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Assemblée nationale

commission élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires sociales

(Application de l’article 120 du Règlement)

Lundi 2 novembre 2015

Présidence de M. Gilles Carrez,
président de la Commission des finances,
et de Mme Catherine Lemorton,
présidente de la Commission
des affaires sociales.

La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures.

projet de loi de finances pour 2016

Santé

M. le président Gilles Carrez. Avec Mme Catherine Lemorton, présidente de la commission des affaires sociales, nous sommes heureux de vous accueillir en commission élargie, madame la ministre des affaires sociales et de la santé, pour vous entendre sur les crédits de la mission « Santé ».

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je souhaite la bienvenue aux étudiants de l’executive master « Gestion et politiques de santé » de Sciences Po, qui se trouvent dans les tribunes du public.

M. Claude Goasguen, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Les crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances (PLF) pour 2016 s’élèvent à 1,25 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP), soit une augmentation de 4,5 % en AE et de 4,7 % en CP. En tant que rapporteur spécial de cette mission, je devrais me réjouir d’une telle hausse. Pourtant, ce n’est pas le cas car, comme chaque année, celle-ci est entièrement due à l’augmentation des crédits consacrés à l’aide médicale de l’État (AME). Les crédits alloués au programme « Protection maladie » s’accroissent en effet de près de 10 %, tandis que ceux du programme « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » diminuent de 2,6 % en AE et de 2,4 % en CP. Cette situation n’est pas exceptionnelle puisque, depuis 2014, les crédits alloués à la prévention ont chuté de 27 %, notamment en raison de transferts vers la sécurité sociale, tandis que ceux consacrés à l’AME ont augmenté de 25 %.

Les crédits budgétés en faveur de l’AME pour 2016 s’élèvent ainsi à 744,5 millions d’euros. Je parle bien des crédits budgétés, et non pas des crédits qui vont être consommés, car la prévision sera bien en deçà de la consommation réelle et nécessitera des abondements massifs lors des collectifs de fin d’année, comme ce fut le cas les années précédentes : 155 millions d’euros en 2013 et en 2014, 100 millions d’euros en 2015. On peut donc tabler sur un dérapage de l’ordre de 15 % à 25 % dû à une sous-budgétisation systématique fondée sur des hypothèses très contestables. Malgré les mesures évoquées pour rationaliser les dépenses – baisse de la tarification des séjours hospitaliers, qui transfère une partie de la charge sur les hôpitaux, ou fin de la prise en charge des médicaments dont le service médical rendu est faible –, la hausse inexorable des dépenses d’AME se poursuit, portée par l’augmentation toujours croissante du nombre des bénéficiaires. Ceux-ci étaient près de 295 000 fin 2014 et, selon le « bleu » budgétaire, leur nombre devrait augmenter de 4,9 %, soit une hausse supérieure à celle prévue en 2015.

Par ailleurs, il est vrai, madame la ministre, que j’aime « mélanger les choux et les carottes », comme vous me l’avez dit l’an dernier lors de l’examen des crédits de cette mission. De fait, je considère que seules des données consolidées permettent d’assurer la transparence et la sincérité budgétaire que les pouvoirs publics doivent au citoyen et au contribuable, en particulier sur ce sujet contesté. Cette année encore, je me suis donc attelé à évaluer le coût global de la prise en charge des dépenses de santé des étrangers en situation irrégulière. J’ai ainsi ajouté à ma « salade » budgétaire non seulement le coût de la dette rampante envers la sécurité sociale et les crédits en faveur des soins urgents pris en charge par cette dernière, mais également une part des dépenses de santé à Mayotte puisque celles-ci, on le sait, bénéficient dans des proportions substantielles à des migrants en situation irrégulière. Et je parviens à un total qui dépasse le milliard d’euros, un milliard qui échappe au contrôle des pouvoirs publics ! Une telle somme n’a rien de dérisoire dans le contexte économique actuel, qui plus est lorsque le Gouvernement se targue de chercher de nouvelles sources d’économies structurelles. J’ajoute qu’il est d’autant plus nécessaire de présenter aux citoyens des chiffrages honnêtes que la crise des migrants est dans tous les esprits, même si celle-ci affectera d’abord le coût de la couverture maladie universelle (CMU).

Je dresserai un bilan radicalement opposé du second programme de la mission, consacré à la prévention, car d’importantes mesures sont prises afin de rationaliser la gestion des agences sanitaires et de réaliser des économies structurelles. Les crédits alloués au programme « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » s’élèvent ainsi à 501,5 millions d’euros, contre 515 millions en loi de finances initiale pour 2015, soit une baisse de 2,7 %. Son évolution réelle à plus long terme est cependant difficile à évaluer, car des compétences importantes, comme le financement de la formation médicale initiale, ainsi que plusieurs opérateurs – l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH), la Haute Autorité de santé (HAS) et le Centre national de génotypage (CNG) –, rattachés antérieurement à la mission, ont été transférés depuis deux ans au budget de la sécurité sociale. L’ensemble de ces changements de périmètre représente environ 150 millions d’euros. Quant aux huit agences qui restent dans le giron de la mission, elles participeront encore en 2016 à l’effort de redressement des finances publiques : leurs subventions pour charges de service public diminuent de 3,7 % et elles rendront un total de 25 équivalents temps plein (ETP) sous plafond. Je salue, par ailleurs, la création de la nouvelle Agence nationale de santé publique qui, en regroupant l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), l’Institut de veille sanitaire (InVS) et l’Établissement de préparation aux urgences sanitaires (EPRUS), marque une première étape en matière de mutualisation. De même, l’harmonisation budgétaire et comptable qui devrait être mise en œuvre dès 2016 au sein des agences sanitaires, associée à un ambitieux projet d’uniformisation des systèmes d’information élaboré par la direction générale de la santé (DGS), constitue une évolution importante, conforme aux exigences de gestion auxquelles sont désormais soumis l’ensemble des opérateurs de l’État.

Le contraste entre les deux programmes est donc, vous en conviendrez, saisissant, tant en termes d’évolution budgétaire que d’effort de rationalisation de la gestion. Je ne vous poserai donc qu’une seule question, madame la ministre, toujours la même : quand le Gouvernement prendra-t-il ses responsabilités en engageant avec courage une réforme de fond de l’AME ?

En conclusion, j’émets un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Santé ».

Mme Bernadette Laclais, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Sur les crédits de la mission « Santé », je ne ferai que quelques observations rapides. Ces crédits s’élèvent à 1,26 milliard d’euros dans le projet de loi de finances pour 2016, soit une augmentation de 4,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. Si des crédits conséquents sont consacrés à l’AME, ceux dédiés à la prévention, à la sécurité sanitaire et à la modernisation de l’offre de soins atteignent des montants importants, puisqu’ils s’élèvent à 515 millions d’euros, destinés à financer les actions de prévention et de meilleur accès aux soins.

L’année 2016 sera marquée par la création de l’Agence nationale de santé publique, qui reprendra les missions assurées par l’INPES, l’INVS, l’EPRUS et le groupement d’intérêt public (GIP) « Addictions drogues alcool info service » (ADALIS). Pouvez-vous, madame la ministre, nous rappeler les objectifs de cette fusion et nous expliquer comment a été préparée la création de la nouvelle agence ? De manière plus générale, pouvez-vous nous préciser la manière dont vous entendez animer l’action des agences sanitaires et le rôle que jouera le comité stratégique d’animation du système des agences sanitaires ?

S’agissant de l’AME, pouvez-vous préciser les moyens mis en œuvre pour maîtriser cette dépense, notamment pour rendre plus fiable l’instruction des dossiers et améliorer les procédures de contrôle ? En 2015, le panier de soins a été redéfini. Peut-on d’ores et déjà mesurer les effets de cette disposition ?

J’ai choisi de centrer mon rapport sur le Fonds d’intervention régional (FIR). Il ressort des auditions et de mes déplacements dans les agences régionales de santé (ARS) que si le FIR représente un incontestable progrès, les conditions de sa mise en œuvre ont contribué à donner de lui l’image d’un outil complexe. Son périmètre a beaucoup changé en trois ans ; il faut maintenant le stabiliser pour que les ARS et les organismes bénéficiaires maîtrisent bien cet outil financier. Ces derniers, s’ils comprennent bien l’intérêt de cette enveloppe globale qui devait favoriser le décloisonnement entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social, regrettent néanmoins que les règles d’attribution des crédits ne soient pas plus transparentes.

Le FIR a été créé en 2012 dans le cadre d’un système de cogestion entre les ARS et la branche maladie, les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) assurant les paiements auprès des bénéficiaires, mais cette coopération s’est révélée parfois délicate car aucune doctrine comptable commune n’avait été définie au préalable.

Décidée en 2015 et effective en 2016, la réforme consistant à transférer aux ARS l’essentiel de la gestion du FIR, qui fera désormais l’objet d’un budget annexe dans chacune d’entre elles, doit donc être saluée comme une décision opportune. Elle permettra de simplifier les méthodes de gestion et de gérer des projets qui s’étalent sur plusieurs exercices budgétaires. J’ai été frappée, du reste, par la mobilisation des équipes des ARS, qui attendent beaucoup de cette réforme comptable. Celle-ci doit être, pour les agences, une occasion d’augmenter leurs marges de manœuvre et de pouvoir réellement agir sur les priorités régionales sanitaires.

La gestion du FIR a une dimension très technique, mais aussi une dimension politique, ce qui soulève la question de savoir si les ARS sont des agences techniques qui doivent mettre en œuvre une politique sanitaire centralisée en appliquant des directives ministérielles ou si, au contraire, elles disposent de véritables marges de manœuvre pour fixer des priorités régionales selon les caractéristiques sociologiques et sanitaires des territoires.

Comment pourrait être accélérée la procédure d’attribution des crédits aux différentes ARS, une fois l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) voté ? Cette année, en effet, elles ont dû attendre la fin du mois d’avril pour connaître leur dotation, ce qui retarde le lancement des appels à projets qui permettront de sélectionner des projets innovants.

Je souhaiterais également savoir, madame la ministre, si vous avez l’intention, pour favoriser la cohérence des financements, d’inclure dans le FIR certaines missions d’intérêt général (MIG), comme celle correspondant aux équipes de cancérologie pédiatrique (MIG 104), d’autres MIG concernant le cancer étant déjà intégrées dans le FIR. La MIG Q02 relative aux services mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR) pourrait également compléter le FIR, qui finance déjà la permanence des soins et les carences ambulancières.

Enfin, pourrait-on évoluer vers un FIR pluriannuel qui permettrait de sécuriser le financement de projets qui mettent plusieurs années à monter en charge, même si une telle programmation semble difficile dans le cadre d’un ONDAM voté annuellement ?

Le FIR parvient à financer des dispositifs innovants, et il faut s’en féliciter. Ses crédits permettent aussi d’élaborer des solutions expérimentales pour lutter contre les déserts médicaux alors que les dispositifs classiques ne sont pas adaptés.

En conclusion, je veux souligner que le FIR est un outil de qualité et que sa gestion directe par les ARS sera un grand progrès. Une question reste cependant posée : que faire quand les territoires sont trop défavorisés ou trop faiblement peuplés pour que soient mobilisées des énergies porteuses de projets et comment s’assurer que les moyens du FIR contribuent à harmoniser les conditions de l’accès aux soins plutôt que de favoriser les territoires les plus dynamiques ? Il n’y a pas de réponse simple à cette question. C’est un véritable enjeu pour les ARS, qui connaîtront bientôt d’autres évolutions majeures, notamment leur regroupement dans le cadre des futures grandes régions.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Je vais m’efforcer de répondre aux questions soulevées par les rapporteurs, mais je souhaite également rappeler à cette occasion les grands choix en matière de santé que traduisent les lois financières pour 2016, dont le projet de loi de finances, qui ne couvre, je le rappelle, qu’une petite partie de la politique de santé.

Ces lois financières traduisent la priorité que nous accordons à la prévention. La préservation des crédits de prévention du programme 204, à hauteur de 162,1 millions d’euros, en est le gage. Ce soutien budgétaire à la politique de prévention passe principalement par la dotation du programme 204 destinée aux projets régionaux de santé dans le cadre du Fonds d’intervention régional. Ces crédits resteront, sur toute la durée du triennal, au niveau de la loi de finances initiale de 2014 ; ils s’élèveront à près de 130 millions d’euros sur les 162 millions dédiés à la prévention. Dans un contexte où d’importants efforts de réduction sont imposés à plusieurs autres lignes de dépenses de l’État, la préservation des crédits de prévention du FIR est un choix politique fort.

Ces crédits permettent de maintenir l’engagement de l’État en faveur de la promotion de la santé et du développement de l’offre de prévention. Ils serviront notamment à financer les structures assurant la gestion des dépistages organisés des cancers, la lutte contre la tuberculose ou la politique vaccinale, dans un cadre qui, comme vous l’avez vous-même indiqué, madame la rapporteure, doit être stabilisé. C’est pourquoi je ne suis pas certaine qu’il soit opportun d’inscrire dans le FIR les budgets des MIG correspondant au traitement de certains cancers, en particulier les cancers pédiatriques, alors que d’autres lignes existent déjà.

Ces ressources viennent s’ajouter, au sein du budget du FIR, à celles qu’apporte l’assurance maladie, soit près de 220 millions d’euros en 2015, ainsi qu’aux crédits supplémentaires que les ARS peuvent mobiliser dans ce domaine, dans le respect de l’enveloppe globale allouée au titre du FIR. En 2014, 28,8 millions d’euros de crédits supplémentaires ont ainsi été consacrés à la prévention par les ARS.

L’effort en faveur de la prévention est également soutenu grâce à la mobilisation d’autres ressources, notamment les fonds de prévention de l’assurance maladie. Ainsi la convention d’objectifs et de gestion avec la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) prévoit une progression des moyens du Fonds national de prévention, d’éducation et d’information sanitaire (FNPEIS), à champ constant, de 437 à 455,4 millions d’euros entre 2013 et 2017. Doivent notamment être mentionnés les 228 millions consacrés à la prévention bucco-dentaire entre 2014 et 2017 – avec une progression des dépenses de 49,9 à 59 millions d’euros de 2013 à 2017 – et les 295 millions consacrés au dépistage des cancers entre 2014 et 2017.

Nous allouons également des ressources supplémentaires à la prévention dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2016, ressources qui doivent notamment financer la prise en charge des dépistages du cancer du sein, la mise en place d’une approche innovante de prévention de l’obésité chez les jeunes enfants et la prise en charge de l’intégralité du parcours de contraception des mineures – une mesure en faveur de laquelle la présidente de la commission des affaires sociales s’est fortement engagée. C’est également en 2016 qu’entrera en vigueur le remboursement intégral aux centres de vaccination de leurs achats de vaccins ; cette mesure a pour but de soutenir leur activité. Par ailleurs, je dois souligner, en tant que ministre de la santé et des droits des femmes, que le doublement des moyens accordés à la lutte contre la traite des êtres humains contribuera à financer des actions de prévention auprès des personnes victimes du système prostitutionnel.

Les crédits de prévention sont ainsi entièrement préservés de l’effort demandé au budget du programme 204, qui porte essentiellement sur les opérateurs. Sur la durée du triennal, les agences sanitaires participent en effet aux efforts d’économies à hauteur de 1 % de leurs dépenses hors rémunérations. Mais ces économies sont le résultat de réformes structurelles.

La création de la future Agence nationale de santé publique, dont je me réjouis qu’elle soit saluée par tous, permettra d’améliorer l’efficacité de la réponse aux risques sanitaires, de favoriser une approche intégrée de la santé publique, mais aussi de réaliser des mutualisations grâce à la fusion des trois opérateurs. Ces mutualisations ne pourront toutefois jouer à plein qu’une fois passée la phase d’installation, donc à partir de 2017. C’est pourquoi il a été décidé d’exonérer, en 2016, les agences qui fusionnent de la diminution de 50 ETP du plafond d’emplois demandée à l’ensemble des opérateurs. Aucune ponction sur réserves ne leur sera par ailleurs demandée en 2016, afin de couvrir les investissements rendus nécessaires par la création de la nouvelle agence.

J’en viens à présent à l’une des questions posées par votre rapporteure pour avis, concernant les travaux de préfiguration de la future agence. Une mission a été confiée en septembre 2014 au docteur François Bourdillon, directeur général de l’InVS et directeur général par intérim de l’INPES, afin de préfigurer l’organisation du nouvel établissement. La recherche des mutualisations possibles, des synergies et des intégrations à envisager a fait l’objet d’un soin particulier, afin que la future agence ne soit pas seulement la juxtaposition de trois instituts, mais un établissement efficient disposant d’une réelle cohérence d’ensemble et de valeurs communes. Le rapport de préfiguration m’a été remis en juillet dernier, à l’issue d’une large concertation avec les personnels des établissements et leurs représentants, concertation qui a permis de montrer que la création du nouvel établissement mobilise les agents autour d’un projet commun. Cette concertation se poursuit sur les projets de textes réglementaires, afin que le futur institut puisse être mis en place au début de l’année 2016, dès la promulgation de la loi de modernisation de notre système de santé.

Vous m’avez également interrogée, madame la rapporteure pour avis, sur le rôle du Comité stratégique d’animation du système d’agences (CASA). Le projet de loi de modernisation du système de santé organise le renforcement de la coordination des opérateurs intervenant dans le champ du ministère chargé de la santé. Il donne une base légale et réglementaire à cette coordination, aujourd’hui assurée de manière informelle au sein du CASA. Plusieurs thèmes de travail ont été identifiés, parmi lesquels la déontologie de l’expertise, la sécurité sanitaire, les articulations territoriales, la communication en santé et l’action européenne et internationale. La composition du CASA sera élargie à l’ensemble des directions du ministère chargé de la santé et aux autres ministères concernés. Ses travaux viseront à harmoniser les approches et les pratiques et à renforcer les complémentarités et les synergies, tout en préservant les prérogatives propres des établissements.

J’en viens à présent au Fonds d’intervention régional, à propos duquel vous m’avez posé plusieurs questions importantes, madame la rapporteure pour avis. Tout d’abord, je vous remercie d’avoir rappelé la forte mobilisation des équipes des ARS autour de la réforme de la gestion du FIR. Cette réforme très importante mettra fin à la complexité qui caractérise le système actuel de gestion du FIR par les ARS et l’assurance maladie et permettra notamment à celles-ci de disposer d’une meilleure vision globale des recettes et des dépenses du FIR et donc d’en améliorer le pilotage.

La question des marges de manœuvre dont disposent les ARS pour fixer des priorités selon les caractéristiques des territoires est souvent évoquée, car elle correspond à une préoccupation des acteurs de la santé et des élus. Il appartient aux ARS d’identifier des priorités de santé publique sur leur territoire ; ces priorités peuvent même être différenciées selon les territoires de santé composant leur région. Elles peuvent y consacrer des moyens, notamment en mobilisant, comme je l’ai évoqué, des crédits supplémentaires par redéploiement en faveur d’actions de prévention et de promotion de la santé. En 2014, vingt et une agences, soit une très large majorité d’entre elles, ont usé de cette possibilité, pour un montant de 28 millions d’euros, soit près de 8 % de leurs dépenses de prévention, c’est-à-dire le double de l’année précédente. Je veux dire combien je suis satisfaite de cette dynamique qui, même si elle peut paraître limitée, montre que les ARS se sont approprié ces instruments et n’hésitent plus ou hésitent moins à s’engager dans cette voie.

Par ailleurs, depuis la création du FIR en 2012, les crédits relatifs à la prévention font l’objet d’une péréquation entre régions. Comme je m’y étais engagée devant le Parlement l’an dernier, nous avons étendu ces mécanismes de péréquation, de sorte qu’ils concernent cette année plus de 60 % des crédits alloués dans le cadre du FIR.

Madame la rapporteure pour avis, je veux apaiser vos inquiétudes concernant la délégation tardive des crédits du FIR aux ARS. Les arrêtés de délégation sont publiés au printemps car, s’agissant de la contribution de l’assurance maladie au FIR – soit environ 90 % des crédits –, les décisions sont prises concomitamment avec celles sur la campagne hospitalière. Mais les agences disposent de mécanismes, notamment la règle des douzièmes provisoires, qui leur permettent, dès le 1er janvier de l’exercice, de mobiliser des crédits et d’engager leurs projets. Nombre de dépenses du FIR financent ainsi le fonctionnement de structures dès le mois de janvier. La création au 1er janvier 2016 d’un budget annexe au sein des ARS va permettre de mieux anticiper ces paiements, puisque les conseils de surveillance devront adopter un budget initial du FIR avant même le début de l’exercice, parallèlement à l’adoption de leur budget principal.

Vous avez enfin appelé de vos vœux la création d’un FIR pluriannuel qui permettrait de sécuriser le financement de certains projets. Il s’agit bien là de l’un des enjeux de la réforme votée en 2014, qui prévoit la possibilité de reporter des crédits non consommés d’un exercice sur l’autre, dans la limite d’un plafond qui est en cours de définition.

Contribuer aux efforts d’économies tout en finançant les priorités : tel est également notre objectif s’agissant du programme 183, consacré à la protection face à la maladie dans des situations relevant de la solidarité nationale.

Avant d’en venir au financement de l’aide médicale de l’État, je voudrais rappeler que, dans le cadre du PLF 2016, l’État stabilise à hauteur de 10 millions d’euros sa contribution au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA). C’est un message politique fort, puisque, certaines années, cette contribution a été nulle. L’État reconnaît ainsi sa responsabilité dans l’indemnisation des victimes de l’amiante. Nous améliorons également l’efficacité du FIVA, en réduisant les délais de présentation et de paiement des offres d’indemnisation. Par ailleurs, le Gouvernement a décidé de procéder, par voie d’amendement en loi de finances, à l’abandon des créances résiduelles du FIVA vis-à-vis des victimes de l’amiante ou de leurs ayants droit qui avaient bénéficié d’un trop perçu du fait d’évolutions de la jurisprudence. Cet abandon de créance sera intégralement compensé par l’État au FIVA.

J’en viens à présent à l’aide médicale de l’État.

Je veux tout d’abord rappeler la réalité des chiffres. En 2015, nous prévoyons 700 millions d’euros de crédits pour l’AME de droit commun. Nous sommes donc très loin des chiffres parfois avancés. Ce budget est fondé sur une hypothèse de progression tendancielle des effectifs identique aux années précédentes, soit 5 %, ce qui est cohérent avec les dernières tendances observées. Elle est proche du niveau de dépenses constaté en 2013 et 2014 et de celui que nous anticipons pour 2015. Je tiens à préciser dès à présent que les ouvertures de crédits supplémentaires que nous demanderons en loi de finances rectificative pour 2015 seront inférieures à ce qui a été constaté les années précédentes, ce qui montre que nous progressons dans la précision de la budgétisation. Nous attendons, du reste, une diminution modérée de la dépense en 2016, en raison de l’entrée en vigueur de la réforme de l’asile, qui devrait réduire le nombre de déboutés du droit d’asile continuant à résider sur notre territoire.

L’AME est une dépense nécessaire ; elle garantit un accès aux soins à des personnes qui ne sont pas des assurés sociaux. Non seulement cette démarche correspond à nos valeurs, mais elle permet de prévenir les surcoûts liés à des soins retardés et pratiqués dans l’urgence. Je veux ici rappeler que la durée moyenne de séjour et la prévalence de certaines pathologies sont bien plus élevées pour les soins urgents que pour l’AME de droit commun. Mais cela ne signifie pas pour autant que l’AME est exemptée de l’effort d’économies. Des mesures à fort impact ont en effet été prises en 2015, comme la fin de la prise en charge des médicaments à 15 % ou la baisse du coefficient de majoration de certains tarifs hospitaliers.

En ce qui concerne la Guyane, monsieur le rapporteur spécial, je vous répondrai très simplement qu’entre 2012 et 2014 les dépenses y ont été réduites de presque 10 %, passant de 34,1 à 30,9 millions d’euros.

Madame la rapporteure pour avis, vous m’avez questionnée sur les moyens mis en œuvre pour maîtriser cette dépense, notamment pour améliorer la fiabilité de l’instruction des dossiers et les procédures de contrôle. J’ai demandé au directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) de rendre plus efficaces les procédures de contrôle d’ouverture des droits. Cela vaut pour l’AME comme pour d’autres prestations, et ces contrôles peuvent concerner à la fois les bénéficiaires et les professionnels de santé. Tous les dossiers dans lesquels les demandeurs ont déclaré n’avoir aucune ressource font l’objet d’un contrôle approfondi des moyens d’existence, comprenant la convocation du demandeur à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) pour un entretien. Au niveau national, sur les 204 480 notifications d’ouverture de droit adressées en 2014, 29 405 ont été des notifications de refus, soit un taux de refus de près de 15 %. Par ailleurs, 160 agents spécialement formés sont chargés de contrôler les dossiers de demande et les conditions d’attribution de la prestation. Enfin, il est reconnu au service du contrôle médical une compétence générale qui lui permet d’analyser l’activité des professionnels de santé dispensant des soins aux bénéficiaires de l’AME dans les mêmes conditions que pour les assurés.

Enfin, monsieur le rapporteur spécial, lorsqu’on prétend parler du coût complet, il faut être précis et rigoureux. L’an dernier, vous aviez avancé un chiffre d’un milliard en faisant feu de tout bois – pour user d’une autre expression que celle que vous avez reprise. En effet, non seulement vous preniez en compte une dette de l’État envers la sécurité sociale – ce qui n’a pas de sens puisqu’il s’agit d’un montant accumulé sur plusieurs années –, mais vous reveniez également sur la réforme de la facturation des séjours hospitaliers AME qui a aligné cette facturation sur le droit commun – réforme qui a été en partie votée sous votre majorité – et vous surestimiez largement des coûts liés à la situation de Mayotte.

Si l’on prend en compte, pour 2014, des crédits budgétaires de 722 millions d’euros pour l’AME et des dépenses de 105 millions pour les soins urgents, on est en deçà de 830 millions. La réalité, c’est que ce montant a diminué entre 2013 et 2014, passant de 844 à 827 millions. En effet, la dépense au titre des soins urgents, après avoir fortement augmenté entre 2011 et 2013 à la suite de l’introduction du droit de timbre, passant de 76 à 129 millions, a baissé en 2014. C’est donc bien plutôt la création du droit de timbre qui a constitué une opération d’insincérité budgétaire, puisqu’elle avait conduit à transférer des dépenses de l’AME vers les soins urgents.

Telles sont, madame la rapporteure pour avis, monsieur le rapporteur spécial, les réponses que je souhaitais vous apporter.

M. Gérard Sebaoun. Le groupe Socialiste, républicain et citoyen se félicite de la progression de près de 5 % des crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2016. Le programme 204, consacré aux politiques de prévention, de sécurité sanitaire et à l’offre de soins, absorbe 44 % de ces crédits, les 56 % restants allant à l’aide médicale de l’État dans le cadre du programme 183. J’avais envisagé d’évoquer, ce soir, ce dispositif mais, puisque nous devons discuter demain, au Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC), du suivi du rapport d’information de 2011 de MM. Goasguen et Sirugue, je m’en abstiendrai ; peut-être en débattrons-nous en séance publique.

La mission « Santé » est en phase avec la stratégie nationale de santé et avec le projet de loi de modernisation de notre système de santé, dont l’article 42 vise à moderniser les agences sanitaires. Je me réjouis à cet égard que nos deux rapporteurs aient salué la création de l’Agence nationale de santé publique.

C’est sur ce nouvel établissement que je veux concentrer mon propos et vous interroger, madame la ministre. Le champ d’intervention de la future agence sera très vaste, puisqu’elle sera chargée de colliger des données scientifiques, sanitaires, démographiques, comportementales, sociales, climatiques et environnementales. Elle aura pour mission de nous préparer aux menaces et aux situations de crise liées aux maladies et aux risques actuels et futurs, ainsi qu’aux conséquences éventuelles de phénomènes naturels, d’accidents technologiques, d’actes de malveillance ou d’actes terroristes, d’événements sanitaires saisonniers ou exceptionnels aussi divers que la toxi-infection alimentaire collective, la grippe H1N1, la dengue ou le chikungunya.

Je salue, madame la ministre, votre choix stratégique de doter la France d’un tel centre de référence indépendant fondé sur l’expertise en santé publique, qui aura pour mission d’éclairer la décision publique, à l’instar des agences internationales qui font autorité en la matière, telles que les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) américains, Public Health England (PHE) ou l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). Elle le fera en partenariat avec les agences régionales de santé, les caisses d’assurance maladie, la direction générale de la santé et les autres administrations centrales ainsi que, je tiens à le préciser, le milieu associatif. Elle maintiendra et développera des liens avec les organismes européens et internationaux en charge de la santé publique. Il convient enfin de souligner la spécificité et l’importance de l’action qu’elle mènera outre-mer.

J’en viens à mes questions. La première d’entre elles concerne le budget et les personnels de la future agence, qui s’implantera sur le site actuel de l’INVS, à Saint-Maurice, dans le Val-de-Marne. Selon le rapport de préfiguration, le coût des aménagements, évalué entre 10 et 12 millions d’euros, devrait être rapidement amorti grâce aux économies réalisées sur les loyers qu’acquittaient les deux autres organismes. Ce transfert devra se faire dans des conditions optimales, en associant les personnels.

Près de 80 % des ressources des trois opérateurs concernés par la fusion proviennent du programme 204, à hauteur de 45 %, et de l’assurance maladie, à hauteur de 33 %. Les clés de répartition sont cependant très différentes d’un opérateur à l’autre. Pour 2016, la mission « Santé » alloue 90 millions euros aux trois opérateurs. Si l’on ajoute à ces crédits la contribution de l’assurance maladie et d’autres recettes, on parvient à un total d’environ 220 millions d’euros. Cette somme correspond-elle bien, madame la ministre, au budget de la future agence de santé publique, et sera-t-elle suffisante ? Quant aux effectifs, ils devraient être composés de 582 ETP, 618 avec ADALIS. Pouvez-vous nous renseigner sur le nombre total des salariés de la future agence ? Par ailleurs, que pouvez-vous nous dire de l’avenir d’ADALIS et de son éventuelle internalisation ? Le GIP ADALIS, je le rappelle, gère notamment les lignes téléphoniques de « Drogues info service » et « Alcool info service », ainsi que leurs sites Internet, et il est financé aujourd’hui à 100 % par l’INPES.

Enfin, il me semble que le marketing social devra faire partie intégrante des actions de la future agence. L’utilisation de cette technique, très largement développée à l’étranger, sera d’autant plus nécessaire que les budgets publicitaires des entreprises marchandes sont colossaux. Celui du secteur de l’agroalimentaire, par exemple, s’élevait en 2013 à près de 5 milliards d’euros en France, soit mille fois plus que le budget de l’INPES consacré aux campagnes relatives à la nutrition.

M. Dominique Tian. La mission « Santé » se compose de deux programmes, le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » et le programme 183 « Protection maladie », lequel comprend deux actions dont celle dédiée à l’aide médicale de l’État. Claude Goasguen vient de souligner que les montants qui y sont consacrés explosent, à tel point que le programme 204 « Prévention » s’en trouve affecté. La Cour des comptes indique en effet, page 15 de celle des analyses complétant son rapport sur l'exécution du budget de l’État en 2014 qui est consacrée à la mission « Santé », que « l'ouverture de crédits supplémentaires sur le programme 183 a été en partie gagée par l'annulation de crédits du programme 204 ». C'est donc le financement du pilotage de notre politique de santé qui est amputé par le dérapage des dépenses de l’aide médicale de l’État.

C’est d’autant plus dommage et grave que la mission « Santé » est, dites-vous, l'une des priorités du Gouvernement. Je pense notamment aux risques auxquels les jeunes sont exposés, comme le tabagisme, dont vous parlez souvent – la lutte contre le tabagisme est en quelque sorte le résumé de votre « programme de santé » –, la mauvaise alimentation et la consommation excessive d’alcool. Il faut, dites-vous, un programme national de réduction du tabagisme. Vous soulignez notamment l'importance du paquet neutre, mais nous sommes un certain nombre à vous l’avoir dit : vous vous trompez de cible. Vous devriez peut-être vous interroger sur le fait que c’est à l’âge de onze ans que, dans notre pays, on commence à fumer !

Il faudrait donc des actions un peu plus fortes en milieu scolaire, mais les budgets concernés diminuent. Le déficit de médecine scolaire inspire une vive inquiétude au groupe Les Républicains. Notre médecine scolaire est devenue l’une des plus mauvaises d’Europe, avec 1 300 praticiens contre 2 000 en 2001. C’est une très nette diminution et cela signifie, notre pays comptant 12 millions d’élèves, qu’il y a un médecin scolaire pour 10 000 écoliers, et même, par endroits, pour 15 000, compte tenu des inégalités entre territoires. Cette baisse des budgets consacrés à la prévention et cette médecine scolaire squelettique ne peuvent que nous attrister, a fortiori lorsque cette situation est due à la progression d’une aide médicale d’État que vous n’arrivez plus à gérer.

Certains programmes mériteraient d’être développés, comme cela a été souligné par notre collègue Valérie Fourneyron, notamment ceux qui permettent de prescrire une activité physique aux patients atteints de cancer, de douleurs chroniques ou d'autres pathologies dans le cadre de leur traitement. Des expérimentations très sérieuses ont fait la preuve de leur efficacité à Strasbourg et à Marseille. Mobilisons donc quelques crédits à cet effet.

Nous sommes également quelque peu déçus en ce qui concerne la fin de vie. Vous avez annoncé, à grands renforts médiatiques, le développement des soins palliatifs et avancé le montant de 40 millions d'euros supplémentaires inscrits dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, mais nous ne disposons d’aucun élément concret sur l’avancement de ce plan. Qu’en est-il donc ?

Le nombre de bénéficiaires de l’AME a dépassé 300 000, et la Cour des comptes prévient que le dynamisme des dépenses, autrement dit leur croissance persistante, compromet la soutenabilité de la mission. Nous constatons donc, encore une fois, une dérive, résultant de la forte augmentation du nombre de bénéficiaires, qui vous a obligée à ouvrir des crédits supplémentaires, comme le rapporteur l’a indiqué. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les crédits de l’AME sont en augmentation. Si un montant de 605 millions d’euros était inscrit en loi de finances initiale pour 2014, l’exécution s’est soldée par une dépense de 760 millions. Pour l’année 2015, vous avez ouvert 677 millions d’euros de crédit et vous prévoyez 744 millions en 2016. Nous ne pouvons qu’être extrêmement inquiets.

Vous indiquez que le recours aux génériques dans le cadre de l’AME est enfin acquis, mais c’est tout de même la moindre des choses ! Vous nous annoncez également que les titres ouvrant droit à l’AME seront sécurisés. Soit, mais nous le réclamions depuis plusieurs années, et nous aimerions des chiffres. Combien de bénéficiaires de l'AME possèdent déjà un titre sécurisé ?

Selon le projet annuel de performances, la réforme du droit d'asile votée cet été aura sans doute quelque influence, et vous-même venez de tenir des propos en ce sens, madame la ministre. Cependant, la Cour des comptes, s'appuyant sur les chiffres d’un service de l’État, la direction générale des étrangers en France (DGEF), nous apprend que 96 % des déboutés restent en France : seules 1 432 personnes déboutées sur 40 206 ont été éloignées. Ce taux d’exécution extrêmement faible nous fait penser que les montants de l’AME ne diminueront pas.

Le groupe Les Républicains voulait souligner cette dérive. Que la politique de prévention de notre pays soit réduite à l’état squelettique au profit de l’aide médicale de l’État nous paraît tout à fait scandaleux et inadmissible.

M. Arnaud Richard. Avant l'examen en nouvelle lecture du projet de loi relatif à la santé la semaine prochaine, nous nous retrouvons pour voter les crédits de la mission budgétaire « Santé ». Nous nous voyons donc régulièrement, madame la ministre, dans l’hémicycle ou en commission, mais nous sommes toujours incapables de saisir les objectifs de votre politique en matière de santé publique – du moins, au groupe Union des démocrates et indépendants.

Alors que le projet de loi de modernisation de la santé était présenté comme la grande loi du quinquennat en matière d'organisation de l'offre de soins sur le territoire, force est de constater qu’il ne résout en rien la question de la désertification et ne prépare nullement notre système de santé pour l'avenir. A son image, le PLFSS et ce projet de budget manquent cruellement d'ambition. Après une baisse de 25 % entre 2014 et 2015, les crédits alloués au programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » vont connaître une nouvelle diminution de 12,1 millions d'euros. Parallèlement, ceux du programme 183 « Protection maladie », qui permettent la mise en œuvre de l'aide médicale de l'État, augmentent de près de 11 %. Cet arbitrage du Gouvernement peut paraître surprenant – Dominique Tian l’a dit à l’instant – dans la mesure où les crédits du programme 204 constituent le socle de notre politique de santé publique.

J’appelle votre attention, madame la ministre, sur les crédits de l'action n° 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades », qui diminuent de 13 %. Avec 8,3 millions d'euros en moins, cette action contribue davantage aux efforts d'économie que toutes les autres réunies. Elle vise pourtant à donner une nouvelle impulsion à l'accompagnement des malades atteints d'une maladie neurodégénérative. Plus de 850 000 personnes sont atteintes de la maladie d'Alzheimer – elles seront plus de 1,3 million en 2020 –, 150 000 de la maladie de Parkinson, et plusieurs dizaines de milliers de la sclérose en plaques. Nous sommes tous concernés, dans nos propres familles, par ces maladies. L'accompagnement des malades et de leurs proches mériterait d'être amélioré par une politique de prévention plus active, par une information à tous les stades de la maladie, ainsi que par des aides susceptibles d'apporter un répit aux aidants. Or votre projet de budget, madame la ministre, ne permettra pas ces avancées.

Par ailleurs, les subventions versées à l'Institut national du cancer (INCa) baissent de 6,5 millions d’euros par rapport à 2015. Vous l’expliquez par des efforts de maîtrise des dépenses de fonctionnement et par des économies sur certaines dépenses de recherche et développement, d'études et de communication. Le signal envoyé, reconnaissez-le, est tout de même surprenant, à l’heure où le Président de la République, comme ses prédécesseurs, annonce un plan cancer – ce sera le troisième – et l'engagement d'actions lourdes.

Quant aux autres économies, elles contribuent incontestablement à fragiliser le socle de notre politique de santé publique.

Je terminerai par quelques mots sur les crédits de la mission 183 « Protection maladie ». Bien évidemment, notre groupe ne souhaite pas la suppression de l'AME, nous l’avons dit en diverses occasions, notamment lors de l’examen de plusieurs textes budgétaires, mais cette hausse de 68 millions d'euros peut être mal comprise par nos concitoyens. Si l'augmentation des crédits s'explique exclusivement par l'augmentation du nombre de bénéficiaires, elle n’en doit pas moins être contenue par un plan de santé publique global, cohérent et efficace, accompagnant les populations concernées dans un souci humanitaire. Depuis la suppression de la franchise de 30 euros se pose également une question d'équité vis-à-vis de celles et ceux qui doivent s'en acquitter, mais nous en débattrons demain, lorsque nous examinerons dans le cadre du CEC le rapport d’évaluation et de contrôle de nos collègues Christophe Sirugue et Claude Goasguen.

Devant contribuer à réduire les inégalités sociales et territoriales de santé et à soigner les plus fragiles, la mission « Santé » est essentielle, mais nous déplorons, madame la ministre, l’absence de solution globale et pérenne pour accompagner les mutations que connaît notre système de soins, confronté à l'augmentation des maladies chroniques, au vieillissement de la population, à l'évolution des attentes des patients et aux progrès scientifiques. Il est urgent de s'attaquer à des questions aussi essentielles que la désertification médicale, le rapprochement entre le public et le privé, la carte hospitalière, la répartition territoriale équitable des établissements de santé et leur nécessaire modernisation, la sécurité sanitaire ou encore l'innovation et la recherche.

Pour toutes ces raisons, le groupe Union des démocrates et indépendants ne votera pas les crédits de la mission « Santé ».

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Mon intervention portera sur le programme 204, en particulier sur son action n° 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » et sur les maladies neurodégénératives, qui touchent, comme cela vient d’être rappelé, plus d’un million de personnes en France. Le plan « Maladies neurodégénératives 2014-2019 » que vous avez présenté, madame la ministre, a impulsé une nouvelle approche transversale de ces pathologies, fixant un socle commun d’intervention et d’action en faveur des malades qui font face à une maladie neurodégénérative, et décloisonnant la recherche, l’accompagnement et l’organisation sanitaire.

Insistons sur l’indispensable formation des professionnels appelés à intervenir auprès de ces personnes. Ils sont nombreux : spécialistes, généralistes, kinésithérapeutes, infirmiers, aides-soignants, services d’accompagnement à domicile, etc. Dans le cadre du plan annoncé, un dispositif spécifique est-il envisageable pour développer la formation des personnels ou des aidants appelés à intervenir auprès des personnes touchées par une maladie neurodégénérative ?

Le plan prévoit une évaluation globale et l’accès à un programme personnalisé de soins. Une prise en charge adaptée sur l’ensemble du territoire et aux réseaux doit être proposée aux malades grâce au recours aux centres experts. Madame la ministre, que pouvez-vous déjà nous dire à ce sujet ?

Enfin, si les maladies neurodégénératives sont souvent évoquées en lien avec le vieillissement de la population, elles touchent aussi des sujets jeunes. Dans leur cas, l’anticipation et la prévention nécessitent une approche plus large du parcours de soins. Des dispositifs particuliers de nature à mieux accompagner le parcours des patients sont-ils prévus ?

M. Jean-Luc Reitzer. Ma question, madame la ministre, porte sur le défunt droit d’option des travailleurs frontalier qui exercent une activité professionnelle en Suisse. En dépit de l’opposition farouche et unanime des intéressés et de tous les parlementaires des régions frontalières concernées par ce droit d’option, vous lui avez porté un coup mortel ; je n’y reviendrai pas. En revanche, je veux ce soir vous faire part de notre exaspération quant à la position de la CNAMTS concernant les demandes de radiation de la CMU.

Le 10 mars dernier, le Tribunal fédéral suisse a fait savoir que, en vertu de la priorité donnée à l’État accueillant l’activité professionnelle du travailleur frontalier, ce dernier peut revenir s’assurer en Suisse s’il n’a pas déposé de manière expresse et formelle une demande d’exemption de couverture sociale auprès du régime suisse d’assurance maladie – la LAMal.

Dans ce cadre, des milliers de frontaliers ont demandé à être radiés de la CMU, et les premiers frontaliers qui en ont fait la demande via le formulaire E106 ont obtenu cette radiation, mais, depuis le 23 juillet dernier, les travailleurs frontaliers en Suisse se voient refuser cette radiation. Ils sont donc pris en otage et amenés à payer une double cotisation totalement contraire – vous le savez aussi bien que nous – au droit communautaire et aux accords de libre circulation entre la Suisse et la France. Ma question est donc simple : pourquoi la CNAMTS refuse-t-elle cette radiation ? La décision du Tribunal fédéral suisse est, à notre avis, parfaitement légitime, et applicable de plein droit. Alors qu’il faut lutter contre le chômage dans notre pays – nous en sommes tous d’accord –, il nous apparaît incohérent et, soyons tout à fait francs, inacceptable d’accabler des salariés qui, depuis des décennies, sont des acteurs quotidiens de la mobilité transfrontalière et des agents de la prospérité économique de nos régions frontalières, et, par ricochet, de la prospérité de notre pays. Voilà pourquoi je me permets de vous poser cette question. Les conséquences sont très importantes pour toutes les régions frontalières concernées.

Mme Françoise Dumas. Que 40 % des crédits de la mission « Santé » soient alloués au programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », est un choix politique fort. La prévention constitue en effet l’un des piliers de notre système de santé, un outil privilégié pour réduire les inégalités. C’est notamment par l’éducation à la santé que peuvent être diffusées les bonnes pratiques.

Au cours de l’année qui vient de s’écouler, l’accent a été mis sur les mesures visant la jeunesse. En lien avec la stratégie nationale de santé, de nombreuses dispositions doivent permettre de faire progresser l’accès à la santé, comme l’étiquetage nutritionnel, introduit dans le projet de loi relatif à la santé, qui offrira au consommateur une meilleure information sur la qualité nutritionnelle de leurs aliments. Les enfants sont particulièrement concernés par cette éducation nutritionnelle. En outre, le risque d’obésité est fréquemment associé à des facteurs environnementaux, à la situation familiale et sociale, à l’accès aux soins, à la couverture maladie, à l’état de santé général des enfants. Il est donc d’autant plus prégnant chez les plus jeunes, les plus fragiles, les plus pauvres, et accroît les inégalités sociales.

Pouvez-vous nous préciser, madame la ministre, comment ce risque est et sera pris en compte dans le cadre des crédits de cette mission « Santé » ?

Mme Isabelle Le Callennec. Je ne reviendrai pas sur l’AME, au sujet de laquelle nous avons déposé un amendement : 68 millions d’euros d’augmentation des crédits cette année, 5 % de bénéficiaires en plus !

Je vous remercie, madame la ministre, de vos réponses concernant le Fonds d’intervention régional. Je note votre volonté de transparence sur l’utilisation des montants, mais je voudrais des précisions supplémentaires. Vous avez évoqué la possibilité d’un report de crédits non consommés dans la limite d’un certain plafond, mais vous avez également parlé de péréquation entre régions. Quel sera le calendrier applicable ? À partir de quand une région devra-t-elle rendre les moyens non consommés ?

En ce qui concerne les conduites addictives, sur quels autres fonds que ceux de l’assurance maladie peut-on espérer financer les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), qui font un travail remarquable sur le terrain ? Et n’entendez-vous pas ceux qui vous disent que le paquet neutre n’est pas la solution ? Il n’y a qu’une solution en vérité : l’augmentation du prix de paquet de cigarettes, moyennant une révision du mode de rémunération des buralistes, qui, aujourd’hui, manifestent. Enfin, aucune volonté politique ne se fait jour en matière de lutte contre la consommation de cannabis, qui touche les jeunes et dont on ne parle jamais.

Quant à la politique vaccinale, que répondez-vous aux 240 familles dont les enfants ont été vaccinés avec le Meningitec, dont 21 lots, contaminés par des particules de fer et d’acier, ont été retirés de la vente ?

Je terminerai par quelques regrets. Toujours rien sur l’impact sur la santé humaine de la présence de champs électromagnétiques dus aux lignes à très haute tension ! Rien non plus sur la lutte contre les troubles musculo-squelettiques (TMS) qui touchent les salariés des entreprises agroalimentaires ! Et un tout petit montant de 1,15 million d’euros en faveur de la santé mentale, ce n’est pas absolument suffisant quand on connaît les besoins de notre pays en la matière.

Mme Sylviane Bulteau. Mon intervention portera sur la lutte contre le cancer, au niveau tant de la prévention que de la réparation.

Saluons tout d’abord une mesure nouvelle, adoptée dans le cadre du PLFSS, qui vise à étendre la gratuité des examens de dépistage et de surveillance aux femmes ayant certains antécédents familiaux de cancer du sein et qui, selon les recommandations de la Haute Autorité de santé et de l’Institut national du cancer, sont exposées à un risque élevé de développer un cancer du sein. Dès 2016, ces femmes pourront donc bénéficier d’une prise en charge à 100 % par l’assurance maladie des examens de dépistage recommandés.

Cependant, le cancer, notamment celui du sein, entraîne fréquemment des dépenses non prises en charge. Aussi notre collègue Bernadette Laclais a-t-elle demandé un rapport sur la prise en charge de l’ensemble des frais directs ou indirects liés à une pathologie cancéreuse et sur les restes à charge des patients, notamment ceux liés à la chirurgie réparatrice. Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, où en est votre réflexion par rapport à cette demande d’évaluation de ces fameux restes à charge, qui contrarient trop souvent notre volonté unanime d’assurer l’égalité devant les soins ?

Enfin, je voudrais être rassurée. Les moyens consacrés à la prévention des maladies chronique permettront-ils bien d’accompagner la mise en œuvre du plan cancer, notamment le travail des associations mais aussi celui de l’Institut national du cancer.

J’ai retrouvé, dans cette mission « Santé », les valeurs et les objectifs qui fondent nos engagements : la solidarité, l’égalité et l’humanité. Peut-être cela répondra-t-il à notre collègue de l’UDI, qui s’interrogeait sur nos objectifs en matière de santé publique.

M. Denis Jacquat. Le budget qui nous est présenté comporte une ligne budgétaire consacrée à la prévention des maladies chroniques et à la qualité de vie des malades, mais il n’est guère question de l’éducation thérapeutique du patient. Un rapport parlementaire lui a pourtant été consacré, adopté ici même à l’unanimité il y a quelques années. Il comportait un certain nombre de propositions visant à permettre aux personnes atteintes d’une maladie chronique de vivre le mieux possible en évitant les poussées aiguës. Madame la ministre, quelle est votre position vis-à-vis de l’éducation thérapeutique du patient ?

Une autre ligne concerne la politique vaccinale. Une minorité se défie actuellement de la vaccination, phénomène amplifié par les médias. Cela jette le trouble. Nous connaissons pourtant tous me rôle de protection individuelle et collective de la vaccination. Vous avez, madame la ministre, confié à l’une de nos collègues une mission de réflexion et annoncé un débat national sur la vaccination en 2016. Pouvez-vous nous indiquer votre position actuelle sur la politique vaccinale de notre pays ?

M. Claude Goasguen, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Vous avez très rapidement éludé, madame la ministre, la question de la dette cumulée. Or la Cour des comptes estime que vous ne pouvez la retirer de l’évaluation budgétaire ; c’est une remarque que nous ne devons pas négliger. En l’état actuel des choses, son montant de 57,3 millions d’euros.

Vous avez aussi éludé la question de la prise en charge des dépenses de soins urgents par la sécurité sociale, que j’évoque dans mon rapport. Une dotation de l’État est prévue, d’un montant de 40 millions d’euros, mais le montant global de cette prise en charge est de 105 millions. Par conséquent, ce sont 65 millions d’euros de soins urgents qui sont pris en charge par la sécurité sociale et que vous ne comptabilisez pas.

Vous avez estimé que le droit d’asile allait permettre des économies d’un montant de 50 millions d’euros – je ne parle pas des médicaments, car je ne pense pas que les montants concernés puissent dépasser 5 millions d’euros. Votre estimation me paraît extrêmement suspecte. D’ailleurs, aucun chiffre ne l’étaie, et, M. Tian l’a dit, l’accélération des procédures et le faible nombre d’éloignements nous laissent plutôt craindre une augmentation des crédits de l’AME, mais peut-être considérez-vous qu’un coup de tampon permettra de considérer toutes les personnes dont les dossiers seront examinés en accéléré comme des réfugiés politiques – il faudra alors nous interroger sur le sens de l’asile politique. Si nous nous en tenons aux statistiques dont nous disposons actuellement, il est vraisemblable que c’est plus l’AME que la CMU qui subira l’effet de cette accélération des procédures sur les réfugiés politiques. Qu’en est-il donc de l’économie que vous attendez ?

Vous considérez que j’ai surévalué les dépenses de santé en faveur des étrangers en situation irrégulière à Mayotte. Pourriez-vous donc nous donner les chiffres ? Jusqu’à présent, nous n’arrivons pas à obtenir un chiffre crédible, et il en va de même en ce qui concerne la Guyane, malgré toutes nos recherches, malgré les critiques de la chambre régionale des comptes de Guyane qui appelle systématiquement notre attention sur le fait que les dépenses d’AME sont sous-évaluées en Guyane. J’attends donc avec beaucoup d’impatience les explications promises. Le cas échéant, je reconnaîtrai bien volontiers que le montant de 100 millions d’euros est excessif, mais je crains fort, madame la ministre, que ce ne soit vous qui sous-évaluiez ces dépenses.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Madame la ministre, vous avez prévu 1,6 million d’euros pour un portail de déclaration des effets indésirables par les usagers et les professionnels de santé. Si mes souvenirs sont bons, il en existe déjà un à la Haute Autorité de santé, de même qu’il existe, pour les médicaments notamment, les centres régionaux de pharmacovigilance. Comment allez-vous donc articuler tout cela pour que nous n’ayons qu’un référentiel ? La question a des implications notamment en ce qui concerne l’open data et les données de santé, et votre réponse devrait particulièrement intéresser mon collègue Gérard Bapt.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Je réponds tout de suite à Mme la présidente de la commission des affaires sociales. Il est vrai que nous sommes en train de reconfigurer les portails de déclaration des événements indésirables. Nous prévoyons bien un crédit d’un montant de 1,6 million d’euros pour la création de ce portail dont l’ouverture est programmée en septembre 2016 et s’inscrit dans le cadre plus large de la réforme, prévue par le projet de loi relatif à la santé, de la prise en charge des vigilances, de l’organisation territoriale, de la veille et de l’alerte sanitaire. Le portail de déclaration des événements indésirables accessible sur le site de la Haute Autorité de santé, sera intégré au portail unique ouvert en septembre 2016 ; la jonction se fera alors. Le contrat d’objectif et de performance (COP) de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) prévoit, pour sa part, de maintenir le niveau de financement des réseaux de vigilance et de poursuivre la montée en charge de la matériovigilance, le renforcement des actions de l’agence dans le domaine de la surveillance de l’impact des produits de santé est la priorité, mais, dans un souci de rationalisation, nous devons fédérer l’ensemble des moyens actuels.

M. Sebaoun a évoqué la nouvelle Agence nationale de santé publique. Comme il l’a souligné, c’est une étape absolument décisive, après celle de la création, pour des raisons diverses et variées, des agences, processus qui s’est étalé sur les vingt dernières années.

Il s’agit aujourd’hui de doter notre pays d’une force de frappe en matière de prévention. Contrairement à d’autres pays, notamment anglo-saxons, la France n’a pas de grande tradition en la matière. Nous avons besoin d’une harmonisation et d’une mobilisation de tous les moyens dont nous disposons en termes de prévention, d’épidémiologie, de surveillance. Il nous faut nous doter une politique cohérente, et c’est ce que nous allons faire.

Ce sont bien 220 millions d’euros que nous allons consacrer à cette nouvelle Agence nationale de santé publique, qui s’appellera également Santé publique France. Comme beaucoup de pays le font pour certaines structures publiques, nous avons en effet choisi une double dénomination, l’une à usage intérieur, l’autre compréhensible par tout le monde à l’étranger, et qui s’imposera peut-être aussi dans notre pays et dans les médias : Santé publique France. Le financement retenu pour la nouvelle agence est calqué sur celui qui existe actuellement pour l’EPRUS, avec une clé de répartition entre l’État et l’assurance maladie fixée par la loi à 50 % sur trois exercices successifs. Le financement de l’INPES est assuré, pour sa part, aux deux tiers par l’assurance maladie et pour in tiers par l’État, tandis que l’InVS est entièrement financé par l’État.

En 2015, les montants alloués aux trois agences s’élevaient à 145 millions d’euros, dont 89 millions fournis par l’État. Par ailleurs, les trois agences comptent bien 585 ETP, auxquels doivent effectivement être ajoutés 36 ETP issus du GIP ADALIS, financé à 100 % par l’INPES, et dont vous avez rappelé qu’il gère les lignes téléphoniques de Drogues Info Service, d’Alcool Info Service, d’Écoute Cannabis, de Joueurs Info Service.

Le scénario retenu est effectivement celui d’une intégration du GIP dans le futur établissement. Les projets de textes, en cours de concertation, prévoient par ailleurs d’inclure l’aide à distance au sein des missions du futur établissement.

Cette internalisation présente plusieurs avantages. Elle va dans le sens d’un meilleur pilotage, par la nouvelle agence, de l’aide à distance en matière d’addictions, et dans le sens d’une meilleure articulation des différentes campagnes. Elle permettra de se doter d’un espace d’expérimentation et d’évaluation des services d’accompagnement. Au-delà, elle facilitera la gestion financière – meilleure maîtrise et intégration des coûts – ainsi que la gestion sociale au sein de la structure qui sera ainsi confortée.

Il est envisagé de prolonger, par voie d’avenant, la convention constitutive du GIP. Cela permettra de prévoir une période de transition entre la dissolution du GIP, prévue au 31 décembre de cette année, et la promulgation de la loi de modernisation de notre système de santé. Cela n’aura aucun impact sur les personnels du GIP, qui n’ont donc pas à s’inquiéter.

Maintenant, il faut reconnaître que nous n’avons pas l’habitude de pratiquer le marketing social, puisque c’est une technique qui a été développée à l’étranger. Celle-ci est d’autant plus nécessaire que la future agence sera confrontée aux budgets publicitaires colossaux des entreprises marchandes. C’est ainsi qu’en 2013 le budget publicitaire de l’agroalimentaire s’élevait à 4,5 milliards d’euros, alors que celui de l’INPES, pour les campagnes relatives à la nutrition, s’élevait à 3,3 millions d’euros, soit plus de mille fois moins… Il en va évidemment de même pour le tabac ou l’alcool. L’actualité nous montre d’ailleurs les moyens considérables consacrés à certaines campagnes de publicité ou de lobbying !

L’INPES a déjà travaillé sur le sujet, en relation avec des acteurs étrangers. Dans les années à venir, il développera le marketing social en matière de santé publique. Cette technique peut, par exemple, être utilisée pour la prévention de l’obésité des adolescents, la lutte contre le tabagisme ou la recommandation d’actions de proximité. Il est vraiment important de s’en saisir.

Je répondrai à MM. Tian et Goasguen que nous n’avons aucune raison d’occulter quelque dépense que ce soit. Nous pouvons être en désaccord sur les objectifs poursuivis ou avec la politique menée, mais, pour notre part, nous assumons notre politique d’aide médicale d’Etat (AME). Pourquoi prétendre que nous dépensons moins que ce que nous dépensons ? Nous n’avons rien à cacher, contrairement à ce que vous voulez faire croire en parlant de mystérieuses dépenses qu’il faudrait débusquer.

Je vous ai dit tout à l’heure que 827 millions d’euros avaient été identifiés. Je vous précise que, dans ce montant, figurent les 105 millions de la CNAMTS. Vous dites que je n’en parle pas. Mais si, j’en parle : simplement, ils sont dans le total. Je n’y peux rien, c’est ainsi.

À Mayotte, on est plus proche de 65 millions d’euros que de 100 millions, contrairement à ce que vous dites. Enfin, la réforme du droit d’asile devrait nous permettre de réduire d’environ 18 000 le nombre de déboutés qui restent, et qui sont pris en charge par l’AME.

Tout à l’heure, monsieur Tian, j’ai évoqué une réduction de la dépense en matière d’AME, ou plus exactement d’une réduction dans la LFI de 2016 par rapport à la loi de finances exécutée en 2015. Mais j’ai précisé que cette réduction serait limitée : je n’annonce pas de réductions drastiques que je ne serais pas en mesure de documenter. De fait, le nombre des personnes déboutées qui ne devraient plus être prises en charge par l’AME ne serait que de 18 000. Mais nous faisons tout pour que ce nombre augmente.

Monsieur Tian, plusieurs de vos questions relèvent, en fait, du PLFSS, mais je vais y répondre.

D’abord, vous ne pouvez pas dire en même temps qu’il faut que les gamins de onze ans ne commencent pas à fumer, et qu’il ne faut pas imposer le paquet neutre. Vous ne pouvez pas m’expliquer que le paquet neutre n’est pas efficace, et me dire qu’il aura un impact sur le chiffre d’affaires bureaux de tabac. Je ne comprends pas votre raisonnement – pas plus que celui de Mme Le Callennec – sur ce point.

A vous entendre, monsieur Tian, la lutte contre le tabagisme serait une de mes lubies ! Selon vous, essayer d’éviter 78 000 morts par an serait donc une lubie ?

M. Dominique Tian. Et la médecine scolaire ?

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Je n’ai aucune prise sur la médecine scolaire, pas plus que sur la médecine du travail. C’est une particularité de notre pays, en effet, que la médecine du travail y dépende du ministère du travail, et la médecine scolaire du ministère de l’éducation nationale.

Quoi qu’il en soit, on ne peut balayer d’un revers de main le fait que 78 000 personnes meurent tous les ans à cause du tabac. Le plan national de réduction du tabagisme est donc bien une priorité de santé publique. Le tabagisme étant la première cause de mortalité évitable dans notre pays, le Gouvernement, et donc le ministère de la santé, doivent s’en préoccuper.

Vous avez par ailleurs insisté sur la nécessité de développer le « sport santé », inscrit dans le projet de loi de modernisation du système de santé. Des actions peuvent être financées par le FIR lorsqu’elles répondent à des projets innovants que les ARS souhaitent mobiliser. Mais comme j’ai eu l’occasion de le dire, aujourd’hui, il n’y a pas de financements émanant de la sécurité sociale.

Lorsque nous avons évoqué le sujet en séance, nous avons rappelé les initiatives prises par certaines villes ou certaines associations. C’est ainsi que depuis un certain temps, la ville de Strasbourg prend en charge l’abonnement Vélhop sur prescription médicale du cardiologue, lorsque celui-ci considère que l’exercice est bon pour la santé de son patient. Des projets de ce type-là sont financés par le FIR, mais pas par l’assurance maladie puisqu’il n’y a pas de remboursements prévus. Mais ils sont tout à fait identifiés.

Enfin, s’agissant des soins palliatifs, je vous répondrai que le financement de 40 millions d’euros que vous avez évoqué est prévu au budget de l’assurance maladie, et non au budget de l’État.

M. Richard, pour sa part, a regretté que je ne préoccupe pas de résoudre le problème de la désertification médicale – critique que l’on entend régulièrement lors des débats parlementaires. Je pense donc qu’il aura à cœur, comme d’autres de ses collègues, de saluer le plan que j’ai annoncé aujourd’hui, et qui vise à renforcer l’attractivité des carrières des praticiens hospitaliers. En effet, ceux qui prendront un poste dans un territoire sous-doté, ou dans une discipline qui manque de professionnels, bénéficieront d’une prime d’engagement significative, représentant plusieurs mois de carrière, et d’une accélération de carrière qui leur permettra, au bout de cinq ans, de se prévaloir de sept ans d’ancienneté, ce qui est tout à faire appréciable. À ce dispositif s’ajouteront d’autres mesures, sur lesquelles je ne reviens pas, qui visent à encourager la prise de postes hospitaliers par les jeunes praticiens.

M. Richard m’a également interrogée, ainsi que Mme Carrillon-Couvreur – mais pas exactement de la même façon – à propos des maladies chroniques et neurodégénératives.

Je rappelle que la baisse des crédits pour les maladies chroniques correspond à la baisse de la dotation attribuée à l’INCa, que M. Richard a relevée. Mais cela ne se traduit pas par une baisse des actions. Ce sont en effet des prélèvements sur le fonds de roulement, qui n’entraînent aucune dégradation des ressources allouées à la santé publique. La lutte contre le cancer est bien pour nous une priorité.

Par ailleurs, après trois plans Alzheimer successifs, nous avons fait le choix de proposer une démarche nouvelle concernant plusieurs maladies neurodégénératives, et fondée sur le soin, l’accompagnement et la recherche. Ces maladies sont incontestablement devenues un enjeu majeur de santé publique : en France, 850 000 personnes sont touchées par la maladie d’Alzheimer, 150 000 par la maladie de Parkinson et 100 000 par la sclérose en plaques.

À la question précise posée par Mme Carrillon-Couvreur, je répondrai que, depuis décembre 2014, la gouvernance du suivi du plan « maladies neurodégénératives » est installée et opérationnelle, tant au niveau national qu’au niveau régional. Les associations de patients sont membres du comité de suivi, présidé par le professeur Michel Clanet.

En juin 2015, sept centres régionaux d’excellence – dont Bordeaux, Grenoble, etc. – sont d’ores et déjà labellisés. Ces centres fonctionnent bien, mais nous devrons faire, dans quelques mois, le bilan de ce qu’ils nous apportent.

Le 1er septembre dernier, j’ai délégué les crédits permettant aux ARS d’augmenter, à hauteur de la cible à atteindre, le nombre de places dans les différentes structures des personnes malades et des aidants – pôles d’activités et de soins adaptés (PASA), unités d’hébergement renforcées (UHR), plateformes d’accompagnement et de répit. Je rappelle d’ailleurs que la loi d’adaptation de la société au vieillissement prévoit des mesures pour les aidants de personnes âgées. Mais les personnes âgées souffrant de maladies neurodégénératives bénéficieront aussi des aides prévues par cette loi.

Enfin, pour favoriser le développement de l’éducation thérapeutique, une enveloppe de 2 millions d’euros a été prévue au sein du FIR pour 2015, et elle sera reconduite chaque année sur toute la durée du plan. Donc, contrairement à ce que disait M. Richard, il n’y a pas du tout de diminution des moyens accordés en ce domaine.

Monsieur Reitzer, la situation des travailleurs frontaliers qui exercent une activité professionnelle en Suisse nous occupe depuis maintenant un certain temps. Je vous remercie d’ailleurs de la façon dont vous m’avez interrogée : très posément. Il est exact que nous rencontrons aujourd’hui une difficulté – même si je ne l’analyse pas de la même façon que vous – qui est celle de la double cotisation.

L’idée était de proposer aux frontaliers le choix du pays d’affiliation. La règle, qui prévalait depuis les accords entre l’Union européenne et la Suisse, était que le choix fait par un travailleur frontalier était définitif, tant que sa situation personnelle n’avait pas changé – départ en retraite, chômage… Or une décision juridictionnelle suisse a considéré que le choix d’affiliation d’un travailleur frontalier allemand, dans son pays de résidence, devait avoir été formulé de façon expresse et formelle pour être définitif.

Cette décision a semé quelque trouble parce que la notion de « choix express et formel » ou de « décision tacite » peut donner lieu à des appréciations différentes, les cantons suisses ayant en jusqu’en 2013 des procédures diverses pour formaliser le choix d’affiliation des travailleurs frontaliers.

Nous considérons pour notre part qu’une décision juridictionnelle suisse ne peut pas produire d’effet direct en France. En outre, la diversité des pratiques administratives des cantons suisses ne saurait avoir des conséquences sur les règles d’affiliation. Les travailleurs frontaliers qui avaient fait le choix d’une couverture maladie en France, y compris auprès d’une assurance privée, avaient bien fait un choix express et formel, puisqu’ils avaient accompli des démarches auprès d’un assureur.

Nous considérons donc que l’assurance maladie a pu, à bon droit, refuser les demandes de radiation déposées par les travailleurs frontaliers ayant demandé une affiliation à la LAMal à la suite de cet arrêt. Si double cotisation il y a, et il peut y avoir double cotisation, elle résulte plutôt de la pratique de certaines administrations suisses, qui ont admis de manière systématique la réaffiliation en Suisse des travailleurs, sans tenir compte de l’option prise en faveur de la France.

Les autorités suisses avaient toujours reconnu que la fin du droit d’option pour l’assurance privée ne devait pas rouvrir la possibilité de choisir entre une affiliation en France ou en Suisse. Il y a néanmoins une difficulté, et c’est pour cela qu’avec mes collègues ministre des finances et secrétaire d’État chargé du budget, nous avons écrit au gouvernement suisse afin qu’il soit mis fin à ces doubles affiliations. Nous avons également saisi le comité mixte Union européenne-Suisse pour trouver les solutions adaptées aux situations concrètes.

Monsieur le député, nous n’avons pas la même analyse juridique de la manière dont la CNAMTS agit en la matière. Nous ne nions pas la difficulté que rencontrent les frontaliers concernés. Nous avons demandé à la Suisse de revoir sa position, et nous travaillons avec les autorités et les structures compétentes pour trouver une solution.

Madame Le Callennec a parlé du FIR, et s’est inquiétée à propos de la péréquation et du budget pluriannuel. Ce sont deux sujets différents.

La question de la péréquation se pose quant àla répartition des sommes qui, année après année, sont attribuées aux différentes ARS. Depuis l’origine, nous établissons une péréquation dont le champ a grandi pour tenir compte des régions qui rencontrent des difficultés plus importantes qu’ailleurs. Sans grande surprise, la région Nord-Pas-de-Calais a fait l’objet d’une péréquation plus importante, compte tenu des déterminants de santé observés.

Mais, indépendamment de cela, nous avons dit que si tous les fonds n’étaient pas consommés à la fin de l’année, donc dans le cadre de l’enveloppe attribuée une fois la péréquation faite, il n’y aurait pas de péréquation des sommes non dépensées.

Cela signifie que l’on ne répartira pas les sommes non dépensées entre les ARS. Nous avons décidé de donner à chaque agence la possibilité de disposer d’une marge de manœuvre, pour que des projets en cours d’élaboration ne soient pas arrêtés parce qu’ils n’auraient pas pu faire l’objet d’un financement dans les délais.

Vous m’avez par ailleurs interrogée, madame Le Callennec, sur le financement des centres de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA). Ceux-ci font l’objet d’un financement dans le cadre de l’assurance maladie. À ce jour, c’est leur seule source de financement. J’ajoute que je préfère qu’il en soit ainsi. En effet, la multiplicité des financements n’est pas forcément un atout. Prenez l’exemple des établissements médicosociaux, dont les financements viennent et de l’État, et du département, et de l’assurance maladie : cela ne facilite pas la fluidité de la prise de décision.

Ensuite, il est exact que certaines familles ont exprimé des inquiétudes à propos du Meningitec. Elles m’ont écrit, et des échanges se sont engagés avec la direction générale de la santé, qui les recevra prochainement.

S’agissant des troubles musculo-squelettiques (TMS) en entreprise, je n’ai pas très bien saisi votre demande, mais je tiens à rappeler que la politique de la santé au travail ne relève pas du ministère de la santé. Cela étant, l’assurance maladie intervient lorsque ces troubles se déclarent. En outre, des politiques de santé mentale et de prévention des risques sociaux peuvent être mises en place. C’est ainsi que le ministère de la santé développe des actions dans ce domaine pour les personnels de la fonction publique hospitalière, ce qui est nouveau.

Madame Bulteau, vous m’avez interrogée sur le financement de la chirurgie reconstructrice après cancer. La question a d’ailleurs été débattue dans l’hémicycle il y a quelques jours. À cette occasion, Mme Laclais a déposé un amendement demandant la remise d’un rapport de l’INCa sur ce sujet. J’avais accepté, en indiquant que ce rapport serait remis en 2017. Je peux affirmer aujourd’hui que cette remise aura bien lieu, mais dès 2016. En effet, l’INCa sera capable de répondre à vos préoccupations dans des délais plus rapprochés que ceux que j’avais moi-même envisagés.

Monsieur Jacquat, vous m’avez interpellée sur les maladies chroniques et l’éducation thérapeutique du patient. C’est évidemment un enjeu important. Au cours de la loi de modernisation de notre système de santé, l’Assemblée a voté – et vous aussi je pense – un article prévoyant l’expérimentation de dispositifs d’accompagnement des patients atteints de maladies chroniques. L’objectif est de favoriser le développement, notamment par les associations, de projets d’éducation thérapeutique innovants.

Enfin, je devrais recevoir prochainement recevoir le rapport de Mme Sandrine Hurel sur la politique vaccinale dans notre pays. À partir de là, nous pourrons lancer le débat. Je ne veux pas préjuger les éléments qui figureront dans le rapport, ni anticiper les conclusions que nous en tirerons. Mais j’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer à plusieurs reprises pour dire ma préoccupation devant la montée du sentiment de défiance vis-à-vis de la vaccination dans notre pays. On peut l’expliquer par plusieurs facteurs. En particulier, ce qui est passé au moment de la grippe H1N1 a eu un impact incontestable.

Votre question me donne l’occasion de rappeler que nous devons encourager ceux qui le peuvent à se faire vacciner de la grippe : ce n’est pas un simple gros rhume désagréable, c’est une maladie qui peut tuer. Il est donc très fortement recommandé aux personnes fragiles – femmes enceintes, personnes de plus de soixante-cinq ans, personnes malades – de se faire vacciner, d’autant plus que nous avons toutes les raisons de penser que, cette année, le vaccin comporte la bonne souche de virus et devrait, pour cette raison, être assez largement efficace. Indépendamment même de cela, il faut soutenir la vaccination, car c’est un élément important de la santé publique.

M. le président Gilles Carrez. Madame la ministre, il me reste une question à vous poser, avant que nous ne passions à l’examen des crédits. Nous venons de recevoir, il y a deux heures, deux amendements du Gouvernement sur la question de l’indemnisation des victimes de l’amiante et de leurs ayants-droit. Pourriez-nous donner quelques explications à ce propos ? Je ne suis pas sûr que nos rapporteurs aient vu ces amendements.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. C’est vrai, j’aurais dû en parler.

M. le président Gilles Carrez. Ces deux amendements sont liés : le premier consiste à augmenter les crédits au bénéfice du fonds d’indemnisation, le second à apurer la situation financière des ayants-droit et des victimes.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. En effet, sur renvoi de la Cour de cassation, des cours d’appel ont réduit le montant des indemnités qui devaient être allouées par le FIVA aux personnes éligibles. Nous avons évalué à 650 le nombre des victimes concernées, pour un montant de 7,8 millions d’euros.

Deux ans se sont écoulés depuis les dernières actions du FIVA sur ce dossier, laissant les débiteurs légitimement penser à une renonciation du Fonds. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de procéder à un abandon de créances, par voie d’amendement, en loi de finances. Et l’État compensera cette perte de recettes, comme je l’ai indiqué dans mon intervention initiale.

Compte tenu de la constitution d’une charge exceptionnelle de 4,4 millions d’euros dans le budget 2013, à la suite de l’abandon de créances, qui avait été financée par la dotation de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (ATMP), le coût de la mesure pour l’État est ramené à 3,4 millions d’euros.

M. le président Gilles Carrez. Madame la ministre, nous vous remercions.

La réunion de la commission élargie s’achève à vingt-deux heures quarante-cinq.

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