- Texte visé : Proposition de loi visant à renforcer le contrôle du Parlement en période d’expédition des affaires courantes, n° 960
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Substituer à l’alinéa 2 les deux alinéas suivants :
« Art. 4 octies. – Les parlementaires ont, en cette seule qualité, intérêt à agir devant la juridiction administrative contre tout acte administratif de nature à méconnaître les compétences et prérogatives liées aux fonctions normatives et de contrôle du Parlement.
« Entrent notamment dans la catégorie mentionnée au premier alinéa du présent article, les actes liés à l’exécution de la loi, les actes d’un Gouvernement démissionnaire excédant manifestement les prérogatives d’un tel Gouvernement ou encore les actes pris en application de la loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. »
Cet amendement du Groupe Ecologiste et social vient introduire dans cette proposition de loi le dispositif prévu dans la proposition de loi n° 756 relative à l’intérêt à agir des parlementaires.
En effet, de jurisprudence constante, le Conseil d’État estime qu’un parlementaire n’a pas, en cette seule qualité, intérêt à agir contre les actes administratifs, y compris le refus du pouvoir réglementaire d’édicter un décret d’application d’une loi pourtant votée par le Parlement et promulguée par le président de la République (CE, 23 novembre 2011, Masson, n° 341258).
La justification de cette jurisprudence restrictive pour les droits des parlementaires serait, selon Jean Massot que le parlementaire en tant qu’il est le représentant de la nation tout entière « fait partie d’un cercle d’intérêt trop vaste pour que son action ne se confonde pas avec l’action populaire » (Conclusions sur CE, 2 février 1987, Joxe et Bollon, n° 82436).
Alors que les membres d’une assemblée délibérante locale ont toujours intérêt à agir contre les actes de l’exécutif local (CE, 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, n° 358994), alors que soixante parlementaires peuvent déférer une loi votée au Conseil constitutionnel avant sa promulgation, le prétoire du juge administratif demeure fermé aux parlementaires sauf à se prévaloir d’une autre qualité, ce qui aboutit soit à des situations ubuesques, soit à un déni de justice.
C’est la raison pour laquelle l’ancien président de la Section du contentieux du Conseil d’État, Daniel Labetoulle, avait proposé de faire évoluer cette jurisprudence en reconnaissant aux parlementaires un intérêt à agir contre les actes administratifs de nature à méconnaître les compétences et prérogatives liées aux fonctions normatives et de contrôle du Parlement (Daniel Labetoulle, « Le recours pour excès de pouvoir du parlementaire », Revue juridique de l’économie publique, n° 675, 1er mai 2010, p. 2).
C’est cette proposition que reprend cet amendement, qui a ainsi une portée plus large que le dispositif prévu originellement, qui est plus ambitieux et qui est sans doute plus conforme à l’état de la réflexion des magistrats administratifs sur la question.