- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, visant à sortir la France du piège du narcotrafic, n° 907
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Supprimer cet article.
Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à supprimer l'article étendant le champ de la procédure de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC).
S'il s'agit d'un outil utile pour préserver les juridictions de jugement d’une charge de travail parfois excessive, elle semble inadaptée à la lutte contre le narcotrafic.
La procédure pénale doit ici prendre le temps de se déployer : les audiences doivent se tenir et surtout être préparées. Toutes les étapes de la procédures pénales sont nécessaires dans le cadre d'affaires forcément complexes. La justice a vocation à être solennelle. Dans les affaires touchant au narcotrafic cette solennité a vocation à être préservée.
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme est d’ailleurs constante : plus l’infraction est grave, plus grandes doivent être les garanties des droits de la défense.
De telles garanties seraient à l’évidence limitées par l’extension de la CRPC aux crimes qui concernent les infractions les plus graves de notre droit.
L’extension de la CRPC aux crimes serait surtout dommageable aux victimes.
En effet, dans le cadre de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, le rôle de la victime est réduit. Son consentement à l'utilisation de cette procédure spécifique n'est nullement requis. Ainsi, elle n'a aucun moyen de faire échec à l'utilisation de cette voie pour revenir dans le droit commun. Si elle dispose d'un droit à l'information, elle est associée exclusivement à la phase d'homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et nullement dans la phase préalable mettant en présence uniquement le procureur de la République, le prévenu et son avocat.
La CRPC criminelle reviendrait ainsi à priver les victimes définitivement d’un procès important pour elles et d’un débat sur les faits, leurs circonstances et leur préparation.
Enfin, et comme le souligne le Conseil National des Barreaux, la CRPC exclut tout débat sur les faits, la personnalité de la personne poursuivie, la qualification juridique des faits reprochés, le quantum de la peine que le parquet souhaitera imposer sans – c’est ce que la pratique actuelle de la CRPC montre – permettre un débat sur l’individualisation et l’adaptation de la peine.
Tel est le sens de cet amendement.