- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Médias, livre et industries culturelles
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport visant à évaluer précisément la part de l’espace audiovisuel disponible consacré aux sujets climatiques et environnementaux. Ce rapport étude l’opportunité, et le coût pour les finances publiques, de mettre en place une réforme visant à accroitre cette part, par exemple via l’élargissement des prérogatives et des moyens de l’ARCOM.
Le 4 avril 2022, les experts du climat du Giec ont publié un nouveau rapport consacré aux conséquences du réchauffement climatique et aux solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ils appellent à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C conformément à l'Accord de Paris en 2015. Alors même que ces conclusions d'intérêt général auraient dû provoquer un ras-de-marée médiatique, les mentions de ce rapport sur les chaînes de télévisions françaises, ont varié « entre « rien » et « quasi rien » », selon l'association Plus de climat dans les médias.Pas un mot aux JT de TF1, M6 ; une minute sur France 2. Aucun auteur du rapport du Giec invité ou interviewé, zéro journaliste environnement en plateau.
L'Affaire du siècle a évalué, via un baromètre créé en 2022, l'espace médiatique consacré à la crise écologique à entre 2 à 5% de l'espace audiovisuel disponible. Dans le secteur audiovisuel, seuls 0,8% des reportages ont été consacrés à ces enjeux entre 2013 et 2022. Les associations QuotaClimat et Data For Good ont montré, en octobre 2022, que la COP 27 a occupé seulement 1,4% de l'espace médiatique, Ces mêmes associations ont quantifié l'espace médiatique dédié à la COP 15 : 0,4%, soit 20 fois moins que la Coupe du monde de Qatar ayant eu lieu sur la même période.
Certes, l'INA a démontré en 2020 que les JT du soir des cinq chaînes historiques (TF1, France 2, France 3, Arte, M6) consacrent deux fois plus de leur temps au traitement des sujets environnementaux depuis la fin des années 1990 et que les angles choisis se diversifient (pollution, climat, biodiversité, énergie...). Cependant cela est loin d'être suffisant, aussi bien au regard du temps de traitement que des sujets abordés.
Ce cadrage médiatique répond encore trop souvent à une logique de silo, via des rubriques dédiées, alors que la question climatique devrait imprégner plus largement le débat. La causalité entre les évènements et le dérèglement climatique est trop souvent exclue du cadrage. Enfin, de nombreux médias ne prennent pas la peine de distinguer les faits des opinions, ce qui alimente le scepticisme, lorsque celui-ci n'est pas directement véhiculé sur les plateaux, comme c'est notamment le cas sur les chaînes privées comme CNews.
Ce problème ne concerne pas seulement l'audiovisuel, mais également l'ensemble de la sphère médiatique. Seuls 8 % des articles de presse du mois d'août 2022 ont fait le lien entre la multiplication des feux et la crise climatique. En tout, seulement 3,6 % des contenus médiatiques pendant la campagne électorale présidentielle de 2022 portaient sur les questions climatiques.
Pourtant, rarement un sujet n'a recouvert une telle dimension d'intérêt général. Le GIEC estime que 3,3 à 3,6 milliards d’individus sont déjà en situation de vulnérabilité. Entre le 1er juin et le 22 août 2022, l’INSEE évalue à 11 000 la surmortalité en France vraisemblablement liée aux vagues de chaleur successives, par rapport à la même période en 2019.
La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets prévoit que l'ARCOM promeut des codes de bonne conduite sectoriels et transversaux, appelés « contrats climat ». Les médias audiovisuels s'engagent, via leurs contrats d'objectifs et de moyens, à renforcer le traitement des thématiques liées à la lutte contre le dérèglement climatique, et à inviter des experts de l'environnement. Les organismes de l'audiovisuel public, en application de l'article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986, sont tenues de participer à l'éducation à l'environnement et au développement durable, obligation sensée figurer dans leurs cahiers des charges qui précisent cette mission (hors ARTE France), et dont l'exécution doit faire l'objet d'un bilan de l'ARCOM transmis au Parlement chaque année. Or, les chiffres sus-mentionnés suggèrent clairement qu'il faut aller plus loin.
Le présent amendement vise donc à demander au Gouvernement la remise d'un rapport aux parlementaires consacré à cette question. Ce rapport évalue précisément la part de l'espace audiovisuel disponible consacré aux sujets climatiques et environnementaux. Ce rapport étude l'opportunité, et le coût pour les finances publiques, de mettre en place une réforme visant à accroitre cette part, par exemple via l'élargissement des prérogatives et des moyens de l'ARCOM.