- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à renforcer les prérogatives des officiers de l’état civil et du ministère public pour lutter contre les mariages simulés ou arrangés, n° 1008
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
Par cet amendement, les député.es du groupe LFI-NFP proposent de supprimer cet article qui, comme l'ensemble des dispositions de ce texte xénophobe, est mû par une volonté de jeter l'opprobre sur tous les couples impliquant au moins une personne de nationalité étrangère.
Rien ne justifie cette extension de la durée du sursis à la célébration du mariage qui peut être décidé par le procureur saisi par l’officier d’état civil lorsque celui-ci estime qu'il existe des indices laissant présumer que le mariage envisagé n'est pas sincère.
Rien ne justifie que des couples souhaitant se marier se voient maintenus dans l'attente pour une durée allant jusqu'à quatre mois entiers (voire davantage si le procureur de la République ne répond pas à la demande formulée par l'officier d'état civil sous quinze jours), sur la base de simples suspicions quant à la sincérité de l'union. Et cela d'autant plus que ce texte établit une équivalence insupportable entre l'absence de titre de séjour d'un.e des futur.es époux.ses et l'absence d'un consentement sincère au mariage entre ces dernier.es .
Ce délai excessif deviendrait certainement la norme, puisque ce même article prévoit que le sursis à exécution devienne automatique si le Parquet n'a pas répondu sous quinze jours, et donc non plus conditionné à un avis motivé.
Cette disposition, comme l'ensemble de ce texte, est guidée par un postulat mensonger et xénophobe selon lequel le mariage serait la voie royale pour accéder à la régularisation dans un contexte de « submersion migratoire ».
Un mensonge qui ne résiste pas à l'épreuve des faits, puisque le nombre de mariages « blancs » contractés dans le seul but d’une régularisation est très faible. Seules 406 enquêtes relatives à cette infraction ont été ouvertes par le parquet en 2022, pour un total de 241 710 mariages célébrés.En d’autres termes, en 2022 en France, seuls 0,16% des projets de mariage avaient fait l’objet de l’ouverture d’une enquête par le parquet pour suspicion de mariage blanc. Les condamnations pour ce motif sont encore plus rares : une trentaine par an en moyenne en France (0,01% du total des mariages).
En outre, la régularisation automatique par le mariage n'existe pas. La démarche est sinueuse et de nombreuses conditions s’appliquent pour qu’une personne étrangère se voit régularisée suite à un mariage avec une personne française ou avec une personne étrangère régularisée.
On peut enfin, souligner l'originalité que constitue l'insertion, dans un texte mis à l'ordre du jour d'une niche d'un parti d'extrême-droite qui se déclare d'opposition, d'une disposition directement suggérée par un membre du gouvernement. En effet, peu après le rejet de ce texte manifestement inconstitutionnel en commission des lois du Sénat, le Garde des Seaux Gérald Darmanin a déclaré « Je suis sûr que votre assemblée trouvera les moyens de rendre constitutionnel ce texte. Notamment en permettant, j’y suis favorable, que si le procureur ne répond pas, on donne raison aux maires, alors qu’aujourd’hui c’est l’inverse. Si le procureur ne répond pas, le maire est obligé de marier (…) ».
Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de cet article et appelons au rejet de ce texte xénophobe.