XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Deuxième séance du jeudi 06 octobre 2022

Sommaire détaillé
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Deuxième séance du jeudi 06 octobre 2022

Présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Félicitations à Mme Annie Ernaux, lauréate du prix Nobel de littérature

    Mme la présidente

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    En votre nom à tous, je tiens à adresser les félicitations de la représentation nationale à notre compatriote Mme Annie Ernaux, lauréate du prix Nobel de littérature 2022. (Mmes et MM. les députés, ainsi que Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État chargée de l’écologie, se lèvent et applaudissent longuement.)

    2. Limitation de l’engrillagement des espaces naturels et protection de la propriété privée

    Discussion d’une proposition de loi adoptée par le Sénat

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée (nos 134, 279).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’écologie.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État chargée de l’écologie

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    La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui poursuit un travail engagé dans les deux chambres. Ce travail entre les deux assemblées mais également entre les groupes parlementaires doit être salué. Il est l’exemple même que l’engagement du Parlement, lorsqu’il cherche le consensus, peut faire bouger les lignes et changer le quotidien des Français.
    À l’origine de la présente proposition de loi existe un constat commun et sans appel : celui que nous avons la responsabilité, Gouvernement, parlementaires comme élus locaux, de nous engager pour la préservation de la richesse des paysages et de la biodiversité, en Sologne en particulier. Or, nous le savons, celle-ci a été défigurée par la pratique de l’engrillagement, une pratique documentée et établie. L’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd) et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) en ont rappelé l’ampleur en 2019 : plus de 3 000 kilomètres de grillages, au minimum, avaient été recensés dans les trois départements du Loiret, du Cher et du Loir-et-Cher.
    Deux propositions de loi ont été déposées lors de la précédente législature : celle de François Cormier-Bouligeon à l’Assemblée nationale, et celle de Jean-Noël Cardoux au Sénat.

    M. Philippe Vigier

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    Sans oublier l’excellent Richard Ramos !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    C’est cette dernière qui a été reprise par le groupe Démocrate, pour laquelle Richard Ramos a mené un travail important de concertation que je salue.

    M. Philippe Vigier

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    Bravo !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Personne ne pourra nier la nécessité de légiférer face à l’attente forte dans nos territoires et l’enjeu écologique auquel nous sommes confrontés. Il n’est plus acceptable de laisser l’engrillagement se développer en Sologne, ni même de prendre le risque de son extension. Il résulte parfois de pratiques purement cynégétiques ou relève de la protection de la propriété privée. Quoi qu’il en soit, ces pratiques doivent être régulées.
    Je le précise d’emblée, le texte prend en compte les exemptions indispensables, notamment pour la sécurité publique ou le développement écologique de nos territoires. Les clôtures nécessaires à la protection des routes ou des voies ferrées, à la régénération forestière ou encore aux activités agricoles, ne sont évidemment pas concernées par la proposition de loi. Ce que les sénateurs et les députés ont cherché à faire, et que le Gouvernement soutient, c’est à diminuer les conséquences de cette pratique sur les paysages.
    L’impact écologique, pour commencer : il se traduit par des ruptures de continuité alors même que nous avons besoin de plus de fluidité. Dans un contexte de changement climatique et d’atteinte aux habitats naturels, il est essentiel que les espèces se déplacent sans contrainte.
    En Sologne, particulièrement, les espaces sont malheureusement devenus au fil des années bien trop fragmentés, ce qui emporte aussi des conséquences sanitaires : la maladie de Lyme, par exemple, se développe davantage dans des espaces divisés.
    C’est tout l’objet de l’article 1er qui a vocation à garantir la continuité écologique entre les propriétés. Ainsi les clôtures ne pourront plus être hermétiques et devront désormais laisser passer les animaux. Nous allons par ailleurs nous appuyer sur la notion de zones naturelles qui présente l’avantage d’être clairement identifiée au plan local d’urbanisme (PLU), tout en épargnant les zones agricoles.
    La présente proposition de loi doit également rendre leur beauté aux paysages. Les clôtures défigurent nos campagnes. C’est ce qui incite les élus comme les citoyens à se mobiliser. Je remercie tous ceux qui se sont emparés du sujet, pour le faire connaître et le documenter.
    Le troisième impact porte sur la capacité à lutter contre les incendies car l’engrillagement entrave la circulation des engins de secours. Nous l’avons constaté cet été lors des incendies survenus en Gironde comme en Bretagne ; le risque d’incendie augmente partout sur le territoire et touche des régions traditionnellement épargnées. Nous devons donc mieux adapter nos forêts à ce risque en veillant à ce que les engins puissent accéder à ces zones. Or les clôtures ne font qu’en compliquer l’accès.
    Ce texte aborde le sujet de l’engrillagement, qui empêche la circulation des animaux sauvages. Il répond, en ce sens, à certaines des critiques qui visent la chasse en enclos et nous appelle sans doute à aller plus loin, en incitant notamment les établissements concernés à adopter des pratiques différentes.
    Nous l’avons compris lors des discussions en commission et à la lecture des amendements que vous avez déposés, la date de 2005 fait débat. Elle constitue une accroche intéressante du point de vue juridique car elle a introduit l’autorisation de chasser en tout temps et en tout lieu dans les enclos, poussant les propriétaires à s’engrillager plus encore. Vos débats ont toutefois souligné qu’elle semble une référence encore trop récente pour avoir une efficacité qui satisferait les acteurs locaux. Nous y reviendrons pendant cette séance.
    L’idée de faire débuter l’obligation de réaménagement des clôtures en se référant à trente ans en arrière présente un double avantage : elle paraît plus efficace dans le temps pour mettre fin à cet état de fait qu’est l’engrillagement ; et, en se fondant sur la prescription trentenaire en matière de droit à la propriété, elle répond aux exigences du Conseil constitutionnel. En contrepartie, l’article 4 donne la possibilité aux propriétaires de mobiliser l’écocontribution pour financer des barrières respectueuses du passage des animaux à la place des grillages.
    J’ai également compris des débats au Sénat comme à l’Assemblée nationale que l’article 2 constituait un point sensible de la proposition de loi. D’un côté, les intrusions volontaires caractérisées doivent être sanctionnées. De l’autre, il apparaît difficilement justifiable de sanctionner d’une contravention de classe cinq les intrusions, particulièrement si elles sont involontaires, alors que ce dispositif s’appliquera sur tout le territoire. Au cours de pratiques de loisirs, on ignore parfois que l’on se situe sur un terrain privé, les démarcations en forêt, à différents endroits du territoire, n’étant pas toujours clairement matérialisées. Nous devons en tenir compte.
    La proposition de loi a aussi des conséquences sur la prévention des dégâts agricoles et forestiers. En effet, nous allons ouvrir des propriétés sur lesquelles vit du grand gibier qui, lorsqu’il est en surabondance, cause des dégâts, menace la régénération des forêts et peut être porteur de maladies infectieuses. L’enlèvement des grillages ne doit pas accentuer ces problèmes en périphérie des espaces concernés. Nous devrons y être vigilants.
    C’est dans cet esprit que je souhaite publier prochainement un décret – qui est en préparation de longue date – renforçant l’obligation de respecter une densité maximale de sangliers dans les enclos.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Très bien !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Interdire la surdensité est une façon de dissuader l’engrillagement, et cela me semble conforme à une certaine éthique de la chasse.
    Enfin, cette proposition de loi nécessitera également de poursuivre le travail sur le terrain, afin d’engager une action efficace, qui se concrétise le plus rapidement possible. Les documents d’urbanisme devront être complétés et mis à jour pour que la loi porte pleinement ses effets. Le dialogue devra donc être engagé très prochainement avec les acteurs de terrain, les propriétaires comme les élus, les fédérations départementales des chasseurs comme les associations écologiques, pour que cette transition se déroule dans les meilleures conditions.
    En conclusion, je suis persuadée que la présente proposition de loi sera une contribution réellement significative et efficace en faveur de la biodiversité. Je suis attachée à sa réussite pour nos territoires et leurs habitants. J’y veillerai à chaque étape du processus, qui se poursuivra au Sénat. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Richard Ramos, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

    M. Philippe Vigier

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    L’excellent Richard Ramos !

    M. Richard Ramos, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

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    « Je rêve d’un peuple qui commencerait par brûler les clôtures et laisser croître les forêts ! » : j’ai souhaité partager avec vous cette phrase magnifique du philosophe, naturaliste et poète américain Henry David Thoreau,…

    M. Philippe Vigier

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    Très bien !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    …dans laquelle il décrit son amour pour la nature, une nature libre, sans grillages, où les animaux sauvages se promènent à leur guise, sans entraves, librement en harmonie avec la nature. Cette citation est également en harmonie avec la proposition de loi visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée, présentée aujourd’hui dans l’hémicycle dans le cadre de la niche du groupe Démocrate (MODEM et indépendants). Je remercie l’ensemble des députés de mon groupe pour leur soutien sans faille.

    M. Philippe Vigier

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    Absolument !

    M. Olivier Falorni

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    Très bien !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Rappelons que cette proposition de loi a été adoptée à l’unanimité par les membres de la commission du développement durable le 28 septembre dernier. Je remercie chaleureusement son président Jean-Marc Zulesi pour l’excellente conduite de nos travaux.

    M. Jean-Marc Zulesi, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

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    Merci.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Je salue ici le sénateur Jean-Noël Cardoux, du groupe Les Républicains, auteur de la proposition de loi initiale – également adoptée à l’unanimité au Sénat – et le remercie d’avoir écrit un premier texte courageux.

    M. Nicolas Forissier

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    Courageux et réfléchi !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Un texte courageux de la part de ce chasseur, visant à lutter contre l’engrillagement qui se propage en France d’année en année et à favoriser la biodiversité.
    Remercions également Bastien Lachaud et François Cormier-Bouligeon qui avaient déposé des propositions de loi à l’Assemblée nationale,…

    M. Erwan Balanant

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    On dirait le discours d’un lauréat de prix Nobel !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    …ainsi que l’ensemble des députés de tous les groupes politiques qui ont participé à l’écriture du texte en commission, notamment Mme Lisa Belluco, M. Stéphane Delautrette, Mme Manon Meunier et Mme Mathilde Paris, ainsi que M. Nicolas Sansu. Cette liste n’est évidemment pas exhaustive.
    Le phénomène n’est pas nouveau : il est présent depuis des décennies en France, notamment en Sologne, où des propriétaires terriens ont engrillagé et engrillagent encore leurs domaines, avec des clôtures enterrées dont la hauteur peut atteindre 2 mètres.

    M. Philippe Vigier

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    C’est vrai !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Depuis le XIXe siècle, la loi autorise un propriétaire à clore son domaine. Nombre d’entre eux ont donc engrillagé le leur pour se protéger des intrusions. Mais certains y pratiquent du ball-trap vivant au cours duquel les animaux sont tués sans aucune chance de s’échapper. (M. Philippe Vigier applaudit.) Cette pratique n’est pas de la chasse mais une tuerie organisée par des enfants gâtés et irresponsables ! (M. Erwan Balanant applaudit.)

    M. Olivier Falorni

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    Ça, c’est envoyé !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Si la Sologne est le territoire le plus touché par l’engrillagement, elle est loin d’être la seule concernée. En effet, les Landes, la Somme, la Bourgogne ou encore le sud de l’Île-de-France recouvrent également des territoires au sein desquels les clôtures sont nombreuses. Les animaux sauvages et la nature sont les grandes victimes de l’engrillagement. En empêchant le libre passage des animaux sauvages, ce phénomène contribue à la rupture des continuités écologiques. Les animaux ne peuvent pas passer les clôtures ; certains s’y éventrent ou s’y prennent les pattes avant une longue agonie. Des images montrant ces animaux pris au piège circulent sur internet et elles sont insoutenables ! Mes chers collègues, nous avons aujourd’hui raison d’agir.

    M. Philippe Vigier

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    C’est vrai !

    M. Olivier Falorni

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    Oui !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    De plus, en période d’incendie, les grillages présentent un réel danger pour la sécurité publique puisque les secours ne peuvent intervenir ; les animaux, eux, se trouvent piégés dans les flammes et ne peuvent fuir le feu – nous l’avons déploré cet été lors des dramatiques incendies survenus notamment dans les Landes.
    Par ailleurs, les clôtures nuisent indéniablement aux paysages et à la beauté des forêts, ce qui ne peut qu’affecter le développement du tourisme rural. Elles constituent en outre un frein à l’exercice de la police de l’environnement, laquelle ne peut pénétrer dans les propriétés closes.
    Il faut mettre fin au fléau de l’engrillagement : cette aspiration est largement partagée dans l’hémicycle et par nos concitoyens. Il s’agit de préserver une nature ô combien fragile. Les animaux sauvages, les arbres, les multiples espèces végétales, les mers, les océans… cette riche biodiversité souffre depuis trop longtemps des agissements de l’homme. Préservons notre nature, chérissons-la ! Soyons à l’image d’un grand écrivain qui vivait dans ma circonscription, Maurice Genevoix, célébré au Panthéon : cet amoureux de la nature en décrivait magistralement les mystères et les couleurs ; il était passionné par son territoire, la Loire et la Sologne. Merci à toi, Maurice Genevoix ! Devant la représentation nationale, je rends hommage à cet auteur qui sublimait la nature par sa plume, et qui plaçait au-dessus de tout la liberté – cette liberté qui lui avait tant manqué durant la Première Guerre. Ses écrits m’ont toujours ému quand j’étais enfant – je pense à ceux qui évoquent la forêt, les étangs de Sologne, la nature, les bruyères et les animaux sauvages, les faisans et les cailles. Je vous invite à lire Routes de l’aventure, comme je l’ai fait dans mon jeune âge.
    J’admire la nature et tout ce qu’elle offre. Comme à vous dans vos territoires, les habitants de ma circonscription me livrent leurs inquiétudes face aux détériorations qu’elle subit. En tant que députés, nous sommes les protecteurs de l’humain, mais aussi de l’humain dans la nature. Or l’engrillagement participe de la dégradation de cette dernière. Je suis évidemment saisi par les associations qui luttent contre ce phénomène depuis de nombreuses années. Nous les avons rencontrées, les avons auditionnées en commission, et avons travaillé avec elles. Elles nous ont fait part de leur désarroi et du combat qu’elles mènent depuis des dizaines d’années face à une situation devenue incontrôlable. Je remercie la famille Louis d’y œuvrer de si longue date…

    M. Nicolas Forissier

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    Très bien !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    …tout comme je remercie Jean-François Bernardin, Dominique Norguet et, bien évidemment, Sébastien Camus, président de l’Association chasseurs promeneurs et faune libre en Sologne, qui est aujourd’hui parmi nous, pour son indéfectible soutien et ses précieux conseils.
    Cette proposition de loi est le fruit d’un long travail en commission. Elle a été améliorée grâce aux contributions de l’ensemble des groupes politiques – c’est l’honneur du travail parlementaire. Lors de nos échanges, le 28 septembre, j’ai souhaité que le désengrillagement s’opère dans l’ensemble des espaces naturels. J’entends aujourd’hui sécuriser au maximum le dispositif. Aussi approuverai-je aujourd’hui un amendement qui concerne, d’une part, les zones naturelles et forestières pour les territoires couverts par un plan local d’urbanisme, et, d’autre part, les espaces naturels pour les territoires non couverts par un document d’urbanisme. En votant ces amendements, je garantirai que le texte s’applique à tous les milieux naturels, sans ambiguïté.
    La commission a également trouvé un consensus concernant les dimensions des éventuelles nouvelles clôtures. Je le répète : il ne s’agit aucunement d’un texte sur la chasse, mais sur la libre circulation des animaux sauvages. Je souhaite que les travaux de la commission et le compromis qu’elle a trouvé se concrétisent rapidement, afin que les territoires soient désengrillagés et que nos paysages retrouvent leur beauté.
    Pas moins de quatre-vingt-dix amendements ont été déposés. Nous aurons à nouveau des débats riches et passionnés concernant le désengrillagement et la liberté des animaux sauvages. Je m’en réjouis, et j’espère que nos discussions seront constructives et respectueuses de chacun. Je suis sûr que vous contribuerez, sur tous les bancs, à le perfectionner. Les habitants des territoires gagnés par l’engrillagement attendent depuis des décennies une limitation des clôtures. L’adoption de notre proposition de loi en commission fut donc historique, et je vous invite à poursuivre ce débat.
    Que ce soit sous l’égide de Marc Fesneau, de Patrick Mignola et, aujourd’hui, du président Mattei, le MODEM a toujours respecté les oppositions. Nous y veillerons particulièrement lors de l’examen de cette proposition de loi. Fidèle à cet esprit que partagent les présidents Mattei, Mignola et Fesneau, je respecterai l’ensemble des propositions issues des oppositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs des groupes RE, LR, HOR et Écolo-NUPES. – M. Roger Chudeau applaudit également.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Hubert Ott.

    M. Hubert Ott

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    Le texte que je vous propose d’adopter, sous l’impulsion du groupe Démocrate, concerne un patrimoine essentiel pour notre pays : les forêts. Dans un monde en proie à une crise climatique, à une crise énergétique et à une crise du vivant, nous avons le devoir de redéfinir la vocation des forêts : elles constituent une ressource essentielle pour répondre aux effets des crises que nous traversons. La forêt est un complexe végétal capable, à lui seul, de tempérer les excès de chaleur et de sécheresse ; en effet, elle libère quotidiennement d’impressionnantes quantités de vapeur d’eau rafraîchissante, par évapotranspiration. La forêt, c’est aussi le bois, qui représente à la perfection le recours à une énergie renouvelable. La forêt, c’est enfin un magnifique écosystème où l’inventivité et la créativité du vivant rendent possible une cohabitation insoupçonnée d’espèces végétales et animales, formant une chaîne du vivant parmi les plus impressionnantes. De fait, les forêts constituent de véritables sanctuaires de biodiversité, qui se perpétuent sans engendrer de dépenses ni grever nos budgets.
    Conséquences directes du changement climatique, les incendies qui se produisent régulièrement depuis plusieurs années, et qui ont durement frappé nos massifs boisés cet été, nous rappellent dramatiquement à une obligation morale : nous devons revoir en profondeur notre conception de ce monde qu’est la forêt.
    Depuis longtemps, les forêts françaises font l’objet d’une approche sylvicole ; ce sont des forêts de production. Notre démarche et notre vision n’excluent en rien cette vocation. Cependant, nous devons la rendre compatible avec une approche authentiquement écologique. Cela implique de choisir le type de production, le rythme de production et la technique les plus aptes à respecter la dynamique naturelle qui fait de la forêt ce qu’elle doit être : un écosystème à part entière, qui n’en est pas moins productif.
    Dans son acception scientifique la plus rigoureuse, l’écosystème désigne la cohabitation de mondes vivants denses, végétaux et animaux, qui perdurent grâce aux équilibres qui s’installent entre les besoins du vivant, les conditions physico-chimiques du milieu et les ressources que celui-ci procure. Si nous savons intégrer ces dimensions à notre réflexion, nous réussirons le pari de conjuguer l’écologie et l’économie forestière, pour apporter une réponse pertinente au défi climatique.
    Chacun des arbres de nos forêts incarne une valeur essentielle, celle du temps long. Si nous apprenions à intégrer le temps long à nos raisonnements économiques et financiers, nous mesurerions la valeur immense que représentent les arbres, et donc la forêt : elle surpasse de loin la valeur des bâtis les plus prestigieux. Reconnaissons donc une dimension patrimoniale à l’arbre qui a besoin du temps long, et à l’écosystème dans lequel il s’épanouit au très long cours. Nous repenserons alors notre économie globale, et pourrons engager, peut-être, une transition « écolonomique ».
    La proposition de loi qui vous est soumise traite un sujet certes précis, mais qui doit être abordé sous tous ses aspects – nous contreviendrions, sinon, à l’ambition économique et écologique que méritent les forêts. Le texte vise à limiter le développement des clôtures autour des forêts privées, lesquelles représentent 75 % de la surface forestière française, soit près de 13 millions d’hectares sur le territoire métropolitain. Cet engrillagement n’est pas sans conséquences. Il a un impact négatif sur le développement économique et touristique des territoires concernés. Il menace en outre la santé des arbres et des sols, de même qu’il réduit l’espace de circulation du grand gibier. Il constitue enfin une atteinte à la biodiversité : les entraves à la circulation du vivant nuisent au brassage génétique des espèces, ce qui provoque une fragilisation et un appauvrissement des peuplements.
    La Sologne, qui compte pas moins de 3 000 kilomètres de grillage, est fréquemment citée pour illustrer ce phénomène. Sans cadre juridique clair, un tel engrillagement outrepasse les dimensions réglementaires. Il ne vise plus à délimiter la propriété privée – sa vocation première –, mais à capter et à retenir le gibier. Outre qu’il enlaidit les paysages naturels boisés, il provoque de grandes difficultés de circulation. Or l’accès à l’ensemble des parcelles forestières est indispensable, notamment pour l’Office français de la biodiversité (OFB), qui remplit des missions essentielles. La situation deviendrait hautement préoccupante en cas de catastrophes naturelles ou des sinistres, comme les incendies qui ont sévi cet été : nos soldats du feu seraient empêchés d’agir avec l’efficacité qui s’impose.
    Je m’attarderai sur les risques provoqués par l’entrave à la libre circulation des animaux sauvages. Non seulement les bêtes peuvent se blesser sur des matériaux coupants, mais encore leur enfermement dans des espaces circonscrits provoque un piétinement des sols forestiers, qui altère la flore muscinale et fongique et nuit à leur caractère spongieux, propice à la rétention naturelle d’humidité. À cela s’ajoute une surconsommation des jeunes pousses, qui empêche la régénération naturelle arborée. Enfin, la concentration excessive de gibier crée un terrain propice à la prolifération de maladies et à la multiplication des risques sanitaires.
    Bien entendu, la proposition de loi prend en considération les besoins des exploitations agricoles et sylvicoles. Elle prévoit des exceptions qui permettront aux agriculteurs de protéger leurs productions et leurs revenus, et aux forestiers de préserver et d’isoler les secteurs de régénération des peuplements boisés. Le texte prévoit par ailleurs des amendes en cas de violation de la propriété privée. Si leur montant peut paraître élevé, elles revêtent avant tout un caractère dissuasif : il s’agit d’assurer la sécurité des usagers qui pourraient se trouver dans une zone de chasse. Si, grâce à cette disposition, une seule vie peut être sauvée, cette mesure sera plus que justifiée.
    Je tiens à saluer l’ensemble de mes collègues, ainsi que les députés des groupes d’opposition, qui, lors de l’examen du texte en commission, loin de l’effervescence de l’hémicycle, au deuxième sous-sol du bâtiment, se sont entendus sur la plupart des amendements et ont abouti à un vote unanime. Cher président Zulesi, la préservation des forêts permet, mieux encore que le football, de rapprocher celles et ceux qui ne cheminent pas ensemble habituellement ! (M. Jean-Marc Zulesi, président de la commission, sourit.)
    Nous avons longuement débattu de la rétroactivité du dispositif de mise en conformité des clôtures. Après une large concertation, nous proposerons aujourd’hui une prescription trentenaire des terrains privés : seraient concernées par la mise en conformité les clôtures de moins de trente ans à la date de publication de la loi.
    Je vous invite à faire collectivement honneur à nos forêts et au grand patrimoine français qu’elles incarnent, en votant une proposition de loi qui favorisera la libre circulation des animaux, qui préservera la santé du gibier sauvage, qui incitera à remplacer les barrières artificielles par des barrières naturelles, qui contribuera à une multiplication des essences d’arbres et d’arbustes, et qui enrichira le paysage et le patrimoine forestier – tout ceci, en ayant à cœur de préserver la sylviculture. Le texte est en phase avec nos objectifs de décarbonation et de protection des forêts. Il est à l’image de l’équilibre recherché par M. le rapporteur et le groupe Démocrate : il s’agit de faire converger les intérêts agricoles, de loisirs et sportifs avec les obligations de protection, de préservation et de régulation chères à nos concitoyens. Je saisis cette occasion pour saluer le travail de notre rapporteur, Richard Ramos, et du sénateur Jean-Noël Cardoux.

    M. Nicolas Forissier

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    Très bien !

    M. Hubert Ott

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    Face au défi climatique, énergétique et écologique qui s’annonce, je souhaite, avec mes collègues du groupe Démocrate et indépendants – et avec vous tous, je l’espère – que nous adoptions ce texte au plus vite, afin que nous puissions libérer nos forêts et leur permettre d’exprimer pleinement leur bienfaisante dynamique naturelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Roger Chudeau applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    Comme vous le savez, la libre circulation de la faune sauvage est un prérequis indispensable aux politiques de préservation de la biodiversité dans nos territoires. Ainsi, le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour préciser le statut des trames verte et bleue. Les lois Grenelle 1 et 2, complétées par la loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, ont sanctuarisé cette approche et introduit l’obligation pour les propriétaires et gestionnaires d’espaces naturels de maintenir la libre circulation de la faune sauvage.
    Malgré cette attention particulière du législateur, nous sommes nombreux à observer dans notre circonscription le développement souvent incontrôlé de clôtures en milieu naturel, notamment dans le cadre de la création de nouveaux enclos de chasse. Si le code civil indique effectivement que « tout propriétaire peut clore son héritage », la jurisprudence veille à ce que ce droit respecte les éventuelles servitudes et ne soit pas utilisé de manière abusive. La Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler que si le propriétaire a le droit de se clore, il n’en reste pas moins tenu au respect des prescriptions fixées par la loi ou par décret en ce qui concerne l’édification de ces clôtures ou les droits des tiers. Comme bien souvent, la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres.
    C’est notamment pour cette raison que le législateur a souhaité ouvrir aux élus locaux la possibilité de réguler par le code de l’urbanisme l’édification des clôtures dans les zones agricoles et naturelles lors de l’élaboration des PLU. Quand de telles dispositions sont prises, les maires ont souvent bien des difficultés à les faire appliquer, comme me l’a appris ma propre expérience de maire.
    Constatant que l’arsenal législatif en vigueur est manifestement incomplet et insuffisant pour traiter cette question de l’engrillagement des zones naturelles, nos collègues sénateurs avaient soulevé ce problème en janvier. Aussi tiens-je à saluer l’initiative de notre collègue Richard Ramos, qui propose de nous pencher à notre tour sur ce sujet.
    Lors de l’examen du texte en commission, de nombreux échanges ont porté sur un point de désaccord concernant la date d’installation à partir de laquelle les clôtures seraient concernées par les dispositions de ce texte. Ces discussions ont abouti à un dénouement pour le moins inattendu ! En effet, c’est finalement la date de 1985, en référence à la loi du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en œuvre de principes d’aménagement, qui a été retenue sur la base d’un amendement défendu par le Rassemblement national et voté par les membres de la majorité. Or vous aviez la possibilité, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les membres de la majorité, d’améliorer la portée de ce texte en votant l’amendement de Manon Meunier qui tendait à supprimer l’année de référence. Vous ne l’avez pas fait…

    M. Erwan Balanant

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    Entre 2012 et 2017, rien n’avait été fait sur le sujet ! On avance comme jamais auparavant.

    M. Stéphane Delautrette

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    …alors qu’au sein de la majorité, le groupe Renaissance avait pourtant initialement déposé un amendement en ce sens.
    Soyons clairs, les députés du groupe Socialistes et apparentés auraient préféré une telle évolution. Mais nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen des amendements à l’article 1er visant à remplacer la référence à l’année 1985 par une interdiction applicable aux clôtures installées dans les trente dernières années.
    En tout cas, cette proposition de loi marque une avancée en faveur de la biodiversité et de la préservation du milieu naturel. Pour cette raison, sous réserve des débats à venir, le groupe Socialistes et apparentés maintiendra son vote en faveur de ce texte. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, Écolo-NUPES, GDR-NUPES et sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Thiébaut.

    M. Vincent Thiébaut

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    Landes, Picardie, Normandie, Sologne surtout : voici quelques-uns des territoires touchés par le développement croissant et incontrôlé de l’engrillagement des espaces naturels. Ce phénomène aux conséquences dramatiques s’amplifie en effet depuis plusieurs années. La loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a sanctuarisé les différents avantages dont bénéficient les espaces hermétiquement clôturés : l’exemption du plan de chasse, la non-participation au remboursement des dégâts ou encore la possibilité de déroger aux dates d’ouverture et de fermeture de la chasse. Par conséquent, elle a entraîné une forte dynamique d’engrillagement des espaces naturels, que doit briser le texte que nous examinons aujourd’hui.
    Je remercie le sénateur Jean-Noël Cardoux de l’avoir déposé. Je pense également à François Cormier-Bouligeon qui avait déposé ici en 2021 une proposition semblable, que j’avais d’ailleurs cosignée. Je remercie enfin le groupe Démocrate et M. le rapporteur de s’être à leur tour saisis du sujet.
    Les conséquences de l’engrillagement des espaces naturels sont désastreuses pour la biodiversité. Les grillages empêchent en effet la libre circulation des animaux, ce qui perturbe leurs besoins écologiques et leur habitat naturel. En outre, ils peuvent conduire à la surconcentration d’animaux dans une zone restreinte, ce qui entraîne, comme l’a souligné le rapport de référence rendu en août 2019 par Michel Reffay et Dominique Stevens, le piétinement des sols, la diminution de l’apport des nutriments aux sols, et donc un appauvrissement de l’écosystème forestier.
    Les conséquences de l’engrillagement ne s’arrêtent pas là. En plus d’entraver la circulation des promeneurs et de dégrader les paysages, il pose de graves problèmes de sécurité. Ainsi, lors des incendies de cet été, les grillages ont limité l’intervention des services de secours et ont entraîné des dégâts dévastateurs pour la faune, emprisonnée dans leur enceinte.
    L’importance de cette proposition de loi est donc évidente pour tous. Il convient d’ailleurs de souligner qu’elle ne porte atteinte ni au droit de propriété ni au droit de chasse. Elle vise avant tout à limiter le phénomène d’édification de clôtures à des fins de chasse commerciale ou de loisirs, très éloigné de l’esprit de la chasse traditionnelle et aux graves conséquences.
    C’est pourquoi, au nom du groupe Horizons et apparentés, je remercie M. le rapporteur pour son implication, pour son engagement et pour les qualités d’écoute et de considération qu’il a montrées lors de l’examen du texte en commission. En effet, les dix articles de cette proposition de loi sont non seulement le fruit de son travail, mais aussi celui de discussions bienveillantes et fertiles pour lesquelles je remercie l’ensemble des représentants des groupes. (M. Richard Ramos, rapporteur, hoche la tête.) Plusieurs amendements ont ainsi été adoptés, enrichissant le texte. Ils reflètent incontestablement la volonté que nous avons tous, quelle que soit notre sensibilité politique, de protéger la biodiversité. Ils reflètent notre volonté d’apporter des réponses concrètes et rapides à un problème qui s’étend à tous nos territoires. Avec ce texte, nos forêts, nos faunes et nos flores seront protégées, sauvegardées et régénérées.
    Les discussions en commission ont permis la construction transpartisane d’un texte ambitieux. Le groupe Horizons et apparentés souligne l’extension du périmètre d’application de la loi à l’ensemble des espaces naturels, et non seulement à la trame verte comme cela était initialement proposé. Sa mise en application a également été avancée, notamment grâce à l’amendement proposé par M. Cormier-Bouligeon et adopté par la commission visant à la réduction du délai de mise en conformité des clôtures, dont le terme est désormais fixé au 1er janvier 2027. Enfin, les débats en commission ont déterminé que les dispositions du texte seraient applicables aux clôtures installées après la loi du 18 juillet 1985 – nous reviendrons sur ce point en proposant un amendement plus ambitieux et plus conforme à l’esprit de la proposition.
    Je rappellerai enfin que ce texte ne contrevient en aucune manière au droit de chasse. La chasse est en effet utile non seulement à l’équilibre de la biodiversité, mais aussi à l’équilibre du cycle sylvogénétique, car sauver les forêts implique entre autres de contrôler la population de gibier. Le texte répond avant tout aux préoccupations des Français et des élus locaux : il protège le droit de propriété et constitue une avancée en matière de protection de la biodiversité. Vous pouvez donc compter sur le vote des députés de notre groupe. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et Dem ainsi que sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco.

    Mme Lisa Belluco

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    Je débuterai mon propos en remerciant, une fois n’est pas coutume, mes collègues Démocrates d’avoir réservé à cette proposition de loi une bonne place dans leur niche parlementaire. Je me réjouis que nous abordions ici ces enjeux, notamment ceux qui concernent la préservation des écosystèmes.
    L’engrillagement des espaces naturels est un fléau qui touche principalement la Sologne,…

    M. Jean-Marc Zulesi, président de la commission

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    (En souriant.) On le saura !

    Mme Lisa Belluco

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    …mais pas seulement. La Picardie, les Landes ou encore la Normandie voient aussi leurs forêts traversées par des kilomètres de clôtures grillagées, au détriment de la faune sauvage et des cueilleurs de champignons. Il existerait, d’après feu l’ONCFS (Office national de la chasse et de la faune sauvage), environ 1 300 parcs et enclos en France, qui contiennent au total entre 50 000 et 100 000 animaux.
    Alors que se déroule sous nos yeux la sixième extinction de masse du vivant, il importe de rappeler que la fragmentation des habitats est une des principales causes d’effondrement de la biodiversité. Afin de préserver leur diversité génétique, les animaux ont en effet besoin de pouvoir se déplacer sur un territoire étendu. En entravant la libre circulation de la faune sauvage, l’engrillagement a un impact considérable sur la pérennité des espèces.
    Évoquons tout de même les enclos de chasse, car c’est bien à cela que servent les grillages. Dans ces enclos, tout est permis, comme l’ont rappelé M. le rapporteur et les orateurs précédents. Ils apparaissent comme des zones franches où les règles communes ne s’appliquent pas. On y chasse toute l’année des animaux souvent issus d’élevages, parfois exotiques, qui n’ont pas la possibilité de s’échapper. Cela pose des questions éthiques, au dire même de certains chasseurs.
    Cette proposition de loi enfonce un coin dans cette pratique barbare en imposant la perméabilité d’un grand nombre de clôtures qui ne pourront donc plus servir d’enclos. Je salue, moi aussi, le travail effectué en commission, qui a permis d’accentuer l’ambition de ce texte. Mais s’il permet des améliorations importantes, nous pensons qu’il faut aller encore plus loin – je vois que cela vous fait sourire, monsieur le rapporteur. Nous proposerons des amendements en ce sens. Nous avons aujourd’hui l’occasion de mettre définitivement fin, selon votre expression, au « ball-trap vivant » que constitue la chasse en enclos.
    Au passage, j’aimerais rappeler que cette chasse est le loisir d’une infime minorité de privilégiés. Elle draine des sommes d’argent importantes pour le plaisir de riches industriels, de rentiers, d’aristocrates de tout poil.

    M. Nicolas Forissier

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    Ce n’est pas ainsi qu’il faut en parler.

    Mme Lisa Belluco

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    Dans le moindre enclos bas de gamme, le droit d’abattre un sanglier se monnaye au moins à 300 euros. Les prix s’envolent quand il s’agit d’abattre un individu d’une espèce exotique et certains sont prêts à payer jusqu’à 4 000 euros pour avoir l’occasion de torturer et d’abattre un grand cerf à demi apprivoisé, car issu de l’élevage, et qui n’a aucune chance de s’échapper. À ceux qui voudraient avancer l’argument que la chasse est une activité populaire, je réponds donc d’avance : « Oui, mais pas la chasse en enclos ! » Cette chasse-là n’a absolument rien à voir avec le droit à chasser obtenu par le peuple lors de la Révolution française. Cette chasse-là est celle des classes méprisantes et destructrices, les mêmes qui sont à l’origine de l’exploitation des femmes et des hommes et de la destruction de la planète.

    M. Nicolas Forissier

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    Il n’y a pas besoin de dire cela !

    Mme Lisa Belluco

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    Au-delà de la chasse en enclos, il conviendrait aussi de profiter de l’opportunité qui nous est offerte de nous interroger sur les pratiques délétères de certains chasseurs. Je pense notamment à l’agrainage et à l’affouragement, c’est-à-dire le fait de nourrir le gibier afin de concentrer les individus chassables en un même secteur pour le plus grand plaisir de nos amis « les premiers écologistes de France ». La concentration d’animaux peu farouches dans un périmètre réduit a souvent pour conséquence la dégradation des cultures environnantes.
    Ce texte aborde un autre sujet d’importance : l’accès à la nature. Il paraît nécessaire, si nous limitons la possibilité de clôturer des terrains, de permettre en contrepartie la protection de la propriété privée par d’autres moyens. En ce sens, l’article 2 instaure la possibilité de sanctionner par une amende de quatrième classe toute personne qui s’introduirait dans une parcelle privée. Si cette mesure semble au premier abord frappée au coin du bon sens, elle risque en fait de limiter très fortement l’accès de tout un chacun à la nature.
    En effet, 75 % des forêts françaises sont privées. Cette disposition permettrait donc, par l’installation de quelques panneaux, d’interdire à quiconque de s’y promener. Avant de prendre une telle décision, il nous paraît nécessaire d’approfondir la réflexion sur l’accès à la nature et les usages de celle-ci. Nous souhaitons donc le retrait de l’article 2 – j’y reviendrai lorsque nous en discuterons.
    En conclusion, ce texte comporte des avancées indéniables pour les forêts de Sologne et d’ailleurs ainsi que pour la faune sauvage qui y vit. Il nous offre en outre l’occasion de remettre en question certaines pratiques et notre rapport collectif aux forêts et à la nature. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    M. Nicolas Sansu

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    Très bien !

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à quinze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures cinquante.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu

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    Je veux tout d’abord remercier notre rapporteur pour son intervention, où le lyrisme le disputait à l’abnégation, et pour avoir permis la discussion de la proposition de loi visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels dans le cadre de la niche du groupe Démocrate – même si parler de niche à propos d’un texte relatif à l’engrillagement peut paraître incongru. (Sourires.)
    Le groupe GDR se réjouit en effet de l’examen de ce texte qui vise à garantir la libre circulation des animaux sauvages dans les territoires concernés par les pratiques d’engrillagement des espaces naturels, à commencer par notre belle Sologne, où se trouve la plus belle forêt de France, bien entendu.
    Le développement incontrôlé depuis plus de vingt ans des clôtures en milieu naturel ne porte pas seulement préjudice aux animaux sauvages, il nuit également à la biodiversité et à la qualité de nos paysages et s’inscrit dans une logique de privatisation de nos espaces forestiers qui en exacerbe les conflits d’usage. Un tel usage appropriatif de la nature – cette belle nature à laquelle le système capitaliste financier inflige tant de cicatrices – suscite des interrogations. Qu’il semble loin, désormais, le temps où l’État invitait les collectivités propriétaires de forêts et les propriétaires forestiers privés à l’imiter et à accueillir plus largement le public.
    Le texte que vous nous proposez, monsieur le rapporteur, ne s’aventure pas à reconnaître la fonction sociale de la forêt et il se risque moins encore à promouvoir la diversification de ses usages – j’en profite d’ailleurs pour rappeler qu’il est temps de redonner à l’Office national des forêts les moyens qui lui sont dus pour accomplir sa mission de gestion de la forêt.
    La proposition de loi marque néanmoins une belle avancée, significative ; les travaux de la commission ont permis d’en améliorer la rédaction. Alors que le texte du Sénat faisait référence de manière trop limitative aux clôtures implantées dans une trame verte, il est désormais prévu que les dispositions de l’article 1er s’appliqueront à l’ensemble des espaces naturels. Cette extension est tout à fait bienvenue, de même que le fait de ramener de sept à cinq ans le délai de mise en conformité des clôtures existantes.
    Nous nous réjouissons par ailleurs que la commission ait adopté un amendement précisant que les dispositions de l’article 1er s’appliquent non seulement aux clôtures installées après la date de publication de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, mais aussi à celles qui ont été aménagées à une date bien antérieure. À cet égard, il me paraît préférable de conserver la date de 1985 plutôt que de retenir une durée de trente ans.
    L’engrillagement de la Sologne, des Landes et d’autres forêts ne date pas, en effet, de 2005, même si cette loi funeste a assurément provoqué une accélération du phénomène en permettant aux propriétaires d’enclos de bénéficier d’un régime dérogatoire qui les autorise à chasser le gibier à poil toute l’année, sans plan de gestion ni contribution aux dégâts de gibier.
    Nous regrettons que le texte n’aille pas jusqu’à interdire la chasse en enclos à caractère commercial, qui n’a rien d’une chasse et s’apparente plutôt à l’abattage d’animaux quasi domestiques, à un jeu entre amis bien peu glorieux. Mais nous regardons comme une avancée la possibilité désormais offerte aux gardes de l’Office français de la biodiversité d’aller voir ce qui se passe dans ces enclos sans avoir à saisir le juge des libertés et de la détention en cas de refus du propriétaire.
    Nous considérons enfin que le texte issu de la commission résout favorablement la question des contraventions en cas d’intrusion sur une propriété privée lorsque cette intrusion est involontaire – tout au moins en partie. La rédaction du Sénat, qui prévoyait de punir d’une contravention de cinquième classe d’un montant maximal de 1 500 euros la pénétration dans la propriété rurale ou forestière d’autrui, même sans y commettre de dommages, n’était pas acceptable.
    Nous étions, pour notre part, favorables à une contravention de deuxième classe. Mais la solution proposée par notre rapporteur et retenue par la commission, qui consiste à ne sanctionner la violation d’une propriété que dans le cas où le caractère privé du lieu est clairement identifié par une signalétique spécifique nous paraît acceptable, en tout cas nettement plus proportionnée. Je veux cependant assurer nos collègues de la NUPES du soutien du groupe GDR sur la question de la suppression de l’article 2.
    Pour conclure, nous ne pouvons qu’accueillir favorablement la proposition de loi, compte tenu, d’une part, des incidences désastreuses de l’engrillagement sur la sauvegarde de la biodiversité et, d’autre part, des risques sanitaires, de surdensité et de maîtrise des populations liés à la chasse en enclos. Comme vous l’avez indiqué, madame la secrétaire d’État, un changement des pratiques est nécessaire.
    C’est un pas décisif que vous nous proposez de franchir, monsieur le rapporteur, et je vous remercie une fois encore. Le groupe GDR vous soutiendra et concourra à la traduction sur le terrain, dans nos départements, des décisions que nous allons prendre. Nous voterons en faveur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

    M. Jean-Louis Bricout

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    Dans de trop nombreux territoires, nos paysages sont lacérés par des milliers de kilomètres de clôtures. La situation de la Sologne, souvent prise en exemple, est caractéristique à cet égard, mais elle est malheureusement loin d’être la seule à souffrir de la prolifération des grillages. Dans les Landes, en Normandie et chez moi, en Picardie, les barrières se multiplient.
    Cet engrillagement, qui résulte majoritairement de la création d’enclos de chasse, a des conséquences importantes : non seulement il empêche le libre passage des animaux et le nécessaire brassage génétique, mais il complique l’intervention des pompiers en cas d’incendie – or les récents évènements nous obligent, à cet égard – et porte préjudice aux promeneurs ainsi qu’à tous ceux qui souhaitent profiter de la nature.
    C’est la raison pour laquelle il est urgent de lutter contre un phénomène qui est devenu abusif. Il ne s’agit pas, ici, de remettre en cause le droit de propriété ni de jeter chasseurs et non-chasseurs les uns contre les autres ; il s’agit avant tout de préserver la biodiversité et le droit de chacun à profiter de la nature.
    Pour le groupe LIOT, les solutions proposées par la proposition de loi sont équilibrées. Le texte a fait consensus au Sénat et, lors de son examen par la commission du développement durable de notre assemblée, de nouveaux compromis ont été trouvés qui ont permis d’accroître sa portée.
    Nous sommes en particulier favorables au fait d’imposer une mise en conformité des barrières construites dès 1985, et non plus exclusivement celles construites à partir de 2005. Le phénomène d’engrillagement ayant pris de l’ampleur à compter des années 1980, cette mesure permettra de lutter efficacement contre la prolifération des barrières. Aussi nous opposerons-nous aux amendements qui visent à revenir sur ces avancées.
    Oui, le choix qui a été fait d’étendre les dispositions à l’ensemble des espaces naturels va dans le bon sens et permettra de s’attaquer à l’engrillagement des chemins ruraux – une problématique qui tient particulièrement à cœur aux membres du groupe LIOT.
    Oui, il est légitime de rétablir le droit commun dans les enclos hermétiquement fermés.
    Oui, il est nécessaire de protéger la propriété. Actuellement, est sanctionné le fait de chasser sur le terrain d’autrui sans son consentement si le terrain est clôturé. Nous estimons qu’il faut aller plus loin et interdire la chasse à moins de 50 mètres de toute habitation, qu’il y ait une clôture ou non.
    Enfin, nous sommes favorables à l’utilisation du fonds biodiversité pour financer le remplacement des clôtures par des haies, à condition toutefois qu’elles soient constituées d’espèces locales ; cette décision, qui favoriserait l’acceptabilité de la mesure, concourt à l’objectif fixé par le programme Plantons des haies !, qui vise à replanter 7 000 kilomètres de haies.
    En somme, le groupe LIOT souhaite préserver les équilibres du texte tel qu’il a été adopté en commission et s’opposera à toute mesure revenant sur ces acquis.
    Pour conclure, je me réjouis, madame la secrétaire d’État, de l’intérêt que vous avez manifesté pour la rédaction d’un décret définissant une densité maximale de sangliers dans les enclos. Vous témoignez ainsi une belle attention à nos exploitants agricoles.
    Comme disait Aristote, le spectacle de la nature est toujours beau. À nous de continuer à le préserver ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et Dem.)

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Il y a cinq ans, peu après avoir été élu pour la première fois, je rencontrais à leur demande les Amis des chemins de Sologne, Marie et Raymond Louis, qui venaient me parler de leur région.
    Je la connais bien, notre Sologne. Berrichon de naissance, Berrichon de toujours, je parcourais ses chemins dans ma jeunesse avec la « Première Bourges », ma troupe de scouts de France.
    Mais depuis bien des années, comme tous les Solognots, comme tous les amoureux de notre magnifique forêt, je la voyais avec tristesse se couvrir de clôtures, de hauts grillages ; je la voyais s’enclore, s’emprisonner.
    C’est ce dont venaient me parler les dirigeants de cette association lanceuse d’alerte, bientôt rejointe par d’autres associations et de nombreux citoyens de toutes les conditions et de toutes les opinions.
    Nos forêts françaises sont belles mais elles sont menacées, par les grands feux, comme nous l’avons vu cet été, mais aussi depuis des décennies par cet engrillagement épouvantable qui balafre nos paysages naturels et qui emprisonne les animaux sauvages par milliers. Ils y sont semi-domestiqués par nourrissage artificiel reposant sur l’affouragement ou l’agrainage avant d’être massacrés par dizaines ou par centaines en un seul week-end – des pratiques qui n’ont, affirmons-le avec la plus grande netteté, strictement rien à voir avec la chasse.
    Cet engrillagement renforce aussi les risques pour la santé et les risques d’incendie, comme l’a souligné Mme la secrétaire d’État.
    Mes chers collègues, nous avons conduit ces dernières années un travail ambitieux et courageux. Je tiens à remercier François de Rugy, alors ministre de la transition écologique et solidaire, qui avait accédé à ma demande d’un rapport pour étudier ce phénomène, en documenter l’importance et formuler des propositions.
    Ce rapport fut rédigé avec compétence par M. Dominique Stevens, membre du Conseil général de l’environnement et du développement durable, et M. Michel Reffay, membre du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux.

    M. Nicolas Forissier

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    Très bien !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Les rapporteurs, que je veux remercier, ont brossé un sombre tableau : ils dénombrent plus de 4 000 kilomètres de hauts grillages, alors qu’il n’y en avait que 110 kilomètres en 1974, comme me le rappelait M. Jacques Baillon en me transmettant le Bulletin de l’Association des naturalistes orléanais datant de cette époque, qui soulignait déjà les risques d’épizooties dans les enclos.
    Il y a donc actuellement, en prenant en compte la seule Sologne, plus de 4 000 kilomètres de grillages coiffés de barbelés, enterrés, qui ne laissent passer aucun animal et, pire, qui piègent ceux qui tentent de les franchir, les laissant, accrochés par une patte, mourir après une agonie atroce. Nous ne voulons plus de cela !
    Des grillages sont désormais installés ailleurs, en Pays-Fort, dans le Sancerrois, en Brenne, en Normandie, en Gironde, en fait partout en France. Il est donc temps de mettre un terme à leur développement !
    Le rapport de MM. Stevens et Reffay a formulé des propositions sur lesquelles s’appuient les amendements du groupe Renaissance que nous avons présentés et adoptés en commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sous la présidence de Jean-Marc Zulesi. Il le fallait !
    En effet, si la proposition de loi du sénateur Jean-Noël Cardoux posait une première pierre et allait dans le bon sens – et nous le remercions pour cette initiative –, les dispositions qu’elle contenait demeuraient très insuffisantes. Ainsi, appuyer nos dispositifs sur la trame verte n’aurait concerné que 6 % de la Sologne. Exonérer de ces dispositifs les clôtures érigées avant 2005 aurait réduit l’effectivité de la loi à moins de 3 %. Nous ne légiférons pas pour résoudre 3 % d’un problème !
    Nous nous réjouissons donc que l’ensemble des groupes de notre assemblée, tant la majorité que les oppositions, avec le soutien de notre rapporteur,…

    M. Philippe Vigier

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    Qui a accompli un travail formidable !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    …aient accepté d’aller dans le sens de l’amélioration de cette proposition de loi que nous défendions.
    Le groupe Renaissance proposera plusieurs amendements pour parfaire le texte. Nous le ferons au nom de ceux qui de tout temps ont aimé et célébré notre forêt, à l’instar de Maurice Genevoix, qu’a invoqué Richard Ramos.
    Les journalistes se sont interrogés sur la paternité de ce texte, mais c’est là un vain sujet. Les vrais initiateurs de ces dispositions, ce sont les amoureux de la Sologne, comme les Amis des chemins de Sologne que j’ai mentionnés en commençant, le cinéaste Nicolas Vanier et l’acteur François Cluzet qui ont si bien défendu la Sologne dans le film L’école buissonnière, Marc Fesneau, soutien fidèle, François Bonneau, président de la région Centre-Val de Loire et Jean-François Bridet, son vice-président chargé de la biodiversité, l’Association des chasseurs et des amis de la Sologne contre son engrillagement, le Comité central agricole de Sologne, l’Association chasseurs promeneurs et faune libre en Sologne, les maires et les élus de Sologne et leurs concitoyens mobilisés pour cette juste et noble cause.

    Mme la présidente

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    Merci de conclure.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Ce sont aussi les chasseurs qui refusent ces pratiques – qui ne sont pas de la chasse mais, au mieux, un effroyable ball-trap cynégétique (M. Vincent Thiébaut applaudit)

    M. Nicolas Forissier

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    Des barbares !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    …ou encore les habitants, les promeneurs, les touristes amoureux de notre nature. Je ne veux pas oublier nos amis de la presse locale, au premier rang desquels Le Petit Solognot. Plusieurs des pionniers de la lutte pour le désengrillagement de la Sologne sont présents dans les tribunes d’où ils suivent nos débats. Je les salue et c’est à eux que je vous prie de réserver vos applaudissements car nous leur devons d’avoir lancé la mobilisation.
    Vive la Sologne et vive les forêts françaises libres ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem, HOR et LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris.

    Mme Mathilde Paris

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    La proposition de loi visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée est un texte très attendu par les associations, les chasseurs ou encore les riverains.
    Je tiens à saluer Marie et Raymond Louis, des Amis des chemins de Sologne, qui ont entamé ce combat il y a vingt-cinq ans ; d’autres les ont suivis, dont certains sont présents dans nos tribunes. Nous avons tous en tête les images des terribles incendies de Gironde, où des animaux ont été pris au piège par les flammes et où l’intervention des pompiers était ralentie par les grillages. En tant que députée de la Sologne, territoire défiguré par l’engrillagement massif, où la faune sauvage ne peut plus circuler librement, je suis mobilisée, avec mon collègue Roger Chudeau, pour protéger la Sologne et défendre ce texte aux côtés du rapporteur Richard Ramos et du sénateur Jean-Noël Cardoux.
    Le 27 juillet, je vous interpellais, madame la secrétaire d’État, en soulignant l’urgence de légiférer pour mettre fin aux conséquences de l’engrillagement massif sur nos paysages, sur la biodiversité ou encore sur le risque d’incendie.
    Tout au long de l’été, j’ai rencontré des associations, des élus locaux, des propriétaires mais aussi des fédérations de chasseurs afin de connaître leurs préoccupations. J’ai pu constater sur le terrain les ravages de l’engrillagement en Sologne : des animaux parqués par dizaines dans des enclos aux allures de prison ; des grillages de plus de 2 mètres de haut surmontés de barbelés ; des doubles rangées de grillage ne laissant aucune échappatoire aux animaux ; des chemins de promenade communaux bordés de part et d’autre d’immenses grillages qui défigurent notre belle Sologne. Je tiens à votre disposition, chers collègues, des photos qui vous permettront de mesurer l’ampleur du désastre que constitue l’engrillagement.
    Je suis convaincue que c’est en étant au plus proche du terrain que nous sommes les plus utiles pour trouver des solutions concrètes et enrichir le travail parlementaire. Lors des discussions en commission, notre groupe a proposé des amendements pour répondre à l’inquiétude des différents acteurs qui dénonçaient le champ trop restreint du texte. En effet, ce dernier ne concernait initialement que les clôtures édifiées après 2005 et situées dans une trame verte. Pourtant, dans certains territoires comme la Sologne, la plupart des clôtures ont été édifiées à partir des années 1980. Il était donc indispensable de les inclure dans le champ d’application de la loi. C’est désormais chose faite grâce à l’adoption d’un amendement du groupe RN, et nous nous en félicitons.
    En revanche, malgré ces évolutions favorables obtenues en commission, je ne vous cache pas que la nouvelle rédaction de l’article 2 nous inquiète. Ainsi rédigé, cet article s’inscrit en rupture avec ce qui faisait la force de cette proposition de loi, à savoir l’équilibre entre l’objectif de désengrillagement et celui de protection de la propriété privée.
    Nous proposerons donc de renforcer le régime de la contravention. Nous sommes fermement opposés aux amendements de la NUPES qui visent à supprimer cette contravention ou à diminuer sa classe. Au contraire, nous sommes convaincus que, pour susciter l’adhésion des propriétaires à ce texte, il est indispensable d’entendre leurs préoccupations et de les rassurer en les protégeant davantage contre les intrusions, conformément aux objectifs visés par cette proposition de loi. Plus encore, il convient dès aujourd’hui de prévenir les futurs blocages au Sénat.
    Je vous rappelle les propos du sénateur LR Laurent Somon, rapporteur de ce texte au Sénat, à propos d’un amendement proposant de supprimer la contravention de cinquième classe : « Il remet en cause la protection de la propriété privée voulue par la proposition de loi en compensation de l’abaissement des clôtures : j’y suis bien évidemment défavorable. » Vous le voyez bien, si nous ne revenions pas à la rédaction initiale de l’article 2, nous prendrions le risque que ce texte ne soit jamais adopté au Sénat.
    Monsieur le rapporteur, nous comptons donc sur votre esprit de responsabilité et sur celui de l’ensemble des députés pour faire évoluer ce texte et le faire adopter rapidement compte tenu de l’urgence à légiférer sur cette question. (Applaudissements et « bravo ! » sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    Mme Manon Meunier

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    La biodiversité s’effondre et – mauvaise nouvelle ! – les écosystèmes non plus n’obéissent pas aux lois du marché. Tout gouvernement devrait donc prendre conscience de la nécessité d’organiser une planification poussée et correctement financée pour sauvegarder cette biodiversité. Or si j’en juge par le nombre de fois que nous avons abordé le sujet depuis le début de la législature, il me semble que le Gouvernement n’a pas saisi l’urgence de la situation.
    Expliquons-nous, en revenant sur les faits. La population d’oiseaux en France a diminué de 30 % en trente ans ; dans le monde, 1 million d’espèces animales et végétales sont actuellement menacées d’extinction.
    Or un rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) paru le 8 juillet dernier montre que nous dépendons au quotidien de près de 50 000 espèces sauvages. Les pollinisateurs, par exemple, assurent la reproduction de plus de 80 % de fleurs et de végétaux cultivés dans l’Union européenne. Divers insectes et mollusques participent au recyclage organique et à la recomposition des sols. Chaque espèce est un maillon d’une chaîne alimentaire dont nous faisons partie. Bref, l’être humain appartient au très grand écosystème terrestre et il est donc nécessaire de le préserver.
    Or il semble malheureusement que M. Béchu, pourtant ministre de la transition écologique, ne l’ait pas compris. En effet, seuls 300 millions d’euros sont prévus pour la biodiversité dans le nouveau projet de loi de finances. C’est dérisoire, si l’on considère par exemple les 800 millions d’euros que recevront Vinci et Eiffage pour la construction d’une autoroute payante, trop chère, en Haute-Vienne et en Vienne. On dépense donc 300 millions au niveau national pour la biodiversité, tandis qu’on affecte 800 millions au niveau local à deux entreprises privées afin qu’elles réalisent un projet destructeur de terres agricoles et naturelles.
    Dans un tel contexte, cette proposition de loi qui nous permet enfin de parler de la biodiversité, en proposant l’adaptation des clôtures placées en milieux naturels pour permettre la libre circulation de la faune sauvage, est la bienvenue.
    Je salue d’ailleurs l’esprit de concertation qui a régné au sein de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire ainsi que la mobilisation de la NUPES, qui ont permis d’améliorer le texte. Ensemble, nous avons étendu le champ d’application de la proposition de loi à tous les espaces naturels, prévu que les haies remplaçant les clôtures soient constituées d’espèces végétales locales et diversifiées et réduit la classe de la contravention applicable en cas d’intrusion involontaire dans une propriété privée.
    Mais il reste encore quelques points fort regrettables dans le texte.
    Premièrement, nous tomberons probablement d’accord à l’énoncé de quelques principes fondamentaux relatifs à nos services publics : il convient de rendre ces derniers accessibles à tous nos concitoyens, mais également assurer l’impartialité des agents de l’État qui les animent. Ce dernier principe est encore plus important lorsqu’il s’agit d’exercer un contrôle à visée judiciaire, comme le font les agentes et agents de l’OFB, qui exercent un rôle de police de l’environnement.
    Or certains alinéas du texte visent à confier aux fédérations de chasse une partie du contrôle de l’application du code de l’environnement. Vous comprendrez qu’une telle décision remettrait en cause le principe d’impartialité et que des conflits d’intérêts pourraient se faire jour.
    Si vous jugez que les agents de l’OFB ne sont pas suffisamment nombreux pour effectuer ces contrôles, rien de plus normal : 60 équivalents temps plein (ETP) y ont été supprimés depuis 2020. Mais j’ai une bonne nouvelle : nous examinerons très prochainement le projet de loi de finances, et nous pourrons alors, ensemble, proposer la création des 500 postes supplémentaires demandés par les syndicats pour l’OFB – quand le Gouvernement n’en propose que 15. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)
    Par ailleurs, la contravention de quatrième classe à laquelle s’exposent les promeneurs qui se trompent de chemin et pénètrent dans une forêt privée reste bien trop sévère pour sanctionner une intrusion involontaire et n’ayant entraîné aucun dégât. Lorsqu’il s’agit des milieux naturels, de la forêt, des rivières, nous devrions chercher à tendre toujours davantage vers une logique de partage, car les paysages sont notre bien commun. C’est d’ailleurs déjà le cas pour les sentiers littoraux, auxquels la loi « littoral » garantit l’accès de nos concitoyens.
    Nous aurions également souhaité que le texte aille plus loin et condamne certaines pratiques indissociables de l’engrillagement : l’agrainage, l’affouragement des animaux sauvages ou encore l’importation d’espèces exotiques comme le cerf sika – autant de pratiques ayant pour objectif d’augmenter les effectifs d’espèces considérées comme du gibier. En favorisant certaines espèces, et en déséquilibrant nos écosystèmes, ces pratiques représentent un danger pour notre biodiversité et notre agriculture, ce qui, vous l’admettrez, est bien plus gênant qu’un promeneur qui se trompe de chemin. Il aurait donc peut-être fallu s’en soucier en priorité.
    En conclusion, nous serons attentifs aux différentes orientations retenues dans le texte et veillerons à ce que les intérêts de la biodiversité et des promeneurs soient les premiers sauvegardés. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES. – M. Roger Chudeau applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Emmanuel Maquet.

    M. Emmanuel Maquet

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    Le texte que nous examinons est important pour tous ceux qui sont attachés à la ruralité et à la chasse. Comme Laurent Somon, rapporteur du texte au Sénat, je suis élu dans la Somme, où le phénomène d’engrillagement est encore relativement maîtrisé : la proposition de loi permettra, je crois, qu’il le reste.
    Je constate tout d’abord que, depuis le début de son examen, le texte fait l’objet d’un large consensus : seule la rétroactivité des mesures fait débat, nous en parlerons dans quelques instants. Je tiens à saluer la capacité des sénateurs à proposer un texte équilibré et apaisé : ce n’était pas gagné, tant il touche à des sujets sensibles.
    Le droit de propriété, qui fonde notre État de droit, ne doit en aucun cas être remis en cause, et les chasseurs, auxquels nous devons tant, doivent être respectés pour leur contribution à la nécessaire régularisation des espèces. Les auteurs de la proposition de loi ont su s’abstenir de les désigner comme adversaires – la Fédération nationale des chasseurs a d’ailleurs participé aux travaux des sénateurs et soutient le texte –, ce que je tiens à saluer.
    Le groupe Les Républicains partage l’objectif de protéger la nature du phénomène d’engrillagement pour plusieurs raisons, en premier lieu écologiques.

    M. Nicolas Forissier

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    Très bien !

    M. Emmanuel Maquet

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    En effet, c’est bien la droite qui, en 2009, était à l’origine de l’inscription des trames vertes et bleues dans le premier Grenelle de l’environnement, dont l’objectif était bel et bien de remettre en bon état les continuités écologiques en limitant, autant que faire se peut, la fragmentation.
    Par ailleurs, la santé du gibier est bel et bien au cœur du dispositif, puisque celui-ci permettra d’éviter les catastrophes sanitaires, comme la diffusion d’une épizootie à l’intérieur d’un enclos justifiant d’abattre l’ensemble des animaux.
    Mais si la nature est accessible à tous, elle n’appartient pas à tous. L’intervention privée y est essentielle à plus d’un titre. Tout d’abord, la propriété foncière est un principe fondateur de notre État de droit. On gère toujours mieux ce que l’on possède : la propriété privée du foncier est donc une incitation à prendre soin, à entretenir, à valoriser la nature. L’engrillagement peut d’ailleurs partir d’une bonne intention de la part de propriétaires soucieux de protéger leurs parcelles.
    En outre, l’engrillagement permet la chasse commerciale, une pratique qui, je crois, ne doit pas être diabolisée : proposer des expériences de chasse sûres et accessibles, c’est aussi créer de la valeur dans nos territoires ruraux et naturels, qui en ont tant besoin. Nous nous battons régulièrement, ici, pour défendre la préservation d’activités traditionnelles dans nos campagnes. Le tourisme est une richesse pour nos territoires, qui regorgent de lieux préservés, magnifiques et dont l’entretien sera d’autant plus aisé que des gens seront prêts à s’y rendre. Le groupe Les Républicains sera donc mobilisé pour défendre une vision raisonnable de la chasse commerciale : si des excès ont accentué le phénomène d’engrillagement, ils ne sauraient justifier la suppression de cette activité.
    Avec cette proposition de loi, le Parlement montre sa capacité à se saisir d’un problème avant qu’il ne devienne trop important sur l’ensemble du territoire, et surtout à y apporter une solution nuancée et consensuelle. Les mesures que nous nous apprêtons à adopter sont l’équivalent de ce qui existe déjà en aménagement du territoire sous la forme des PLU. Sans remettre en cause le droit de propriété, ces règlements bornent ce que les propriétaires sont autorisés à faire – pour le plus grand bénéfice, je crois, de l’intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Richard Ramos, rapporteur, et M. Roger Chudeau applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    D’aucuns auraient pu croire que ce texte ne s’adressait qu’aux seuls habitants de la Sologne, du Loiret et du Loir-et-Cher, dont les territoires sont particulièrement concernés par la question de l’engrillagement : il n’en est rien. En effet, la proposition de loi nous ramène au bon usage de la nature, qui nous concerne tous. N’en déplaise aux esprits chagrins, je salue le travail juste et équilibré mené par le Sénat, en particulier par le sénateur Jean-Noël Cardoux, ainsi que celui de mes collègues en commission. S’il est adopté, le texte viendra mettre fin – et c’est heureux – aux longues tractations qui l’ont précédé, souvent avortées par manque de mesure.
    Le texte est le gage d’une liberté retrouvée. Retrouvée, d’abord, pour les grands animaux de nos si belles forêts françaises. Retrouvée, ensuite, pour les chasseurs qui, pour reprendre les mots de Jean-Noël Cardoux, « mieux que quiconque, savent saisir ces instants fugitifs de bonheur que leur procurent l’immersion dans la nature, le retour au sauvage et cette quête pleine d’espoir leur permettant, parfois, de posséder l’objet de leur passion ». Retrouvée, enfin, pour les amoureux d’une nature qu’il nous revient plus que jamais de chérir, de contempler, de connaître, de faire connaître et de protéger pour la transmettre.
    L’engrillagement pose des problèmes dont nous avons tous conscience : des problèmes sanitaires, la destruction de la faune et de la flore, une artificialisation dangereuse des milieux naturels et des problèmes de sécurité, les parcelles devenant inaccessibles aux pompiers, en cas d’incendie par exemple. L’été brûlant que nous venons de passer nous l’a d’ailleurs cruellement rappelé. S’ajoutent à cela les problèmes que posent l’agrainage et l’affouragement incontrôlés pratiqués par quelques prétendus chasseurs.
    Voilà pour le constat, qui doit nous interpeller.
    Faut-il rappeler que pas moins de 3 000 kilomètres de grillage devront être arrachés ? Une mesure loin d’être anecdotique, et pas seulement pour les départements cités plus haut, mais également au-delà, parce qu’elle revêt une dimension éminemment politique et même, j’ose le dire, philosophique, en ce qu’elle concerne ce « vivre-ensemble » dont tout le monde se réclame, souvent à tort et à travers.
    En effet, l’engrillagement est avant tout l’expression parfois violente d’une perte du « savoir vivre ensemble » pour reprendre les mots du rapporteur du Sénat, Laurent Somon. Il est l’expression d’un individualisme qui gangrène toutes les sphères de la société, jusque dans nos campagnes. Face à certains promeneurs qui considèrent que la nature appartient à tout le monde, déambulant souvent, dégradant parfois, les propriétaires ont cru devoir se protéger – parfois à juste titre : que l’on songe à l’agressivité de certains collectifs antichasse dont les actions sont trop souvent hors-la-loi !
    N’en déplaise aux pourfendeurs de la propriété privée, les trois quarts des forêts françaises métropolitaines sont privées, et les droits des promeneurs ne sauraient être supérieurs à ceux de leurs propriétaires. À ce titre, je me réjouis – même si je déplore sa raison d’être – que l’article 2 prévoie une contravention de quatrième classe en cas d’intrusion dans la propriété d’autrui sans autorisation.
    À ce propos, puisque le texte tend à autoriser les agents de l’Office français de la biodiversité à effectuer des contrôles des enclos sans se voir opposer la protection du domicile, je regrette que les gardes champêtres, qui constituent une police de l’environnement efficace, n’y soient pas mentionnés. Sans doute aurons-nous encore beaucoup à faire pour renforcer le pouvoir de la police de proximité, à laquelle, vous le savez, je suis très attachée. Que celle-ci œuvre en ville ou à la campagne, nous l’oublions en effet trop souvent.
    Ce texte, résolument mesuré et juste, fait la part belle à la nature sans léser personne. Il respecte les chasseurs, les randonneurs et les animaux, même s’il reste encore beaucoup à faire pour la biodiversité.
    Pour finir, permettez-moi, en citant Charles Péguy, de rêver que l’on reverra bientôt dans les grands bois, « les bondissements de la biche et du daim […] et les dépassements du bouc et du chevreuil, mêlant et démêlant leur course audacieuse […] afin de saluer la terre spacieuse. » Un peu de littérature dans cet hémicycle plus habitué aux joutes oratoires qu’à la poésie… (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. – MM. Richard Ramos, rapporteur, et Roger Chudeau applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.

    Article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Émilie Bonnivard.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Tout d’abord, je remercie notre collègue Richard Ramos et le groupe Dem pour avoir déposé cette proposition de loi.
    Je voudrais appeler votre attention sur les contradictions que la protection absolue de la biodiversité peut parfois engendrer.
    La montagne est, par essence, un espace de liberté ancestral. Les montagnards sont très attachés aux espaces pastoraux et au pastoralisme, pratique agricole ancestrale, durable, créatrice de biodiversité et respectueuse de l’environnement, qui correspond ainsi tout à fait aux attentes actuelles de nos concitoyens.
    Or la protection stricte des loups a fait exploser leur nombre dans les espaces pastoraux, et leurs attaques entraînent la mort de plus de 10 000 animaux chaque année. Paradoxalement, l’absence de régulation des loups a donc poussé l’Union européenne à rendre obligatoire la protection contre la prédation. Cette protection est d’ailleurs financée à la fois par l’Union européenne et par l’État. Depuis dix ans, nous sommes contraints d’engrillager les espaces pastoraux pour protéger les troupeaux.
    Je souhaitais appeler votre attention sur ce point, afin que le texte ne mette pas les éleveurs en difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 54 rectifié et 71 rectifié.
    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon, pour soutenir l’amendement no 54 rectifié.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Purement légistique, il tend à créer, dans le code de l’environnement, une section spécifique relative aux clôtures. En effet, l’extension à toutes les zones naturelles du champ de la proposition de loi, au-delà de ce qui concerne la trame verte, implique de ne pas placer ses dispositions dans la section dédiée aux trames vertes et bleues, au risque de leur limiter son application.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 71 rectifié.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Il est identique à celui de M. Cormier-Bouligeon et vise à une clarification, la trame verte n’incluant pas certains périmètres auxquels ce texte sera applicable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Avis favorable, puisque la commission a élargi le champ de cette proposition de loi au-delà de la trame verte ; il importe donc que ses dispositions ne soient pas insérées dans la section consacrée à cette trame.
    Par ailleurs, je profite de cette intervention pour répondre à Mme Bonnivard. Madame la députée, vous aurez d’autres occasions de vous exprimer au sujet de la prédation par les loups ; sachez toutefois que ce texte ne concerne pas les domaines agricoles, dont font partie les domaines d’élevage. Encore une fois, nous aurons l’occasion d’en reparler, mais il n’est pas question aujourd’hui de toucher aux clôtures des élevages de brebis ou autres.

    (Les amendements identiques nos 54 rectifié et 71 rectifié sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 69.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Il s’agit d’un amendement rédactionnel, tendant à clarifier les exceptions prévues par le texte.

    (L’amendement no 69, accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, les amendements nos 89 et 4 tombent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon, pour soutenir l’amendement no 60, qui fait l’objet d’un sous-amendement, no 102.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Nous avons eu en commission un débat nourri, un beau débat, au sujet du champ d’application des dispositions de l’article 1er. Dans la version adoptée par nos collègues du Sénat, elles portaient uniquement sur la trame verte, ce qui était trop restreint, comme je l’ai dit tout à l’heure à la tribune : en Sologne, par exemple, 6 % seulement de la forêt auraient été concernés. Nous avons décidé d’étudier la possibilité de les étendre aux espaces naturels et aux zones naturelles, et travaillé en ce sens avec le rapporteur. Suivant cette logique, l’amendement vise, dans la première phrase de l’alinéa 3, à substituer aux mots « espaces naturels » ceux de « zones naturelles ou forestières délimitées au règlement du plan local d’urbanisme au titre de l’article L. 151-9 du code de l’urbanisme ».

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Antoine Armand, pour soutenir le sous-amendement no 102.

    M. Antoine Armand

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    Il est destiné à compléter l’amendement de M. Cormier-Bouligeon en vue de clarifier le périmètre d’application de l’article 1er. En l’absence de plan local d’urbanisme, les nouvelles règles relatives aux clôtures concerneront les espaces naturels ; ainsi, tous les milieux naturels seront couverts par le texte.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Favorable, bien évidemment. Entre zones naturelles et espaces naturels, nous avons beaucoup débattu de ce sujet en commission, chacun défendant l’un ou l’autre choix ; cette rédaction permet effectivement de couvrir, au-delà de la trame verte, l’intégralité des terrains concernés. Lorsqu’il y a PLU ou PLUI – plan local d’urbanisme intercommunal –, il y a zone naturelle ; sinon, espace naturel. Qui peut le plus peut le moins : encore une fois, avis très favorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Même avis. Je vous remercie d’avoir déposé cet amendement : la précision concernant les zones naturelles manquait au texte. J’espère qu’il rencontrera la faveur des députés, ainsi que le sous-amendement, car il importe de ne créer aucune différence entre les parties de notre territoire soumises à un PLU et les autres.

    (Le sous-amendement no 102 est adopté.)

    (L’amendement no 60, sous-amendé, est adopté.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 79 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 79, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 41 et 24, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l’amendement no 41.

    Mme Lisa Belluco

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    Nous proposons que le délai de mise en conformité soit ramené de quatre à deux ans, ce qui est bien suffisant pour changer ou supprimer une clôture.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 24.

    Mme Mathilde Paris

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    Nous demandons au contraire que le délai de mise en conformité soit porté à cinq ans à compter de l’entrée en vigueur de cette future loi : si celle-ci tarde à être définitivement adoptée, le temps restant aux propriétaires pour s’y conformer avant le 1er janvier 2027 sera réduit d’autant.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Défavorable. L’échéance retenue constitue un bon compromis entre les sept ans initialement prévus par nos amis sénateurs et notre volonté d’accélérer le désengrillagement – bien que Mme Belluco souhaite toujours aller plus vite encore.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    J’ajouterai aux propos de M. le rapporteur qu’un délai de deux ans serait bien ambitieux. La commission a déjà réduit celui que prévoyait la proposition de loi issue du Sénat ; la date du 1er janvier 2027 constitue en effet un compromis. J’ai évoqué 3 000 kilomètres de grillage, M. Cormier-Bouligeon a parlé de 4 000 kilomètres : il faut laisser aux propriétaires le temps nécessaire à son remplacement par des barrières, d’autant que les sénateurs en exemptaient les clôtures antérieures à la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, et le texte de la commission uniquement les clôtures antérieures à la loi du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en œuvre de principes d’aménagement. Peut-être ce dernier point fera-t-il également l’objet d’un compromis – la date de 1992, par exemple, laisserait subsister les clôtures remontant à plus de trente ans. Pour toutes ces raisons, je demande le retrait des amendements ; à défaut, avis défavorable.

    (Les amendements nos 41 et 24, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 23.

    Mme Mathilde Paris

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    Cet amendement de bon sens vise à ce que l’enlèvement ou la mise en conformité des clôtures soit précédé du recensement des animaux sauvages présents sur la parcelle en cause, afin de protéger la biodiversité. Certains terrains enclos abritent en effet des espèces importées susceptibles de présenter un risque sanitaire : il conviendrait de prendre les dispositions nécessaires et de les extraire avant qu’elles ne se retrouvent en liberté.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Madame Paris, votre amendement part d’une bonne intention. Cependant, pour avoir, comme nous, largement amendé le texte en commission, vous n’ignorez pas que nous souhaitons que celui-ci soit applicable immédiatement ; or la mesure que vous proposez retarderait de plusieurs années le désengrillagement. Je vois bien d’une part ce que vous demandez, d’autre part ce qui était prévu, et je constate que vous êtes désormais une adepte du « en même temps » ; mais en l’occurrence, je ne peux concilier les deux. Avis défavorable.

    M. Nicolas Sansu

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    Très bien, monsieur le rapporteur !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Madame la députée, votre souhait d’éviter les potentiels effets néfastes de l’enlèvement des grillages se trouve satisfait notamment par l’article 1er ter, amendé en commission à l’initiative de M. Cormier-Bouligeon. Par ailleurs, il serait regrettable d’instaurer au sein de ce processus une charge administrative supplémentaire. Je préfère donc compter sur la responsabilité de chacun, sachant que des contrôles resteront évidemment possibles. Comme l’a dit M. le rapporteur, l’idée n’est pas de ralentir mais d’accélérer les choses ; du moins ai-je entendu les représentants de tous les groupes exprimer le désir d’avancer sur ce point. Par conséquent, je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

    (L’amendement no 23 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de six amendements, nos 15, 85, 40, 57, 73 et 83, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 15 et 85 sont identiques, ainsi que les amendements nos 40, 57, 73 et 83. Ces derniers font en outre l’objet d’un sous-amendement, no 95.
    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 15.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il vise à rétablir, à l’alinéa 3, la référence à la loi du 23 février 2005 au lieu de celle du 18 juillet 1985. Restreindre le dispositif aux clôtures postérieures au 23 février 2005 en exclura certes un grand nombre, ce qui peut poser problème – cette date pivot a d’ailleurs été âprement discutée au Sénat. En revanche, il est à craindre que celle du 18 juillet 1985 fasse obstacle, pour des raisons constitutionnelles, à l’entrée en vigueur de ces dispositions. Si nous revenons à 2005, le texte satisfera de nouveau aux conditions de rétroactivité de la loi ; quant aux clôtures plus anciennes, le sénateur Jean-Noël Cardoux a fort bien expliqué qu’il suffirait d’attendre leur obsolescence, si j’ose dire. Nous éviterions ainsi le risque de voir le texte retoqué par le Conseil constitutionnel.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Forissier, pour soutenir l’amendement no 85.

    M. Nicolas Forissier

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    Il s’agit en effet de rétablir l’équilibre obtenu en retenant la date de 2005. Toutefois, si j’ai bien compris, monsieur le rapporteur, un consensus s’est dégagé en vue d’exclure du dispositif les clôtures ayant au moins trente ans d’existence à la date de la publication de cette future loi. Ce délai est compatible avec le droit constitutionnel, ce qui reste le principal, car nous voulons avant tout que le texte s’applique. Je retire donc le présent amendement et propose que le groupe Les Républicains vote en faveur du vôtre, le no 73, qui va dans ce sens.

    (L’amendement no 85 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Nous en venons à la seconde série d’amendements identiques au sein de cette discussion commune.
    La parole est à M. Vincent Thiébaut, pour soutenir l’amendement no 40.

    M. Vincent Thiébaut

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    Lors de l’examen du texte en commission, nous l’avons entre autres amélioré en substituant à la date du 23 février 2005 celle du 18 juillet 1985, afin d’accroître sa portée. Pour des raisons de coordination juridique, et par esprit de cohérence, nous proposons désormais une nouvelle rédaction qui, prenant en compte le mécanisme de la prescription acquisitive trentenaire d’un terrain privé, retient un délai de trente ans.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon, pour soutenir l’amendement no 57.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Finalement, tous nos débats devraient être à l’image de celui-ci : un échange d’arguments où l’on s’écoute et l’on se respecte, et qui débouche sur un consensus.
    L’article 1er repose sur trois piliers. S’agissant du premier, le périmètre auquel s’appliquent ses dispositions, nous avons remplacé les trames vertes par les zones et espaces naturels. S’agissant du deuxième, la date d’entrée en vigueur de la future loi, nous sommes convenus par consensus d’arrêter la date du 1er janvier 2027. Il restait à déterminer les clôtures concernées. Après en avoir beaucoup discuté en commission, nous étions parvenus à un point d’équilibre. Il ressort néanmoins de nos échanges depuis la tenue de la commission que ce point d’équilibre ne serait pas solide juridiquement et qu’il pourrait nous mettre en péril en cas de saisine du Conseil constitutionnel. Nous avons donc recherché un autre fondement juridique et l’avons trouvé : il s’agit de la prescription acquisitive de trente ans portant sur les propriétés privées. Nous proposons donc que toutes les clôtures érigées depuis trente ans soient soumises à l’obligation d’effacement et que celles qui ont été érigées antérieurement soient conservées. Ce compromis nous paraît solide tant dans la perspective d’un passage devant le juge constitutionnel que dans celle du débat qu’auront nos collègues sénateurs d’ici quelques semaines.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 73.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Sur ce point longuement discuté en commission, nous sommes parvenus à trouver un compromis solide sur le plan juridique vis-à-vis du Conseil constitutionnel et acceptable pour nos camarades sénateurs, dans le cadre de nos travaux communs sur ce texte. Il me semble donc que c’est bien le délai trentenaire que nous devons retenir.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 83.

    Mme Mathilde Paris

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    J’avais demandé pour ma part que la date de 1985 soit retenue, mais il est apparu qu’elle pourrait s’avérer fragile dans la perspective d’un passage devant le Conseil constitutionnel. J’ai donc déposé cet amendement de consensus, l’objectif étant que la proposition de loi soit adoptée et, une fois adoptée, efficace.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hubert Ott, pour soutenir le sous-amendement no 95.

    M. Hubert Ott

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    Au travers de ce sous-amendement de coordination, visant à ajouter les mots « plus de », nous souhaitons nous assurer que le dispositif s’applique aux clôtures construites lors des trente années précédant la promulgation de la loi.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur les amendements de la discussion commune ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    J’émets un avis défavorable aux amendements identiques nos 15 et 85, et un avis favorable aux amendements trentenaires ! (Sourires sur plusieurs bancs du groupe Dem.) Il s’agit des amendements nos 40, 57 et 73. Avis défavorable à l’amendement no 83 et avis favorable, enfin, au sous-amendement no 95.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Il est défavorable aux amendements nos 15 et 85 et favorable aux amendements suivants, nos 40, 57, 73 et 83, ainsi qu’au sous-amendement.
    Le Gouvernement n’ayant pas eu l’occasion de s’exprimer en commission, je profite de l’occasion pour partager notre avis au sujet du consensus qui a été trouvé. La semaine qui s’est écoulée entre les débats de la commission et ceux de la séance publique me semble avoir été particulièrement propice. Plusieurs dates ont été évoquées. Celle de 2005, notamment, a été proposée par le Sénat ; si elle était stable sur le plan juridique, elle ne recueillait cependant pas l’assentiment des députés dans la mesure où elle aurait concerné peu de parcelles. L’objectif du texte étant de revenir sur l’engrillagement d’un maximum de parcelles, il a fallu trouver une date antérieure. Celle de 1985, adoptée en commission pour les espaces naturels sensibles, nous paraissait fragile. La date de 1992 nous semble susceptible de répondre à l’exigence exprimée par les députés en commission, celle d’aller plus loin que ne l’aurait permis la date de 2005. La date retenue doit également être solide sur le plan juridique : le risque, si elle ne l’était pas, serait que le Conseil constitutionnel censure les dispositions, rendant la loi inopérante et aboutissant finalement à ce qu’aucun grillage ne puisse être retiré.
    Je voudrais également revenir sur l’amendement déposé par Manon Meunier en commission, qui n’a pas été retenu. Le Gouvernement y voyait deux inconvénients de taille : d’abord, le Conseil constitutionnel se serait opposé à la disposition qu’il portait, ce qui aurait été un obstacle majeur. Ensuite, il aurait fallu recenser les domaines patrimoniaux – vous imaginez bien, en effet, que l’on n’aurait pas détruit des murs édifiés il y a plus d’une centaine d’années –, et cela aurait été difficile.
    En définitive, la date de 1992 est solide sur le plan juridique et nous garantit une certaine tranquillité vis-à-vis du Conseil constitutionnel. Je vous assure, en outre, qu’elle permettra de toucher un grand nombre de parcelles. L’engrillagement était en effet assez rare auparavant et s’est développé de façon plus importante au cours des trente dernières années, suivant l’essor notamment des chasses en enclos et des chasses commerciales.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    Mme Manon Meunier

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    Je suis déçue, compte tenu de la concertation qui avait eu lieu en commission au sujet de la loi de 1985. Il me semble que, considérant le principe de proportionnalité et la situation d’urgence dans laquelle nous nous trouvons quant à la protection de la biodiversité, la date de 1985 n’aurait pas changé grand-chose pour le Conseil constitutionnel. Pour la biodiversité, en revanche, elle aurait eu un impact important, de nombreuses clôtures ayant été érigées au cours des années 1980. Pour les animaux, le fait que la clôture date de 1985 ou de 1992 ne change rien. Nous sommes donc défavorables à l’ensemble des amendements qui visent à supprimer la référence à la loi de 1985 et appelons nos collègues à voter contre également, afin de répondre à la situation d’urgence en matière de biodiversité. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Forissier.

    M. Nicolas Forissier

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    Madame la secrétaire d’État ayant émis un avis au sujet de l’amendement no 85, je voudrais lui rappeler que j’ai bien souligné tout à l’heure le souhait du groupe Les Républicains de rejoindre le consensus sur la prescription trentenaire et que j’ai, pour cette raison, retiré mon amendement. J’ajoute que je suis très heureux que nous ayons trouvé ce consensus.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris.

    Mme Mathilde Paris

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    Je voudrais simplement signaler que le rapporteur M. Ramos a dû commettre une erreur lorsqu’il a émis un avis défavorable à l’amendement no 83, pourtant identique aux précédents et auquel Mme la secrétaire d’État a émis un avis favorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    C’est en effet une erreur de ma part. Je suis évidemment favorable à l’amendement no 83 et au délai de trente ans sur lequel nous nous sommes accordés.

    (L’amendement no 15 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco.

    Mme Lisa Belluco

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    Notre groupe trouve lui aussi regrettable que nous soyons revenus sur le consensus qui avait été trouvé en commission. Je ne sais plus qui l’a dit en introduction de nos débats, mais je suis certaine qu’un orateur a précisé que la majorité des enclos dataient des années 1980. Une date postérieure – 1992 ou 1993, en fonction de la date de promulgation de la loi – risque de nous faire passer à côté de l’objectif poursuivi. Nous avons bien compris néanmoins que l’enjeu était politique avant que d’être juridique et constitutionnel, puisqu’il fallait trouver un consensus avec les sénateurs. Nous nous abstiendrons donc sur ces amendements qui fixent le délai à trente ans, mais je tiens à souligner que cet aboutissement est regrettable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Je ne sais pas où vous avez obtenu ces informations, madame Belluco. Je regrette de vous le dire, mais elles ne sont pas fondées. Les cartes aériennes qui existent aujourd’hui ne montrent absolument pas que les engrillagements de parcelles auraient été plus nombreux dans les années 1980 qu’au début des années 1990. L’objectif, avec le délai de trente ans, est d’avoir une date solide sur le plan juridique. Le pire, pour nous tous, serait que nous soyons déboutés par le Conseil constitutionnel et que cette proposition de loi ne puisse pas entrer en application. Je comprends que vous souhaitiez fixer une date antérieure, madame Belluco, mais il convient d’être raisonnable. Les trente ans prévus sont solides sur le plan juridique, et c’est ce qui compte.

    (Le sous-amendement no 95 est adopté.)

    (Les amendements identiques nos 40, 57, 73 et 83, sous-amendés, sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 92 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 92, accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence, l’amendement no 87 tombe.)

    Mme la présidente

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    Sur l’article 1er, je suis saisie par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Nicolas Forissier, pour soutenir l’amendement no 87.

    M. Nicolas Forissier

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    Il concerne un problème pratique mais vise également le respect du droit de propriété dans le cadre de l’application du texte que, j’espère, nous voterons tout à l’heure. La dernière phrase de l’alinéa 3 porte sur les rénovations ou réfections de clôtures ou de murs après leur effondrement ou leur destruction – par un arbre lors d’une tempête, par exemple. C’est très concret. Le texte dispose que la réfection doit être menée en fonction des nouvelles normes édictées au cours des trente dernières années. Or si la clôture ou le mur a été édifié il y a plus de trente ans, je ne vois pas pourquoi les règles nouvelles devraient s’appliquer.
    Il pourrait même en résulter des situations quelque peu grotesques où s’intercaleraient sur des clôtures anciennes et licites des segments de quelques mètres de clôture nouvelle. Le praticien du monde rural que je suis estime que ce n’est pas une bonne solution, notamment du point de vue du passage du gibier. Je souhaite donc par cet amendement que soient exclues les réfections et rénovations de clôtures et de murs antérieurs à la date de construction à partir de laquelle nous venons de décider que l’alinéa 3 s’appliquera, c’est-à-dire il y a trente ans.

    Mme la présidente

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    Veuillez m’excuser, cher collègue ; je vous ai donné la parole pour présenter cet amendement mais il est tombé avec l’adoption des amendements précédents.
    La parole est à M. Stéphane Mazars, pour soutenir l’amendement no 62.

    M. Stéphane Mazars

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    Il vise à créer deux exceptions aux dispositions que nous examinons et que nous allons – je l’espère – adopter. La première concerne les clôtures des parcs d’entraînement, de concours ou d’épreuves de chiens de chasse. Il va de soi qu’en l’absence de clôture, on ne saurait assurer la sécurité des chiens. La deuxième exception a trait aux clôtures des élevages équins.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Favorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Il fallait en effet préciser quelques exemptions dans le texte – c’est tout l’intérêt de son examen dans l’hémicycle, qui permet d’y ajouter des dispositions en tant que de besoin. En l’occurrence, il est important de prévoir une exemption concernant les entraînements et concours de chiens de chasse, car les espaces utilisés à ces fins sont des zones naturelles et non des zones de chasse en enclos ou de chasse commerciale. Avis favorable.

    M. Olivier Falorni

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    C’est Royal Canin !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco.

    Mme Lisa Belluco

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    J’ai quelques réserves à l’égard de cet amendement. Je comprends l’exception relative aux chiens de chasse mais celle qui concerne les chevaux me laisse sceptique, car les clôtures de parcs à chevaux sont perméables et non étanches à la faune sauvage. Pourquoi cette exception ? Surtout, elle me semble présenter le risque que soient enfermés, dans les enclos en question, non seulement quelques chevaux mais aussi d’autres animaux, du gibier par exemple, et qu’elle serve d’astuce pour contourner la loi.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Millienne.

    M. Bruno Millienne

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    Une fois n’est pas coutume, je partage l’avis de nos amis écologistes. Le danger existe – avec ou sans le parrainage de Royal Canin, monsieur Falorni – qu’on voie surgir des terrains d’entraînement de chiens de chasse,…

    M. Nicolas Sansu

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    Bien sûr !

    M. Bruno Millienne

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    …tant il sera simple de conserver les clôtures concernées pour échapper à la loi, d’où mon doute quant au bien-fondé de cet amendement.

    M. Erwan Balanant

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    Je le partage.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Certains élevages de chevaux de race, madame Belluco, sont entourés de clôtures bien plus épaisses qu’un simple fil électrique pour que les chevaux ne s’échappent pas. On ne saurait comparer la taille d’un chien à celle d’un cheval. L’objectif est de préserver une activité, l’entraînement des chiens de chasse, et il n’amoindrit en rien l’ambition qui inspire le projet de loi. Au demeurant, les terrains utilisés pour les concours de chiens de chasse ne sont pas si nombreux. Encore une fois, l’idée est de protéger l’activité d’entraînement, en aucun cas la chasse en enclos ou la chasse commerciale.

    (L’amendement no 62 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 55 et 80.
    La parole est à M. Bertrand Bouyx, pour soutenir l’amendement no 55.

    M. Bertrand Bouyx

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    Il vise à supprimer l’alinéa 8 afin d’éviter d’avoir à dresser la liste – ce serait fastidieux – « des territoires et des parties de territoires délimités par des clôtures revêtant un caractère historique et patrimonial ». Tous ici nous savons, pour les parcourir régulièrement, combien nos circonscriptions sont riches en patrimoine. Puisque la date de référence – en l’occurrence, trente ans avant la promulgation du présent texte – est assez ancienne, il n’y a aucune raison d’exclure ces clôtures patrimoniales de l’application de la loi.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 80.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Même objet. Nous nous sommes inquiétés, dans les discussions antérieures, que le projet de loi ait notamment pour effet d’imposer la destruction des murs de Chambord et de Chantilly, ce qui aurait été regrettable, mais la date de référence dont nous sommes convenus, c’est-à-dire il y a trente ans, exclut de facto les murs de ces domaines et d’autres murs historiques. Il faut donc supprimer l’alinéa 8.

    (Les amendements identiques nos 55 et 80, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 75.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Cet amendement rédactionnel vise à réécrire l’alinéa 9 relatif à la déclaration préalable en cas d’édification de clôtures. Il s’agit d’une clarification juridique.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Je suis perplexe : cet amendement ne me semble pas d’ordre rédactionnel. Les collectivités disposent déjà de deux outils relatifs aux obligations de déclaration de clôtures. En vertu du code de l’urbanisme, le plan local d’urbanisme définit les espaces où les clôtures sont soumises à déclaration pour protéger le patrimoine culturel et naturel ainsi que les continuités écologiques. En outre, par simple délibération, une commune peut soumettre les clôtures à déclaration préalable.
    En clair, l’amendement est satisfait puisque les communes peuvent déjà faire la démarche que vous prônez selon les deux modalités que j’ai citées. Je vous propose de ne pas rendre cette faculté obligatoire par la loi, et de retirer l’amendement qui me semble alourdir le texte.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Je le maintiens, car il ne fait que réécrire proprement l’alinéa 9.

    Mme la présidente

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    Qu’en dites-vous, madame la secrétaire d’État ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Sagesse.

    (L’amendement no 75 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 52 et 77.
    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon, pour soutenir l’amendement no 52.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    C’est un amendement de clarification. Dans sa grande sagesse, notre collègue sénateur Jean-Noël Cardoux a souhaité permettre, à l’alinéa 10, que les habitations et sièges d’exploitations agricoles ou forestières situés en milieu naturel soient entourés d’une clôture étanche, édifiée à moins de 150 mètres de leurs limites. La clarification rédactionnelle qui vous est proposée vise simplement à faire en sorte que les deux catégories de constructions – les habitations et les sièges d’exploitations – soient bien concernées par cette faculté.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 77.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Même objet : on précise une disposition autorisant la création, lorsqu’elle est nécessaire, d’un périmètre de sécurité dans un rayon de 150 mètres.

    (Les amendements identiques nos 52 et 77, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 78.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Il me semble inutile et inadapté de préciser que l’objectif consistant à limiter l’implantation des clôtures s’applique aux Sraddet – schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires –, car il est inhérent à leur fonction de protection et de restauration des continuités écologiques. Je propose la suppression de l’alinéa 13.

    (L’amendement no 78, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 1er.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        100
            Nombre de suffrages exprimés                100
            Majorité absolue                        51
                    Pour l’adoption                100
                    Contre                0

    (L’article 1er, amendé, est adopté.)
    (Applaudissements sur tous les bancs.)

    Après l’article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Roger Chudeau, pour soutenir l’amendement no 12 rectifié, portant article additionnel après l’article 1er.

    M. Roger Chudeau

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    Dans le prolongement de cette proposition de loi – à laquelle il va de soi que j’adhère pleinement, la Sologne se trouvant au cœur de ma circonscription dans le Loir-et-Cher –, le présent amendement vise à nettoyer nos paysages et nos espaces naturels en éliminant les dispositifs vulnérants que sont les barbelés.
    Les barbelés, souvent installés depuis plus de trente ans, se trouvent partout : qu’on ramasse des champignons, qu’on soit en randonnée, qu’on pratique le cyclotourisme, on bute toujours sur des barbelés. Les chemins de grande et de petite randonnée en sont festonnés. Or ils sont tout à fait inutiles : la plupart du temps, ils ont été posés à une époque où il fallait protéger les pâturages et le bétail mais aujourd’hui, une clôture électrique simple ou double – chargée au moyen de batteries solaires – suffit. En clair, les barbelés ne servent à rien. Ils sont aussi cruels : les animaux, notamment les grands animaux tels que les sangliers, les cervidés, les chevreuils, se blessent fréquemment en allant au gagnage pour s’alimenter ou se rembucher. Les jeunes animaux, en particulier, s’éventrent ou se blessent cruellement. Faut-il ajouter que les barbelés sont dangereux, car les promeneurs peuvent se prendre les pieds dedans ? Et pour finir, ils sont inesthétiques : notre pays est défiguré par les barbelés qui balafrent nos paysages.
    Je vous propose donc de les supprimer. L’amendement prévoit que les propriétaires de toutes parcelles ont cinq ans pour éliminer les barbelés des clôtures, quelles qu’elles soient. En cas de non-exécution de cette prescription, l’État interviendra aux frais des propriétaires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Monsieur Chudeau, le Loir-et-Cher a parlé ! Vous m’aviez déjà fait part de votre proposition alors que nous nous étions croisés tard dans la nuit dans les couloirs de l’Assemblée. Votre amendement est judicieux, preuve en est qu’il est satisfait par l’article 1er où il est précisé que les clôtures « ne peuvent ni être vulnérantes ni constituer des pièges pour la faune ».

    M. Roger Chudeau

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    Oui, mais il n’est pas question de date dans mon amendement.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Je vous demande donc de bien vouloir le retirer ; à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Monsieur Chudeau, si l’article 1er a été adopté par cent voix sur cent, c’est parce que nous avons su trouver une position équilibrée, qui fait consensus. Votre amendement va trop loin : il ne mentionne aucune date et généralise la suppression de toutes les clôtures…

    M. Roger Chudeau

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    Des barbelés seulement !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Mon avis sera défavorable. Je vous rappelle que nous souhaitons que l’unanimité se fasse autour de ce texte.

    Mme la présidente

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    Retirez-vous votre amendement, monsieur Chudeau ?

    M. Roger Chudeau

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    Je le maintiens !

    (L’amendement no 12 rectifié n’est pas adopté.)

    Article 1er bis

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir les amendements nos 42 et 48, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    Mme Lisa Belluco

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    L’amendement no 42 propose de mettre fin à la pratique des chasses à caractère commercial en enclos. Celle-ci n’a en effet pour but que le divertissement et ne participe nullement à l’équilibre agro-sylvo-cynégétique auquel la « vraie » chasse est censée contribuer. Ajoutons que les animaux qui y sont chassés ne sont même pas destinés à la consommation mais sont tout simplement mis dans un trou une fois tués.
    L’amendement no 48, de repli, vise à appliquer à la chasse en enclos les règles de droit commun, notamment celles relatives aux périodes de chasse.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Avis défavorable. Je comprends l’esprit de ces amendements mais cette proposition de loi, je le répète, porte non pas sur la chasse mais sur la libre circulation des animaux sauvages. Néanmoins, je ne doute pas que des propositions de loi émanant de votre groupe nous donneront l’occasion de débattre de la chasse, madame Belluco.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Vous avez consacré une large part de votre intervention dans la discussion générale aux pratiques de la chasse. Le texte dont nous débattons, relatif à la biodiversité, répond à certaines critiques que vous émettez au sujet de la chasse en enclos, en visant les engrillagements qui empêchent la libre circulation des animaux sauvages. Retenir une durée de trente ans, comme votre assemblée vient de le faire, permettra de rendre perméables de nombreuses parcelles engrillagées.
    J’estime nécessaire de lutter contre les abus relatifs à la densité d’animaux sauvages et à leur nourrissage. Lors de la discussion générale, je me suis ainsi engagée à publier un décret portant sur la densité maximale de sangliers de manière à éviter tout phénomène de surdensité dans les enclos. Toutefois, je considère qu’il est inopportun d’interdire tous les types de chasse en enclos. Nous voulons trouver une position d’équilibre autour de ce texte qui, comme l’a souligné M. le rapporteur, ne concerne pas la chasse mais vise à lutter contre les engrillagements qui ont tant abîmé nos paysages.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    Mme Manon Meunier

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    J’aimerais apporter mon soutien aux amendements de ma camarade Lisa Belluco. Leur objet me semble directement lié à la biodiversité. La chasse en enclos repose sur des pratiques comme l’importation de gibier exotique ou la concentration de certaines espèces. Et qui dit concentration des espèces, dit risque de zoonoses. Or nous ne maîtrisons pas ce qui se passe avec ces enclos d’où certains animaux peuvent s’échapper. Profitons-en pour aller plus loin et interdisons la chasse en enclos à visée commerciale. Lors de la discussion générale, les diverses interventions ont montré que nous étions presque tous d’accord pour dire qu’il s’agissait d’une pratique cruelle envers les animaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Lisa Belluco applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Millienne.

    M. Bruno Millienne

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    Cette proposition de loi ne vise pas la chasse mais je suis totalement d’accord avec vous, il faudra que nous revenions sur la pratique de la chasse en enclos d’autant qu’elle ne porte pas seulement sur les animaux de nos régions mais aussi sur des animaux spécialement importés pour servir de proies, ce qui est un scandale.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    C’est vrai !

    M. Bruno Millienne

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    Déposez une proposition de loi en ce sens et je la voterai !

    Mme Raquel Garrido

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    Autant voter dès maintenant cet amendement !

    (Les amendements nos 42 et 48, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l’amendement no 81.

    Mme Lisa Belluco

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    Madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, vous avez insisté à plusieurs reprises sur le fait que cette proposition de loi ne portait pas sur la chasse. Or elle ne désigne les animaux que sous le terme de « gibier ». Si son objet est bien la préservation de la biodiversité, il importe donc de remplacer les mots « gibier à poil » ou « espèces de gibier » par ceux d’« animaux non domestiques » car c’est bien à la libre circulation de tous les animaux que nous devons œuvrer. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Avis favorable. (« Ah ! » sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Sagesse.

    (L’amendement no 81 est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Bruno Millienne

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    Très bien, madame Belluco !

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 13 et 59 deuxième rectification, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 13.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il s’agit d’un amendement de cohérence avec l’un des amendements que j’avais déposés à l’article 1er, le no 15. Je pensais qu’il était tombé, mais puisqu’il ne l’est pas, je le retire.

    (L’amendement no 13 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annaïg Le Meur, pour soutenir l’amendement no 59 deuxième rectification, qui fait l’objet d’un sous-amendement, no 99.

    Mme Annaïg Le Meur

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    Au regard du mécanisme de prescription acquisitive trentenaire d’un terrain privé, il est proposé que les clôtures de plus de trente ans à la date de publication de la loi soient mises en conformité en rétablissant les continuités écologiques. Il s’agit d’un ajustement rédactionnel par référence au nouvel article créé.

    Mme la présidente

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    Le sous-amendement no 99 de M. Hubert Ott est défendu.

    (Le sous-amendement no 99, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

    (L’amendement no 59 deuxième rectification, sous-amendé, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

    (L’article 1er bis, amendé, est adopté.)

    Article 1er ter A

    Mme la présidente

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    L’amendement no 68 rectifié de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 68 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    (L’article 1er ter A, amendé, est adopté.)

    Articles 1er ter et 1er quater

    (Les articles 1er ter et 1er quater sont successivement adoptés.)

    Article 1er quinquies

    Mme la présidente

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    L’amendement no 82 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 82, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Les amendements identiques nos 53 deuxième rectification de M. François Cormier-Bouligeon et 67 deuxième rectification de M. le rapporteur sont rédactionnels.

    (Les amendements identiques nos 53 deuxième rectification et 67 deuxième rectification, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 14.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il vise à compléter l’article par l’alinéa suivant : « Le permis de chasser ou l’autorisation de chasser sont rétablis sans délai dès lors que la mise en conformité des clôtures est constatée par les agents ». Il s’agit de privilégier l’incitatif par rapport au punitif. Il serait en effet incompréhensible que le permis de chasser ou l’autorisation de chasser ne soient pas rétablis dès lors que la mise en conformité des clôtures donne entière satisfaction.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Je dois vous avouer être surpris par votre amendement, madame Ménard. Une personne qui volerait chez un commerçant, à Béziers, ne serait-elle plus coupable dès lors qu’elle restitue le bien qu’elle a dérobé ? Non ! Quand une personne commet un délit, elle ne peut être considérée comme étant non coupable à partir du moment où elle réparerait le tort qu’elle a fait. Il faut laisser au juge le soin d’appliquer la sanction. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Même avis. Il revient au juge de déterminer la durée de suspension du permis de chasser, en prenant éventuellement en considération les engagements de la personne concernée. Le rétablissement sans délai que vous appelez de vos vœux nécessiterait, qui plus est, une nouvelle décision de justice, qui me semble compliquée à mettre en œuvre. Faisons confiance à l’appréciation du juge.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Vous savez la confiance que je place dans la justice de notre pays mais, monsieur le rapporteur, je ne suis pas sûre que les chasseurs apprécient beaucoup que vous les compariez à des voleurs.

    M. Nicolas Forissier

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    C’est vrai !

    M. Olivier Falorni

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    M. le rapporteur faisait peut-être allusion aux braconniers !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Ce rapprochement me paraît hasardeux et suscite chez moi une surprise aussi grande que celle provoquée chez vous par mon amendement.

    Mme la présidente

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    Maintenez-vous votre amendement, madame Ménard ?

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Oui, madame la présidente.

    (L’amendement no 14 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’article 2, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    (L’article 1er quinquies, amendé, est adopté.)

    Article 1er sexies

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier, pour soutenir l’amendement no 5, tendant à supprimer l’article 1er sexies.

    Mme Manon Meunier

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    Nous ne souhaitons pas que le droit de contrôler les clôtures soit étendu aux agents des fédérations de chasse, pour une raison très simple : ce droit est détenu par les agents de l’OFB et c’est pour garantir son exercice impartial qu’il est assuré par un service public.
    Peut-être une solution alternative pourrait-elle résider dans le renforcement de ce service public par l’ouverture de nouveaux postes à un niveau beaucoup plus élevé que celui prévu dans le projet de loi de finances (PLF) – une quinzaine de postes sont créés alors que les syndicats en demandent 500. Si l’on considère qu’il n’est pas possible d’appliquer correctement le code de l’environnement, il faut chercher à renforcer l’OFB plutôt que d’ouvrir ses compétences à des fédérations de chasse au sein desquelles des conflits d’intérêts pourraient incontestablement se faire jour. (Mme Raquel Garrido applaudit.)
    Nous vous proposons donc de voter avec nous cet amendement de suppression du présent article. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Benjamin Lucas applaudit également.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Elle a raison !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    J’approuve une partie de votre raisonnement : il faut renforcer l’OFB, car – vous avez raison – il est nécessaire que ses agents soient plus nombreux. Nous étudierons attentivement les amendements qui le proposeront, afin de financer la création de ces nouveaux postes.
    Cependant – je profite de la bonne ambiance qui règne parmi nous –, quand je vais au restaurant, et je le dis en tant qu’ancien chroniqueur gastronomique, je prends toujours fromage et dessert. Je préfère que plusieurs types d’agents puissent verbaliser les contrevenants : les agents des fédérations de chasseurs qui auront ce droit seront ainsi près de 300 et s’ajouteront à ceux de l’OFB.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Parce qu’ils connaissent bien les territoires mais aussi les acteurs qui y évoluent, les agents de développement des fédérations départementales de chasseurs peuvent tout à fait réaliser des contrôles et s’assurer de la bonne application des dispositions établies en matière de continuité écologique. C’est évidemment ce que vise la proposition de loi. Il est vrai que nous devons être attentifs aux moyens de l’OFB, dont l’action revêt des enjeux essentiels et beaucoup plus complexes que ce dont nous sommes en train de discuter ; d’ailleurs, nous avons déjà annoncé aux acteurs concernés que nous allions maintenir les budgets et même augmenter les ETP.
    Comme le dit M. le rapporteur, le présent article a pour objectif de permettre davantage de contrôles ; les acteurs dont il est question connaissent bien le terrain et je crois que nous pouvons leur faire confiance. Avis défavorable.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Fromage et dessert pour Mme la secrétaire d’État !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco.

    Mme Lisa Belluco

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    Je soutiens pour ma part cet amendement, car nous craignons que les agents des fédérations de chasse soient mis dans des positions intenables, dans lesquelles ils seraient parfois juge et partie ; appartenant au milieu des chasseurs, ils pourraient subir des pressions. Ce n’est pas que je les pense incapables de contrôler la bonne application de la loi, mais je crains qu’ils se retrouvent dans une situation ne leur permettant pas toujours de prendre la bonne décision. Je rejoins donc mes collègues du groupe LFI-NUPES : il faut que de tels contrôles soient effectués par des agents de l’OFB, qui, disposant d’un peu plus de recul et d’une position plus neutre, seront moins soumis aux pressions du terrain.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Forissier.

    M. Nicolas Forissier

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    Je m’inscris totalement en faux contre ce que je viens d’entendre. Nous devons créer les conditions d’une société de confiance. Les fédérations de chasseurs accomplissent un travail colossal ; il est dans leur intérêt que les choses se passent bien et que la loi soit respectée. Pour bien les connaître – et je ne suis pas le seul ici –, je fais confiance aux agents des fédérations de chasse pour assurer un contrôle impartial car, encore une fois, c’est dans leur intérêt. La confiance est nécessaire pour écrire une loi de consensus, ce que nous essayons de faire ici. Je voterai contre le présent amendement.

    (L’amendement no 5 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 66 rectifié et 65 de M. le rapporteur sont rédactionnels.

    (Les amendements nos 66 rectifié et 65, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

    (L’article 1er sexies, amendé, est adopté.)

    Après l’article 1er sexies

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 26, portant article additionnel après l’article 1er sexies.

    Mme Mathilde Paris

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    Il vise à intégrer la lutte contre l’engrillagement des espaces naturels, donc les mesures de la présente proposition de loi, dans les objectifs des Sraddet, car ce n’est actuellement pas le cas.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Défavorable. Les Sraddet ont déjà compétence pour réguler l’engrillagement et sont donc déjà pourvus en la matière.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Défavorable, pour les mêmes raisons.

    (L’amendement no 26 n’est pas adopté.)

    Article 2

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 6 et 43, tendant à supprimer l’article 2.
    La parole est à M. Sylvain Carrière, pour soutenir l’amendement no 6.

    M. Sylvain Carrière

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    Par cet amendement, nous vous demandons, madame la secrétaire d’État, de supprimer la contravention prévue en cas d’introduction involontaire et sans dégâts causés au sein d’une propriété privée. Cela concerne les propriétés privées situées aux abords de chemins ruraux ou de sentiers de randonnée. Nous mettons ainsi en avant la libre circulation des promeneurs, ainsi que le partage de nos paysages et de nos forêts.
    Vous le savez bien : lors de promenades ou de randonnées, il est parfois délicat voire impossible de savoir si l’on se trouve sur un terrain privé ou non. Bien que l’article 2 précise que « le caractère privé du lieu », qui conditionne l’amende, doit être « clairement identifié par une signalétique spécifique », nous savons qu’une telle mesure s’avère à l’usage impossible à appliquer sans dénaturer les espaces naturels par la pose de pancartes à tout-va. À moins d’avoir le cadastre sous les yeux, les randonneurs seront donc condamnés à suivre rigoureusement le tracé des chemins. Vous connaissez bien les entraves à la libre circulation, engagées pendant la période du covid ; la réponse, comme toujours avec vous, c’est 135 euros d’amende ! Par le présent amendement, nous disons non à cette société de contrôle permanent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – « Oh ! » sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 43 de Mme Lisa Belluco est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Monsieur Carrière, je vous invite à venir participer à la commission du développement durable (« Il y est ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES), car les débats y ont jusqu’à présent toujours été respectueux, et ce n’est pas avec vous que cela va changer.
    Le débat mérite d’avoir lieu : je comprends ce que vous dites à propos de la propriété privée, de ce que peuvent parfois vivre les promeneurs et de leur libre circulation. Mais il ne viendrait à personne l’idée de permettre à tout le monde d’entrer sur la totalité d’une propriété privée ! Certes, la loi « littoral » existe, nous y reviendrons, mais en l’espèce, nous avons cherché un compromis consistant à baisser l’amende prévue, sans toutefois la supprimer : nous l’avons fait passer de la cinquième classe des contraventions, comme le Sénat le prévoyait, à la quatrième, trouvant ainsi une forme de compromis.
    Je comprends votre logique, qui renvoie à celle que vous avez parfois défendue s’agissant du littoral et de la libre circulation totale qui y a cours, mais nous recherchons ici un équilibre permettant de garantir le respect de la propriété privée en prévoyant une sanction qui soit proportionnée, donc moins importante que celle qu’avait prévue le Sénat. Avis défavorable donc : même si je comprends l’esprit de votre amendement, je pense qu’il faut aussi respecter la propriété privée.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 6 et 43 ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Bien sûr, lorsqu’on est en forêt, il est parfois difficile de reconnaître les délimitations entre les parcelles. Cela dit, je donnerai un avis favorable à l’amendement no 64 de M. le rapporteur, que nous examinerons ensuite et qui viendra satisfaire le vôtre, monsieur Carrière et madame Belluco. Il importe aussi de pouvoir sanctionner les intrusions volontaires caractérisées, et je trouve que le travail effectué depuis l’examen en commission a permis de mieux borner les choses. Je ne suis pas favorable à ce que l’on revienne sur la décision prise en commission, qui a fait de l’intrusion une contravention de quatrième classe – nous avons déjà baissé d’un cran par rapport à ce qui était prévu initialement. Une telle disposition doit être conservée.
    Cependant, il m’apparaît comme à vous nécessaire de mieux informer les promeneurs lorsqu’ils se trouvent sur une propriété privée. Encore une fois, c’est une position d’équilibre qui a été trouvée et vous avez majoritairement souhaité conserver cette disposition. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco.

    Mme Lisa Belluco

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    Je comprends tout à fait l’importance de respecter la propriété privée et de protéger les espaces qui étaient clos et vont se retrouver non clos ; je vois bien que c’est ce que vous recherchez, monsieur le rapporteur. Je tiens toutefois à appeler encore une fois votre attention, chers collègues, sur le fait que 75 % du couvert forestier français appartient à des propriétaires privés. C’est aussi dans ces forêts que les gens se promènent, et non uniquement dans les forêts publiques.

    M. Nicolas Forissier

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    Ils peuvent emprunter les chemins communaux !

    Mme Lisa Belluco

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    Le fait d’ajouter une signalétique spécifique constitue certes un premier pas, et j’avais indiqué, lorsque j’avais défendu l’amendement en question en commission – il avait été adopté –, que l’on risquait de voir se multiplier les panneaux « propriété privée » partout dans nos forêts, ce qui ne serait pas non plus satisfaisant. Je crois vraiment qu’il faut approfondir la réflexion, car la sanction ne me paraît pas être la bonne solution, ni la seule solution, ni même la solution la plus efficace pour protéger la propriété privée et pour laisser libre l’accès aux chemins de nos forêts. Nous pourrions peut-être réfléchir à une solution permettant le libre accès à tous les chemins, à condition d’y rester sans pénétrer dans la forêt proprement dite – tous les chemins ne sont pas communaux.
    C’est à mon avis une solution à creuser, car je crains que l’adoption d’un tel article, qui prévoit des sanctions très fortes pour des délits qui n’en sont en fait pas, ne nous entraîne vers des dérives regrettables.

    M. Nicolas Forissier

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    C’est un projet collectiviste, là !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Raquel Garrido.

    Mme Raquel Garrido

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    Vous venez de faire appel à notre esprit de confiance, et vous nous avez dit, à propos des fédérations de chasseurs et de leurs agents, qu’il fallait avoir confiance dans leur aptitude à procéder à des contrôles en toute bonne foi, hors de tout conflit d’intérêts. Je vous propose donc, dans le même esprit, de faire confiance aux promeneurs !

    M. Bruno Millienne

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    Mais vous, vous n’avez pas fait confiance aux chasseurs !

    Mme Raquel Garrido

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    Si nous acceptons d’adopter cette proposition de loi avec vous, en permettant que certains de ses articles soient votés à l’unanimité, vous devez aussi faire l’effort de considérer que le promeneur n’est pas là pour abîmer la propriété privée d’autrui.

    M. Bruno Millienne

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    Ah, mais vous ne vous baladez pas souvent en forêt !

    Mme Raquel Garrido

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    Au demeurant, le fait de pénétrer dans un espace privé et de l’abîmer reste évidemment répréhensible et punissable. Ce n’est pas là-dessus que porte notre amendement, qui vise simplement à faire que le promeneur traversant une propriété privée sans l’endommager, de quelque manière que ce soit, ne s’expose pas automatiquement à une contravention, donc à une sanction d’ordre pénal. Je crois percevoir dans ce que vous dites l’idée selon laquelle en l’absence de sanction prévue, il deviendrait permis…

    M. Bruno Millienne

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    …d’entrer dans une propriété privée !

    Mme Raquel Garrido

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    …d’agir de la sorte. Mais non ! En droit, ce n’est pas vrai ! Ce n’est pas parce qu’une norme n’est pas assortie d’une sanction qu’elle n’existe pas.
    Je tirerai du droit français un exemple que vous connaissez tous : l’article 40 du code de procédure pénale, qui impose aux agents publics de dénoncer des faits répréhensibles dont ils auraient connaissance, n’est pas assorti d’une sanction. Vous connaissez cet article, et il vous arrive peut-être de saisir le procureur de la République à ce titre, en lui transmettant une information après avoir été témoin d’un délit. Si vous ne le faites pas, vous violez une loi, sans toutefois vous exposer à une sanction. C’est la situation juridique dans laquelle nous proposons de placer les promeneurs – ceux qui sont de bonne foi, bien entendu. À défaut, si l’on décidait d’appliquer une vision quelque peu absolutiste du droit de propriété, qui n’est d’ailleurs pas celle de la loi française, le fait d’ôter les grillages perdrait un peu de son sens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon.

    M. Olivier Falorni

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    Cormier va ramener un peu d’ordre !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Ce n’est pas tellement une question de confiance. Nous en convenons avec vous, madame Garrido : lorsque nous nous promenons en famille, que ce soit en Sologne, en forêt d’Allogny, à Brinon-sur-Sauldre…

    M. Nicolas Sansu

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    Ou à Vouzeron !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    …ou à Vouzeron, naturellement – pour faire plaisir à notre collègue Sansu –, et que nous passons d’une parcelle domaniale à une parcelle dite privée, il n’y a aucune raison pour que nous tombions sous le coup d’une contravention de quatrième classe ! C’est pourquoi nous allons proposer d’adopter l’amendement du rapporteur Ramos, qui a trait aux conditions dans lesquelles devront se matérialiser les limites de propriétés.
    Mais ne perdons pas de vue que cette loi est une avancée historique grâce à laquelle nous allons faire tomber ces grands grillages qui clôturent nos forêts et les remplacer par des clôtures de 1,20 mètre permettant de laisser passer le gibier.
    Pour que cette disposition rétroactive puisse être validée par le Conseil constitutionnel, nous devons prévoir une condition de proportionnalité – c’est la règle des trente ans que nous avons adoptée à l’article 1er – mais aussi une compensation – on ne pourra pas pénétrer dans ces propriétés désengrillagées au 1er janvier 2027 sans encourir une contravention de quatrième classe.
    Cette disposition ne vise pas les promeneurs comme vous et moi, mais une pratique qui a cours dans nos forêts : des équipes de dix ou vingt personnes viennent ramasser tout ce qui traîne – champignons, jonquilles et cætera pour les vendre ensuite à la volée.

    M. Bruno Millienne

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    Exactement !

    M. Nicolas Forissier

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    Très bien !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Considérant que nous sommes parvenus à un bon accord entre les parties, nous souhaitons conserver la contravention de quatrième classe, assortie d’une condition que va nous proposer le rapporteur dans un instant. (MM. Bertrand Bouyx et Bruno Millienne applaudissent.)

    Mme Raquel Garrido

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    Dans ce cas, pourquoi ne pas avoir proposé un sous-amendement ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Madame Garrido, ce que vous défendez est juste. En commission, nous avions accepté l’amendement de Mme Belluco qui craignait qu’un marquage de la propriété privée ne fasse fleurir des panneaux disgracieux un peu partout. Elle se disait embêtée, ce qui nous avait conduits à cet arbitrage. Votre description est juste, et il me semble que le ministère prévoit des réunions de travail à propos de ces chemins communaux que les promeneurs empruntent à vélo tout-terrain (VTT) ou à pied avant de se retrouver parfois sur des tronçons accaparés par des propriétaires privés jouissant d’un délai de prescription.

    M. Nicolas Forissier

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    Ah !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Le marcheur ou le cycliste peut avancer sans avoir un GPS en permanence et se retrouver tout à coup sur une propriété privée.

    M. Philippe Vigier

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    C’est vrai !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    En commission, nous avons donc pris l’amendement de Mme Belluco, mais en le modifiant – ainsi que vous allez le voir un peu plus tard – pour que la sanction ne s’applique que lorsque l’entrée dans la propriété privée a été délibérée. Nous répondons ainsi à votre préoccupation, ce qui ne nous empêchera pas d’avoir des discussions de travail au ministère parce que, en effet, il y a en France des kilomètres de chemins communaux qui ont été accaparés par des propriétaires privés, les maires ruraux n’ayant pas reçu les moyens de les entretenir alors qu’ils en avaient la volonté. Et cela dure depuis cinquante ans ! Nous devons donc réfléchir à ce problème que vous soulevez, madame Garrido, et nous employer à y trouver remède dans les cinq ans à venir.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Madame Garrido, je voulais vous préciser que les barrières prévues seront d’une hauteur de 30 centimètres ou de 1,20 mètre, en fonction du type d’animaux qu’elles devront laisser passer – petit ou grand gibier. Face à une barrière de 1,20 mètre, un humain saura qu’il n’a pas à pénétrer dans la propriété.

    M. Nicolas Forissier

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    Bien sûr !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Le risque d’erreur s’en trouvera limité et le caractère intentionnel de l’entrée dans une propriété privée plus facile à mettre en évidence et à verbaliser.

    M. Nicolas Forissier

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    Mais oui !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    D’où cette contravention de quatrième classe, puisque vous conviendrez tous de la nécessité de sanctionner une personne qui pénètre sciemment dans une propriété privée. Soyez donc à l’aise avec cette mesure.

    M. Bruno Millienne

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    Très bien !

    Mme Blandine Brocard

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    Parfait !

    M. Nicolas Sansu

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    Ça fait cher le kilo de cèpes !

    (Les amendements identiques nos 6 et 43 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 27 rectifié.

    Mme Mathilde Paris

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    Nous voulons revenir à la contravention de cinquième classe prévue dans la version initiale du texte. Le code pénal indique très clairement que l’amende peut atteindre jusqu’à 1 500 euros, ce qui veut dire qu’elle peut être inférieure, son montant étant soumis à l’appréciation du juge. Le promeneur qui s’est trompé de chemin ne se verra pas infliger une amende de 1 500 euros. Quant au propriétaire qui supprime son grillage ou en réduit la hauteur pour se conformer à la loi, il aura la garantie du respect de son droit de propriété. Comme je l’ai dit en préambule, c’est un argument essentiel pour convaincre les sénateurs de voter ce texte, et de réconcilier tout le monde – propriétaires, promeneurs et chasseurs – sur le sujet.

    M. Nicolas Sansu

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    Ils ne veulent pas du Smic à 1 500 euros, mais ils veulent bien des amendes !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Madame la députée, vous tentez de remettre en question l’équilibre de l’article 2, que nous avons trouvé. Il me semble démesuré d’envisager d’infliger cinq contraventions à une famille de cinq personnes, qui se serait égarée. Il faut être raisonnable. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

    M. Jean-Louis Bricout

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    Pour ma part, j’ai l’impression que nous avons un souci d’appréciation de ce que l’on peut appeler une intrusion. Ne serait-il pas possible, madame la secrétaire d’État, de rédiger un sous-amendement qui introduirait une forme de tolérance par rapport à ces contraventions ? (Mme Raquel Garrido applaudit.) Réservons la contravention aux cas où il y a vraiment une atteinte à la propriété par des dégradations ou des cueillettes. Il faut apprécier ces situations avec bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme Raquel Garrido

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    Tout à fait !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Emmanuel Blairy.

    M. Emmanuel Blairy

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    La contravention de cinquième classe oblige l’agent verbalisateur à rédiger un rapport, ce qui permet au juge d’apprécier la nature de l’infraction de manière beaucoup plus précise. L’amende de quatrième classe, elle, se règle directement par timbre-amende ou paiement électronique. Notre amendement permet d’équilibrer l’appréciation du juge.

    (L’amendement no 27 rectifié n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de sept amendements, nos 21, 44, 22, 45, 7, 46 et 101, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 21 et 44 sont identiques, ainsi que les amendements nos 22 et 45, et les amendements nos 7 et 46.
    La parole est à M. Sylvain Carrière, pour soutenir l’amendement no 21.

    M. Sylvain Carrière

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    Si vous le permettez, madame la présidente, je vais faire une seule présentation pour les amendements nos 21, 22 et 7.
    Monsieur le rapporteur, je vous rassure : je participe aux travaux de la commission le mercredi.
    Décidément, la minorité présidentielle est dure en affaires ! (Exclamations sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem.) Chers députés du MODEM, nous savons la peine que vous avez à vous démarquer au sein de cette majorité minoritaire (Mêmes mouvements), mais ajouter une énième tâche à nos policiers – cette fois-ci en dehors des aires densément peuplées – vous semble-t-il être la solution adaptée ? Sérieusement, est-ce que la priorité sécuritaire en 2022 est de faire la chasse aux randonneurs ? Et si vous comptez faire appliquer ces mesures par des volontaires chasseurs, comme précédemment évoqué, qui ira les contrôler, eux ? (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    Chers collègues, s’il vous plaît.

    M. Sylvain Carrière

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    L’application de ce texte est tout bonnement impossible. Il instaurerait un climat délétère dans nos communes et nos espaces naturels, synonymes de liberté. Quel est le bénéfice écologique d’une telle mesure qui va accentuer la distance entre les hommes et la nature ? La prochaine étape est-elle de permettre la chasse aux dealers de champignons ? Un peu de sérieux, je vous prie ! (Mêmes mouvements.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Cela n’a rien à voir !

    M. Bruno Millienne

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    Insupportable !

    M. Sylvain Carrière

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    Si vous ne voulez pas supprimer la contravention, allez-vous au moins admettre qu’une contravention de classe inférieure est suffisante pour sanctionner le délinquant randonneur ? A-t-on enfin trouvé le juste prix qui conviendra à toute la Macronie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Laurent Croizier

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    Quand on commence par une agression, on devient inaudible !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l’amendement no 44. S’il vous plaît, chers collègues, essayons de poursuivre nos débats dans la sérénité.

    Mme Lisa Belluco

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    Au sein de la NUPES, nous nous sommes organisés sur le mode « bon flic/mauvais flic », mais le fond est le même ! (Sourires et exclamations sur divers bancs.)
    Nous avons déposé ces amendements, qui visent à réduire le niveau de l’amende, pour reparler de l’accès à la nature et des risques de dérives qu’introduit cette disposition. Nous ne demandons pas la collectivisation des terres ou je ne sais quoi d’autre. Nous, les écologistes, comprenons qu’il s’agit de protéger la propriété privée. Nous sommes d’accord : les gens qui vont enlever les grillages et clôtures mettront vraisemblablement une autre marque signifiant les limites de leur propriété.
    Or, je le répète, 75 % des forêts sont privées, une bonne partie étant non clôturées et fréquentées par des promeneurs. Ces forêts et autres espaces risquent d’être visités par inadvertance par des promeneurs n’ayant aucune intention de violer une propriété privée. L’amende proposée nous paraît disproportionnée. Les montants maximums sont de 750 euros pour une amende de quatrième classe, de 450 euros pour une amende de troisième classe, de 150 euros pour une amende de deuxième classe et de 38 euros pour une amende de première classe. Revenons à nos cueilleurs de champignons, souvent pris comme exemple dans nos débats. S’ils doivent payer 38 ou 150 euros d’amende après s’être égarés dans une parcelle de forêt privée non clôturée ou insuffisamment marquée, ils seront très vigilants par la suite.
    Le but n’est pas d’ouvrir tout à tout le monde. Nous n’en sommes pas là et nous comprenons qu’il faut protéger la propriété privée. Nous sommes seulement soucieux d’éviter des dérives, de voir infliger des amendes à des gens qui se sont tout bonnement perdus dans la forêt. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Les amendements identiques nos 22 de Mme Manon Meunier et 45 de Mme Lisa Belluco, tout comme les amendements identiques nos 7 de M. Loïc Prud’homme et 46 de Mme Lisa Belluco sont défendus.
    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 101.

    Mme Mathilde Paris

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    Nous proposons, comme précédemment, de revenir à une contravention de cinquième classe.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Avis défavorable pour une raison simple : nous avons trouvé un bon équilibre en atténuant la sanction prévue par le Sénat – une contravention de cinquième classe.
    Monsieur Carrière, nous avons toujours eu des débats apaisés, alors que vous êtes violent avec nous, avec le MODEM. Nous n’avons pas changé de ligne, nous avons toujours été des modérés. La violence, qu’elle soit faite aux hommes, aux femmes ou aux animaux, on la laisse aux autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Avis défavorable à l’ensemble de ces amendements. Nous défendons la position d’équilibre trouvée en commission : le passage d’une amende de cinquième classe à une amende de quatrième classe. Une fois encore, je tiens à assurer Mme Belluco que ne sont ciblées que les intrusions volontaires caractérisées. Cette position d’équilibre me semble pouvoir faire consensus sur ces bancs.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Raquel Garrido.

    Mme Raquel Garrido

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    Je pense que la discussion permet toujours d’avancer.
    Première chose : personne ici ne demande que la propriété privée devienne propriété du promeneur, de personne ou de tous. Nous restons à droit constant. Nous ne cherchons pas à changer la titularité du territoire concerné.
    De quoi s’agit-il ? Alors qu’il est prévu de créer de nouvelles barrières permettant le passage d’animaux non domestiques de différentes tailles, se pose la question du passage des représentants de l’espèce humaine. Comme je l’ai déjà indiqué, je préconise de faire confiance au promeneur. Notre collègue Cormier-Bouligeon nous explique que le problème n’est pas tant le promeneur qui traverse un territoire privé, même s’il le fait en toute conscience, que le dommage potentiel causé notamment par des prélèvements de masse à vocation commerciale. Il me semble donc que l’idée de créer une nouvelle procédure administrative – puisque c’est de cela qu’il s’agit – n’est pas pertinente. Alors que vous êtes généralement pour l’allègement administratif et que vous critiquez la gauche en l’accusant de vouloir toujours tout interdire, nous sommes ici à fronts renversés : c’est vous qui voulez absolument un nouvel échelon administratif, des agents chargés de dresser des amendes, des contrôles, et même des rapports, pour nos collègues de l’extrême droite.
    Je pense au contraire qu’il faut laisser sa chance à la phase d’expérimentation. Comme l’a indiqué le rapporteur, une séquence nouvelle s’ouvre. Dans ce cadre, il me semble que nous pourrions – le cas échéant par le biais d’un sous-amendement du Gouvernement, comme le suggérait Jean-Louis Bricout – limiter le périmètre des sanctions aux hypothèses décrites par notre collègue Cormier-Bouligeon. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. Bruno Millienne

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    C’est ce que la secrétaire d’État vient de dire !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Millienne.

    M. Bruno Millienne

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    J’entends votre propos, madame Garrido. Vous vous êtes exprimée calmement et posément, ce que j’apprécie grandement – c’est pourquoi je me permets de vous répondre. Cette discussion a eu lieu en commission. S’il est vrai que le chemin de crête à emprunter est étroit, j’estime que le travail que nous avons mené a permis de trouver un bon compromis. Vous appelez à faire confiance aux promeneurs et à alléger les sanctions qu’ils encourent, voire à les laisser se promener comme ils le veulent. Le paradoxe, c’est que quand nous vous avons demandé de faire confiance aux agents des fédérations de chasseurs, vous avez voté contre : la confiance, pour vous, ne va que dans un sens.

    Mme Raquel Garrido

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    Pour vous aussi, visiblement !

    M. Bruno Millienne

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    Je considère que le compromis que nous avons trouvé est plutôt bon. Le rapporteur a indiqué clairement – et il me semble que la secrétaire d’État l’a confirmé – que nous devrons, durant les cinq années qui nous séparent de l’entrée en vigueur de la loi, trouver le moyen de nous montrer plus précis. Nous nous accordons tous sur ce point.
    Un dernier mot pour finir : tant que vous, la minorité minoritaire, présenterez vos amendements comme vous l’avez fait, nous serons peu enclins à les accepter. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)

    (Les amendements identiques nos 21 et 44 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements identiques nos 22 et 45 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements identiques nos 7 et 46 ne sont pas adoptés.)

    (L’amendement no 101 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 64.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Il m’a été inspiré par Mme Belluco. Je ne l’ai pas plagiée, rassurez-vous ! Simplement, ses interventions en commission ont nourri ma pensée.
    L’amendement vise à préciser qu’il n’est pas nécessaire d’installer des panneaux pour signifier le caractère privé d’une propriété : il suffit, comme l’a expliqué Mme la secrétaire d’État, de le matérialiser physiquement, en installant de nouvelles clôtures ou toute autre signalisation. Cette nouvelle rédaction présente l’avantage de ne pas encourager la pose de panneaux qui seraient disgracieux, puisque, contrairement à ce qui est prévu dans la rédaction actuelle, il importe seulement d’installer une matérialisation physique suffisante pour délimiter la propriété privée, comme une barrière en bois. Je ne voulais pas que le texte favorise le développement d’une pollution visuelle qui vous aurait gênée, madame Belluco.

    Mme Lisa Belluco

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    Tout à fait.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Il s’agit en effet de l’amendement que nous attendions de M. le rapporteur pour sécuriser le dispositif que Mme Belluco avait défendu en commission et pour mieux équilibrer la mesure. La rédaction proposée vise à préciser qu’il suffit que la limite de parcelle soit matérialisée physiquement – soit par une barrière, soit par un panneau – pour que la contravention s’applique. Avis favorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco.

    Mme Lisa Belluco

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    Voilà une nouvelle occasion de parler de l’accès à la nature ! Je vous rejoins sur le fait que l’amendement adopté en commission, qui prévoyait d’installer une signalétique pour marquer la limite d’une propriété privée, était sûrement trop restrictif, donc pas tout à fait satisfaisant. J’en étais moi-même convenue en le présentant. Cependant les mots « matérialisé physiquement » me semblent très vagues. Permettent-ils de se prémunir de tout risque de dérive ? Un propriétaire ne pourrait-il pas se prévaloir d’une matérialisation visible dès lors que des arbres ont été coupés ou qu’une ligne est tracée au sol ?

    M. Richard Ramos, rapporteur et Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Non, non !

    Mme Lisa Belluco

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    Qu’est-ce qu’une limite matérialisée physiquement ? Ne conviendrait-il pas de préciser ce terme pour éviter la dérive qui conduirait à sanctionner un promeneur égaré ?

    M. Erwan Balanant

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    Le texte prévoit que si un promeneur se perd, il ne recevra pas d’amende !

    (L’amendement no 64 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 2, tel qu’il a été amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        88
            Nombre de suffrages exprimés                76
            Majorité absolue                        39
                    Pour l’adoption                68
                    Contre                8

    (L’article 2, amendé, est adopté.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures dix.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    Article 4

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Carrière, pour soutenir l’amendement no 10.

    M. Sylvain Carrière

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    Il vise à ce que l’écocontribution, qui doit financer des actions apportant un bénéfice écologique, ne puisse pas servir à réparer des dommages causés à l’environnement.
    Le texte prévoit que l’écocontribution puisse être mobilisée pour adapter des clôtures afin qu’elles respectent les nouvelles normes ou pour procéder au désengrillagement préalable à la plantation de haies arboricoles. Or les clôtures appartiennent le plus souvent à de riches propriétaires. Nous souhaitons que l’écocontribution ne serve pas à réparer des dommages environnementaux : ces coûts doivent être assumés par les propriétaires, conformément à la loi.
    L’écocontribution, dans ce cadre, ne doit financer que le replantage de haies composées de plusieurs essences d’arbres et d’arbustes adaptées au changement climatique, et non le désengrillagement, lequel doit rester à la charge du propriétaire. Si ce dernier n’est pas en mesure de financer l’opération au motif qu’elle serait trop onéreuse, nous l’invitons à venir marcher avec nous dimanche 16 octobre afin de lutter contre la vie chère et l’inaction climatique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Bruno Millienne

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    C’était l’instant de publicité !

    M. Olivier Falorni

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    En marche !

    M. Philippe Vigier

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    Rejoignez-nous parmi les marcheurs ! Nous avons de bonnes chaussures !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Je constate avec plaisir que vous êtes pour la marche. On apprend toujours des autres, même quand on n’est pas d’accord avec eux. Ainsi, j’ai appris de Mme Garrido, qui expliquait tout à l’heure qu’il fallait savoir faire confiance. Je la prends au mot : faisons confiance ! En l’occurrence, faisons confiance aux personnes que défend Mme Belluco, à savoir les agents de l’OFB.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Je m’explique. Les fonds mobilisés pour des replantages de haies, qui permettent de recréer de la biodiversité, font l’objet d’appels à projets gérés et organisés par les agents de l’OFB. Si ces agents, que nous défendons comme vous, considèrent que les appels à projets ne répondent pas à cet objectif de biodiversité, ils les refuseront.
    Je demande donc le retrait de cet amendement qui est satisfait à la fois parce que vous pouvez faire confiance aux agents de l’État s’agissant du respect de la biodiversité et parce que ce sont ces agents qui décideront d’accorder ou non les fonds. À défaut, avis défavorable.

    M. Bruno Millienne

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    Très bien, monsieur le rapporteur !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Même avis. Votre amendement me laisse perplexe, car l’écocontribution ne peut servir uniquement à faire tomber des grillages pour poser des barrières. La loi se contente de donner la possibilité d’accompagner des projets.
    Il existe néanmoins certains garde-fous puisque les propositions sont faites à la Fédération nationale des chasseurs avant de remonter à l’Office français de la biodiversité, lequel juge, après examen, si un accompagnement est opportun ou non.
    Évidemment, certains propriétaires forestiers n’auront pas besoin d’être accompagnés. Je fais confiance aux agents de l’OFB pour avoir une vision claire de la situation et pour prendre la décision la plus évidente. Cependant, il ne faudrait pas mettre en difficulté certains propriétaires qui auraient besoin d’un accompagnement dans leur projet de désengrillagement. Car n’oublions pas que l’objectif est de désengrillager les parcelles.
    Il n’est pas nécessaire d’ajouter les précisions que vous avez évoquées, laissons les choses se faire. Je fais confiance aux agents de l’OFB qui, en grands professionnels, sauront prendre les bonnes décisions.

    M. Bruno Millienne

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    Très bien !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Bravo, madame la secrétaire d’État !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    M. Bruno Millienne

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    Votre confiance est à géométrie variable !

    Mme Manon Meunier

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    Nous faisons nous aussi confiance aux agents de l’OFB…

    M. Bruno Millienne

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    On ne dirait pas !

    Mme Manon Meunier

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    …pour accomplir leur mission qui consiste à faire respecter la loi. C’est d’ailleurs pour cela que, tout à l’heure, nous avons émis le souhait qu’eux seuls conservent le pouvoir de faire respecter le code de l’environnement. Leur force, c’est qu’en tant qu’agents de l’État ils doivent faire preuve d’impartialité et appliquer la loi telle qu’elle est sans traiter les dossiers différemment en fonction des citoyens concernés.
    Voilà pourquoi nous souhaitons que la loi soit la plus claire possible. Plusieurs d’entre nous l’ont dit dans la discussion générale, les clôtures appartiennent à de riches propriétaires, en particulier en Sologne. (Protestations sur quelques bancs des groupes Dem et LR.) Je ne vous apprends rien, cela a été dit tout à l’heure. S’ils souhaitent une aide afin de planter des haies, très bien – puisque c’est à cela que doit servir l’écocontribution.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Mais c’est le cas !

    Mme Manon Meunier

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    En revanche, on ne peut accepter qu’ils bénéficient de cette aide pour causer un dommage à l’environnement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Lisa Belluco applaudit également.)

    (L’amendement no 10 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Les amendements identiques nos 56 deuxième rectification de M. François Cormier-Bouligeon et 63 deuxième rectification de M. le rapporteur sont rédactionnels.

    (Les amendements identiques nos 56 deuxième rectification et 63 deuxième rectification, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 25.

    Mme Mathilde Paris

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    Il porte sur l’écocontribution. Nous considérons que celle-ci ne doit pas servir à financer les opérations de mise en conformité, liées au désengrillagement, auxquelles les propriétaires n’auraient pas procédé dans le délai imparti. Cela rejoint un peu l’amendement proposé par la NUPES.
    Les propriétaires de parcs engrillagés étant souvent des personnes qui ont les moyens de procéder à la mise en conformité, il nous semblerait un peu exagéré d’utiliser l’argent du contribuable pour financer ces travaux.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Je le répète, l’article prévoit uniquement de laisser la possibilité d’un accompagnement. Il ne me semble pas souhaitable de le refuser lorsqu’il est nécessaire. Laissons les agents de l’Office français de la biodiversité se pencher sur les dossiers et déterminer si un accompagnement est utile ou non. À mon avis, dans un grand nombre de cas, la réponse sera négative parce que les propriétaires ont les moyens de payer ces travaux eux-mêmes. Or il ne s’agit pas de mobiliser de l’argent public pour aider les grands propriétaires. En revanche, dans quelques cas, un accompagnement est sans doute nécessaire. Privilégions donc le cas par cas.
    Parce qu’il faut faire preuve de sagesse sur ces questions, j’émettrai un avis défavorable sur cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Forissier.

    M. Nicolas Forissier

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    Je me permets de faire remarquer que, normalement, tous les citoyens sont égaux devant la loi. On ne regarde pas quels sont les moyens dont disposent les uns et les autres. Dès lors, pourquoi stigmatiser des propriétaires qui seraient prétendument très riches et qui n’auraient pas le droit de bénéficier d’une incitation ? Au demeurant, nombre d’entre eux n’en feront jamais la demande, car ils ne se lanceront pas dans une démarche complexe.
    Toutefois, nous pourrions choisir la voie de l’apaisement. Si l’on veut que la loi soit incitative, pourquoi fermer la porte à des personnes qui, même si elles disposent peut-être de plus de moyens que d’autres, doivent elles aussi être incitées à modifier leur clôture ? Je sais bien qu’une telle disposition ne figure pas dans le texte, je vise le commentaire qui vient d’être fait par notre collègue Manon Meunier. Je suis surpris d’entendre ce type d’argument.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Je souhaite réagir aux propos de M. le député. Il ne faudrait pas non plus aboutir à une forme de marchandage, avec un propriétaire qui accepterait de faire tomber ses grillages et d’installer une clôture seulement si une aide de l’Office français de la biodiversité lui était accordée.
    Il faut procéder au cas par cas. Un accompagnement est parfois nécessaire mais, dans d’autres cas, les travaux de mise en conformité doivent être effectués sans aide. Nous devons avoir un regard bienveillant sur toutes ces situations. L’article 4, tel qu’il est rédigé actuellement, et qui reflète la position du Gouvernement, le permet.

    M. Nicolas Forissier

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    Puisque c’est possible pour les uns…

    (L’amendement no 25 n’est pas adopté.)

    (L’article 4, amendé, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par les groupes Renaissance et Démocrate (MODEM et indépendants) d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Après l’article 4

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 61 et 9, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon, pour soutenir l’amendement no 61.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Il est retiré.

    (L’amendement no 61 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier, pour soutenir l’amendement no 9.

    Mme Manon Meunier

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    Il vise à interdire l’introduction de gibier importé. Comme nous le savons – cela a été dit plusieurs fois –, une telle pratique déséquilibre les écosystèmes, en particulier s’agissant des espèces exotiques, que l’on voit apparaître régulièrement dans les enclos car elles se reproduisent rapidement.
    Je prendrai un exemple dont vous avez peut-être entendu parler. Une douzaine de lapins furent introduits en Australie au XIXe siècle par un chasseur. Cinquante ans plus tard, on en comptait plus de 500 millions dans le pays, ce qui a causé des dégâts phénoménaux pour une raison simple : on ne doit pas dérégler les écosystèmes en y introduisant aussi rapidement des espèces venues d’ailleurs. Je vous propose donc d’interdire ces pratiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Sagesse.

    Mme Manon Meunier

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    Ah !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Votre amendement est satisfait. L’introduction de grand gibier dans le milieu naturel est déjà impossible aujourd’hui s’agissant du sanglier. L’article L. 424-11 du code de l’environnement prévoit que leur transport est interdit et que l’introduction des cervidés, par exemple, est soumise à autorisation préfectorale. La loi est déjà assez bavarde sur le sujet, il n’est pas utile d’ajouter une précision qui existe déjà. Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

    M. Nicolas Forissier

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    Absolument ! Vous avez raison !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Caroline Fiat.

    Mme Caroline Fiat

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    Madame la secrétaire d’État, nous ne vous parlons pas seulement de grand gibier – tant mieux, si, comme vous nous l’avez dit, cette interdiction existe pour eux –, mais de tous les gibiers. Ma collègue a parlé des lapins. Or, aux dernières nouvelles, les lapins ne font pas partie des grands gibiers. Nous ne retirerons pas notre amendement, car la loi doit être claire. Vous nous avez donné l’exemple des cervidés et des sangliers, mais d’autres espèces sont bien concernées par cette pratique. Il faut y mettre un terme.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Madame Fiat, votre argument ne tient pas dans la mesure où l’interdiction est bien mentionnée – j’ai demandé à mes services de le vérifier – dans le code de l’environnement s’agissant des cervidés et même des lapins.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérard Leseul.

    M. Gérard Leseul

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    Dans sa grande sagesse, le rapporteur a laissé à l’Assemblée la possibilité d’adopter cet amendement de bon sens et de précision. Même s’il est relativement superfétatoire, il serait souhaitable, dans le cadre de la coconstruction que vous appelez de vos vœux, sinon de donner raison à nos collègues, du moins de permettre l’adoption de cet amendement.

    Mme Caroline Fiat

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Je reprendrai l’expression, employée tout à l’heure par M. Ramos : « fromage et dessert » – sachant que le fromage doit être consommé avec du Sancerre ou du Menetou ! Plus sérieusement, madame la secrétaire d’État a expliqué que l’amendement était satisfait.
    Ce qui importe ici, comme dans le cas de l’interdiction de l’importation des suidés dans les enclos – mesure que nous avions prise dans le cadre de la loi de 2019 –, c’est le contrôle de l’application de la loi. Dans quelques semaines, nous voterons pour déterminer les moyens accordés à l’OFB. J’insiste donc auprès de tous les collègues ici présents sur la nécessité absolue de renforcer ces moyens pour permettre aux agents de contrôler l’application de ces interdictions.
    Je donnerai un exemple : dans le Cher, douze postes sont inscrits au tableau. Or huit seulement sont pourvus. Les agents n’ont pas donc les moyens de faire leur travail convenablement. Nous devons absolument renforcer les moyens de l’OFB. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. Sylvain Maillard

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    Excellent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Naegelen.

    M. Christophe Naegelen

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    Je suis opposé à l’amendement qui vient d’être discuté. Je prendrai l’exemple du grand tétras. Ce gibier peut être chassé dans les Pyrénées mais, à l’inverse, c’est une espèce protégée dans la région Grand Est, où il doit être réintroduit. Voilà donc le cas d’un gibier dont il faut forcer l’introduction pour lui permettre de se reproduire dans des massifs spécifiques. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Roger Chudeau.

    M. Roger Chudeau

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    Je m’associe à la proposition visant à interdire l’importation de grand gibier en France. En effet, chacun sait que nous, chasseurs, tuons 600 000 sangliers par an – sans compter ceux qui sont tués par des voitures ou que l’on ne retrouve jamais. Par conséquent il est totalement inutile et absurde d’en importer. Cependant, puisque madame la secrétaire d’État nous indique que l’interdiction existe déjà, il n’y a pas lieu de surlégiférer.
    Je m’associe donc au conseil – presque une injonction – de mon collègue Cormier-Bouligeon selon lequel nous devons renforcer les moyens de l’OFB pour que la loi puisse être appliquée. En Sologne, on voit passer presque chaque jour des camions remplis de sangliers, venus tout droit de Hongrie ou de Pologne, et que personne n’arrête ni ne contrôle. Nous devons mettre fin à cette situation.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Je commencerai par rassurer en vous lisant le texte de l’article L. 424-11 du code l’environnement, modifié par la loi du 24 juillet 2019 : « L’introduction dans le milieu naturel de cervidés et de lapins, et le prélèvement dans le milieu naturel d’animaux vivants d’espèces dont la chasse est autorisée sont soumis à autorisation préfectorale, dans des conditions et selon des modalités fixées par un arrêté conjoint du ministre chargé de la chasse et du ministre chargé de l’agriculture. » (« Donc ce n’est pas interdit ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Le premier alinéa de l’amendement est donc satisfait. Si votre objectif, madame Meunier, est d’aller plus loin…

    Mme Manon Meunier

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    Oui !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    …et donc d’interdire l’introduction en milieu naturel non seulement des lapins, mais aussi des faisans, des perdrix, de l’ensemble du petit gibier, je reprendrai les arguments du député Naegelen, à savoir qu’il n’y en a quasiment plus dans certains territoires. Et je rappelle que les lâcher ne consiste pas uniquement à les mettre dans des enclos,…

    M. Nicolas Forissier

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    Exactement !

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    …mais aussi à réintroduire des espèces en voie de disparition localement pour qu’elles puissent se régénérer et que leur population grandisse sur le territoire concerné. Une telle interdiction serait donc inopportune.
    Enfin, je précise à l’intention de M. Chudeau qu’il ne s’agit pas de savoir s’il faut ou non importer du gibier pour le placer en enclos, mais s’il faut ou non l’importer en zones naturelles. Ce n’est pas la même chose.

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    M. le rapporteur, souhaitez-vous modifier votre avis de sagesse ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Oui, madame la présidente, car les explications de Mme la secrétaire d’État m’ont éclairé. J’émets donc un avis défavorable.

    Mme Caroline Fiat

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    Oh !

    (L’amendement no 9 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 17 et 28.
    La parole est à Mme Corinne Vignon, pour soutenir l’amendement no 17.

    Mme Corinne Vignon

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    Mon amendement vise à permettre le transport d’animaux sauvages captifs vers des refuges, des sanctuaires ou des établissements qui pratiquent des soins sur ces animaux. La loi interdisant de détenir un animal sauvage, un propriétaire a été condamné en Bretagne pour avoir domestiqué une femelle sanglier, qui lui a été confisquée, et la seule solution proposée par l’OFB était d’abattre l’animal. Certes, au lieu d’être victime de cette décision injuste, la laie a pu bénéficier d’une place dans un refuge grâce à l’aide d’une célèbre association. Mais l’interdiction que j’ai évoquée est toujours en vigueur, seul étant autorisé le transport vers des établissements professionnels de chasse à caractère commercial en terrain clos, ce qui est aberrant !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Paris, pour soutenir l’amendement no 28.

    Mme Mathilde Paris

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    Je compléterai ce qu’a dit ma collègue en soulignant qu’il y a beaucoup de témoignages à propos d’animaux qui se prennent dans des grillages, et mon amendement vise plus particulièrement à tirer les conséquences de ces animaux prisonniers aujourd’hui de l’engrillagement massif. Des vidéos ont circulé à ce sujet, l’une d’elles montrant une biche qui, les pattes prises dans un grillage, n’a pu empêcher un renard de lui ouvrir le ventre et de manger son petit. Il y a un moment où il faut en tirer des leçons. Les associations qui viennent en aide à ces animaux sont là uniquement pour les soigner avant de les remettre en liberté : il faudrait donc permettre le transport desdits animaux vers les centres de soins, ni plus ni moins. Qu’ils vivent ensuite leur vie.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Défavorable à ce qu’on pourrait appeler « l’amendement Brigitte Bardot » ou « l’amendement Fondation Brigitte Bardot », quand bien même il se trouverait transformé en Harley-Davidson… J’estime en effet qu’il ne faut pas laisser n’importe qui transporter des animaux sauvages, en l’occurrence des sangliers. Votre proposition, ma chère collègue, ouvrirait la porte à un transport qui ne serait plus encadré et qui nuirait d’ailleurs aussi aux animaux.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Même avis. Votre amendement, madame Vignon, part évidemment d’un bon sentiment puisque vous souhaitez protéger tous les animaux, mais son application serait confrontée à deux obstacles très importants : d’une part, il n’existe pas de refuges à sangliers, et, d’autre part, il s’agit aujourd’hui de réguler cette population, ce qui est contradictoire avec leur remise en liberté. Leur nombre est aujourd’hui trop important pour que votre proposition soit acceptable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Frédérique Meunier.

    Mme Frédérique Meunier

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    Je rejoins Mme Vignon sur la nécessité d’améliorer actuellement le code de l’environnement. Je ne pense pas de toute façon que les personnes qui transportent déjà des animaux illégalement en soient dissuadées par cette nouvelle loi. Par contre, la disposition que propose ma collègue permettrait à des personnes bien intentionnées de transporter des animaux sauvages blessés vers un centre de soins en se posant moins de questions une fois que ce sera autorisé par la loi. Cet amendement me paraît de bon sens et je vous invite d’ailleurs à aller visiter les centres de refuge, qui travaillent d’arrache-pied.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Au-delà des arguments que j’ai exposés, il y a aussi un volet sanitaire à prendre en compte. Il serait tout de même compliqué d’autoriser le transport d’un sanglier à l’état sauvage alors que sévit la peste porcine. On ne peut qu’être touché par le destin de ce sanglier femelle qui portait un petit (« Une biche ! » sur de nombreux bancs)…

    M. Erwan Balanant

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    Visiblement, certains sont moins attendris par les sangliers que par les biches ! (Sourires.)

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    …et tout autant si c’était une biche, mais comprenez qu’on ne peut accepter sans condition le transport de ces animaux, ce ne serait pas raisonnable. Il reste possible d’essayer d’aider l’animal à s’extraire du grillage et aussi de lui prodiguer des soins sur place. Je réitère donc l’avis défavorable du Gouvernement.

    (Les amendements identiques nos 17 et 28 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l’amendement no 20.

    M. Jean-Louis Bricout

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    Ce modeste amendement propose de limiter l’intrusion des chasseurs aux abords des habitations à au moins cinquante mètres, sauf autorisation du propriétaire, et ce quelle que soit la qualité de la clôture.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Demande de retrait : cet amendement est déjà satisfait puisque l’article 1er fixe les règles encadrant l’intrusion des chasseurs dans les propriétés et prévoit la possibilité de se clôturer dans un rayon de 150 mètres.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    Monsieur Bricout, maintenez-vous votre amendement ?

    M. Jean-Louis Bricout

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    Je le retire.

    (L’amendement no 20 est retiré.)

    Article 5

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 47 et 8, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l’amendement no 47.

    Mme Lisa Belluco

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    Il est proposé d’interdire l’agrainage et l’affouragement dans tous les espaces naturels et pas seulement dans les enclos. On élargit donc un peu la focale. Je crois parler au nom de nombre d’acteurs de la nature, notamment des agriculteurs opposés à ces pratiques qui ont pour conséquence de provoquer une concentration de gibier, concentration qui peut être à l’origine de dégradations des cultures au même endroit. Je vous garantis que je ne parle pas qu’à la Confédération paysanne puisque, dans mon département, c’est plutôt la Coordination rurale. Je pense que cette proposition est partagée de tous les côtés par les acteurs de la nature au sens large.

    M. Sylvain Maillard

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    C’est vrai.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier, pour soutenir l’amendement no 8.

    Mme Manon Meunier

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    Il s’agit en effet d’interdire ces pratiques d’agrainage et d’affouragement, en tout temps et sur tout le territoire, puisque les acteurs de l’agriculture eux-mêmes sont contre ces pratiques qui favorisent des espèces plutôt que d’autres et créent des déséquilibres dans les écosystèmes qui se répercutent jusque dans leurs activités.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Demande de retrait ou avis défavorable parce qu’on peut avoir besoin d’affourager ou d’agrainer pour détourner des champs le gibier :…

    M. Roger Chudeau

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    Absolument !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    …je pense aux petits paysans qui n’ont pas les moyens de se protéger par des clôtures, notamment ceux qui cultivent bio sur quatre ou cinq hectares.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Même avis pour le même motif.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Forissier.

    M. Nicolas Forissier

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    Je vais dans le sens du Gouvernement et du rapporteur et je suis surpris de ce que vous dites, madame Belluco. Il y a peut-être des agriculteurs et des organisations agricoles qui s’expriment contre l’affouragement et l’agrainage, mais beaucoup d’autres disent le contraire parce que c’est aussi un moyen de maintenir certains animaux, notamment les sangliers, dans les massifs forestiers et d’éviter ainsi qu’ils aillent dans les cultures. Le débat est loin d’être tranché. Pour ma part, j’entends exactement l’inverse de ce que vous rapportez. Je pense donc qu’il faut à ce stade rester extrêmement prudent et je rejoins les propos du rapporteur.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    Mme Manon Meunier

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    L’affouragement ou l’agrainage ont pour but de nourrir des animaux, ce qui se traduit en réalité par une sélection des espèces, alors que d’autres techniques permettent d’effaroucher les animaux sans renforcer la population d’aucune espèce aux dépens d’une autre. En fait, nourrir une espèce sauvage, c’est la rendre quasi domestique. La pratique du nourrissage est en réalité très défavorable à l’agriculture et aux agriculteurs. Il faut de toute façon les accompagner en cas de dégâts – car il peut certes y en avoir –, mais par d’autres pratiques que celle du nourrissage.

    Mme Caroline Fiat

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    Très bonne démonstration !

    Mme la présidente

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    Mes chers collègues, je comprends que le sujet soit important et je vais encore donner la parole à plusieurs d’entre vous, mais je vous invite à être concis.
    La parole est à Mme Mathilde Paris.

    Mme Mathilde Paris

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    Je reconnais qu’il y a aujourd’hui des excès puisqu’on agraine dans des propriétés privées en hiver, au moment de la chasse, de manière à disposer de plus de gibier sur place, ce qui crée un phénomène à la fois de concentration et de surpopulation. En revanche, on ne peut pas l’interdire totalement puisque c’est un moyen d’éloigner certains animaux des cultures sensibles. Il devrait être possible de revenir sur la question à l’occasion d’un autre texte de loi qui concernerait plutôt la chasse. Je pense qu’il existe une possibilité de trouver une solution plus équilibrée qui permettrait l’agrainage au moment des cultures et l’interdirait en dehors de cette période sensible. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois

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    Il n’y a peut-être pas une interdiction générale à prendre mais, je le vois bien chez moi, la pratique de l’agrainage sur des chasses privées a provoqué des pullulations de sangliers qui n’existaient pas auparavant. Une réflexion doit donc être menée sur le sujet, d’autant plus que la modification des populations à laquelle on a assisté s’est faite très rapidement, en l’espace de quelques années.

    Mme Caroline Fiat

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

    M. Jean-Louis Bricout

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    Je vois moi aussi dans mon territoire des champs de pommes de terre détruits en deux temps trois mouvements, et c’est loin d’être agréable pour nos exploitants agricoles.
    Madame la secrétaire d’État, vous avez évoqué un décret qui permettrait de déterminer la densité maximale admise des animaux dans les enclos. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les critères qui seront pris en compte et sur les délais de mise en œuvre ?

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    En effet, madame Paris, il y a eu des abus. Mais le présent texte est très clair sur le sujet, puisqu’il interdit l’agrainage dans les espaces clos. C’est seulement cette pratique-là qui ne sera bientôt plus autorisée. Le nourrissage est bien interdit. Là, nous parlons d’agrainage et d’affouragement pour détourner les sangliers qui seraient tentés de détruire, entre autres, les champs de maïs. C’est ce que M. le rapporteur a rappelé tout à l’heure.
    Monsieur Turquois, aujourd’hui, il est plutôt question d’encadrer de façon plus stricte l’agrainage ; c’est bien le sujet de l’accord-cadre qui doit être discuté. Ce que nous remettons en cause, ce n’est pas l’agrainage en tant que tel, mais les quantités déversées. Celles-ci devraient être réduites. Toutefois, il n’est pas question de revenir sur le principe même de cette pratique, car elle a aussi son intérêt. Au demeurant, je partage votre avis : parfois, il est utile d’abaisser les quantités.
    Pour vous répondre, monsieur Bricout, ce sera un animal par hectare.

    Mme la présidente

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    Je vous remercie ; je pense que tout le monde a pu s’exprimer.

    (Les amendements nos 47 et 8, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 50 de la commission est rédactionnel.

    (L’amendement no 50, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Cormier-Bouligeon, pour soutenir l’amendement no 58 deuxième rectification.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Le mieux est parfois l’ennemi du bien. En commission, nous avons adopté une formulation un peu trop large de la dérogation à l’interdiction d’agrainage et d’affouragement. Nous proposons donc, par le présent amendement, de limiter cette dérogation aux seuls agrainages et affouragements réalisés dans un cadre scientifique.

    (L’amendement no 58 deuxième rectification, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

    (L’article 5, amendé, est adopté.)

    Titre

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérard Leseul, pour soutenir l’amendement no 38.

    M. Gérard Leseul

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    Il s’agit, en quelque sorte, d’un amendement rédactionnel. Nous proposons de remplacer l’expression d’espaces naturels par celle de zones naturelles ; le titre de la proposition de loi serait ainsi rendu conforme aux propos qu’a tenus à plusieurs reprises Mme la secrétaire d’État. Une telle rectification semble normale : même si cela ne change pas fondamentalement les choses, il est pour nous évident que les zones naturelles correspondent au secteur naturel forestier d’une commune. La notion de zones naturelles – on les désigne souvent par les initiales ZN – est abondamment employée en droit de l’urbanisme ; on la retrouve notamment dans l’ensemble des discussions relatives aux PLU qui ont lieu dans les communes.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    L’avis est défavorable, pour une raison simple. L’expression d’espaces naturels est comprise par tous et s’avère beaucoup plus large.

    M. Sylvain Maillard

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    Elle est plus belle aussi !

    M. Richard Ramos, rapporteur

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    Nous avons beaucoup débattu ; je comprends, bien entendu, le sens de votre amendement. Toutefois, j’insiste : la notion de zones naturelle se restreint aux PLU alors que celle d’espaces naturels couvre une réalité plus large.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État

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    Pour ma part, je serai légèrement plus nuancée. Il est vrai qu’on a débattu de ce point et que le texte a été modifié… J’émets donc un avis de sagesse, aussi par souci d’élégance vis-à-vis de l’auteur de la proposition de loi qui, je le rappelle, n’est pas issu des bancs de cet hémicycle.

    (L’amendement no 38 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Nous en avons terminé avec la discussion de la proposition de loi ; je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote.
    Nous allons procéder au scrutin.

    Vote sur l’ensemble

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        91
            Nombre de suffrages exprimés                90
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                90
                    Contre                0

    (La proposition de loi est adoptée.)
    (Applaudissements sur tous les bancs.)

    3. Lutte contre les abus et les fraudes au compte personnel de formation

    Discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à lutter contre les abus et les fraudes au compte personnel de formation (nos 212, 278).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Fuchs, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Bruno Fuchs, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    L’accès à la formation professionnelle constitue l’une des grandes priorités de l’action de la majorité présidentielle afin que notre pays atteigne le plein emploi. Cette ambition s’était déjà traduite tout au long du précédent quinquennat par des investissements massifs. Ces derniers ont permis une profonde transformation de l’écosystème de la formation professionnelle ; la rénovation du compte personnel de formation (CPF), actée par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, en fut l’une des composantes.
    Le changement d’approche opéré par l’ouverture du parcours d’achat direct, qui permet de mobiliser ses droits de formation sans intermédiaire, a provoqué un engouement spectaculaire. On a ainsi dénombré 517 000 formations en 2019, 984 000 en 2020, 2 millions en 2021. Et d’après les projections, il y en aurait plus de 3 millions fin 2022 !
    Mais il y a un revers à tout cela. L’une des conséquences négatives de la montée en puissance du CPF, c’est l’explosion d’actes malhonnêtes, d’opérateurs peu scrupuleux ou, tout simplement, de pratiques commerciales agressives qui tentent de détourner le dispositif. Nous avons tous été victimes de ces campagnes de démarchage massives et abusives qui permettent non seulement la collecte de données personnelles, mais aussi, dans un certain nombre de cas, la captation d’une partie ou de la totalité du CPF.
    En un an, les signalements de SMS indésirables ont été multipliés par quatorze ; les déclarations de soupçon liées à une potentielle fraude au CPF ont été multipliées par onze. Tracfin constate que la fraude par détournements financiers atteint 43,2 millions d’euros en 2021 – elle n’était que de 7,8 millions en 2020.
    Bref, le phénomène de fraude prend une ampleur chaque jour plus grande.
    Avant d’entamer la discussion des articles de ce texte, je veux rappeler que les pouvoirs publics ne sont pas restés inactifs et ont déjà apporté de nombreuses réponses ces dernières années. Les services de l’État traitent tous les signalements de fraude, en lien avec la Caisse des dépôts, afin d’identifier les différents types d’usurpation ou d’arnaque possibles. Des plaintes sont systématiquement déposées et des poursuites judiciaires sont engagées dès lors qu’elles s’avèrent nécessaires. Pour la première fois, il y a deux semaines, à Saint-Omer, un opérateur a été condamné à 3 millions d’euros d’amende, à 3 ans de prison avec sursis et à 10 ans d’interdiction de diriger une entreprise. On voit à quel point les sanctions sont lourdes ; j’espère qu’elles seront de nature à dissuader la plupart des opérateurs peu scrupuleux.
    Dans un registre différent, plusieurs mesures ont été prises pour renforcer la sécurité à l’entrée et tout au long du parcours d’achat de formation sur le portail « Mon compte formation ».
    Il faut aussi souligner la collaboration de plus en plus régulière et efficace entre les acteurs publics dans le combat contre les pratiques illégales ou abusives. C’est la capacité qu’ont tous les acteurs de travailler ensemble qui donne à cette lutte toute son efficacité. Par exemple, la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) du ministère du travail, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) du ministère de l’économie et des finances et la Caisse des dépôts ont engagé, à l’automne 2019, un travail partenarial en vue de définir une stratégie commune dans la lutte contre la fraude.
    Autre exemple : la Caisse des dépôts et France compétences partagent régulièrement des informations utiles à l’exercice de leurs missions respectives. La seconde a d’ailleurs engagé un important travail de mise à jour du répertoire spécifique des certifications professionnelles, ce qui a abouti au retrait d’un nombre significatif de formations douteuses disponibles sur la plateforme « Mon compte formation ».
    En janvier 2022, une étape importante a été franchie avec l’obligation faite aux organismes de formation présents sur le portail d’obtenir la certification Qualiopi.
    Enfin, sur l’initiative de la ministre du travail et du ministre des comptes publics, un comité de pilotage ministériel chargé de lutter contre le démarchage abusif et la fraude au CPF a été créé au début de l’année 2022.
    Malgré ces progrès, la fraude et le démarchage abusif au CPF ne cessent de s’amplifier. Il nous a donc semblé indispensable de doter notre arsenal juridique d’outils supplémentaires pour mieux protéger les consommateurs et les organismes de formation vertueux, afin que le développement de leur activité puisse être à la hauteur de la demande.
    La présente proposition de loi a pour objet d’interdire le démarchage, la prospection ou encore la captation de données personnelles, en s’adressant directement aux titulaires d’un compte personnel de formation. Je veux l’affirmer et le répéter : il n’est pas question d’interdire aux organismes de bonne foi de faire de la publicité pour les prestations de qualité qu’ils fournissent. L’esprit de ce texte, c’est de trouver un juste équilibre entre la nécessaire lutte contre les fraudes ou abus et la liberté d’entreprendre des organismes de formation. Ces derniers sont un maillon essentiel de la montée en puissance du CPF et de la formation, laquelle est indispensable dans la stratégie du retour à l’emploi du plus grand nombre.
    Nous devons revenir aux fondamentaux du CPF, à savoir que c’est au seul titulaire du compte de prendre l’initiative. C’est lui seul qui décide de sa formation ; c’est lui seul qui décide de contacter un opérateur pour commander une formation. Dès lors, les choses apparaissent de façon évidente au législateur. Si, de son propre chef, le titulaire d’un compte personnel de formation sollicite un organisme, et que ce dernier le contacte en retour afin de définir contractuellement les modalités de sa formation, puis lui envoie un devis, cela ne pourra être considéré comme de la prospection commerciale et ne pourra être sanctionné. Je pense que le Gouvernement confirmera ce point de vue, qui devrait rassurer définitivement tous les acteurs de la formation qui pourraient s’inquiéter d’une entrave à leur pratique usuelle et contractuelle.

    M. Bruno Fuchs, rapporteur

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    Cet esprit d’équilibre habitait déjà la proposition de loi déposée en février dernier par Catherine Fabre et ses collègues, dont est largement inspiré le texte que nous examinons cet après-midi. Je veux saluer le travail de notre ancienne collègue et la remercier pour la richesse de l’héritage qu’elle a laissé sur la réflexion autour de la lutte contre la fraude et les abus portant sur le CPF.
    Permettez-moi à présent de dire quelques mots du texte dont nous allons débattre.
    L’article 1er prohibe tout démarchage ou prospection commerciale des titulaires d’un CPF par téléphone, SMS, courrier électronique ou sur un réseau social, dès lors que cette action aurait pour objet soit de collecter leurs données à caractère personnel, par exemple le montant des droits inscrits sur leur compte, soit de conclure ou de chercher à conclure des contrats portant sur des actions éligibles au dispositif, à l’exception des sollicitations qui interviendraient dans le cadre d’une prestation en cours. La méconnaissance de cette interdiction sera passible d’une amende administrative dont le montant ne pourra excéder 75 000 euros pour une personne physique, ce qui représente un montant relativement rare, et 375 000 euros pour une personne morale.
    L’article 2 vise à sécuriser, sur le plan juridique, le partage d’informations entre les autorités qui participent, à un titre ou à un autre, à la lutte contre la fraude au CPF. À cette fin, il autorise notamment la Caisse des dépôts et consignations, France compétences, les services de l’État chargés de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et ceux chargés des contrôles de la formation professionnelle à échanger tous documents et informations détenus ou recueillis dans le cadre de leurs missions respectives. J’indique d’ores et déjà que je suis évidemment favorable aux amendements qui proposent d’étendre la liste des acteurs concernés par le dispositif.
    L’article 3, introduit à l’initiative des groupes Renaissance d’une part, et Horizons et apparentés d’autre part, instaure une procédure de référencement, sur la plateforme « Mon compte formation », des personnes qui réalisent des actions de formation afin de garantir la qualité et l’homogénéité des prestations proposées.
    Dans un article additionnel, le Gouvernement propose de mieux encadrer le recours à la sous-traitance dans le cadre des formations financées par le CPF. J’y suis favorable, car il est inutile de contrôler les organismes donneurs d’ordre si l’on ne contrôle pas les organismes sous-traitants qui proposent certaines de leurs formations. Il faut mieux encadrer les conditions de recours à la sous-traitance, car de trop nombreux abus qui nuisent à la qualité des formations découlent de ces situations. Je demanderai toutefois au Gouvernement de préciser au maximum les intentions qui sont derrière son amendement, qui renvoie au règlement.
    Toutes ces dispositions empreintes de pragmatisme servent le même objectif : mettre fin à des pratiques intolérables qui portent atteinte à la crédibilité d’un outil efficace et qui peuvent nuire à l’efficacité d’un dispositif qui a pris une place essentielle dans le paysage de la formation.
    Pour conclure, je forme le vœu que demeure l’unanimité qui s’est dégagée en commission autour du texte et que celui-ci puisse entrer en vigueur le plus rapidement possible. Nos concitoyens l’attendent et le réclament. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels

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    Je salue cette initiative parlementaire du groupe MODEM et de la majorité, qui ont décidé de prendre en charge la lutte contre les fraudes au compte personnel de formation et le démarchage abusif de ses titulaires. Sous le quinquennat précédent, les parlementaires, dont j’étais, avaient déjà manifesté le souhait de se saisir de la question ; je rappelle ici rappeler l’initiative de la députée Catherine Fabre, qui avait déposé une proposition de loi sur le même sujet au mois de février dernier. Le texte a, depuis, été remarquablement enrichi, notamment par M. le rapporteur et par les travaux de la commission des affaires sociales.
    Le Gouvernement s’est lui-même fortement engagé sur le sujet dès 2021, à travers des mesures de régulation de la qualité de l’offre accessible sur « Mon compte formation ». Je tiens également à saluer la mobilisation des pouvoirs publics pour empêcher que des individus ne détournent ce droit fondamental des Français. Je pense notamment à la sévérité du jugement du tribunal de Saint-Omer qui, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, a condamné un organisme de formation et sa dirigeante à de très lourdes sanctions – 3 millions d’euros d’amende pour la société et trois ans d’emprisonnement avec sursis pour son dirigeant. Je suis donc très heureuse, en tant que ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels, de soutenir cette proposition de loi dont je suis certaine qu’elle recueillera un très large consensus sur les bancs de l’Assemblée. Parce que, tous ensemble, nous avons à cœur de faire cesser les phénomènes de démarchage abusif et de fraude, insupportables pour nombre de nos concitoyens, alors que le dispositif répond aux défis professionnels des Français, il est de notre devoir de dépolluer les pratiques illégales qui créent indûment de la dépense, ternissent l’image du compte personnel de formation et dépossèdent le titulaire de son libre arbitre.
    Le succès du CPF est incontestable et nécessite de notre part une vigilance sur les abus et fraudes développés ces dernières années. Depuis l’ouverture de l’application « Mon compte formation », en novembre 2019, nous comptabilisons plus de 5 millions d’entrées en formation. L’une des grandes conquêtes de la loi du 5 septembre 2018 est d’avoir fait en sorte que les femmes, les ouvriers et les employés accèdent très largement à la formation professionnelle grâce au CPF : cet outil a véritablement démocratisé l’accès à la formation. Chacun peut aujourd’hui prendre en main sa montée en compétences et agir pour son évolution professionnelle – car le CPF finance aussi, je le rappelle, le permis de conduire, essentiel pour être mobile et accéder à l’emploi dans certaines zones, des bilans de compétences, indispensables à tout projet d’évolution, ou encore des actions de formation à la création d’entreprise pour celles et ceux qui en ont le projet. Le CPF est au rendez-vous de tous les carrefours de la vie professionnelle des Françaises et des Français. Il est l’outil dont doivent s’emparer nos concitoyens pour préparer leur parcours professionnel.
    Afin d’accompagner la croissance du recours au CPF, des actions ont été menées dès 2021 pour améliorer la qualité de l’offre. Le Gouvernement a pris des mesures de régulation du secteur pour faire monter en qualité l’offre accessible sur « Mon compte formation », incluant l’entrée en vigueur du label Qualiopi depuis le 1er janvier, afin de renforcer l’exigence de qualité pour les organismes de formation, lesquels sont près de 17 000 sur la plateforme. Un travail exigeant a été engagé sur le renouvellement du répertoire spécifique ; il a conduit à éliminer deux tiers des certifications dont l’intérêt n’était plus avéré pour l’évolution professionnelle des actifs. Il existe également des dispositifs de signalement à la disposition des titulaires de compte, notamment sur le site moncompteformation.gouv.fr. Toutefois, nos concitoyens ne les connaissent pas suffisamment et ne les mobilisent pas assez pour signaler les fraudes et les escroqueries.
    Pour aller plus loin dans la lutte contre tous les abus, nous avons besoin de passer par la loi. Tel est l’objet de la proposition de loi, que le Gouvernement soutiendra. Elle permettra d’interdire le démarchage abusif et de sanctionner ceux qui le pratiquent, y compris sur les réseaux sociaux en ligne. Nous ne pourrons que nous satisfaire de ne plus voir de tels abus : des influenceurs promettre n’importe quoi, tablettes et smartphones, et véhiculer des messages inacceptables en incitant au recours au CPF pour mieux l’instrumentaliser et le détourner de sa fonction initiale. Les amendes seront très dissuasives : jusqu’à 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. Avec un tel niveau de sanctions, je ne doute pas que le signal sera bien entendu par la plupart des fraudeurs.
    La proposition de loi donnera aux services les moyens de partager les informations dont ils disposent pour mieux conduire la lutte contre la fraude. J’insiste sur cette coordination entre les services de l’État et les opérateurs car elle est absolument incontournable pour resserrer les mailles du filet, vérifier les identités des suspects et les habilitations à former et traquer les fausses domiciliations. Nous devons impérativement croiser les fichiers et les informations pour lutter efficacement contre les fraudeurs, les traquer et les arrêter. Je salue donc les amendements déposés par le groupe LIOT, lesquels permettront notamment à la Caisse des dépôts d’accéder au fichier des comptes bancaires des organismes de formation et de vérifier leur identité. En donnant plus de moyens aux services de l’État, à la Caisse des dépôts ou encore à Tracfin pour identifier les fraudeurs, ces délits ne resteront pas impunis. C’est tout le sens de ce texte.
    Pour anticiper davantage et prévenir la fraude, la proposition de loi prévoit, enfin, grâce à un amendement proposé par la majorité en commission, une procédure de vérification des organismes de formation qui demandent à être enregistrés sur la plateforme. La Caisse des dépôts procédera à des contrôles renforcés, bien au-delà de la déclaration d’activité ou même de la certification Qualiopi : par exemple, il sera vérifié que l’organisme est bien à jour de ses obligations fiscales et sociales ou encore que le casier judiciaire du représentant légal est vierge.
    Le Gouvernement, pour sa part, proposera de compléter et renforcer l’arsenal juridique pour le rendre le plus complet possible. Nous proposerons deux amendements.
    Le premier est un volet préventif qui consiste à anticiper les fraudes en encadrant la sous-traitance. Soyons clairs : il ne s’agit pas d’interdire la sous-traitance ni d’entraver la liberté de commerce. Mais nous constatons aujourd’hui que certains organismes de formation référencés sur la plateforme proposent seulement ce que l’on appelle un portage Qualiopi. Je le dis clairement, ces organismes de formation agissent comme des sociétés-écrans ; ils savent que la Caisse des dépôts ne peut ni identifier ni contrôler les sous-traitants, et cet angle mort pourrait constituer un véritable nid à fraudes. Cette pratique n’est plus admissible et doit être régulée. Concrètement, nous proposons que les sous-traitants répondent aux mêmes exigences que l’organisme de formation donneur d’ordre : déclaration d’activité, certification Qualiopi, obligations fiscales et sociales, casier judiciaire vierge… Nous devons protéger les Français en vérifiant à qui ils ont affaire. C’est une mesure de bon sens, et la Caisse des dépôts sera chargée de cette mission.
    Le second amendement comporte des mesures de lutte active en aval, après constatation de la fraude. Il renforce les pouvoirs de la Caisse des dépôts en lui donnant la possibilité de recouvrer plus rapidement les sommes indûment perçues. Il faut savoir qu’aujourd’hui, si elle veut obtenir un recouvrement forcé, la Caisse des dépôts doit d’abord saisir la juridiction administrative, mais le délai moyen de jugement devant le tribunal administratif est compris entre sept mois et deux ans et demi selon le dossier ; autant dire que c’est souvent peine perdue. Nous proposons donc de permettre à la Caisse des dépôts, comme c’est le cas pour Pôle emploi par exemple, de disposer du pouvoir d’intervenir directement et rapidement afin de mieux lutter contre l’évasion des fonds en cas de fraude. C’est aussi, bien évidemment, une mesure d’économie, puisque les nouveaux pouvoirs de la Caisse réduiront mécaniquement le délai des procédures contentieuses ainsi que les frais afférents.
    Pour finir, je redis la détermination du Gouvernement à empêcher tout détournement du droit fondamental d’accès à la formation. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui va nous donner des leviers efficaces pour mieux prévenir les abus et les fraudes au CPF, lutter contre eux et les sanctionner. Certains détournements actuels relèvent de l’escroquerie de la part d’individus malveillants. Ces escrocs extorquent les données ou usurpent les identifiants des titulaires de compte personnel de formation ; nous avons dernièrement fait le constat d’usurpations d’identité sur « Mon compte formation » via le portail FranceConnect. Il faut agir vite pour protéger directement les Français qui se font avoir par ces charlatans. Nous avons donc décidé de renforcer la sécurité des usagers sur la plateforme « Mon compte formation » dès la fin de ce mois : au moment de l’achat d’une formation, le niveau de sécurisation de la transaction sera désormais plus important et un contrôle d’identité renforcé sera demandé à l’utilisateur. C’est ce que l’on appelle le service FranceConnect+, qui va plus loin que FranceConnect. Dès la semaine prochaine, mon cabinet recevra les partenaires sociaux et les représentants des organismes de formation pour évoquer le sujet avec eux.

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    Nous pouvons nous satisfaire du travail collectivement réalisé sur ce sujet transpartisan et véritablement d’intérêt général. Il était temps d’agir et de faire cesser ces dérives, spams et autres hameçonnages autour du CPF. Notre responsabilité est de protéger le CPF de nos concitoyens. Protéger le CPF, c’est protéger la capacité des Français à se former, c’est protéger une application qui fait désormais partie de leur vie quotidienne, c’est protéger un droit qui est désormais à portée de main et qu’ils se sont approprié grâce à la désintermédiation. Le CPF, rappelons-le, a rendu plus réelle et tangible la liberté de chacune et chacun de choisir son avenir professionnel. Interdire le démarchage abusif et mieux lutter contre les fraudes vise à redonner à tous les actifs leur latitude d’action et à leur permettre d’évoluer ou d’effectuer une transition professionnelle.
    Nous accompagnerons prochainement une meilleure régulation du CPF afin que celui-ci soit mieux ciblé vers les besoins de l’économie, c’est-à-dire vers les métiers en tension autant que les métiers d’avenir. C’est un travail que je vais mener en concertation avec les partenaires sociaux.

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    Je remercie encore une fois les députés de la majorité et les députés de la commission des affaires sociales de l’Assemblée pour la contribution qu’ils ont apportée en se saisissant de la proposition de loi pour donner corps à la protection du droit à la formation. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à Mme Maud Petit.

    Mme Maud Petit

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    Les niches parlementaires sont des moments de démocratie importants, car elles permettent l’expression directe des préoccupations que nous, députés représentants du peuple, entendons sur le terrain. Monsieur le rapporteur, cher Bruno, je voulais vous remercier de nous permettre de débattre et d’agir au moyen d’une proposition qui permettra, comme je l’avais dit en commission, de soulager et d’adoucir le quotidien de nombre de nos concitoyens.
    Hier encore, j’ai fait l’expérience désagréable de recevoir un appel concernant mon compte personnel de formation – mon interlocuteur ne savait même pas prononcer mon prénom. Comme pour beaucoup d’entre nous sur ces bancs, et beaucoup d’entre vous qui nous regardez, ce n’était pas le premier appel de la semaine. Ce démarchage incessant et intempestif d’organismes qui veulent tout connaître de nos droits à la formation est usant et révoltant. Tout le monde est concerné puisque parfois, comme l’ont rappelé certains de nos collègues en commission, des personnes retraitées depuis des années sont visées ; c’est charmant. Cet acharnement finit presque par nuire à l’image même du CPF, désormais sujet de moqueries, notamment sur les réseaux sociaux.
    Pourtant, le compte personnel de formation est une mesure importante soutenue par notre majorité sous la précédente législature. Depuis sa mise en place dans le cadre de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, ce sont 4 millions de formations qui ont été financées et près de 17 millions de personnes qui se sont connectées à la plateforme pour connaître leurs droits. C’est un succès dont nous pouvons nous réjouir et qui ne doit pas être menacé par ces tentatives malheureuses de détournement.
    Chacun sait aujourd’hui que l’apprentissage ne s’arrête pas à la fin des études. L’emploi permet certes l’émancipation, mais la formation continue ouvre la possibilité de se lancer des défis et de créer de nouvelles passerelles participant à l’épanouissement de l’individu dans son parcours professionnel et, au-delà, dans son parcours de vie. Il s’agit donc d’un enjeu essentiel pour atteindre l’objectif du plein emploi fixé par le Président de la République, notamment en permettant aux Français de trouver leur place dans un marché du travail en constante évolution. Chacune ou chacun peut s’adapter et se renouveler en fonction de ses objectifs et des enjeux de demain.
    Comme pour beaucoup de dispositifs au succès identique, le CPF est victime de sa réussite. Dans un effet boule de neige, la monétisation du système a causé l’émergence d’un démarchage agressif, entraînant son lot de fraudes. De l’arnaque à l’usurpation d’identité, on estime qu’en 2021, ce sont plus de 43 millions d’euros qui ont été détournés des comptes. Ce problème rappelle un texte similaire adopté par notre assemblée, visant à lutter contre le démarchage téléphonique concernant la rénovation énergétique. Il serait en effet nécessaire de mener une réflexion plus globale sur les moyens de prévenir de telles conséquences qui nuisent à l’ambition des dispositifs. La communication me semble être un élément indispensable pour pallier ces risques. Il serait en effet regrettable que certains de nos concitoyens renoncent à leur droit de formation parce qu’ils craignent une fraude.
    Le vote de cette proposition à l’unanimité en commission a démontré un consensus encourageant sur le sujet. C’est le fruit d’un travail rigoureux et mené collectivement en bonne intelligence. Monsieur le rapporteur, laisser une certaine souplesse quant aux démarches commerciales des entreprises nous paraît indispensable, et le groupe Démocrate rejoint lui aussi cette position. Il ne convient pas d’interdire toute démarche commerciale pour une entreprise de formation. Outre l’exception accordée à l’article 1er dans le cadre d’une prestation en cours entre un individu et un organisme de formation, vous avez su trouver un équilibre certain entre la nécessaire préservation de la liberté d’entreprendre et le droit de chacun à la tranquillité.
    Nous saluons également l’extension de cette disposition sur les démarchages aux réseaux sociaux, dans l’objectif évident de protéger les plus jeunes. L’article 2 vient quant à lui faciliter la prévention et la détection des fraudes au travers du partage d’informations entre les différents acteurs institutionnels impliqués. L’article 3, ajouté en commission, permet d’améliorer ce dispositif antifraude en renforçant les demandes de référencement des organismes de formation auprès de la Caisse des dépôts. Comme j’ai pu l’annoncer plus tôt, ce droit à la formation constitue pour beaucoup une occasion sans pareille d’évoluer, de faire évoluer ses compétences, voire de se réorienter. Nous ne pouvons donc pas laisser prospérer des fraudes organisées ou des démarchages agressifs qui viendraient priver ces personnes de telles opportunités. C’est donc une proposition de loi très attendue par les Français que nous examinons ce soir, et je suis certaine que nos débats permettront d’enrichir encore plus les propositions issues de nos travaux en commission. Le groupe Démocrate soutient donc bien évidemment ce texte essentiel et le votera avec conviction. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Arthur Delaporte.

    M. Arthur Delaporte

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    « Alors, mes amours, je voudrais vous parler de fast formation, c’est chanmé ; en fait, c’est des formations qui sont 100 % gratuites puisqu’elles sont agréées par l’État et c’est des formations qui vous permettent de travailler et de gagner de l’argent ». Ces mots, c’est Maéva Ghenam – 3,3 millions d’abonnés sur Instagram – qui les a prononcés. J’aurais pu citer Manon Tanti, 3 millions d’abonnés sur Instagram ; Greg, 1,5 million ; Hillary, Marc…

    M. Pierre Dharréville

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    Des experts !

    M. Arthur Delaporte

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    Autant d’influenceurs aux millions d’abonnés qui ont fait la promotion de formations au CPF prétendument gratuites, mais surtout coûteuses pour l’État, en promettant monts et merveilles à leur issue. La réalité est souvent loin de ces mirages.
    J’ai volontairement commencé par un exemple qui prend le contrepied de celui évoqué la semaine dernière : celui de Pauline, 89 ans, à qui on proposait de passer le permis de conduire pour améliorer sa mobilité professionnelle. Tous ces SMS, ces appels intempestifs, horripilants, désagréables, insupportables, empoisonnent évidemment le quotidien des Françaises et des Français. Le nombre de témoignages que j’ai reçus à l’issue de mon intervention la semaine dernière en commission témoigne de cette réalité ; c’est édifiant. Cette proposition de loi est donc la bienvenue.
    Quel que soit notre âge, de 8 à 107 ans nous sommes régulièrement dérangés par ces démarchages abusifs qui ne font que démontrer une chose : le CPF, bien au-delà de ses ambitions, est une machine à cash qui peut être la source d’un détournement lucratif inépuisable, dans laquelle les escrocs trouvent un terreau favorable comme l’a rappelé Mme la ministre déléguée.
    Monsieur le rapporteur l’a bien précisé : les montants de la fraude au CPF ont bondi. Selon le rapport de Tracfin, l’augmentation est de 450 % environ en un an, puisqu’on est passé de 8 millions d’euros de fraudes détectées en 2020 à 43 millions d’euros en 2021. La réalité est peut-être pire encore. Il était donc nécessaire que le pouvoir législatif s’empare de ce sujet pour tenter de mettre fin à cette situation. En commission, la discussion a été assez consensuelle et très constructive et je pense qu’elle va continuer de l’être dans l’hémicycle, puisque nous partageons toutes et tous les mêmes ambitions.
    Je salue aussi les amendements du Gouvernement qui contribuent à renforcer la qualité des certifications. Comme vous l’évoquiez, madame la ministre déléguée, il s’agit de lutter contre les certifications-écrans. Vos amendements vont dans le bon sens. Nous aurions bien sûr pu envisager une loi plus ambitieuse sur la formation qui aurait mieux traité la question de leur qualité, car certaines font défaut.
    Le ciblage des bénéficiaires reste aussi un problème, parce que ceux qui se forment ne sont pas forcément ceux qui ont le plus besoin de formation. Quand on a 59 ans, la formation à l’œnologie est-elle la plus nécessaire pour améliorer ses compétences professionnelles ? C’est un véritable sujet, mais la réponse est toute trouvée.
    Il conviendra également de rappeler que le modèle du privé lucratif, que le CPF a alimenté, notamment dans ses dérives, n’est pas la seule manière de former les adultes. On évoquait le droit à la formation. Je tiens à rappeler le soutien du groupe Socialistes et apparentés au modèle du secteur public de la formation pour adultes qui doit évidemment être soutenu.
    Je conclurai en évoquant un point également souligné par la Cour des comptes, à savoir que pour lutter contre la mauvaise utilisation et le démarchage frauduleux, le pouvoir réglementaire est important ; nous comptons donc sur l’État pour mettre en place tous les moyens nécessaires non seulement pour lutter contre le démarchage frauduleux et abusif qui nous occupe aujourd’hui, mais aussi plus largement pour améliorer, puisque ce dispositif existe, la qualité et l’usage du CPF.
    Vous l’aurez compris, nous considérons que cette proposition de loi va dans le bon sens. Même si je n’ai pas manqué de pointer certaines dérives et certaines nécessités d’agir, nous la soutiendrons. La balle est maintenant dans notre camp, mais surtout dans le camp du Gouvernement, pour continuer à améliorer ce dispositif. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES. – Mme Maud Petit applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thomas Mesnier.

    M. Thomas Mesnier

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    Comme j’ai déjà eu l’occasion de le faire en commission, je voudrais d’abord saluer l’engagement de M. le rapporteur. Il s’est emparé de ce sujet du quotidien qui ramène la politique à ce qu’elle a de plus noble, pour répondre aux attentes des Français. Je voudrais également saluer l’engagement de notre collègue Sylvain Maillard et de Catherine Fabre, députés qui, sous la précédente législature, avaient mis en avant ce sujet.

    M. Sylvain Maillard

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    Excellents députés !

    M. Thomas Mesnier

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    Il me semble que nous avons su trouver en commission une belle unanimité pour voter la proposition de loi visant à lutter contre le démarchage abusif au CPF. Nous sommes parvenus à établir un texte à la hauteur des enjeux. Au cours des dernières années, les sollicitations visant le compte personnel de formation nous ont tous affectés, nous ont tous touchés et je dirais même qu’elles nous ont peut-être encore plus touchés depuis que nous avons voté la loi en commission, comme si cela nous revenait en boomerang.
    C’est une problématique publique partagée par tous nos concitoyens qui sont sujets à une véritable traque de la part des organismes de formation. En plus de ces atteintes, les fraudes se sont multipliées ces derniers temps. M. le rapporteur a parlé d’un montant de 43 millions d’euros pour la seule année 2021, ce qui est absolument inacceptable.
    Ce démarchage malveillant nuit à la crédibilité du CPF, dispositif favorable et véritable fer de lance du plein emploi que nous visons. Son succès est indiscutable et nous ne voulons pas que les abus dont il fait l’objet ternissent le bilan de ce dispositif de soutien à l’emploi. Je rappelle les chiffres : 2 millions de Français bénéficiaires ; 3,8 millions de téléchargements de l’application « Mon compte formation » ; 16 millions de visiteurs sur le portail numérique ; un soutien indiscutable aux très petites entreprises et aux petites et moyennes entreprises (TPE et PME) ; un retour progressif vers le plein emploi. C’est aussi cela, le bilan du CPF, et l’ambition de cette proposition de loi est de lui rendre ses lettres de noblesse.
    À cette fin, nous proposons d’une part d’interdire le démarchage téléphonique concernant le CPF dès lors qu’il n’a pas lieu entre un individu et un organisme de formation dans le cadre d’une prestation de formation en cours. Avec cette proposition de loi, on tranche le nœud gordien : s’il n’est pas question d’interdire aux organismes de promouvoir leur formation, il s’agit d’interdire aux organismes d’importuner éhontément. D’autre part, nous donnons compétence à la Caisse des dépôts pour lutter contre ces démarches dans le cadre de sa mission de lutte contre la fraude. Je le répète : 43 millions d’euros de fraude par an, cela ne peut plus durer. En commission des affaires sociales, nous avons pu enrichir le texte. Nous avons notamment voté des amendements cosignés par le député Maillard…

    M. Sylvain Maillard

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    Excellent !

    M. Thomas Mesnier

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    …et le groupe Renaissance visant à étendre aux réseaux sociaux l’interdiction des démarchages au CPF pour aboutir à une belle unanimité.
    Cette proposition de loi permettra non seulement d’en finir avec les pratiques commerciales agressives et abusives, mais aussi d’améliorer l’image du dispositif qui souffre de ces abus, pour encourager les Français à y avoir recours. Le groupe Horizons et apparentés est fier d’avoir porté avec l’ensemble de la majorité derrière vous, monsieur le rapporteur, cette proposition de loi que nos compatriotes appellent de leurs vœux. Nous voterons largement en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem.)

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Delphine Batho.

    Mme Delphine Batho

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    Je remercie le groupe MODEM de mettre à l’ordre du jour des travaux du Parlement la lutte contre le harcèlement téléphonique et numérique. Il s’agit d’un combat que nous sommes plusieurs à mener ici depuis quelques années.
    « Bénéficiez d’une formation 100 % prise en charge par l’État. Vérifiez votre éligibilité » ; « Urgent. Vous allez perdre vos droits CPF. Consultez votre budget et réclamez votre formation 100 % prise en charge. » : voilà deux exemples de messages reçus par certains de nos concitoyens. Lutter contre la fraude au compte personnel de formation et interdire le démarchage le concernant relèvent du bon sens.
    La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui part donc d’une bonne intention. Hélas, les méfaits dont nous débattons aujourd’hui étaient parfaitement prévisibles. Lors de l’adoption de la loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux en 2020, qui interdisait le démarchage téléphonique dans le seul domaine de la rénovation énergétique, les Écologistes avaient alerté le Gouvernement sur cette faille béante du texte. Il y avait fort à parier, disions-nous alors, que le harcèlement téléphonique se déploierait dans un autre domaine. Nous y sommes ! La même question se pose aujourd’hui avec la proposition de loi : le CPF est-il le seul secteur d’activité qui donne lieu à un déluge intempestif d’appels téléphoniques et de SMS ? La réponse est non.
    Chers collègues, les citoyennes et les citoyens excédés attendent une protection globale contre le harcèlement commercial intrusif que constitue le démarchage téléphonique. Tout démarchage téléphonique est abusif. Les Français attendent que la loi mette fin à l’invasion des sollicitations commerciales à toute heure du jour et parfois même de la nuit.
    L’approche développée par la proposition de loi – que nous soutiendrons, bien entendu, car elle constitue un progrès – s’inscrit malheureusement dans la continuité du travail parlementaire depuis deux ans. Le code de la consommation prévoit désormais l’interdiction du démarchage téléphonique pour la rénovation énergétique et les énergies renouvelables. Le code des assurances a intégré, en 2021, la régulation du démarchage pour les contrats d’assurance. Aujourd’hui, nous nous apprêtons à intégrer, dans le code du travail, l’interdiction du démarchage pour le CPF. Nous nous réjouissons de cette nouvelle avancée, mais nous regrettons que rien ne soit fait au sujet d’autres pratiques massives et nocives. Les démarcheurs, les arnaqueurs et les fraudeurs n’auront qu’à se reporter demain sur un nouveau terrain de harcèlement.
    Le démarchage téléphonique a des conséquences graves sur la société, car il affecte la santé morale et mentale des individus, les relations sociales et la sécurité, notamment celles des personnes les plus vulnérables. Dans un territoire rural comme le mien, les personnes âgées coupent le téléphone pour ne pas être harcelées et ne sont donc plus joignables par les services de santé. Dans notre République, chacun a droit à la tranquillité et à une vie privée. Chacun a le droit de ne pas être dérangé chez lui de façon intempestive. Sur ce sujet concret, nous aspirons tous à une forme de sobriété.
    Si la représentation nationale n’est pas capable de mettre fin à un problème aussi simple que celui du démarchage téléphonique par crainte de froisser les intérêts économiques des centres d’appels, comment pourra-t-elle relever le défi du changement climatique et s’opposer à l’industrie des énergies fossiles ? Le seul argument avancé depuis des années contre l’interdiction du démarchage téléphonique commercial était précisément celui-là : « Évitons de nuire à l’activité économique. »
    Les centres d’appels ont le bras long. Plus de deux ans après l’adoption de la loi censée encadrer les horaires des appels non sollicités pour prospection commerciale, le décret d’application n’a toujours pas été publié. Pis, le projet de décret envisagé par le Gouvernement délivre un permis de harcèlement en autorisant les appels intrusifs les lundis, mardis, mercredis, jeudis et vendredis de neuf heures à dix-neuf heures, avec une pause pour le déjeuner, et les samedis de dix heures à douze heures et de quatorze heures à dix-huit heures – ce qui représente au total une plage horaire de cinquante heures par semaine ! Ce décret légalise aussi le droit de rappeler quatre fois par mois une personne qui a refusé une offre commerciale au premier appel.
    Là où le législateur cherchait à limiter, réduire et encadrer, le Gouvernement défend jusqu’à la caricature les intérêts des centres d’appels. C’est la raison pour laquelle les Écologistes présenteront un amendement visant à élargir l’application de cette excellente proposition de loi et à interdire toute forme de démarchage téléphonique sauf consentement exprès des citoyennes et des citoyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    On dirait que vous êtes surpris : il existe une fraude au CPF ! Des démarches commerciales très agressives sont utilisées pour encourager les gens à vider leur CPF sans qu’ils bénéficient pour autant d’une formation qualifiante. Ces pratiques sont scandaleuses, mais cette fraude et cette agressivité commerciale, qui méconnaissent les enjeux de la formation professionnelle, étaient toutes deux inscrites dans la réforme dont vous louez les mérites avec emphase. Vous avez monétisé le compte personnel de formation, vous avez désintermédiatisé l’accès à la formation, vous avez marchandisé la formation professionnelle. À chaque fois que vous vous emparez d’un sujet, vous libéralisez, vous privatisez, vous dérégulez, vous marchandisez, et cela fait des dégâts. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES et SOC.)
    Vous avez créé les conditions de ces dérives. Il y a de l’argent, un marché et des personnes qui veulent faire des profits. Bien entendu, dans la majorité des cas, de vraies formations professionnelles sont dispensées et les organismes accompagnent les salariés dans leur parcours de qualification. Nous avons besoin d’eux. Je regrette donc l’affaiblissement continu du service public de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), quasiment ignoré du dispositif. (Mme Caroline Fiat applaudit.)

    M. Arthur Delaporte

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    Il a raison !

    M. Pierre Dharréville

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    En réalité, en ouvrant le marché de la formation professionnelle, vous avez désigné les titulaires du CPF – un porte-monnaie – comme des clients à séduire et à hameçonner. Dans ce secteur, les dépenses de marketing font l’objet d’une véritable débauche : chaque organisme cherche à s’imposer dans la course à l’échalote, et c’est autant d’argent destiné à la formation professionnelle qui n’y est pas consacré. Nous courons ainsi le risque d’un abaissement programmé de l’offre de formation, ou tout du moins d’une formation à deux vitesses. Les formations aux langues étrangères et au permis de conduire ont déjà pris le dessus : elles sont sans doute utiles dans la recherche et l’exercice d’un travail, mais elles ne correspondent pas nécessairement à une formation professionnelle qualifiante. Les salariés, les entreprises et la société tout entière ont pourtant besoin de voir s’élever le niveau de qualification pour faire face aux défis de notre temps.
    Le deuxième problème soulevé par la formation professionnelle est celui du respect du travail, des métiers et de l’humain au travail. En abaissant le contenu de la formation professionnelle, en se contentant de former à des compétences ciblées ou éparses, on forme simplement à l’exécution d’une tâche, on déqualifie, on ne crée pas les conditions de l’épanouissement au travail. Partout dans la société, nous observons la crise du travail, une perte de sens, de la souffrance et du travail gâché.
    Dans la continuité de notre débat d’hier sur la validation des acquis de l’expérience (VAE), permettez-moi d’espérer que nous ne verrons pas croître le marché de la VAE au détriment des formations qualifiantes. (Mme Caroline Fiat applaudit.) Leur articulation est la garantie d’un véritable droit, mais elle ne cadre pas avec votre logique adéquationniste – faire rentrer un cube dans un rond. Si, avec la VAE, vous souhaitez faire l’économie de la formation qualifiante pour répondre en mode dégradé aux besoins économiques, alors de lourds problèmes finiront par se poser.

    Mme Caroline Fiat

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    Eh oui !

    M. Pierre Dharréville

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    La VAE est un droit véritable : elle doit permettre une reconnaissance des acquis de l’expérience et s’accompagner des compléments nécessaires pour offrir une qualification pleine et entière, donnant à un individu les moyens de s’épanouir dans le travail et d’y être reconnu.
    Enfin, il ne faudrait pas que certains employeurs se croient dédouanés de leur devoir à l’égard des salariés en matière de formation professionnelle bien qu’il n’apparaisse pas dans le CPF. Les dispositions que vous nous proposez aujourd’hui ne s’attaquent pas à ce type de fraude.
    Qui pourrait toutefois s’opposer à la lutte contre la fraude et à l’interdiction du démarchage téléphonique ? Pas nous ! L’application du présent texte constituerait un moindre mal. Les appétits financiers que suscitent les fonds de la formation professionnelle ne s’éteindront pas pour autant. Tandis que France compétences écope, ou plutôt creuse sa dette, certains se repaissent. On ne doit pas économiser sur la formation professionnelle, mais on ne doit pas non plus gâcher l’argent qui lui est destiné.
    Le groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES soutiendra la proposition de loi et remercie les députés du groupe Démocrate pour leur initiative. Les dispositions contenues dans le texte permettront de limiter la casse, de réguler et d’améliorer la qualité de l’offre de la formation professionnelle. Nous appelons cependant le Gouvernement à prévoir des moyens suffisants pour les services publics chargés de les appliquer. À ce jour, je n’ai malheureusement entendu parler de rien. Enfin, notre groupe tire la sonnette d’alarme : les dérives dont nous parlons sont le signe de problèmes bien plus profonds ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES et SOC.)

    Mme Caroline Fiat

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    Du grand Dharréville ! (Sourires.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Naegelen.

    M. Christophe Naegelen

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    La proposition de loi visant à lutter contre les abus et les fraudes au compte personnel de formation comporte deux enjeux principaux. Le premier concerne la formation professionnelle et le CPF, le second le démarchage, qu’il s’effectue par téléphone, par courrier électronique ou par SMS.
    Le premier enjeu, celui de l’accès à la formation professionnelle, est particulièrement important dans un contexte marqué par des difficultés en matière de recrutement. Jusqu’à présent, ce sujet n’a hélas pas fait l’objet de l’attention qu’il méritait. Le CPF est un outil non négligeable pour rendre plus accessible la formation tout au long de la vie. Le succès de ce dispositif a d’ailleurs permis une démocratisation de l’accès à la formation, le nombre de formations ayant quasiment doublé entre 2017 et 2020.
    S’agissant du démarchage, second enjeu de la proposition de loi, Delphine Batho a parfaitement décrit sa nocivité il y a quelques minutes. Il y a deux ans, elle avait défendu plusieurs amendements lors de l’examen du projet de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux. Permettez-moi, sur ce sujet, de rappeler plusieurs faits essentiels.
    Sur la question de savoir si l’on doit privilégier l’option de retrait (opt-out) sur l’obtention du consentement du destinataire (opt-in), je rappelle que, pour le CPF, le démarchage s’effectuait principalement par le biais des SMS. Or pour les SMS et les courriers électroniques, l’obtention du consentement est nécessaire. Nous sommes donc déjà dans un cas d’opt-in.
    En ce qui concerne les appels téléphoniques, je rappelle qu’il est impératif d’être inscrit sur Bloctel. Une entreprise qui démarche par téléphone une personne inscrite sur cette liste est dans l’illégalité. Depuis la loi de 2020, des amendes relativement importantes ont été attribuées à des sociétés qui ne respectaient pas cette règle – 400 000 euros en Bretagne, 375 000 euros à Marseille, plus de 3 millions d’euros récemment dans l’ouest de la France pour un démarchage concernant le CPF.
    Rappelons, par ailleurs, que sur les trois décrets d’application qui devaient être publiés après l’adoption de la loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, un seul a été signé par le Gouvernement. Les deux décrets en attente concernent les horaires et les jours autorisés pour le démarchage.
    L’exécutif a aussi la responsabilité de recruter davantage de personnels à la DGCCRF pour augmenter le nombre de contrôles et donc de sanctions.
    Quant aux opérateurs, nous attendons qu’ils mettent enfin en œuvre le mécanisme d’authentification interopérateurs. Ce mécanisme a été inscrit dans la loi en 2020 et nous avons laissé trois ans aux opérateurs pour le mettre en place. Le Gouvernement doit veiller à ce qu’il le soit. Ce mécanisme permettra de couper les appels des entreprises coupables de démarchage téléphonique abusif. Je rappelle que les appels surtaxés rapportent 25 % du coût de la communication aux opérateurs. Il est indispensable de les responsabiliser et de les inciter à appliquer rapidement le mécanisme d’authentification. Près de trois ans après l’adoption de la loi, le Gouvernement doit veiller, je le répète, à sa bonne application.
    Pour conclure, notre groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutiendra bien évidemment ce texte sur lequel nous avons déposé deux amendements élaborés avec le Gouvernement, et nous l’en remercions, parce qu’œuvrer à la protection des Français doit être un travail collectif. C’est ce que nous nous sommes efforcés de faire dans le cadre de cette proposition de loi et nous remercions le groupe Démocrate de l’avoir inscrite à l’ordre du jour de nos travaux d’aujourd’hui. (Mmes Maud Petit et Estelle Folest applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Maillard.

    M. Sylvain Maillard

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    Je suis heureux de défendre la présente proposition de loi aux côtés de Bruno Fuchs qui en est le rapporteur – permettez-moi de le remercier de son travail – ainsi que de Thomas Mesnier, et d’y associer l’ensemble des membres de la majorité présidentielle. Je m’associe aux propos du rapporteur et de Mme la ministre déléguée pour saluer le travail initial de notre ancienne collègue Catherine Fabre, qui a abouti à cette proposition de loi.
    Je souhaiterais pour commencer vous prendre à témoin : lequel d’entre vous n’a jamais entendu parler ni subi ces pratiques commerciales agressives, voire abusives, visant à inciter nos concitoyens à acheter des formations contre leur gré ou de mauvaise qualité ? Harcèlement téléphonique, sollicitations répétées par SMS ou par mail, offres trompeuses, usurpations d’identité, inscriptions à des formations non souhaitées, les témoignages se succèdent malheureusement et les tentatives d’arnaque visant à dérober les crédits du compte personnel de formation se multiplient.
    Le 29 juillet dernier, devant les sénateurs, Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, a dévoilé des chiffres alarmants relatifs aux escroqueries au CPF : 32 400 signalements ont été effectués auprès de la Caisse des dépôts, gestionnaire du dispositif, au premier semestre 2022. Le préjudice estimé dans le cadre des plaintes pénales déposées par la Caisse des dépôts entre mars 2020 et mai 2022 s’élève à 27 millions d’euros. Par ailleurs, les signalements de SMS indésirables liés au CPF ont été multipliés par quatorze entre le premier semestre 2021 et le premier semestre 2022. Ces arnaques sont prégnantes, en nette croissance et de plus en plus sophistiquées. Aussi devons-nous agir afin de renforcer l’ordre public économique et de protéger nos concitoyens.
    Pourtant, la loi de 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel (loi LCAP) poursuivait un objectif clair : faire en sorte que la formation professionnelle soit plus accessible et plus lisible pour les actifs, notamment en transformant le compte personnel de formation en euros. Il est désormais alimenté à hauteur de 500 euros par an pour tous les salariés effectuant au moins un mi-temps. Quelle avancée ! Cette mesure a permis une véritable démocratisation de l’accès à la formation. Trois ans après le vote de la loi, le succès du CPF est incontestable puisque plus de 5 millions de Français se sont inscrits à une formation. Elle a permis à des publics très éloignés de la formation continue d’y avoir accès – je pense notamment aux salariés des TPE-PME.
    Désormais, il est urgent de légiférer contre les pratiques commerciales abusives qui mettent en péril la lisibilité et la crédibilité du dispositif. L’article 2 permettra de donner plus de moyens à l’État, à la Caisse des dépôts et à France compétences afin de détecter les fraudes ; l’article 3 permettra de mieux contrôler et d’améliorer le référencement des organismes de formation ; l’article 1er vise tout simplement à interdire le démarchage abusif qu’il soit effectué par téléphone, par SMS, par courriel ou encore sur les réseaux sociaux, ainsi qu’à interdire la collecte illégale des données à caractère personnel.
    Rappelons, à toutes fins utiles, que tout manquement sera passible d’une amende – vous l’avez rappelé, M. le rapporteur – dont le montant ira de 75 000 euros pour une personne physique à 375 000 euros pour une personne morale.
    Protéger nos concitoyens contre les abus et les fraudes, telle est notre responsabilité de législateurs. C’est pour continuer à valoriser la formation professionnelle et permettre que ce succès indéniable ne soit pas pollué par des abus en tous genres que le groupe Renaissance votera en faveur de la présente proposition de loi. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thierry Frappé.

    M. Thierry Frappé

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    L’entreprise est le poumon de notre économie, ses salariés en sont l’oxygène. Si la France veut rester compétitive et préserver le potentiel de ces derniers, elle doit faire en sorte qu’ils fassent confiance à la formation. Le droit à la formation professionnelle est précieux : il faut le protéger et le pérenniser. Le projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi démontre l’importance de la formation dans la carrière d’un salarié. Elle est particulièrement précieuse parce qu’elle permet d’apprendre tout au long de sa vie professionnelle et ouvre de nombreuses perspectives d’évolution, que ce soit au sein de l’entreprise afin de faire évoluer son champ de compétences ou encore dans le but de créer un nouveau projet professionnel. Pour donner une idée de l’importance de la formation, je citerai quelques chiffres : en 2021, plus de 2 millions de salariés se sont inscrits au CPF – soit trois fois plus qu’en 2019.
    Depuis l’instauration du compte personnel de formation et, surtout, sa monétisation intervenue en 2019, les Français reçoivent régulièrement au moins un appel téléphonique, un SMS, un courriel ou désormais, parfois, un message sur les réseaux sociaux concernant le CPF. Ces appels et envois publicitaires, très souvent proches du harcèlement, ont engendré de nombreuses désillusions parmi nos concitoyens.
    À ce sujet, je rappelle que la Caisse des dépôts a précisé que seul le site officiel permet d’utiliser le CPF en toute sécurité. De l’appel masqué à l’appel par l’intermédiaire d’un numéro ordinaire, de nombreux malfrats, voleurs et escrocs tentent de récupérer en argent comptant une partie du solde de nombre de nos compatriotes. Ces pratiques, contraires à l’esprit de ce droit, sont totalement illégales.
    Le rapport Tracfin pour l’année 2021 nous apprend que le nombre de fraudes au CPF ne cesse d’augmenter : il a été multiplié par trois en 2021 par rapport à 2020 et le montant des enjeux financiers a été multiplié par plus de cinq, atteignant 43,2 millions d’euros. Bien que les services de renseignement financier accomplissent un travail remarquable, avec pour preuve plus de 2 600 mises en demeure, près de 30 dépôts de plaintes pénales et l’exclusion du processus de plus de 150 organismes, ce fléau ne cesse de perturber le quotidien de nos concitoyens. Si des mesures de protection existent déjà, les Français attendent avec impatience l’adoption de la présente proposition de loi qui permettra, par sa clarté, d’améliorer le quotidien de millions d’entre eux et de restaurer la confiance dans les organismes de formation.
    Cette proposition de loi entre logiquement dans une cinétique d’amélioration de la formation professionnelle. Il nous appartiendra d’aider ce droit à évoluer en développant la procédure d’admission et d’acceptation, tout en continuant d’améliorer la formation et la certification.
    Le groupe Rassemblement national ne cesse de prouver son implication et sa volonté d’améliorer le quotidien des Français. Il souhaite plus que tout le respect profond des travailleurs et de leur engagement. C’est pourquoi il votera favorablement la présente proposition de loi, suivant en cela une logique de bon sens afin de mettre fin au harcèlement régulier et aux démarches frauduleuses en la matière. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    4. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires ;
    Discussion de la proposition de loi relative à la charge fiscale de la pension alimentaire.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra