Deuxième séance du jeudi 06 juillet 2023
- Présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge
- 1. Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027
- Discussion des articles (suite)
- Après l’article 3 (suite)
- Amendement no 1304
- M. Erwan Balanant, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
- M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
- Amendements nos 812 et 556
- Sous-amendement no 1484
- Amendements nos 334, 1326, 465, 909, 1453 et 335
- Article 3 bis AA
- Après l’article 3 bis AA
- Article 3 bis AB
- Après l’article 3 bis AB
- Article 3 bis A
- Suspension et reprise de la séance
- Article 3 bis B
- Rappel au règlement
- Article 3 bis B (suite)
- Article 3 bis C
- Rappel au règlement
- Article 3 bis C (suite)
- Article 3 bis
- Amendement no 596
- Article 4
- Mme Pascale Bordes
- Mme Élisa Martin
- Mme Caroline Abadie
- Amendements nos 513, 445, 130 et 1009
- M. Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement
- Amendements nos 943, 1174, 1010, 1452, 1168, 1022, 648, 888, 875, 767, 339, 729, 1367, 550, 551, 552 et 993
- Après l’article 4
- Amendement no 275
- Avant l’article 5
- Amendement no 1281
- Article 5
- Mme Pascale Bordes
- Mme Élisa Martin
- Mme Cécile Untermaier
- Amendements nos 1449, 1260, 1278, 1279 et 1416
- Après l’article 5
- Article 6
- M. Philippe Schreck
- Mme Cécile Untermaier
- M. Philippe Gosselin
- Amendements nos 356, 1013, 1125 et 1254
- M. Jean Terlier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
- Amendements nos 89, 1017, 1015, 358, 1014, 517, 852, 1018, 1343, 134, 624, 851, 96, 357, 942, 1342 et 1019
- Après l’article 3 (suite)
- Discussion des articles (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (nos 1346, 1440 deuxième rectification).
Discussion des articles (suite)
Mme la présidente
Ce matin, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 1304 portant article additionnel après l’article 3.
Après l’article 3 (suite)
Mme la présidente
La parole est à M. Aurélien Lopez-Liguori, pour soutenir l’amendement no 1304.
M. Aurélien Lopez-Liguori
Il s’inscrit dans la continuité des amendements défendus ce matin par le Rassemblement national et part du constat suivant : un détenu condamné à moins de deux ans de prison ferme bénéficie généralement d’une libération sous contrainte trois mois avant la fin de sa peine – autrement dit, sa libération est de droit et automatique, à quelques exceptions près. L’amendement no 1304 vise à supprimer cette règle. Les délinquants n’ont plus peur de la justice et ne craignent pas de passer devant le tribunal une fois, deux fois, dix fois… Les condamnés savent très bien qu’ils ne purgeront pas toute leur peine derrière les barreaux et qu’ils bénéficieront d’une réduction ou d’un aménagement. Dans ces conditions, pourquoi se priver de casser, voler, incendier ?
Refuser de soutenir notre amendement reviendrait à accepter l’impunité des délinquants et à ignorer les victimes. La procédure pénale doit être considérée comme un outil politique de lutte contre la délinquance. Le message que nous voulons faire passer est celui de la fermeté. Il convient de rendre à la peine son véritable sens, puisque le mot vient du latin poena, « châtiment ».
Mme la présidente
La parole est à M. Erwan Balanant, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission.
M. Erwan Balanant, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
La libération sous contrainte de plein droit pour les reliquats de peine de prison ferme de trois mois ou moins est en vigueur depuis seulement deux ans et fonctionne pour l’instant de manière satisfaisante. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
Nous avons déjà débattu de ce sujet ce matin. Avis défavorable.
(L’amendement no 1304 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jordan Guitton, pour soutenir l’amendement no 812.
M. Jordan Guitton
Dans le même esprit, cet amendement vise à modifier l’article 720 du code de procédure pénale afin de réduire la durée du reliquat de peine donnant droit à une libération sous contrainte pour une personne condamnée, exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté d’une durée totale inférieure ou égale à deux ans. La surpopulation carcérale ne justifie en aucun cas l’application de la libération sous contrainte à un nombre croissant de délinquants. Nous avons ouvert ce débat important ce matin avec Marine Le Pen et nous devons le poursuivre cet après-midi. Nous avons besoin d’une justice qui condamne les délinquants et qui garantit l’exécution des peines. C’est à cette seule condition qu’elle pourra regagner la confiance des Français, ce que nous souhaitons tous ici.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Nous avons déjà longuement discuté de cette question. Je rappelle que la libération dont nous parlons est une libération sous contrainte. Avis défavorable.
(L’amendement no 812, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Ludovic Mendes, pour soutenir l’amendement no 556, qui fait l’objet d’un sous-amendement du Gouvernement.
M. Ludovic Mendes
Il vise à sanctionner par une amende toute personne qui ne se présente pas à son audience sans en avoir informé les personnes pour lesquelles l’État a engagé des frais, telles que les interprètes, aujourd’hui payés par les contribuables français.
Mme la présidente
La parole est à M. le garde des sceaux, pour soutenir le sous-amendement no 1484.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Je sais, monsieur Mendes, que vous connaissez bien votre sujet ! L’amendement dont vous êtes l’auteur vise à mettre les frais d’interprète à la charge des personnes qui ne se rendent pas à l’audience et qui n’ont pas tenu la juridiction informée de leur absence – si une excuse valable a été fournie, il n’y a évidemment pas de raison que le dispositif s’applique. La mesure s’appliquerait tant aux personnes poursuivies qu’aux parties civiles, qui n’ont pourtant pas d’obligation de comparaître devant la juridiction. Le présent sous-amendement propose donc que les frais d’interprète soient uniquement à la charge du prévenu qui ne comparaît pas à l’audience, et non aux parties civiles.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
M. le ministre a été clair : il ne serait pas logique de faire payer et les personnes poursuivies, et les parties civiles. Le sous-amendement propose de faire peser les frais uniquement sur le prévenu qui ne comparaît pas à l’audience et qui n’a pas informé de son absence, ce qui paraît en effet préférable. Sous réserve de son adoption, j’exprime un avis favorable sur l’amendement.
Mme la présidente
La parole est à Mme Raquel Garrido.
Mme Raquel Garrido
Le fait, dans un tribunal, de comprendre ce qui se dit est un droit aussi ancien que les articles 110 et 111 de l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539, articles qui sont sans doute les plus anciens de notre ordre juridique national. Créer une distinction pécuniaire dans l’accès à la justice me paraît donc contrevenir à l’ordonnance de Villers-Cotterêts, ainsi qu’à l’efficacité et à l’universalité du service public de la justice.
M. Ludovic Mendes et M. Sylvain Maillard
Cela n’a rien à voir !
Mme Raquel Garrido
L’application d’une sanction pécuniaire pour les personnes qui n’ont pas comparu à l’audience et qui n’ont pas informé de leur absence – l’amendement et le sous-amendement ne précisent d’ailleurs pas dans quel délai elles doivent le faire pour être exonérées de ce qui peut être considéré comme une amende – n’est pas recevable du point de vue du droit. Cette proposition est ni faite ni à faire et doit être rejetée. (Mme Danielle Simonnet applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Schreck.
M. Philippe Schreck
Nous ne sommes pas opposés, par principe, à ce que l’ordonnance de Villers-Cotterêts soit citée en référence. Toutefois, bien loin de restreindre l’intervention de l’interprète, l’amendement et le sous-amendement attestent de sa présence. Quant au prévenu, il est en réalité très simple pour lui d’informer de son absence à l’audience et de fournir un motif valable : un coup de téléphone ou un mail suffisent.
De toute évidence, la partie civile, dont la comparution n’est pas obligatoire, doit être exclue du dispositif. Reste le cas du témoin, dont la présence peut être requise par la juridiction et qui a été oublié. Or il peut lui aussi demander la présence d’un interprète. Le dispositif – un dispositif intéressant – mériterait d’être complété en le prenant en compte.
Mme la présidente
La parole est à M. Erwan Balanant, rapporteur.
M. Erwan Balanant, rapporteur
Le témoin est exclu du dispositif puisque les frais d’interprète seront uniquement à la charge du prévenu. La partie civile et le témoin ne sont pas concernés.
M. Philippe Schreck
Je suggère justement qu’il le soit !
(Le sous-amendement no 1484 est adopté.)
(L’amendement no 556, sous-amendé, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l’amendement no 334.
Mme Cécile Untermaier
Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés, dont nous avons discuté en commission, s’inspire des travaux du sénateur Jean-Pierre Sueur et vise à améliorer la procédure de recours contre les conditions indignes de détention instaurée par la loi du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, dont le bilan est aujourd’hui mitigé.
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la France pour méconnaissance de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme et dénoncé en particulier l’absence de voies de recours internes effectives permettant de remédier à des conditions de détention contraires à la dignité humaine – conditions de détention dont nous avons beaucoup parlé ce matin. Pour résumer, nous sommes dans une situation indigne et la voie de recours proposée ne permet pas aux détenus d’obtenir une réponse satisfaisante.
La CEDH souligne l’inefficacité des procédures de référé susceptibles d’être engagées devant le juge administratif, notamment celle du référé-liberté, et pointe la portée limitée du pouvoir d’injonction conféré au juge par la jurisprudence.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Ce matin, nous nous sommes engagés à travailler sur ce sujet. Je vous invite donc à retirer votre amendement, chère collègue.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Même avis.
Mme la présidente
Madame Untermaier, souhaitez-vous maintenir l’amendement ?
Mme Cécile Untermaier
Oui, madame la présidente, mais je suis tout à fait d’accord pour en rediscuter ultérieurement.
Mme la présidente
La parole est à Mme Danielle Brulebois.
Mme Danielle Brulebois
Nous avons entendu beaucoup de choses ce matin sur la surpopulation carcérale et sur les conditions indignes de détention en France. Je veux témoigner que ce n’est pas toujours le cas. Malgré la surpopulation carcérale, il arrive que la dignité des détenus soit respectée dans des maisons d’arrêt (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES)…
Mme Danièle Obono
Cela arrive…
Mme Danielle Brulebois
…et qu’ils soient traités avec humanité, notamment dans les prisons à taille humaine.
Mme Danielle Simonnet
C’est hallucinant de dire des choses pareilles !
Mme Andrée Taurinya
Où par exemple ?
M. Louis Boyard
Des exemples !
Mme Danielle Brulebois
C’est le cas dans la maison d’arrêt de Lons-le-Saunier, je peux vous le certifier. Je salue les surveillants pénitentiaires, dont nous avons amélioré les conditions de travail et surtout le salaire, puisqu’ils vont passer de la catégorie B à la catégorie A. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Ils font un travail tout à fait remarquable dans les maisons d’arrêt à taille humaine et, je le répète, respectent, avec une grande rigueur, la sécurité, la dignité et l’humanité dues à tout être humain.
Mme la présidente
La parole est à Mme Cécile Untermaier.
Mme Cécile Untermaier
Quelques mots seulement : l’intervention de Mme Brulebois n’a absolument rien à voir avec l’amendement que j’ai déposé,…
M. Emeric Salmon
C’est certain !
Mme Cécile Untermaier
…qui porte sur les voies de recours effectives permettant de remédier à des conditions de détention contraires à la dignité humaine, conformément aux préconisations de la CEDH, et qui ne visait nullement à rouvrir le débat sur la surpopulation carcérale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Marietta Karamanli applaudit également.)
(L’amendement no 334 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jérémie Iordanoff, pour soutenir l’amendement no 1326.
M. Jérémie Iordanoff
Depuis 2021, les détenus peuvent faire valoir leur droit à des conditions dignes de détention, mais le dispositif de recours est très insuffisant : il ne prévoit que des solutions ponctuelles et individuelles, qui ne répondent pas aux problèmes structurels dont nous avons déjà parlé. Ce dispositif a cependant le mérite d’exister. Malheureusement, les détenus le déclenchent peu, notamment parce qu’un recours aboutit parfois à un transfert dans un autre établissement, ce qui est pourtant prohibé par la Convention européenne des droits de l’homme. Or un transfert entraîne la rupture des liens familiaux, des soins et des parcours de réinsertion.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Pas forcément !
M. Jérémie Iordanoff
C’est pourquoi nous proposons de mettre en conformité le droit français avec le droit européen et de supprimer la possibilité de transférer un détenu lorsqu’il effectue un recours, possibilité qui a aujourd’hui un effet dissuasif dans l’exercice de ce droit.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Nous avons déjà eu ce débat. Défavorable.
(L’amendement no 1326, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Sur l’amendement no 909, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l’amendement no 465.
Mme Béatrice Descamps
Il vise à mieux encadrer l’activation à distance des appareils électroniques, en étendant aux députés européens élus en France la protection prévue pour les parlementaires nationaux.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Favorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
C’est un excellent amendement, qui va dans le bon sens : dès lors que l’on protège les parlementaires, tous doivent être concernés. J’y suis favorable.
(L’amendement no 465 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Andrée Taurinya, pour soutenir l’amendement no 909.
Mme Andrée Taurinya
Par cet amendement, nous demandons l’abrogation de l’article du code de procédure pénale permettant le recours à la visioconférence pour les audiences de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion statuant sur l’appel d’une ordonnance de juge du tribunal judiciaire de Mamoudzou.
Vous savez déjà que nous ne sommes pas favorables à la visioconférence, mais encore moins dans ce cas précis. Des dispositions légales équivalentes, qui figuraient à l’article 706-71 du même code, ont été censurées par le Conseil constitutionnel. Pourtant, elles sont maintenues à Mayotte, bien que contraires à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui dispose que « toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution » ; ainsi, en l’espèce, les droits de la défense ne sont pas garantis, notamment la confidentialité des échanges.
L’éloignement géographique ne peut justifier ce traitement dérogatoire qui prive les personnes mises en examen à Mamoudzou de pouvoir comparaître physiquement devant le juge.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Je serai bref : nous avons déjà eu ce débat en commission et en séance hier.
D’abord, ce que vous avancez n’est pas tout à fait exact : il n’y a pas eu de censure s’agissant de Mayotte. Le nouvel article 883-2 du code de procédure pénale garantit en effet la comparution physique de la personne devant le juge. Il prévoit qu’en matière criminelle, la première demande de remise en liberté formée par un détenu mis en examen depuis plus de six mois doit être examinée par le juge des libertés et de la détention (JLD) à la suite d’un débat contradictoire en présence de l’intéressé. Cette disposition propre à Mayotte répond pleinement à la décision du Conseil constitutionnel – à savoir la garantie d’une comparution physique en matière criminelle au moins une fois tous les six mois. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 909.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 57
Nombre de suffrages exprimés 44
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 15
Contre 29
(L’amendement no 909 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Romain Baubry, pour soutenir l’amendement no 1453.
M. Romain Baubry
Nous avons adopté l’article 3, qui prévoit que dans le cadre d’une prolongation de garde à vue, l’examen médical puisse être réalisé par vidéotransmission.
Par cet amendement, je vous propose de rendre possible, dans les mêmes conditions, le recours à un examen par vidéotransmission pour les personnes retrouvées en état d’ivresse sur la voie publique. L’intérêt serait de soulager les médecins d’une partie de leur travail et d’éviter de troubler la quiétude des services hospitaliers. En effet, du fait du comportement de ces personnes, le service des urgences devient un véritable champ de foire, où hurlements, insultes et violences se multiplient à l’encontre du personnel hospitalier – parfois même des patients.
Ce serait également utile aux services de police qui doivent gérer au quotidien ces infractions d’ivresse publique et manifeste. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Défavorable. L’individu interpellé en état d’ivresse est placé en cellule de dégrisement le temps de retrouver la raison et de sortir de son état de confusion. Il paraît préférable de conserver la situation en l’état.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Andrée Taurinya.
Mme Andrée Taurinya
Nous sommes contre la téléconsultation, car nous voulons privilégier l’humain. Nous savons bien que la situation des hôpitaux est dramatique en raison des politiques néfastes menées ces trente dernières années ; cela étant, nous refusons d’opter pour cette solution.
Si les hôpitaux sont dégradés, donnons-leur des moyens pour rétablir leurs effectifs ! Augmentons les salaires afin d’éviter le départ des infirmières et des aides-soignantes ! Rendons ces métiers attractifs, et recrutons !
Que les personnes soient arrêtées pour état d’ivresse ou pour toute autre raison, elles doivent pouvoir accéder à une consultation médicale physique, et pas en téléconsultation.
Je propose donc aux députés du groupe Rassemblement national de voter toutes les propositions que nous avons déposées pour rendre attractifs les métiers de l’hôpital, afin de les aider à sortir de la crise qu’ils traversent.
Mme la présidente
La parole est à M. Romain Baubry.
M. Romain Baubry
C’est pourtant bien la NUPES qui a retiré son texte sur la réintégration du personnel soignant non vacciné – et, lorsque nous avons voulu le récupérer pour notre niche parlementaire, ses membres ne semblaient pas se préoccuper des services hospitaliers !
M. Emeric Salmon
Eh voilà !
Mme Danièle Obono
Nous ne l’avons pas retiré ! Quant au vôtre, personne n’en voulait !
M. Romain Baubry
Monsieur le rapporteur, je n’ai pas compris votre argument. Lorsqu’une personne est trouvée en état d’ivresse sur la voie publique, la procédure veut qu’elle soit amenée devant un médecin – presque systématiquement dans un service hospitalier – afin que lui soit remis un certificat de non-admission. Cet examen médical reste généralement superficiel, pour la simple raison qu’il est souvent très difficile de retenir l’individu pendant la consultation, qui donne souvent lieu à des violences à l’encontre du personnel hospitalier.
Ces personnes troublent la quiétude des patients – parfois même des enfants – et de l’ensemble du service hospitalier en hurlant dans les couloirs.
M. Emeric Salmon
Cela arrive tous les samedis soir !
M. Romain Baubry
Réaliser cet examen par vidéotransmission permettrait d’alléger les services hospitaliers, qui pratiquent un examen qui, en réalité, ne sert à rien.
(L’amendement no 1453 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l’amendement no 335.
Mme Marietta Karamanli
Par cet amendement, notre groupe souhaite étendre le champ des données statistiques publiées par le ministère de la justice.
Si la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) retrace le nombre annuel de techniques spéciales d’enquête auxquelles ont régulièrement recours les différents services de renseignement, ces données n’existent pas concernant l’autorité judiciaire. Pour retrouver des éléments statistiques, seuls existent quelques rapports, du Parlement ou de la Cour des comptes. Ainsi, en 2020, la Cour des comptes indiquait que 10 000 lignes étaient écoutées en permanence, et que 100 millions de communications étaient interceptées par an, dont 54 millions de SMS et MMS.
Si la centralisation de certaines données est moins évidente que dans le cas de la surveillance administrative, des données sont pourtant disponibles au ministère de la justice, grâce à l’Agence nationale des techniques d’enquête judiciaires (ANTENJ).
Alors que l’article 3 crée une nouvelle technique spéciale d’activation à distance en matière de géolocalisation et de captation, une communication transparente annuelle devient indispensable. Nous souhaiterions donc disposer d’un rapport sur ces données, comme cela se pratique dans d’autres pays. (Mme Raquel Garrido et M. Benjamin Lucas applaudissent.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Au cours des prochaines séances, l’examen du rapport annexé sera l’occasion de voter différentes orientations sur les statistiques concernant le ministère de la justice. Nous irons donc dans la direction que vous prônez.
Pour l’heure, je ne crois pas que nous soyons prêts à produire des chiffres sur cette technique particulière.
Enfin, vous avez raison : nous avons un rôle de contrôle, et nous devrons l’exercer aussi sur les techniques spéciales d’enquête.
Mme Cécile Untermaier
Eh oui, mais comment faire ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Ainsi, lors de l’évaluation du texte, il sera important que les parlementaires objectivent l’utilisation de ces techniques. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Avis défavorable. Les informations relatives aux gardes à vue et aux perquisitions relèvent du ministère de l’intérieur ; vous comprendrez que le ministère de la justice ne puisse pas prendre d’engagements en son nom.
Mme la présidente
La parole est à Mme Valérie Rabault.
Mme Valérie Rabault
Je ne comprends pas comment M. le rapporteur et M. le garde des sceaux peuvent être contre les statistiques. En démocratie, la transparence…
M. Erwan Balanant, rapporteur
On vient de vous dire qu’on était pour !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
On est pour !
Mme Valérie Rabault
Monsieur le garde des sceaux, je vous ai adressé un grand nombre de questions écrites pour obtenir des statistiques de votre ministère. Vous avez raison : on en a plus du ministère de l’intérieur que du ministère de la justice,…
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Ah oui !
Mme Valérie Rabault
…ce qui pose quand même un vrai problème démocratique. Peut-être devriez-vous demander au ministère de l’intérieur de vous prêter son service statistique !
M. Benjamin Lucas
Coconstruisez donc !
Mme Valérie Rabault
Ce n’est pas normal que nous obtenions aussi peu de données de la part du ministère de la justice, qui est un pilier de notre démocratie.
Depuis deux ou trois ans, je vous ai écrit plusieurs courriers pour obtenir des données par département et par juridiction. Quand j’interroge les magistrats, ils me répondent qu’ils vous les transmettent ; mais il semble qu’aucune synthèse n’en est tirée. Ce n’est pas normal, monsieur le garde des sceaux : nous ne pouvons pas nous satisfaire de votre réponse. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Mme Elsa Faucillon
Les statistiques, c’est bon pour tout le monde !
(L’amendement no 335 est adopté.)
(Exclamations et applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Article 3 bis AA
Mme la présidente
Sur les amendements nos 989 et 911, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de trois amendements, nos 961, 1336 et 989, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 961 et 1336 sont identiques.
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 961.
Mme Elsa Faucillon
Nous avions déjà présenté cet amendement en commission mais nous y revenons car il nous semble important d’étendre les moyens d’action judiciaire des associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme.
Quand une association ou une personne sont victimes d’attaques, d’insultes, d’agressions racistes ou antisémites, elles n’ont pas toujours la possibilité de se porter partie civile et d’engager le combat sur ce terrain. Pourtant, il ne faut rien laisser passer dans ce registre, qu’il s’agisse de délits ou de crimes. Il est donc important de permettre à des associations spécialisées dans la lutte contre le racisme et l’antisémitisme de se porter partie civile. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jérémie Iordanoff, pour soutenir l’amendement no 1336.
M. Jérémie Iordanoff
Il est identique à l’amendement no 961, et nos arguments pour le défendre sont les mêmes.
Ces amendements tendent à opérer deux modifications. La première, qui ajoute une référence aux « profanations », est satisfaite par la mention des violations de sépulture dans le texte adopté en commission. En revanche, l’insertion de « ou à raison de ses engagements pour la défense des droits des victimes de racisme et de discriminations, » n’est pas satisfaite par la rédaction actuelle.
Prenons quelques exemples : SOS Méditerranée, la caisse d’allocations familiales (CAF), le Planning familial, ces structures qui viennent en aide à des victimes de discrimination et particulièrement de racisme sont elles-mêmes attaquées par des groupuscules d’extrême droite. Il nous paraît normal, dans de telles situations, qu’elles puissent bénéficier du soutien d’autres associations qui se portent partie civile dans le procès. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l’amendement no 989.
Mme Danièle Obono
Il vise justement à permettre aux associations antiracistes et de lutte contre les discriminations de se porter partie civile dans les procédures les concernant ou touchant à des sujets qui relèvent de leur champ de compétence. C’est notamment grâce aux actions de ces associations que la jurisprudence en matière de lutte contre le racisme et les discriminations a beaucoup évolué. Elles font donc un véritable travail d’intérêt général et contribuent à étoffer une jurisprudence encore très défaillante.
Le 4 juillet, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a publié son rapport qui montre que les actes racistes sont encore largement sous-estimés. Plus de 1,2 million de personnes seraient chaque année victimes d’au moins une atteinte à caractère raciste, antisémite ou xénophobe, tandis que la réponse judiciaire est encore dérisoire : en 2021, il n’y aurait eu que 1 382 infractions à caractère raciste ; le plus souvent, le caractère raciste des faits est une circonstance aggravante, mais ne constitue pas le cœur de ce qui est reproché aux personnes accusées. Dans le cadre d’affaires de discrimination raciste où c’est la principale infraction, le nombre de condamnations tombe à 4. Les personnes victimes se découragent souvent de mener jusqu’au bout les procédures parce qu’elles sont longues, difficiles et très coûteuses. Le rapport de la CNCDH note que seules 2 % des victimes d’injures et 14 % des victimes de menaces ou de violences portent plainte. Parmi les nombreuses recommandations qui visent, par exemple, à améliorer la formation pour favoriser les dépôts de plainte et pour réduire la sous-déclaration, il nous semble…
Mme la présidente
Merci madame Obono ; vous avez dépassé les deux minutes imparties.
Mme Danièle Obono
…que l’amendement contribuerait à rendre justice aux victimes. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Tout d’abord, la première partie de l’amendement est satisfaite par la rédaction que nous avons adoptée en commission après l’avis favorable donné à l’amendement d’Ugo Bernalicis.
Je comprends parfaitement l’intention qui préside à la deuxième partie de l’amendement. Vous avez raison, nous devons travailler sur ce sujet.
Néanmoins – ne voyez pas dans ma position de la mauvaise volonté ; elle résulte au contraire d’une volonté de sécuriser le dispositif –, ce que vous décrivez ne correspond pas à une infraction ni à une circonstance aggravante. Il faudrait d’abord envisager une qualification pénale pour qualifier les agressions qui viseraient les gens en raison de leur engagement associatif, avant d’envisager la mesure que vous proposez. Être victime d’une attaque raciste et être victime d’une agression en raison de son engagement contre le racisme sont deux choses différentes. Dans le deuxième cas, la qualification pénale n’existe pas ; on ne pourra donc pas en faire une circonstance aggravante.
Mme Elsa Faucillon
Il ne s’agit pas seulement d’une circonstance aggravante !
M. Erwan Balanant, rapporteur
Nous pourrons sans doute continuer de travailler sur ce sujet. Je vous demande donc de retirer l’amendement, sans quoi la commission émettra un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Raquel Garrido.
Mme Raquel Garrido
Nous avons besoin de stabiliser l’intervention des associations antiracistes pour aider l’action publique à poursuivre efficacement des délits, des actes qui visent des personnes en raison de leur origine, de leur ethnie réelle ou supposée ou de leur engagement pour lutter contre la xénophobie. C’est la réalité du pays dans lequel nous vivons.
Comme avocate, il m’est arrivé de défendre des associations antiracistes en tant que partie constituée civilement dans des procès pour injures racistes ; mais à la fin on nous expliquait parfois que les associations n’avaient pas intérêt à agir. La situation actuelle n’est pas exempte de surprises : parfois la demande d’une association est recevable, parfois non. La société française ne peut pas se permettre une telle incertitude.
Nous devons parvenir à une position consensuelle et délivrer tous ensemble un message antiraciste. Il est important que le pays comprenne que nous avons sur ce sujet une manière commune de voir.
Le racisme est un délit. Attaquer les gens parce qu’ils sont solidaires avec les immigrés n’est pas acceptable. Le moment est venu de le déclarer d’une seule et unique voix. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Béatrice Roullaud.
Mme Béatrice Roullaud
Je ne comprends pas très bien le sens de cet amendement… (« Quelle surprise ! » sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Laissez-moi terminer ; vous pourrez critiquer ensuite !
Mme la présidente
S’il vous plaît, chers collègues !
Mme Béatrice Roullaud
L’article 2-1 du code de procédure pénale dispose : « Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre le racisme ou d’assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne, d’une part, les discriminations réprimées par les articles 225-2 et 432-7 du code pénal et l’établissement ou la conservation de fichiers réprimés par l’article 226-19 du même code, d’autre part, les atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité de la personne, les menaces, les vols, les extorsions et les destructions, dégradations et détériorations qui ont été commis au préjudice d’une personne à raison de son origine nationale, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une race ou une religion déterminée.
« Toutefois, lorsque l’infraction aura été commise envers une personne considérée individuellement, l’association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l’accord de la personne intéressée […]. » Quoi de plus normal ?
Toutes les dispositions nécessaires figurent donc déjà dans le code de procédure pénale. (« Non, justement ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Elsa Faucillon
Non !
M. Benjamin Lucas
Vous êtes hors sujet ; vous ne comprenez jamais rien !
Mme Béatrice Roullaud
Si, elles y figurent déjà.
(Les amendements identiques nos 961 et 1336 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 989.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 82
Nombre de suffrages exprimés 80
Majorité absolue 41
Pour l’adoption 26
Contre 54
(L’amendement no 989 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 549 de M. Erwan Balanant, rapporteur, est rédactionnel.
(L’amendement no 549, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L’article 3 bis AA, amendé, est adopté.)
Après l’article 3 bis AA
Mme la présidente
Nous en venons à une série d’amendements portant article additionnel après l’article 3 bis AA.
Je suis saisie de trois amendements, nos 911, 247 et 248, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Andrée Taurinya, pour soutenir l’amendement no 911.
Mme Andrée Taurinya
La justice restaurative est importante pour lutter contre la surpopulation carcérale. Contrairement à ce que propose le Rassemblement national, nous ne pensons pas que les victimes doivent participer au délibéré : elles n’ont pas à décider à la place des juges. En revanche, il nous semble souhaitable qu’elles puissent discuter avec les auteurs d’infraction pour renouer un dialogue. Cette dimension humaine est intéressante.
L’amendement vise donc à rendre systématique, et non simplement possible, la délivrance des informations sur les dispositifs relevant de la justice restaurative, qui ne sont pas encore connus du grand public.
Mme la présidente
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 247.
M. Ian Boucard
Cet excellent amendement de M. Éric Pauget traite également de la justice restaurative.
Des pays ont su répondre au double problème de la réinsertion sociale des auteurs d’infraction et du manque de confiance envers la justice. Au Canada, pays qui a instauré la justice restaurative, 95 % des contrevenants participant au projet avaient le sentiment que justice avait été rendue, et surtout, 78,8 % des victimes partageaient ce sentiment.
Ainsi, cette procédure permet de redonner confiance en la justice en participant activement à sa modernisation. Elle permet non seulement aux victimes et aux auteurs de prendre part au processus de résolution des conflits, mais aussi de responsabiliser les auteurs en leur offrant la possibilité de comprendre les conséquences de leurs actes sur les victimes et la société.
La première partie de l’amendement vise à créer un droit à la justice restaurative en imposant un devoir d’information du recours à cette procédure lors des auditions des victimes. La deuxième vise à informer les victimes de leur droit d’accéder à la justice restaurative.
Mme la présidente
La parole est à M. Ian Boucard, pour soutenir l’amendement no 248.
M. Ian Boucard
Il s’agit d’un amendement de repli qui crée un devoir d’information sur le droit à la justice restaurative.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Il s’agit d’un sujet important et intéressant…
M. Philippe Gosselin
Et d’un gros sujet, là encore !
M. Erwan Balanant, rapporteur
…sur lequel la Chancellerie et plusieurs parlementaires ont commencé à travailler.
La justice restaurative se développe, mais nous ne disposons pas encore de moyens suffisants pour garantir à toute personne qui le souhaiterait l’accès aux dispositifs qui en relèvent.
M. Erwan Balanant, rapporteur
Par conséquent, même si vous n’en serez pas ravis, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, avis défavorable. Nous pourrons ainsi continuer à travailler sur ce sujet, ou plus exactement faire en sorte que se déploient sur le terrain les associations, les moyens nécessaires à la justice restaurative. En outre seront examinés après cette discussion commune deux amendements identiques, dont le no 352, dû à Mme Untermaier : je vous invite à les adopter, puisque la commission s’est montrée favorable à leur contenu, quoique le Gouvernement ne soit pas tout à fait d’accord. Les promesses non tenues, ou mal tenues, sont perçues par nos concitoyens comme autant de tromperies : celle d’une justice restaurative qui ne serait pas encore prête pourrait renforcer la défiance.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Même avis. La justice restaurative, qui contribue à la résilience des victimes, n’est pas toujours possible : certaines personnes n’ont aucune envie d’être mises en présence de l’artisan de leur malheur, et c’est là quelque chose qui se respecte.
M. Philippe Gosselin
Bien sûr !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
En revanche, chaque fois qu’elle l’est, les résultats sont incroyables. C’est pourquoi nous ne pouvons – pardonnez-moi cette expression – en faire de la poudre aux yeux. La proposer systématiquement, alors que nous ne sommes pas encore prêts, reviendrait en effet à tromper les gens. Savez-vous, madame Untermaier, ce qui manque dans nombre de juridictions ? Des associations, une offre ! Certes, le succès considérable du film Je verrai toujours vos visages a attiré l’attention sur les vertus de cette forme de justice. Vous avez cité l’exemple du Canada, monsieur Boucard : on peut dire qu’il a en la matière quelques années d’avance sur nous. Il nous faut donc combler l’écart, à notre manière propre, naturellement ; la Chancellerie compte entamer en ce sens un vaste travail. En attendant, je le répète, nous ne sommes pas prêts : pas la peine d’inciter les gens à choisir une procédure qui n’est pas encore opérationnelle, finalisée, de faire une proposition derrière laquelle il n’y aura rien ! J’entends le faire le moment venu, et je suis prêt à travailler dans ce but avec les parlementaires.
Mme la présidente
La parole est à Mme Élisa Martin.
Mme Élisa Martin
Vous allez être fort occupé, monsieur le garde des sceaux, car c’est là le énième point sur lequel vous vous engagez à œuvrer avec nous. Concernant les questions de régulation et de désinflation de la population carcérale, ce travail aurait même dû déjà aboutir !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Justement, je travaille, je ne fais pas que parler !
Mme Élisa Martin
Permettez-nous donc – je le dis en toute courtoisie – de douter des engagements que vous prenez devant nous.
Monsieur le rapporteur, je me permets, avec la même courtoisie, de vous inviter à lire nos amendements : il ne s’agit que de délivrer une information. Sincèrement, je vous soupçonne d’être réticent à promouvoir un dispositif certes particulier, notamment touchant le rapport aux auteurs d’infraction ! Si tel n’était pas le cas, vous nous auriez au pire proposé un délai en vue de la création de ce système d’information, afin que nous puissions tout de même l’inscrire dans la future loi. Au début de l’examen de celle-ci, j’avais fait valoir deux problèmes : d’une part son manque de transparence concernant les engagements financiers, d’autre part son défaut de stratégie. Nos débats de ces derniers jours illustrent ce dernier point : nous accumulons les mesures sans développer de vision construite d’une justice forte, équitable et républicaine !
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Gosselin.
M. Philippe Gosselin
La justice restaurative constitue quelque chose d’assez nouveau : il faut bien dire que dans ce domaine, la France n’est pas à l’avant-garde du progrès.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
C’est vrai !
M. Philippe Gosselin
Vos propos, monsieur le ministre, vont dans le bon sens ; nous manquons encore peut-être d’ambition, sans doute de moyens. Précisément, me répondrez-vous, ce projet de loi a été conçu pour y remédier.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
J’allais le dire !
M. Philippe Gosselin
Les chantiers seront en effet nombreux : il y aura du pain sur la planche au-delà même de la fin du quinquennat, et certains risquent fort de rougir ou de s’impatienter. Reste que, même si la justice restaurative n’est pas l’alpha et l’oméga, nous devons pouvoir la proposer partout où elle est possible – il va de soi que je n’incrimine pas le refus de certaines victimes de se retrouver confrontées à l’individu qui les a harcelées, par exemple. Insistons, allons dans ce sens, accélérons les choses, nous verrons ce qu’il en sera ; le fait que cette position soit largement partagée, notre débat en lui-même, sont déjà importants !
Mme la présidente
Puisque les deux interventions étaient favorables aux amendements, j’autorise un troisième orateur à défendre la position inverse : la parole est à Mme Naïma Moutchou.
M. Ian Boucard
Elle aussi est pour les amendements !
Mme Danièle Obono
M. Gosselin était moyennement pour !
Mme Naïma Moutchou
En fait, je suis contre, mais à court terme ! (Sourires.) Mon groupe est très attaché à la question de la justice restaurative : nous avons fait adopter en commission un amendement visant à aller plus loin en la matière, persuadés, nous aussi, que cette forme de justice doit prendre toute sa place au sein de notre droit. Elle permet la reconstruction de la victime, la responsabilisation de l’auteur, voire sa réinsertion dans la société ; dans certaines situations, il convient, à un moment donné, de préférer le dialogue au contentieux. Cependant, je suis d’accord avec le garde des sceaux : la progression doit s’opérer par étapes,…
M. Philippe Gosselin
C’est toute la difficulté, avec ce type d’amendements !
Mme Andrée Taurinya
Mais là, on n’avance pas du tout !
Mme Élisa Martin
On est encore à la cave, on n’a même pas atteint le rez-de-chaussée !
Mme Naïma Moutchou
…afin que nous ne proposions que ce qui peut être réalisé, que nous n’adoptions de dispositions que celles qui peuvent être appliquées. Certains d’entre nous travaillent sur la question : c’est très bien, et nous pouvons sans doute nous trouver d’accord. Mon groupe rédige ainsi un texte qui, complété et enrichi par d’autres collègues, pourrait devenir une proposition de loi. En revanche, tout cela demande du temps ! Autant l’avenir ouvre de vastes perspectives, autant il serait prématuré d’adopter ces amendements.
Mme la présidente
Dans un souci d’équilibre, nous entendrons un second orateur contre les amendements : la parole est à Mme Caroline Yadan.
Mme Danièle Obono
M. Gosselin n’était pas vraiment pour !
Mme Sandra Regol
Ça fait trois interventions contre les amendements !
Mme la présidente
Mme Martin et M. Gosselin se seront exprimés pour, Mmes Moutchou et Yadan contre (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES) : laissez-moi juger de la situation, chers collègues ! Madame Yadan, vous et vous seule avez la parole.
Mme Caroline Yadan
Il ressort de la lecture des amendements que l’auteur de l’infraction doit se voir proposer une mesure de justice restaurative, ce qui suppose la certitude que celle-ci soit applicable. Je soutiens avec ferveur les dispositifs visant à régler les différends à l’amiable, car, pour y avoir recouru à titre professionnel, j’ai pu constater leur efficacité. En revanche, M. le garde des sceaux a raison lorsqu’il nous conseille de laisser le temps au temps : regardez le rapport annexé au texte, vous verrez à quel point les modes de règlement amiable sont développés, notamment la césure du procès civil et l’audience de règlement amiable (ARA). En outre, nous avons bien en main les outils de médiation restaurative.
Mme Cécile Untermaier
Ce n’est pas la même chose !
Mme Caroline Yadan
La justice restaurative nécessite au contraire d’aller de l’avant, de définir le rôle du juge qui proposera la mesure, celui des associations – seul un infime pourcentage de celles qui pratiquent la médiation maîtrise la justice restaurative.
Mme la présidente
Merci, chère collègue.
Mme Caroline Yadan
Ne décevons pas le justiciable : interpréter autrement l’attitude du garde des sceaux, c’est lui faire un mauvais procès !
M. Ian Boucard
Seuls les juges font des procès : nous, nous formulons des critiques !
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 911.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 80
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 22
Contre 41
(L’amendement no 911 n’est pas adopté.)
(Les amendements nos 247 et 248, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 352 et 1199.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l’amendement no 352.
Mme Cécile Untermaier
Tout le monde adore la justice restaurative, mais lorsqu’il s’agit de l’inscrire dans une future loi, personne n’en veut ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC, LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
M. Ian Boucard
Tout à fait !
Mme Cécile Untermaier
J’espère que ce que je viens de dire n’est pas entièrement vrai ; reste que nous ne pouvons plus longtemps tenir un double langage et aborder en vain la question d’un dispositif législatif pourtant très attendu par les associations, qui sont prêtes à faire le maximum. Nous devons utiliser les véhicules dont nous disposons, d’autant que ce texte est ambitieux, monsieur le ministre. Si la justice restaurative, qui n’a rien à voir avec la médiation, n’existe pas encore dans tous les tribunaux, tant pis : promouvons du moins cette culture, très peu connue des auteurs et des victimes, voire du magistrat qui lui-même, en informant, la prendra en considération. S’il n’est pas possible d’y recourir, il saura bien l’expliquer ! Et ne me dites pas, monsieur le ministre, que des 2 milliards d’euros promis, nous ne pouvons distraire quelques millions : la réussite du Québec en matière de justice réparatrice, comme elle est appelée là-bas, tient aussi aux crédits qu’y consacre l’État. Le jugement ne constitue pas toujours la solution : la résilience se trouve au bout de la justice restaurative. Puisque vous êtes d’accord, ne perdons pas de temps, il y a urgence ! Ces amendements identiques, élaborés de concert avec M. Balanant, ont du reste le mérite de prévoir que la mesure « n’est mise en œuvre que sous réserve de sa faisabilité », ce qui répond à vos objections en supposant l’accord de la victime, celui de l’auteur, et la présence d’une association compétente.
Mme la présidente
La parole est à M. Erwan Balanant, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 1199.
M. Erwan Balanant, rapporteur
Mme Untermaier vient de le dire, ces amendements identiques visent au consensus, à nous permettre d’avancer. Vous aurez remarqué que j’ai souvent beaucoup de mal à résister à ses arguments (Sourires sur les bancs du groupe SOC) : j’espère qu’elle ne résistera pas davantage aux nôtres lorsqu’il s’agira de la mise aux voix du texte, au terme de nos débats ! Nous proposons là une formule équilibrée, consistant à tenir compte de la possibilité d’une mesure de justice restaurative, mais aussi à développer l’information à ce sujet – ce qui, au sein de certaines juridictions, pourra susciter des vocations associatives en vue d’aider et d’accompagner. C’est pourquoi ces amendements très sages ont reçu, je le rappelle, un avis favorable de la commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Je suis favorable à la justice restaurative, ce n’est pas un mystère. Je ne souhaite pas, néanmoins, que nous fassions des promesses que nous ne pourrons pas tenir. Or sur ce sujet, nous ne sommes pas prêts. Je pense, madame Untermaier, être au rendez-vous de mes engagements. J’ai dit que nous allions nous orienter dans la voie de la justice restaurative. Il s’agit d’une excellente solution, qui relève d’une vision moderne de la justice et qui convainc de plus en plus même si, comme je l’ai déjà dit, rien ne peut se faire sous la contrainte. Comme Caroline Yadan, et contrairement à vous, je pense que ce type de mesure se rapproche beaucoup d’une forme de médiation.
Je préfère quant à moi attendre un peu et continuer à travailler, afin de pouvoir offrir aux justiciables une mesure aboutie plutôt que de faire une annonce alors que nous ne sommes pas prêts.
Mme Cécile Untermaier
Dans ce cas, prévoyons un délai avant l’entrée en vigueur de ces dispositions !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Il ne faut pas confondre urgence et précipitation. Vous me dites que l’on en parle depuis longtemps, mais c’est en réalité l’une des premières fois que nous évoquons ce sujet ensemble. Je vous répète que nous travaillons ardemment sur cette mesure, à laquelle je crois profondément. Je vous ai dit à de nombreuses reprises que nous travaillerions ensemble sur tel ou tel sujet, et il ne me semble pas avoir failli. Je suggère donc le retrait des amendements : avançons ensemble pour préparer une mesure aboutie, car c’est l’intérêt de nos justiciables. À défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Danièle Obono.
Mme Danièle Obono
Il nous semble que ces amendements sont de repli et que la formulation qu’ils proposent ne changerait pas grand-chose à l’existant. J’aimerais par ailleurs clarifier quelques points. Les propos du ministre pourraient en effet laisser penser que la justice restaurative place la victime face à son agresseur ou face à l’auteur de l’infraction. Or ce n’est pas ainsi que cela se passe.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Si, cela se passe parfois ainsi.
Mme Danièle Obono
La justice restaurative n’est pas non plus une médiation entre la personne ayant commis un préjudice et sa victime. C’est une démarche beaucoup plus élaborée, qui est en cours d’expérimentation, dans le but justement d’éviter de provoquer de nouveaux traumas. Si nous demandons de systématiser la délivrance d’informations, ce n’est pas pour informer sur des dispositifs qui n’existent pas mais bien sur ceux qui existent, ainsi que sur les moyens à disposition.
Je rappelle que nous avions déjà eu ce débat en 2021, il y a deux ans. Notre groupe, LFI, avait défendu des amendements à ce sujet, et on nous avait fait peu ou prou la même réponse. On peut arguer, certes, que la crise du covid est survenue entre-temps, mais en réalité nous n’avançons pas – notamment parce que nous ne nous en donnons pas les moyens. Nous aurons peut-être à l’automne prochain un débat sur le budget. Si nous donnons alors des moyens aux associations qui travaillent déjà sur le sujet, et qui nous demandent un engagement financier dans leurs structures, nos débats d’aujourd’hui ne seront pas des paroles en l’air – même s’il est dommage, à cet égard, que notre amendement précédent n’ait pas été adopté. Si en revanche on nous explique, comme on le fait depuis 2021 au moins, que tout le monde est d’accord mais qu’il n’y a pas de moyens et que, deux ans plus tard, nous avons encore le même débat…
Mme la présidente
Merci de conclure, madame Obono.
Mme Danièle Obono
…alors nous nous serons payés de mots mais la justice ne sera pas rendue comme elle devrait l’être.
Mme la présidente
La parole est à Mme Caroline Yadan.
Mme Caroline Yadan
Il y a selon moi une grande différence entre les amendements précédents, aux termes desquels le justiciable pouvait se voir proposer une mesure de justice restaurative,…
Mme Élisa Martin, Mme Danièle Obono et Mme Andrée Taurinya
Non ! De l’information !
Mme Caroline Yadan
…et les amendements de Mme Untermaier et de M. le rapporteur Balanant, qui visent à assurer l’information des justiciables. (Mmes Élisa Martin, Danièle Obono et Andrée Taurinya s’exclament.) Ne vous offusquez pas, chères collègues…
Mme la présidente
S’il vous plaît, mesdames, je vous invite à écouter Mme Yadan.
Mme Caroline Yadan
Délivrer une information sur la justice restaurative, ce n’est pas la même chose que proposer une mesure en ce sens. Autre point de détail, qui n’en est pas un : la grande différence entre la justice restaurative et la médiation restaurative tient au fait que, dans le cadre de la seconde, on met en présence la victime d’une infraction et l’auteur de celle-ci.
Mme Élisa Martin
Non !
Mme Caroline Yadan
Dans le cadre de la justice restaurative, on met en présence la victime d’une infraction avec l’auteur d’une autre infraction du même type.
Mme Andrée Taurinya
Nous ne parlons pas de la même chose !
Mme Danièle Obono
C’est vous qui entretenez la confusion !
Mme Caroline Yadan
En tout état de cause, le fait de proposer une information sur la justice restaurative, et d’inviter les personnes à se renseigner sur l’existence d’associations proposant ce type de démarche, me semble constituer une avancée intéressante. J’y suis personnellement favorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Erwan Balanant, rapporteur.
M. Erwan Balanant, rapporteur
Je propose de retirer mon amendement, et je crois que Mme Untermaier en fera autant. (Mme Andrée Taurinya s’exclame. – Mme Danièle Obono et Mme Caroline Yadan s’interpellent mutuellement.)
Mme la présidente
S’il vous plaît, chers collègues, je vous invite à vous écouter les uns les autres.
M. Erwan Balanant, rapporteur
Je suis en effet convaincu de la détermination du garde des sceaux à avancer sur ce sujet.
Mme Danièle Obono
Ce n’est pas vrai…
M. Erwan Balanant, rapporteur
Eh oui ! Tout à l’heure, madame Martin, vous avez souhaité faire preuve de courtoisie à notre égard. Avec la même courtoisie – même si elle se trouve mise à rude épreuve, il faut le dire –,…
Mme Élisa Martin
La nôtre l’est aussi !
M. Erwan Balanant, rapporteur
…je vous répondrai, sans chanter les louanges du garde des sceaux, que ce dernier a travaillé et qu’il a pris des engagements. Le projet de loi qu’il nous présente comporte de grandes avancées. Il nous dit aujourd’hui qu’il souhaite travailler sur le sujet avec les parlementaires ; j’en prends acte et je retire mon amendement. Nous mettrons néanmoins une pression parlementaire amicale sur le Gouvernement pour avancer sur le sujet !
Mme Danièle Obono
Nous en parlons depuis 2021 !
(L’amendement no 1199 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Cécile Untermaier.
Mme Cécile Untermaier
Les circonstances sont un peu particulières, car j’avais élaboré l’amendement no 352 avec M. Balanant, à la suite de nos travaux en commission.
Mme Danièle Obono
Eh voilà !
Mme Cécile Untermaier
Moralement, je ne peux pas le maintenir alors que M. Balanant retire le sien. Je maintiens en revanche le no 324.
(L’amendement no 352 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l’amendement no 324.
Mme Marietta Karamanli
Il vise également à systématiser la délivrance, aux victimes et auteurs d’infractions, d’informations relatives aux mesures de justice restaurative, à chaque fois que la procédure pénale s’y prête et que les faits sont reconnus. L’Institut français pour la justice restaurative déplore en effet l’absence d’information des personnes concernées. De même, lors de travaux sur les victimes du terrorisme, dans le cadre du Conseil de l’Europe, j’ai eu l’occasion de constater que, si elle est en pointe par rapport à d’autres législations européennes dans certains domaines, la législation française est en revanche très en retard s’agissant de l’information des victimes, en particulier au sujet de la justice restaurative. Nos voisins espagnols, notamment, sont beaucoup plus avancés que nous. C’est la raison pour laquelle notre groupe tient beaucoup à maintenir cet amendement. J’entends ce que dit M. le garde des sceaux, lorsqu’il explique que nous ne sommes pas prêts. Mais le passé m’a enseigné qu’il fallait parfois insister, sans quoi l’on peut toujours remettre à demain ce que l’on aurait pu faire aujourd’hui.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Erwan Balanant, rapporteur
Nous avons déjà largement débattu du sujet. Si j’ai retiré mon propre amendement, c’est pour que nous avancions. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Pour preuve, s’il en était encore besoin, de ma volonté d’avancer sur le sujet, sachez que j’ai convoqué il y a quelques jours une nouvelle réunion du Comité national de la justice restaurative. Je crois en effet à la justice restaurative, et je veux que nous allions dans ce sens. Il me semble cependant que l’obligation d’information risque de susciter des frustrations, car nous ne sommes pas en mesure de proposer ce type de procédure dans tous les ressorts judiciaires. À défaut d’un retrait de l’amendement, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Gosselin.
M. Philippe Gosselin