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Commission des affaires européennes

mardi 16 septembre 2014

14 heures

Compte rendu n° 153

Présidence de Mme Danielle Auroi Présidente

I. Examen du rapport d’information pour observations sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (no 2188)

II. Communication de la Présidente Danielle Auroi sur la consultation publique de la Commission européenne relative à la qualité de l’eau potable

III. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

IV. Nomination de rapporteurs d’information

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mardi 16 septembre 2014

Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 14 h 05

I. Examen du rapport d’information pour observations sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (no 2188)

La Présidente Danielle Auroi. Nous allons passer sans tarder à l’examen des deux points à l’ordre du jour.

Le premier est un rapport d’information portant observations, en application de l’article 151-1-1 du règlement, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Il vise à donner l’éclairage européen de notre commission sur un texte qui devrait constituer une étape majeure pour la transition vers un modèle de croissance plus durable en France. À un peu plus d’un an de la Conférence climat qui se tiendra à Paris et dont l’horizon est de parvenir à un accord mondial sur le climat pour succéder au protocole de Kyoto, le sujet de la transition énergétique est un sujet qui mérite toute notre attention.

Notre commission est engagée à plusieurs titres dans le suivi des problématiques de la transition énergétique. D’une part, avec le rapport annuel de MM. Jérôme Lambert et Bernard Deflesselles pour le suivi des négociations climatiques internationales. D’autre part, avec la participation au groupe de travail conjoint avec les commissions du développement durable et des Affaires étrangères pour la préparation de la Conférence climat qui se tiendra à Paris en 2015. Ce groupe s'est réuni pour la première fois le 9 septembre dernier.

Il m’a donc semblé essentiel que la commission des Affaires européennes puisse s’exprimer sur ce projet de loi qui va toucher tous les citoyens. Quels sont les principaux objectifs de la loi et les moyens mis en œuvre pour les atteindre ?

Le projet de loi relatif à la croissance énergétique pour la croissance verte comprend 8 titres, avec 3 grandes parties et 64 articles. C’est un texte programmatique, car il pose les grands principes et les objectifs de la transition énergétique française, mais laisse à une Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui sera adoptée ultérieurement, le soin du détail de sa mise en œuvre concrète. Cette première programmation devrait porter sur la période 2015-2018. Les trois parties du texte en montrent les grandes priorités : la priorité aux économies d’énergie, pour l’efficacité énergétique ; l’impératif de diversifier notre mix énergétique, pour la promotion des énergies renouvelables et le renforcement de la sûreté nucléaire ; la volonté d’agir ensemble, de simplifier et de mieux réguler, pour des gains de compétitivité liés à la simplification et une meilleure participation de tous les acteurs concernés.

Le projet contient des objectifs forts pour accélérer la transition énergétique qu’il faut souligner. La réduction des émissions de gaz à effet de serre françaises dans le but de contribuer pleinement à l’objectif européen d’une baisse de 40 % des émissions en 2030 par rapport à 1990. La diminution de la consommation d’énergies fossiles de 30% à l’horizon 2030. La réduction de la part du nucléaire à 50 % de la production d’électricité en 2025 (73 % en 2013). Le déploiement des énergies renouvelables pour qu’elles représentent 32 % de notre consommation énergétique finale en 2030.

Ces objectifs sont assortis d’outils utiles. Tout d’abord, des outils de programmation pour organiser la gouvernance de la transition énergétique : la programmation pluriannuelle de l’énergie qui fusionne les exercices existants dans les différents secteurs de l’énergie, avec des objectifs quantitatifs par filière et l’enveloppe des ressources publiques mobilisées, mais aussi des « budgets-carbone » et une stratégie de développement bas carbone afin de fixer par période de 5 ans des plafonds d’émission en application de nos engagements européens – sans oublier les risques du tout électrique que comporte une stratégie bas carbone qui ne peut être qu’une part de l’ensemble du projet. Le projet met en œuvre des dispositifs d’action nouveaux : l’obligation de travaux d’efficacité énergétique à l’occasion des travaux de rénovation des bâtiments ; la réduction des émissions de GES liées au transport et à la grande distribution et à l’agriculture ; la simplification des procédures administratives applicables aux énergies renouvelables, le traitement des déchets que comprend la notion d’économie circulaire.

Il me semble donc que le projet de loi propose certaines mesures ambitieuses et bienvenues afin de favoriser la transition énergétique. Même si l’application de certaines des dispositions reste conditionnelle aux mesures plus spécifiques qui seront adoptées dans la PPE, le texte n’en pose pas moins d’intéressants jalons. La question des moyens de mise en œuvre sera évidemment essentielle.

Cette proposition de loi intervient dans le contexte européen d’une discussion du second paquet énergie-climat et d’une révision de la directive sur l’efficacité énergétique

La Commission européenne a publié, le 22 janvier 2014, une proposition en faveur de la politique énergie-climat à l’horizon 2030 pour succéder au premier paquet énergie-climat adopté en 2008, en vigueur jusqu’en 2020, qui prévoyait :

La nouvelle proposition de la Commission européenne contient des objectifs tels que la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 40 % par rapport au niveau de 1990 et l’augmentation à un niveau d’au moins 27 % la part des énergies renouvelables, afin de rendre l’économie de l'UE plus compétitive, de réduire ses émissions de carbone et de créer de nouveaux emplois en lien avec ce secteur d’avenir.

L’objectif d’efficacité énergétique européenne qui figurait dans le paquet énergie-climat pour 2020 (augmenter l’efficacité énergétique de 20 %), n’a pas été repris dans la proposition de la Commission de janvier 2014. Il pourrait toutefois être réintégré, le nouveau Président de la Commission Jean-Claude Juncker s’étant déclaré favorable à un objectif contraignant d’augmentation de 30% de l’efficacité énergétique lors de son discours devant le Parlement européen le 15 juillet 2014.

Il nous faut donc nous poser la question de savoir si nous progressons vers une Union européenne de l’énergie. Le projet de loi relatif à la transition énergétique s’inscrit dans un mouvement européen de passage à une économie moins « carbonée ». Ce nouvel horizon industriel pourrait être la perspective qui manque au projet européen et nourrir une forme de relance basée sur un modèle de développement plus durable.

Ce mouvement vise à fournir une réponse satisfaisante au triple défi énergétique que connaît l’Europe. Le déséquilibre entre des réserves de source d’énergie fossile limitées et la demande qui menace la sécurité de son approvisionnement et la place dans une situation de dépendance, dont les troubles en Ukraine nous font apercevoir les potentiels dangers. Le maintien de la compétitivité européenne s’avère difficile face à des coûts de l’énergie croissants et de plus en plus volatiles. Enfin, le défi du réchauffement climatique, que l’Europe désire relever à la pointe en allant vers un rôle de pilote des négociations climatiques mondiales, appelle à un changement de modèle.

Mais la transition énergétique pourrait également être placée au cœur d’un approfondissement de la construction européenne (après ses phases successives d’élargissements) et voir se déployer une mobilisation nouvelle, positive et porteuse de projets, qui contribuerait à une croissance portée par un modèle plus soutenable. À cet égard, la position volontariste du projet de loi, pourvu que ses objectifs soient atteints, place la France dans la bonne configuration pour aller vers une Union de l’énergie.

C’est pourquoi notre rapport d’information pour observations, pris en application de l’article 151-1-1 de notre règlement, vise à illustrer le contexte actuel, européen et international, dans lequel s’inscrit la discussion du projet de loi sur la transition énergétique. Il s’efforce de rappeler les principaux textes européens auxquels la France a souscrits, et qui donnent des impulsions majeures à la forme de sa transition énergétique. Tout en saluant l’ambition d’un texte qui touche à de nombreux aspect de la transition énergétique, notre rapport tente également de dégager des voies d’amélioration du projet de loi, par lesquelles notre pays pourrait agir encore plus efficacement pour cette transition.

Dans cet esprits, il pourrait ainsi être utile :

Sous réserve de ces modifications, je vous propose de donner un avis favorable au projet de loi qui vous est proposé, dans le sens des conclusions qui vont vous être présentées, et avec une insistance particulière sur le rôle que la France pourrait jouer dans la promotion d’une Union de l’énergie au niveau européen. Ce rôle serait cohérent avec l’ambition affichée par le projet, à l’heure où une nouvelle ambition industrielle reposant sur les principes d’un développement plus soutenable nous semble de nature à donner un nouveau souffle au projet européen.

M. Joaquim Pueyo. Nous allons voter ce projet de loi qui va dans le bon sens et qui constitue un enjeu de société et de civilisation pour les cinquante années à venir. Il me semble très important de souligner le lien entre ce texte et les territoires à travers trois thèmes : la rénovation des logements, il faut orienter les fonds européens vers ces dispositifs ; le développement des transports en commun, qui permettra de préserver la santé ; et la lutte contre les gaspillages et le recyclage des déchets. Nous sommes très satisfaits de ce projet de loi, qui devra aider à une réorientation des fonds européens.

La Présidente Danielle Auroi. Je suis d’accord avec ces remarques et, à mon sens, ce texte ne traite pas assez de ce qui tourne autour de l’efficacité énergétique. Le grand thème un peu délaissé des dernières directives est effectivement l’efficacité énergétique. Il est important de rappeler notre attention à ce thème. Une fois que la loi sera intervenue, il faudra être vigilant sur les moyens qui seront mis en place pour son application.

Nous proposons le sous-titre : « Projet de loi relatif à la transition énergétique : un pas décisif vers une Union européenne de l’énergie » à notre rapport pour appuyer ce qui vient d’être dit et rappeler notre souci de ce projet.

Yves Daniel. Le poids des territoires et de leur action est essentiel car les collectivités territoriales prennent des décisions importantes. Aussi nous faut-il un cadre défini pour protéger et accompagner les décisions locales.

Les conclusions, dont le texte figure ci-dessous, ont ensuite été adoptées à l’unanimité par la commission.

« La Commission des affaires européennes,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment ses articles 4, 114, 122, 170 à 172 et 194, 216 à 218,

Vu l’article 151-1-1 du règlement de l’Assemblée nationale,

Vu le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte no 2188 enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 31 juillet 2014,

Vu la directive no 2009/29/CE du 23 avril 2009 du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive no 2003/87/CE afin d’améliorer et d’étendre le système communautaire d'échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (SCEQE),

Vu la directive no 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives no 2001/77/CE et no 2003/30/CE,

Vu la décision no 406/2009/CE du 23/04/09 du Parlement européen et du Conseil relative à l'effort à fournir par les États membres pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre afin de respecter les engagements de la Communauté en matière de réduction de ces émissions jusqu'en 2020,

Vu la directive no 2014/52/UE du 16/04/14 du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive no 2011/92/UE concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement,

Vu la directive no 2009/30/CE du 23 avril 2009 contenant des spécifications relatives à l’essence, au carburant diesel et aux gazoles,

Vu la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution),

Vu la directive 2012/18/UE du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 dite directive « Seveso III » concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses, modifiant puis abrogeant la directive 96/82/CE du Conseil,

Vu la directive no 2011/70 du Conseil du 19 juillet 2011 établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs,

Vu la directive no 2012/27/UE du 4 décembre 2012 du Parlement européen et du Conseil sur l’efficacité énergétique,

Vu le règlement no 443/2009 du 23 avril 2009 fixant des normes de performance en matière d'émissions pour les voitures particulières neuves dans le cadre de l'approche intégrée de la Communauté visant à réduire les émissions de CO2 des véhicules légers,

Vu le livre vert de la Commission européenne du 27 mars 2013 COM(2013) 169 : « Un cadre pour les politiques en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030 »,

Vu la communication COM(2011) 0885 de la Commission européenne du 15 décembre 2011 : « Feuille de route pour l'énergie à l'horizon 2050 »,

Considérant le rapport de la Commission européenne au Parlement européen et au Conseil COM(2013) 791 du 18 novembre 2011 sur la mise en œuvre du programme énergétique européen pour la relance,

Considérant la communication de la Commission européenne au Parlement européen, au conseil, au Comité économique et social européen et au comité des régions COM(2014) 15 du 22 janvier 2014 : « Un cadre d'action en matière de climat et d’énergie pour la période comprise entre 2020 et 2030 »,

Considérant que la transition énergétique constitue la voie la plus adaptée pour résoudre le triple défi de la sécurité de l'approvisionnement, du réchauffement climatique et de la compétitivité,

Approuve les grands principes posés par le projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte (no 2188), les objectifs fixés et l’essentiel des mesures proposées sous réserves des remarques et ajouts énoncés dans le rapport de Mme Danielle Auroi « Projet de loi relatif à la transition énergétique : un pas décisif vers une Union européenne de l’énergie » déposé par la Commission des affaires européennes le 16 septembre 2014, et notamment :

II. Communication de la Présidente Danielle Auroi sur la consultation publique de la Commission européenne relative à la qualité de l’eau potable

La Présidente Danielle Auroi. L’initiative citoyenne européenne, instituée par l’article 11 du traité de Lisbonne, vise à encourager une plus grande participation démocratique dans les affaires européennes : 1 million de citoyens d’au moins sept États membres – avec un nombre minimum de signataires requis dans chacun d’entre eux – peuvent inviter la Commission européenne à présenter une proposition législative dans n’importe lequel des domaines relevant des compétences de l’Union européenne.

Dans les trois mois suivant la présentation d’une ICE ayant recueilli le nombre requis de déclarations de soutien, la Commission européenne adopte une réponse officielle, sous forme d’une communication. Elle n’est cependant pas tenue de présenter une proposition législative.

L’initiative « L’eau et l’assainissement sont un droit humain ! L’eau est un bien public, pas une marchandise ! », dite « Right2Water », a été la première à satisfaire aux conditions requises et à aboutir. Elle a été transmise officiellement à la Commission européenne le 20 décembre 2013, après avoir recueilli le soutien de plus d’ 1 650 000 citoyens.

Ceux-ci invitaient la Commission européenne à proposer une législation faisant du droit à l’eau et à l’assainissement « un droit humain […] et à promouvoir la fourniture d’eau et l’assainissement en tant que services publics essentiels pour tous », à travers des mesures de trois types : contraindre les institutions européennes et les États membres à faire en sorte que tous les habitants jouissent du droit à l’eau et à l’assainissement ; préserver l’approvisionnement en eau et la gestion des ressources hydriques des règles du marché intérieur ; intensifier les efforts de l’Union européenne en faveur de l’accès universel à l’eau et à l’assainissement.

Ces propositions sont inspirées de la résolution adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 28 juillet 2010, qui érige l’accès à une eau potable, salubre et propre en « droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’homme ».

Dans sa communication présentée consécutivement à la réussite de cette ICE, la Commission européenne compile l’ensemble des actions de l’Union européenne en faveur de la qualité de l’eau. En conclusion, elle y prend aussi une série d’engagements, qui risquent toutefois de ne déboucher sur aucune mesure contraignante : renforcement de la mise en œuvre de la législation relative à la qualité de l’eau ; amélioration de la transparence de la gestion des données relatives aux eaux usées urbaines et à l’eau potable ; instauration d’un dialogue plus structuré entre les parties prenantes à propos de la transparence dans le secteur de l’eau ; coordination avec des initiatives existantes ; encouragement des approches innovantes pour l’aide au développement et le partage de bonnes pratiques entre États membres ; défense de l’accès universel à l’eau et à l’assainissement en tant que domaine prioritaire dans le cadre des futurs objectifs de développement durable ; lancement d’une consultation publique concernant la directive sur l’eau potable.

Cette réponse peut être considérée comme une occasion manquée. Il est en effet regrettable que la Commission européenne évacue clairement l’idée de la reconnaissance législative de l’accès à l’eau et à l’assainissement comme droit de l’homme au sens où l’entendent les Nations unies. Mais il est vrai que la troïka a imposé à la Grèce de privatiser la distribution de l’eau.

Signalons que le Comité économique et social européen (CESE), dans un avis de sa section spécialisée Agriculture, développement rural, environnement, soutient également la démarche de l’ICE « Right2Water ».

Comme le prévoyait sa communication, la Commission européenne a effectivement ouvert une consultation publique sur la qualité de l’eau potable dans l’Union européenne, qui court du 23 juin au 23 septembre 2014.

S’agissant des facteurs menaçant l’eau potable, des normes de qualité à faire respecter et de la surveillance à assurer, deux catégories de produits particulièrement pernicieux doivent faire l’objet d’une vigilance accrue : les herbicides et les pesticides, dont la combinaison peut provoquer des effets cocktails indésirables ; les médicaments, en particulier dans les eaux usées provenant des hôpitaux et des maisons de retraite, lesquelles devraient faire l’objet d’un traitement spécifique.

Il convient en outre de basculer d’une logique d’analyses physico-chimiques à une logique d’analyses biologiques, rendue possible par des progrès scientifique non encore valorisés dans le secteur de l’eau.

Une information doit être dispensée une fois par an à quiconque dispose d’un compteur à son nom. Mais les habitants de la plupart des immeubles collectifs, équipés d’un compteur unique, ne reçoivent aucune information. Il conviendrait que les syndics de copropriété aient l’obligation de relayer l’information reçue à l’ensemble des habitants de leurs copropriétés.

Enfin, une carte de France des dérogations aux normes de pollution de l’eau accordées localement a été publiée l’an dernier. Deux catégories doivent être distinguées : les dérogations ponctuelles, pour faire face à un problème temporaire exceptionnel, ne soulèvent aucune objection et sont même nécessaires ; en revanche, les dérogations pour trois ans, souvent renouvelées deux fois, interrogent quant à la réelle volonté des opérateurs impliqués à résoudre les problèmes de qualité de l’eau constatés.

En complément de ces éléments de réponse à la consultation publique de la Commission européenne, il importe de souligner qu’il s’agit d’une initiative « light », à l’instar de la communication qui l’annonçait. Le questionnaire soumis aux parties prenantes reflète le décalage profond entre la prudence des commissaires européens, réticents à s’immiscer dans les affaires des États membres sur ce sujet, et les aspirations des acteurs de terrain et des consommateurs.

La question de la qualité de l’eau se pose avec d’autant plus d’acuité pour notre pays, qui vient d’être condamné par la Cour de justice de l’Union européenne pour manquement à ses obligations en matière de lutte contre la pollution aux nitrates « dans une très grande partie » de son territoire.

Selon un rapport interministériel de juin 2014, plus de 8,5 % des 35 392 points de captage français présentent « un état qualitatif préoccupant », dans la mesure où les plafonds préconisés en matière de nitrates ou de pesticides y sont dépassés.

En réponse à la condamnation par la CJUE, le gouvernement français envisage de demander une modification de la directive nitrates, considérant, comme l’a dit le premier ministre Manuel Valls, que son « approche normative a clairement montré ses limites ». La logique suivante serait donc retenue : attention, la température du malade augmente ; alors cassons le thermomètre !

Cette nouvelle alerte sur la qualité de l’eau devrait plutôt inciter les pouvoirs publics à répondre aux attentes des acteurs de terrain et des consommateurs, d’autant que nombre de communes de notre pays, derrière Grenoble et Paris, peuvent faire valoir des expériences réussies de remunicipalisation de la distribution et/ou de l’assainissement, à travers des régies ou des sociétés publiques locales. Même là où ces services restent délégués à des entreprises oligopolistiques privées, les contrats de concession sont désormais moins chers, plus courts et mieux contrôlés. Résultat, la qualité de la ressource est améliorée, les réseaux sont entretenus plus convenablement et les familles retrouvent du pouvoir d’achat.

Une proposition de loi allant dans le sens de la résolution de 2010 des Nations unies est actuellement à l’étude. Si elle est adoptée, la France sera le premier pays du Nord à intégrer cette idée de « droit à l’eau » dans son corpus juridique. Alors que la loi Brottes de 2013 prévoit l’interdiction des coupures d’eau pour impayés, on en dénombre encore quelque 100 000 par an dans notre pays. Une mesure concrète consisterait à instaurer une taxe sur l’eau en bouteille, dont le produit serait affecté à des aides en faveur des 2,5 millions de ménages éprouvant des difficultés à s’acquitter de leur facture d’eau : un taux de prélèvement de 1 % dégagerait quelque 55 millions d’euros par an.

À l’échelon européen, une réponse similaire s’impose, en lieu et place de la réponse a minima proposée par la Commission européenne, manifestement conçue comme un enterrement de première classe de l’ICE « Right2Water ». L’Union européenne serait bien avisée d’amener les États membres, par le biais d’une directive, à inscrire le droit à l’eau dans leurs Constitutions nationales. Une telle mesure aurait une grande résonnance mondiale et contribuerait à anticiper le risque de « guérillas de l’eau » menaçant nombre de pays du Sud.

Je vous invite par conséquent à prendre acte de la consultation ouverte par la Commission européenne à propos de la qualité de l’eau potable en Europe, tout en regrettant que le questionnaire soumis aux parties prenantes n’évoque pas l’objectif de consacrer l’accès à l’eau et à l’assainissement comme des droits fondamentaux, essentiels au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’homme.

M. Joaquim Pueyo. Nous sommes tous d’accord sur les conclusions mais j’ai quelques remarques à formuler sur le rapport.

Quand une commune procède à une délégation de service public, la qualité des prestations dépend de la manière dont est contrôlé l’organisme délégataire : comme l’a expliqué Madame la Présidente dans sa communication, plus le contrôle est exigeant, meilleurs sont les résultats.

Les usines de traitement de l’eau sont très onéreuses – entre 16 et 20 millions d’euros pour une unité fournissant une collectivité de 70 000 habitants – et il faut orienter les investissements vers une bonne répartition entre eaux de rivière et eaux de source – en favorisant ces dernières – afin d’obtenir une meilleure qualité de l’eau.

Quant à votre proposition d’une taxe sur les bouteilles d’eau, elle m’inspire une grande prudence. Une taxe existe déjà et quelques problèmes avaient été soulevées à ce propos lors de son adoption par le Parlement. Pourquoi taxer l’eau de source pour financer la consommation d’eau ? Il faudrait trouver d’autres sources de financement.

M. Yves Daniel. Je partage ce point de vue : puisque nous considérons que l’accès à l’eau est un droit fondamental, il me parait incohérent de prélever une taxe d’1 % sur la consommation d’eau en bouteille, d’autant que seul ce type d’eau serait concerné.

La Présidente Danielle Auroi. La taxe en vigueur, qui pèse sur les capsules, ne profite qu’aux communes et non aux intercommunalités, à l’instar de la taxe sur le produits des jeux des casinos. Du reste, si je me suis permise de formuler cette proposition dans ma communication, elle ne figure pas dans les conclusions, dans la mesure où la réflexion mérite en effet d’être affinée. Comme l’a souligné la Fondation France libertés lorsque je l’ai auditionnée, il est inadmissible que des multinationales, notamment Suez, continuent de couper l’eau à des ménages en situation difficile, en violation de la loi Brottes, dont les décrets d’application ont pourtant été publiés.

M. Joaquim Pueyo. Les communes doivent veiller à l’application du cahier des charges régissant la délégation de service public ; cela pose la question du contrôle et des moyens qui lui sont alloués. Dans une délégation de service public, c’est en principe la collectivité locale qui a la main.

La Présidente Danielle Auroi. Absolument ; c’est le problème de l’adéquation entre la volonté et les moyens.

M. William Dumas. Certes, mais il incombe aussi aux départements de se mobiliser, avec les grandes entreprises et les services sociaux, pour essayer de résoudre les situations difficiles. Je pense que le département constitue un meilleur échelon que la commune pour régler ces problèmes…

La Commission a ensuite adopté, à l’unanimité, les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu l’article 11 du traité sur l’Union européenne,

Vu les articles 191 et 192 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Considérant l’importance de l’accès à une eau potable et à des équipements d’assainissement de bonne qualité et respectueux de l’environnement comme marqueur du degré de développement humain d’un pays,

Considérant le succès de l’initiative citoyenne européenne « L’eau et l’assainissement sont un droit humain ! L’eau est un bien public, pas une marchandise ! », dite « Right2Water », qui appelle une réponse législative forte de la part des institutions européennes,

Considérant la résolution 64/292 du 28 juillet 2010 de l’Assemblée générale des Nations unies, qui érige le droit à l’eau et à l’assainissement en droit de l’homme,

1. Prend acte de la consultation ouverte par la Commission européenne à propos de la qualité de l’eau potable en Europe ;

2. Regrette néanmoins que le questionnaire soumis aux parties prenantes n’évoque pas l’objectif de consacrer l’accès à l’eau et à l’assainissement comme des droits fondamentaux, essentiels au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’homme. »

III. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Textes « actés »

Aucune observation n’ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

Ø Défense européenne

- Directive (UE) de la Commission portant modification de la directive 2009/43/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la liste des produits liés à la défense (D034892/02 – E 9586).

Ø Éducation - Jeunesse

- Règlement de la Commission portant exécution du règlement (CE) no 452/2008 du Parlement européen et du Conseil relatif à la production et au développement de statistiques sur l’éducation et la formation tout au long de la vie, en ce qui concerne les statistiques sur la participation des adultes à la formation tout au long de la vie, et abrogeant le règlement (UE) no 823/2010 de la Commission (D033348/01 – E 9523).

Ø Environnement

- Directive (UE) de la Commission modifiant la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau (D033411/01 – E 9583) ;

- Décision de la Commission établissant les critères écologiques pour l’attribution du label écologique de l’UE aux produits cosmétiques à rincer (D027173/04 – E 9599).

Ø Fiscalité de l’énergie

- Proposition de décision d’exécution du Conseil autorisant l’Italie à appliquer, dans des zones géographiques déterminées, des taux réduits de taxation au gazole et au GPL utilisés pour le chauffage conformément à l’article 19 de la directive 2003/96/CE (COM(2014) 395 final – E 9492).

Ø Formation professionnelle

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (CE) no 198/2006 en ce qui concerne les données à collecter et les exigences en matière d’échantillonnage, de précision et de qualité (D033352/01 – E 9553).

Ø Marché intérieur

- Proposition de décision du Conseil relative à la position à adopter au nom de l’Union européenne, au sein du Comité mixte de l’EEE, sur une modification du protocole 31 de l’accord EEE concernant la coopération dans des secteurs particuliers en dehors des quatre libertés (lignes budgétaires 02 03 01 et 12 02 01) (COM(2014) 523 final – E 9636).

Ø Pêche

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1343/2011 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant certaines dispositions relatives à la pêche dans la zone couverte par l’accord de la CGPM (Commission générale des pêches pour la Méditerranée) (COM(2014) 457 final – E 9542).

Ø Politique régionale

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation du Fonds de solidarité de l’Union européenne (COM(2014) 348 final – E 9430).

Ø Politique sociale - Travail

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux gens de mer, modifiant les directives 2008/94/CE, 2009/38/CE, 2002/14/CE, 98/59/CE et 2001/23/CE (COM(2013) 798 final – E 8887) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un réseau européen des services de l’emploi, à l’accès des travailleurs aux services de mobilité et à la poursuite de l’intégration des marchés du travail (COM(2014) 6 final – E 9036) ;

- Projet de décision du Conseil portant adaptation des indemnités prévues par la décision 2007/829/CE relative au régime applicable aux experts et militaires nationaux détachés auprès du Secrétariat général du Conseil – Adoption (10918/14 – E 9483).

Ø Recherche

- Proposition de décision du Conseil relative à la signature et à l’application provisoire de l’accord de coopération scientifique et technologique entre l’Union européenne et les Îles Féroé associant les Îles Féroé au programme-cadre pour la recherche et l’innovation "Horizon 2020" (2014-2020) (COM(2014) 495 final – E 9592) ;

- Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l’accord de coopération scientifique et technologique entre l’Union européenne et les Îles Féroé associant les Îles Féroé au programme-cadre pour la recherche et l’innovation "Horizon 2020" (COM(2014) 496 final – E 9593).

Ø Relations extérieures

- Proposition de décision du Conseil relative à la position de l’Union au sein du conseil de coopération institué par l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Moldova, d’autre part, en ce qui concerne l’adoption d’une recommandation relative à la mise en œuvre du programme d’association UE-Moldavie (COM(2014) 359 final – E 9566) ;

- Proposition de décision du Conseil relative à la position de l’Union au sein du conseil de coopération institué par l’accord de partenariat et de coopération UE-Géorgie entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Géorgie, d’autre part, en ce qui concerne l’adoption d’une recommandation relative à la mise en œuvre du programme d’association UE-Géorgie (COM(2014) 360 final – E 9567).

Ø Santé

- Proposition de DÉCISION DU CONSEIL soumettant le 4-iodo-2,5-diméthoxy-N-(2-méthoxybenzyl)phénéthylamine (25I-NBOMe), le 3,4-dichloro-N-[[1-(diméthylamino)cyclohéxyl]méthyl]benzamide (AH-7921), la 3,4-méthylènedioxypyrovalérone (MDPV) et la 2-(3-méthoxyphényl)-2-(éthylamino)cyclohéxanone (méthoxétamine) à des mesures de contrôle (COM(2014) 362 final – E 9440) ;

- Règlement de la Commission modifiant le règlement (UE) no 283/2013 en ce qui concerne les mesures transitoires s’appliquant aux procédures relatives aux produits phytopharmaceutiques (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE) (D032665/03 – E 9518) ;

- Règlement (UE) de la Commission concernant le refus d’autoriser certaines allégations de santé portant sur les denrées alimentaires, autres que celles faisant référence à la réduction du risque de maladie ainsi qu’au développement et à la santé des enfants (D029597/03 – E 9579) ;

- Règlement (UE) de la Commission concernant le refus d’autoriser certaines allégations de santé portant sur les denrées alimentaires, autres que celles faisant référence à la réduction du risque de maladie ainsi qu’au développement et à la santé des enfants (D034097/02 – E 9585) ;

- Règlement (UE) de la Commission concernant l’autorisation et le refus d’autorisation de certaines allégations de santé portant sur les denrées alimentaires et faisant référence à la réduction d’un risque de maladie (D034099/02 – E 9608).

Ø Sécurité alimentaire

- Règlement (UE) de la Commission relatif à l’autorisation d’une allégation de santé portant sur les denrées alimentaires et faisant référence à la réduction d’un risque de maladie (D031055/03 – E 9546) ;

- Règlement (UE) de la Commission modifiant l’annexe III du règlement (CE) no 853/2004 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la manipulation de certains abats provenant d’animaux destinés à la consommation humaine (D033070/04 – E 9552).

Point B

La Commission a approuvé le texte suivant :

Ø Transports

- Règlement (UE) de la Commission relatif à la spécification technique d’interopérabilité concernant le sous-système "Applications télématiques au service du fret" du système ferroviaire de l’Union européenne et abrogeant le règlement (CE) no 62/2006 (D033759/02 – E 9642).

Accords tacites de la Commission

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), et 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d’ajustement à la mondialisation), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation du Fonds européen d’ajustement à la mondialisation, en application du point 13 de l’accord interinstitutionnel du 2 décembre 2013 entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur la discipline budgétaire, la coopération en matière budgétaire et la bonne gestion financière (demande EGF/2013/002 BE/Carsid, présentée par la Belgique) (COM(2014) 553 final – E 9655) ;

- Virements de crédits no DEC 30/2014 – Section III - Commission - du budget général 2014 (DEC 30/2014 – E 9659).

Accords tacites de la Commission liés au calendrier d’adoption par le Conseil

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :

Ø PESC

- Décision du Conseil modifiant et prorogeant la décision 2010/565/PESC relative à la mission de conseil et d’assistance de l’Union européenne en matière de réforme du secteur de la sécurité en République démocratique du Congo (EUSEC RD Congo) (12625/14 – E 9648).

Ø Relations extérieures

- Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion, au nom de l’Union européenne et de ses États membres, du protocole additionnel à l’accord commercial entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Colombie et le Pérou, d’autre part, en vue de tenir compte de l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne (COM(2014) 503 final – E 9596) ;

- Proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de l’Union européenne et de ses États membres, et à l’application provisoire du protocole additionnel à l’accord commercial entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Colombie et le Pérou, d’autre part, en vue de tenir compte de l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne (COM(2014) 504 final – E 9597).

IV. Nomination de rapporteurs d’information

Sur proposition de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a nommé rapporteurs d’information :

M. Jean-Patrick Gille, sur un système européen d’assurance chômage ;

MM. Jérôme Lambert et Didier Quentin sur le contrôle de la subsidiarité ;

MM. Pierre Lequiller et Christophe Caresche sur l’influence française au sein des institutions européennes ;

MM. Jérôme Lambert et Jacques Myard sur une politique industrielle pour l’Europe ;

Mme Nathalie Chabanne sur l’impact de la législation européenne en matière de services publics.

La séance est levée à 14 h 45

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mardi 16 septembre 2014 à 14 heures

Présents. – Mme Danielle Auroi, M. Jean-Luc Bleunven, M. Yves Daniel, M. William Dumas, M. Joaquim Pueyo

Excusés. – Mme Chantal Guittet, M. Lionnel Luca