- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Code concerné : Code du travail
Le II de l’article L. 6241‑2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le 1° est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « établissements », il est inséré le mot : « publics » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° Au premier alinéa du 2° , après le mot : « centres », il est inséré le mot : « publics ».
Par cet amendement, le groupe parlementaire de la France insoumise - NFP propose de réserver le « solde » de la taxe d'apprentissage aux établissements publics.
Emmanuel Macron et ses gouvernements successifs n’ont cessé de vanter la voie d’excellence que serait l’apprentissage. Ils ont déployé des milliards d’argent public pour le développer. Voie d’excellence, vraiment ? Les taux de ruptures de contrat sont extrêmement importants et les jeunes se retrouvent alors sans formation. En 2017, on notait un taux de rupture de 29,4 % en moyenne. Ce chiffre monte à 39,3% pour les moins de 18 ans. Le pourcentage grimpe à 71 % en Bac Pro Esthétique, 57 % en CAP hôtellerie-restauration, 52 % en CAP Vente des produits alimentaires, 37 % en carrosserie… Les conditions de travail sont parfois déplorables : en 2019, pour 450 000 apprentis, 10 301 accidents du travail et 3 décès, 32 4743 journées d'arrêt de travail.
La promotion de l’apprentissage a été menée à marche forcée, au détriment des finances publiques et de l'enseignement professionnel sous statut scolaire, où les réformes successives ont abouti à la fermeture de dizaines de sections d’enseignement professionnel, de lycées entiers : 137 lycées professionnels autonomes ont fermé depuis 2010.
Les centres de formation d’apprentis (CFA) ont été livrés au marché avec la suppression de l’autorisation préalable à l’ouverture. La réforme du financement de l’apprentissage a fait porter l’essentiel de leur financement sur les choix privés. Résultat : les formations les moins « rentables » ferment, tandis que les CFA d’entreprises, eux, se multiplient. Ainsi, le marché étend son emprise sur la formation de la jeunesse.
En mars 2024, une Revue des dépenses publiques d’apprentissage de l’IGAS et l’IGF relève : « Alors que les dépenses de formation professionnelle et d’alternance ont augmenté depuis 2020, la part financée par l’Etat a augmenté de 4,5 points et celle des opérateurs de compétences (Opco), qui intermédient les contributions des entreprises, a diminué de 2,4 points entre 2020 et 2022. » « Les plus fortes progressions de dépenses ont ainsi été enregistrées pour les opérateurs exerçant une mission de service public (+214% entre 2015 et 2022) et l’Etat (+130% entre 2015 et 2022). Les Opco demeurent toutefois les premiers financeurs finaux de la formation professionnelle et de l’alternance. »
Et, « si le volume des dépenses réalisées par les Opco a crû de 42,7%, de 7,7 milliards d’euros de 2015 à 11 milliards d’euros en 2022, leur part dans les dépenses totales s’est réduit de 5,5 points, de 39,9% en 2015 à 34,4% en 2022 ». Les proportions s’appliquant à des montants totaux respectifs de 19,1 milliards d’euros en 2015, et 31,7 milliards d’euros en 2022.
Nous souhaitons que l’apprentissage soit réservé aux formations où cela est pertinent d’un point de vue pédagogique, et supprimer progressivement les aides à l’embauche d’apprentis versées aux entreprises. Ces moyens seront intégralement destinés au financement des lycées professionnels. La création des centres de formation d’apprentis (CFA) devrait à nouveau être strictement encadrée. Les CFA d’entreprises prendront fin.
La taxe d’apprentissage a vu son fonctionnement, son assiette et sa répartition interne souvent modifiés. Avant 2019, une part de 23% de cette taxe (« hors quota) était destinée à la formation technologique et professionnelle hors apprentissage. Depuis 2019 et l’entrée en vigueur de la loi portée par Mme Pénicaud (n°2018-771 du 5 septembre 2018) et dite pour la liberté de choisir son avenir professionnel, seuls 13% de cette taxe d’apprentissage (« le solde ») financent les formations initiales technologiques et professionnelles hors apprentissage, l’affectation étant laissée au choix des entreprises.
Nous proposons donc dans un premier temps, par cet amendement, que le solde de la taxe d'apprentissage soit réservé aux établissements publics. De plus, nous souhaitons supprimer le fait que les établissements destinataires de cette part de la taxe d’apprentissage soient désignés par les entreprises elles-mêmes. Chaque établissement est aujourd’hui mis en concurrence et doit solliciter les entreprises de son secteur.
Le financement de l’enseignement professionnel ne doit pas être asservi aux règles du marché.