- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
L’article 1133 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Les mots : « ne donne ouverture à aucun impôt ou taxe » sont remplacés par les mots : « donne ouverture aux droits de mutation à titre gratuit prévus à l’article 777 du présent code » ;
3° Est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – L’assiette retenue pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit correspond à la valeur du bien à date de la réunion de l’usufruit à la nue-propriété »
Par cet amendement, les députés du groupe LFI-NFP, fidèles à leur objectif de suppression des niches fiscales inutiles et injustes, proposent de mettre un terme à l’évitement fiscal que constitue l’exonération sur l’usufruit dans les transmissions d’héritage.
En France, et contrairement à d’autres pays européens comme la Belgique, le Danemark ou la Suisse, la transmission par héritage de l’usufruit d’un bien ne donne lieu à aucun droit de succession de quelque nature.
Par démembrement d’un bien immobilier qu’il possède, un propriétaire peut transmettre de son vivant uniquement la nue-propriété à ses héritiers, tout en conservant l’usufruit afin de continuer à percevoir des loyers. De cette manière, l’évaluation de la valeur de la nue-propriété alors transmise s’élève seulement à la moitié de la valeur de la pleine propriété. Au décès du donateur, l’usufruit s’éteint au profit de ses héritiers sans aucun droit de succession.
Cumulée à la possibilité de transmettre 100 000€ d’héritage tous les quinze ans, cette anomalie fiscale a considérablement accru les opérations de démembrement dans le seul but de se soustraire à la solidarité nationale. En utilisant ce mécanisme, un propriétaire de 31 ans peut céder, morceau par morceau, 1 000 000 € de biens immobiliers à son héritier en s’acquittant en tout et pour tout de 18 000 €, soit un taux ridiculement faible de 1,8%. Si la transmission d’un tel patrimoine avait eu lieu sans user et abuser de niches fiscales, cette transmission aurait été imposée à 21%, plus de 10 fois plus !
Alors que les transmissions du vivant d’un parent sont prévues pour subvenir aux besoins d’un héritier plus jeune, cette stratégie purement fiscale ne répond en rien à ce besoin : l’héritier ne pourra faire aucun usage du logement transmis puisque le donateur s’en réserve la jouissance afin de percevoir les loyers du bien transmis.
Résultat de ces dispositifs, dans notre pays les super-héritiers , soit le top 0,1% , reçoivent environ 13 millions d’euros – soit 180 fois l’héritage médian – et ne paient, en moyenne, que 10% d’impôt dessus.
Dans les 30 prochaines années, 25 milliardaires français transmettront à leurs héritiers plus de 460 milliards d’euros de super-héritages sur lesquels l’État risque de perdre 160 milliards en raison des niches fiscales existantes, si rien n’est fait. Afin de limiter les effets d’évitement qui grève les droits de succession, vident les caisses de l’État, et sapent la confiance dans nos institutions, nous proposons donc de supprimer l’exonération sur l’usufruit dans les transmissions d’héritage.