- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Le code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :
I. – L’article L. 422‑15 est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « deux » est remplacé par « trois »
2° À la première phrase du d du 1° nombre : « 1000 » est remplacé par le nombre : « 2000 ».
3° Après le d du 1° est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les destinations proches non européennes qui comprennent les territoires des États dont le principal aérodrome desservant sa capitale est situé à une distance inférieure à 5 000 kilomètres de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle et qui ne relèvent pas du 1° du présent article. La liste de ces États est constatée par arrêté du ministre chargé de l’aviation civile ; »
4° Le 2° est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :
« Les destinations tierces, qui comprennent celles qui ne relèvent pas du 1° et du 2° du présent article. »
II. – L’article 422‑21 est ainsi modifié :
1° À la troisième ligne de la première colonne, le mot : « Tierce » est remplacé par les mots : « Proche non européenne et tierce »
III. – L’article L. 422‑22 est ainsi rédigé :
« Le tarif de solidarité prévu au 2° de l’article L. 422‑20 est déterminé en fonction de la destination finale du passager, et des services additionnels dont le passager bénéficie à bord, sans supplément de prix par rapport à d’autres passagers, selon les modalités suivantes :
Destination finale | SERVICES ADDITIONNELS À BORD DONT BÉNÉFICIE LE PASSAGER, SANS SUPPLÉMENT DE PRIX, PAR RAPPORT À D'AUTRES PASSAGERS | Tarif de solidarité (€) |
UE et assimilées | Aucun service additionnel | 16 |
Présence de services additionnels | 32 | |
Proches non européennes | Aucun service additionnel | 39 |
Présence de services additionnels | 68 | |
Tierce | Aucun service additionnel | 71 |
Présence de services additionnels | 142 |
« Le passager est réputé bénéficier des services additionnels mentionnés aux deux premiers alinéas du présent article lorsqu’il peut bénéficier, sur au moins l’un des tronçons compris entre le point d’embarquement initial et le point de débarquement terminal, sans supplément par rapport au prix initialement convenu, de services à bord auxquels l’ensemble des passagers ne peut accéder sans un tel supplément. À cette fin, les points d’embarquement initial et de débarquement final s’entendent respectivement du premier et du dernier d’entre eux qui ne sont ni en correspondance, ni en transit.
IV. – Après le second alinéa de l’article L. 422‑30, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les embarquements et débarquements en départements, régions et collectivités d’Outre-mer au sens des articles à l’article 72‑3 et l’article 73 de la Constitution sont exonérés du tarif de solidarité prévu au 2° de l’article L. 422‑20. »
V. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Cet amendement du groupe Socialiste et apparentés vise à refondre le tarif de solidarité, composante de la taxe sur le transport aérien de passagers, en alignant le barème de la classe économique sur le niveau allemand, et en doublant ce barème pour obtenir le montant en classes premium.
Actuellement, ce tarif est uniquement différencié selon la destination finale du passager (France métropolitaine, DOM, autre État membre de l’UE, autre État partie à l’accord sur l’EEE, États situés à moins de 2000 km de la France, et autres destinations) et la classe (« eco », « première » et autres).
L’amendement prévoit une modulation du tarif selon plusieurs critères :
- La destination finale, à laquelle est adossée un bornage kilométrique (< 2 000 km, entre 2 000 et 5 000 km et > 5 000 km) ; en excluant les territoires d’outre-mer, et en maintenant le niveau le plus bas pour les territoires du Maghreb.
- La classe de voyage.
En 2023, la taxe solidarité a rapporté 436 millions d’euros. Dans un contexte budgétaire contraint, cette mesure permettrait de percevoir, selon Transport & Environment, 2,5 milliards d’euros supplémentaires par an, soit 15.14 mds € de recettes additionnelles cumulées entre 2025 – 2030. Un premier pas pour combler le manque à gagner lié aux exonérations fiscales dont jouit le secteur aérien : 6,1 milliards d’euros pour l’absence de toute taxe sur le kérosène selon I4CE (2018) et 3,1 milliards d’euros pour la TVA réduite selon Transport & Environment (2019).
Elle permettrait aussi, sans remettre en cause la continuité territoriale et le droit de circulation des personnes notamment celles voyageant vers les territoires d’Outre-mer, de renforcer le caractère juste de cette taxe en prévoyant une gradation de son montant en fonction de la situation financière des passagers. En effet, les classes supérieures sont accessibles seulement aux ménages les plus aisés.
En outre, cette nouvelle tarification est également plus pertinente d’un point de vue écologique, puisqu’elle module le tarif des vols internationaux entre un court-courrier (Europe, Afrique du Nord), un moyen-courrier (Afrique de l’Ouest) et un long-courrier (Asie, Amériques). Le Secrétariat Général à la Planification Écologique avait ainsi pointé, dans une étude sur la décarbonation du secteur aérien[2], la très faible taxation des long-courriers (3,2 % sur un Paris - New York) au regard de leurs importantes émissions de CO2.
Le moment semble particulièrement propice puisque :
- La France connaît une situation budgétaire critique qui appelle tous les secteurs, à commencer par les plus polluants à contribuer à la solidarité nationale.
- Les pays qui hébergent les principaux aéroports internationaux en Europe (Allemagne, Pays-Bas, Royaume-Uni) prélèvent tous des montants de taxe sur les billets d’avion bien supérieurs à la France.
France (Paris CDG) | Royaume-Uni (London Heathrow) | Pays-Bas (Amsterdam Schiphol) | Allemagne (Frankfurt) | |
Court-courrier | 2.5 € | 15 € | 29 € | 16 € |
Moyen-courrier | 7.6 € | 103 € | 29 € | 39 € |
Long-courrier | 7.6 € | 108 € | 29 € | 71 € |
Afin de renforcer l’efficacité environnementale, de la taxe et son acceptabilité, les recettes dégagées devraient être affectées vers des dépenses en faveur de la transition écologique du secteur du transport. Le produit de la taxe pourrait ainsi abonder à hauteur de 800 millions d’euros affectés de la manière suivante :
- 500 millions d’euros fléchés pour l’agence de financement des infrastructures de transport de France (abrégé en AFIT France) afin de financer le développement des trains de nuits. Dans son rapport sur les Trains d’Équilibre du Territoire (T.E.T.) publié en mai 2021, le Gouvernement montre la pertinence de constituer un parc de 600 voitures de trains de nuit pour un investissement de 1,5 milliard d’euros d’ici 2030. En décembre 2021, le ministère des Transports a promis la construction de 300 voitures de nuit pour 800 millions d’euros. Cet investissement est urgent, vu la pénurie de trains de nuit en Europe et l’état de vieillissement du parc. Nous proposons ici une ressource permettant de le financer.
- 300 millions fléchés sur l’ADEME afin de financer la recherche et développement pour les carburants de synthèse afin d’atteindre l’objectif fixée par l’UE de 20 % de Carburant d’aviation durable (SAF) en 2035. Ces aides publiques à l’investissement répondent à des enjeux écologiques mais aussi d’indépendance énergétique.
Cet amendement a été travaillé en lien avec le Réseau Action Climat et Transport & Environnement.