENTRALISATION DES RÉGIONS D'OUTRE-MER 1998-2000

(en millions de francs)

Départements

1998

1999

2000

Guadeloupe

25

25,7

25,9

Guyane

7,2

7,4

7,5

Martinique

23,6

24,3

24,5

Réunion

35,4

36,4

36,7

Total

91,3

93,8

94,6

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

      3.- Les subventions aux collectivités locales inscrites au budget de l'Outre-mer

Le budget de l'Outre-mer prévoit, en ce qui concerne les collectivités des DOM-TOM, des subventions de plus de 82 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement. La part globale revenant aux DOM dépasse les 45 millions de francs.

      a) Les subventions de fonctionnement

      · Le chapitre 41-51 - Subventions de caractère obligatoire en faveur des collectivités territoriales des départements d'outre-mer

Ce chapitre a pour vocation de compenser des ressources fiscales manquantes aux collectivités locales. Il s'agit de subventions versées par l'État aux communes des DOM en compensation des pertes de ressources fiscales consécutives aux exonérations temporaires de taxe foncière sur les propriétés bâties, conformément à l'application de l'article L. 2335-3 du code général des collectivités territoriales.

Après avoir été stable entre 1998 et 2000, à 32 millions de francs, la dotation proposée est seulement de 25 millions de francs pour 2001, soit une baisse de près de 22 %, qui s'explique par le taux bas de consommation de ces crédits.

DOTATIONS DU CHAPITRE 41-51 EN EXÉCUTION (1998-2000)

(en millions de francs)

 

DOM

1998

1999

2000

    Guadeloupe

3,78

0,99

1,39

    Guyane

5,51

5,77

5,39

    Martinique

6,15

2,13

1,92

    Réunion

14,59

14,24

14,56

    Total

30,05

23,13

23,26

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

 

      · Le chapitre 41-91 - Subventions de caractère facultatif aux collectivités locales des départements d'outre-mer, aux budgets locaux des territoires et à divers organismes

L'article 70 de ce chapitre comprend des crédits destinés à compenser les dépenses faites par la collectivité territoriale de Mayotte alors qu'elles relèvent de la compétence de l'État. En 1999, une subvention exceptionnelle de 20 millions de francs avait été ouverte en loi de finances rectificative pour couvrir des dépenses anciennes non remboursées. La dotation proposée pour 2001 se monte à 3,6 millions de francs, comme c'était déjà le cas dans les lois de finances initiales pour 1999 et 2000.

L'échéancier établi dans le cadre du règlement de la dette de l'ex-territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon prévoit un versement annuel de 76.764,64 francs, de 1997 à 2002. 80.000 francs sont donc inscrits à l'article 80.

Alors que les compagnies Air Saint-Pierre et Air Austral sont désormais gérées par le Fonds de péréquation des transports aériens, les subventions de fonctionnement aux compagnies de transport sont en voie de disparition. Il ne reste que la subvention pour la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon qui figure depuis 2000 à l'article 32 du chapitre 41-91 et est reconduite au même niveau (11 millions de francs) qu'en 1999 et 2000. Au cours des dernières années, la subvention a connu l'évolution suivante :

SUBVENTION À LA DESSERTE MARITIME
DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON (1997-2001)

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999

2000

2001

Crédits inscrits

11

11

11

11

11

Crédits consommés

11,30

11,18

11,11

8,9 (1)

-

(1) au 31 août 2000

Source : contrôle financier près le secrétariat d'État à l'Outre-mer et direction de la comptabilité publique.

Enfin, il est créé un nouvel article 90 - Offices de l'eau dans les DOM, doté de 3 millions de francs. En effet, le projet de loi d'orientation pour l'outre-mer prévoit la création de tels organismes. Établissements publics locaux, ils seront chargés de faciliter les actions d'intérêt commun dans le domaine de la gestion de l'eau ; leur financement sera assuré conjointement avec le ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement et le concours des collectivités locales.

Il faut noter par ailleurs qu'au titre de la mise en _uvre de l'ordonnance n° 2000-219 du 8 mars 2000 relative à l'état civil mahorais sont inscrits 4,7 millions de francs sur les chapitres 31-98 et 34-96 couvrant les frais de personnel afin d'assurer le fonctionnement de la commission de réforme de l'État civil, ainsi que le recrutement pendant cinq ans d'une quarantaine d'agents contractuels.

      b) Les subventions d'investissement (chapitre 67-51)

Elles consistent notamment en des subventions aux travaux d'intérêt local, dont les crédits sont inscrits au chapitre 67-51 - Travaux divers d'intérêt local. Comme le relève le rapport du contrôleur financier : « l'intitulé du chapitre est assez vague pour accueillir des opérations de toute nature ». Pour être éligibles, les opérations ne doivent pas faire apparaître d'autres subventions en provenance du budget du même département ministériel. Les opérations généralement subventionnées se situent entre 100.000 francs et 500.000 francs.

De manière récurrente, les crédits votés dans la loi de finances initiales sont très nettement supérieurs aux crédits demandés du fait de l'ouverture de crédits en provenance de la réserve parlementaire. En 2000, ont été ouverts 13,05 millions de francs en autorisations de programme et en crédits de paiement (contre 5 millions de francs prévus dans le projet de loi de finances). 4,5 millions de francs avaient été affectés au 31 juillet 2000. Pour 2001, il est proposé d'inscrire 2,5 millions de francs de crédits de paiement et 5 millions de francs d'autorisations de programme.

Ce chapitre souffre d'une sous-exécution de caractère structurel liée à l'obligation, pour les collectivités locales, de mobiliser d'autres financements. Ainsi, certaines opérations ont purement et simplement été abandonnées. Pour l'année 1999, sur les 35,36 millions de francs de crédits disponibles (dont 20,36 millions de francs provenant de reports), seuls 11,27 millions de francs ont été consommés (pour l'outre-mer dans sa globalité). 24,09 millions de francs ont donc pu être reportés sur l'exercice 2000.

Le montant total des crédits de paiement affectés en 1999 pour les DOM et les collectivités territoriales d'outre-mer s'est élevé à 15,96 millions de francs, soit plus de 94 % du total. Le tableau suivant récapitule les actions menées sur les crédits de paiement dans les DOM en 1999.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DE L'UTILISATION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU CHAPITRE 67-51 AU COURS DE L'EXERCICE 1999

 

(en francs)

Départements et collectivités

Crédits délégués

Crédits consommés

Crédits sans emploi

Guadeloupe

3.000.000

31.350

2.968.650

Guyane

2.289.176

1.024.334

1.264.842

Martinique

3.652.612

3.281.724

370.888

Mayotte

400.000

-

400.000

Réunion

4.779.063

4.724.141

54.922

St-Pierre-et-Miquelon

1.840.000

1.258.652

581.348

Total

15.960.851

10.320.201

5.640.650

Source : contrôle financier près le secrétariat d'État à l'Outre-mer.

Ce chapitre 67-51 contenait aussi un article 20 - Programme civil de défense, qui n'était plus doté depuis plusieurs années, et qui est supprimé dans le projet de loi de finances pour 2001.

    D.- LES NOMBREUX SOUTIENS PUBLICS SPÉCIFIQUES

      1.- Les subventions d'investissement

      a) Le Fonds d'investissement des départements d'outre-mer

Le Fonds d'investissement des DOM (FIDOM) est régi par le décret n°84-712 du 17 juillet 1984 modifié. Il est formé de deux chapitres, correspondant à deux sections :

· chapitre 68-01 : section générale, pour les interventions du fonds relevant de l'action directe de l'État (FIDOM général) ;

· chapitre 68-03 : la section régionale et départementale alimentait une dotation globale aux budgets des régions et des départements des DOM ainsi qu'à ceux des collectivités territoriales. L'extinction de cette section locale, décidée dans le projet de loi de finances pour 1997, est maintenant réalisée. Le chapitre n'est néanmoins pas supprimé, car des crédits de paiement y sont encore inscrits en loi de finances rectificative.

FIDOM : CRÉDITS OUVERTS EN LOI DE FINANCES INITIALE (1997-2001)

(en millions de francs)

   

1997

1998

1999

2000

2001 (1)

Section générale

Autorisations de programme

232,5

225

205

220

340,5

 

Crédits de paiement

218

232,5

198,7

217,5

250,15

Section régionale

Autorisations de programme

-

-

-

-

-

 

Crédits de paiement

14,65

6,6

-

-

-

Section départementale

Autorisations de programme

-

-

-

-

-

 

Crédits de paiement

18,65

8,4

-

-

-

Total

Autorisations de programme

232,5

225

205

220

340,5

 

Crédits de paiement

251,3

247,5

198,7

217,5

250,15

(1) projet de loi de finances pour 2001.

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

En 1999, à la suite de différents mouvements en cours d'exécution, la section générale a reçu une dotation de 221,671 millions de francs en autorisations de programme, dont 188 millions de francs ont été délégués dans l'année, et de 256,8 millions de francs en crédits de paiement, mandatés à hauteur de 163,3 millions de francs.

En cours d'exécution, les sections régionales et départementales ont bénéficié de 60 millions de francs provenant de reports et de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1999. Les 10 millions de francs de report, qui provenaient de la loi de finances rectificative pour 1998 ont été entièrement consommés, en Guadeloupe, à hauteur de 7,16 millions de francs et à Saint-Pierre-et-Miquelon, à hauteur de 2,84 millions de francs. 93,5 millions de francs de crédits de paiement et 44,2 millions de francs d'autorisation de programme ont été reportés sur la section générale en 2000.

OPÉRATIONS RÉALISÉES PAR LE FIDOM EN 1999 ET 2000

(en millions de francs)

FIDOM général

1999

2000

Guadeloupe

51,25

29,99

Martinique

49,91

33,21

Guyane

16,92

31,43

Réunion

51,09

45,15

Saint-Pierre-et-Miquelon

7,08 (1)

12,32

Mayotte

32,99

68,20

Opérations communes

0,01

2,80

Total

209,24

223,10

(1) dont 2 millions de francs en réserve pour Archipel SA

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

Le FIDOM finance principalement les opérations inscrites aux contrats de plan État-régions et la convention de développement économique et social de Mayotte (qui arrive à son terme en 2000).

Depuis plusieurs années, il a existé sur le FIDOM général une insuffisance de crédits de paiement au regard des autorisations de programme. La situation est en voie de résorption dans la mesure où priorité a été donnée aux crédits de paiement qui ont progressé plus vite que les autorisations de programme. Sur le FIDOM décentralisé, qui n'est plus doté en autorisations de programme depuis 1997, il subsiste un écart entre autorisations de programme et crédits de paiement, malgré une dotation de 50 millions de francs votée en loi de finances rectificative pour 1999. En septembre 1999, le secrétariat d'État au Budget et le secrétariat d'État à l'Outre-mer ont mené une mission d'expertise sur l'utilisation des dotations du FIDOM décentralisé afin d'évaluer précisément les autorisations restant à couvrir. Les résultats de leur mission ne pas encore définitifs mais il est probable que des dotations en crédits de paiement seront à nouveau ouvertes en loi de finances rectificative pour 2000 et pour 2001.

Les dotations au FIDOM pour 2001 augmentent nettement : de 15 % pour les crédits de paiement, à 250,15 millions de francs, et de près de 55 % en autorisations de programme, ces dernières atteignant 340,5 millions de francs. La liste des opérations susceptibles d'être financées avec le concours du FIDOM pour 2001 n'est pas encore arrêtée. Le secrétariat d'État à l'Outre-mer a simplement indiqué que 308,3 millions de francs seront utilisés au financement des contrats de plan alors que les 32,2 millions de francs non encore affectés seront répartis par le comité du FIDOM en 2001.

      b) L'importance des contrats de plan pour les départements d'outre-mer

Comme nous venons de le voir, le FIDOM finance les contrats de plan État-régions pour la part à la charge du secrétariat d'État à l'Outre-mer (SEOM). Ces contrats sont essentiels pour maintenir à un rythme soutenu l'investissement public dans les départements et collectivités territoriales d'Outre-mer.

· Les contrats de plan 1994-1999

Sur la période 1994-1999, l'État aura consacré 3.853 millions de francs aux contrats de plan passés avec les quatre départements-régions d'outre-mer : Martinique, Guadeloupe, Guyane, la Réunion. Il faut y ajouter les contrats de plan passés entre l'État et les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte, cette dernière bénéficiant également d'une convention de développement, ce qui représente près de 2.400 millions de francs supplémentaires.

Dans les DOM, les opérations contractualisées constituent la contrepartie nationale des programmes européens 1994-1999, pour lesquels la commission européenne a doublé les fonds structurels par rapport à la période 1989-1993 (12 milliards de francs).

Les crédits affectés aux contrats de plan 1994-1999 se répartissent selon quatre orientations équilibrées :

- 894 millions de francs (23,2 %) concernent des opérations de cohésion sociale (équipements sanitaires et sociaux, emploi et formation professionnelle, politique de la ville) ;

- 1.126 millions de francs (29,23 %) sont attachés aux infrastructures (routes, ports, aéroports, foncier et environnement) ;

- 901 millions de francs (23,38 %) sont consacrés à l'éducation et à la culture (constructions scolaires et universitaires, équipements sportifs et culturels) ;

- 932 millions de francs (24,2 %) relèvent du développement économique (développement rural, aide à la compétitivité des entreprises, du commerce et de l'artisanat).

Sur l'ensemble des contrats de plan et de la convention précitée, le taux d'engagement moyen au 31 décembre 1999 est de 80,06 % au terme de la dernière année du contrat, ce qui reste encore assez faible compte tenu de l'étalement sur une année supplémentaire. Les difficultés de gestion sont réelles, mais s'y ajoutent les niveaux de délégations d'autorisations de programme qui n'ont pas toujours été suffisantes, puisque 90,64 % seulement ont été déléguées au 31 décembre 1999.

Toutefois, ces résultats globaux recouvrent des réalités régionales assez différentes dues à la situation financière des régions et départements cosignataires (voire infra). La prolongation, par un allégement annuel de la charge, a permis d'achever les dossiers techniques des opérations le plus importantes ou les plus complexes.

BILAN D'EXÉCUTION DES CONTRATS DE PLAN ET CONTRATS DE VILLE

PAR L'ÉTAT AU 31 DÉCEMBRE 1999 (1)

(en millions de francs)

 

Montant
du contrat

AP déléguées

AP

engagées

Engagements
(en %)

Total mandaté

Guadeloupe

239,97

219,02

160,27

73,18

101,38

Guyane

227,27

210,09

192,77

91,76

132,10

Martinique

261,62

238,24

82,63

34,68

69,14

Réunion

383,65

348,37

348,30

99,98

178,33

Saint-Pierre-et-Miquelon

25,20

22,37

22,37

100

22,37

Mayotte

218,08

190,83

177,52

93,02

159,00

(1) en autorisations de programme (AP).

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

· Les contrats de plan 2000-2006

S'agissant des projets de contrats pour la période 2000-2006, le montant total de la part de l'État pour les seuls DOM (collectivités territoriales non comprises) est de 5.640 millions de francs, dont 1.366 millions de francs à la charge du secrétariat d'État à l'Outre-mer. Le montant total annuel croît de 25 % par rapport aux contrats précédents. Le coût annuel pour l'État par habitant passe de 440 francs à 483 francs, soit une croissance de près de 10 %. (il passe de 237 à 256 francs en moyenne métropolitaine).

La répartition des différentes actions ne diffère pas sensiblement de la précédente :

- 1.006 millions de francs (17,84 %) concernent des opérations de cohésion sociale (équipements sanitaires et sociaux, emploi et formation professionnelle, politique de la ville) ;

- 1.570 millions de francs (27,84 %) sont attachés aux infrastructures (routes, ports, aéroports, foncier et environnement) ;

- 1.973 millions de francs (34,98 %) sont consacrés à l'éducation et à la culture (constructions scolaires et universitaires, équipements sportifs et culturels) ;

- 1.091 millions de francs (19,34 %) relèvent du développement économique (développement rural, aide à la compétitivité des entreprises, du commerce et de l'artisanat).

La hausse la plus sensible concerne l'éducation et la culture dont la dotation fait plus que doubler et augmente de plus d'un milliard de francs.

Le tableau suivant indique la part de l'État contractualisée avec les différents départements et collectivités territoriales d'outre-mer.

PART DE L'ÉTAT CONTRACTUALISÉE DANS LES CONTRATS DE PLAN 2000-2006

(en millions de francs)

 

Montant total

Part du SEOM

Montant total annuel

Part annuelle du SEOM

 

Guadeloupe

1.284

270

145

39

 

Guyane

1.221

286

134

41

 

Martinique

1.119

330

113

47

 

Réunion

2.015

480

219

69

 

Saint-Pierre-et-Miquelon

109

29

16

6

 

Mayotte (1)

1.800

584

117

243

 
 

(1) la contractualisation avec Mayotte couvre seulement cinq ans.

 

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

On peut noter l'effort particulièrement important consenti en faveur de Mayotte, qui souffre d'un considérable retard d'équipement et de développement.

      c) Les infrastructures de la Guyane (chapitre 58-01)

Ce chapitre a été créé dès 1980 afin de compenser la faiblesse du fonds d'investissement des routes et des transports (FIRT), alimenté par la taxe sur les carburants.

Entre 1980 et 2000, 710 millions de francs d'autorisations de programme et 672 millions de francs de crédits de paiement ont été délégués. Ils ont permis différents aménagements routiers, portuaires et aéroportuaires, certaines de ces opérations bénéficiant par ailleurs de concours du FEDER.

En 1998, les crédits ont été accrus, tant en autorisations de programme (+ 37,1 %) qu'en crédits de paiement (+ 12,9 %). Cette augmentation correspondait à un financement supplémentaire pour trois ans de la route Régina-Saint-Georges (5 millions de francs). La dotation pour 1999 a poursuivi cet effort et celle votée pour 2000 ne connaît qu'une faible baisse de 71.000 francs en crédits de paiement, pour un total de 18,25 millions de francs, et de 470.000 en autorisations de programme, à 18 millions de francs, comme en 1998. En 2001, il est proposé de réduire ces dotations dans des proportions importantes : de 55,55 % pour les autorisations de programme, à 8 millions de francs, de 35,6 % pour les crédits de paiement, à 12 millions de francs.

Les travaux les plus récents, financés sur ce chapitre, concernent essentiellement la construction de la route Régina-Saint-Georges, qui devrait être achevée au plus tard début 2001 et l'aménagement du tronçon Balata-Maringouins de la route nationale (RN1), qui a été mis en service fin 1999.

Dans un proche avenir, l'aménagement du quai A du port de Larivot doit être entrepris, mais les travaux ont dû être différés du fait d'un appel d'offre infructueux. Cette opération bénéficie d'un fonds de concours du FEDER à hauteur de 15 millions de francs. Sur la dotation en autorisations de programme pour 2001, 2,5 millions de francs sont inscrits au titre du contrat de plan pour l'aménagement du port de Saint-Laurent-du-Maroni et 5,5 millions de francs, hors contrat de plan, sont destinés à la construction de deux ponts sur la RN1.

      3.- Les aides européennes aux départements d'outre-mer

      a) Des montants élevés pour des aides inégalement utilisées

Pour la période de programmation 1994-1999, les Documents Uniques de Programmation (DOCUP) approuvés au titre de l'objectif 1 ont repris les mêmes axes et parfois les mêmes opérations que dans la programmation précédente, les principales modifications intervenant généralement au niveau des mesures de redéploiements, dont les projets peuvent faire l'objet, en cours de gestion, en fonction de leur rythme de réalisation.

Pour l'ensemble des dispositifs, sur la période 1994-1999, 1.762 millions d'écus, soit près de 11,5 milliards de francs, étaient destinées aux DOM. A titre indicatif, les principales opérations financées par les fonds structurels dans chacun des DOM sont les suivantes (données 1998 et 1999) ():

Guadeloupe

L'ensemble des opérations agréées a permis de programmer sur la période 1994-1999 un montant s'élevant à 5,2 milliards de francs soit 93 % des crédits publics prévus au titre du DOCUP. Ce sous-programme mobilise 2,74 milliards de francs de crédits publics au titre du développement régional, dont 1,12 milliard de francs de crédits provenant du Fonds européen de développement des régions (FEDER), pour un taux d'engagement de 91 % au 30 octobre 1999.

Les grands travaux d'aménagement structurants que sont l'achèvement de l'aéroport international du Raizet et la liaison nouvelle port-aéroport ont constitué un levier important sur l'ensemble du programme du fait de l'envergure de ces réalisations.

Il faut noter par ailleurs, que si la plupart des opérations relèvent des mesures liées au développement des entreprises et du tissu économique et industriel de l'archipel, c'est surtout l'aide à l'investissement matériel qui connaît un bon niveau de consommation dans ce domaine par rapport au développement de l'ingénierie financière et de l'investissement immatériel. D'autres mesures relevant des axes « tourisme » et « environnement », ainsi que les crédits engagés au titre de l'assistance technique viennent ensuite compléter, à des degrés divers, le niveau d'avancement de ce programme.

En matière d'emploi, le Fonds social européen (FSE) a été mobilisé à hauteur de 689,8 millions de francs (taux d'engagement à 98 %).

Les principales opérations relevant de ce sous-programme s'inscrivent dans la continuité des actions menées en faveur de la formation et de l'aide à l'embauche impulsées en début de programmation. On dénombre 62.059 stagiaires concernés par les actions de formation mises en _uvre de 1994 à 1998. 29.736 hommes et 32.283 femmes ont été formés. Le public éligible de moins de 25 ans a été de 28.625 soit 46 %. On compte parmi eux 226 personnes handicapées.

Les propositions d'actions qui ont été envisagées pour les années 1998 et 1999 notamment pour l'accompagnement des actions nationales (emplois jeunes, lutte contre le chômage de longue durée, accompagnement des CES), ont permis un meilleur niveau de réalisation du FSE.

Au titre du Fonds européen d'orientation et de garantie agricoles (FEOGA), 943,78 millions de francs de crédits publics ont été mobilisés dont 504,83 millions de francs de crédits provenant directement du FEOGA. Les principales opérations financées relèvent ici de deux mesures, le développement de la filière banane et le projet d'irrigation. Les autres mesures présentent des niveaux d'engagement plus modestes notamment dans le domaine de la diversification de la production. Ce sont en effet des mesures innovantes et leur mise en _uvre est plus difficile.

Depuis 1999, un prêt de 30 millions d'euros a par ailleurs été accordé à la Guadeloupe par la Banque européenne d'investissement afin de contribuer au financement de l'extension et de l'aménagement de son réseau routier.

Martinique

Sur la période de programmation actuelle, la Martinique a bénéficié de 2,7 milliards de francs. Le FEDER représente, avec 1,4 milliard de francs, 51 % des fonds structurels du DOCUP. Les principaux axes d'intervention du FEDER concernent le développement touristique, le désenclavement de l'île et l'environnement.

On peut citer à cet égard l'achèvement du palais des congrès de Madiana en 1998, financé à hauteur de 35 millions de francs de FEDER pour un coût global de 135 millions de francs, et l'achèvement des infrastructures aéronautiques de l'aéroport du Lamentin pour 28,4 millions de francs de FEDER.

En matière d'équipement, le principal chantier de désenclavement est le début, en juin 1998, des travaux d'infrastructures de la zone industrialo-portuaire de la Pointe des Grives pour lequel 206 millions de francs du FEDER sont mobilisés au titre du DOCUP et 70 millions de francs pour les superstructures dans le cadre du programme d'initiative communautaire pour les régions isolées REGIS II. Concernant le projet de construction d'un port de plaisance l'Etang z'Abricots, sa programmation à hauteur de 42millions de francs de FEDER reste assujettie à la conclusion du rapport d'enquête publique et de la passation des marchés.

Les mesures environnementales mobilisent 470 millions de francs du FEDER. Elles concernent en particulier les travaux permettant de lutter contre les eaux et les crues (98 millions de francs), la collecte et le traitement des eaux usées (146 millions de francs) et enfin l'élimination des déchets pour 155,6 millions de francs. A cet égard, la construction de l'usine d'incinération des ordures ménagères du syndicat intercommunal du centre de la Martinique a été programmée à hauteur de 153 millions de francs du FEDER pour un coût global de 278 millions de francs ; les travaux devraient commencer au cours du dernier trimestre.

Il convient enfin de noter les efforts faits en faveur de la modernisation des transports collectifs (appontements et arrêts de bus) qui mobilisent 62 millions de francs de FEDER.

Le FSE représente 25 % des fonds structurels de la Martinique. Il est engagé à hauteur de 78 %. Le montant programmé au titre du FSE en 1998 s'élève à 133 millions de francs et celui prévu pour 1999 est de 156,2 millions de francs. Les orientations gouvernementales en faveur des jeunes et des chômeurs ont été reprises à l'échelon local, ces deux catégories de public étant les principaux bénéficiaires du FSE. La lutte contre l'exclusion (handicapés, RMIstes, détenus) a également fait l'objet d'une attention particulière.

Le FEOGA connaît un taux d'engagement satisfaisant (85,6 %) sur le DOCUP avec 381,3 millions de francs notifiés sur une enveloppe globale de 445,5 millions de francs. Les mesures financées par le FEOGA concernent essentiellement la modernisation de la filière banane (174 millions de francs), l'équipement rural et l'irrigation (68 millions de francs) ainsi que la diversification des productions agricoles (43,2 millions de francs).

Guyane

Les taux de programmation et d'engagement des fonds sont globalement satisfaisants : le FEDER et le FEOGA sont engagés à 85 %. A noter que le taux d'engagement de REGIS II reste inférieur en raison du retard pris dans l'exécution de ce programme.

Les crédits FEDER ont principalement bénéficié au financement d'infrastructures de désenclavement telles que les routes et l'aérogare de Cayenne Rochambeau (coût prévisionnel de 138 millions de francs), les équipements de formation (collèges, lycée agricole, construction d'un centre AFPA, École nationale de musique et de danse), ainsi que les mesures « aides à l'industrie », « zones industrielles et artisanales » avec le parc d'activité économique de Rémire-Monjoly, et la « promotion des ressources d'intérêt touristique » avec le projet de camp de la transportation de Saint-Laurent du Maroni.

Le volet FEOGA est, pour sa part, essentiellement concentré sur la mesure « développement rural » (équipements publics ruraux) qui mobilise sur la phase actuelle de programmation près de 205 millions de francs, bien qu'une récente reprogrammation ait prévu un redéploiement au profit des mesures de modernisation des exploitations agricoles et de la mesure « forêt » (équipement en voirie forestière) et d'une nouvelle sous-mesure pour la réhabilitation lourde de la voirie en zone agricole.

L'aide du FSE s'élève à 239,288 millions de francs. Comme les années précédentes, elle a permis de poursuivre les programmes de valorisation des potentialités et la remise à niveau dans le cadre de la valorisation des ressources humaines.

Réunion

Les crédits communautaires sont globalement plus importants que dans les autres DOM avec environ 5,2 milliards de francs répartis entre d'une part, le DOCUP et d'autre part, le programme REGIS II.

Pour le FEDER, au 31 octobre 1999, le niveau d'engagement du DOCUP se situe à 94 %, celui de REGIS II à 70 %. Il contribue principalement au financement du grand projet « basculement des eaux d'Ouest en Est », qui représente 1,5 milliard de francs en coût total. Les autres opérations concernent le soutien à la modernisation et à l'investissement des entreprises pour lequel le comité local de suivi a encouragé le financement de plus de 396 millions de francs d'investissements, la réalisation des établissements de formation professionnelle bénéficiant d'un financement du FEDER de 61,73 millions de francs. Au niveau du sous-programme « désenclavement », c'est le projet du Boulevard Sud qui connaît le meilleur rythme de réalisation avec près de 75 millions de francs de travaux.

Les crédits du FEOGA ont été engagés à 95 % au 31 octobre 1999. Ce fonds présente également un très bon niveau d'engagement notamment sur les mesures liées aux « productions agro-alimentaires » et les « mesures socio-structurelles » (régimes d'aides européennes relatifs à l'installation des jeunes agriculteurs et la modernisation des exploitations), ainsi que le programme de diversification et de valorisation des productions.

Les crédits FSE ont été engagés à 110 % (45,4 millions d'euros sur la tranche 1999 du DOCUP). A titre d'exemple, grâce au concours communautaire, 1.085 personnes ont bénéficié d'actions pré-qualifiantes et qualifiantes, 5.694 apprentis ont pu s'orienter vers les sections d'apprentissage comme l'hôtellerie-restauration et plus de 4.000 personnes, dont 1.577 femmes, ont bénéficié du dispositif de mobilité professionnelle.

Il convient de signaler également que le FSE a permis de mener d'importants programmes d'intervention dans les entreprises (diagnostics, plans de formation... ) et à assurer une mission d'appui technique dans le suivi des contrats d'objectifs.

Enfin, depuis 1993, la Réunion a bénéficié de près de 171 millions d'euros de prêts de la Banque européenne d'investissement, pour l'aménagement de son aéroport, l'amélioration de son réseau routier et la modernisation des infrastructures de l'enseignement secondaire.

      b) Une réforme destinée à favoriser une meilleure gestion

Les nouveaux règlements communautaires ont été approuvés lors du Sommet européen de Berlin (24 mars 1999). Ils définissent notamment les objectifs généraux de la politique régionale, les modalités de fonctionnement des différents fonds structurels, les conditions d'éligibilité des régions de l'Union aux fonds, la répartition financière entre les fonds et les objectifs, ainsi que les taux et les conditions de cofinancement des mesures à mettre en _uvre. Ils constituent la base sur laquelle est élaboré chacun des DOCUP et sur laquelle se fondent les interventions financières de la Communauté européenne.

La réforme, qui obéit à une logique de concentration des aides de l'Union européenne en faveur des régions en retard de développement, s'est traduite essentiellement par la réduction du nombre des objectifs qui passent de sept à trois.

Conformément à la décision n° 1999/502/CE de la Commission du 1er juillet 1999 établissant la liste des régions concernées par l'objectif 1 « promouvoir le développement et l'ajustement structurel des régions en retard de développement » pour la période 2000-2006, les quatre DOM (Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion) restent éligibles.

La disparition du programme d'initiative REGIS II est justifiée par la réduction du nombre des initiatives communautaires. Sur un plan pratique, la perte financière induite par la disparition du programme REGIS II, est compensée par un accroissement important de l'enveloppe financière accordée aux DOCUP. Néanmoins, au niveau politique, elle souligne un défaut de reconnaissance de la spécificité ultrapériphérique au moment où le Traité d'Amsterdam vient d'en consolider le statut via l'article 299-2.

Les régions de l'Union européenne relevant de l'objectif 1 perçoivent 69,7 % des ressources financières, soit l'équivalent de 136.000 millions d'euros, dont 3.254 millions d'euros pour les DOM français. Les enveloppes financières affectées aux DOM ont pratiquement doublé entre les deux périodes

FINANCEMENT AU TITRE DE L'OBJECTIF POUR 2000-2006

(en millions d'euros)

Régions

Dotation 1994-1999

Dotation 2000-2006

Guadeloupe

420

749,7

Guyane

193

343,6

Martinique

405

624,7

Réunion

774

1.405

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

Il est créée une réserve de performance : 4 % des crédits prévus seront mis en réserve au début de la période. A mi-parcours la Commission procédera, en étroite collaboration avec l'État membre, à l'allocation de la réserve de performance aux programmes les plus performants. La performance des programmes sera évaluée sur la base d'indicateurs quantifiés définis par l'État membre ; ces indicateurs devront refléter l'efficacité, la gestion et l'exécution financière.

La détermination du taux de cofinancement conditionne fortement les taux de mobilisation des enveloppes allouées. Lors de la programmation 1994-1999, les DOM n'ont pas utilisé au maximum les possibilités d'intervention des fonds structurels du fait du nombre important des mesures inscrites dans les documents de programmation.

Sur la période 2000-2006, les taux d'intervention communautaire sont principalement définis dans les règlements (CE) n° 260/1999 (portant dispositions générales des fonds structurels), n°1257/1999 et 1750/1999 (concernant le développement rural). Les fonds interviennent différemment selon le type de mesure.

La programmation couvre une période de sept ans. Toutefois, la programmation pourra faire l'objet d'une adaptation au milieu de la période, à la suite de l'évaluation à mi-parcours et de l'allocation de la réserve de performance.

Les modalités de gestion financière en revanche ont été profondément modifiées en vue d'assurer une exécution plus efficace des programmes. Les engagements seront effectués de façon annuelle au plus tard le 30 avril. La part d'un engagement qui n'aura pas fait l'objet de paiement à la fin de la 2ème année après celle de l'engagement, sera dégagée d'office par la Commission.

Pour les paiements, un nouveau système est mis en place :

· lors du premier engagement, la Commission verse à l'État membre un acompte de 7 % maximum de la participation totale des fonds au programme ;

· les paiements suivants remboursent les dépenses effectivement payées et certifiées par l'État membre ;

· le solde est payé si la Commission a reçu et approuvé tous les documents requis (déclaration de dépenses, rapports annuels et rapport final).

Enfin, le contrôle financier est renforcé : le règlement (CE) n° 1260/1999 indique clairement que les États membres sont responsables en premier lieu du contrôle financier, de la poursuite des irrégularités et des corrections financières. Toutefois, en cas de défaillance des États membres ou d'irrégularité financière, la Commission intervient pour demander à l'État concerné ses observations. En l'absence de correction par l'État et en cas d'échec d'une rencontre de conciliation, la Commission peut réduire ou supprimer tout ou partie de la participation communautaire pour le programme incriminé.

Pour ce qui est des deux collectivités d'outre-mer, qui ne sont pas membres de l'Union au même titre que les départements d'outre-mer, à l'issue des négociations relatives à la révision à mi-parcours de la décision d'association, la France a obtenu une enveloppe de 50,3 millions d'euros (330 millions de francs) au titre du VIIIème Fonds européen de développement (FED) pour la période 1996-2000, soit une augmentation de 25 % par rapport au VIIème FED.

Le secrétariat d'État à l'outre-mer a effectué le partage entre les différents pays et territoires d'outre-mer : Mayotte reçoit 10 millions d'euros (65,6 millions de francs), soit une augmentation de 49 % par rapport au VIIème FED, qu'elle consacre à un projet de traitement et assainissement des eaux ; Saint-Pierre-et-Miquelon se voit attribuer 4 millions d'euros (26,2 millions de francs), soit 17,6 % d'augmentation, qui financent la reconstruction de l'hôpital de Saint-Pierre, la rénovation du système d'assainissement des eaux et l'amélioration de la piste de l'aérodrome de Miquelon.

La période couverte par le VIIIème FED s'achevant en 2000, des négociations sont actuellement en cours pour l'élaboration d'un nouveau régime d'association, et d'un nouveau dispositif d'aide().

Il apparaît ainsi que les fonds européens apportent, bon an mal an, un complément nécessaire aux faibles investissements des départements et collectivités territoriales d'outre-mer et aux dotations encore insuffisantes de l'État. Les nouvelles règles devraient permettre une utilisation pour rapide et plus efficace de ces fonds.

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II.- UN BUDGET DE MISE EN _UVRE DU VOLET ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DE LA FUTURE LOI D'ORIENTATION
QUI S'AVÈRE DÉCEVANT

    A.- LE VOLET ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DE LA FUTURE LOI D'ORIENTATION POUR L'OUTRE-MER

Le projet de loi d'orientation pour l'outre-mer a été discuté en première lecture les 10 et 11 mai par votre Assemblée et les 13 et 14 juin 2000 par le Sénat ; après l'échec d'une commission mixte paritaire, il a fait l'objet d'une nouvelle lecture devant votre Assemblée les 11 et 12 octobre 2000. Il se veut le résultat d'un travail de réflexion commencé en 1998 lorsque les parlementaires Claude Lise et Michel Tamaya avaient été chargés de proposer des adaptations institutionnelles à la situation des DOM, tandis que M. Bertrand Fragonard et Mme Éliane Mossé, respectivement expert en redistribution et économiste, rédigeaient parallèlement l'un un rapport sur l'économie des DOM, l'autre un rapport sur les questions sociales. A la mi-décembre 1999, un « document-cadre » était soumis aux assemblée locales, dont les réactions se sont avérées pour le moins contrastées et critiques.

Devant l'opposition de nombre d'élus domiens, l'économie du texte a été notablement bouleversée puisque la partie institutionnelle, comportant la création d'un « Congrès », dont la fonction a diminué au fil du temps, la bidépartementalisation de la Réunion et le transfert de nouvelles compétences, initialement mise en avant et présentée comme la plus novatrice, est renvoyée à la fin du projet et reportée, dans un premier temps, à l'horizon 2002.

Le volet le plus important, pour l'avenir des DOM comme pour les finances publiques, puisque son coût est évalué entre 4 et 5 milliards de francs - financement du passage à 35 heures inclus -, est économique et social. Les principales mesures figurant dans le texte sont les suivantes :

· exonération des charges sociales pour toutes les entreprises de moins de 11 salariés et les entreprises, quelle que soit leur taille, des secteurs exposés : artisanat, commerce, industrie, tourisme, hôtellerie-restauration, presse, agriculture-pêche et BTP, ainsi que (à la suite d'un amendement adopté par votre Assemblée) nouvelles technologies et transport terrestre de personnes ; dans la limite de 1,3 SMIC , pour un coût estimé à 3,5 milliards de francs qui seront inscrits sur le budget de l'emploi ;

· mise en place d'un dispositif spécifique de primes à la création d'emplois pour les entreprises qui réalisent 20 % de leur chiffre d'affaires dans leur environnement régional ;

· mesure facilitant les départs en préretraite à partir de 55 ans contre l'embauche de jeunes ;

· alignement progressif du RMI sur celui de la métropole : à l'issue de la première lecture, votre Assemblée a réduit la période transitoire d'alignement du RMI de cinq à trois ans ;

· plan d'apurement des dettes sociales et fiscales sur sept ans pour les entreprises en difficultés.

Au cours de la première lecture, votre Assemblée a inclus au projet une aide financière de l'État à des « projets initiative-jeunes » en direction des jeunes demandeurs et a adopté un amendement supprimant la « prime d'éloignement » versée aux fonctionnaires métropolitains travaillant outre-mer ou ultramarins travaillant en métropole.

Le Sénat a supprimé la bidépartementalisation de la Réunion, la mise en place de « Congrès » et les mesures d'annulation partielle des créances fiscales et sociales et a étendu les exonérations fiscales aux dix premiers salariés des entreprises de moins de 20 salariés.

Votre Rapporteur spécial regrette que les améliorations ainsi apportées au projet par le Sénat, ait été supprimées par l'Assemblée, et déplore que tous les problèmes n'aient pas été pris en compte.

· La « bidépartementalisation » est objet de trop polémiques et de changements d'avis pour être bien perçue par l'ensemble des Réunionnais, tandis qu'elle ne résoudra pas, à elle seule, les graves problèmes de développement que connaît l'île. Tout comme la mise en place de « Congrès » dont la constitutionnalité est incertaine, ce changement institutionnel est de nature à créer un climat d'incertitudes qui ne peut qu'inquiéter les investisseurs potentiels. Son coût pour les finances publiques n'a semble-t-il pas encore été évalué. Le secrétariat d'État à l'outre-mer indique seulement qu'il sera inscrit dans le budget pour 2002, sur la section de l'Outre-mer en ce qui concerne les frais de personnel et sur la section de l'Intérieur pour les coûts relatifs à la mise en place et au fonctionnement de la nouvelle structure. Rien n'est prévu pour le budget 2001 alors que la bidépartementalisation entrera en vigueur le 1er janvier 2001, à la suite de l'adoption d'un amendement par votre Assemblée en nouvelle lecture.

· L'annulation, même plafonnée à 50 % des créances, des dettes sociales et fiscales des entreprises en difficultés est aussi très contestable. Elle risque d'accroître le non-recouvrement, les entreprises anticipant une nouvelle « amnistie », et est source d'inégalité : entre les entreprises qui ont payé et celle qui seront amnistiées, entre les entreprises des DOM et celles de métropole, qui ne peuvent bénéficier du plan d'apurement. De plus, le coût de la mesure n'a jamais été donné, et pourrait s'avérer exorbitant : au 31 décembre 1998, les seuls impayés sociaux des DOM dépassaient déjà les 10 milliards de francs... Même si une partie de ces créances n'aurait jamais pu être recouvrée - cette partie s'élèverait à 60 % pour les créances sociales d'après une évaluation de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale -, cette annulation partielle pourrait coûter plusieurs milliards de francs.

· L'extension des exonérations sociales aux dix premiers salariés des entreprises comptant jusqu'à 20 salariés était un point positif. En effet, réserver cette mesure aux entreprises de moins de 11 salariés va entraîner de regrettables effets de seuil qui pourraient se traduire par le morcellement d'entreprises plus grandes ou le licenciement d'une partie des salariés et créer une distorsion entre entreprises du même secteur mais de tailles différentes. De plus, comme seuls 4,4 % des entreprises des DOM comptent 10 salariés ou plus, le coût budgétaire supplémentaire n'en aurait pas été très élevé.

Votre Rapporteur spécial regrette que certains problèmes pénalisants pour les DOM n'aient pas été pris en compte et ne reçoivent pas aujourd'hui ni attention, ni crédits suffisants, nous y reviendrons dans la troisième partie du présent rapport.

    B.- L'EMPLOI EST LA PRIORITÉ DE LA LOI D'ORIENTATION

      1.- Le Fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon financera les nouveaux dispositifs 

Le Fonds pour l'emploi dans les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon (FEDOM) regroupe les financements des actions spécifiques menées par l'État en faveur de l'emploi et de l'insertion.

Conformément aux dispositions du décret n° 95-984 du 25 août 1995 qui organise le fonctionnement et la gestion du FEDOM, les décisions relatives à la gestion du fonds sont arrêtées par un comité directeur qui comprend, outre les représentants des administrations centrales concernées (budget, emploi-solidarité et outre-mer), des parlementaires d'outre-mer ainsi que les préfets des départements concernés, ce qui permet d'adapter la gestion des mesures aux situations locales.

Les actions financées par le FEDOM sont les suivantes :

· le financement du programme des contrats emploi-solidarité (CES) ;

· le versement aux agences d'insertion d'une participation financière aux contrats d'insertion par l'activité (CIA) ;

· l'exonération des charges sociales et les primes des contrats d'accès à l'emploi (CAE) ;

· l'exonération des charges sociales pour les contrats de retour à l'emploi (CRE) en cours ;

· le financement du dispositif instituant une prime à la création d'emplois ;

· la dotation des agences d'insertion de la part de la créance de proratisation réservée à l'insertion ;

· le financement du dispositif « nouveaux services - nouveaux emplois » (emplois-jeunes) ;

· le financement des contrats emplois-consolidés, (CEC) à partir de 2000, alors qu'il était auparavant assuré par le ministère de l'Emploi et de la solidarité.

La loi d'orientation prévoit une enveloppe spécifique de 240 millions de francs, au sein du FEDOM, pour assurer le financement de quatre nouveaux dispositifs :

· les projets initiatives jeunes (PIJ), conçus comme une aide au projet professionnel pour les jeunes de moins de 30 ans désirant soit créer une entreprise dans les DOM, soit suivre une formation professionnelle hors du département d'outre-mer ;

· l'allocation de retour à l'activité (ARA) qui est destinés à encourager le retour à l'activité des bénéficiaires de minima sociaux ;

· la prime à la création d'emploi qui bénéficiera aux entreprises exportant au moins 20 % de leur production ;

· le congé-solidarité qui permet un départ en préretraite à 55 ans compensé par l'embauche de jeunes.

Le principe de fongibilité des crédits des FEDOM (hors les crédits destinés à financer les emplois-jeunes) permet de redéfinir les priorités et de modifier les différentes enveloppes budgétaires en fonction du nombre de solutions retenues et de leur répartition.

      2.- Bilan et perspectives pour 2001

      a) Les actions du Fonds : de forts contrastes entre les départements

Pour 2000, le montant total des crédits inscrits au chapitre 44-03 par la loi de finances initiale s'est élevé à 2.101,7 millions de francs, auxquels sont venus s'ajouter 180,8 millions de francs de crédits reports de 1999 destinés à financer des emplois-jeunes. Cette dotation a été abondée en cours de gestion des crédits d'un montant de 205,06 millions de francs correspondant à la part d'insertion de la créance de proratisation pour 2000. En cours de gestion, l'enveloppe globale du FEDOM s'élève donc à 2.487,56 millions de francs.

L'action du FEDOM pour 2000 a été définie par le comité directeur du 20 janvier 2000 puis complétée par le comité permanent du 29 juin 2000. L'effort réalisé au cours des deux dernières années a été accentué, avec d'une part, la reconduction des mesures ouvertes en 1999, soit 34.000 CES, 15.000 CIA, 7.000 CAE et 500 primes à la création d'emplois et d'autre part, l'ouverture d'une enveloppe complémentaire de 1.000 CES et 500 CAE. Compte tenu du rattachement au FEDOM du dispositif CEC, une dotation de 2.800 nouveaux contrats a été prévue. Enfin, l'ouverture de 3.000 nouveaux postes d'emplois-jeunes a été décidée.

Le tableau ci-après présente l'exécution des crédits du fonds en 1999 et les prévisions pour 2000 :

EXÉCUTION DES CRÉDITS DU FEDOM EN 1999 ET PRÉVISIONS POUR 2000

 

Exécution 1999

Loi de finances initiale 2000

Mesures d'insertion

Coût budgétaire (en millions de francs)

Nombre
de contrats signés

Dotation budgétaire (en millions de francs)

Nombre
de contrats

prévus

CES

677,16

40.030

631,50

35.000

CEC

-

-

291,70

2.800

CIA

182,03

20.197

186,00

15.000

CAE

212,00

6.820

354,00

7.500

Primes

8,77

366

12,00

500

CRE

6,00

(nc)

10,00

(nc)

Études

0,34

(nc)

1,00

(nc)

Emplois-jeunes

559,74

3.823

615,00

3.000

Total

1.646,04

71.236

2.101,20

63.800

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

L'analyse de l'utilisation du dispositif des emplois-jeunes, présenté dans le tableau suivant, montre clairement un contraste entre les départements d'outre-mer. Le nombre moyen d'emplois-jeunes créés en 1999 pour 1.000 habitants est de 4,37 pour l'ensemble des DOM, contre 1,83 en métropole. Le département où la proportion d'emplois-jeunes est la plus faible est la Guadeloupe, avec un taux inférieur au taux métropolitain, alors que le taux martiniquais est trois fois plus élevé.

LES EMPLOIS-JEUNES DANS LES DOM FIN 1999 (1)

 

FEDOM

Éducation nationale

Intérieur

Total général

Nombre de créations en 1999 par tranche de 1.000 habitants

Nombre de postes

Aides éducateurs

Adjoints de sécurité

Guadeloupe

856

568

34

1.458

1,75

Guyane

475

265

16

756

2,85

Martinique

2.296

487

27

2.810

5,74

Réunion

3.870

1.271

57

5.198

5,11

Total

7.497

2.591

134

10.222

4,37

(1) il s'agit du nombre total d'emplois créés depuis l'entrée en vigueur du dispositif en octobre 1997, sauf pour le nombre de créations pour 1.000 habitants, qui est calculé sur les créations de 1999.

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

      b) Les perspectives pour 2001 : le financement simultané d'une douzaine de dispositifs

Le montant des crédits du FEDOM (chapitre 44-03) est porté pour 2001 à 2.640 millions de francs, enregistrant un forte hausse de 25,6 %. En 2000, il avait déjà connu une augmentation de 16,24 %, mais elle était essentiellement le résultat du transfert de 291,7 millions de francs en provenance du ministère de l'Emploi et de la Solidarité pour financer les contrats emplois-consolidés. Pour 2001, il s'agit en revanche de moyens nouveaux, dont 290 millions de francs relèvent directement de la mise en _uvre de la loi d'orientation relative à l'outre-mer.

A hauteur de 1.513 millions de francs (+ 3,4 % par rapport à 2000), il financera environ 63.800 mesures « classiques » d'insertion :

· 35.000 contrats emploi-solidarité (pour un coût de 630 millions de francs, inscrit à l'article 11 du chapitre 44-03) ;

· 2.800 contrats emplois-consolidés (336 millions de francs, inscrits à l'article 12, en hausse de 44,3 millions de francs) ;

· 15.000 contrats d'insertion par l'activité, destinés à des bénéficiaires du RMI (189 millions de francs) ;

· 7.500 contrats d'accès à l'emploi (348 millions de francs) ;

· 500 primes à la création d'emploi.

S'y ajouteront 24.200 mesures créées par la loi d'orientation et auxquelles sera consacrée une enveloppe de 240 millions de francs :

· 10.000 projets initiative jeunes, pour 100 millions de francs ;

· 10.000 allocations de retour à l'emploi (90 millions de francs) ;

· 1.200 primes à la création d'emploi « nouvelle formule », pour 10 millions de francs ;

· 3.000 préretraites financées à hauteur de 40 millions de francs, les conseils général ou régional, ainsi que les entreprises, devant également apporter leur contribution.

Votre Rapporteur spécial s'interroge sur la raison d'être de ces nouveaux dispositifs. Il observe que les préconisations de bon sens du rapport Fragonard (rénovation et adaptation du CIA, augmentation du nombre de CAE) n'ont pas été suivies, alors que quatre nouvelles mesures viennent s'ajouter aux huit déjà en vigueur, qui ne sont pas modifiées et dont aucune n'est supprimée. Cette prolifération de dispositifs n'est pas du tout lisible et ressemble à un empilement désordonné. Il ne fait aucun doute qu'un petit nombre de dispositifs simples serait plus efficace que cette douzaine de mesures.

    C.- LE REVENU MINIMUM D'INSERTION EST EN VOIE D'ALIGNEMENT SUR CELUI DE LA MÉTROPOLE

Comme en métropole, le dispositif du revenu minimum d'insertion (RMI) est un maillon essentiel de la lutte contre l'exclusion dans les DOM. Jusqu'alors, il y était l'objet d'adaptations spécifiques. La loi d'orientation pour l'outre-mer prévoit leur suppression et l'alignement du niveau du RMI ultramarin sur celui de métropole en trois ans. Cette décision est lourde de conséquences car elle remet en cause le fonctionnement actuel du dispositif.

      1.- L'évolution non maîtrisée du nombre de bénéficiaires

Depuis août 1993, on constate une augmentation ininterrompue du nombre d'allocataires du RMI. Fin décembre 1999, ce chiffre se monte à 127.176 bénéficiaires, dont 27,9 % de familles monoparentales et 50,6 % d'allocataires isolés. La croissance au cours de l'année 1999 est de 7,2 %, supérieure encore à celle enregistrée en 1998, quand elle était en métropole de + 2,5 %. Les RMistes représentent plus de 16 % de la population. Au premier semestre 2000, le nombre de RMIstes baisse, pour la première fois, de 1,7 % en métropole, mais continue sa progression à un rythme élevé (3,1 %) dans les DOM.

Corrélativement, le montant des dépenses d'allocation augmente depuis 1994, pour atteindre 2.271,5 millions de francs en 1998 et 2.692 millions de francs en 1999.

Le rapport Fragonard explique le nombre très élevé d'allocataires du RMI par une série de raisons : la situation sociale et économique difficile, bien sûr, mais aussi la faiblesse de l'accès des habitants des DOM à d'autres dispositifs de revenu ou d'indemnisation (allocation parentale d'éducation, allocation chômage) et le caractère lacunaire des contrôles.

Évoquant ce dernier problème, le rapport parle d'un « dispositif mal maîtrisé ». Il regrette la quasi-absence de dénonciation des situations anormales (travail non déclaré, concubinage...) par les services sociaux ou par les maires, qui en ont pourtant l'obligation légale, déplore que les commissions locales d'insertion ne proposent pratiquement jamais de suspension au préfet pour refus d'insertion, ce qui fait que, faute de suspension, « le RMI est devenu un dispositif d'assistance pour une bonne partie des bénéficiaires ». Le rapport conclut que « l'avis général est qu'une partie importante, voire une majorité pour certains, des bénéficiaires du RMI exercent une ou plusieurs activités non déclarées ».

Le RMI perd ainsi une partie de sa raison d'être et constitue une sorte de « rente », indûment perçue. Étant donné le coût du dispositif, pour l'État, mais aussi pour les départements, souvent exsangues, qui financent une partie des mesures d'insertion, votre Rapporteur spécial estime nécessaire que plus de rigueur soit appliquée dans l'avenir. Or aucun progrès de ce genre ne figure dans la loi d'orientation pour l'outre-mer alors même que cette dernière prévoit l'alignement en trois ans du RMI dans les DOM sur son niveau de métropole.

      2.- L'insertion des allocataires du revenu minimum d'insertion

Rappelons que, dans le système en place actuellement, le barème du RMI applicable dans les DOM est égal à 80 % du montant fixé pour la métropole. L'allocation mensuelle moyenne s'élève à 1.760 francs, alors qu'elle est de 2.104 francs en métropole. C'est cette spécificité qui est donc supprimée par la loi d'orientation, au bénéfice d'un alignement, en trois ans, sur le niveau du RMI métropolitain et d'une compensation, pour les actions d'insertion et de logement, des pertes provoquées par la suppression de la créance de proratisation. Les RMIstes d'outre-mer recevront 166 francs de plus chaque année pendant trois années de suite. Le coût de l'alignement est estimé à un milliard de francs en année pleine, après l'alignement progressif.

      a) Vers la disparition du mécanisme de la créance de proratisation

En compensation du taux inférieur du RMI dans les DOM, l'État participait au financement d'actions d'insertion au profit des bénéficiaires du RMI, en plus de celles de droit commun. Ces crédits, appelés créance de proratisation du RMI, représentaient la différence entre les allocations versées dans les DOM chaque année et le montant qu'elles auraient atteint, en prenant en compte le nombre de personnes qu'elles auraient concerné, si le barème métropolitain avait été appliqué.

En 1999, le montant de cette créance s'est élevé à 815 millions de francs ; en 2000, elle atteint 878,5 millions de francs.

La créance est répartie, après avis des conseils d'administration des agences d'insertion et du comité directeur du FEDOM, entre une part insertion et une part logement social. En 2000, la part insertion était de 205,05 millions de francs, la part logement de 673,5 millions de francs.

La créance de proratisation, hors la part consacrée au logement, est versée par le Fonds pour l'emploi dans les DOM (FEDOM) au budget des agences d'insertion créées pour élaborer et mettre en _uvre la politique d'insertion en faveur des bénéficiaires du RMI. La répartition s'opère en fonction du nombre d'allocataires dans chaque département.

La suppression en trois ans de la créance de proratisation va se traduire par un moindre versement, puis la disparition du versement, au profit des agences d'insertion. En 2001, le versement sera réduit d'un tiers, soit de 68,5 millions de francs, si on prend comme référence la créance qui aurait dû être versée en 2001 pour l'insertion, soit 205,5 millions de francs.

L'État s'est engagé à compenser cette baisse. Pourtant, seuls 50 millions de francs sont inscrits à cette fin dans le budget du FEDOM (chapitre 44-03, article 50). De plus, comme nous le verrons pour la part logement de la créance, pour laquelle le problème est encore plus grave puisqu'elle est plus élevée, la compensation ne tiendra pas compte de l'évolution des flux de RMIstes, qui conserve un rythme rapide dans les DOM. D'autre part, rien n'oblige l'État à maintenir cette compensation au-delà de la période d'alignement du RMI.

Or il est essentiel de favoriser avant tout le travail de réinsertion mené par les agences : la hausse du RMI ne semble, ni directement ni indirecte, un moyen d'y parvenir.

      b) Le rôle des agences départementales d'insertion

La loi du 25 juillet 1994 a créé les agences départementales d'insertion afin d'améliorer les conditions de l'insertion des bénéficiaires du RMI. Ces quatre agences disposent aujourd'hui de 428 emplois permanents et sont les employeurs uniques des bénéficiaires du RMI recrutés en contrats d'insertion par l'activité (CIA).

Le budget des agences a été réparti comme suit en 1999 :

BUDGETS PRIMITIFS DES AGENCES D'INSERTION (1999-2000)

(en millions de francs)

 

1999

2000 (1)

Guadeloupe

199,5

-

Guyane

74,7

-

Martinique

202,7

-

Réunion

404,5

-

Total

881,4

1.061

(1) Quoique demandée, cette information n'a pas été transmise.

Source : ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

Le budget des agences d'insertion regroupe en 1999 :

· une participation financière de l'État, comportant la part insertion de la créance de proratisation et la contrepartie de l'allocation du RMI pour les bénéficiaires d'un contrat d'insertion par l'activité (193,6 millions de francs, contre 179,1 millions de francs en 1998) ;

· une participation financière du département qui correspond au moins à 20 % du montant des sommes versées par l'État au titre de l'allocation du RMI, déduction faite des 3,75 % consacrés à la couverture complémentaire de la sécurité sociale. Ces crédits représentaient en 1999 389,77 millions de francs et dépasseront 400 millions de francs en 2000 ;

· la participation du FEDOM au financement des contrats d'insertion par l'activité (182,03 millions de francs en 1999) ;

· la contribution financière des utilisateurs auprès desquels l'agence place des personnes en CIA.

Depuis plusieurs années, en principe à cause des récentes réformes institutionnelles (voir infra), les agences n'ont pas entrepris de changements radicaux de leurs programmes. Le comité directeur du FEDOM leur a fixé un objectif initial de 15.000 contrats d'insertion par l'activité. Il a été largement dépassé en 1998, mais ce n'est qu'un objectif quantitatif sans grande signification.

Les agences élaborent le programme départemental d'insertion, qui représente 40 % du budget global, et le programme annuel de tâche d'utilité sociale qui représente 48 % des dépenses et consiste principalement dans la mise en _uvre des contrats d'insertion par l'activité.

      c) Une réforme enfin achevée, mais incomplète

Les agences ont été mises en place le 1er janvier 1995, mais les élus locaux ont rapidement émis des reproches à l'encontre du dispositif de lutte contre l'exclusion spécifique aux DOM, en particulier concernant la trop grande complexité des procédures administratives et budgétaires, imposée par les textes, et la remise en cause de certains des principes fondamentaux de la décentralisation.

Le système devait évoluer dans le sens d'une plus grande déconcentration des décisions et d'une meilleure prise en compte du rôle des élus d'outre-mer. Il fallait mettre en place un cadre de fonctionnement rénové, permettant néanmoins aux agences de demeurer l'instrument partenarial privilégié de l'État et des départements dans la lutte contre l'exclusion.

La loi du 29 juillet 1998 a donc transformé les agences d'insertion, antérieurement établissements publics nationaux, en établissements publics locaux à caractère administratif. Cette évolution a pour effet à la fois d'alléger les procédures administratives et les tutelles des ministères chargés de l'outre-mer et du budget, et d'accroître le rôle des autorités locales, notamment lors de la nomination des directeurs, les présidents de conseil généraux disposant désormais d'un pouvoir de proposition. L'ordonnance n° 2000-99 du 3 février 2000 et le décret d'application n° 2000-713 de la même date ont parachevé cette modification en donnant aux agences le statut départemental. Les préfets deviennent membres du conseil d'administration et, en tant que commissaires du Gouvernement, peuvent demander de nouvelles délibérations.

Le rapport Fragonard souligne les difficultés auxquelles se heurtent les agences : elles n'ont pas pour mission d'assurer l'instruction et le suivi social de l'ensemble des bénéficiaires et ne s'occupent réellement que d'une partie d'entre eux, faute de moyens humains adéquats. En conséquence, des dizaines de milliers de bénéficiaires du RMI ne bénéficient d'aucun suivi social, ni d'insertion. Ce manque de moyens est accentué par le fait que, depuis la création des agences, les autres services publics ont tendance à leur renvoyer toute la responsabilité en matière d'insertion.

Il est donc suggéré de supprimer les commissions locales d'insertion et de confier aux agences un double rôle : la contractualisation d'un plan local d'insertion avec chaque commune et l'élaboration et la signature des contrats d'insertion. Des emplois qualifiés doivent être créés et les agences doivent se recentrer sur l'insertion professionnelle, en renforçant leur partenariat avec l'ANPE.

Il est très regrettable que la récente réforme ait été d'ordre purement institutionnel et n'ait nullement tiré les conséquences des constats de dysfonctionnements faits par la mission Fragonard.

        3.- L'exception de Mayotte : les « chantiers de développement local »

Le dispositif du RMI n'existe pas à Mayotte : la collectivité territoriale, tout comme les trois territoires du Pacifique Sud, continue à bénéficier d'un autre dispositif, celui des « chantiers de développement local ».

Mis en place par plusieurs circulaires du ministère chargé du travail et de l'emploi des 22 décembre 1971, 12 février 1978 et 10 juin 1983, au titre de l'aide aux travailleurs sans emploi, il a été rénové par la circulaire du 15 juillet 1991. Les DOM n'en bénéficient plus depuis 1990, compte tenu du développement des actions d'insertion menées dans le cadre du RMI et de la création des contrats emploi-solidarité.

Ce dispositif permet aux services de l'État, aux collectivités locales et à leurs établissements publics de donner à des catégories de population particulièrement défavorisées et rencontrant des difficultés d'accès à l'emploi, une activité rémunérée, en contrepartie d'un travail d'intérêt général, pendant une durée déterminée de trois ans au plus. Il permet d'apporter une aide à la réinsertion sociale et professionnelle des travailleurs privés d'emploi. Les chantiers de développement local s'adressent à la fois aux adultes et aux jeunes, ces derniers bénéficiant de dispositions destinées à compléter leur formation initiale.

Les activités concernées sont de deux types :

· travaux d'entretien, d'assainissement et de remise en état du patrimoine public (bâtiments, routes, voies d'eau, forêts) ;

· actions sociales, service de l'usager, activités culturelles et sportives, lutte contre la pauvreté.

Les sommes totales déléguées à ce titre pour Mayotte sont passées progressivement d'environ 4 millions de francs en 1996 à près de 10 millions de francs en 1999. La participation financière de la collectivité territoriale a augmenté plus que proportionnellement puisqu'elle n'était que de 350.000 francs en 1996 alors qu'elle atteignait 2 millions de francs en 1999.

Ce dispositif était financé, pour la part de l'État, sur les crédits de l'article 41 du chapitre 46-94 jusqu'au projet de loi de finances pour 2000. Depuis, la partie revenant à Mayotte est séparée des fonds attribués aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie, qui figurent toujours à l'article 41 : les chantiers de développement local à Mayotte bénéficiaient en 2000 d'une dotation de 8 millions de francs, incluse dans le nouvel article 42 du chapitre 46-94 - Emploi, formation et insertion à Mayotte. Pour 2001, cette dotation est accrue d'un million de francs afin de répondre à des besoins très importants.

    D.- LE LOGEMENT, GRAND ABSENT DE LA LOI D'ORIENTATION, RESTE UNE PRIORITÉ AFFICHÉE

La situation du logement dans les DOM est toujours un point préoccupant. La pression démographique, confirmée par les résultats du dernier recensement, les difficultés liées à la viabilisation foncière, les ressources modestes des ménages et la situation financière difficile des collectivités locales concourent à y créer des conditions difficiles.

Le parc de logement est assez réduit, créant une inflation des loyers nourrie également par les « sur-rémunérations » de la fonction publique. Le niveau des loyers à La Réunion dépasse par exemple celui de la région parisienne. Les besoins sont donc énormes, comme le tableau ci-dessous le montre :

ÉLÉMENTS STATISTIQUES D'APPRÉCIATION DE LA SITUATION DU LOGEMENT DANS LES DOM

             
 

Guadeloupe

Martinique

Guyane

Réunion

Mayotte

Total

Population 1999

421.632

381.467

157.274

705.072

131.320

1.796.765

Croissance 1999/90 (en %)

8,95

6,09

37,24

18,18

38,82

15,74

Nombre de personnes/ménage en 1990

3,41

3,34

3,39

3,76

4,50

3,57

Nombre de RMIstes (1)

27.112

26.606

8.251

62.273

- (2)

124.242

Logements insalubres (3)

14.500

11.000

8.000

10.000

15.000 (4)

58.500

Besoins logements neufs sociaux /an

3.000

2.400

1.800

5.000

1.800

1.400

(1)  nombre de foyers en décembre 1999.

(2)  pas de RMI à Mayotte.

(3)  estimation. Les critères retenus ne sont pas toujours les mêmes d'un DOM à l'autre

(4)  la quasi-totalité du parc traditionnel peut être considérée comme insalubre, soit environ 15.000 logements.

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

Pourtant, la loi d'orientation pour l'outre-mer ne prévoit aucune disposition en sa faveur, si ce n'est, en négatif, la disparition programmée de la créance de proratisation et sa compensation par l'État. Les crédits relatifs au logement connaissent néanmoins une hausse importante en apparence : le logement est le deuxième poste de dépenses du budget.

      a) Des crédits en forte augmentation apparente

Après avoir connu une très forte hausse de 58 % en loi de finances initiale pour 1999, les crédits de la ligne budgétaire unique d'aide au logement dans les DOM, à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon ont augmenté modestement de 2,3 % en 2000. Ils progresseront plus fortement en 2001 : + 3,5 % en crédits de paiement (950 millions de francs contre 918 millions de francs en 2000) et surtout + 22,7 % en autorisations de programme, pour atteindre 1.350 millions de francs.

L'effort total au titre du logement permettra de financer la construction ou l'amélioration de 15.000 logements, contre 13.400 en 2000.

La ligne budgétaire unique finance l'ensemble des aides à la pierre dans les DOM et à Mayotte, tant sur la location, l'accession à la propriété et l'amélioration du parc locatif social et des logements des propriétaires occupants. Son montant a évolué ainsi depuis 1998 :

LIGNE BUDGÉTAIRE UNIQUE
(autorisations de programme)

(en millions de francs)

1998

1999

2000

2001

1.096

1.096

1.100

1.350

Sources : budgets votés et projet de loi de finances.

Il faut souligner que ces crédits, en autorisations de programme, avaient diminué en 1998 compte tenu de la baisse du taux de TVA applicable au logement social dans les DOM.

La hausse des autorisations de programme profite aux articles 10 et 20 du chapitre 65-01 :

· 1.190 millions de francs seront consacrés aux diverses aides au logement (chapitre 65-01, article 10), contre seulement 974 millions de francs en 2000 ;

· à 130 millions de francs, le chapitre 65-01, article 20 - Résorption de l'habitat insalubre voit ses dotations en autorisations de programme augmenter de 35,4 %;

· l'article 30, créé en 2000, constitue l'aide exceptionnelle de l'État prévue à l'article 3 de la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les DOM, destinée à faciliter les acquisitions de terrains, situés dans cette zone, sur lesquels des habitations ont été construites. Sa dotation de 30 millions de francs sera reconduite en 2001 et devrait permettre la régularisation de 500 nouveaux dossiers.

      b) Une augmentation seulement destinée à compenser la réduction de la créance de proratisation

Jusqu'à la loi d'orientation relative à l'outre-mer, le financement du logement était complété par 75 % de la créance de proratisation du RMI, lesquels s'élèvaient à 673 millions de francs en 2000. Le tableau suivant fait le point sur l'évolution du montant de la créance de proratisation consacré au logement.

PART DE LA CRÉANCE DE PRORATISATION
BÉNÉFICIANT AU LOGEMENT

(en millions de francs)

1997

1998

1999

2000

556

592

638

673

Source : secrétariat à l'Outre-mer.

L'alignement du RMI sur le niveau métropolitain entraîne la diminution, puis la disparition au bout de trois ans, de la créance de proratisation, qui est censée être compensée par une dotation de l'État. En fait, aucune dotation individualisée n'est inscrite à cette fin sur le budget : le secrétariat d'État indique seulement que la ligne budgétaire unique sera dotée à cet effet de 250 millions de francs supplémentaires en autorisations de programme, ce qui correspond à la totalité de l'augmentation de cette ligne pour 2001. Or cette somme correspond, à quelques millions de francs près, à la perte qu'entraînera en 2001 la première étape de revalorisation du RMI.

En effet, les crédits supplémentaires nécessaires à la compensation des pertes sur la créance de proratisation sont évalués à 244,5 millions de francs en 2001, 489 millions de francs en 2002 et 733,5 millions de francs en 2003. Les pertes pour 2001 sont compensées intégralement en autorisations de programme et à hauteur de seulement 32 millions de francs, soit 13 %, en crédits de paiement.

Il est à noter que les évaluations reposent sur un montant prévisionnel de la créance qui aurait été affectée en 2001 de 733,5 millions de francs : la compensation se baserait donc sur le niveau de 2001, sans tenir compte de l'éventuelle évolution à la hausse du nombre de RMIstes. Il est donc tout à fait possible, si ces prévisions ne sont pas remises régulièrement à jour, que les fonds affectés au logement soient finalement moins élevés qu'ils l'auraient été si la créance de proratisation avait perduré. Une réévaluation est en effet prévue, mais elle prendrait seulement en compte l'évolution de l'indice du coût de la construction.

Enfin, rien n'empêche l'État de réduire les dotations de la LBU après la période de compensation de la perte de la créance de proratisation, alors que ce dernier mécanisme lui assurait des ressources régulières en rapport avec l'évolution de la situation sociale.

Il apparaît donc que les crédits consacrés au logement n'enregistreront pas une réelle augmentation en 2001 (seulement 0,5 % en autorisations de programme), mais seront stables étant donnée l'évolution à la baisse de la créance de proratisation.

    E.- LA POLITIQUE SOCIALE ET CULTURELLE SE POURSUIT SANS LIGNE DIRECTRICE CLAIRE

      1.- Des actions diversifiées

Le chapitre 46-94 - Action sociale et culturelle changera de libellé en 2001 pour porter celui de Action sociale, culturelle et de coopération régionale, conformément au projet de loi d'orientation pour l'outre-mer. Si on retire de sa dotation globale celle du nouvel article 35 - Fonds de coopération régionale, d'un montant de 20 millions de francs, il reste 209,53 millions de francs, contre 185,53 millions de francs en 2000, qui bénéficient aux DOM et aux TOM. En incluant la subvention de 43,65 millions de francs à l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer (ANT), ce sont plus de 157,7 millions de francs qui bénéficient aux DOM et aux collectivités locales d'outre-mer, principalement au travers des articles suivants.

L'article 10 portait le libellé Activités sportives, culturelles et de jeunesse dans les DOM jusqu'au projet de loi pour 2001 : la fin de son libellé est désormais « en faveur de l'outre-mer », une partie (à hauteur de 1,5 million de francs) revenant dorénavant à la Nouvelle-Calédonie dont l'article spécifique a été supprimé. Il est doté de crédits qui permettent de subventionner des associations, organismes à but non lucratif, ou encore d'établir des conventions avec d'autres ministères, pour mettre en place des actions d'animation, de formation, de préparation à des échéances sportives, et de manifestations diverses touchant au cinéma, à la danse, à la musique comme aux arts plastiques. Par ailleurs, le secrétariat d'État à l'Outre-mer participe financièrement à l'aide à l'édition ou à l'organisation de colloques.

Le Gouvernement souhaitant mettre l'accent sur la politique culturelle, la dotation, de 3 millions de francs en 1999, a été portée à 7,5 millions dans la loi de finances pour 2000 et devrait atteindre 21,05 millions de francs en 2001. 12 millions de francs sont destinés à alimenter le fonds de promotion des échanges mis en place par la loi d'orientation afin de promouvoir les déplacements éducatifs, culturels et sportifs des habitants des DOM vers la métropole et les pays situés dans leur environnement régional.

Dans le secteur de la jeunesse et des actions socio-éducatives, des conventions signées avec le ministère de la Jeunesse et des sports et avec les fédérations nationales d'éducation populaire et autres organismes, ainsi que le soutien à des associations attestent de la volonté du secrétariat d'État à l'Outre-mer de poursuivre les efforts entrepris en matière de prévention, de formation et d'insertion des jeunes. En 2000, ont été menées notamment des actions d'information sur la contraception en direction des jeunes des Antilles, de la Guyane et de Mayotte et une action en direction des personnes hospitalisées à Basse-Terre.

En matière culturelle, a été créé en 1999 fonds d'échanges culturels en partenariat avec le ministère chargé de la Culture et de la communication. La dotation, qui pourra atteindre 6 millions de francs, imputés à parité sur les budgets des deux ministères, vise à soutenir les manifestations et les projets permettant de favoriser la circulation des _uvres et des artistes et de développer les échanges entre l'outre-mer et la métropole, l'Europe et les pays situés dans leur environnement régional (Amérique latine et centrale, Caraïbes, Océan indien et Pacifique sud).

Parmi les autres actions culturelles, on peut citer la programmation de pièces et chorégraphies au festival d'Avignon, l'organisation de concerts réunissant artistes réunionnais et européens, la programmation de rencontres littéraires à Paris en présence d'auteurs antillais et haïtiens.

En 2001, le renforcement des crédits inscrits sur ces deux articles donnera la possibilité de reconduire et de développer cette politique en matière de sports, de jeunesse et culture, en particulier pour favoriser les déplacements des sportifs et des artistes.

L'article 31 - Préformation et formation professionnelle des DOM et des collectivités territoriales dispose de crédits utilisés pour le financement du contrat de plan État-collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et la subvention d'actions de formation menées par des associations à but non lucratif.

Depuis 1998, une action nouvelle est inscrite à l'article 31 : la formation individualisée mobilité qui est un dispositif permettant de faire suivre une formation qualifiante de niveau V en métropole à de jeunes originaires des DOM dans le cadre du crédit formation individualisée. Dans le projet de loi de finances pour 2001, la dotation pour l'ensemble de ces actions est quasiment stable, à 28,57 millions de francs (- 1 %) et la part consacrée à la formation individualisée mobilité est stable à 27,9 millions de francs.

L'article 32 - Bourses en faveur des étudiants mahorais est doté de crédits destinés au versement des bourses d'enseignement supérieur aux étudiants mahorais. Il importe de ne pas pénaliser ces étudiants, de plus en plus nombreux. Ainsi, les crédits prévus en projet de loi de finances pour 2001 sont stables depuis 1998 (0,861 million de francs).

L'article 42 - Emploi, formation et insertion à Mayotte, créé en 2000, était doté de 55,25 millions de francs : il disposera de 63,3 millions de francs en 2001 grâce à 8,05 millions de francs de moyens nouveaux destinés au renforcement des actions en faveur de l'emploi, de la formation professionnelle et de l'insertion à Mayotte.

Si les crédits augmentent, la réflexion sur les actions à mener ou à aider est absente. Les moyens servent en fait à financer des projets ne présentant pas une grande cohérence et choisis au coup par coup. De toute évidence, il manque aux DOM une politique culturelle et sociale construite et adaptée.

      2.- L'insertion en métropole : l'agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer

      a) Les ressources

L'article 20 du chapitre 46-94 - Action sociale et culturelle est doté de crédits permettant à l'agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer (ANT) de mettre en _uvre la politique d'aide en faveur des originaires des DOM dans les domaines de la mobilité et l'insertion professionnelle.

Afin de soutenir le développement de cette politique de mobilité, la subvention de l'État pour 2001 (43,65 millions de francs) traduit quasiment la reconduction des crédits accordés depuis 1999.

ÉVOLUTION DE LA DOTATION DE L'ÉTAT À L'ANT

(en millions de francs)

1992

98

1993

84

1994

66

1995

64

1996

53

1997

50

1998

45

1999

43,70

2000

43,71

    2001 (1)

43,65

(1) projet de loi de finances pour 2001.

Sources : budgets votés et projet de loi de finances.

L'ANT perçoit des ressources provenant du Fonds social européen et des crédits accordés dans le cadre des programmes « Leonardo da Vinci » et Regis II. Le tableau suivant décompose les ressources de l'ANT pour 2000.

LES RESSOURCES DE l'ANT (2000)

 

(en millions de francs)

(en %)

Subvention de l'État

44

33,3

Participation des collectivités territoriales

39

28,7

Financements communautaires

37

27,2

Prestations et divers

16

11,8

Total

136

100

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

Ces recettes enregistrent une augmentation de 6 millions de francs par rapport à 1999, essentiellement due à l'augmentation des prestations et produits divers.

L'agence devrait connaître une augmentation de son activité en 2001. Cette évolution entraînera une augmentation des dépenses liées à l'insertion professionnelle. Ses dépenses de fonctionnement devraient enregistrer une croissance modérée.

      b) Des actions aux résultats incertains

L'action de l'ANT passe principalement par deux dispositifs :

· commandes de formation à l'Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) : 1.500 places de stages en métropole sont ouvertes depuis 1998 en faveur des personnes originaires des DOM, avec des résultats décevants, ce qui explique qu'une concertation soit engagée depuis 1999 entre les deux ministères concernés, l'ANT et l'AFPA, afin de remplir effectivement ces places ;

· le système de la formation individualisée mobilité, qui permet à des jeunes de faible niveau de qualification de suivre, dans le cadre du crédit de formation individualisée, une formation en métropole. Les crédits correspondants (27,94 millions de francs) ont été transférés au budget du secrétariat d'État à l'Outre-mer en 1998. Depuis 2000, ce dispositif est ouvert aux jeunes Mahorais et Wallisiens : ils sont respectivement 50 et 16 à avoir suivi une formation au cours de cette première année.

Les autres outils sont les contrats de travail en alternance, les programmes régionaux de formation professionnelle, les programmes européens, ainsi que la mobilité des sportifs.

Selon les chiffres fournis par l'ANT, la mobilité professionnelle dans les DOM aurait augmenté de 31,4 % entre 1996 et 1999, en tenant compte des trente mobilités obtenues dans les TOM : ces résultats sont en diminution constante (+ 66 % entre 1994 et 1997, en comptant la petite province des Iles Loyautés, en Nouvelle-Calédonie, et + 38,4 % entre 1995 et 1998).

De nouveaux modes d'intervention devraient se développer en 2000 et 2001. Ils porteraient sur la mobilité inter DOM-TOM ou la mobilité pour l'apprentissage d'un métier en coopération avec la zone de chaque région. L'agence a réalisé une première expérience en Haïti et en Afrique du Sud et noue des contacts pour proposer aux stagiaires de nouvelles destinations intéressantes.

Un effort de suivi et d'accompagnement devrait être réalisé afin de mieux connaître la situation des stagiaires dans l'année suivant la fin de leur formation.

Votre Rapporteur spécial, qui a quelques doutes sur la réelle efficacité de cette agence, est favorable à une amélioration du suivi afin qu'il soit possible d'évaluer l'intérêt de ses interventions. Si le développement de la formation est indispensable, les résultats en termes de mobilité, qui d'ailleurs sont médiocres et en baisse, ne sont pas très significatifs : mieux vaudrait connaître le nombre de formations suivies, de diplômes obtenus, d'emplois trouvés...

Il observe par ailleurs que les mesures prises à la suite des critiques sévères émise par la Cour des comptes dans son rapport particulier du 9 juillet 1998() connaissent un essoufflement certain. Aucune mesure d'amélioration du fonctionnement et de la gestion de l'Agence n'a été prise au cours de l'année 2000.

    F.- LE SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ SUBSISTE

      1.- Le service militaire adapté contribue à l'effort en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle

Le service militaire adapté (SMA) consiste à dispenser aux appelés la formation militaire et civique nécessaire à tout combattant, mais aussi à les préparer à une meilleure insertion dans la vie active lors de leur retour à la vie civile, par une formation professionnelle dont le volume horaire correspond à 70 % des dix mois de conscription. Enfin, il doit les faire participer à la mise en valeur des collectivités d'outre-mer, ainsi qu'à l'exécution des plans de défense, de protection, de secours et d'aide au service public.

Les chantiers-écoles réalisés par les unités du SMA permettent d'appliquer les enseignements théoriques reçus durant les premiers mois de service militaire et de participer au développement économique des départements et territoires d'outre-mer (construction de nombreuses routes bétonnées de désenclavement d'habitation et de terres agricoles, réalisation d'installations sportives, travaux de curage de rivières). Ils sont financés avec des crédits de la loi de finances initiale, des crédits FSE et des crédits des collectivités locales. Leur coût a été de 12,35 millions de francs en 1999, dont 9,7 millions de francs financés par les collectivités locales elles-mêmes.

La loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national prévoit la fin de l'appel obligatoire sous les drapeaux pour les jeunes gens nés après le 31 décembre 1978, seuls ceux en report d'incorporation pouvant être appelés jusqu'au 31 décembre 2001. La possibilité d'un volontariat dans les armées est instituée : les jeunes des DOM pourront donc effectuer ce volontariat au sein des unités du service militaire adapté.

Il est ainsi prévu le remplacement progressif des appelés par des volontaires, sous enveloppe budgétaire constante et la réduction d'un tiers des effectifs d'ici 2002, pour tenir compte d'un coût individuel supérieur dans la mesure où la rémunération des volontaires sera nettement plus élevée que celle des appelés actuels. Une féminisation accrue a également été décidée.

Dès 1998, les effectifs incorporés ont baissé à cause de la diminution du nombre de jeunes encore soumis à l'obligation du service national. En octobre 1998 est intervenue la convocation des jeunes de l'outre-mer à « l'appel de préparation à la défense ». En janvier 1999 est intervenue l'incorporation des premiers volontaires : 500 ont été recrutés au cours de cette année. De 2000 à 2002, se poursuit la transformation initiée en 1999, conduisant d'un effectif global de 3.840 militaires à un effectif d'environ 2.600. En 2000, 600 volontaires supplémentaires ont été recrutés, auxquels s'ajouteront 900 postes en 2001.

Ainsi, au cours de l'année 1999, 2.577 stagiaires (volontaires et appelés) ont été formés dans une trentaine de filières de formation professionnelle. Tous ont reçu une formation militaire, amélioré leurs connaissances générales et acquis ou perfectionné des connaissances professionnelles ; 85 % ont obtenu une attestation de formation du SMA, un diplôme officiel de l'Éducation nationale ou du ministère chargé du travail, ou une unité de valeur d'une formation qualifiante ; 60 à 65 % ont obtenu un emploi dans la première année suivant leur retour à la vie civile ou ont été admis en stage de formation ou de perfectionnement.

Les bons résultats du SMA en terme d'insertion sociale, certainement liés à la qualité de l'encadrement militaire, justifient pleinement le maintien de ce dispositif même s'il s'avère relativement onéreux pour la collectivité.

      2.- Le financement

Le coût total du SMA dans les DOM, les TOM et en métropole est estimé, pour le budget de l'État, à 451 millions de francs pour 2001. Cette dotation en loi de finances initiale est équivalente à celle de 1999 (450 millions de francs), et supérieure à celle de 2000 (440 millions de francs). A cette somme s'ajoute une contribution du Fonds social européen destinée à la formation professionnelle. Le coût total du SMA atteint ainsi plus de 500 millions de francs : il était de 504 millions de francs en 1999. La part bénéficiant au SMA dans les DOM est de plus 342 millions de francs pour le seul financement national.

En ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2001, la réforme du service national conduit à supprimer, pour l'ensemble des DOM-TOM, 900 emplois d'appelés et 30 emplois de militaires d'encadrement du SMA (contre 1.000 et 80 en 2000) : dans les DOM, ce sont 790 postes d'appelés qui disparaissent et 26 emplois d'encadrement. Sur les 900 emplois de volontaires qui sont créés (600 en 2000), 774 le sont dans les DOM. Le tableau suivant décompose le coût du SMA pour les seuls DOM et en présente l'évolution.

COÛT DU SMA POUR LES DOM (2000-2001)

(en millions de francs)

 

2000

Prévisions 2001

 

Soldes et rémunération des personnels militaires, civils et ouvriers (chapitres 31-90 et 31-98)

236,72

249,56

Charges sociales (chapitre 33-90)

14,63

10,65

Prestations sociales (chapitre 33-91)

8,29

8,12

Alimentation (chapitre 34-42)

32,08

32,37

Fonctionnement (chapitre 34-96)

34,88

34,88

Frais de justice et réparations civiles (chapitre 37-91)

1,07

1,07

Infrastructure et matériel techniques (chapitre 57-91) (1)

5,00

5,75

Total

332,67

342,40

(1) en crédits de paiement.

Source : secrétariat d'État à l'Outre-mer.

Le surcoût du SMA en 2001 provient essentiellement de l'augmentation des soldes et rémunérations, et en leur sein par l'augmentation de 12,7 millions de francs des soldes du personnel militaire. C'est le résultat logique du coût plus élevé d'un volontaire que d'un appelé.

III.- DES PROBLÈMES GRAVES NÉGLIGÉS PAR LA LOI D'ORIENTATION ET PAR LE PRÉSENT BUDGET

Comme nous l'avons évoqué plus haut, votre Rapporteur spécial regrette que certains problèmes pénalisants pour les DOM, et dont il avait souligné la gravité dans son précédent rapport spécial, n'aient pas été pris en compte :

· C'est le cas de la sur-rémunération des fonctionnaires : alors que les rapports successifs() et tous les acteurs politiques et économiques ultramarins dénoncent les effets pervers de cette pratique, le projet de loi ne prévoyait aucun changement. A l'issue de la première lecture devant votre Assemblée et grâce à l'adoption d'un amendement d'origine parlementaire, le projet comportait un article prévoyant la suppression de la prime d'éloignement, que le Sénat a adopté.

Il s'agit d'un premier pas, qui concernerait 3.000 fonctionnaires par an, mais beaucoup reste encore à faire pour mettre un terme à une sur-rémunération qui atteint 40 % du traitement aux Antilles et 53 % à la Réunion, puisque le coefficient multiplicateur continue à s'appliquer sans changement et que les autres avantages (prise en charge des frais de déménagement, bonification des pensions...) demeurent. Aucun engagement n'a d'ailleurs été pris quant à l'usage qui allait être fait des sommes ainsi économisées, qui atteindraient 100 millions de francs selon les premiers résultats d'une enquête menée par le secrétariat d'État en juillet 2000.

· Le renforcement de la lutte contre le travail clandestin, également souhaité par tous, et qui aurait dû être la contrepartie de l'alignement du RMI sur le RMI métropolitain, ne constitue pas non plus une priorité pour le Gouvernement.

· Le problème du devenir du dispositif de défiscalisation prévu par la « loi Pons » a aussi été éludé dans la préparation de la loi d'orientation. En février 2000, le Premier ministre avait annoncé la création d'un groupe de travail chargé de faire des propositions pour soutenir les investissements outre-mer tout en favorisant plus nettement l'emploi : lors de sa constitution, en avril, le secrétaire d'État à l'Outre-mer avait exprimé le souhait que le texte issu de leurs propositions puisse être inclus dans le projet de loi d'orientation : il n'en a rien été. Il a fallu attendre le projet de loi de finances pour connaître les intentions du Gouvernement sur ce point et pour découvrir un projet de réforme frileux et décevant.

Si donc, aucun des problèmes qu'il dénonçait à l'occasion du projet de loi de finances pour 2000 n'est actuellement l'objet d'un traitement adapté, alors que la plupart d'entre eux a plutôt tendance à s'aggraver, votre Rapporteur spécial souhaite évoquer ici d'autres aspects de la situation domienne qu'il estime intolérables mais négligés.

Nous aborderons le problème du développement de la délinquance et de l'insécurité, que la justice s'avère incapable de traiter efficacement ; nous signalerons quelques scandales financiers, qui montrent le non-respect répété des règles des finances publiques dans les DOM, avant de présenter la situation fiscale « paradisiaque » dont bénéficient indûment certaines collectivités ultramarines françaises.

    A.- UNE JUSTICE IMPUISSANTE FACE AU DEVELOPPEMENT DE LA DÉLINQUANCE ET DE L'INSÉCURITÉ OUTRE-MER

      1.- Le développement continu du trafic de stupéfiants

Constituée d'une trentaine d'États, pour la plupart de petite taille, la zone Antilles-Guyane est vulnérable au trafic de stupéfiants. En effet, elle est située entre les régions de production (Amérique du sud et Amérique centrale) et les régions de consommation (Amérique du Nord et Europe).

En matière de délinquance, le phénomène de la drogue est sans conteste un problème majeur dans ces départements d'Amérique où, en peu de temps, la situation au regard de la drogue s'est profondément transformée.

      a) La présence toujours plus forte de stupéfiants

Traditionnellement, ces départements étaient traversés par le trafic international de cocaïne dont les lieux de destination se trouvaient ailleurs. Localement on consommait des dérivés de cannabis sans grand effet sur la délinquance.

Aujourd'hui, les Antilles-Guyane restent une zone importante du trafic de passage, en dépit de la diminution de 6,37 % des saisies de drogue en 1999 qui s'inscrit davantage dans le cadre d'un changement de stratégie des trafiquants internationaux dans l'acheminement de la drogue que dans une baisse des opérations de trafic.

Le fait majeur et relativement nouveau est l'apparition de la consommation locale du crack qui place les DOM en deuxième position après Paris pour l'utilisation de ce produit. En volume, la cocaïne saisie en 1999 enregistre une hausse de près de 25 % par rapport à 1998. Les deux tiers des prises ont été effectuées en Guyane (334 kg en mars 1999).

En 1999, 1.542 individus ont été interpellés dans les trois départements des Antilles-Guyane pour infractions à la législation sur les stupéfiants, soit une hausse de 26,91 % par rapport à 1998 et de 61 % par rapport à 1996.

      b) La hausse inquiétante de la consommation de drogue

Dans l'ensemble des DOM, elle progresse de 30,50 %, en 1999. Si le cannabis demeure le produit le plus utilisé, le développement de la consommation de crack est plus inquiétant.

En effet, produit dérivé de la cocaïne obtenu par adjonction d'ammoniac ou de bicarbonate de soude, le crack, moins cher que certaines autres drogues mais qui produit des effets encore plus désastreux, est particulièrement nocif en raison de la dépendance quasi immédiate et des dégâts qu'il entraîne sur l'organisme. Les besoins impérieux de consommer génèrent de la part des utilisateurs de crack des actions violentes : agressions physiques, vols à main armée, vols avec violences. Ce phénomène connaît actuellement une progression dans les trois départements français d'Amérique et en particulier en Martinique et en Guyane.

      c) Un trafic des stupéfiants difficile à combattre

Le trafic local alimente la consommation locale des départements français. Il est organisé entre la Guyane française et le Surinam, entre la Guadeloupe et Antigua, la Dominique ou Saint-Martin, entre la Martinique et Sainte-Lucie ou Saint-Vincent. Il est associé au phénomène de l'immigration clandestine dont il emprunte les filières. Il permet l'acheminement, sur le territoire français, de petites quantités de produits qui sont soit directement revendues, soit remises aux trafiquants locaux.

Situés au c_ur d'une zone stratégique pour l'acheminement des stupéfiants vers l'Europe et les États-Unis d'Amérique, les aéroports internationaux des Antilles-Guyane sont utilisés comme des points de passage pour le trafic international. Les saisies de drogues confirment cette réalité.

La Guyane sert de point de départ pour des passages de cocaïne importée du Surinam vers l'Europe (principalement la France métropolitaine et la Hollande). La Martinique sert également de point de départ pour des passages de cocaïne, de cannabis ou de crack vers l'Europe (France métropolitaine et Royaume-Uni). La Guadeloupe, quant à elle, avec sa principale dépendance, l'île de Saint Martin, est le territoire des Antilles françaises où le trafic international est le plus développé.

En exerçant une forte pression sur le trafic, les services répressifs ont réussi, en 1998, le démantèlement de plusieurs filières en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane, mais n'ont pas réalisé de saisie spectaculaire.

Ce phénomène peut trouver une explication dans le succès enregistré par ces mêmes services, les années précédentes, obligeant les trafiquants à orienter différemment les routes de trafic, les aires de stockage et d'acheminement.

En effet la proximité d'îles ou de pays indépendants moins bien armés pour lutter contre les trafics ou moins hostiles à l'activité des trafiquants, a conduit ces derniers à privilégier ces secteurs pour poursuivre leur commerce. C'est ainsi que le rôle prépondérant de l'île de Saint-Vincent et l'île de Sainte-Lucie dans le trafic régional a été confirmé au travers de plusieurs affaires importantes.

      2.- L'immigration clandestine nourrit la délinquance et l'insécurité

      a) Les Antilles sont de plus en plus fortement touchées

L'arc caraïbe est constitué de nombreuses îles qui relèvent de législations différentes (française, hollandaise, d'influence anglaise ou américaine pour celles qui sont devenues indépendantes ...). Certaines d'entre elles connaissent de graves difficultés économiques qui peuvent être aggravées en cas d'instabilité politique. Bon nombre de leurs ressortissants, confrontés à la pauvreté et à la précarité, recherchent alors des pays proches et plus prospères sur le plan économique et social.

La Guadeloupe et la Martinique

La Guadeloupe et la Martinique subissent une forte immigration clandestine. Les nationalités concernées soumises à l'obligation de visa pour entrer sur le territoire français sont les Haïtiens, Saint-Luciens, Dominicains, ressortissants de Saint-Domingue. Cette immigration utilise essentiellement la voie maritime, par nature difficilement contrôlable compte tenu de son étendue et du relief des côtes.

En Martinique, la population étrangère est évaluée à 6.500 personnes. S'y ajoutent entre 300 et 500 étrangers en situation irrégulière. 224 mesures de reconduite à la frontière ont été exécutées en 1999, contre 192 en 1998, ainsi que 27 mesures d'expulsion, contre 24 en 1998. En Guadeloupe, la population étrangère est évaluée à 23.047 personnes (contre 10.596 en 1996). La régularisation des étrangers intervenue depuis trois ans en application des réformes sur l'entrée et le séjour des étrangers, a permis de diminuer de moitié la population clandestine, évaluée à moins de 10.000 personnes en 1999. 795 mesures de reconduite à la frontière ont été exécutées en 1999 (753 en 1998), ainsi que 111 expulsions (102 en 1998).

La lutte contre l'immigration clandestine, outre les contrôles d'entrée aux ports et aéroports, s'organise avec une surveillance permanente de la brigade frontalière mobile de la Police des frontières et une surveillance des côtes par les vedettes des douanes et de la gendarmerie. Dans le domaine de l'emploi, les contrats sont soumis à la direction départementale du travail et de l'emploi qui est censée effectuer un contrôle approfondi.

- Le cas particulier de Saint-Martin

Le problème de l'immigration clandestine est particulièrement délicat à Saint-Martin, compte tenu de la localisation de l'aéroport international dans la zone hollandaise et de l'absence de contrôle à la frontière entre les deux parties de l'île.

Pour une population totale d'environ 35.000 habitants, la commune de Saint-Martin compte 8.000 étrangers, dont 350 ressortissants de l'Union européenne. A ce chiffre, s'ajoutent plus de 2.000 étrangers en situation irrégulière. La population étrangère est composée à 60  % de Haïtiens et à 20  % de Dominicains. Au titre de l'année 1999, 218 mesures de reconduite à la frontière, sur les 795 comptabilisées pour toute la Guadeloupe, ont été exécutées à Saint-Martin.

La présence de nombreux immigrés clandestins ne manque pas de poser de sérieuses difficultés à la commune au point de vue social et économique. En effet, les infrastructures de santé, de scolarité et de logement sont sous dimensionnées par rapport à la demande, en général non solvable. A cela s'ajoutent les problèmes d'insécurité, de trafic de drogue et de zones d'habitats insalubres.

L'accord franco-néerlandais du 17 mai 1994 relatif au contrôle conjoint dans les aéroports de Saint-Martin, ratifié par la France le 20 juillet 1995, et dont l'entrée en vigueur est subordonnée à la ratification par les Pays-Bas, devrait, s'il est finalement ratifié, faciliter l'éloignement des étrangers non admis ou se trouvant en situation irrégulière.

La loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers et au droit d'asile prévoit de maintenir, pour la Guyane et la commune de Saint-Martin, le dispositif dérogatoire relatif au caractère non-suspensif des recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière, précédemment en vigueur pour une période de cinq ans dans les départements d'outre-mer.

Les commissions du titre de séjour ont été rétablies en métropole par la loi du 11 mai 1998 précitée. A titre dérogatoire, cette disposition n'est pas applicable, pendant une durée de cinq ans, dans le département de la Guyane ni dans la commune de Saint-Martin.

      b) La Guyane, malade de ses clandestins

Frontalière du Surinam et du Brésil - avec une frontière longue de près de 3.000 kilomètres, dont la plus grande partie en forêt dense -, située à proximité immédiate de pays sud-américains confrontés aux problèmes du développement, la Guyane apparaît pour nombre de ressortissants de ces pays comme un espace de liberté et de richesse. C'est ce qui explique la forte immigration en provenance du Brésil, de Guyana, du Surinam et de Haïti.

La lutte contre l'immigration clandestine doit être une priorité de l'action de l'État en Guyane, d'autant plus qu'elle est un facteur important d'insécurité, en particulier dans l'agglomération de Cayenne.

Pour une population estimée à 157.274 habitants, on dénombre environ 20.000 étrangers en situation régulière, répartis comme suit :

    Haïtiens

    37 %

    Brésiliens

    20 %

    Surinamiens

    20 %

    Chinois

    3,5 %

    Guyanais

    8 %

    Saint-Luciens

    2,7 %

    Dominicains

    2,5 %

A cette population émigrée s'ajoutent environ 30.000 individus en situation irrégulière. Le phénomène de l'immigration clandestine pèse sur les dépenses publiques, en particulier dans les domaines sanitaire et social. Il alimente également certaines formes de délinquance.

La lutte contre l'immigration clandestine s'organise autour de deux axes : le contrôle des frontières et la lutte contre l'emploi clandestin. Mais la localisation de la plus grande partie du territoire guyanais dans la forêt amazonienne rend difficile le contrôle de l'accès du territoire français par les forces de police ou de gendarmerie.

Avec 1.070 policiers et gendarmes, le département de la Guyane possède un ratio de représentant des forces de l'ordre de 6,8 pour 1.000 habitants, pour une moyenne nationale de 3,7. Le poste de la police aux frontières de Saint-Laurent du Maroni a été restructuré en 1993, son effectif passant à 35 policiers. L'effectif total de la police aux frontières est actuellement de 138 agents dont 45 à Saint-Laurent du Maroni. Un troisième escadron de gendarmerie a été déployé à Saint-Laurent du Maroni.

Un centre de rétention, destiné à faciliter la gestion des reconduites à la frontière (50 % du total des reconduites aux frontières françaises), a été construit en 1996 près de l'aéroport de Rochambeau. En 1999, 6.937 mesures de reconduite à la frontière (6.582 en 1998) ont été exécutées. Ces mesures diminuent d'une année sur l'autre car les refoulements à la frontière sont en progression constante et rendus possibles par le dispositif de contrôle aux frontières.

Un dispositif de surveillance et de contrôle particulier a été mis en place avec les plans « alizébis » et « Galerne » sur les fleuves Maroni et Oyapock (patrouilles sur les fleuves, surveillance sur les rives), le renforcement du contrôle à l'aéroport, au bac international et au poste d'Iracoubo, point de passage obligé en arrière du Maroni.

La loi n° 97-396 du 24 avril 1997 permet, en outre, les contrôles d'identité et les contrôles sommaires des véhicules autres qu'individuels sur une zone s'étendant à 20 km au-delà des frontières terrestres et littorales. Cette mesure, associée au dispositif de ce contrôle, devrait, à terme, contribuer à réguler plus efficacement les flux migratoires. Au cours de l'année 1999, sur 4.431 interpellations effectuées dans le cadre de ce dispositif spécifique à la Guyane, 4.301 interpellations concernaient des infractions à la législation sur l'entrée et le séjour des étrangers.

Par ailleurs, les contrôles dans les quartiers à forte densité de population étrangère ont été multipliés sous formes d'opérations conjointes de la police, de la gendarmerie et de la douane. En 1990, l'État a lancé un programme de lutte contre l'emploi clandestin. Une antenne de l'Office des migrations internationales a été mise en place à Cayenne à la fin de cette même année.

Une étroite concertation entre l'État, les élus locaux et les socio-professionnels, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, _uvre pour un meilleur contrôle des flux migratoires.

Il en est de même dans le cadre d'une politique active de coopération régionale. Depuis un accord franco-brésilien de 1984, des réunions bilatérales où la France est représentée par le préfet de la Guyane permettent d'examiner les problèmes liés à l'immigration clandestine brésilienne et facilitent les rapports entre les services de police.

      c) La Réunion commence à être concernée par ces problèmes

Située au nord-ouest de l'Océan Indien, éloignée des grands axes de circulation, à 800 kilomètres au large de Madagascar, la Réunion est relativement à l'abri des grands flux migratoires.

Néanmoins, la libéralisation des transports aériens a contribué à ouvrir l'île sur son environnement régional immédiat (Madagascar, les Comores et Maurice), dont le niveau de vie est nettement inférieur à celui de ce département. Aussi, le problème de l'immigration se pose désormais à la Réunion même si l'ampleur du phénomène est bien moindre que celle relevée dans les autres départements d'outre-mer.

Les Comoriens en provenance de Mayotte constituent la principale filière d'immigration clandestine à la Réunion. Cette immigration peut être évaluée à environ 300 personnes à rapprocher d'une population étrangère de 4.574 personnes en situation régulière pour 700.000 habitants au total.

La lutte contre l'immigration irrégulière s'organise autour du dispositif de contrôle aux frontières aéroportuaires et maritimes et avec le renforcement de l'action contre le travail clandestin. 39 mesures de reconduite à la frontière ont été exécutées en 1999 (55 en 1998).

Il est incontestable que l'immigration clandestine prend de l'ampleur et s'étend à l'ensemble des départements d'outre-mer ; il est donc urgent de mettre tous les moyens nécessaires à la disposition des forces de l'ordre et des différentes autorités de contrôle afin de la combattre. Elle se traduit à la fois par des coûts sociaux élevés pour des départements dont nous avons vu les difficultés financières et par un climat d'insécurité lié à l'impossibilité de travail officiel pour les clandestins et à la constitution de réseaux d'immigration clandestine. Enfin, elle exerce une pression supplémentaire sur un système judiciaire au fonctionnement défaillant.

      3.- La criminalité et la délinquance sont en forte hausse

Le bilan 1999 de la délinquance et de la criminalité constatées par les services de police et de la gendarmerie nationale se traduit par une hausse globale de 6,30 % (+ 0,07 % en métropole).

      a) Une évolution générale inquiétante

Avec un total de 92.245 crimes et délits constatés en 1999, le taux de la criminalité des quatre départements d'outre-mer subit donc une nette croissance. Cette tendance résulte de la hausse des diverses infractions de voie publique (+ 4,96 %) et plus particulièrement de celles sur les stupéfiants et les délits à la police des étrangers (+ 13,25 %).

Cette évolution se répartit ainsi : + 23,7 % en Guyane, + 5,8 % en Martinique, + 3 % à la Réunion, + 0,9 % en Guadeloupe.

Pour ce qui est de l'indice de criminalité, les départements de la Réunion (37,71 ) et la Martinique (57,05 %o) enregistrent tous en 1999 un taux inférieur au taux moyen national (60,97 %o). La Guyane (l08,71 %o) et la Guadeloupe (63,33 %o) se situent en revanche, comme en 1997 et 1998, au-dessus de cette moyenne. Pour l'ensemble des départements d'outre-mer cet indice est de 55,32 %o.

      b) Des crimes et délits graves

Regroupant notamment les homicides à l'occasion de vols, les vols avec armes à feu et le trafic et la revente sans usage de stupéfiants, la criminalité organisée et spécialisée progresse de 32,59 % en 1999 (10,22 % en 1998) et représente 1,98 % des faits constatés dans les DOM. Sa répartition par département est la suivante : + 28,10 % en Guadeloupe avec une part dans la délinquance de 2,54 %, + 113,40 % en Martinique avec une part dans la délinquance de 1,98 %, + 0,40 % en Guyane avec une part dans la délinquance de 2,89 % et + 44,60 % à La Réunion avec une part dans la délinquance de 0,85 %.

Diminuant de 2,95 % en métropole, la délinquance de voie publique augmente de 4,96 % dans l'ensemble des DOM. Elle représente 48,74 % de la délinquance totale (contre 53,23 % au plan national).

On observe en particulier un durcissement des formes violentes de la criminalité dans tous les départements, à l'exception de la Guyane, pour les vols à main armée (- 16,12 %). Les vols à main armée sont globalement en hausse de 11,15 % en raison d'une augmentation de ces infractions en Guadeloupe (+ 31,88 %) et à la Réunion (+ 20,93 %).

Les vols avec violence sur la voie publique croissent nettement de 32,78 % (14,75 % en métropole) ce qui résulte de la poussée significative de ces infractions en Martinique (+ 58,54 %,) et à La Réunion (+ 27,79 %). Dans les zones urbanisées des départements français d'Amérique, ils représentent la catégorie d'infractions dont le taux a évolué le plus défavorablement soit + 44,58 en 1999. Sur cinq ans, ils ont progressé de près de 80 %.

On peut noter, en outre, que les délits à la police des étrangers augmentent de 16,63 %, contre 11 % en métropole. Contrairement aux années précédentes, le nombre d'étrangers mis en cause dans la commission des crimes et délits devient plus important (+ 15,17), notamment en raison de la forte progression de ce taux en Guyane (+ 40,74).

      4.- La justice s'avère impuissante

Alors que la délinquance ne cesse de croître dans les départements d'outre-mer, en particulier à cause de la situation économique et sociale dégradée et du développement du trafic de stupéfiants et de l'immigration clandestine, le mauvais fonctionnement de la justice apparaît de plus en plus évident. Nous en évoquerons deux aspects : l'état des prisons ultramarines et les dysfonctionnements constatés au tribunal de grande instance de Cayenne.

      a) L'intolérable état des prisons ultramarines

Trois membres de votre Assemblée, conduit par M. Louis Mermaz, le président de la commission d'enquête sur la situation dans les prisons françaises créée le 3 décembre 1999, ont visité les prisons de Guyane, de Martinique et de Guadeloupe. Ils en ont tiré un constat sans appel.

En Martinique, par exemple, le centre pénitentiaire et le centre régional de détention de Ducos sont en sureffectifs nets : alors que la capacité de la maison d'arrêt est de 410 places, elle accueille 650 détenus. Cette surpopulation a naturellement des conséquences sur les conditions de détention. Le président Mermaz a notamment déclaré que les dix-neuf femmes détenues « n'ont pas la possibilité de mener une vie correcte »().

Les syndicats ont insisté sur la spécificité des détenus ultramarins et sur la nécessité de l'élaboration d'une politique pénitentiaire adaptée et attiré l'attention des parlementaires sur le manque de moyens tant matériels, au point de vue de la sécurité, qu'humains. Ces revendications n'étaient pas infondées comme le montrent les événements qui se sont déroulés au centre pénitentiaire de Ducos au mois de juillet 2000 : deux surveillants ont été agressés et une bagarre entre détenus a fait un blessé grave. La qualité déplorable des conditions de détention est évidemment source de tension chez les prisonniers. Les surveillants se sont mis en grève afin de protester contre cette situation, mais ils n'ont obtenu aucune amélioration.

Les demandes des surveillants et des élus de la Guadeloupe et de la Réunion ont en revanche enfin été entendues : la loi de finances rectificative de novembre 1999 a ouvert des crédits pour une nouvelle prison à la Réunion et le collectif du printemps 2000 devrait permettre la création d'une nouvelle prison à Basse-Terre, en Guadeloupe, « d'ici environ trois ans », selon le ministère de la Justice. Mais ces décisions n'ont été prises que devant l'état de vétusté extrême de ces centres de détention, que les parlementaires avaient souligné. Elles témoignent donc surtout de la gravité d'une situation qui n'avait jusqu'ici intéressé personne. On ne peut donc que déplorer qu'il ait été possible d'en arriver à une telle situation.

Une prison neuve n'est d'ailleurs pas forcément suffisante pour résoudre les problèmes de conditions de détention. En 1998, la « prison la plus moderne de France » a été inaugurée en Guyane. Après avoir été en partie détruite par de violentes émeutes, elle est déjà saturée à 200 %, dont plus de la moitié de détenus étrangers, et on peut s'en évader avec une déconcertante facilité.

      b) Les dysfonctionnements de la justice en Guyane

Cette particularité de la prison guyanaise n'est qu'un élément de ce qu'il convient d'appeler l'absence de justice dans le département.

En mai 1999, un rapport interne, établi par le président du tribunal de grande instance à la demande des services judiciaires et remis au Garde des Sceaux, mettait en exergue l'ampleur des dysfonctionnements constatés. En 1998, « sur les 1.200 jugements rendus [en correctionnelle], une vingtaine seulement a été dactylographiée et exécutée » peut on lire dans ce rapport, dont le contenu, tenu secret, a été dévoilé dans la presse. Il apparaît ainsi que près de 80 % des délinquants arrêtés ne sont pas sanctionnés.

Au-delà de ce rapport officiel, les magistrats ne cessent d'essayer d'attirer l'attention du Gouvernement pour obtenir les moyens de faire leur travail. Ils font observer que de nombreux auxiliaires de justice subissent d'intolérables retards dans le versement de leur rémunération. Les interprètes, dont le rôle est essentiel dans un département où plus de la moitié de la population pénale est étrangère et où les Français ne parlent pas forcément le français, sont des vacataires qui ne bénéficient d'aucune protection sociale et qui doivent être disponibles tous les jours ; ils peuvent accumuler des créances à l'égard de l'État de plus de 50.000 francs.

Face au désordre engendré par la pénurie, les magistrats ont dû abandonner les affaires les moins urgentes afin de traiter les autres affaires en suspend. Ils travaillent dans des locaux exigus et dangereux et sont assistés par un nombre très insuffisant de fonctionnaires : ils ne sont que 28 pour 16 magistrats alors que le quota au niveau national serait de 2,4 fonctionnaires par magistrat.

De plus, la cour d'appel compétente est celle de Martinique, trop éloignée des préoccupations et des besoins locaux, alors que Cayenne en a abrité une pendant des décennies.

Une telle situation conduit inévitablement à un renforcement de la délinquance - le nombre de cambriolages a doublé en un an à Cayenne -, et à un sentiment justifié d'insécurité. Faute de pouvoir compter sur l'efficacité de l'État, la population est tentée de s'organiser par elle-même. Le 8 janvier 2000, l'Union des commerçants, libéraux et artisans de Kourou adressait une lettre ouverte au Président de la République afin d'attirer son attention sur la « gravité de la situation » et de demander « que l'effectif de gendarmerie soit augmenté d'une manière significative, pour que celle-ci puisse enfin assurer régulièrement des rondes de surveillance ». Il y a pourtant déjà à Kourou un gendarme pour 300 habitants, contre un pour 1.000 habitants en métropole.

Cette démarche est loin d'être isolée : fin 1999, des particuliers victimes de cambriolages avaient lancé une pétition et recueilli environ 2.000 signatures pour réclamer des mesures urgentes contre l'insécurité. Plusieurs collectifs contre l'insécurité mobilisent des centaines d'adhérents, tandis que de plus en plus d'habitants du département sont obligés de s'armer et de se barricader.

Il apparaît indispensable à votre Rapporteur spécial que l'accent soit enfin mis sur la sécurité et sur le bon fonctionnement de la justice, condition nécessaire à un recul significatif de la délinquance. Sans un minimum de sécurité, il est parfaitement illusoire d'espérer une amélioration de la situation économique et sociale de la Guyane, quels que soient les efforts consentis par ailleurs en ce sens.

    B.- DES DÉPARTEMENTS MINÉS PAR DES SCANDALES FINANCIERS

Il ne s'agit nullement ici de dresser la liste des affaires financières relatives à l'outre-mer actuellement devant la justice. Mais force est de constater que de nombreux scandales mettent actuellement à jour des zones d'ombre dans la gestion des fonds publics outre-mer : il semblerait que, loin de Paris, les règles les plus élémentaires de transparence restent lettre morte, tandis que les règles des finances publiques ne sont guère respectées.

      1.- La mystérieuse disparition du fonds de garantie de la Société de développement régional Antilles-Guyane

En novembre 1998, est ouverte une information judiciaire pour « faux, escroquerie et abus de confiance » à l'encontre de la Société de développement régional Antilles-Guyane (Soderag). Cet organisme de crédit, placé sous la tutelle du ministère des Finances, était chargé de prêter de l'argent à des petites et moyennes entreprises régionales. Mais en mai 1998, ses comptes laissent apparaître un trou de 875 millions de francs. Le ministère des Finances charge l'AFD, qui a repris en main la Soderag en 1995, de liquider la société. Il apparaît alors que les 4 milliards de francs qui ont transité par le fonds de garantie, créé pour aider les entreprises qui ne peuvent plus honorer leurs échéances, ont disparu.

Faute d'être parvenue à prouver que, comme ses dirigeants l'affirment, la garantie a été utilisée pour rembourser des échéances d'emprunts non honorés, la Soderag est l'objet de plusieurs actions en justice. En effet, le fonds de garantie était alimenté par le dépôt, par chaque emprunteur, de 5 % du montant de la somme qu'il empruntait. Les entreprises débitrices étaient donc copropriétaires du fonds à hauteur de leurs quote-parts respectives et devaient être tenues informées de sa gestion.

Or, la plupart des entreprises n'ont jamais pu recouvrer leur part tandis que d'autres ont vu leurs mensualités augmenter sans cesse. En mai dernier, une nouvelle plainte était déposée pour « abus de confiance et escroquerie », plainte qui vise la Soderag, mais aussi l'AFD. Cette dernière aurait « couvert une gigantesque escroquerie » au cours de laquelle au moins douze milliards de francs auraient disparu.

A la suite de plusieurs référés, quelques éléments ont été dévoilés sur le devenir de ces énormes sommes d'argent. Il apparaît d'abord que la Soderag prélevait régulièrement sur ce fonds, sans aucune justification comptable, des centaines de millions de francs : entre 1989 et 1996, ses ponctions auraient atteint un total de 705 millions de francs. De plus, chaque année, des dizaines de millions de francs étaient versés à un agent de change pour être placés en bourse, mais ces placements se sont systématiquement soldés par des pertes sèches, tandis que la Soderag et l'AFD refusent de livrer à la justice l'identité de cet agent de change.

L'opacité de la gestion du fonds de garantie et l'absence d'information sur la destination finale des sommes disparues sont de nature à alimenter toutes les rumeurs. Ainsi, beaucoup se demandent si elles n'auraient pas servi au financement occulte de quelque parti politique...

C'est aujourd'hui à la justice des répondre à ces questions, mais cette affaire nuit gravement à l'image de l'État qui apparaît incapable d'exercer un contrôle efficace sur une société dont il est chargé de la tutelle, à moins, ce qui est encore plus grave, qu'il n'ait laissé faire, voire approuvé, des détournements de fonds qui se traduisent par des pertes financières importantes pour des milliers d'entreprises ultramarines.

De plus, dans l'espoir d'obtenir le retrait des plaintes, l'AFD a accepté de rembourser les dépôts des emprunteurs qui ont remboursé leur dernière échéance. Le montant maximal des remboursements de dépôt est estimé à 148 millions de francs, ce qui, compte tenu des impayés définitivement irrécouvrables, pourrait porter le coût de cette liquidation pour l'État, et donc pour le contribuable, à 1 milliard de francs.

Par ailleurs, on peut noter que la gestion d'une autre société de développement des départements d'outre-mer, la Société financière pour le développement économique de la Guyane (Sofideg) est tout aussi mal gérée que le Soderag. Selon un récent rapport de l'Inspection générale des finances, cette société anonyme d'économie mixte auraient 50 % de créances contentieuses, précontentieuses ou douteuses. Les crédits auraient été octroyés en priorité aux membres du conseil d'administration ou à leurs relations et des personnalités titulaires de mandats électoraux auraient bénéficié de prêts dans des conditions anormales. Le Sofideg enregistre des pertes annuelles de 19 millions de francs pour un volume d'encours de 100 à 120 millions de francs, ce qui va obliger l'État, actionnaire aux côtés des collectivités territoriales, à apporter de l'argent pour couvrir ces pertes.

Arriver à de telles situations de manière aussi fréquente montre bien le manque de rigueur de l'État qui exerce une surveillance insuffisante sur des organismes par lesquels transitent beaucoup de fonds et dont il est garant des engagements financiers.

      2.- La mauvaise gestion de l'office départemental de tourisme de la Guadeloupe

Une lettre d'observations définitives de la Chambre régionale de comptes de la Guadeloupe sur la gestion de l'office du tourisme a dénoncé « la gestion déplorable » dont il a été l'objet entre 1990 et 1995, période couverte par le contrôle.

Afin de conduire des actions de promotion, l'office a recours à des intervenants extérieurs mais « ni les conditions dans lesquelles l'office fait appel à ces sociétés, ni les prestations effectuées, ni les conditions financières ne sont exemptes de graves critiques ». En six ans, il aurait passé des contrats avec une même société, pour un chiffre d'affaires de 20 millions de francs, « sans mise en concurrence ni signature de contrat ou de bon de commande ».

Il apparaît que, sur la période contrôlée, le directeur de l'office du tourisme a bénéficié de rémunérations particulièrement élevées et de remboursements de frais très significatifs, alors que ses déplacements donnaient lieu à l'établissement d'ordres de mission très laconiques, et qu'il signait lui-même, et que les remboursements s'effectuaient sans pièces justificatives.

La chambre régionale des comptes estime que sa situation financière est fort dégradée : « l'office vit largement au-dessus de ses moyens, connaît de graves problèmes financiers et de trésorerie ce qui le conduit notamment à ne pas s'acquitter de ses dettes sociales et à payer des frais financiers fort importants ».

Depuis l'arrêté de ces conclusions définitives, en juillet 1998, la situation ne semble guère s'être améliorée. Le doute plane encore sur le niveau du déficit de cet organisme pour l'exercice 1999. En janvier 2000, le commissaire aux comptes l'évaluait à 18 millions de francs alors que le président du conseil d'administration de l'office avançait le chiffre de 320.000 francs. La différence proviendrait d'un déficit accumulé de charges sociales qu'il faut faire apparaître en totalité dans le bilan alors qu'elle est en cours de règlement à la suite de la conclusion d'un moratoire : 1,6 million de francs seraient dépensés chaque année pour solder ces énormes arriérés.

      3.- La mise en cause des dirigeants du Crédit Martiniquais dans sa débâcle financière

Dès 1997, il apparaît que le Crédit Martiniquais, la banque des artisans et des petits commerçants martiniquais, possédait un milliard de francs de créances douteuses quasiment perdues, sur un encours de 3 milliards de francs, et avait été le théâtre de malversations en tout genre. Son ancien président, décédé depuis, avait d'ailleurs été mis en examen pour « abus de biens sociaux et abus de pouvoir ». Cette situation déplorable était le résultat des choix peu judicieux faits jusque là : tentative d'implantation en métropole, mauvais placements défiscalisés, train de vie dispendieux, ouvertures inconsidérées de lignes de crédit, prêts à taux quasi nul à des entreprises florissantes...

Malgré cette situation financière catastrophique, l'État a trouvé un repreneur pour les actifs sains du Crédit Martiniquais qui atteignent au total un milliard de francs : il s'agit du groupe mutualiste BRED-Banques populaires, qui paie une vingtaine de millions de francs pour l'ensemble. Quant au renflouement des créances douteuses, il est confié au nouveau fonds de garantie des dépôts, financé par la profession bancaire, qui est en place depuis le 15 septembre 1999.

Une fois l'opération réalisée et conformément à la loi bancaire, le fonds de garantie des dépôts a engagé, le 16 mai 2000, une action en responsabilité à l'encontre des anciens dirigeants du Crédit Martiniquais, de Cofidom, son actionnaire majoritaire, et des commissaires aux comptes. Il estime à 1,26 milliard de francs le coût net de son intervention et demande au tribunal « le remboursement par l'ensemble des dirigeants concernés du coût » qu'il a dû supporter.

Il attend donc de la justice qu'elle oblige les responsables de la débâcle financière du Crédit Martiniquais à assumer leurs responsabilités. En effet, ils étaient restés sourds aux mises en garde émanant dès 1996 de la Commission bancaire qui avait déjà détecté ses pratiques très particulières.

    C.- DES SITUATIONS FISCALES DÉROGATOIRES QUI OTENT TOUTE CRÉDIBILITÉ À LA FRANCE DANS SA LUTTE CONTRE LES PARADIS FISCAUX

      1.- Une fiscalité largement dérogatoire, au coût exorbitant

La loi fiscale, qui ne concerne pas les territoires d'outre-mer, dotés de leur propre fiscalité, s'applique en revanche aux départements d'outre-mer. Ils bénéficient néanmoins de mesures d'adaptation qui se traduisent par une série de minorations des taxes et impôts, sources d'autant de dépenses fiscales pour l'État.

Le tableau ci-dessous, qui rassemble des données extraites de l'annexe au projet de loi de finances pour 2001 « Évaluation des voies et des moyens », retrace les principales mesures de dépenses fiscales pour 2000 et 2001. Le document ne chiffre pas le coût de certaines dépenses fiscales (comme, par exemple, la mesure 910101 - Droit de consommation particulier sur les tabacs consommés dans les départements de Martinique et Guadeloupe). De plus, certains dispositifs sont communs aux DOM et aux TOM mais leur coût est évalué globalement. La liste qui suit donne néanmoins une idée assez juste de l'importance de l'effort consenti.

ÉVALUATION POUR 1999 ET 2000 DES DÉPENSES FISCALES BÉNÉFICIANT AUX DOM (1)

(en millions de francs)

 

Impôt concerné

N° de la mesure

Nature de la mesure

Estimation

2000

Estimation

2001

IR

100111

Déduction des investissements productifs réalisés dans les départements, territoires et collectivités territoriales d'outre-mer

1.300

1.400

IR

110210

Réduction d'impôt au titre des investissements effectués dans les DOM-TOM par les personnes physiques

500

600

IR

110302

Réduction, dans la limite d'un certain montant, pour les contribuables des DOM de la cotisation résultant du barème (30 % en Guadeloupe, Martinique et Réunion, et 40 % en Guyane)

1.200

1.250

IR

180303

Imputation sur le revenu global, sur agrément antérieur au 15 septembre 1997, des déficits industriels et commerciaux non professionnels correspondant à des investissements effectués dans certains secteurs économiques de l'outre-mer et à leur exploitation

760

780

IR - IS

230104

Déduction des revenus et bénéfices investis dans les départements d'outre-mer et dans les territoires d'outre-mer

100

nc

IS

300302

Exonération, sur agrément, des bénéfices en cas de création d'activité nouvelle dans les départements d'outre-mer

110

50

IS

320102

Taxation sur une base réduite des résultats provenant d'exploitations situées dans les départements d'outre-mer.

Disposition applicable jusqu'au 31 décembre 2001

300

340

IS

320113

Déduction des investissements productifs réalisés dans les départements, les territoires et les collectivités territoriales d'outre-mer et des souscriptions au capital des sociétés qui réalisent de tels investissements

600

690

Taxe
sur les salaires

410201

Diminution du taux de la taxe dans les DOM (taux applicables : 2,95 % dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, 2,55 % pour la Guyane)

600

590

TVA

710102

Exonération de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers

730

730

TVA

710103

Régime des départements d'outre-mer ; fixation des taux à :

- 9,5 % pour le taux normal
- 2,1 % pour le taux réduit

3.000

2.500

TVA

710104

Régime particulier des départements d'outre-mer. Déductibilité de la taxe afférente à certains produits exonérés

610

570

TIPP

800401

Exclusion des DOM du champ d'application de la TIPP

500

510

TOTAL (1)

8.390

10.010

(1) certains dispositifs bénéficiant aussi aux territoires d'outre-mer, le total n'est qu'indicatif.

Source : Évaluation des voies et des moyens, projet de loi de finances pour 2001.

Non seulement le total est très élevé, supérieur à 10 milliards de francs, mais il ne semble pas en voie de diminution. Le traitement de faveur n'est d'ailleurs pas seulement fiscal, mais aussi social.

Les exonérations de cotisations patronales définies par les articles 3,4 et 5 de la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités économiques dans les DOM, atteignaient 969,4 millions de francs en 1999 et voisinent un milliard de francs en 2000. Désormais prises en charge par le budget de l'emploi, elles sont inscrites à hauteur de 1 milliard de francs en 2001.

La loi d'orientation organique évalue le coût du nouveau dispositif d'allégements de charges sociales qu'elle crée à 3,5 milliards de francs, inscrits sur le budget de l'emploi.

      2.- La question de l'avenir de la défiscalisation sur le point d'être tranchée sans grand changement

Le régime actuellement applicable dans les DOM, connu sous le nom de « loi Pons », concerne soit l'impôt sur le revenu des personnes physiques, soit l'impôt sur les sociétés. Il a été plusieurs fois amendé, en dernier lieu par la loi de finances pour 1998, qui a supprimé la déduction supplémentaire liée à l'imputation des déficits des activités concernées imposées dans la catégorie des bénéfices industriels de commerciaux, et par la loi de finances pour 1999, qui a prorogé le régime jusqu'au 31 décembre 2002.

      a) Un dispositif coûteux à l'efficacité incertaine qui a besoin d'être remplacé

Dans son rapport relatif aux crédits des départements d'Outre-mer pour l'année 2000, votre Rapporteur spécial a présenté le bilan du dispositif et les orientations envisagées pour l'avenir. En résumé, la dépense fiscale liée à ces défiscalisations serait d'environ 3 milliards de francs par an, soit à peu de chose près le montant des investissements réalisés tandis que les créations d'emplois induites atteindraient entre 1.000 et 3.000 emplois par an selon les dossiers de demande d'agréments, mais les emplois réellement créés n'ont jamais fait l'objet d'un chiffrage.

De plus, la défiscalisation, tout en favorisant l'investissement dans le secteur du logement, a contribué à l'augmentation des prix du foncier, à la dégradation du marché secondaire (revente) et a eu, faute d'une maîtrise suffisante de l'urbanisme, des effets indésirables sur l'aménagement de l'espace, entraînant des coûts pour les collectivités locales (« mitage » du territoire) entraînant des problèmes d'assainissement et de voirie.

Enfin, si la défiscalisation est une mesure très attractive pour les entreprises qui peuvent en bénéficier, elle perturbe la sélection des projets d'investissement et favorise l'apparition de surcapacités sur certains petits marchés. En outre, elle favorise une composition productive déséquilibrée au profit du facteur capital, et donc défavorable au facteur travail.

      b) Vers un nouveau dispositif d'aide à l'investissement outre-mer

Dans le présent projet de loi de finances pour 2001, il est proposé de créer un nouveau dispositif d'aide fiscale à l'investissement outre-mer qui remplacerait celui actuellement en vigueur.

Cette réforme viserait deux objectifs principaux :

· une plus grande justice fiscale : la déduction du revenu global actuellement permise, qui porte atteinte à la progressivité de l'impôt sur le revenu, serait remplacée par une réduction d'impôt ;

· une plus grande efficacité économique : l'aide serait étendue à de nouveaux secteurs économiques et la loi fixerait le montant de l'avantage fiscal qui devra être rétrocédé à l'exploitant local.

Ce nouveau dispositif, qui concernerait les investissements réalisés du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2006, comporterait les principales innovations suivantes.

En ce qui concerne les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, il est proposé :

· d'exclure de l'aide le secteur de la navigation de croisière ;

· d'étendre le bénéfice de l'aide au secteur de la maintenance porteur d'emplois, jusqu'ici limité à celle effectuée au profit d'activités industrielles ;

· de rendre éligible les travaux de rénovation hôtelière et l'acquisition des logiciels nécessaires à l'utilisation des investissements éligibles, lorsque ces travaux et logiciels constituent des éléments de l'actif immobilisé ;

· d'admettre la déductibilité des souscriptions au capital de sociétés en difficulté, même si ces dernières ont déjà bénéficié du régime de défiscalisation.

Serait créée une réduction d'impôt pour les investissements réalisés au profit d'une entreprise relevant de l'impôt sur le revenu :

Le régime de déduction fiscale pratiquée sur le revenu global des personnes physiques serait supprimé et remplacé par un dispositif de réduction d'impôt comportant le même champ d'application que celui qui serait applicable aux entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés (voir supra).

La réduction d'impôt serait égale à 50 % du prix de revient hors taxes des investissements productifs, diminué de la fraction de ce prix financée par une subvention publique.

Ce taux serait porté à 60 % pour les investissements réalisés en Guyane, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon ou à Wallis-et-Futuma, ainsi que pour les travaux de rénovation hôtelière.

Lorsque le bien est donné en location, le contribuable serait tenu de rétrocéder 60 % de la réduction d'impôt à l'entreprise exploitante sous forme de diminution du loyer et, le cas échéant, du prix de cession du bien à l'exploitant.

Pour les personnes qui n'exploitent pas elles-mêmes l'investissement (non professionnels), la réduction d'impôt ne pourrait excéder 50 % de l'impôt dû, avant application de la réduction. L'excédent éventuel, dans la limite du solde de l'impôt sur le revenu, s'imputerait sur l'impôt dû au titre de l'année suivante exclusivement, dans la même limite de 50 %.

Pour les contribuables agissant à titre professionnel, l'excédent de la réduction d'impôt sur l'impôt dû constituerait une créance sur l'État qui serait utilisée pour le paiement de l'impôt dû au titre des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. La fraction non utilisée serait remboursée à l'expiration de cette période dans la limite d'un investissement plafonné à 10 millions de francs.

La réduction d'impôt serait, sous certaines conditions, subordonnée à l'octroi d'un agrément préalable du ministre chargé du budget.

Une nouvelle réduction d'impôt serait créée pour les investissements immobiliers et les souscriptions au capital de certaines sociétés réalisés entre le ler janvier 2001 et le 31 décembre 2006 par les particuliers.

Le champ d'application de cette réduction serait identique à celui de l'actuelle réduction d'impôt, à l'exclusion cependant des souscriptions au capital de sociétés concessionnaires de service public local à caractère industriel et commercial.

Le montant des investissements éligibles serait plafonné à 10.000 francs par mètre carré de surface habitable pour les logements affectés à l'habitation principale du contribuable. Comme dans le dispositif actuel, la réduction d'impôt serait étalée sur cinq ans.

Le taux de la réduction d'impôt applicable à chaque fraction annuelle serait de 25 %. Pour les investissements locatifs réalisés dans le secteur intermédiaire, ce taux serait porté à 40 %.

Ce dispositif n'entraînerait pas de surcoût pour les finances publiques et est destiné à contribuer de manière plus efficace au développement de l'économie et de l'emploi outre-mer.

En fait, le dispositif proposé n'est pas foncièrement différent de celui actuellement en vigueur, et il n'est pas sûr qu'il ne présente pas le même type d'inconvénients. D'abord, s'il est censé ne pas entraîner de surcoût pour l'État, force est de constater que son coût n'est pas précisément chiffré et qu'il ne semble pas permettre d'économies alors que la défiscalisation antérieure avait un coût prohibitif de 3 milliards de francs par an environ. De plus, son impact sur l'emploi ne semble pas avoir été l'objet d'études et il n'y a pas de raison qu'il soit nettement plus fort que celui des mesures antérieures, même si tout le secteur de la maintenance, riche en main d'_uvre, sera désormais concerné.

La mise en place d'un dispositif valable jusqu'en 2006 est une bonne chose dans la mesure où elle assure une visibilité du dispositif à moyen terme : votre Rapporteur spécial est satisfait sur ce point. Néanmoins, il n'est pas sûr que la solution proposée soit très pertinente et s'avère d'un meilleur rapport coût/efficacité, malgré l'adoption d'amendements censés renforcer son impact en termes d'emplois. Il note que le secteur des nouvelles technologies de l'information, promis à un grand avenir, n'était pas pris en compte dans le dispositif initial mais a heureusement été intégré par un amendement adopté par votre Assemblée.

Il s'étonne par ailleurs du fait que le principe de la défiscalisation, c_ur de la si critiquée « loi Pons », soit maintenu malgré les préconisations contraires du groupe de travail interministériel qui a rendu ses conclusions en février 1999. Celui-ci suggérait une bonification d'intérêts et un allégement de taxe professionnelle : pourquoi ne pas avoir tenté de suivre ces orientations ?

      3.- La situation fiscale très exceptionnelle des îles du Nord de la Guadeloupe

Depuis quelques mois, alors que la lutte contre les paradis fiscaux devient une priorité aux niveaux national et international, la situation fiscale de l'île de Saint-Barthélémy et de la partie française de Saint-Martin suscite un intérêt croissant. Dans un rapport d'information de septembre 1999(), notre collègue M. Jean-Pierre Brard dénonçait les « régimes fiscaux de fait » appliqués sur les deux îles et appelait à la perception effective des impôts directs dus et à une étude approfondie sur la fiscalité indirecte.

Quelques mois plus tard, en mars 2000, le Syndicat national unifié des impôts publiait un dossier de presse dont une partie dénonçait la situation des deux îles sous le titre « La France a ses zones franches... mais aussi ses paradis fiscaux ».

Soucieux de montrer qu'il s'intéresse aussi à cette question, le secrétaire d'État à l'Outre-mer charge le maître des requêtes au Conseil d'État M. François Seners de dresser un portrait des deux îles du Nord de la Guadeloupe. Dans un rapport() remis en décembre 1999, ce dernier reconnaît leur transformation en paradis fiscaux, que ce soit de droit ou de fait.

      a) Un régime fiscal très particulier

Fruit de la colonisation, le régime fiscal spécifique des deux îles n'a pas été remis en cause par la départementalisation de 1946, puisque des décrets, transitoires en principe mais jamais abrogés, l'ont maintenu en vigueur. La situation actuelle est ainsi la suivante :

· Reconnus en situation d'extraterritorialité par le code des douanes communautaires, Saint-Martin et Saint-Barthélémy ne perçoivent pas de droit de douane.

· Les dispositions de l'article 19 de la loi n° 92-676 du 17 juillet 1992 exonèrent les deux îles du paiement de l'octroi de mer ; en revanche, elles bénéficient des ressources provenant de cette recette perçue dans le reste de la Guadeloupe.

· Alors qu'aucune norme ne les exonère légalement de la TVA, l'administration fiscale a précisé à plusieurs reprises, par notes ou instructions administratives, que la TVA n'est pas applicable à Saint-Martin et Saint-Barthélémy. Celle qui pèse sur les transactions immobilières, plus récente, y est perçue mais est l'objet de contestations.

· La plupart des droits indirects n'y est pas appliquée grâce à l'exonération prévue par l'article 12 du décret du 30 mars 1948. Mais, sans qu'il existe de raisons juridiques claires, certains y sont perçus comme le droit de licence sur les débits de boisson, qui bénéficie aux budgets communaux, et les droits d'enregistrement sur les mutations à titre gratuit ou onéreux.

· S'il existe des droits indirects propres aux îles du Nord, telle la taxe de séjour de 5 % à Saint-Martin, les impôts directs locaux, perçus normalement à Saint-Martin, ne le sont pas à Saint-Barthélémy, où le conseil municipal s'est toujours refusé à voter des taux, dans la mesure où il perçoit un droit de quai de 4 % ad valorem sur toute marchandise importée dans l'île.

· Pour ce qui est de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés, il est aujourd'hui établi qu'aucune exemption n'est prévue au profit des deux îles(). Devant les protestations suscitées par ce qui est apparu comme une remise en cause de « droits historiques », il fut décidé en mars 1986, dans l'attente d'un règlement global, de donner des instructions aux services fiscaux afin que les contribuables ne remplissant pas de déclaration ne soient pas poursuivis. Devant ce moratoire fiscal, les fonctionnaires, qui étaient les seuls à payer l'impôt, ont aussi cessé de remplir leurs déclarations. Depuis, rien n'a été fait pour régulariser cette situation et les velléités ponctuelles de l'administration fiscale n'ont constitué que des « coups d'épée dans l'eau ».

Après avoir reconnu que la fiscalité effectivement perçue sur les deux îles est très limitée, et très légère, l'auteur du rapport replace leur situation dans leur environnement géographique, marqué par la présence de nombreux paradis fiscaux ou espaces fiscaux préférentiels et conclut ainsi : « Leur régime fiscal particulier, même illégal, leur a permis de rester en phase avec les autres îles de cette partie de la Caraïbe. Elles ont même certainement compensé ce que le caractère incertain de leur droit fiscal leur faisait perdre ; à Saint-Martin, par l'attrait, pour les investisseurs français, de la défiscalisation de la loi Pons ; à Saint-Barthélémy, par une gestion particulièrement avisée du potentiel touristique. Il est évident que les incertitudes entourant l'avenir de la défiscalisation et la remise en cause par l'État du régime fiscal coutumier sont de nature à déstabiliser l'économie de ces deux îles. L'économie de Saint-Barthélémy ne pourrait que se recroqueviller sur l'activité hôtelière ; celle de Saint-Martin serait menacée d'être aspirée par la partie hollandaise de l'île. »

      b) Des préconisations qui visent à maintenir une fiscalité allégée

Pour ce qui est de Saint-Martin, le problème est de savoir si l'île a vocation à constituer une zone franche. Si sa partie néerlandaise est une zone off-shore qui attire des services financiers, parmi lesquels une part importante de trafics illicites et d'opérations de blanchiment, M. François Seners reconnaît que la France, compte tenu de ses positions de principe et de ses engagements communautaires, ne peut envisager la création de telles activités à Saint-Martin, même si son statut était modifié.

Il retient en revanche l'hypothèse d'une zone franche commerciale. Il rappelle que la constitution de zones franches « en vue de favoriser la constitution de pôles de développement économique en liaison avec les zones portuaires ou aéroportuaires » est autorisée par la loi de programme du 31 décembre 1986, dite loi Pons et permettrait d'alléger les entreprises qui réexportent vers la Caraïbe ou l'Amérique du poids de la taxe professionnelle. Il apparaît de plus que Saint-Martin dispose déjà d'éléments essentiels d'un statut de zone franche : légalement ne s'y applique ni droit de douane, ni octroi de mer. Pour ce qui est de la TVA, l'exonération, qui existe légalement en Guyane, pourrait être validée par une disposition législative. Une réflexion pourrait aussi être menée sur un dispositif d'exonération de la taxe professionnelle, qui dynamiserait les entreprises.

M. François Seners estime que le régime juridique de Saint-Barthélémy n'a pas non plus à rentrer dans le droit commun. Il n'est pas non plus question d'en faire un paradis fiscal, mais des avantages fiscaux lui semblent justifiés, dès lors qu'ils ne bénéficient qu'aux résidents réels de l'île et non à des personnes ou des sociétés qui n'y résident que fictivement. Il estime que, même si le statut départemental est conservé, des aménagements de la fiscalité sont possibles et souhaitables pour assurer le développement de l'île et tenir compte du coût élevé de la vie. Par exemple, l'impôt de solidarité sur la fortune peut être maintenu si le foncier est retiré de l'assiette, dans la mesure où l'importance de la demande a conduit à une très forte hausse de la valeur des terrains. Parallèlement, il recommande au Parlement la création de taxes locales, actuellement envisagées par les élus de Saint-Barthélémy, telles une taxe de séjour, inspirée de celle applicable à Saint-Martin, une taxe locale sur les carburants et une taxe sur les passagers.

Le projet de loi d'orientation pour l'outre-mer prévoit ainsi dans son article 36, la possibilité pour Saint-Barthélémy de prélever une taxe de séjour équivalente à 5 % du prix de la nuitée et crée au profit de la commune de Saint-Barthélémy une taxe additionnelle à la taxe régionale sur les certificats d'immatriculation des véhicules dont le taux, qui ne peut excéder celui de la taxe principale, sera fixé par délibération du conseil municipal. Le Sénat était allé encore plus loin sur cette voie, en première lecture, en adoptant deux amendements tendant à permettre la création de deux taxes supplémentaires au profit de cette même commune : une taxe sur les carburants, dans la limite de 1,50 franc par litre (le prix du litre d'essence y est actuellement de 3,27 francs), destinée à l'entretien du réseau routier et une taxe sur les passagers débarquant au port de Gustavia, dans la limite de 30 francs par passager, destinée à la rénovation des installations portuaires.

Votre Rapporteur spécial s'étonne que rien ne soit entreprise pour normaliser, ou au moins légaliser, la situation de ces îles. Ce laxisme nuit à la crédibilité du combat mené par la France contre les paradis fiscaux. L'autorité de l'État est régulièrement bafouée par des contribuables qui s'opposent souvent de façon violente aux mesures prises par le ministère des Finances pour améliorer le recouvrement de l'impôt. Il convient de ne plus ajourner cette question et de prendre les décisions qui s'imposent.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 8 novembre, la commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a examiné les crédits des Départements d'outre-mer.

Après avoir indiqué que le budget du secrétariat d'État à l'Outre-mer enregistre une hausse de 6,94 % et de 6,17 % à structure constante, les transferts entre diverses sections atteignant 48,6 millions de francs, votre Rapporteur spécial a estimé que, comme la loi d'orientation pour l'outre-mer qu'il met en _uvre, ce budget s'avère décevant. L'effort financier en faveur de l'emploi et de l'insertion est accru : les crédits du Fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer augmentent de plus de 25 %, mais ils ne seront pas utilisés pour une politique novatrice et cohérente. Ils financeront une douzaine de dispositifs d'aide à l'emploi, dont quatre sont créés par la loi d'orientation : les autres subsistent alors qu'aucune évaluation de leurs effets n'a été réalisée. Une partie de ces emplois aidés est destinée aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, dont le nombre ne cesse de croître outre-mer alors qu'il commence à diminuer en métropole. L'action sociale et culturelle est poursuivie avec près de 158 millions de francs de dotations destinés à financer des actions très variées, ne faisant l'objet d'aucune réflexion d'ensemble : il manque aux DOM une politique culturelle et sociale adaptée.

L'action en faveur de l'insertion dans les DOM passe par une politique vigoureuse en faveur du logement social : or, cette dernière est la grande absente de la loi d'orientation et la progression des crédits, qui atteignent 1,35 milliard de francs et doivent financer 15.000 logements neufs ou améliorés, est l'objet d'un affichage politique nullement justifié. En effet, l'augmentation de 250 millions de francs en autorisations de programme correspond, pour l'essentiel, à la compensation de la diminution de la créance de proratisation, résultat de la première étape de l'alignement du niveau du RMI sur son niveau métropolitain. La hausse des autorisations de programme n'est donc, en fait, que de 0,5 %. Quant au service militaire adapté, il subsiste.

Le secrétariat d'État à l'Outre-mer verse aussi aux DOM une série de subventions aux collectivités locales. Les subventions de fonctionnement ne connaissent pas de grands changements. Les subventions d'investissement transitent, pour la plus grande partie, par le Fonds d'investissements des DOM (FIDOM), dont la dotation augmente de 15 % en crédits de paiement et de 55 % en autorisations de programme. Elle permettra la mise en _uvre des contrats de plan pour la période 2000-2006, dont les axes demeurent les mêmes que pour la génération précédente. Des fonds communautaires soutiennent également l'investissement dans les DOM.

Enfin, votre Rapporteur spécial a tenu à évoquer des problèmes graves qui touchent les DOM mais qui ne sont combattus ni par la loi d'orientation, ni par le budget du secrétariat d'État. Les DOM sont victimes d'un fort développement de la délinquance et de l'insécurité : le trafic et la consommation de drogues s'intensifient - les saisies ont augmenté de 25 % en 1999 aux Antilles et en Guyane - et jouent un rôle important dans la hausse de plus de 6 % des crimes et délits enregistrée en 1999, tandis que la croissance de la population en situation irrégulière entretient l'insécurité. La justice manque cruellement de moyens : les prisons sont en très mauvais état, saturées, insuffisamment sûres, ce qui conduit à de nombreuses évasions et, en Guyane, 80 % des peines prononcées en correctionelle ne sont même pas exécutées.

Parallèlement, l'État fait preuve de son inefficacité, voire de son manque d'intérêt pour les DOM, en n'assurant guère le respect de la loi. Les scandales financiers à répétition en témoignent (disparition du fonds de garantie de la société de développement régional Antilles-Guyane, gestion de l'office du tourisme de la Guadeloupe critiquée par la chambre régionale des comptes, débâcle du crédit Martiniquais), tandis que l'île de Saint-Barthélémy et la partie française de Saint-Martin constituent des paradis fiscaux de fait, sinon de droit. Si la réforme du dispositif de défiscalisation des investissements outre-mer vise à mettre un terme aux abus les plus criants, elle ne suffira ni à en effacer tous les effets pervers, ni à en accroître notablement l'efficacité.

Le Président Henri Emmanuelli a fait observer que le problème du régime fiscal de Saint-Martin et Saint-Barthélémy était ancien et que nombre de gouvernements n'y avait pas remédié. Pour ce qui est de la défiscalisation, la réforme en cours permettra une amélioration notable du dispositif.

M. Pierre Forgues s'est inquiété de la surpopulation de 200  % et du nombre d'évasions des prisons en Guyane, tout en constatant que le Rapporteur spécial ne proposait pas la construction d'une prison nouvelle.

Alors que votre Rapporteur spécial a proposé de les rejeter, la Commission a adopté les crédits des départements d'Outre-mer et vous demande d'émettre un vote favorable à leur adoption.

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2624-35 Rapport de M. François d'Aubert (commission des finances) sur le projet de loi de finances pour 2001 : Départements d'outre-mer

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() les données techniques et financières pour 2000 et 2001 ne sont pas encore disponibles.

() voir Philippe Auberger, rapport spécial sur les crédits des pays et territoire d'outre-mer pour 2001, annexe n° 37 au rapport sur le projet de loi de finances pour 2001 de M. Didier Migaud.

() voir François d'Aubert, rapport spécial sur les crédits des départements d'outre-mer pour 2000, annexe n° 36 au rapport sur le projet de loi de finances pour 2000 de M. Didier Migaud, document n° 1861, pp.73-75.

() Pour une présentation du problème et des solutions proposées, voir le rapport spécial de M. François d'Aubert, annexe n° 36 au rapport de M. Didier Migaud sur le projet de loi de finances pour 2000, op.cit., pp. 79-86.

() France Antilles, 20 avril 2000.

() M. Jean-Pierre BRARD, La lutte contre la fraude et l'évasion fiscales : retrouver l'égalité devant l'impôt, rapport d'information n° 1802, Assemblée nationale, onzième législature, 8 septembre 1999.

() François Seners, Saint-Martin, Saint-Berthélémy : quel avenir pour les îles du Nord de la Guadeloupe (décembre 1999).

() Arrêt de section du Conseil d'État du 22 mars 1985 pour l'impôt sur le revenu, confirmé par un arrêt du 14 juin 1989 à propos de l'impôt sur les sociétés.