- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Les e, e bis, f, g et j du II de l’article 244 quater B du code général des impôts sont abrogés.
Par cet amendement de repli, le groupe LFI-NFP propose de resserrer la liste des activités éligibles au crédit d’impôts recherche (CIR), que même l’IGF estime beaucoup trop large en ce qu’elle permet une optimisation fiscale injustifiée des très grandes entreprises.
A la suite de la pérennisation du CICE en baisse de cotisations, le CIR est devenu en 2020 la première dépense fiscale du budget de l'État, avec un coût qui croit beaucoup plus vite que notre économie : 7,7 milliards d’euros en 2024, contre « seulement » 7,2 milliards d’euros en 2023. Les avis sur cette dépense massive pour le moins timorés. La dernière étude faisant foi, le rapport de France Stratégie publié le 1er juin 2021, démontre l'inefficacité du CIR lorsqu'il est appliqué aux grandes entreprises : un euro de dépense fiscale par le CIR suscite tout juste 0,4 euro de dépenses supplémentaire par l’entreprise. Et pourtant, ce sont les très grandes entreprises qui concentrent l’essentiel du dispositif : les 50 plus gros bénéficiaires du CIR touchent plus 44 % du total de la niche. Comme le dénonce le CAE, il ne s’agit ni plus ni moins pour les grands groupes que d’un effet d’aubaine, puisque le CIR subventionne des dépenses qui auraient de toute façon eu lieu.
En septembre 2022, un note du Conseil d’analyse économique pointait que le CIR coûte plus que le CNRS, le Cnes, et l’Inserm réunis. Cet argent pourrait donc avantageusement venir soutenir la recherche publique, dont les découvertes participent au bien commun et non à établir un « avantage compétitif » et une chasse gardée par le jeu des brevets.
Le déficit d’efficacité de ce CIR, pour lequel nos propositions de conditionnalités sont systématiquement refusées par la macronie, est particulièrement criant avec un exemple : Sanofi a bénéficié entre 2010 et 2020 de plus d’un milliard d’euros de CIR. Cela n’a pas empêché le directeur général de déclarer en pleine pandémie que leur vaccin bénéficierait en priorité aux États-Unis, vaccin qu’ils n’ont pas trouvé. Non seulement le CIR n’a pas permis à ce grand groupe de disposer des capacités de recherche biomédicales suffisantes, mais il s’est révélé parfaitement inefficace pour acheter la loyauté des dirigeants de Sanofi face au dieu-marché. C’est la même chose pour l’emploi : en dépit de ce milliard, Sanofi a licencié en 2021 1000 emplois en France, dont 400 chercheurs, tout en étant le deuxième distributeur de dividende du CAC40 en 2020 avec 4,8 milliards d'euros. Nous aurions pu alors mettre un terme à cette gabegie d’argent public. Mais les macronistes ont idéologiquement refusé de changer quoi que ce soit. Les mêmes causes produisent alors les mêmes effets : entre 2022 et 2024, Sanofi a touché plus de 300 millions d’euros de CIR, dégage un bénéfice de 5,4 milliards d’euros en 2023… et licencie 330 postes de R&D en France.
Ce coup astronomique s’explique en partie par la liste des activités éligibles à ce crédit d’impôt, qui est aujourd’hui beaucoup trop large selon l’Inspection générale des finances. Conformément aux recommandations de l’IGF, nous proposons donc de recentrer l’assiette du CIR aux activités définies dans le manuel de Frascati édité par l’OCDE, en excluant les dépenses liées aux brevets, à la normalisation et à la veille technologique.