- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
I. – À partir du 1er janvier 2025, il est institué une taxe dénommée : « contribution numérique à l’audiovisuel public », exigible le 1er janvier de chaque année.
II. – La contribution est due par les entreprises de services numériques pour lesquelles un établissement stable est réputé exister sur le territoire français et dont la mise à disposition d’espace publicitaires en ligne représente en moyenne des trois derniers exercices plus de 10 000 000 d’euros.
1° Un établissement stable est réputé exister dès lors qu’il existe une présence numérique significative par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.
Les dispositions du précédent alinéa s’ajoutent sans y porter atteinte ni en limiter l’application, à tout autre critère conforme au droit de l’Union ou à la législation nationale permettant de déterminer l’existence d’un établissement stable dans un État membre aux fins d’impositions, que ce soit spécifiquement en relation avec la fourniture de services numériques ou autre.
2° Une présence numérique significative est réputée exister sur le territoire national au cours d’une période d’imposition si l’activité exercée par son intermédiaire consiste, en tout ou en partie, en la fourniture de services numériques par l’intermédiaire d’une interface numérique, définie comme tout logiciel, y compris un site internet ou une partie de celui-ci, et toute application, y compris les applications mobiles, accessibles par les utilisateurs, et qu’une ou plusieurs des conditions suivantes sont remplies en ce qui concerne la fourniture de ces services par l’entité exerçant cette activité, considérée conjointement avec la fourniture de tels services par l’intermédiaire d’une interface numérique par chacune des entreprises associées de cette entité au niveau consolidé :
a) La part du total des produits tirés au cours de cette période d’imposition et résultant de la fourniture de ces services numériques à des utilisateurs situés sur le territoire national au cours de cette période d’imposition est supérieure à 7 000 000 € ;
b) Le nombre d’utilisateurs de l’un ou de plusieurs de ces services numériques qui sont situés sur le territoire national membre au cours de cette période imposable est supérieur à 100 000 ;
c) Le nombre de contrats commerciaux pour la fourniture de tels services numériques qui sont conclus au cours de cette période d’imposition par des utilisateurs sur le territoire national est supérieur à 3 000.
III. – La contribution est assise sur le montant total, hors taxe sur la valeur ajoutée, des recettes engrangées par des prestations de mise à disposition d’espaces publicitaires numériques à destination d’utilisateurs sur le territoire national.
Un utilisateur est réputé être situé sur le territoire national au cours d’une période d’imposition si l’utilisateur utilise un appareil sur le territoire national au cours de cette période d’imposition pour accéder à l’interface numérique par l’intermédiaire de laquelle les services numériques sont fournis. Ces derniers sont définis comme services fournis sur l’internet ou sur un réseau électronique et dont la nature rend la prestation largement automatisée, accompagnée d’une intervention humaine minimale, et impossible à assurer en l’absence de technologie de l’information.
IV. – Le taux de la contribution, est de 3 % des montants définis au III.
V. – Lorsqu’une entreprise non établie en France est redevable de la contribution mentionnée au I, elle est tenue de désigner un représentant fiscal établi en France qui s’engage à remplir les formalités incombant à cette entreprise et à acquitter la taxe à sa place ainsi que, le cas échéant, les pénalités qui s’y rapportent.
VI. – La contribution est déclarée, liquidée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions que l’impôt sur les sociétés. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cet impôt.
Par cet amendement, le groupe LFI-NFP souhaite réaffirmer la nécessité d’un financement pérenne et indépendant pour l’audiovisuel public, en raison notamment de son importance pour nos démocraties, et propose, en plus de l’institution d’une contribution affectée et progressive adossée à l’impôt sur le revenu, de diversifier et renforcer le financement de l’audiovisuel public en affectant une partie sur les recettes publicitaires des GAFAM.
Cette source additionnelle de financement permettrait en outre de supprimer la publicité sur les antennes du service public. En effet, en raison de sa spécificité et de son rôle si important pour l’information et le divertissement du public, le service public ne peut être considéré comme un audiovisuel comme un autre, se faisant le véhicule d’une mentalité consumériste, à rebours de l’urgence écologique qui nous oblige au contraire à ralentir la course au productivisme et à la consommation.
L’audiovisuel public, de par son rôle dans notre société, doit être libéré des logiques commerciales liées aux annonceurs. Que la suppression de la publicité et des annonces sur le service public soit compensée par une taxe sur les recettes publicitaires des annonceurs sur les plateformes digitales de marchés et de services est cohérent, puisque les plateformes produisent elles-mêmes de l’information et du contenu, qui ne sont pas soumis aux mêmes exigences que les médias et l’audiovisuel public.
Par ailleurs, la part du trio de tête Google-Meta-Amazon atteint 71% du marché total de la publicité, avec plus de 3,5 milliards d'euros de recettes combinées. Les publicités sur les réseaux sociaux sont extrêmement rentables, notamment sur les vidéos courtes. Par ailleurs, des entreprises comme Meta et TikTok «ont bénéficié de nouveaux annonceurs internationaux, voire spécifiquement chinois» comme Shein et Temu, ce qui au niveau du marché français représente des dizaines de millions d'euros de dépenses directes sur ces plateformes. La publicité sur les moteurs de recherche, le segment des bannières publicitaires, représentent plusieurs centaines de millions de chiffres d’affaires.
Mise en place en 2019, la taxe sur les services numériques avait rapporté à la France 700 millions d’euros en 2023. Elle est estimée à près d’1 milliard pour 2024. Ces recettes permettraient de compenser la suppression de la publicité, notamment sur France télévisions, qui a tiré de ces recettes publicitaires 434,5 millions d’euros en 2024. FMM, de son côté, ne perçoit que 2,3 millions d’euros. L’INA et Arte ne perçoivent pas de recettes publicitaires. En 2022, Radio France indiquait avoir perçu 64 millions d’euros de recettes publicitaires.
La taxe proposée par les député-es du groupe LFI-NFP couvrirait donc largement la suppression de la publicité et des annonces à caractère commercial sur le service public.