- Texte visé : Proposition de loi visant à protéger durablement la qualité de l'eau potable, n° 766
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Compléter l’alinéa 7 par la phrase suivante :
« En cas de dépassement, par un composé, des seuils de qualité applicables à l’eau destinée à la consommation humaine, tels que fixés par arrêté en application des articles R. 1321‑1 et suivants du code de la santé publique, l’utilisation de tout produit contenant ledit composé est interdite par arrêté préfectoral, dans les plus brefs délais, sur l’ensemble des aires d’alimentation de captages situées dans la zone concernée. »
Par cet amendement, les députés LFI-NFP visent à protéger strictement les aires d’alimentation de captage. En cas de dépassement par un composé des exigences de qualité fixées pour l’eau destinée à la consommation humaine, l’interdiction de l’utilisation du ou des produits le contenant sur l’ensemble des aires d’alimentation de captages est prise par arrêté préfectoral de façon imminente dans la zone concernée.
Un rapport d'inspection interministériel, datant de juin 2024 et révélé en novembre, souligne "l'échec global" de la préservation de la qualité de l'eau destinée à la consommation pour ce qui concerne les pesticides, et préconise l'interdiction "d'urgence" de leur usage sur les aires de captage d'eaux souterraines les plus polluées. Ce rapport a été réalisé par les inspections des ministères de la Santé, de la Transition écologique et de l'Agriculture.
En 2021, 3,4 millions de français ont bu de l’eau du robinet dépassant la norme de qualité de 0,1 µg/L pour l’ESA-métolachlore selon les résultats du contrôle sanitaire des eaux, effectué par les Agences régionales de santé (ARS) en 2021. Suite à sa mission de pharmacovigilance, l’ANSES a conclu que les concentrations estimées des trois métabolites du S-métolachlore (ESA, OXA, NOA) dans les eaux souterraines sont supérieures à la valeur seuil définie dans le règlement (UE) n°546/2011.
Le S-métolachlore est l’une des substances actives herbicides les plus utilisées en France. Elle se dégrade en métabolites qui migrent dans les milieux : les sols et les eaux de surface et eaux souterraines.
Pourtant les Etats Membres n’ont voté l’interdiction de cette substance qu’en octobre 2023.
Les connaissances scientifiques sur l’état de la pollution agro-chimique qui ne cessent de s’accumuler sont très alarmantes. Citons simplement l’expertise conjointe de l’Inrae et de l’Ifremer en 2022 montrant la contamination générale des écosystèmes.
D’après une étude de l’ONG Générations futures publiée en octobre 2024, ce sont 39 pesticides générant 79 métabolites, ne faisant l’objet d’aucun suivi par les autorités sanitaires et toujours utilisés en France, qui risquent de contaminer les nappes au-delà du seuil réglementaire de 0,1 microgramme par litre (µg/l) .
Pour les eaux souterraines, 70,7 % sont considérées en bon état chimique, les presque 30 % restantes sont affectées principalement par la présence de résidus de pesticides et des teneurs trop élevées en nitrates. Le tableau est moins positif pour les eaux de surfaces. En 2019, seulement 43,1 % d’entre elles étaient en bon état écologique et sensiblement le même pourcentage en bon état chimique.
Les perspectives sont plus négatives encore : 10% de plus des eaux souterraines n’atteindraient pas le bon état écologique en 2027 et 10% de plus des eaux de surface ne seraient pas en bon état chimique à la même échéance. Ces objectifs ne seront pas encore atteints en 2027 à cause des externalités négatives de nos modèles économiques auxquels l’Etat ne demande pas compte.
La Cour des comptes dans son rapport publié en juillet 2023 soulignait l’échec des plans Ecophyto malgré la mobilisation de fonds publics importants et appelait l’Etat à influer sur les modes de production et les filières par l’exercice de ses compétences normatives et de régulation.