Fabrication de la liasse
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Photo de monsieur le député Olivier Falorni
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Photo de madame la députée Lysiane Métayer
Photo de monsieur le député Emmanuel Pellerin
Photo de madame la députée Sophie Mette

I. – Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :

1° Après le 8° de l’article L. 36‑6, il est inséré un 9° ainsi rédigé :

« 9° Les caractéristiques appropriées pour l’interconnexion des services de réseaux sociaux en ligne prévue à l’article 6‑6 de la loi n° 2004‑575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, ainsi que les normes ou les spécifications techniques de cette interconnexion, qui doivent garantir un niveau élevé de sécurité et de protection des données à caractère personnel. »

2° L’article L. 36‑10‑1 est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° De l’article 6‑6 de la loi n° 2004‑575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique. »

II. – Après l’article 6‑5 de la loi n° 2004‑575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, il est inséré un article 6‑6 ainsi rédigé :

« Art. 6‑6. – Au sens de l’article 2 du règlement 2022/1925 du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique, lorsqu’un contrôleur d’accès fournit des services de réseaux sociaux en ligne qui sont énumérés dans la décision de désignation de la Commission européenne conformément à l’article 3, paragraphe 9 de ce même règlement, il permet à tout fournisseur de services de réseaux sociaux, à sa demande et gratuitement, de s’interconnecter avec les services de réseaux sociaux du contrôleur d’accès identifiés en vertu de l’article 3, paragraphe 7, de manière à rendre ces services interopérables au sens de l’article 2, point 29. L’interconnexion est fournie dans des conditions et une qualité objectivement identiques à celles qui sont disponibles ou utilisées par le contrôleur d’accès, ses filiales ou ses partenaires, permettant ainsi une interaction fonctionnelle avec ces services, tout en garantissant un niveau élevé de sécurité et de protection des données personnelles. »

III. – Dans un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur des dispositions prévues à l’article 6‑6 de la loi n° 2004‑575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse publie un rapport sur la mise en œuvre de l’interopérabilité des plateformes.

 

Exposé sommaire

L’ère du numérique devait être celle du libre choix. Pourtant, les réseaux sociaux ont réussi à construire, chacun à sa manière, une véritable captivité de leurs usagers, de leur clientèle. Il y a quelques mois, combien se disaient prêts à quitter un site de mico-blogging une fois qu'un célèbre milliardaire controversé en aurait pris le contrôle ? Après n’avoir rien fait, combien avaient promis qu’un système de badge payant serait leur dernière ligne rouge ? Et puis, après avoir appris que le même milliardaire pensait à rendre payant tout ou partie de l’utilisation de la plateforme, combien d’entre nous ont promis que ceci finirait de les convaincre de quitter la plateforme tout en sachant qu’ils ne le feront pas. 

Pour ces choix, ceux successifs de ne pas quitter la plateforme, aucun consommateur ne peut être tenu pour véritablement responsable. Car ces décisions ne sont pas vraiment les leurs  : quitter une plateforme de réseaux sociaux, c’est perdre un moyen de communication essentiel, une manière de rester en contact avec ses amis ou famille, de s’informer, voire de travailler.

C’est pour renforcer donc la vraie liberté de choix des utilisateurs que cet amendement propose d’établir l’interopérabilité des réseaux sociaux. Elle consiste à permettre à un utilisateur d’un réseau social A de communiquer avec un utilisateur d’un réseau social B. Ce faisant, l’interopérabilité permet à un internaute de quitter un réseau social dont la politique de modération ne serait pas conforme à ses attentes, tout en pouvant continuer de communiquer avec ses contacts restés sur ledit réseau social.

L’interopérabilité des réseaux sociaux augmente la concurrence entre les réseaux sociaux puisque ces derniers perdront le monopole qu’ils ont aujourd’hui sur leur communauté.

Cette interopérabilité permettra notamment l’émergence de réseaux sociaux reposant sur un modèle économique autre que la publicité ciblée. Elle ouvrira également le champ des possibilités économiques à toute une partie de l’écosystème numérique européen écrasé par les géants chinois et américains.

Il existe aujourd’hui différents réseaux sociaux interopérables entre eux, Mastodon étant le logiciel le plus utilisé dans cet écosystème. Mastodon est un réseau social de microblogging, similaire a Twitter/X, et désormais vu comme alternative crédible à celui-ci. L’Union européenne dispose par exemple d’une « instance » Mastodon, c’est-à-dire de son réseau social interopérable pour les administrations de l’UE, permettant à des internautes sur d’autres « instances » de suivre les comptes européens. La Suisse, également, a récemment annoncé le lancement de son instance Mastodon. De plus, de nombreuses administrations ou organismes publics français ont déjà un compte Mastodon (Conseil national du numérique, Direction du numérique pour l’éducation du ministère français de l’Éducation nationale et de la jeunesse dédié aux logiciels et ressources éducatives libres, Mission Interministérielle Numérique écoresponsable, CNRS, des lycées, ...).

Pourtant, il n’existe aujourd’hui aucune obligation d’interopérabilité pour les grands réseaux sociaux.

Le Digital Markets Act (DMA), règlement européen visant à réguler les plateformes, avait initialement envisagé, sous l’impulsion du Parlement européen, d’introduire une telle obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux. Lors des trilogues, cette obligation a été retirée du texte et seule celle des messageries interpersonnelles est prévue dans le DMA.

Le présent amendement vise à introduire une obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux. Elle se base sur la proposition du Parlement européen dans le cadre du Digital Markets Act. L’Arcep sera chargée d’établir les normes techniques à respecter puis veillera à leur respect.

Cet amendement a été proposé par La Quadrature du Net