- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, visant à sortir la France du piège du narcotrafic, n° 907
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Supprimer cet article.
L’article 23 ter, introduit au Sénat, prévoit qu’en cas d’installation d’une antenne relais à proximité d’un établissement pénitentiaire, le dossier d’information mairie (DIM) doit être transmis au chef dudit établissement, qui devra rendre un avis sur la compatibilité du projet avec les dispositifs techniques de lutte contre la délinquance et la criminalité organisées déployés en prison. Tant que cet avis n’a pas été émis, le maire ou le président de l’intercommunalité ne pourra délivrer l’autorisation d’urbanisme. Par ailleurs, cet article prévoit que le chef d’établissement pénitentiaire participe à l’instance de concertation départementale relative à l’implantation des antennes.
Cette disposition introduit des contraintes nouvelles et substantielles dans les procédures d’autorisation d’implantation des antennes relais, qui sont aujourd’hui régies par la loi n°2015-136 du 9 février 2015, dite loi « Abeille ». Or, l’un des enjeux fondamentaux du déploiement des réseaux mobiles réside dans l’identification des sites d’implantation adaptés, une démarche qui prend déjà plusieurs années. En France, le délai moyen entre l’identification d’une zone et la mise en service d’une antenne varie entre 18 et 24 mois, contre seulement quelques mois en Allemagne et au Royaume-Uni.
En conditionnant l’autorisation d’urbanisme à un avis du chef d’établissement pénitentiaire, cette mesure allongerait encore ces délais, rendant plus difficile le déploiement des infrastructures mobiles dans certaines zones. Cela pourrait impacter directement et concrètement l’accès aux services de téléphonie mobile pour les riverains, y compris leur capacité à joindre les services d’urgence en cas de besoin.
En outre, cette disposition soulève une question de compétence et de cohérence juridique. Elle confère au chef d’établissement pénitentiaire un pouvoir d’appréciation en matière de télécommunications, alors même qu’il ne dispose pas des compétences techniques nécessaires pour évaluer l’impact d’une installation radioélectrique. Ce faisant, elle remet en cause le principe de séparation des législations consacré par le Conseil d’État dans sa décision du 26 octobre 2011. Ce principe affirme que la régulation des communications électroniques relève d’une police spéciale confiée aux autorités de l’État – notamment au ministre chargé des communications électroniques, à l’ARCEP et à l’ANFR – et non aux autorités locales ou à d’autres administrations. La mesure proposée introduirait donc une confusion des compétences contraire à l’objectif d’un déploiement efficace et cohérent des infrastructures numériques sur le territoire.
Enfin, cette disposition apparaît d’autant plus inutile que des mécanismes de coordination existent déjà. L’ANFR travaille en étroite collaboration avec les opérateurs et les établissements pénitentiaires pour éviter toute interférence entre les antennes relais et les dispositifs de brouillage déployés dans les prisons. Avant d’autoriser une station à émettre, l’ANFR identifie les antennes situées à proximité des établissements pénitentiaires et en informe les directions concernées. L’ajout d’une obligation législative supplémentaire ne ferait donc que rigidifier des procédures qui fonctionnent déjà efficacement.
Pour toutes ces raisons, le présent amendement propose la suppression de l’article 23 ter.