- Texte visé : Texte de la commission sur le projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de simplification de la vie économique (n°481 rectifié)., n° 1191-A0
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Supprimer cet article.
L’article 15 quater, introduit en commission spéciale, crée un nouveau cas de dérogation à l’évaluation environnementale pour les projets qualifiés d’intérêt national majeur pour la souveraineté nationale ou la transition écologique, au sens de l’article L. 300-6-2 du code de l’urbanisme, dans le cadre d’une demande d’autorisation environnementale.
Cet article pose de nombreuses difficultés juridiques, qui le rendent inopérant et contreproductif. Il convient tout d’abord de rappeler que c’est le projet qui fait l’objet d’une évaluation environnementale et non les procédures d’autorisation auquel il est soumis.
Le présent article serait donc inapplicable en l’état. Par ailleurs, si cet article s’appuie sur l’article 2.4 de la directive 2011/92/UE relative à l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, il ne fait toutefois pas une bonne application de ses dispositions.
En effet, l’article 2.4 de la directive 2011/92/UE prévoit la possibilité de déroger à l'évaluation environnementale dans des conditions strictement définies. Cette dérogation ne peut s’appliquer que dans des cas exceptionnels, pour un projet spécifique et lorsque la réalisation d’une évaluation environnementale entrainerait une atteinte à la finalité du projet. Autrement dit, la directive ne permet l’application de cette dérogation qu’à titre exceptionnel, pour certains projets spécifiques, et non pour une catégorie générale de projet.
Il faut également que la réalisation du projet présente un caractère d'urgence. En l’occurrence, le présent article prévoit une dérogation générale et automatique pour un ensemble de projets, sans aucun mécanisme d’examen des demandes de dérogation à l’évaluation environnementale, ni justification de l'urgence dans la réalisation du projet. Cet article est donc, à ce titre, inconventionnel au regard de la directive et pourrait conduire à une mise en demeure de la France par la Commission européenne. À cet égard, il serait de nature à fragiliser juridiquement les projets concernés, allant à l’encontre de l’objectif recherché, en ce que les dispositions législatives pourraient être écartées par le juge pour non-conformité manifeste à la directive 2011/92/UE.
En outre, le XII de cet article prévoit une dérogation au régime d’archéologie préventive en l’écartant pour ces mêmes projets. L’introduction d’un tel régime dérogatoire aurait pour effet de priver l’aménageur de la possibilité de lever l’aléa archéologique préalablement à son aménagement. Il demeure en effet soumis à l’obligation de déclarer toute découverte de patrimoine archéologique en cours d’aménagement et serait par ailleurs exposé à un risque de sanction pénale en cas de destruction du patrimoine archéologique. Pour rappel, la France a ratifié la convention européenne de La Valette (1992) pour la protection du patrimoine archéologique et c’est à ce titre que le dispositif d’archéologie préventive a été mis en place.
Le maintien d’une telle dérogation au régime de l’archéologie préventive aurait pour conséquence de reporter la charge des fouilles, en cas de découverte de vestiges, sur les finances de l’Etat et non de l’aménageur comme dans le cadre de l’archéologie préventive L’absence de possibilité de mettre en œuvre le dispositif d’archéologie préventive fait également peser de très graves risques de destruction du patrimoine archéologique. Le présent amendement vise en conséquence à supprimer cet article au regard notamment de son inconventionnalité avec le droit européen et de la remise en cause du dispositif d’archéologie préventive.