- Texte visé : Projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, n° 760
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
La Nation se fixe pour objectif de rétablir le facteur postures pénibles parmi les facteurs de pénibilités pris en compte dans le compte personnel de prévention.
"Par cet amendement, les député·es du groupe parlementaire LFI-NUPES souhaitent rétablir le critère de postures pénibles comme critère donnant droit à des actions de prévention et de départ anticipé à la retraite.
Comme la majorité des Français·es, nous nous opposons totalement à l'ensemble de ce projet de loi et demandons le retrait de l'ensemble de ses dispositions, y compris celles qui auraient pour fonction de limiter les dégâts d'un texte dévastateur.
Depuis l'ordonnance Pénicaud de 2017, la pénibilité revêt des critères réduits, car ne prenant plus en compte l'exposition aux postures pénibles, aux vibrations mécaniques, aux risques chimiques ainsi qu'au port de charges lourdes.
De notre point de vue, certaines activités professionnelles sont caractérisées par des conditions de travail plus pénibles que d’autres (travail de nuit, gestes répétitif, poids importants, températures extrêmes, manque d’autonomie, etc.). Elles doivent donc être compensées en ouvrant des droits supplémentaires. Notamment un départ plus rapide en retraite. Deux raisons à cela. Premièrement, les professionnel·le·s en activité pénible jouissent moins de la retraite car ils et elles sont souvent en moins bonne santé (blessés, handicapés ou usés par le travail). Deuxièmement, leur espérance de vie est réduite. Un ouvrier vit en moyenne six années de moins qu'un cadre.
Mais de nombreux autres employés ne sont pas en reste quant à la pénibilité au travail, bien qu'elle soit moins évidente (elle n'en est pas moins prégnante et réelle), tels que celle dont peuvent souffrir par exemple les conducteurs de la RATP, comme en témoigne Cemil Kaygisiz, secrétaire général de la CGT RATP : “A force de faire toujours les mêmes mouvements, on a beaucoup de collègues qui ont des pathologies, des troubles musculosquelettiques, un collègue sur cinq finit en inaptitude, c'est beaucoup (...) Travailler pendant plus de 30 ans dans ces conditions a un impact sur la santé, notre système de retraite n’est absolument pas un privilège, mais la compensation d’une pénibilité que l’on ne peut pas enlever”.
In fine, ces modalités sont à l'image d'une majorité présidentielle qui, à l'instar de son président, conteste le terme de ""pénibilité"", ""parce que ça donne le sentiment que le travail serait pénible"". (Macron à Rodez en octobre 2019).
Au lieu de fixer davantage de critères universels de pénibilité, la future loi sur les retraites prend le parti d'un suivi personnalisé de l'usure au travail, comme le souhaite, là aussi, le patronat. Déjà l'article 2 de l'ordonnance Pénicaud visant à supprimer quatre critères de pénibilité avait effectué un virage à 380° en matière de sémantique, en remplaçant toutes les occurrences au mot ""pénibilité"" par les mots ""des effets de l'exposition aux facteurs de risques professionnels"". Pure novlangue macroniste. Les mots ont un sens et les paraphrases aussi. En passant de la pénibilité à une description vaseuse de ce que cela signifie et aujourd'hui à un autre mot celui d'usure on s'attèle à faire passer la responsabilité du côté non pas du travail ou du poste de travail occupé (et donc de l'employeur) mais du côté du travailleur lui-même et de son enveloppe corporelle usée ou non. Cela n'a rien d'anecdotique, il s'agit d'une violence faite aux travailleurs qui se plient à un système qui ne reconnaît pas les conditions difficiles de leur environnement de travail, et qui en ont les corps meurtris."