XVe législature
Session ordinaire de 2020-2021

Séance du lundi 07 décembre 2020

partager
Séance du lundi 07 décembre 2020

Présidence de Mme Annie Genevard
vice-présidente

Mme la présidente

  • partager

    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à seize heures.)

    1. Restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal

    Nouvelle lecture d’un projet de loi modifié par le Sénat

    Mme la présidente

  • partager

    L’ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal (nos 3526, 3631).

    Présentation

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme la ministre de la culture.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture

  • partager

    Je suis très heureuse d’être parmi vous aujourd’hui pour l’examen du projet de loi relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal. Cas contact au SARS-CoV-2 lors de l’examen du texte en première lecture dans cet hémicycle, je n’avais pas pu participer à vos débats, et croyez bien que je le regrette. C’est donc à distance que j’avais suivi vos échanges et le vote unanime de l’Assemblée nationale.

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Unanime à l’époque !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    Permettez-moi, avant d’entrer dans le détail du texte, de remercier votre rapporteur, dont le travail minutieux et très éclairant, sur une question aussi complexe que celle des restitutions, mérite véritablement d’être salué.
    La commission mixte paritaire réunie le 19 novembre dernier n’ayant pas trouvé d’accord, vous êtes appelés à examiner en nouvelle lecture ce texte important, qui constitue l’aboutissement d’un long travail dont l’impulsion a été donnée par le Président de la République lors de son discours à Ouagadougou en novembre 2017. Il y avait exprimé sa volonté de réunir les conditions nécessaires à des restitutions d’œuvres relevant du patrimoine africain, dans le cadre du renouvellement et de l’approfondissement du partenariat entre la France et les pays du continent africain.
    Ce projet de restitution de vingt-six œuvres issues du trésor de Béhanzin à la République du Bénin et du sabre attribué à El Hadj Omar Tall et de son fourreau à la République du Sénégal s’inscrit dans le cadre d’une politique de coopération culturelle déjà bien engagée avec ces deux pays. Il prend place dans un contexte général de réflexion sur le rôle et les missions des musées en Europe et dans le monde. Il tient compte du caractère exceptionnel des œuvres et des objets que nous souhaitons restituer aux deux pays qui en ont fait la demande. Je ne reviendrai pas dans le détail des objets concernés : vous connaissez tous, désormais, les caractéristiques de ces œuvres, leur provenance et, bien entendu, leur caractère exceptionnel. Je veux en revanche insister sur le sens, la portée et les conséquences du texte qui vous est soumis.
    Tout d’abord, il convient de rappeler que la restitution de biens culturels par un État à un autre n’a en soi rien d’inédit, y compris dans la période récente. Parmi les dernières restitutions effectuées, je mentionnerai celle d’une statue volée d’Amon-Min à l’Égypte en 1981, en application du jugement d’un tribunal français, ou celle de vingt et une têtes maories à la Nouvelle-Zélande par la loi votée le 18 mai 2010 à l’initiative de la sénatrice Catherine Morin-Desailly. Ces différents cas montrent bien que le droit français propose plusieurs voies pour effectuer des restitutions.
    S’agissant des objets dont nous traitons aujourd’hui, le Gouvernement a décidé de procéder par voie législative. En effet, le Bénin et le Sénégal n’ont pas saisi de juridiction pour contester la propriété de la France sur ces objets. C’est donc bien une décision du législateur, et non du juge, qui doit apporter une réponse à leur demande. Aussi, cette loi, si vous l’adoptez, n’aura pas pour effet de créer une jurisprudence, comme le ferait la décision d’un juge. Ce projet de loi ne vaut que pour le cas spécifique des objets qu’il énumère expressément : il n’institue aucun droit général à la restitution en fonction de critères abstraits qui seraient définis a priori.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    C’est bien de le préciser.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    La voie législative s’impose à nous, par ailleurs, dans la mesure où la restitution des objets implique de déroger au principe d’inaliénabilité des collections publiques, inscrit dans le code du patrimoine. Mais si ce projet de loi propose ainsi de contrevenir ponctuellement au principe d’inaliénabilité, il ne le remet nullement en cause, pas plus que ne l’ont fait les lois précédentes du même type, comme celle de 2010. Je remercie la députée Constance Le Grip, dont l’amendement adopté en première lecture a permis de lever toute incertitude à cet égard, en inscrivant dans le texte la référence à ce principe et en désignant explicitement ces restitutions comme des dérogations.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Un excellent amendement !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    Comme je le disais précédemment, malgré le soutien unanime apporté par les deux chambres aux deux articles initiaux du texte, la commission mixte paritaire n’a pas été conclusive, essentiellement en raison du désaccord sur la création d’un conseil de restitution des œuvres. Même si nous aurons l’occasion d’en discuter plus longuement lors de l’examen des amendements, je souhaite en dire deux mots. D’une part, le travail scientifique existe déjà : il a été mené par les équipes de conservation des musées concernés et a permis d’orienter les choix du Gouvernement. L’étude d’impact qui accompagne le projet de loi en est d’ailleurs l’illustration. Une telle instance ne ferait que doublonner les travaux des musées et des responsables de collection.
    D’autre part, la création d’un tel conseil me semble en totale contradiction avec la volonté d’un dialogue direct avec les pays demandeurs et avec le Parlement. Vous l’avez tous souligné sur ces bancs il y a quelques semaines : chaque demande de restitution est unique ; chaque objet a son histoire, qu’il convient d’étudier et de faire étudier. Je reste persuadée que la création d’une telle instance, alors que vous déplorez régulièrement le dessaisissement du Parlement et la perte de ses prérogatives, n’est pas la bonne solution.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Très bien !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    Je sais également que le départ de la couronne ornant le dais de la reine Ranavalona III a suscité beaucoup d’interrogations.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Eh oui !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    J’ai depuis eu l’occasion de m’exprimer à plusieurs reprises sur cette question, mais je souhaite, devant vous, repréciser plusieurs points. En l’état, seule une convention de dépôt a été signée avec Madagascar : il ne s’agit donc nullement d’une restitution. Celle-ci, vous le savez, ne pourra intervenir qu’après l’adoption d’une loi permettant de déroger au principe d’inaliénabilité des collections publiques, auquel nous sommes tous attachés. Certes, la date de cette annonce, intervenue au lendemain du débat au Sénat fut malheureuse,…

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    En effet !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    …mais, comme j’ai pu l’indiquer, cette demande n’est pas récente : elle remonte à plusieurs années. Il ne s’agit, en l’espèce, que d’un prêt à Madagascar : la restitution de l’œuvre devra être approuvée par le Parlement. À aucun moment, il n’a été dans mon intention ni dans celle du Gouvernement de dissimuler une quelconque information à la représentation nationale sur ce dossier, que j’avais d’ailleurs évoqué devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
    La fonction première de la culture est d’exprimer et d’explorer ce que notre condition humaine a d’universel. Cette conviction, qui est au fondement du ministère français de la culture, peut paraître, hélas, de moins en moins partagée de nos jours. Ce projet de loi est aussi une façon de rappeler que nous n’y renoncerons jamais. C’est au nom d’une telle conviction, d’un tel idéal, que la France n’accepte de restituer des œuvres à d’autres États que si ces derniers s’engagent à ce qu’elles gardent leur vocation patrimoniale, c’est-à-dire à ce qu’elles continuent d’être conservées et présentées au public dans des lieux consacrés à cette fonction.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    C’est très important !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    Dans le cas du Bénin et du Sénégal, ces garanties ont été données. La France accompagne les initiatives de ces deux pays en faveur du patrimoine, bien au-delà des seules restitutions.
    Ce projet de loi, qui permettra la restitution des vingt-six œuvres issues du trésor de Béhanzin à la République du Bénin et du sabre attribué à El Hadj Omar Tall et de son fourreau à la République du Sénégal, est un acte d’amitié envers ces deux pays. Il permettra aux Béninois et aux Sénégalais de renouer plus directement avec leur passé et avec des éléments constitutifs de leur histoire, comme nos propres collections nous permettent de le faire. Ces objets symboliques leur permettront de penser un présent et de bâtir un futur qui leur est propre, tout en les partageant avec tous ceux qui visiteront ces nouveaux musées. C’est, pour la France, un honneur et une fierté que de pouvoir jouer un rôle actif en la matière et de contribuer à ce que notre histoire commune continue sans cesse de nous nourrir les uns les autres. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Yannick Kerlogot, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Je ne cache pas que je suis surpris de me trouver devant vous aujourd’hui. Le texte qui nous occupe avait fait l’objet, dans cet hémicycle, d’un vote à l’unanimité en première lecture. Nous sommes aujourd’hui amenés, non pas à amender les deux premiers articles, qui font consensus, mais à examiner un article additionnel qui provoque, disons-le, un réel désaccord.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Eh oui !

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    Le projet de loi visant à restituer des biens culturels aux Républiques du Bénin et du Sénégal constitue la première concrétisation d’une volonté forte exprimée par le Président de la République, à savoir repenser la relation de la France à l’Afrique en retenant la culture comme domaine permettant de tisser de nouveaux liens, de renforcer les coopérations bilatérales et de nourrir les relations d’amitié en assumant une page souvent sombre de notre histoire, celle de la colonisation. Pour permettre aux citoyens du Bénin et du Sénégal d’accéder à un patrimoine qui les relie à leurs origines, un patrimoine symbolique, prestigieux et historique qui comporte, pour certains des objets concernés, une dimension sacrée, le projet de loi vise à répondre positivement aux demandes clairement formulées par ces deux républiques d’Afrique subsaharienne.
    Nous sommes ainsi sollicités pour donner notre accord au transfert de propriété de biens culturels faisant partie des collections publiques de la France, après que cette dernière a fait l’objet d’une saisine officielle par ces deux États : nous sommes loin du fait du prince trop souvent dénoncé depuis la première lecture au Sénat. Nous avons unanimement voté, en première lecture, un texte dont nous avons salué la portée symbolique forte et le message qu’il adresse à la jeunesse africaine et à la jeunesse afro-descendante de notre pays. Pour rassurer plusieurs d’entre nous, nous avions pris le soin d’adopter des amendements visant à affirmer clairement le caractère dérogatoire des restitutions, au nom de l’inaliénabilité, de l’imprescriptibilité et de l’insaisissabilité des collections publiques.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Exactement !

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    Ce caractère dérogatoire implique que tout transfert de propriété de biens culturels soit validé, après étude, par les parlementaires. Est-il encore nécessaire de le rappeler ? Aucun objet patrimonial conservé dans les musées d’État ne peut être restitué sans l’accord des parlementaires : des lois doivent être votées au cas par cas – c’est l’objet du présent texte. Même quand une restitution est sollicitée au terme d’une convention de prêt à un musée étranger, comme c’est précisément le cas pour le sabre attribué à El Hadj Omar Tall, qui est exposé au MCN – Musée des civilisations noires – de Dakar, elle ne peut être définitivement validée que par le Parlement. L’article 2 du texte a, du reste, été adopté par les deux chambres sans polémique.
    À l’exception de restes humains patrimonialisés rendus à la Nouvelle-Zélande et à l’Afrique du Sud, la France n’avait, jusqu’à présent, pas restitué de biens culturels nécessitant un travail législatif semblable à celui qui nous occupe : les restitutions au Bénin et au Sénégal seraient les premières réalisées par notre pays. Elles s’intègrent, qui plus est, dans des dispositifs de coopération patrimoniale et culturelle qui existent déjà et sont appelés à se renforcer avec le temps.
    En ma qualité de rapporteur, en me fondant sur les informations que j’ai pu recueillir lors des auditions et des échanges avec les ministères concernés, je ne peux partager l’idée exprimée lors de la commission mixte paritaire – CMP – selon laquelle, quand il s’agit de restituer des biens culturels, « la diplomatie prévaut sur le patrimoine dans les arbitrages interministériels ». Nous avons eu l’occasion de le préciser à plusieurs reprises depuis le début de l’examen du projet de loi : les demandes béninoise et sénégalaise ont fait l’objet d’une démarche scientifique et historique initiée de concert par les ministères des affaires étrangères et de la culture, qui ont mobilisé les conservateurs des musées concernés pour confirmer le caractère « mal acquis » des objets revendiqués.
    À ce titre, comme j’ai pu le faire en commission mercredi, je tiens à vous communiquer des informations qui m’ont été récemment transmises par le ministère de la culture. Elles démontrent la volonté qui anime aujourd’hui les conservateurs du musée du quai Branly, dont la mission consistant à rechercher les provenances des biens culturels va être renforcée. Ainsi, depuis un an, est entrepris un travail d’examen des collections visant à identifier les objets acquis par la violence ou par la contrainte administrative, et ceux dont la provenance reste contestée.
    Cette initiative porte sur l’ensemble des collections des quatre continents. Un premier périmètre d’œuvres sur lesquelles pèsent des suspicions a été circonscrit – pour l’Afrique, 240 objets sont concernés. Ces œuvres devront faire l’objet de recherches approfondies pour confirmer ou infirmer ces suspicions. Pour ce faire, les bourses de recherche du musée ont été réorientées vers les questions de provenance. De nouvelles bourses plus spécifiques sont en cours de création, notamment avec des partenaires tels que la Bibliothèque nationale de France et l’Institut national d’histoire de l’art.
    Pour coordonner tous ces travaux, à la fois en interne et avec les partenaires extérieurs, un poste de chargé de recherches a été spécifiquement créé – la conservatrice recrutée à cet effet arrive ce mois-ci. En outre, dès que le contexte sanitaire le permettra, des missions seront effectuées dans les différents pays d’Afrique concernés pour permettre la fluidité des échanges. Dans le sens inverse, des conservateurs africains seront invités à venir travailler à Paris : en 2021, par exemple, le directeur du musée national du Tchad viendra étudier la création d’un inventaire des collections tchadienne en Europe, sur le modèle de ce qui a été réalisé pour le patrimoine kanak dispersé. Rappelons par ailleurs que le Tchad a formulé en 2019 une demande de restitution concernant 10 000 objets.
    Comme vous le constatez, des moyens complémentaires permettront d’approfondir l’indispensable travail de recherche préalable à toute restitution. C’est l’occasion de rappeler que la France est saisie de deux types de demandes de restitution : d’une part, concernant des objets symboliques, prestigieux, inventoriés, comme celle exprimée par la Côte d’Ivoire concernant le tambour du peuple Atchan, et d’autre part des réclamations en nombre, qui relèvent davantage d’une revendication, somme toute légitime, mais qui ne sont pas l’expression d’une réflexion aboutie.
    Pour en revenir au Tchad, il va de soi que le type de coopération proposée par la France, que je viens de citer, devra permettre aux autorités tchadiennes de mieux saisir la réalité historique de la provenance d’objets de leur pays dans nos collections publiques. Le Tchad sera plus à même de comprendre la nécessité de revoir sa demande officielle à la lumière des connaissances scientifiques qui auront été partagées.
    Financièrement, pour le musée du quai Branly, l’estimation budgétaire des différents postes de dépenses concernés par l’examen des collections s’élève à un total de 200 000 euros par an.
    Toutes ces informations complémentaires montrent qu’il existe aujourd’hui une réelle volonté de renforcer les démarches de recherche.
    J’en viens à la création par le Sénat d’un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens. Je reste convaincu qu’un tel organisme serait redondant au regard de la coopération interministérielle telle qu’elle s’est opérée dans le cadre des restitutions qui nous occupent. Il présenterait aussi le risque, je l’ai déjà dit, d’entamer l’acte de confiance qui doit prévaloir dans une démarche de restitution entre deux États.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Mais non !

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    J’en suis arrivé à la conclusion qu’une instance supplémentaire ne se justifie pas quand les parlementaires peuvent initier des auditions et des missions leur permettant d’avoir connaissance d’avis complémentaires avant de se prononcer par leur vote sur un transfert de propriété. Le conseil national de réflexion résulterait, certes, d’une initiative du Parlement, qui entend défendre ses prérogatives et son indépendance, mais il constituerait à mes yeux un doublon qui ne se justifie ni en matière de finances publiques ni en pratique, car ses démarches s’ajouteraient à celles conduites par les ministères et les musées saisis par une demande de restitution, dont les conclusions résident dans l’étude d’impact liée associée au projet de loi.
    Je conclus en rappelant qu’un travail interministériel conjoint a été réalisé entre le ministère de l’Europe et des affaires étrangères et celui de la culture sur les premiers dossiers traités, Bénin et Sénégal, depuis la saisine par l’État demandeur jusqu’au projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui. Cette méthode a été exposée aux parlementaires lors des différentes auditions. Elle comprend en particulier l’établissement d’une liste de biens et une recherche de leurs origines. Ce travail préfigure ce que peut être une cellule interministérielle, qui existe déjà de fait. Nous ne pouvons qu’encourager la volonté annoncée de rendre cette organisation plus formelle…

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Nous y sommes : plus formelle !

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    …de façon à ce qu’elle devienne plus agile et qu’elle soit dotée d’un plan de travail pour les prochains mois.
    Comment le ministère de la culture et celui de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ont-ils travaillé ensemble ? Après la saisine formelle d’un État, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères saisit celui de la culture qui conduit une instruction en plusieurs étapes. Le ministère de la culture invite ainsi le musée qui conserve les biens demandés à effectuer les recherches de provenance. Ce musée vérifie que les œuvres demandées sont bien référencées dans les collections publiques françaises. Dans le même temps, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères veille à ce que la restitution éventuelle puisse s’accompagner d’un renforcement de la coopération patrimoniale et culturelle, notamment muséale, avec le pays demandeur. Il apporte son éclairage sur l’état de la relation bilatérale et le partenaire institutionnel pressenti pour recevoir les biens, en particulier le moment politique idoine pour qu’une telle restitution, si elle est décidée, fasse pleinement sens.
    La cellule interministérielle est amenée, selon les besoins de chaque dossier, à demander des rapports à des experts. Afin que le travail puisse être mené de manière approfondie en associant l’ensemble des partenaires français comme ceux du pays demandeur, cette cellule devrait remettre une note écrite sur l’instruction de chaque demande en vue d’une prise de décision. Nous pouvons demander un engagement en la matière.
    Il était utile d’évoquer cette démarche à la fois scientifique, historique et transparente au terme de laquelle les parlementaires sont amenés à se prononcer pour permettre le transfert de propriété de biens culturels. Les amendements que nous examinerons permettront d’y revenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.  Mme Marie-George Buffet et Mme Béatrice Descamps applaudissent également.)

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Remarquable intervention !

    Discussion générale

    Mme la présidente

  • partager

    Dans la discussion générale, la parole est à M. Pascal Bois.

    M. Pascal Bois

  • partager

    Ce projet de loi comporte deux dispositions visant à déroger au principe d’inaliénabilité des collections nationales, qui permettent de restituer respectivement le sabre d’El Hadj Omar Tall à la République du Sénégal, et les vingt-six objets composant le trésor d’Abomey à la République du Bénin. Je rappelle que ces restitutions résultent de demandes officielles auprès de la République française, qui ont fait l’objet d’études historiques et de recherches préalables de la part des musées et des conservateurs. Elles ne sont pas le fruit d’une décision unilatérale du Président de la République.

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    C’est quand même un peu le fait du prince !

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Mais non, monsieur Lecoq !

    M. Pascal Bois

  • partager

    S’ajoute, à cette approche scientifique, une démarche diplomatique qui accompagne des coopérations ambitieuses pour la conception des lieux d’exposition, mais aussi pour former les conservateurs et même assurer la préservation et la sécurité des collections sur le long terme.
    Finalement, le retour de ces œuvres fait passer trois messages forts. Il s’agit d’abord de la main tendue à l’égard de l’Afrique en signe d’amitié – ce n’est pas seulement un acte de diplomatie culturelle. C’est ensuite la réparation d’une injustice : nous rendons des objets soustraits à leur pays d’origine dans des circonstances négatives durant le passé colonial de la France. C’est enfin un acte de confiance en direction de la jeunesse africaine qui est la force de ce continent, où 70 % de la population a moins de 30 ans : nous devons l’aider à retrouver l’accès à son patrimoine.
    Pour en revenir au texte, le groupe majoritaire des députés La République en marche salue à nouveau l’ensemble du travail du rapporteur, en particulier lors des nombreuses auditions. À titre personnel, en qualité de responsable du texte pour mon groupe, j’ai eu véritablement plaisir à œuvrer avec lui.
    En première lecture, le texte a été amendé dans l’esprit constructif de cette majorité, ce qui a permis son adoption à l’unanimité le 6 octobre dernier. Dans le même esprit, en commission, à l’occasion de cette nouvelle lecture, nous avons conservé les modifications sémantiques adoptées au Sénat puis rétabli le vocable « restitution », qui nous paraît mieux approprié pour l’intitulé de ce texte. En revanche, nous avons supprimé l’article 3 introduit au Sénat,…

    M. Maxime Minot

  • partager

    Eh oui !

    M. Pascal Bois

  • partager

    …article dont le contenu est à l’origine de l’échec de la commission mixte paritaire. Nous regrettons d’autant plus cet échec que le contenu de l’article en question s’éloigne de l’objet même du projet de loi – mais peut-être a-t-il pour but de rendre impossible les futures restitutions ?

    Plusieurs députés du groupe LR

  • partager

    Mais non !

    M. Maxime Minot

  • partager

    Quelle condescendance !

    M. Pascal Bois

  • partager

    En effet, l’article 3 crée un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens, qui nous paraît inutile et inadapté. Il paraît inutile, car il ferait doublon avec les recherches historiques et l’expertise scientifique des musées, mentionnées au début de mon propos. Remarquons que ce travail s’effectue en lien étroit avec le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, car l’aspect diplomatique est tout aussi important, quand il n’est pas essentiel ; pourtant, les diplomates seraient absents du conseil national de réflexion. De plus, cette disposition fait réapparaître une instance récemment supprimée dans le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dit ASAP, instance qui, la plupart du temps, ne parvenait pas à tenir ses réunions faute de quorum. Ce conseil national risquerait donc de vivre la même histoire.
    L’article 3 paraît aussi inadapté car l’instance qu’il crée établirait au fil de ses réflexions une doctrine qui rendrait complexe, voire impossible, toute restitution, tout en remettant en cause le principe même d’inaliénabilité des collections nationales. Or, nous affirmons deux principes dans ce projet de loi : celui du traitement au cas par cas des demandes de restitution, aboutissant, le cas échéant, à déroger à l’inaliénabilité des collections nationales, et celui de la nécessité de laisser cette prérogative aux seuls pouvoirs exécutif et législatif. C’est aux parlementaires de s’emparer de la plénitude de leur mission de contrôle relatif à l’application de la loi, donc au suivi des restitutions. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    C’est bien quand c’est vous qui le dites !

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine.

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    Nous examinons en nouvelle lecture le projet de loi relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal. Ce texte qui faisait consensus parmi nous et qui aurait dû faire l’objet d’un accord en commission mixte paritaire a vu son examen pollué…

    M. Maxime Minot

  • partager

    Ça, c’est vrai !

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    …par des initiatives malheureuses.
    En plein examen du projet de loi par le Sénat, le Gouvernement a annoncé le prêt, en vue de sa restitution, de la couronne décorative du dais de la dernière reine de Madagascar, Ranavalona III. Cette annonce, nouvelle illustration du fait du prince, est venue jeter le trouble : alors que nous discutions de restitutions limitées, sur une liste bien définie, voilà que l’on nous en annonce de nouvelles.
    Ce sont autant d’entorses au principe d’inaliénabilité des collections publiques, auquel nous sommes pourtant très attachés. Il s’agit d’un principe qu’il faut réaffirmer tout comme les principes d’imprescriptibilité et d’insaisissabilité.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Très juste !

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    La restitution définitive n’est d’ailleurs qu’une des solutions possibles. Un bien culturel doit pouvoir voyager, faire l’objet de dépôts, de restitutions temporaires ou encore de prêts. Pourquoi s’obstiner à opérer des restitutions si ce n’est pour servir une diplomatie, en utilisant opportunément le patrimoine culturel ?

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    C’est incroyable d’entendre ça !

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    Il s’agit pourtant d’une pratique qui fait débat et qui présente de nombreuses limites. Rappelons-nous de la polémique légitimement apparue suite à l’annonce présidentielle malvenue du prêt de la tapisserie de Bayeux au Royaume-Uni. Une telle opération aurait mis en danger la bonne conservation de cette œuvre inestimable.
    Au contraire d’être dévoyées dans une stratégie d’influence aux effets limités, les restitutions d’œuvres doivent s’inscrire dans le cadre d’un dialogue et d’une coopération culturelle avec les autres pays. Il ne doit pas être ici question d’appropriation par un pays plutôt qu’un autre, mais de partage de nos expériences culturelles. Les musées français ont conservé les œuvres, non dans une volonté d’appropriation nationale de trésors de l’humanité, mais avec une dimension universaliste qui consistait à préserver ce patrimoine mondial et à le transmettre aux générations qui viennent.
    C’est en effet dans nos musées que peut s’opérer le dialogue entre les cultures, et il faut veiller à ne pas associer aux œuvres qui s’y côtoient la marque d’une revendication avant tout nationaliste. C’est pour veiller à préserver cette vision française des biens culturels, laquelle leur attribue un statut supérieur et une protection particulière, que le Sénat a introduit un nouvel article dans le projet de loi.
    Malheureusement supprimé en commission du fait de l’entêtement de la majorité, l’article 3 prévoyait pourtant la création d’un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens. Ce conseil, de par ses compétences scientifiques pluridisciplinaires, constituait une proposition équilibrée qui n’aurait dû avoir aucune difficulté à être adoptée. Ce n’est qu’en disposant d’une telle institution que nous pourrions vraiment garantir, à l’avenir, la défense du principe d’inaliénabilité face aux multiples atteintes de l’exécutif.
    En première lecture, notre groupe Les Républicains a soutenu le projet de loi et donc la restitution de ces biens culturels au Bénin et au Sénégal. Mais l’annonce du prêt, en vue très certainement de sa restitution, de la couronne du dais de la reine malgache, de surcroît en plein examen dudit projet de loi par le Sénat, a été une nouvelle preuve de mépris du travail parlementaire et un nouvel exemple du fait du prince ; elle est venue jeter malheureusement le trouble dans un débat pourtant apaisé. Suite à cet incident, il n’est plus possible de décorréler la restitution de ces biens culturels de la réaffirmation du principe d’inaliénabilité.
    Dès lors, le groupe Les Républicains, dans sa grande majorité, s’abstiendra sur ce texte. Cette abstention est d’autant plus motivée par l’éventualité où l’article 3, introduit par le Sénat et qui constitue, je le redis, une mesure d’équilibre indispensable, ne serait pas rétabli au terme de cette séance. Et c’est parce qu’il nous semble impératif de le réintroduire que nous vous proposerons, chers collègues, l’adoption d’un amendement en ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Maxime Minot

  • partager

    Très bien !

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Bruno Fuchs.

    M. Bruno Fuchs

  • partager

    La question des restitutions est essentielle à la nouvelle relation de notre pays au continent africain, comme viennent de le rappeler Mme la ministre et M. le rapporteur. Si elle interroge notre histoire commune, elle doit surtout ouvrir la voie à une relation partenariale en rupture avec les périodes tourmentées et critiquables de la Françafrique. On sait que l’adoption de ce projet de loi revêt surtout une dimension symbolique : restituer est une façon de consacrer le droit au patrimoine des peuples africains, mais également de leur permettre de se réapproprier une partie de leur histoire et pour nous de faire amende honorable sur une partie de la nôtre.
    En 2017, à Ouagadougou, le Président de la République impulsait une dynamique nouvelle en voulant clairement rompre avec la doctrine française en matière de restitution de biens culturels : il a ainsi exprimé le souhait que « le patrimoine africain soit mis en valeur à Paris mais aussi à Dakar, à Lagos, à Cotonou ». Suite à ce discours, nous, responsables politiques français, transformons aujourd’hui cette intention en acte.
    Le Mouvement démocrate et Démocrates apparentés votera bien sûr ce projet de loi parce qu’il suit une trajectoire que ses membres défendent. Néanmoins, nous avons rappelé en première lecture que ce texte n’apporte qu’une réponse ponctuelle à une question immédiate ; centré sur une liste d’objets prédéfinis, il n’offre pas de solution globale permettant de simplifier le cadre juridique des restitutions. Nous pensons nécessaire d’aller plus loin afin de mieux encadrer ce mouvement de restitutions et de réfléchir à l’élaboration d’une loi-cadre. Celle-ci pourrait inaugurer une réforme du régime juridique de la restitution pour le rendre plus lisible, plus fluide et moins dépendant des aléas politiques. Cela permettrait aussi de réfléchir à l’articulation de cette réforme avec le principe d’inaliénabilité des collections des musées publics établi par l’article L. 451-7 du code du patrimoine, qui empêche le déclassement des œuvres issues d’un legs ou d’un don, sans devoir passer à chaque fois par une loi ad hoc…

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Ah non !

    M. Bruno Fuchs

  • partager

    …et de modifier cette disposition en conséquence.
    Le but de ce travail sera bien sûr de trouver un équilibre entre exigence de préservation du patrimoine des musées français, d’une part, et restitutions plus fréquentes et moins complexes à mettre en œuvre d’autre part. L’élaboration d’une loi-cadre sur la restitution permettrait aussi de traiter un ensemble plus large de problématiques comme le renforcement de l’accès aux musées africains, la formation des conservateurs et des restaurateurs d’œuvres d’art ou encore la facilitation de la circulation et du dialogue de musée à musée. Pour en dessiner les contours, nous pourrions allier toutes les forces vives de notre assemblée autour d’une mission parlementaire, celles de la commission des affaires étrangères et celles de la commission des affaires culturelles et de l’éducation notamment. À cet égard, je me réjouis de la création d’une cellule interministérielle réunissant le ministère de la culture, celui de l’enseignement supérieur et de la recherche ainsi que le Quai d’Orsay, laquelle garantira une démarche scientifique et culturelle dont le caractère interministériel lui permettra d’englober tous les aspects de la question.
    À l’inverse, le groupe Mouvement démocrate et Démocrate apparentés s’est dit opposé, en commission mixte paritaire, à la création d’un conseil consultatif sur le retour des œuvres, comme l’a proposé le Sénat, et il réitère bien évidemment sa position aujourd’hui.
    En conclusion, notre vœu est que ce projet de loi soit l’occasion de poser les jalons d’une vision nouvelle de la politique française pour l’Afrique à travers la culture, en nous amenant à dépasser la seule notion de restitution pour fonder une politique partenariale sincère et équitable, construite sur une confiance réciproque avec les États et avec les musées africains. Cette vision nouvelle et partenariale permettra aux Africains de se réapproprier leur histoire, la gloire et le génie de leurs ancêtres. Et c’est bien la volonté exprimée par le Président de la République au Burkina-Faso en 2017 et l’intention première de ce projet de loi.
    L’initiative que nous votons aujourd’hui est donc décisive à bien des égards, mais ne peut en rester au stade d’ébauche. C’est pourquoi nous appelons à lui donner rapidement sa pleine dimension. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et plusieurs bancs du groupe LaREM.)

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Bravo !

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Personne n’a salué la présence de Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères !

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Gabriel Serville.

    M. Gabriel Serville

  • partager

    Je crois que la trajectoire politique empruntée par ce projet de loi qui prévoit la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal a surpris plus d’un observateur, car ce qui, au départ, ne devait être qu’une discussion consensuelle autour d’un objectif communément partagé a soudain viré à l’affrontement sur les moyens d’y parvenir.
    Plus qu’une question de forme, le désaccord intervenu en CMP au sujet de la création du conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens est révélateur des façons de concevoir la restitution de ces biens, pratique dont on sait qu’elle va prendre de plus en plus d’ampleur dans les années à venir. Ce développement est heureux et je souhaite rappeler ici que mes collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et moi-même considérons depuis de très longues années que la restitution des biens pillés dans les pays colonisés ou à l’occasion d’une guerre relève de la plus grande importance historique : en agissant de la sorte, notre pays contribue à la paix mémorielle et diplomatique, répare de terribles injustices ressenties à l’intérieur et à l’extérieur de nos frontières et offre une chance de renouveler le dialogue franco-africain, et plus largement avec l’ensemble des États issus de la décolonisation.
    Il s’agit de construire un projet commun qui s’organiserait autour de la culture et de la reconstitution d’un patrimoine défait. Léopold Sédar Senghor disait très justement que « sans l’essor de l’esprit, nous ne sommes rien », et voyait dans un projet culturel commun « une quête […] qui honore l’humanité ». Aussi, le groupe de la gauche démocrate et républicaine ne peut que souscrire aux intentions de ce projet de loi, qui honorent l’humanité.
    Cependant, le retour des biens ne doit pas s’opérer dans n’importe quelles conditions.
     
    Tout d’abord, en vertu du caractère universel des œuvres concernées, au sens où Aimé Césaire parlait d’« un universel riche de tout le particulier, de tous les particuliers », nous voulons que celles-ci soient bien conservées, dans des musées, en dehors du règne de l’argent, en dehors du marchandage. Il faut pour cela s’assurer d’une coopération en bonne et due forme avec les États qui prennent part à l’entreprise de restitution.
    Ensuite, nous considérons que ce salutaire mouvement de retour de biens culturels doit s’accompagner d’une lutte de grande ampleur contre le trafic international d’œuvres d’art. Faute de quoi, toutes les actions de notre pays, aussi vertueuses soient-elles, s’avéreront bien inutiles.
    Enfin, et j’en viens ici au point sensible de la discussion, nous estimons que la restitution de biens culturels ne peut pas être soumise au seul fait du prince. C’est, hélas, ce qui se passe ici, ce projet de loi n’étant pas autre chose que l’habillage juridique des desiderata exprimés par le Président de la République à Ouagadougou en novembre 2017. Dommageable sur la forme, puisque le Parlement est, une fois de plus, relégué au rang de chambre d’enregistrement,…

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Eh oui !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    …cette pratique est particulièrement nuisible sur le fond.

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Et c’est permanent !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    En effet, comment protéger le principe juridique de l’inaliénabilité des collections publiques alors que la restitution est soumise à une décision unilatérale ? C’est à cette question que le Sénat, unanimement, a tenté de répondre en instituant un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens. Nous soutenons cette initiative sénatoriale…

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Ah !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    …qui devrait permettre la tenue d’un débat contradictoire, transparent et public,…

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Mais ce débat a lieu ici même !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    …garantissant ainsi la distanciation historique indispensable aux futurs projets de restitution.

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Et la démocratie !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    C’est à travers l’édification de ce conseil que l’on mettra un coup de frein à des pratiques verticales telles que le prêt de la couronne du dais de la reine Ranavalona III à Antananarivo, intervenu quelques heures seulement après le vote au Sénat, sans que jamais le Parlement n’ait été informé de cette décision. Au moment où certains collègues déplorent que le régime parlementaire soit malmené par le pouvoir exécutif, nous regrettons de les voir s’en prendre à l’instauration d’un conseil national censé éclairer leur expertise. L’urgence est pourtant réelle, le Parlement ne peut plus être mis devant le fait accompli sur des questions aussi sensibles. Ce conseil national doit donc être défendu pour ce qu’il a vocation à devenir, à savoir un outil indispensable pour traiter un mouvement international qui prend de plus en plus d’ampleur.
    C’est pourquoi, après s’être exprimés favorablement sur ce texte en première lecture au nom de la très grande importance que nous accordons à ce mouvement de réparation historique, mes collègues souhaitent ardemment faire de même en nouvelle lecture. Espérons que la majorité acceptera de rétablir l’article 3 introduit par le Sénat – mais si ce n’était pas le cas, cela ne constituerait bien évidemment pas un obstacle rédhibitoire au soutien du groupe GDR. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme Roselyne Bachelot, ministre et M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Très bien !

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Rassurés ? Mais cela ne nous empêchera pas de dire ce que nous pensons !

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Nous non plus !

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Aina Kuric.

    Mme Aina Kuric

  • partager

    Le Président de la République a annoncé voilà trois ans, lors de son discours à l’université de Ouagadougou, vouloir restituer de façon temporaire ou définitive les œuvres d’art africain des collections publiques françaises aux pays dont sont issues ces œuvres. La France détient près de 90 000 œuvres d’art africain dans ses collections publiques, dont les deux tiers au sein du musée du quai Branly. Dès lors, il a été confié à deux chercheurs, Felwine Sarr et Bénédicte Savoy, le soin de réaliser un rapport sur la restitution du patrimoine africain.
    Ce rapport est un véritable plaidoyer en faveur d’une restitution massive, au nom de la repentance politique, du patrimoine africain présent dans les collections publiques françaises. Il vise les œuvres acquises en l’absence de consentement des populations locales, par la violence ou la ruse, ou dans des conditions iniques ; il recommande également la restitution des pièces saisies lors de conquêtes militaires ou collectées lors de missions scientifiques ou par des agents de l’administration coloniale, ainsi que le retour des œuvres issues du trafic illégal après 1960.
    La remise du rapport au Président de la République, le 23 novembre 2018, a été l’occasion pour ce dernier d’annoncer la restitution de vingt-six objets provenant du palais de Béhanzin et conservées actuellement au musée du quai Branly. Ce projet de loi concrétise cet engagement fort du Président de la République en prévoyant leur retour au Bénin, leur terre d’origine, ainsi que la restitution au Sénégal d’un sabre et de son fourreau qui auraient appartenu à El Hadj Omar Tall, chef toucouleur.
    En effet, ces œuvres ont surtout une forte portée symbolique. Apportées en France lors de l’expansion coloniale comme des objets de curiosité exotique, elles avaient d’abord, pour la plupart, une fonction spirituelle. Témoins d’un passé prospère, elles contribuent à donner un sentiment de fierté et de confiance en soi à des populations trop souvent dépouillées de leur histoire.
    Que les choses soient claires : ce projet de loi ne met pas fin au caractère inaliénable de nos collections publiques. Il matérialise simplement le souhait commun d’apaiser des conflits de mémoire, un vœu que la France continue de formuler, comme lorsqu’elle a redonné, il y a peu, la couronne du dais de la reine malgache Ranavalona III à Madagascar, en attendant que soit votée la loi qui autorisera à déroger au caractère inaliénable et incessible des collections nationales.

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Le fait du prince ! Ça ne s’appelle pas autrement !

    Mme Aina Kuric

  • partager

    Cela ne se passe pas autrement, cher collègue, il est important de pouvoir le préciser.

    Mme la présidente

  • partager

    Seule Mme Kuric a la parole. Poursuivez, madame la députée.

    Mme Aina Kuric

  • partager

    Lors de la restitution d’œuvres, les risques liés à de mauvaises conditions de conservation sont bien réels, tout comme les risques de vol et de malversation dans des sociétés marquées par une forte corruption et par une faible implication des autorités publiques dans les politiques patrimoniales. Ne le nions pas.
    Le renforcement de la coopération culturelle franco-béninoise à la coopération muséale, à la formation de conservateurs de musée, à l’échange d’experts et à un programme de travail commun sont autant de raisons qui garantissent la conservation et la présentation au public de ces biens dans les meilleures conditions possibles.
    Aussi la dimension symbolique de réparation mémorielle et de réappropriation patrimoniale que revêtent ces restitutions – sans oublier leur dimension économique d’attractivité touristique – est-elle indéniable. Il apparaît légitime de favoriser l’accès au patrimoine historique et culturel de la jeunesse africaine, source d’inspiration pour la création et de compréhension de son héritage culturel.
    Le groupe Agir ensemble votera en faveur de ce projet de loi présenté en nouvelle lecture. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Béatrice Descamps.

    Mme Béatrice Descamps

  • partager

    Il est bien évident que la France ne saurait s’opposer au droit de chaque pays de retracer son histoire et de connaître ce qui constitue sa culture. Le groupe UDI et indépendants se réjouit donc que, dans le cadre de partenariats diplomatiques avec le Bénin et avec le Sénégal, la France participe, à travers ces restitutions, au développement de l’accès à la culture – à leur culture. C’est un acte d’amitié et de confiance envers des pays avec lesquels nous partageons une longue histoire et de nombreux projets.
    Je tiens justement à insister sur l’importance de la coopération diplomatique et des bonnes relations que nous entretenons avec les pays concernés, et à revenir sur les propos que vous avez tenus en commission, monsieur le rapporteur.
    Il est important que des études scientifiques soient consacrées aux biens qui font partie des collections nationales pour connaître leur importance, leur origine et leur histoire. Mais ces informations ne doivent pas être les seules à prendre en considération pour décider de la potentielle restitution des biens. C’est le rôle de notre Parlement que d’examiner les décisions de restitution en étudiant le cadre scientifique établi mais aussi les conditions de restitution et de conservation des biens concernés. Si les scientifiques sont là pour éclairer les décisions, il doit toujours appartenir au Parlement de trancher.
    Nous sommes attachés à la tradition universaliste de notre pays, qui garantit une bonne conservation des œuvres, permettant le dialogue avec toutes les cultures. C’est grâce à cette volonté française que nous pouvons aujourd’hui rendre des œuvres en bon état de conservation, et nous nous réjouissons que, sur ce point, des garanties importantes aient été apportées par la République du Bénin comme par celle du Sénégal.
    De même nous sommes attachés au fait que ces pays ont émis des demandes très précises. Le texte rappelle l’importance de l’inaliénabilité des collections françaises, ce qui me permet d’insister une nouvelle fois sur la nécessité de continuer à faire examiner ces restitutions au cas par cas par notre Parlement.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Eh oui !

    Mme Béatrice Descamps

  • partager

    Si le recours à des avis externes aurait pu, comme le souhaitait le Sénat, être développé, nous devons rester vigilants à ce que ne se crée pas une forme de jurisprudence concernant ces restitutions.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Très juste !

    Mme Béatrice Descamps

  • partager

    Cette critique peut cependant s’appliquer de la même manière à l’instauration d’une loi d’exception ou d’une loi-cadre qui viendrait fixer les principes généraux de remise des œuvres. Aussi ne sommes-nous pas favorables à une telle loi, évoquée dans cet hémicycle au moment de la première lecture du texte, d’autant plus que, je le répète, les facteurs à prendre en considération lors de ces opérations sont multiples.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Tout à fait !

    Mme Béatrice Descamps

  • partager

    Enfin les parlementaires que nous sommes peuvent, et même doivent être associés à la diplomatie culturelle de notre pays. Nous sommes d’ailleurs nombreux à nous y intéresser.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Très bien, madame Descamps !

    Mme Béatrice Descamps

  • partager

    Je comprends ainsi le mécontentement de certains de nos collègues sénateurs lorsqu’ils ont appris qu’une couronne avait été prêtée à Madagascar au moment même où ils examinaient ce texte,…

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Quelle provocation !

    Mme Béatrice Descamps

  • partager

    …d’autant que cette couronne faisait depuis longtemps l’objet d’une demande de restitution. S’il est compréhensible que les objets culturels fassent partie de notre action diplomatique, le Parlement ne doit pas être tenu à l’écart des décisions qui concernent les collections nationales.
    Malgré ces quelques remarques et précisions, le groupe UDI et indépendants soutiendra bien entendu ce texte.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Merci, madame Descamps !

    M. Maxime Minot

  • partager

    Très bien, madame Descamps, mais…

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani

  • partager

    Au moment où je retrouve l’Assemblée nationale, après soixante-huit jours pénibles, je tiens à adresser mes remerciements à tous les collègues ainsi qu’à toutes les personnes, ici et ailleurs, qui m’ont adressé des messages d’encouragement. Dans cette période éprouvante, chacun d’entre eux a été un petit moment de bonheur. (Applaudissements sur tous les bancs.)
    Qui aurait pu se douter, lorsque notre Assemblée adoptait ce texte il y a deux mois, que nous nous retrouverions pour une nouvelle lecture, tant le consensus sur la question de la restitution des biens culturels au Bénin et au Sénégal semblait complet ? Celui-ci n’a d’ailleurs pas été mis à mal puisque la chambre haute comme la chambre basse se sont prononcées favorablement, et à l’unanimité, sur les deux premiers articles du présent projet de loi.
    Madame la ministre, nous sommes réunis aujourd’hui en raison d’un manque patent de transparence. Comment ne pas comprendre la position du Sénat, qui a exprimé, à raison, la désagréable et récurrente sensation que nous, parlementaires, avons d’être mis devant le fait accompli ? En effet, alors même que nos collègues sénateurs examinaient ce texte, nous apprenions, le 5 novembre dernier, la remise aux autorités malgaches de la couronne qui surmontait le dais de la reine Ranavalona III, sans que le Gouvernement en informe le Parlement.
    Certes il s’agit d’une demande de longue date, cette décision n’est en soi ni surprenante ni illégitime, et il ne s’agit que d’un dépôt, en attendant une procédure législative sur laquelle nous aurons à nous prononcer, comme aujourd’hui, pour valider le transfert de propriété. Personne ne conteste l’objet de la démarche : c’est bien la méthode qui est en cause. Ce fait du prince abaisse encore un peu notre Parlement, qui se retrouvera de nouveau contraint de valider a posteriori des engagements internationaux pris par le Président. C’est bien regrettable.
    Cela dit, revenons-en au sujet qui nous occupe aujourd’hui : d’une part la restitution au Bénin de vingt-six œuvres, d’autre part la restitution au Sénégal du sabre attribué à El Hadj Omar Tall ainsi que de son fourreau. Le groupe Libertés et territoires réitère sa volonté de voir ce long processus aboutir. Le désaccord que nous avons sur la forme ne doit pas nous empêcher d’honorer cet engagement.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Ça, c’est sûr !

    M. Michel Castellani

  • partager

    Il en va de même pour l’article 3, adopté par le Sénat, qui a conduit à l’échec de la commission mixte paritaire. Notre groupe n’a pas d’objection particulière à la création d’un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour des biens culturels extra-européens. Un tel cadre pourrait être pertinent, surtout depuis la suppression de la commission scientifique nationale des collections par la loi ASAP. Mais il ne faudrait pas qu’un tel conseil aboutisse à ralentir les processus ni à dégrader les relations bilatérales qui se construisent et s’enrichissent autour de ces projets. Dès lors, la suppression de cet article n’entraînera pas notre opposition au texte.
    En revanche, la création d’une cellule interministérielle sur cette question est loin d’être satisfaisante du point de vue de la transparence et de l’indépendance.
    Finalement, ce qui nous importe, c’est bien la circulation et la transmission. C’est pourquoi nous n’opposons pas, comme certains l’ont fait, diplomatie et patrimoine. L’accès au patrimoine doit être universel et ne peut être réduit à un usage strictement politique et diplomatique.
    À l’inverse, le patrimoine doit pouvoir circuler dans le cadre de relations bilatérales renouvelées. En effet, la restitution de ces biens culturels est une occasion de construire des relations renforcées entre nos pays, de participer au récit et à la transmission de l’histoire humaine au-delà de nos frontières et de rendre à la jeunesse africaine son droit au patrimoine.
    En acceptant de restituer des œuvres, il ne s’agit pas de renier le passé ni de se déposséder : au contraire, on regarde le passé en face. C’est la raison pour laquelle notre commission a eu raison de rétablir le titre initial du projet de loi, en gardant le terme « restitution ».
    Il est symboliquement important d’employer ce mot qui, contrairement à ce qui a été dit au Sénat, ne sous-entend pas l’idée d’une repentance mais celle d’une reconnaissance, laquelle suppose d’accepter que les captations et les annexions patrimoniales ont bien fait partie du système colonial. Les travaux d’enquête et d’expertise réalisés par nos musées nous ont largement permis de déterminer qu’effectivement certains biens culturels présents dans nos collections nationales avaient été mal acquis. Ils sont incontestablement liés au passé guerrier et colonial de la France. C’est une avancée, pour nos relations avec les pays concernés, que de le reconnaître.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Libertés et territoires votera le texte adopté en nouvelle lecture par notre commission. (M. Pascal Bois applaudit.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Régis Juanico.

    M. Régis Juanico

  • partager

    Cet après-midi je me ferai le porte-voix de ma collègue Michèle Victory, la rareté des trains provenant de sa terre d’élection, en Ardèche, ne lui ayant pas permis d’arriver à temps dans l’hémicycle – à quelques minutes près.
    Ce projet de restitution, malgré l’unanimité apparue lors de la première lecture, pose encore quelques questions, comme nous l’avons noté en commission. Certaines divergences ont été exprimées par différents groupes concernant le véhicule législatif choisi pour répondre à la demande de restitution de la part du Bénin et du Sénégal. Cependant, et comme nous l’avons déjà souligné, les députés du groupe Socialistes et apparentés approuvent l’objectif initial du projet de loi et sont favorables à la restitution de ces œuvres.
    Le texte adopté à l’unanimité et discuté en CMP a donc été modifié pour qu’y soit ajoutée la création d’un conseil national de réflexion autour de ces questions. Et même si cette nouvelle disposition a été supprimée en commission, nous considérons que les critiques relatives à la forme de ces restitutions ne sont pas toutes sans fondement. Les décisions de restituer des œuvres d’art, que leur provenance puisse être légitimement justifiée ou non, sont pour nos chefs d’État un outil diplomatique qui semble échapper au débat démocratique et servir régulièrement des stratégies discutables.
    Cette décision, comme d’autres prises en d’autres temps, pose la question du sens de ces lois d’exception, s’agissant de questions importantes qui risquent de se développer au gré des demandes légitimes qui ne manqueront d’être émises.
    C’est donc bien la méthode du cas par cas qui peut être contestée et qui, au-delà de l’aspect symbolique de cette restitution, nous prive d’une démarche plus scientifique, plus ample, capable de prendre en considération, avec l’expertise de l’ensemble des acteurs concernés, la complexité de ces décisions.
    L’exigence d’une parfaite transparence, rappelée par plusieurs d’entre nous, ne peut que nous conduire à être favorables à la mise en place d’une instance qui viendrait par sa pluralité et par son expertise nourrir le nécessaire débat. Au sein d’un tel conseil national, les enjeux des restitutions présentes et à venir, liés notamment à leur contexte, pourraient ainsi être explorés avec attention. Le ministère de la culture y occuperait toute la place qui lui revient.
    En effet, si le cas qui nous occupe aujourd’hui est relativement consensuel, on peut imaginer que la manière de traiter les questions de restitutions pèsera à l’avenir dans nos relations bilatérales, car les traces laissées par la colonisation ne peuvent disparaître totalement d’un tel débat. La nécessité d’avoir une réflexion éclairée et globale sur les voyages de ces objets à travers l’histoire de nos pays mérite davantage de dialogue.
    Nous ne voulons pas voir dans ce geste un acte de repentance moralisatrice. La restitution n’est pas un gage de réparation mais une réponse constructive pour affirmer la volonté d’apaiser des conflits mémoriels. La reconnaissance de ce désir fort de réappropriation par les populations concernées de fragments de leur identité, d’une histoire où la diaspora des objets et des personnes s’est entremêlée, fait consensus sur nos bancs. C’est cette promesse d’une confiance partagée que nous défendons ici à travers ce texte.
    Que l’on discute de sémantique, pourquoi pas : les mots ont un sens. Pour autant, nous ne partageons pas l’extrême prudence lexicale des sénateurs qui ont préféré le mot de « retour » à celui de « restitution », lequel sous-entend un accaparement non consenti de richesses.
    Nous ne souhaitons pas qu’au travers d’arguments de forme, l’idée même de restitution soit remise en cause. Les demandes auxquelles le texte répond sont légitimes et la complexité des conditions dans lesquelles les objets concernés ont quitté leur territoire natal pour venir enrichir nos collections ne doit pas servir d’alibi à une autre complexité, celle régissant la construction de principes qui ont forgé l’histoire nationale de nos collections, enrichi notre expertise muséale et contribué à nourrir une vaste économie du marché de l’art.
    Comme le suggère Emmanuel Pierrat en nous exhortant à dépasser l’opposition stérile entre la notion de culture universelle – qui justifierait le statu quo – et celle de culture nationale – trop souvent synonyme de patriotisme étroit –, il existe, entre les deux postures, un chemin pour favoriser la circulation des œuvres et dépasser des réalités complexes où s’expriment toutes sortes d’obstacles et d’analyses historiques, politiques, financières, juridiques et morales.
    La tentation de ne pouvoir imaginer ces objets en dehors de l’écrin du musée du quai Branly est grande, mais la demande de soutien, de partage et d’accompagnement qui est établie devrait participer – sans naïveté excessive – d’une nouvelle éthique de l’échange. C’est la raison pour laquelle le groupe Socialiste et apparentés votera, de nouveau, en faveur du texte. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.  Mme Marie-George Buffet applaudit également.)

    Mme la présidente

  • partager

    La discussion générale est close.
    La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Je souhaite saluer ici l’excellent travail du rapporteur Yannick Kerlogot. À entendre certains propos, on pourrait croire que nous n’avons pas assez travaillé, que nous n’avons pas été suffisamment éclairés. Pourtant, le travail de longue haleine accompli tant à l’Assemblée – j’en veux pour preuve les multiples auditions menées par le rapporteur – qu’au Sénat nous permet désormais de disposer de deux rapports sur un sujet qui, jusqu’à présent, n’avait fait, c’est vrai, l’objet que de peu d’analyses.
    Reprenons la chronologie : la demande de restitution de la part du Bénin remonte à 2016 ; pour éclairer le débat public, le Président de la République, Emmanuel Macron, a missionné M. Felwine Sarr et Mme Bénédicte Savoy ; ces derniers lui ont remis leur rapport en 2018. On peut prendre toutes les distances que l’on veut– et c’est ce qui a été fait – avec ce rapport, il n’empêche que le débat a eu lieu, de façon approfondie, pendant les semaines qui ont précédé l’examen du texte en commission puis dans l’hémicycle, ici et au Sénat. Je tenais à le rappeler.
    Au fond, nous tenons tous à ce texte ; la meilleure preuve en est qu’en première lecture, nous nous sommes unanimement prononcés en sa faveur.

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    Eh oui !

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Mesdames et messieurs les députés du groupe Les Républicains, vous avez annoncé vouloir vous abstenir ; au-delà des remarques entendues ici ou là, sachez, en toute sincérité, que nous pouvons nous rassembler sur ce sujet qui n’est pas uniquement franco-français mais qui est suivi de près par les partenaires africains de la France. Vous l’avez senti dans les propos du rapporteur et c’est pour cela que je tenais à prendre la parole : au-delà des désaccords sur la création d’une commission nationale,…

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Un conseil, ce n’est pas pareil !

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    …au-delà de tous les arguments, et les vôtres peuvent s’entendre, le texte dont nous discutons vaudra certes pour l’histoire – et le vote de tout à l’heure sera historique – mais également pour l’avenir. J’espère donc que nous pourrons tous nous rassembler, dans quelques minutes, pour le voter. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Si vous le voulez vraiment, alors votez nos amendements !

    Discussion des articles

    Mme la présidente

  • partager

    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées n’ont pu parvenir à un texte identique.

    Article 1er

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Philippe Michel-Kleisbauer.

    M. Philippe Michel-Kleisbauer

  • partager

    Je profite de cette occasion inespérée pour rouvrir le débat : madame la ministre, au-delà de l’idée de restitution, à laquelle je souscris sans réserve, nous devrions, ainsi que nous y a invités tout à l’heure Bruno Fuchs au nom du MODEM, parler d’échanges culturels.
    Les auteurs de certaines œuvres immatérielles, nés en Afrique et avec qui nous partageons la même langue native, peinent à se voir confier des chaires de littérature ou de philosophie en France. Je pense au poète Alain Mabanckou, au philosophe Achille Mbembe ou encore aux romancières Léonora Miano et Scholastique Mukasonga : nous devons leur offrir des chaires de littérature, et la possibilité de venir éclairer nos concitoyens de leur encre noire. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et LaREM).

    (L’article 1er est adopté.)

    Article 2

    (L’article 2 est adopté.)

    Article 3

    Mme la présidente

  • partager

    Cet article a été supprimé par la commission. Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 1, 2, 3 et 4, qui visent à le rétablir
    Ces amendements font l’objet d’une demande de scrutin public de la part du groupe Les Républicains.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l’amendement no 1.

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    Il s’agit de rétablir l’article 3, introduit par le Sénat afin de créer un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens. Sa composition serait resserrée, et c’est là tout son intérêt, puisqu’il réunirait au maximum une douzaine de personnes disposant de compétences précises.
    Ce conseil pluridisciplinaire réunirait des conservateurs, des historiens, des historiens de l’art, des ethnologues et des juristes. Il aurait pour mission de donner un avis simple sur les demandes de restitution présentées par des États étrangers, en dehors de celles présentées en application de la Convention de l’UNESCO – Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture – de 1970 concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels. Il le ferait avant que les autorités françaises n’y aient apporté une réponse, afin d’éclairer les pouvoirs publics dans leur prise de décision.
    Le conseil pourrait donc intervenir dès le début du processus de demande de restitution, en permettant d’éviter le fait du prince. Si déroger au principe d’inaliénabilité des biens publics relève bien de la seule compétence du législateur, le prêt d’œuvres, comme nous l’avons constaté encore récemment, devient une monnaie d’échange dans les actions diplomatiques de l’exécutif, qui met ainsi le législateur devant le fait accompli, ce qui est très désagréable. D’où la nécessité de disposer, en amont, d’une instance indépendante, spécialisée et garante d’impartialité.
    Non, madame la ministre, le conseil ne ferait pas doublon avec les musées et le travail remarquable qu’ils accomplissent. Vous suggérez d’ailleurs la création d’une cellule interministérielle : vous convenez donc de l’existence d’un besoin dans les processus de restitution. Mais une cellule interministérielle ne serait qu’une demi-mesure et ne constituerait pas une garantie d’indépendance, quand le conseil national apporterait méthode, garanties et, surtout, sécurisation des procédures de restitution des biens culturels. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR).

    Mme la présidente

  • partager

    Sur l’ensemble du projet de loi, je suis saisie par le groupe La République en marche d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    L’amendement no 2 de Mme Elsa Faucillon est défendu.
    La parole est à Mme Constance Le Grip, pour soutenir l’amendement no 3.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Je souhaite également tenter de réintroduire l’article 3 tel que voté par le Sénat. Dans la droite ligne des travaux de la Haute assemblée, nous souhaitons proposer à l’Assemblée la création, à travers le conseil national de réflexion, d’une instance pérenne qui survivrait aux gouvernements, aux changements de ministres ou de directeurs d’administration centrale, aux renouvellements des assemblées parlementaires. Le conseil s’inscrirait ainsi dans la durée afin de mener un travail approfondi, serein, continu et éclairé. Ses conclusions seraient régulièrement rendues publiques pour plus de transparence et de partage avec toutes les composantes de l’opinion publique.
    Le politique – tant le Gouvernement que l’Assemblée nationale ou le Sénat – aurait intérêt à bénéficier des avis et des éclairages d’un tel conseil national, qui constituerait, en quelque sorte, un outil d’aide à la décision et, surtout, à la réflexion.
    Beaucoup des intervenants ont rendu hommage au travail des spécialistes des questions patrimoniales. Or, pour mobiliser les experts, il faut un cadre, une méthode et des procédures : c’est à cela que répondrait la création du conseil national.
    Il s’agit d’une proposition portée par la rapporteure du texte au Sénat, Mme Catherine Morin-Desailly – qui y a longtemps présidé la commission de la culture – et qui a été adoptée par l’ensemble des familles politiques de la Haute assemblée, qui se sont toutes rassemblées dans la création de cet instrument. Pour répondre aux vœux du président Studer de nous réunir, de nous rassembler, essayons de travailler ensemble à créer une telle instance. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR)

    M. Maxime Minot

  • partager

    Très bien !

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Julien Ravier, pour soutenir l’amendement no 4.

    M. Julien Ravier

  • partager

    À mon tour d’essayer de vous convaincre de rétablir l’article 3, excellemment écrit par nos collègues sénateurs afin de créer un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour des biens culturels extra-européens. Il s’agit d’un conseil resserré, réunissant des compétences scientifiques – conservateurs, historiens, historiens de l’art, ethnologues, juristes – afin d’éclairer de son avis impartial et indépendant du pouvoir exécutif les décisions que doit prendre le législateur au sujet des restitutions – je préfère d’ailleurs employer le mot « retour », moins empreint de repentance.
    À travers le ministère des affaires étrangères, le Gouvernement peut, et doit avoir une volonté en la matière, mais il appartient aux parlementaires et à eux seuls de décider, au cas par cas, des exceptions au principe d’inaliénabilité des collections publiques, et donc du bien-fondé de la restitution des œuvres d’art qui auraient été mal acquises. Plus que jamais, le Parlement a besoin d’un tel organe de conseil, pluridisciplinaire et politiquement neutre, pour éviter le fait du prince. En aucune façon le retour de certaines œuvres d’art ne doit devenir une monnaie d’échange systématique dans les actions diplomatiques de l’exécutif.
    Nous ne mettons pas en cause le besoin ni la volonté de restituer les biens culturels au Sénégal et au Bénin, mais M. le rapporteur a lui-même admis que vous aviez besoin d’une cellule interministérielle pour vous aider et vous conseiller ; dès lors, pourquoi ne pas accepter un conseil qui serait totalement indépendant du pouvoir exécutif ?

    Mme la présidente

  • partager

    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    J’ai écouté avec attention l’ensemble des arguments avec lesquels cette demande de réintroduction de l’article 3 créant un conseil national de réflexion sur la circulation et la restitution des biens culturels extra-européens est remise sur la table, malgré les échanges de qualité que nous avons eus en CMP puis en commission la semaine dernière.
    Je m’arrête sur cette notion qui revient très régulièrement de « fait du prince ». En l’évoquant, vous vous référez systématiquement au dossier malgache, sur lequel je vous demande vraiment de vous renseigner, pour dépasser le maladroit concours de circonstances qui s’est produit.
    Les prémices de ce dossier datent de 2005, sous Jacques Chirac. L’enceinte royale du Rova ayant été détruite en 1995, il aura fallu plus de vingt-cinq ans pour pouvoir, au gré des financements malgaches, la reconstituer. Mais dès 2005, la demande concernant l’objet que vous avez les uns et les autres très bien décrit est sur la table. Ce n’est donc pas, si j’ose dire, un fait du prince récent.
    Au-delà de cela, l’ambassadeur Christophe Bouchard l’a rappelé, si cette convention de prêt s’est concrétisée récemment, c’est dans le cadre d’un événement, les soixante ans de l’indépendance de l’État malgache, à un moment où l’on inaugurait également le nouveau palais Rova. On est donc dans une suite logique, avec une volonté de la France de répondre, me semble-t-il, à une demande symbolique forte exprimée par les autorités malgaches. Je vous renvoie à l’actualité de cette année-là : regardez comment la population malgache a accueilli cette dite couronne de la reine Ranavalona III !
    S’agissant du conseil national, j’ai le sentiment que les motivations présentées par les différents députés ne vont pas dans le même sens. Pour certains, la demande est de s’assurer au cas par cas que l’objet est restituable, qu’il a été mal acquis, et ce alors même qu’une démarche a déjà été engagée par les ministères et les conservateurs et experts des musées. Dans ce cadre, attention à ne pas sous-estimer le travail du Parlement et de l’Assemblée ! Nos commissions travaillent, elles mènent des auditions. Je ne vois pas comment un comité restreint de douze membres pourrait donner un avis différent et enrichi quand l’ensemble des experts dédiés et légitimes, à savoir les conservateurs des musées concernés par les objets des collections publiques, auront été sollicités.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Ce n’est pas très clair !

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    Si ! En parlant tout à l’heure de cellule interministérielle, je donnais un nom à ce qui existe déjà, la collaboration entre différents ministères, et à la déclinaison scientifique et historique que nous devons acter. Enfin, l’étude d’impact est publique, accessible, et montre l’ensemble de la démarche engagée par les différents ministères et les conservateurs et experts.
    Chers collègues, je vous invite vraiment à voter ce projet de loi, ou à vous abstenir. Je reprends la très belle expression de Gabriel Serville tout à l’heure : ce projet de loi honore l’humanité. C’est la conclusion sur laquelle je veux terminer. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)

    Mme la présidente

  • partager

    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    Je crois utile de se demander très franchement ce que pourrait apporter un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour d’œuvres d’art extra-occidentales. En quoi un tel conseil pourrait-il empêcher que soit contrevenu au principe d’inaliénabilité ? En rien. Sur le plan juridique, un prêt relève d’un acte gouvernemental, en l’occurrence par exemple de la décision du ministère des armées, propriétaire de la couronne de la reine malgache, de procéder à ce prêt. En aucun cas ce conseil n’interviendrait dans une procédure de prêt ; il n’a pas qualité pour intervenir dans cette procédure.
    En quoi pourrait-il nourrir la procédure législative de restitution ? En rien et je vais y revenir. Il est, à ce niveau et au niveau de protection que vous espérez, totalement inutile.
    En quoi ce conseil améliorerait-t-il la démarche scientifique et culturelle ? En rien. Je remarque que personne n’a contesté, en l’absence de ce conseil, l’exhaustivité et la qualité du travail scientifique mené sur tous ces sujets. Il est donc totalement inutile.
    En quoi ce conseil améliorerait-il la démarche juridique du processus de restitution ? En rien. Tous ici nous avons salué le remarquable travail effectué par Yannick Kerlogot et l’ensemble des députés et sénateurs sur ce sujet. C’est un conseil inutile au plan de la protection du caractère inaliénable, inutile au plan scientifique et inutile au plan législatif. Je demande donc de ne pas voter ces amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Brigitte Kuster.

    Mme Brigitte Kuster

  • partager

    Madame la ministre, sur nos bancs des Républicains, nous n’avons évidemment aucune objection à procéder au retour de certains biens culturels vers leurs pays d’origine, mais cela ne peut se faire que dans le cadre d’une coopération culturelle avec ces pays. Ces accords doivent en effet garantir la sécurité et la conservation des œuvres dans les meilleures conditions.
    Je me réjouis donc que les amendements que nous avons déposés et qui prévoient que ce retour au Bénin et au Sénégal, ou ailleurs, se fasse par dérogation au principe d’inaliénabilité aient été adoptés en première lecture. Cette précaution maintient le caractère exceptionnel de cet accord et ferme la porte à des retours automatiques de parties de nos collections nationales.
    Cependant, si cette adjonction est salutaire, il convient d’anticiper et de créer le cadre réflexif pour le futur. C’était justement là le sens de l’article 3 introduit par le Sénat. La création d’un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens permettrait en effet de prendre des décisions de manière beaucoup plus éclairée, et indépendante par rapport à l’exécutif. Car la question est bien : quelle politique de coopération culturelle voulons-nous ? Notre assemblée doit se poser la question du temps long ; c’est le sens de la création d’un conseil prospectif.
    C’est aussi le meilleur moyen d’éviter – cela a été rappelé par mes collègues – le fait du prince et les retours au gré des alternances politiques. Nous ne sommes pas à l’abri de dérives en matière de retour d’œuvres culturelles et de bien muséaux. Il nous revient donc de prévoir ici, au Parlement, la garantie de l’imprescriptibilité, de l’insaisissabilité et de l’inaliénabilité des collections nationales. L’article 3 est l’occasion de le faire durablement, et le Sénat, dans sa grande sagesse, madame la ministre, l’a compris. Votre famille politique l’a voté : cela ne doit-il pas vous conduire à vous interroger ?
    En tout cas, il y a une erreur manifeste entre ceux qui siègent sur les bancs du Sénat et ceux qui siègent ici à l’Assemblée nationale. Cela devrait vous interpeller. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    Dans les amendements que vous proposez, les membres de ce conseil sont nommés par le Gouvernement : alors pour l’indépendance, pardon…

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Vous admettez donc que tous ceux qui sont nommés par le Gouvernement ne sont pas indépendants ! Bravo ! (Sourires.)

    Mme la présidente

  • partager

    Je mets aux voix les amendements identiques nos 1, 2, 3 et 4.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

  • partager

    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        71
            Nombre de suffrages exprimés                68
            Majorité absolue                        35
                    Pour l’adoption                13
                    Contre                55

    (Les amendements identiques nos 1, 2, 3 et 4 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

  • partager

    Nous avons achevé l’examen des articles du projet de loi.

    Explications de vote

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Marion Lenne.

    Mme Marion Lenne

  • partager

    Permettez-moi de partager avec vous à nouveau la position du groupe La République en marche sur le projet de loi relatif à la restitution des biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal, adopté à l’unanimité en première lecture en commission des affaires étrangères pour avis, en commission des affaires culturelles et de l’éducation au fond, puis en séance dans cet hémicycle.
    Nous l’avons examiné aujourd’hui dans une version enrichie par le Sénat. Si les articles originels nous reviennent dans leur quintessence, avec l’adoption sans modification en nouvelle lecture d’un amendement sémantique de la rapporteure au Sénat, la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée a pris le temps de la réflexion sur un article additionnel. Cet article avait vocation à instituer un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens, sorte d’ersatz de la commission scientifique nationale des collections supprimée par le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de l’action publique.
    Pourquoi vouloir raviver cette flamme alors même que la CMP a été conclusive ? Pourquoi ajouter une couche supplémentaire à notre célèbre millefeuille administratif alors même que nous tendons vers un allégement des dispositifs administratifs ? Ce serait un énième conseil, coûteux et chronophage, donnant un énième avis – d’autant que le glissement sémantique de la restitution vers la circulation et inversement est ancien et ses limites maîtrisées, en témoignent encore les échanges que j’ai eus récemment avec le conseiller culturel de l’ambassadeur de France à Dakar.
    Pourquoi cette redondance alors que garanties et méthodes sont assurées par des professionnels formés pour se prononcer sur la provenance, le sens et la vie de ces objets ? Les historiens et scientifiques sont mobilisés, les musées sont mobilisés, et nous, les parlementaires, sommes aussi mobilisés.
    Ce projet de loi, c’est à la fois la coopération culturelle et notre diplomatie d’influence réaffirmées, pour répondre à l’engouement de la jeunesse africaine envers la mémoire collective et le patrimoine universel. Pour toutes ces raisons, le groupe La République en marche le votera. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Constance Le Grip.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Dans la droite ligne d’Emmanuelle Anthoine, je souhaite à nouveau faire savoir que le groupe Les Républicains a abordé l’ensemble de nos débats, dès les travaux de notre commission avant la première lecture dans cet hémicycle, avec beaucoup d’enthousiasme et un intérêt appuyé pour ces sujets. Nous n’oublions pas que le dialogue des cultures est le mantra, le leitmotiv, le slogan en quelque sorte, du très grand musée du quai Branly-Jacques Chirac, et loin de notre famille politique l’idée de mépriser ou de considérer comme dangereuse toute idée de travailler à un renforcement du dialogue entre les cultures à travers ces politiques de retour, de restitution et de coopération culturelle, scientifique et muséale durable, légitimement en phase avec les aspirations du moment d’un certain nombre de pays partenaires.
    Après avoir réussi à faire adopter deux amendements aux articles 1er et 2, les députés du groupe Les Républicains avaient majoritairement choisi de voter en faveur du texte en première lecture. Il s’agissait toutefois de la première lecture : vous le savez, nous sommes très attachés au bicamérisme et nous savions que le Sénat travaillerait ardemment sur ce projet de loi et proposerait des modifications. C’est la raison pour laquelle nous regrettons, alors que nous examinons le texte en nouvelle lecture, que les deux chambres n’aient pas réussi à converger et que l’excellent texte du Sénat n’ait pas recueilli l’adhésion de l’Assemblée.
    La proposition de créer un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens a fait l’objet de critiques nombreuses et acerbes, qui sont tombées dru. Elle ne nous semble pourtant ni redondante, ni inutile. Ce nouveau conseil a été comparé à la commission scientifique nationale des collections, aujourd’hui disparue : mais chacun sait bien que les différents ministres de la culture se sont évertués à lui ôter tout moyen de fonctionner ! C’est donc fort logiquement qu’elle a été supprimée au bout de quelque temps.
    Nous espérions que nos amendements visant à créer le conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens, proposition qui nous paraissait fort féconde, seraient examinés dans un esprit plus constructif. Ce conseil aurait permis d’éclairer le chemin à l’avenir et les politiques de retour des biens culturels. Parce qu’il n’en a rien été, le groupe Les Républicains s’abstiendra très majoritairement lors du vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Oh là là ! 

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Bruno Fuchs.

    M. Bruno Fuchs

  • partager

    Le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés votera bien entendu en faveur du projet de loi, qui, nous l’avons déjà souligné, constitue une première étape importante dans la restitution d’œuvres d’art et ouvre une nouvelle ère dans les relations entre la France et les pays du continent africain.
    S’agissant de l’article 3, dont plusieurs de nos collègues souhaitaient la réintroduction, je rappelle que ce projet de loi concerne la restitution d’œuvres d’art au Bénin et au Sénégal. Or le conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens, créé par cet article, serait amené à statuer sur des œuvres d’art à venir. Il n’a donc pas sa place, selon nous, dans le texte que nous examinons aujourd’hui. La réflexion initiée par nos collègues n’en reste pas moins pertinente. Le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés va d’ailleurs plus loin encore puisqu’il demande une loi-cadre afin d’initier une dynamique nouvelle en matière de restitution des biens culturels.
    Nous voterons en faveur du projet de loi car nous souhaitons, comme l’a expliqué Philippe Michel-Kleisbauer, créer avec les pays d’Afrique une nouvelle dynamique partenariale allant au-delà de la simple restitution et intégrant l’ensemble des biens culturels dans le cadre d’une relation foisonnante d’égal à égal.

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Michèle Victory.

    Mme Michèle Victory

  • partager

    Je vous prie de m’excuser de n’avoir pu être présente pour la discussion générale, et je remercie mon collègue Régis Juanico d’être intervenu à ma place. Je suis certaine qu’il l’a très bien fait !

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Il l’a très bien fait ! (Sourires.)

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    Presque aussi bien que vous ne l’auriez fait vous-même !

    Mme Michèle Victory

  • partager

    Je ne reviendrai pas sur la proposition de nos collègues Les Républicains de créer un conseil national de réflexion sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens, même s’il faudra bien, à l’avenir, réfléchir à la manière d’organiser les restitutions de biens culturels. J’indique simplement qu’en tant que rapporteure d’application du projet de loi, je serai attentive à la manière dont ses dispositions, qui sont importantes, seront appliquées et se traduiront dans la pratique. En un mot, je veillerai à la manière dont les biens culturels seront restitués, conformément au projet Deux mains au Bénin, une belle initiative qui nous permet de tendre la main à ce pays et de tisser des liens nouveaux, forts et de confiance. Ces liens, je crois, ne doivent pas être remis en cause. Le groupe Socialistes et apparentés estime donc important de conserver le terme de « restitution » : il s’inscrit dans un contexte historique dont il est difficile de s’abstraire totalement.
    Comme en première lecture, c’est avec une forte conviction que nous voterons en faveur du projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.  Mme Marion Lenne applaudit également.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Aina Kuric.

    Mme Aina Kuric

  • partager

    Le groupe Agir ensemble votera pour ce texte, comme en première lecture. Je souscris pleinement aux propos de M. le rapporteur : notre simple présence ici aujourd’hui démontre qu’il n’y a pas de fait du prince.

    M. Jean-Paul Lecoq

  • partager

    Si si !

    Mme Aina Kuric

  • partager

    Il n’y en a eu ni en 2005, ni sous la présidence actuelle.
    Je souhaite que l’Assemblée soit également saisie de la question de la restitution de la couronne du dais royal de la reine malgache Ranavalona III. Pour l’instant il s’agit d’un prêt,…

    M. Yannick Kerlogot, rapporteur

  • partager

    Tout à fait !

    Mme Aina Kuric

  • partager

    …dont nous discutons avec les autorités malgaches depuis juillet dernier.
    Il n’y a donc aucunement fait du prince. Le Parlement continuera de jouer son rôle dans le cadre des travaux et des auditions menés par plusieurs commissions – en l’occurrence, la commission des affaires culturelles et de l’éducation et la commission des affaires étrangères, qui ont travaillé ensemble sur le sujet, en lien étroit avec Mme la ministre.
    Continuons ce travail parlementaire nécessaire et soutenons le processus de restitution de biens culturels, indispensable pour conserver la mémoire de l’histoire commune de la France et de l’Afrique et construire avec elle un avenir partagé et serein. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Gabriel Serville.

    M. Gabriel Serville

  • partager

    La position du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne souffre d’aucune ambiguïté : nous reconnaissons que l’Assemblée nationale, par la discussion et le vote de ce projet de loi, fait œuvre utile et s’inscrit dans une démarche fort louable, qui sera certainement regardée avec intérêt au niveau international.
    Lors de la discussion générale, j’ai indiqué que le refus du Gouvernement et de la majorité de réintroduire l’article 3 dans le texte ne constituait pas un élément rédhibitoire pour notre groupe, qui votera malgré tout en faveur du projet de loi. Je rappelle cependant que nous souhaitions, avec la création du conseil national de réflexion sur la circulation et le retour d’œuvres d’art extra-occidentales, renforcer les critères de transparence des futurs projets de transfert et de restitution de biens culturels, ainsi que l’accompagnement des futurs travaux correspondants. Avec la création de cet organe, il s’agissait aussi de mieux éclairer le Parlement en lui permettant de s’appuyer sur des experts, ce qui, en aucune manière, ne remettait en cause la qualité du travail qu’il fournit.
    De manière fort regrettable, Mme la ministre a estimé que ce conseil serait inutile.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    En effet !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    Ce terme ne peut être utilisé tant que ce conseil n’a pas subi l’épreuve des faits.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    Il a raison !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    Le Gouvernement et la majorité préjugent de la capacité de cet organe à servir utilement notre nation, ce que je trouve très dommage.
    Reste que nous privilégions le fond et que nous nous inscrivons dans la durée. Nous ne sommes que partiellement satisfaits, mais ce projet de loi, bien qu’amputé de l’article 3, honore, comme M. le rapporteur a relevé que je l’avais dit, l’humanité. Oui, il honore notre humanité. Il est très attendu à l’échelle de la planète.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Eh oui !

    Mme Roselyne Bachelot, ministre

  • partager

    Votez-le !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    Nous faisons aujourd’hui un grand pas en l’adoptant. C’est la raison pour laquelle, comme en première lecture, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera en faveur du projet de loi.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Très bien !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    Je veux dire, pour finir, que nous sommes attachés à l’indépendance de certaines commissions parlementaires dans lesquelles nous avons placé toute notre confiance. Or cette confiance est largement fragilisée aujourd’hui après les propos de Mme la ministre.

    Mme Constance Le Grip

  • partager

    C’est vrai !

    M. Gabriel Serville

  • partager

    Je le dis avec un petit sourire sous mon masque, madame la ministre, mais vous avez clairement formulé les choses et nous les avons bien entendues :  nous tenons à vous en remercier ! (Mme Marie-George Buffet applaudit.)

    Mme la présidente

  • partager

    Monsieur Kokouendo, je ne peux pas vous donner la parole, car le groupe La République en marche s’est déjà exprimé. Croyez que je le regrette.

    Vote sur l’ensemble

    Mme la présidente

  • partager

    Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

  • partager

    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        71
            Nombre de suffrages exprimés                64
            Majorité absolue                        33
                    Pour l’adoption                64
                    Contre                0

    (Le projet de loi est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.
      Mme Marie-George Buffet applaudit également.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

  • partager

    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

    Mme la présidente

  • partager

    La séance est reprise.

    2. Code mondial antidopage et lutte contre le dopage

    Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi

    Mme la présidente

  • partager

    L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l’efficacité de la lutte contre le dopage (nos 2700, 3593).

    Présentation

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des sports.

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée chargée des sports

  • partager

    Depuis mon arrivée au ministère des sports, il y a maintenant plus de deux ans, j’ai placé l’éthique au cœur de mes priorités. Je considère en effet que ce ministère doit s’investir avant tout dans les politiques publiques liées à la protection des pratiquants, qu’il s’agisse du sport de haut niveau ou du sport amateur.
    Depuis la création de l’Agence nationale du sport – ANS –, chargée de la haute performance et du développement des pratiques, j’ai entendu s’exprimer des inquiétudes quant au rôle qui échoirait au ministère des sports. Celui-ci se centre plus que jamais sur ses prérogatives régaliennes, autour de la promotion de l’intégrité, de la déontologie des organisations sportives et de son rôle éducatif.
    En ces temps troublés par la crise sanitaire, où nous constatons que le sport et plus généralement l’exercice physique nous sont nécessaires pour vivre mieux, il est essentiel de rappeler le rôle fondamental du sport pour la santé, pour la cohésion sociale et pour la défense des valeurs qui lui sont propres. Le dopage et les conduites dopantes et addictives constituent un fléau, parce qu’ils menacent l’intégrité de nos compétitions sportives comme la santé de nos sportifs professionnels et amateurs. Ils faussent la performance, pénalisent les athlètes propres et attaquent fondamentalement l’esprit de loyauté et d’équité qui fait pourtant l’essence même des compétitions sportives.
    Aussi, je poursuis avec mon ministère une politique volontariste et efficace de lutte contre le dopage et contre les conduites dopantes. Nous veillons à tout mettre en œuvre pour sensibiliser les sportifs et leurs proches aux dangers du dopage ; nous accompagnons les campagnes de prévention des fédérations et des établissements du ministère ; et nous investissons les moyens financiers nécessaires à cette lutte.
    En 2021, la contribution annuelle de la France au fonctionnement de l’Agence mondiale antidopage – AMA – s’établira à un peu plus de 1 million d’euros. Pour l’année 2020, je viens de signer une contribution complémentaire de 50 000 euros en réponse à la demande du président de l’AMA, M. Witold Banka, pour accompagner encore mieux la recherche scientifique.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Bien !

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    Par ailleurs, la dotation attribuée par l’État pour 2021 à l’Agence française de lutte contre le dopage – AFLD – sera en hausse de 850 000 euros par rapport à 2020, s’établissant à près de 11 millions d’euros, pour permettre notamment des recrutements complémentaires, ainsi qu’une augmentation du nombre de contrôles.
    Ce sont donc près de 12 millions d’euros que notre Gouvernement investira en 2021 en faveur des opérateurs de la lutte contre le dopage. Cela illustre notre ambition dans ce domaine, liée à l’accueil par Paris des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Nous conserverons certainement un riche héritage matériel de ces Jeux, mais ils seront aussi un formidable levier susceptible de laisser un héritage immatériel durable à notre pays et à nos concitoyens. L’accueil de cet événement planétaire doit nous offrir la possibilité de changer la place du sport dans notre société et de l’inscrire durablement dans le quotidien de tous : les Jeux doivent constituer le véhicule central d’une pratique sportive propre, loyale et digne.
    J’en suis intimement convaincue : le sport est un espace privilégié pour l’apprentissage de la citoyenneté, de la tolérance et des règles qui nous permettent de vivre ensemble, de faire société et de faire nation. Face à l’actualité brûlante de ces derniers mois, tous les acteurs du sport doivent renouveler leur engagement pour combattre les dérives qui attaquent notre bien commun, qu’il s’agisse du dopage ou des violences, de toute forme de discrimination ou encore des atteintes aux principes de notre pacte républicain.
    Une politique efficace de prévention du dopage est l’affaire de tous : les sportifs, le ministère chargé des sports, les fédérations, l’AFLD, le corps médical, les médias, mais aussi l’ensemble du public du spectacle sportif.
    L’efficacité de cette politique passe par les actions concrètes que nous menons. Je pense notamment au plan national de prévention du dopage et des conduites dopantes pour la période 2020-2024, à destination des fédérations sportives ; je sais la détermination des fédérations et des athlètes, engagés à mes côtés, pour le mener à bien. Je pense aussi au financement d’un nouveau laboratoire d’analyses plus performant et indépendant, qui intégrera la faculté de pharmacie de l’université Paris-Saclay à l’horizon 2023. Je pense enfin au sujet qui nous réunit aujourd’hui : la transposition des nouvelles dispositions du code mondial antidopage dans le droit français.
    En raison du caractère privé de l’AMA, ce code n’a pas force contraignante directe sur les États. C’est donc en application de la convention internationale contre le dopage dans le sport, adoptée en 2005 sous l’égide de l’UNESCO – Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture – et ratifiée par la France en 2007, qu’il nous appartient d’adopter les mesures nécessaires pour asseoir la conformité de notre droit avec les principes du code mondial antidopage.
    La nouvelle version de ce code, adoptée en novembre 2019 en Pologne, entre en vigueur le 1er janvier 2021 ; c’est pourquoi j’ai déposé dès le 19 février dernier un projet de loi à l’Assemblée nationale. Malheureusement, il n’avait jusqu’à présent pas pu s’inscrire dans l’agenda du Parlement, en raison des urgences liées à la crise de la covid-19. La transposition étant devenue très urgente, j’ai été conduite à solliciter l’engagement de la procédure accélérée sur ce texte.
    Croyez-moi, mesdames et messieurs les députés, j’aurais souhaité que le calendrier de l’AMA et notre calendrier législatif permettent pour la première fois la tenue d’un débat de fond, devant la représentation parlementaire, concernant les prochaines dispositions législatives du code du sport en matière de dopage. Le symbole aurait été appréciable, à trois ans de l’accueil des Jeux olympiques en France. En effet, depuis 2010, les transpositions ont toujours été effectuées par voie d’ordonnances, avec la confiance du Parlement.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Dommage !

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    Cette fois, ce sont les contraintes inhérentes aux délais, mais aussi le risque d’une procédure d’infraction qui pénaliserait la France sur la scène internationale à l’approche des Jeux, qui m’amènent à vous demander d’habiliter à nouveau le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnance.
    Monsieur le rapporteur, je tenais à saluer vos travaux et la grande qualité du rapport que vous avez établi, ainsi que celle des débats qui ont eu lieu en commission, présentant de manière détaillée les axes qui devront être ceux de la future ordonnance.
    L’article unique du présent projet de loi vise une habilitation permettant d’assurer la mise en conformité du droit interne avec les principes du code mondial antidopage, ainsi que la définition du nouveau statut du laboratoire antidopage et le renforcement de l’efficacité du dispositif de lutte contre le dopage, en facilitant le recueil d’informations par l’AFLD et la coopération entre les acteurs de cette lutte.
    L’efficacité de cette démarche dépend bien sûr des prérogatives et des moyens confiés à l’AFLD. L’ordonnance de transposition devra permettre de renforcer ses pouvoirs d’enquête, conformément aux dispositions du code mondial antidopage et aux standards internationaux de l’AMA. La transposition vise notamment à introduire dans le droit français une nouvelle catégorie de substances, dites d’abus, ainsi qu’une procédure d’aveu rapide, l’acceptation des conséquences pouvant induire une réduction de la durée de suspension.
    Vous le savez, assurer la conformité de notre droit avec les principes du code mondial antidopage est une absolue nécessité. Nous devons être exemplaires d’abord sur le plan national, au nom des 36 millions de citoyens que vous représentez et qui pratiquent une activité sportive occasionnelle, mais aussi des 16 millions de licenciés que compte notre pays. Nous devons l’être aussi sur le plan international, pour que la France demeure un modèle en matière de lutte antidopage,…

    M. Maxime Minot

  • partager

    C’est vrai !

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    …ce qu’elle est depuis la loi fondatrice de 1999 souhaitée par Mme Marie-George Buffet, alors ministre de la jeunesse et des sports.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Excellent !

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    Je suis d’ailleurs honorée que ce soit vous, madame Buffet, qui suiviez l’application de ce texte ; je sais que vous le ferez avec conviction.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Absolument !

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    Enfin, mesdames et messieurs les députés, je souhaite profiter de l’occasion pour remercier la direction des sports et l’ensemble des agents du ministère, mobilisés quotidiennement au service de nos politiques publiques et d’un sport citoyen et solidaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

    M. Patrick Vignal

  • partager

    Bravo !

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Bertrand Sorre, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

    M. Bertrand Sorre, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Le projet de loi que nous examinons cet après-midi a été adopté par la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à l’unanimité de ses membres. Cette délibération, acquise à l’issue d’échanges constructifs, manifeste l’attachement de nos collègues à la réalisation d’un objectif partagé sur tous nos bancs : que la France puisse continuer de s’illustrer dans le combat pour un sport propre et éthique, par ses initiatives sur la scène internationale mais aussi par ses lois.
    De fait, le projet de loi d’habilitation tend à une mise en conformité globale du dispositif français, au regard des nouveaux standards de la lutte mondiale contre le dopage. Mais le vote de la commission des affaires culturelles nous engage aussi à faire la part des choses entre une nécessité objective et le choix des voies et des moyens pour y parvenir.
    Je le sais : certains d’entre nous déplorent que le Gouvernement choisisse de recourir à l’article 38 de la Constitution, plutôt que de soumettre à la délibération des assemblées l’ensemble des mesures relevant de leurs prérogatives. Mais reconnaissons qu’en matière de droit antidopage, le recours aux ordonnances n’est pas inhabituel : depuis 2010, il constitue l’instrument privilégié de la mise en conformité de la loi française après chaque révision du code mondial. Du reste, il est des circonstances où nécessité fait loi : la nouvelle version du code mondial antidopage, ainsi que les standards internationaux qui l’accompagnent, entreront en vigueur le 1er janvier 2021.
    En toute rigueur, les stipulations du code ne possèdent pas par elles-mêmes de force contraignante pouvant s’imposer aux États, car elles émanent d’une fondation de droit privé, en l’espèce l’AMA. Cependant, elles nous obligent au moins à deux titres : d’abord parce que la France a ratifié en 2007 la convention internationale contre le dopage dans le sport ; et surtout par le fait que les obligations et principes édictés par le code mondial antidopage s’imposent aux organisations nationales chargées de la lutte contre le dopage, aux fédérations sportives et aux organisations responsables de grandes manifestations sportives.
    Or les stipulations du standard international pour la conformité au code des signataires de l’AMA sont sans équivoque. Le constat d’une situation d’irrégularité pourrait entraîner trois conséquences : d’une part, l’inéligibilité du pays du signataire à l’organisation de championnats régionaux, continentaux et mondiaux ou de grandes manifestations organisées par des organisations sportives, pendant une période définie ; d’autre part, la privation du droit de participer ou d’assister à de tels événements ; enfin, l’impossibilité de participer ou d’assister à la prochaine édition des Jeux olympiques et paralympiques, ainsi qu’aux suivantes, jusqu’à ce que le signataire soit réintégré.
    Vous l’avez compris : il y va de la participation des sportifs français aux compétitions internationales, mais aussi de l’organisation des grandes compétitions à venir sur le territoire national. Or vous n’êtes pas sans savoir que la France accueillera la prochaine Coupe du monde de rugby, en 2023, et bien entendu les Jeux olympiques et paralympiques de Paris, en 2024.
    En outre, le standard pour la conformité au code des signataires prévoit aujourd’hui une procédure en manquement. Il est vrai que celle-ci comprend une première phase de dialogue contradictoire d’une durée de trois mois. Mais les risques de sanctions apparaissent d’autant moins théoriques que le déclenchement des différentes étapes présente une certaine automaticité. Il importe donc que la France se place en situation de donner au plus vite des gages. C’est la raison pour laquelle je défendrai un amendement qui propose de réduire la durée de l’habilitation prévue par le projet de loi initial de neuf à six mois.

    Mme Marie-George Buffet

  • partager

    Très bien !

    M. Bertrand Sorre, rapporteur

  • partager

    En pratique, la mise en conformité du droit français avec les standards de la lutte contre le dopage ne va pas de soi dans le cadre d’un calendrier parlementaire particulièrement surchargé cette année. En effet, cette tâche exige une certaine technicité, au regard des implications multiples que comportent les changements apportés au code mondial.
    Je ne décrirai pas ici l’intégralité des modifications apportées au dispositif établi par la Conférence de Katowice, en Pologne, en novembre 2019. Mais nous pouvons retenir que la rédaction applicable à compter du 1er janvier prochain marque un approfondissement des principes et une certaine sophistication des procédures.
    Ainsi, sur le plan des substances et des produits interdits, la dernière version du code mondial se caractérise, pour l’essentiel, par une certaine stabilité des qualifications relatives aux méthodes spécifiées, ainsi qu’aux substances et produits interdits. La véritable novation du dispositif adopté réside dans la création d’une nouvelle catégorie de substances : les substances d’abus.
    Dans la définition des infractions au code mondial antidopage, le dispositif applicable au 1er janvier 2021 comporte des reformulations et des précisions. Il en va ainsi pour la définition de la falsification de tout élément du contrôle du dopage de la part d’un sportif ou d’une autre personne. De même, la nouvelle rédaction du code mondial révise les conditions nécessaires à la sanction de l’association interdite.
    Au-delà, je crois que chacun sera sensible au fait que le code mondial accorde une protection nouvelle aux personnes qui dénoncent une violation des règles antidopage – je parle des lanceurs d’alerte. Les pressions ou représailles exercées à leur encontre pour ce motif reçoivent désormais la qualification d’infraction.
    Sur le plan des sanctions en cas de violations alléguées, le code mondial procède, il est vrai, à un alourdissement des sanctions encourues pour certains faits tels que la complicité et au rétablissement de circonstances aggravantes.
    En définitive, l’évolution du régime des sanctions manifeste le souci de mieux prendre en considération les circonstances et les profils. J’en veux pour preuve des stipulations qui ouvrent aux contrevenants la possibilité d’obtenir ce qui peut s’assimiler à des réductions de peine pour certaines infractions : c’est le cas, d’une part, pour la soustraction à un contrôle antidopage, le refus de s’y soumettre ou une falsification, et, d’autre part, pour les sanctions prévues en cas de consommation de substances d’abus.
    On trouvera une autre illustration de cette volonté d’un traitement pragmatique des infractions dans la place plus significative accordée à des procédures qui, à des degrés divers, allègent le prononcé des sanctions en contrepartie d’une coopération des contrevenants ou d’une reconnaissance des infractions alléguées. Je fais ici référence à l’extension du champ d’application de l’aide substantielle, à la réduction de la durée d’interdiction pour aveu rapide et acceptation des conséquences, ou encore à la création des accords de règlement de l’affaire. En dernière instance, le code mondial pousse la logique jusqu’à établir des régimes de sanctions assouplies. Dans sa rédaction applicable à compter de 2021, il prévoit plusieurs tempéraments au régime des sanctions encourues pour certaines infractions au bénéfice de deux catégories nouvelles : les personnes protégées, c’est-à-dire les mineurs, et les sportifs de niveau récréatif.
    En matière de contrôles antidopage et de recueil des informations à cette fin, le dispositif présente des inflexions plus notables. Ainsi, le code mondial actualisé se signale par l’affirmation du principe de la nécessaire indépendance des laboratoires à l’égard de toute organisation antidopage, aux plans administratif et opérationnel. Cette stipulation nous fait l’obligation d’établir l’indépendance organique du Laboratoire national de dépistage du dopage – LNDD – à l’égard de l’AFLD. Sachez que cette indépendance est déjà amorcée.
    Une autre inflexion significative réside dans la capacité nouvelle des organisations nationales antidopage à recueillir des informations sur la localisation des sportifs qui ne sont pas inclus dans un groupe cible.
    Il convient de souligner l’élargissement du champ des enquêtes des organisations nationales antidopage à l’entourage des sportifs. La nouvelle rédaction du code mondial impose, en l’occurrence, de mener des investigations sur l’implication potentielle de membres du personnel d’encadrement des sportifs ou d’autres personnes dans chaque cas de dopage.
    Sur le plan de la coordination des acteurs de la lutte contre le dopage, le code mondial comprend des stipulations de nature à conforter le rôle et les responsabilités des organisations antidopage. Dans son nouveau dispositif, il impose en effet à tout signataire d’adopter des règles obligeant chacune de ses organisations membres et toute autre organisation sportive relevant de sa compétence à respecter, appliquer, maintenir et exécuter le code. Sur le principe, le dispositif tend à renforcer la position de l’AFLD vis-à-vis des fédérations sportives.
    En dernier lieu, le code mondial antidopage réaffirme la nécessaire indépendance des organisations antidopage dans leurs décisions et activités opérationnelles vis-à-vis du milieu sportif et du Gouvernement.
    À l’évidence, la transposition du code mondial antidopage emporte des conséquences et des obligations de portée très diverse, mais extrêmement nombreuses.
    Devant la commission des affaires culturelles et de l’éducation, j’ai qualifié le recours à l’article 38 de notre Constitution d’expédient procédural, conforme à l’esprit de nos institutions mais aussi raisonnable. Je veux redire ici que l’objectif d’une transposition rapide du code mondial antidopage ne dispense pas le Parlement de demeurer très vigilant quant aux mesures que le Gouvernement prendra sur la base de l’habilitation.
    C’est dans cet esprit que je présenterai deux amendements : le premier vise à parfaire la définition du champ de l’ordonnance à venir ; le second réaffirme la nécessaire conciliation entre, d’une part, les exigences du code mondial antidopage et, d’autre part, la préservation des principes constitutionnels et conventionnels qui prévalent sur le territoire national.
    Pour conclure, je vous appelle, mes chers collègues, à faire vôtre la position de la commission des affaires culturelles et de l’éducation en votant en faveur de l’adoption du présent projet de loi et, je l’espère, une nouvelle fois, à l’unanimité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

    M. Maxime Minot

  • partager

    Excellent !

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Marie-George Buffet, rapporteure d’application de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

    Mme Marie-George Buffet

  • partager

    Tout d’abord, je voudrais faire part de mon soulagement de voir ce projet de loi inscrit à l’ordre du jour. Il y avait en effet urgence car la France doit être en conformité avec le code mondial antidopage et le standard international. Elle se doit de l’être sur le plan juridique afin de satisfaire aux engagements pris devant l’UNESCO, et sur le plan moral car notre pays, qui va accueillir les Jeux olympiques et paralympiques, doit être irréprochable dans ce domaine.
    Nous ne pouvions courir le risque de sanctions, quand bien même nous pourrions parier sur une clémence, considérant l’année particulièrement compliquée que nous avons vécue et ses conséquences sur les travaux parlementaires. Le Gouvernement nous propose de légiférer par ordonnance. Ce n’est jamais satisfaisant, mais cela s’impose au vu des délais. À nous, parlementaires, d’être particulièrement attentifs au contenu de cette ordonnance, en particulier au moment de sa ratification.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Exactement !

    Mme Marie-George Buffet

  • partager

    C’est donc aujourd’hui une première étape très importante. Je fais confiance aux autorités françaises, à Mme la ministre déléguée et à l’AFLD pour que cette ordonnance soit la plus pertinente possible au regard des nouveaux standards adoptés en 2019 par l’AMA, mais également au regard des droits fondamentaux, garantis en droit interne et en droit international.
    La réforme du code mondial antidopage de 2019 permet de préciser les catégories de substances, notamment grâce à l’introduction des substances d’abus, prenant mieux en compte la spécificité de ces produits dans le régime des sanctions. Les nouvelles dispositions du code mondial antidopage tendent ainsi à une meilleure proportionnalité des peines et à une meilleure individualisation de celles-ci, grâce à un régime de sanctions quelquefois assoupli. Des assouplissements sont ainsi prévus pour les sportifs dits récréatifs et pour les mineurs qui, je le rappelle, sont des enfants et ont avant tout besoin de protection.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Et de prévention !

    Mme Marie-George Buffet

  • partager

    Le nouveau standard international pour l’éducation devra également être pleinement effectif dans notre pays, sous l’autorité de l’AFLD et en lien avec les fédérations sportives. Le principal ressort de la lutte antidopage est l’éducation des athlètes dès le plus jeune âge et la formation des encadrants. C’est un volet indispensable. Je m’interroge toutefois sur la place du ministère des sports en la matière : quelles prérogatives va-t-il conserver puisqu’il est chargé du respect de l’éthique dans le sport, comme l’a réaffirmé Mme la ministre déléguée, alors que l’AFLD pilotera le programme ?
    Évidemment, tout cela ne peut se mettre en place qu’au sein de structures indépendantes de manière organique. C’est tout l’enjeu de la séparation du LNDD de l’AFLD. J’exprime ici une certaine forme de soulagement après le trop long feuilleton du déménagement et du lieu d’implantation du laboratoire. Celui-ci doit être le plus performant possible car les standards internationaux sont devenus très élevés, et son rattachement au campus d’Orsay répond à ces exigences.
    Venons-en à la protection des lanceurs d’alerte. Il sera possible de sanctionner les personnes – athlètes ou encadrants – qui empêchent quelqu’un de signaler à l’organisme compétent l’existence d’une infraction aux règles antidopage ou au droit national en matière de lutte contre le dopage. C’est une bonne chose. Nous ne connaissons que trop bien cet engrenage dans lequel se trouvent embarqués des sportives et sportifs quand leur carrière dépend de l’acceptation d’un système de triche. Parler – ou tout simplement refuser les mauvaises pratiques – peut signifier l’effondrement d’une carrière et d’années de sacrifices. Lutter contre l’omerta, protéger celles et ceux qui s’opposent à la triche est le plus élémentaire des devoirs. Je saisis cette opportunité pour saluer chaleureusement les femmes et les hommes qui ont eu le courage de témoigner.
    Notre fil conducteur en matière de lutte contre le dopage est la protection de la santé publique – principe de base du nouveau code mondial antidopage – et celle des athlètes. Protéger les sportives et les sportifs, c’est leur permettre d’échapper à l’enfer du dopage, mais c’est aussi garantir le respect de leurs droits. Nous leur demandons beaucoup, peut-être parfois trop : être localisables vingt-quatre heures sur vingt-quatre ; se soumettre à des contrôles à des heures parfois extrêmes ; être toujours attentifs aux traitements qu’ils reçoivent. En contrepartie, nous devons leur garantir des procédures scrupuleusement respectueuses des droits de la défense, une proportionnalité des peines lorsqu’ils sont reconnus coupables, et le droit à l’oubli pour certains, particulièrement les jeunes.
    En tant que rapporteure d’application, en lien avec notre excellent rapporteur, je soutiens ce texte d’habilitation et je suivrai l’avancée de l’ordonnance et son application de manière à garantir un plein respect de la volonté du Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs des groupes LaREM, LR, Dem et SOC.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

  • partager

    Dans la discussion générale, la parole est à M. Luc Geismar.

    M. Luc Geismar

  • partager

    Nous examinons aujourd’hui le projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l’efficacité de la lutte contre le dopage. Ce texte, indispensable à la mise en conformité de notre législation au nouveau code mondial antidopage, est établi sous l’égide de l’AMA. La France a toujours eu à cœur de placer l’éthique au centre de la pratique sportive. Pour cette raison, le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés se réjouit de l’arrivée de ce texte auquel nous apportons tout notre assentiment.
    Il s’agit de mettre au plus vite le droit français en conformité avec les normes édictées à l’échelle internationale par l’AMA. Pour ce faire, le texte prévoit d’habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance afin d’adapter notre législation aux nouveaux principes du code mondial antidopage et aux standards internationaux connexes. Conformément aux réponses qu’il avait données à notre collègue Sophie Mette, M. le rapporteur a déposé un amendement faisant passer la durée de l’habilitation de neuf à six mois. Nous l’en remercions.
    Le vote de ce texte nous permettra de faire preuve d’exemplarité alors que notre pays va très prochainement accueillir plusieurs des grands rendez-vous sportifs internationaux.

    M. Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

  • partager

    Et, surtout, on va les gagner !

    M. Luc Geismar

  • partager

    Par l’adoption de ce texte, nous réaffirmons notre profond attachement à l’importance de l’éthique dans le sport. Rappelons que les règles antidopage sont intrinsèques à une pratique du sport saine et équitable. C’est pourquoi il est nécessaire d’ajuster sans cesse nos règles, pour les conformer aux standards les plus exigeants. Notre groupe soutient pleinement la volonté des organismes internationaux et du Gouvernement de continuellement adapter la norme aux nouveaux usages du dopage, afin de protéger les sportifs et l’intégrité du sport.
    À cet égard, nous saluons particulièrement la possibilité ouverte par la réforme du code mondial de moduler les sanctions ; par exemple, le nouveau code prévoit pour les sportifs récréatifs ou encore pour les mineurs de moins de 16 ans des sanctions réduites. En outre, la publication est rendue facultative pour ces derniers. Cette mesure, parce qu’elle s’adapte davantage au profil du sportif sanctionné, permettra d’apporter, j’en suis persuadé, plus de justice et d’équité aux futures procédures.
    Nous sommes également satisfaits que le texte accorde une place importante à la prévention et à l’éducation, car ce n’est qu’en agissant dès les premières années de la pratique sportive que nous arriverons à limiter, voire à éradiquer ces pratiques néfastes tant pour la santé des sportifs que pour le sport dans son ensemble.
    Enfin, la lutte contre le dopage ne doit pas entraîner un affaiblissement des droits des sportifs ; nous avions lancé l’alerte sur ce point en commission et nous remercions le rapporteur qui nous a rassurés sur le fait que les contrôles et les dépistages s’effectueraient bien dans le respect de notre droit.
    Le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LaREM.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Régis Juanico.

    M. Régis Juanico

  • partager

    Ce projet de loi, déposé en février dernier, est examiné par le Parlement in extremis ; il a pour objectif d’habiliter le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer la conformité du droit français aux principes du code mondial antidopage. La lutte pour un sport propre, intègre et éthique, en France et dans le monde, est non seulement un impératif, mais aussi un combat de tous les instants, qui ne doit tolérer aucun relâchement. Cette lutte sans concession, c’est au mouvement sportif, rappelons-le, qu’il incombe de la mener ; pour être aussi efficace que possible, elle passe par une mise en conformité de notre législation avec le code mondial antidopage.
    La transposition des règles internationales permettra des avancées dans la lutte contre un fléau qui mine les valeurs du sport.
    Elle permettra d’abord une meilleure individualisation des profils et des sanctions. La nouveauté principale du texte est l’apparition de la notion de « substances d’abus », une catégorie qui regroupe les produits à usage récréatif hors contexte sportif ; cette démarche permet une meilleure classification des substances. Pour les sportifs dits protégés, les sanctions sont allégées ; cette flexibilité correspond à l’idée de responsabiliser, d’accompagner et de conseiller les jeunes sportifs au quotidien.
    De même, le passage de l’indépendance opérationnelle à l’indépendance organique du LNDD confirme la nécessaire liberté de la recherche à l’égard de tout organisme administratif ou politique. L’intégration du laboratoire au sein de l’AFLD était une anomalie française. Son déménagement au sein de l’université Paris-Saclay permettra enfin la mise en conformité avec le code mondial. La recherche française, qui a toujours été en pointe, a la capacité de détecter de nouvelles substances ; faisons-lui confiance.
    Enfin, la nouvelle priorité accordée à la prévention est un signe d’ouverture de la part de l’AMA. Le tout-répression ne fonctionne pas ; la sensibilisation doit primer sur la sanction, même si je rejoins les interrogations formulées en commission par Marie-George Buffet sur le rôle résiduel, encore une fois, du ministère des sports, alors qu’il exerce des missions régaliennes de protection de la santé et de l’intégrité des sportifs, en particulier dans le domaine de la prévention en direction des plus jeunes.
    Enfin, l’élargissement du champ des enquêtes à l’entourage des sportifs témoigne d’un constat partagé par tous : l’environnement de l’athlète est déterminant dans la prise ou non de produits dopants. Ce renforcement du pouvoir d’enquête accroît le rôle de régulateur de l’Agence et facilite son travail de lutte contre le dopage.
    Toutefois, il faudra rester extrêmement vigilants, vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure d’application, sur le champ des habilitations accordées au Gouvernement comme sur la rédaction des ordonnances. Nous soutiendrons, pour plus de prudence et de sécurité, la modification proposée par l’amendement du rapporteur à l’alinéa 2 de l’article unique du projet de loi, faisant passer le délai de ratification de l’ordonnance à six mois au lieu de neuf.
    De même, il est urgent d’organiser un outil de droit susceptible de compléter la prise en charge des frais exposés devant le Tribunal arbitral du sport. Il faut accompagner dignement les sportifs les plus modestes qui n’ont pas accès à l’assurance du fonds d’assistance judiciaire.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Exactement !

    M. Régis Juanico

  • partager

    S’agissant des lanceurs d’alerte, la nouvelle version du code n’est pas un outil de protection en soi. Il s’agit surtout de créer une sanction pour les individus qui menacent et intimident les informateurs. Cette différence d’appréciation est problématique dans le processus d’enquête et dans l’anticipation des cas de dopage.
    Même si le recours à l’ordonnance est critiquable, nous considérons, compte tenu de l’urgence, rappelée à de multiples reprises avec force dans l’hémicycle par Marie-George Buffet, qu’il est indispensable aujourd’hui, pour mettre notre droit en conformité avec le code mondial antidopage, ainsi que pour corriger les irrégularités identifiées, d’en passer par ce moyen.
    Sur la question fondamentale de la lutte contre le dopage, la France ne peut se permettre de s’exposer à des sanctions internationales. Si la probabilité de sanctions immédiates est faible, nous ne pouvons pas perdre en crédibilité et en légitimité à l’approche de l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 – nous avons eu l’occasion de le rappeler, avec mon collègue Stéphane Testé, en commission.
    Le but est de créer un dispositif de lutte contre le dopage performant et d’anticiper les risques bien à l’avance. L’AFLD doit se conformer aux standards internationaux afin d’être opérationnelle et d’accompagner au mieux toute une génération, qui ne demande d’ailleurs que cela.
    C’est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés votera en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Aina Kuric.

    Mme Aina Kuric

  • partager

    Dans notre course à la performance, les sportifs sont exposés et en première ligne. Au cours de ces trente dernières années, nous avons observé une amélioration constante des prouesses physiques des sportifs de haut niveau, une professionnalisation croissante et une monétisation plus importante encore des événements sportifs locaux, nationaux et internationaux. Face à ces enjeux de taille, nous avons malheureusement assisté à la multiplication des usages de produits ou procédés illégaux par des sportifs qui cherchent à améliorer leurs performances et leurs résultats. Ce phénomène mondial concerne tous les sports et peut toucher tous les sportifs, quels que soient leur âge ou leur niveau, qu’ils soient professionnels ou amateurs.
    Le dopage engendre des risques pour la santé des athlètes, les substances utilisées pouvant entraîner des troubles du comportement, des problèmes de santé, voire la mort. Face à la multiplication des fraudes, la France, pour favoriser l’égalité des chances et protéger la santé des sportifs, s’était dotée en 1999, à la suite de la création de l’AMA, d’une loi interdisant la pratique du dopage ; cette loi a été renforcée en 2006 par la création d’une autorité publique indépendante, l’AFLD, chargée de définir et de mener les actions de lutte contre le dopage et de sanctionner les violations aux règles en vigueur.
    Cependant, malgré les contrôles fréquents réalisés pendant les compétitions et au cours des entraînements, de nouvelles méthodes et de nouveaux produits apparaissent constamment, et les professionnels du contrôle doivent sans cesse s’adapter. Afin de renforcer l’arsenal mondial de lutte contre le dopage, l’AMA a modifié en 2019 le code mondial antidopage.
    La France étant signataire depuis 2005 de la convention internationale contre le dopage dans le sport, nous sommes tenus de ratifier les mesures prévues par le code mondial antidopage. Aussi nous appartient-il aujourd’hui de redéfinir les rôles des différents organes de lutte contre le dopage et de favoriser une meilleure coopération entre eux. Nous avons l’obligation d’intégrer ces modifications en droit interne et de nous conformer au droit international en la matière.
    Alors que ce projet de loi a été déposé sur le bureau de notre assemblée en février dernier, le contexte sanitaire, social et économique nous a forcés à retarder son étude. Toutefois, même si le virus est encore actif, nous ne pouvons plus différer l’examen de ce texte que nous devons transposer impérieusement avant janvier 2021, sous peine de sanctions internationales. Parmi les principaux enjeux de cette transposition, nous devons, notamment pour des raisons d’éthique, assurer la séparation organique du laboratoire d’analyses antidopage et de l’AFLD.
    En raison de l’urgence des sujets traités, le groupe Agir ensemble accueille favorablement la demande du Gouvernement de légiférer par ordonnance. Nous nous interrogeons toutefois sur les délais restreints – moins d’un mois – dont il disposera pour mettre en conformité notre droit et espérons que la France pourra tenir ses engagements dans les délais.
    Alors que se préparent les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 à Paris, la France se doit bien évidemment d’être irréprochable dans la mise en place d’un dispositif exigeant de lutte contre le dopage, qui permettra aux sportifs de dépasser leurs limites dans un cadre vigilant, sécurisé et apaisé.
    Le groupe Agir ensemble votera pour ce projet de loi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Béatrice Descamps.

    Mme Béatrice Descamps

  • partager

    « L’important dans la vie, ce n’est point le triomphe, mais le combat ; l’essentiel n’est pas d’avoir vaincu, mais de s’être bien battu. » Cette phrase de Pierre de Coubertin résonne de façon plus juste que jamais dans un monde où de nombreuses compétitions sportives sont devenues professionnelles et internationales, et que leurs enjeux sont parfois si importants qu’ils peuvent devenir source de tensions. Dans cette joute mondiale, nous ne devons avoir qu’un objectif : que le sport reste cette passion qui nous unit et qui véhicule les valeurs essentielles d’entraide, de coopération, de dépassement de soi, de respect. Ces valeurs du sport sont celles que nous aimerions voir dans la vie de tous les jours, celles qui font de bons citoyens, celles qui font simplement de belles personnes. Il est donc impératif de continuer à œuvrer pour que le sport reste exemplaire, et notamment exempt de dopage.
    Car si le dopage est une tricherie, c’est aussi un risque important pour des sportifs, qui peuvent se retrouver dépendants vis-à-vis de ces substances. Nous devons donc adopter une législation protectrice pour la santé des athlètes comme pour l’image du sport. Dans ce but – nous l’avons déjà évoqué en commission, monsieur le rapporteur –, l’éducation et la prévention chez nos jeunes sont vitales, à l’école comme dans les clubs de sport ; ceux qui encadrent la pratique sportive doivent inculquer les bonnes valeurs et prévenir les enfants du danger que peut constituer le dopage.
    Pour en revenir au texte qui nous occupe aujourd’hui, le groupe UDI et indépendants se réjouit de le voir inscrit à l’ordre du jour en cette fin d’année, alors que l’échéance de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions du code mondial antidopage, le 1er janvier prochain, arrive très vite.
    Vous nous avez rassurés, monsieur le rapporteur : il y a peu de chances de voir la France être sanctionnée pour ne pas avoir transposé à temps ces dispositions ; la durée de neuf mois peut cependant paraître contestable, et nous vous remercions d’avoir déposé un amendement visant à abaisser cette période à six mois. Nous le soutiendrons.
    Si nous sommes heureux de voir l’harmonisation des règles internationales se poursuivre dans un climat de bonne coopération entre États, je dois avouer notre inquiétude quant à la récente loi adoptée aux États-Unis qui permettrait aux juridictions américaines de condamner des sportifs pour des cas de dopage n’ayant pas eu lieu sur leur territoire. La France, l’Europe et tous les États qui souhaitent garantir le bon fonctionnement de la coopération internationale en matière de dopage doivent apporter une réponse à cette situation qui crée une grande insécurité juridique.
    Les avancées de ce texte sont nombreuses : les sanctions proportionnées selon le niveau et le comportement du sportif ; l’indépendance du LNDD ; la reconnaissance des lanceurs d’alerte. Sur ce dernier point, d’ailleurs, j’espère que vous pourrez, madame la ministre déléguée, nous préciser les moyens envisagés pour transposer cette mesure dans notre droit.
    Enfin, au moment où les autorités françaises commencent à préparer les Jeux olympiques de Paris, il ne faut pas que les contrôles se concentrent exclusivement sur le sport de haut niveau – Mme Buffet l’a rappelé en commission. Le sport amateur est tout aussi important, car c’est lui qui structure la pratique sportive sur tout notre territoire ; c’est lui que nos concitoyens vivent au quotidien.
    À cet égard, je m’interroge sur les moyens consacrés à la lutte contre le dopage dans notre pays, sachant que notre assemblée examinera la semaine prochaine, en nouvelle lecture, le projet de loi de finances pour 2021. Des inquiétudes légitimes se sont exprimées quant à la capacité des autorités françaises à gérer les contrôles dans l’ensemble des pratiques sportives.
    Le groupe UDI et indépendants soutiendra ce texte et vous invite, madame la ministre déléguée, à prendre le plus rapidement possible l’ordonnance qu’il prévoit. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et GDR.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani

  • partager

    Il y a presque un paradoxe à discuter de lutte contre le dopage alors que le monde sportif, tant amateur que professionnel, continue de subir les conséquences dévastatrices de l’épidémie de covid-19. La plupart des compétitions nationales ont été reportées, quand elles n’ont pas été annulées ; les grands rendez-vous se tiendront probablement en 2021. Quant aux clubs amateurs, qui font vivre nos territoires, ils sont en grave danger, en raison de l’hémorragie de licenciés pendant la longue période d’inactivité forcée. Certes, des dispositifs d’aide ont été mobilisés par l’État et les collectivités, mais je veux réitérer mes craintes quant à une baisse durable du nombre de licenciés et de clubs ainsi que de la pratique sportive.
    Une autre menace pèse sur l’éthique et l’équité dans le sport : le développement de pratiques dopantes de plus en plus complexes. Celles-ci touchent au premier rang les grandes épreuves mondiales. À cet égard, la France doit faire preuve d’exemplarité, puisqu’elle accueillera la Coupe du monde de rugby en 2023 et les Jeux olympiques et paralympiques en 2024.
    Comment ne pas se souvenir des Jeux olympiques d’hiver de 2018, marqués par l’affaire ayant abouti à la disqualification des sportifs russes ? Cet exemple de dopage d’État, révélé par l’AMA, montre l’ampleur de ces pratiques déloyales et les différentes formes que celles-ci peuvent prendre. En effet, le dopage n’est pas seulement l’affaire d’une personne, d’un athlète ; il peut être le fruit d’une institution étatique ou de réseaux spécialisés propres au sport de haut niveau.
    C’est pourquoi la lutte antidopage doit être menée à l’échelle internationale. Elle doit aussi être adaptée constamment, car les techniques comme les produits évoluent rapidement – c’est une sorte de contre-la-montre perpétuel. Dans le cas des sportifs russes, ce sont les contrôles qui ont été manipulés et faussés. Nos mesures doivent donc prendre aussi cet aspect en considération.
    Le Gouvernement nous demande de l’autoriser à prendre une ordonnance qui prévoira la séparation organique du laboratoire d’analyses antidopage et de l’AFLD, pour conformer notre organisation au nouveau standard de l’AMA. Elle prévoira en outre le recueil par l’AFLD d’informations utiles à son activité de contrôle et une coordination renforcée entre acteurs de la lutte antidopage.
    Les intentions sont légitimes. Néanmoins, le groupe Libertés et territoires attend que vous exposiez clairement, madame la ministre déléguée, les mesures que le Gouvernement entend prendre en ce sens. En effet, il est à regretter que l’on procède par voie d’ordonnance, même s’il s’agit, nous le savons, d’une procédure habituelle, rendue plus nécessaire encore par la crise sanitaire.
    Par ailleurs, l’AMA étant critiquée pour son manque d’efficacité et pour un défaut d’indépendance à l’égard du mouvement sportif et des gouvernements, nous aimerions entendre la position du Gouvernement à ce sujet. Si nous ne doutons pas du bien-fondé du rôle de l’AMA, ces éléments doivent nous conduire à nous interroger sur nos rapports avec elle.
    Jugeant insuffisantes les décisions de l’AMA et du Comité international olympique – CIO – face à la Russie, le Sénat américain a adopté, lundi 16 novembre, le Rodchenkov Act, qui vise à permettre aux États-Unis de poursuivre toute personne impliquée dans un système international de dopage, quelle que soit sa nationalité. Madame la ministre déléguée, comment la France se positionne-t-elle dans ce bras de fer ? Il ne faudrait pas que de telles initiatives nuisent à la coopération internationale.
    Les grands événements internationaux ne sont qu’une loupe grossissante de pratiques qui se développent bien en amont. Dès lors, le sport amateur ne doit pas être oublié, ce qui implique d’améliorer notre politique en matière d’éducation et de sensibilisation, dès le plus jeune âge, et de rappeler sans cesse que les effets du dopage ne sont pas seulement d’ordre éthique : ils représentent avant tout un danger pour la santé des athlètes.
    Enfin, notre collègue Marie-George Buffet l’a indiqué très clairement en commission, il faudrait accorder des moyens humains et financiers supplémentaires à l’AFLD, qui se verra confier de nouvelles responsabilités dans le domaine de la prévention et de l’éducation. Nous l’avons relevé lors de l’examen du budget : la dotation de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2021 ne suffira pas.
    Ces préoccupations étant rappelées, le groupe Libertés et territoires votera bien entendu le projet de loi. (M. le rapporteur et Mme Marie-George Buffet applaudissent.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Alexis Corbière.

    M. Alexis Corbière

  • partager

    L’article unique du projet de loi tend à habiliter le Gouvernement à « prendre par voie d’ordonnance toutes mesures relevant du domaine de la loi en matière de lutte contre le dopage afin d’assurer la mise en conformité du droit interne avec les principes du code mondial antidopage, de définir le nouveau statut du laboratoire antidopage et de renforcer l’efficacité du dispositif de lutte contre le dopage en facilitant le recueil d’informations par l’Agence française de lutte contre le dopage et la coopération entre les acteurs de cette lutte ». Le groupe La France insoumise, que je représente, n’a pas d’opposition de fond sur ce texte et le votera.
    Je souhaite malgré tout redire mon désaccord quant à la méthode des ordonnances. Le Gouvernement a déposé ce texte dès le mois de février dernier. Rien ne l’empêchait de déposer un projet de loi complet pour permettre un véritable débat au Parlement. Vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur, la date d’entrée en vigueur du nouveau code mondial antidopage a été fixée au 1er janvier 2021. Cela nous laissait largement le temps de suivre la procédure législative normale.
    De plus, ni l’exposé des motifs, ni le dispositif du projet de loi, ni même l’étude d’impact ne dressent la liste de toutes les adaptations nécessaires du droit français. Les parlementaires doivent donc se prononcer sans même disposer de l’ensemble des informations. À mon sens, cela ne permet pas de garantir le principe de clarté et de sincérité du débat parlementaire. Je rappelle ici une position de principe.
    Nous souhaitons profiter de l’examen de ce texte pour étudier les pistes d’amélioration de la politique française et internationale en matière de lutte contre le dopage. L’activité de l’AMA a parfois manqué d’efficacité et de transparence, cela a été rappelé. L’enquête sur le dopage russe a été très tardive.
    L’ancien président de l’AMA a lui-même reconnu un problème d’efficacité, comme le montrent ses propos rapportés par Le Monde le 7 novembre 2019 : « […] 282 athlètes russes ont concouru à Rio, 169 à Pyeongchang. Est-ce une sanction efficace ? La Russie a été réintégrée avant que ce qui lui a été réclamé ne soit fourni. Nous manquons d’une direction vraiment indépendante. J’aimerais voir une réelle indépendance mais je pense qu’il sera difficile d’y parvenir. » En l’espèce, ce sont des athlètes russes qui étaient visés, mais le dopage, nous le savons, n’est pas le fait d’une seule nationalité ; il est, hélas, assez généralisé.
    Actuellement, l’AMA est composée et financée à parts égales par le mouvement sportif et les gouvernements. Les athlètes, qui subissent les tests antidopage, ne sont représentés ni dans la gouvernance ni dans le contrôle de l’AMA. C’est pourquoi l’AFLD a signé un communiqué réclamant « d’éliminer les conflits d’intérêts dans le système antidopage ».
    J’insiste surtout sur le fait que l’AMA est trop peu financée : le budget annuel du régulateur mondial de la lutte antidopage s’établit à 32 millions d’euros seulement ; c’est l’équivalent du budget du club de football d’Angers – pardonnez-moi pour cette comparaison sportive. Une réforme d’ampleur de la gouvernance et du financement de l’AMA est donc nécessaire, voire indispensable.
    S’agissant de l’AFLD, le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une augmentation très limitée de ses crédits, de 9,59 millions à 10,74 millions d’euros. Cette maigre évolution est sans rapport avec l’ambition de poursuivre une politique volontariste en matière de lutte contre le dopage, notamment dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024.
    La France a joué un rôle très actif dans la lutte antidopage à l’échelle mondiale. Je tiens de nouveau à saluer le rôle joué par ma collègue et amie Marie-George Buffet : si elle n’a pas été la seule à agir, elle a donné une impulsion à ce travail.
    Notre pays a pris de multiples dispositions dans son droit interne afin d’assurer l’intégrité des compétitions sportives. Il importe qu’il tienne son rang en donnant à son agence les moyens d’augmenter ses capacités d’analyse et de recherche et d’exercer pleinement ses missions, dont le périmètre est croissant. On remarquera que le budget de l’agence antidopage du Royaume-Uni est le double de celui de son homologue française.
    Mon collègue Michel Larive l’a rappelé lorsqu’il vous a présenté son avis budgétaire sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative » : le groupe La France insoumise souhaite doter l’AFLD d’un budget plus élevé, afin de la rendre plus efficace. Pour l’heure, je le réaffirme à cette tribune, nous voterons ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme Marie-George Buffet.

    Mme Marie-George Buffet

  • partager

    Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera ce texte, et je tiens à saluer ici le travail de son rapporteur, Bertrand Sorre.
    Le dopage est un fléau. Il place en situation de dépendance un ou une athlète, parfois très jeune, qui, sous la pression, dans une fuite en avant au nom de la performance, met sa santé en danger et se met en marge du cadre commun de la pratique sportive ; il ou elle triche.
    Le dopage, c’est le moment où l’athlète rompt avec ce à quoi il a pris du plaisir, un jour, enfant, dans un dojo, dans un gymnase, sur un terrain : le partage du jeu, l’envie de gagner. À certains – une minorité –, de bonnes performances, de premiers palmarès ouvrent les portes du monde du haut niveau, avec les charges d’entraînement qui augmentent, la compétition, la recherche du résultat ou de la médaille. Telle est la réalité de la performance, de l’excellence.
    Le rôle des encadrantes et des encadrants est d’accompagner techniquement, mais aussi psychologiquement, car le haut niveau implique de nombreux sacrifices. La maîtrise du geste parfait et la joie de la victoire sont une quête ; elles justifient tous les efforts. C’est la beauté du sport, celle qui nous fait vibrer, mais aussi celle qu’instrumentalisent parfois des États.
    Cette pression, ce devoir de résultat peuvent conduire des individus, des équipes, voire des organisations à basculer dans l’engrenage du dopage. Les pratiques dopantes sont polymorphes, elles peuvent être très organisées ou être le fait d’individus dans leur coin, être institutionnalisées ou échapper aux radars officiels. Mais, dans tous les cas, le dopage est une prison pour l’athlète, un cycle infernal duquel il est difficile de sortir.
    Combattre le dopage par la prévention, par le contrôle et par la sanction, c’est préserver la santé publique, protéger les sportives et les sportifs, mais c’est tout autant combattre pour la reconnaissance de la place du sport dans nos sociétés comme vecteur d’épanouissement et d’émancipation.
    Le dopage touche tous les sports, parfois même à des niveaux où les enjeux sont extrêmement limités. Mais le « tous dopés » est un leurre, qui vise en réalité à banaliser la pratique d’une minorité et à nier le bien-fondé de la lutte contre le dopage.
    Oui, j’ai vu des sportives et des sportifs qui n’avaient en définitive pas le choix, car celui ou celle qui ne se pliait pas au dopage était automatiquement mis de côté. J’ai vu des sportives et des sportifs qui ne saisissaient pas la gravité de leurs actes, tant la pratique était banalisée. J’ai vu les dégâts que pouvait causer une certaine marchandisation du sport,…

    M. Maxime Minot

  • partager

    Eh oui !

    Mme Marie-George Buffet

  • partager

    …quand les enjeux financiers conduisent à fermer les yeux. On sait aussi ce que peut être le dopage d’État, déguisé en patriotisme.
    Mais j’ai surtout vu des femmes et des hommes se battre pour un sport propre. Ces athlètes, ces encadrants, ces cadres d’État, ces dirigeantes et dirigeants de fédération, ces bénévoles dans les clubs, ces journalistes aussi forment la majorité, l’immense majorité. Ils sont l’honneur du sport français.
    En 1999, la France a adopté une loi contre le dopage. Ce n’était pas le premier texte en la matière, mais notre pays s’est alors tourné vers l’Union européenne, puis vers le CIO et l’UNESCO, car la réponse contre le dopage n’a de sens qu’à l’échelle mondiale. Je suis donc convaincue de l’utilité de l’AMA et du code mondial antidopage. Comme toute instance internationale, l’Agence a ses failles, mais son rôle est primordial.
    Il en va de même de notre agence nationale, l’AFLD, dont il convient de saluer le travail. Ses moyens doivent être augmentés pour qu’elle puisse exercer pleinement ses missions, qui seront étendues à la prévention et à l’éducation conformément aux standards internationaux, et auxquelles s’ajoutent des missions liées aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Elle doit y faire face tout en maintenant – c’est essentiel – sa vigilance en matière de sport amateur.
    Les événements internationaux que nous accueillerons ne pourront souffrir du moindre dysfonctionnement en la matière. Ministère chargé des sports, AFLD, Agence nationale du sport, Comité national olympique et sportif français, comités d’organisation, tous seront au rendez-vous si nous leur en donnons les moyens et que nous articulons correctement les compétences de chacun d’entre eux.
    Je tiens à saluer les amendements déposés par le rapporteur, en particulier celui qui vise à ramener de neuf à six mois le délai dans lequel l’ordonnance devra être prise. Cette durée me semble beaucoup plus appropriée.
    Chers collègues, la bataille contre le dopage s’inscrit dans une démarche plus large en faveur de l’éthique dans le sport, travail mené par le ministère chargé des sports. Elle pose aussi la question de la protection des sportives et des sportifs, de leur intégrité physique et psychique, sur laquelle nous devons continuer à travailler.
    En conclusion, je rappellerai qu’en cette période de crise, le sport, qu’il soit professionnel, amateur ou de haut niveau, est fragile. Au-delà des nécessaires mesures d’urgence, il nous faut donc œuvrer à des réponses structurelles. Un débat plus large devra se tenir au Parlement sur notre modèle sportif, sur ses moyens et surtout sur ses fins. De nombreux dossiers restent encore en suspens, d’où l’intérêt – et je sais que Mme la ministre déléguée nourrit cette ambition –, d’inscrire un projet de loi-cadre relatif au sport à l’ordre du jour de notre assemblée.
    Soucieux de voir la France se montrer irréprochable en matière de lutte contre le dopage pour protéger aussi bien le sport et les athlètes que la santé publique, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI, ainsi que sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Patrick Vignal.

    M. Patrick Vignal

  • partager

    Madame la ministre déléguée, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur – sans oublier les membres du cabinet de Mme la ministre déléguée, qui travaillent beaucoup –, chers collègues, nous examinons le projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage.
    Vous l’avez tous dit, nous traversons, depuis le mois de mars, une crise sanitaire sans précédent qui frappe de plein fouet la France, l’Europe et le monde. Déposé en début d’année par le Gouvernement, le projet de loi devant permettre la transposition du code mondial antidopage dans le droit français devait offrir au Parlement un véritable débat de fond sur le dopage dans le sport. Mais les événements que nous subissons nous obligent à nous adapter. Aussi, pris par le temps, nous n’avons pas d’autre choix que d’habiliter au Gouvernement à transposer par ordonnance ces nouvelles modalités et mesures figurant dans le nouveau code mondial antidopage 2021.
    La France est l’un des pays les plus reconnus et les plus engagés dans la lutte contre le dopage, future organisatrice d’événements internationaux – Coupe du monde de rugby 2023 et Jeux olympiques et paralympiques 2024. Aussi, nous ne pouvions nous permettre de nous exposer à des sanctions qui auraient pu être prononcées à l’encontre de l’État pour non-respect de ce code.
    Le dopage est un fléau qui gangrène notre société, à commencer par le sport professionnel, amateur et récréatif. Jusqu’où ira-t-on dans cette société de la performance, qui place constamment l’individu au second plan derrière les intérêts financiers et la rentabilité sans conscience ? Annihilé, l’homme est en train de devenir un robot. Toutes les sphères de la société, pas uniquement le sport, subissent cette frénésie. Le dopage devient même mécanique, à l’instar de l’assistance mécanique dans le cyclisme. Les performances sportives visent le « toujours plus ». Et le dopage animal est en expansion. Il existe des médicaments pour aller plus loin dans la performance, pour mieux récupérer, pour être plus performant. Des substances conditionnent parfois la réussite scolaire des étudiants, le parcours professionnel de certains dirigeants, voire – très rarement – du personnel politique.
    Le dépassement de soi par l’activité physique, traditionnellement inculqué, s’est vu remplacer par la chimie. Propriétaire d’un club sportif, enseignant en STAPS – sciences et techniques des activités physiques et sportives – et dans un CREPS – centre de ressources, d’expertise et de performance sportives –, j’ai pu constater cette évolution. J’ai vu des adhérents qui, à 70 ans passés, prenaient des anabolisants pour gagner du muscle, des jeunes qui, adolescents, souhaitaient ressembler à Rambo, et même une certaine jeunesse qui prenait des médicaments pour être plus performante dans d’autres situations. (Sourires.) Voilà toute une partie de notre société, qui fait la part belle à la seule performance et qui ne se dépasse que grâce à la chimie !
    Ces injonctions au toujours plus n’ont pourtant rien de rationnel. Elles n’aboutissent qu’à perdre l’individu dans un dédale de miroirs égocentriques. Voici la question à se poser : après quoi court-on dans notre société ? Pouvez-vous imaginer les effets secondaires que subit celui qui a consommé ces produits depuis toujours ? Et je ne voudrais pas oublier, madame la ministre déléguée, les réseaux sociaux, les jeux vidéos, les écrans, devant lesquels nos adolescents – des gamins – passent sept heures par jour au lieu de faire de la voile, du ski, ou de se trouver dans l’un des complexes sportifs du monde associatif. Dépendance, troubles métaboliques ou neurologiques, dépression : au bout du compte, la course est perdue d’avance et l’on se retrouve dans une société où l’on ne juge que sur ce que vous avez, ce que vous possédez, mais pas sur ce que vous êtes.
    Le sport propre, respectueux de la performance humaine, sera toujours plus valorisant que n’importe quelle fausse vérité. Ses valeurs, ce sont les enseignants, les entraîneurs, les organisations de compétition, les fédérations qui doivent en être les garants. Ils doivent exercer une vigilance accrue sur ces enjeux et encourager les sportifs à adopter une approche psychocorporelle de leur discipline, laquelle leur apportera un meilleur équilibre et placera leur ego à sa juste place. Tendre vers un sport propre, un sport « zéro dopage », voilà l’objectif que poursuit le Gouvernement en nous proposant de transposer le code mondial antidopage 2021.
    Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe La République en marche votera le projet de loi avec plaisir et conviction. Notre belle commission des affaires culturelles et de l’éducation avait adopté le texte à l’unanimité, comme elle sait si bien le faire, et je remercie tous les groupes qui le voteront à nouveau en séance publique.
    J’espère que, demain, nous serons également capables de nous rassembler tous pour prendre le pouvoir sur le covid-19. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Maxime Minot.

    M. Maxime Minot

  • partager

    Le groupe Les Républicains s’est toujours placé dans une démarche proactive et responsable s’agissant de la lutte contre le dopage. Étant aujourd’hui à nouveau amenés à nous prononcer sur cette question, nous continuerons d’honorer cet héritage.
    Si la France n’a cessé de jouer un rôle important dans la lutte contre le dopage, disposant d’ailleurs d’un arsenal législatif cohérent qui lui a permis d’obtenir des résultats en la matière, ce nécessaire combat ne peut être efficace qu’au-delà du cadre national, c’est-à-dire à l’échelle mondiale. C’est la raison d’être du code mondial antidopage, qui a plusieurs fois évolué depuis sa création en 2003 et dont la dernière version doit être intégrée dans notre droit interne avant le 1er janvier prochain.
    Or cette transposition n’est pas sans soulever quelques interrogations.
    Premièrement, la procédure engagée pour opérer cette transposition m’apparaît contestable. L’urgence invoquée par le Gouvernement pour justifier le recours à l’article 38 de la Constitution ne fait plus de doute, tant l’échéance du 1er janvier est rapprochée. Toutefois, je ne puis que déplorer le retard pris par le Gouvernement. En outre, le recours trop systématique aux ordonnances interroge également. Certes, la procédure apparaît conforme à nos institutions et aux pratiques passées, mais comment ne pas y voir la confirmation d’une certaine dérive institutionnelle ?
    Deuxièmement, la nécessité d’insérer dans la législation les nouvelles rédactions et les nouveaux dispositifs du code mondial antidopage ne doit pas nous empêcher d’en mesurer toutes les implications. À cet égard, je souhaite appeler votre attention sur une série de préoccupations.
    La première a trait au risque d’affaiblissement de la protection des sportifs, conséquence d’une offensive juridique du droit anglo-saxon au détriment du droit continental, laquelle pourrait contredire notre conception des droits de la défense et des libertés. En effet, nous pourrions assister à une inversion de la charge de la preuve, préjudiciable aux sportifs en faisant naître une suspicion permanente à leur endroit ainsi que des différences de traitement difficilement compréhensibles. À ce titre, des questions prioritaires de constitutionnalité émanant de certains sportifs ne sont pas à exclure.
    Lors des auditions que j’ai menées, j’ai également constaté que des sportifs, de peur d’apparaître en défenseurs des pratiques dopantes, craignent de critiquer le nouveau code, alors que la surveillance permanente qu’il exige pose des questions fondamentales en matière de respect des libertés individuelles. Il ne doit y avoir aucune omerta sur ce point et les mises en garde des sportifs doivent être entendues.
    Ma deuxième interrogation porte sur le flou entourant certaines mesures. Dans son avis sur le code mondial antidopage 2021, rendu à l’AMA, l’ancien président de la Cour européenne des droits de l’homme, Jean-Paul Costa, nous a d’ailleurs alertés sur ce point.
    Quant à ma troisième et dernière interrogation, elle concerne le manque de prévention,…

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    Il a raison !

    M. Maxime Minot

  • partager

    …d’autant plus que le dopage se propage bien au-delà du sport de haut niveau, ou même amateur, et touche les usagers des salles de sport. Aucune interdiction, si elle veut être efficace, ne peut faire l’économie d’une politique de prévention concomitante. Et dans ce domaine, le manque de coordination mondiale n’est pas sans rappeler certaines lacunes de notre pays. En effet, chaque fédération agit de son côté, alors qu’il faudrait une impulsion coordonnée et globale dans tous les sports.

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    Très bien !

    M. Maxime Minot

  • partager

    Pour tenter d’y répondre, le ministère a présenté, en 2019, un nouveau dispositif de dix-sept actions pour la période 2019-2024, afin d’élargir le spectre de la prévention à ceux qui pratiquent le sport en dehors des clubs et de pouvoir compter sur des ambassadeurs de renom.
    En outre, la baisse des contrôles dans le monde sportif amateur au profit de ceux réalisés dans le sport de haut niveau doit s’accompagner d’un renforcement de la prévention dans le milieu scolaire. Cela implique, madame la ministre déléguée, un budget à la hauteur des objectifs fixés, ce qui n’est pas tout à fait le cas. L’examen du texte en commission n’a pas permis de lever les incertitudes qui entourent ce nécessaire ajustement financier.
    À l’approche de la Coupe du monde de rugby 2023 et des Jeux olympiques et paralympiques 2024, la France doit faire preuve d’exemplarité. La lutte contre le dopage doit devenir une priorité pour le pays hôte de ces événements au rayonnement planétaire. Aucune ombre ne saurait poindre au-dessus du sport français, surtout pas celle de ce fléau qu’est le dopage.
    D’aucuns diront qu’il est le fardeau de la société de la performance, qu’il est aggravé par la mercantilisation du sport de haut niveau ou qu’il est intrinsèque à la volonté de l’homme de remporter la victoire sur les autres ou sur lui-même. Ici réside peut-être l’origine du sentiment selon lequel les législations seront toujours en retard par rapport aux mauvaises pratiques de dopage. Néanmoins, je refuse tout fatalisme.
    Le groupe Les Républicains votera ce projet de loi, mais comme à chaque fois que le Gouvernement utilise cette procédure législative déléguée, notre groupe ne manquera pas de faire preuve d’une vigilance toute particulière quant aux mesures qui en résulteront. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.  M. Patrick Vignal applaudit également.)

    Mme Emmanuelle Anthoine

  • partager

    Bravo !

    Mme la présidente

  • partager

    La discussion générale est close.

    Discussion des articles

    Mme la présidente

  • partager

    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.

    Article unique

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Bertrand Bouyx.

    M. Bertrand Bouyx

  • partager

    Le projet de loi vise à se conformer aux principes du nouveau code mondial antidopage dès janvier 2021. Il s’agit d’un texte indispensable et nécessaire si la France veut se montrer exemplaire en ce domaine.
    Le dopage existe depuis des temps immémoriaux, aussi loin que remonte le sport : les Grecs consommaient déjà des champignons hallucinogènes pour accroître leur endurance. Cette pratique n’en est pas moins condamnable et débute dès lors qu’une substance ou un procédé est utilisé afin d’accroître la performance sportive. Ce premier geste conditionnera progressivement l’athlète, qu’il soit professionnel ou amateur, et l’on sait combien l’habitude du geste compte dans les pratiques addictives.
    Si le beau geste, le fair-play et la compétition sont les ferments d’une saine émulation individuelle ou collective, le dopage, lui, va à l’encontre de l’esprit sportif. Plus que le geste, c’est donc l’esprit qu’il convient de rechercher. Au-delà de la question du dopage, interrogeons-nous sur la culture de la performance – un culte qui a ses adorateurs, ses temples et ses guérisseurs, un culte qui place la performance au-dessus de la santé et déshumanise toujours un peu plus le sport.
    Le dopage est non seulement une tricherie, mais aussi une tyrannie : celle du dépassement sans fin de la performance physique. N’ayons pas peur de le dire, cette pratique est révélatrice d’une société qui, malheureusement, se pense sous un angle technique plus qu’esthétique – si par esthétique on entend le beau, l’harmonie d’une pratique, une santé renouvelée, une confiance retrouvée. Le dopage est un témoin silencieux des difficultés que nous éprouvons dans nos sociétés de la sur-performance, raison pour laquelle il déborde largement dans d’autres secteurs. Je pense à certains étudiants qui y recourent pour leurs examens, à certains musiciens lors de longues tournées et à de nombreux autres professionnels dont on demande le dépassement et qui emploient des procédés comparables afin d’augmenter leur efficacité intellectuelle.
    Je conclurai par cette formule de Goethe : « Celui qui reconnaît consciemment ses limites est le plus proche de la perfection. » (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 1.

    M. Bertrand Sorre, rapporteur

  • partager

    Il vise à mieux définir l’habilitation à légiférer demandée au Parlement, en précisant que la mise en conformité du droit national avec les obligations du code mondial antidopage portera sur les stipulations qui entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2021. Je propose donc d’ajouter à la rédaction initiale de l’article la date du 1er janvier 2021 que nous impose la nouvelle rédaction du code mondial actée à Katowice en novembre 2019.

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des sports, pour donner l’avis du Gouvernement.

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    L’amendement vise à expliciter la date d’entrée en vigueur des normes internationales que nous transposons aujourd’hui en droit français. C’est une précision utile car elle permet de souligner l’urgence de cette mise en conformité et d’assurer l’AMA de l’engagement de la France dans la lutte contre le dopage.
    Je tiens à vous rassurer quant à la possibilité d’atteindre cet objectif consensuel – je dis consensuel, car tous les processus de révision du code mondial font l’objet de longues consultations, souvent pendant plusieurs années et, lorsque le processus de révision a été présenté à Katowice, il a été adopté à l’unanimité par la conférence mondiale de l’UNESCO contre le dopage. De notre côté, vous l’avez dit, nous n’avons pas tardé puisque j’ai présenté le projet de loi d’habilitation au conseil des ministres le 19 février 2020, projet qui a été déposé au Parlement dès le lendemain. Chacun sait ici les urgences auxquelles nous avons dû faire face depuis le mois de mars, aussi je me bornerai à vous remercier d’avoir, vous aussi, trouvé un consensus sur le projet de loi, ce qui en facilitera et en accélérera l’adoption.
    Je suis favorable à l’amendement.

    (L’amendement no 1 est adopté.)

    Mme la présidente

  • partager

    Sur l’article unique du projet de loi, je suis saisie par le groupe La République en marche d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 2.

    M. Bertrand Sorre, rapporteur

  • partager

    C’est également un amendement rédactionnel. Il vise à encadrer le travail d’élaboration de l’ordonnance prévue par le projet de loi d’habilitation, en consacrant l’obligation de concilier les prescriptions et procédures figurant dans le code mondial antidopage avec les principes et les normes de valeur constitutionnelle et avec les engagements internationaux de la France. Je propose donc de compléter l’alinéa 1 par les mots : « dans le respect des principes constitutionnels et conventionnels en vigueur sur le territoire de la République ». Cette mention figurait dans le dispositif de la demande d’habilitation entrée vigueur le 1er janvier 2015. Il me paraissait important de la réintroduire.

    Mme la présidente

  • partager

    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    La nouvelle version du code mondial antidopage aura un impact substantiel sur les dispositions actuelles du code du sport – je précise, à cet égard, que le travail d’élaboration du projet d’ordonnance est déjà engagé par mon ministère, en lien avec l’AFLD et l’AMA. Comme à chaque transposition, l’enjeu est de concilier les nouvelles obligations du code mondial antidopage avec les principes du droit français, au premier rang desquels la sauvegarde des principes fondamentaux en matière de libertés individuelles. Depuis le début, et j’en suis fière, la France a fait le choix de traduire les dispositions mondiales antidopage dans le code du sport pour élever les modifications décidées par l’AMA au niveau de la loi française.
    Si, depuis 2010, le Gouvernement propose à la représentation parlementaire de légiférer par voie d’ordonnance, c’est pour respecter le calendrier mondial et ne pas s’exposer à des procédures d’infraction.
    Je tiens également à vous rassurer sur le fait que mon ministère conservera toute sa place dans le pilotage de la politique publique de lutte antidopage. L’AFLD en sera un contributeur et l’État l’accompagnera avec des moyens supplémentaires : dès 2021, cinq équivalents temps plein seront recrutés afin de permettre à l’AFLD de réaliser mille contrôles annuels supplémentaires. Je fais néanmoins confiance au dynamisme de cette institution renouvelée pour diversifier ses sources de financement, conformément à l’engagement qu’ont pris l’AMA et Witold Banka au niveau international.
    Ces précisions étant faites, je suis tout à fait favorable à l’amendement du rapporteur.

    (L’amendement no 2 est adopté.)

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 3.

    M. Bertrand Sorre, rapporteur

  • partager

    Il propose de réduire les délais accordés au Gouvernement pour prendre l’ordonnance prévue par le projet de loi.

    M. François Cormier-Bouligeon

  • partager

    Très bien !

    M. Bertrand Sorre, rapporteur

  • partager

    Vous avez été, à juste titre, nombreux à me le suggérer en commission, et je pense qu’il donne un gage supplémentaire à l’AMA concernant la volonté du Parlement et du Gouvernement de mettre notre droit en conformité rapidement, en respectant au mieux la date du 1er janvier 2021.

    Mme la présidente

  • partager

    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée

  • partager

    Nous avons tous insisté sur l’urgence de la transposition. Le travail est déjà en cours avec le ministère de la justice, l’AFLD et l’AMA pour finaliser le projet d’ordonnance, et je m’engage devant vous, si le texte est adopté en début d’année au Sénat, à vous présenter l’ordonnance au cours du premier trimestre 2021. Un travail complémentaire sera poursuivi, avec la mise à jour nécessaire de plusieurs décrets d’application.
    Le Premier ministre a récemment écrit au président de l’AMA pour l’informer de la date de la séance d’aujourd’hui et pour lui confirmer la mobilisation commune et collective du Gouvernement et des parlementaires pour la mise en conformité de notre droit dans les meilleurs délais.
    J’émets donc un avis favorable, en m’engageant à agir dans les six mois qui suivront l’adoption du texte.

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Régis Juanico.

    M. Régis Juanico

  • partager

    Comme je l’ai évoqué en discussion générale, c’est un très bon amendement, pour deux raisons.
    Tout d’abord, le projet de loi ayant été déposé au mois de février, un travail intéressant d’échange a pu être mené entre l’AMA, le ministère de la justice, votre ministère, madame la ministre déléguée, et l’AFLD. Puisque les travaux sont engagés, il semble utile de réduire le délai de neuf à six mois.
    L’autre intérêt de l’amendement – si le calendrier annoncé est bien respecté – est que, comme vous le savez, les Jeux olympiques et paralympiques de Tokyo 2020 auront exceptionnellement lieu en 2021, c’est-à-dire l’été prochain, à la fin du mois de juillet et au début du mois d’août. Comme vous le savez aussi, au lendemain de ces Jeux, nous serons à la veille de l’Olympiade de Paris 2024. Ce serait un formidable signal que d’avoir ratifié, d’ici là, l’ordonnance prévue dans le projet de loi. Elle permettrait à la France d’afficher, en matière de lutte contre le dopage, une crédibilité et une exemplarité dont nous avons tous souligné l’importance cet après-midi. Ce serait un atout pour l’équipe du comité d’organisation.

    (L’amendement no 3 est adopté.)

    Explication de vote

    Mme la présidente

  • partager

    La parole est à M. Stéphane Testé, pour une explication de vote.

    M. Stéphane Testé

  • partager

    Le projet de loi sur lequel nous nous prononcerons dans quelques instants vise à mettre le dispositif français en conformité avec les standards de la lutte mondiale contre le dopage. Ce texte est de la plus grande importance car la France doit être à la pointe dans la lutte contre le dopage, d’autant plus qu’elle sera le pays hôte de la Coupe du monde de rugby de 2023 et des Jeux olympiques et paralympiques de 2024.
    La France a toujours été reconnue pour le rôle essentiel qu’elle a joué et qu’elle joue encore dans la lutte contre le dopage. Elle a toujours fait partie des pays les plus engagés dans le combat contre ce fléau qui gangrène le sport et fausse trop souvent les résultats. Le dopage dans le sport n’est pas nouveau, mais il s’est développé, s’est étendu géographiquement et est devenu plus visible au cours des dernières décennies. C’est un problème important pour de nombreux sports de compétition, qui met en danger la santé de millions de jeunes athlètes dans le monde. Le dopage est en effet présent à tous les niveaux, professionnel comme amateur, et touche même les plus jeunes, avec les problèmes de santé qui l’accompagnent, et il s’étend encore davantage avec le dopage mécanique qui a vu le jour dans certaines disciplines.
    Il ne faut pas le nier : le combat contre le dopage est un combat difficile et de tous les instants contre toutes les formes de tricherie. Mes chers collègues, nous n’en avons pas fini avec le dopage, et la France devra faire sa part pour lutter contre ce fléau qui fausse les résultats, abîme le sport et peut avoir des conséquences très graves sur la santé des sportifs. Le projet de loi est une pierre supplémentaire qui permettra à notre pays de jouer tout son rôle dans la lutte, essentielle, contre le dopage dans le sport. Il représente une avancée majeure pour un sport propre, un sport sain, un sport intègre ; c’est pourquoi le groupe La République en marche votera en sa faveur.

    Vote sur l’article unique

    Mme la présidente

  • partager

    Je mets aux voix l’article unique du projet de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

  • partager

    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        64
            Nombre de suffrages exprimés                64
            Majorité absolue                        33
                    Pour l’adoption                64
                    Contre                0

    (L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble duprojet de loi.)

    Mme la présidente

  • partager

    Le projet de loi est adopté à l’unanimité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

  • partager

    Prochaine séance, demain, à neuf heures :
    Questions orales sans débat.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à dix-neuf heures dix.)

    Le Directeur du service du compte rendu de la séance
    de l’Assemblée nationale
    Serge Ezdra