- Texte visé : Texte de la commission sur la proposition de loi de M. Olivier Falorni relative à la fin de vie (1100)., n° 1364-A0
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Ne peuvent bénéficier de l’aide à mourir prévue par le présent article les personnes faisant l’objet d’une procédure pénale en cours pour des faits passibles de sanction criminelle ou correctionnelle, et dont la responsabilité pénale est susceptible d’être engagée. Cette exclusion s’applique jusqu’au prononcé définitif de la décision de justice.
L’aide à mourir, en tant qu’acte irréversible, exige un consentement libre, éclairé, constant et
non influencé. Or, une personne mise en examen, détenue provisoirement ou en attente de
jugement, est en situation de forte vulnérabilité psychologique, sociale et juridique. Le
contexte pénal – isolement, incertitude, stress, stigmatisation – compromet la clarté du
discernement et la liberté du choix. Le consentement, pour être valable, doit être juridiquement
et moralement sécurisé, ce que ne garantit pas une procédure judiciaire en cours.
Selon la doctrine bioéthique et la jurisprudence (Convention d’Oviedo, CEDH), l’aide à mourir
ne peut jamais se substituer à des soins défaillants ou à un abandon institutionnel. Des
précédents étrangers, en Espagne (Marin Eugen Sabau) ou en Belgique (Frank Van Den
Bleeken), illustrent les dérives possibles : euthanasie accordée à des détenus avant jugement
ou par défaut de prise en charge, empêchant procès, reconnaissance des faits et réparation
pour les victimes.
Ces affaires ont montré que la mort, dans certains cas, devient une « solution » à une détresse
non médicale, faute d’alternatives crédibles. L’Institut européen de bioéthique alerte sur le
risque de banalisation de l’aide à mourir dans le milieu carcéral, où la demande est souvent
motivée par l’enfermement, l’isolement ou l’abandon, et non par une pathologie incurable.
Permettre l’aide à mourir à une personne en instance de jugement risquerait de court-circuiter
la procédure judiciaire, de priver les victimes de justice et d’ébranler la confiance dans l’État
de droit. La justice doit primer lorsqu’il y a un enjeu collectif, et l’exercice d’un droit individuel
ne peut entraver la fonction pénale ni compromettre l’ordre public.
L’amendement proposé vise donc à suspendre temporairement la possibilité d’aide à mourir
pour les personnes non encore jugées, sans remettre en cause leur droit aux soins palliatifs,
à la sédation profonde (loi Claeys-Leonetti), ni à un accompagnement médical et
psychologique adapté. Il s’inscrit dans une logique de précaution, conforme à la jurisprudence
de la CEDH, qui reconnaît aux États le droit d’encadrer strictement cette pratique pour
protéger les plus vulnérables.