- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à renforcer les prérogatives des officiers de l’état civil et du ministère public pour lutter contre les mariages simulés ou arrangés, n° 1008
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
La législation actuelle permet déjà au parquet de surseoir à la célébration du mariage pour une durée d’un mois renouvelable, soit deux mois au total, dans le but de mener une enquête en cas de doute sur la réalité du consentement. Ce délai est amplement suffisant pour permettre au parquet de forger sa conviction, dès lors que la saisine de l’officier d’état civil repose, en principe, sur des indices sérieux de fraude. Si ces indices sont bien fondés, l’enquête ne devrait pas nécessiter un délai plus long. Prolonger le sursis de manière systématique revient donc à alourdir la procédure sans nécessité, et à introduire une insécurité juridique pour les couples, en permettant à l’autorité judiciaire de bloquer un projet de mariage pour une durée de quatre mois. Cela dénature la finalité même du sursis, qui est un outil d’enquête exceptionnel, et non un moyen de pallier une charge de travail ou une carence décisionnelle du parquet.
Surtout, l’instauration d’un sursis automatique en cas de silence du parquet au bout de 15 jours est inacceptable : elle inverse la logique de protection des libertés. Le sursis ne peut résulter que du doute exprimé par le procureur, et non de son silence. Ce dispositif transforme donc une mesure d’exception en obstacle systématique à la liberté matrimoniale. Ce faisant, il donne aux maires un pouvoir de blocage inacceptable puisqu'en saisissant le parquet, quand le profil des futurs époux ne leur convient pas, ils déclencheront mécaniquement un sursis sans que la sincérité du projet matrimonial soit réellement mise en cause. Si certains élus se montreront responsables, d’autres, plus prompts à user de leur fonction pour discriminer, disposeront d’un levier pour entraver arbitrairement les projets de mariage des personnes en situation précaire ou étrangère.
Pour toutes ces raisons, la suppression de cet article s’impose, afin de préserver l'équilibre entre les exigences de contrôle et la protection effective de la liberté matrimoniale.