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Aimé Césaire


Portrait d'Aimé Césaire,
exposé à l'ancienne mairie de Fort-de-France

© Édition de Conti

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Le mouvement de la négritude

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« ma négritude n'est pas une pierre, sa surdité

ruée contre la clameur du jour

ma négritude n'est pas une taie d'eau morte ruée contre la clameur du jour

ma négritude n'est pas une taie d'eau morte

sur l'oeil mort de la terre

ma négritude n'est ni une tour ni une cathédrale

elle plonge dans la chair rouge du sol

elle plonge dans la chair ardente du ciel

elle troue l'accablement opaque de sa droite patience. »

Cahier d'un retour au pays natal



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Le mouvement de la négritude se forme à Paris, dans l'entre-deux guerres, quand trois jeunes intellectuels déracinés s'associent pour fonder la revue l'Étudiant noir : le Sénégalais Léopold Sédar Senghor, le Guyanais Léon Gontran Damas et le Martiniquais Aimé Césaire.

La une de l'Étudiant noir, numéro de mars 1935

avec l'article d'Aimé Césaire jeunesse noire et assimilation

© D.R.

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Ces trois poètes, influencés par le surréalisme, vont se retrouver au Palais Bourbon après guerre, mais ils incarnent des options politiques très différentes.

Léopold Sédar Senghor, humaniste et chrétien, recherche les points de jonction entre la France et l'Afrique, au point d'accepter à deux reprises un poste ministériel.

Léon Gontran Damas, proche des socialistes, tente de moderniser les structures politiques et économiques de la Guyane.

Aimé Césaire, le communiste, demeure un révolté.

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Le mot négritude fut créé par Aimé Césaire, vers 1936. Il est employé dans un des premiers poèmes de Léopold Sédar Senghor, Le Portrait :

« Il ne sait pas encore

L'entêtement de ma rancoeur aiguisé par l'Hiver

Ni l'exigence de ma négritude impérieuse... »

« Je suis d'autant plus libre de défendre le terme, reconnaît Senghor, qu'il a été inventé, non par moi, [...] mais par Aimé Césaire.

Il y a tout d'abord, que Césaire a forgé le mot suivant les règles les plus orthodoxes du français. [...]

Pour revenir donc à la Négritude, Césaire la définit ainsi : « La Négritude est la simple reconnaissance du fait d'être noir, et l'acceptation de ce fait, de notre destin de noir, de notre histoire et de notre culture. » (Liberté 3, pp. 269-270.)

Césaire emploie le mot avec des sens différents : le mot signifie l'ensemble des noirs comme « Haïti où la négritude se mit debout pour la première fois » ; il signifie aussi conceptuellement « l'être-dans-le-monde du Nègre » selon l'expression de Jean-Paul Sartre dans Orphée noir.

Brassaï (1899-1984)

Sartre, café de Flore

Paris, 1944. Photographie, épreuve contact aux sels d'argent (8,5 x 5,9 cm)

BnF, Estampes et Photographie

C'est logiquement que la remise en cause culturelle d'Aimé Césaire :

« ma négritude n'est pas une taie d'eau morte ruée contre la clameur du jour »

fait écho à celle de Senghor :

« Ma Négritude point n'est sommeil de la race mais soleil de l'âme, ma négritude vue et vie

Ma Négritude est truelle à la main, est lance au poing Réécade. »

Le mouvement de la négritude est ainsi un combat culturel pour l'émancipation, comme l'écrit Césaire dans l'Étudiant noir :

« C'est pourquoi la jeunesse noire tourne le dos à la tribu des Vieux. La tribu des Vieux dit : Assimilation. Nous répondons : Résurrection.

« Que veut la jeunesse noire ?... Vivre. Mais pour vivre vraiment, il faut rester soi... Les jeunes Nègres d'aujourd'hui ne veulent ni asservissement ni "assimilation", ils veulent émancipation... »

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Voir aussi :

1794,1848 : Abolition de l'esclavage [dossier d'histoire]

Léopold Sédar Senghor : « Négritude, francité, et civilisation de l'universel »

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