- Texte visé : Texte de la commission sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, relative à la raison impérative d’intérêt public majeur de la liaison autoroutière entre Castres et Toulouse (n°1435)., n° 1446-A0
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
À l’alinéa 2, supprimer les mots :
« , au désenclavement territorial ».
Par cet amendement de repli, les député.es du groupe LFI-NFP souhaitent purger cette proposition de loi de ses postulats mensongers. En particulier, le projet de liaison autoroutière entre Castres et Verfeil – A69 ne présente pas, contrairement à ce que cet article unique prétend, de "contribution significative" au désenclavement territorial.
Premièrement, le récit de l'enclavement du bassin Castres-Mazamet ne correspond pas à la réalité. En 2019, les sénateurs eux-mêmes adoptaient une loi disposant au contraire que Castres était « désenclavante ». L'article 1er de cette proposition de loi définit explicitement l’enclavement d’un territoire : il doit être situé soit à plus de 50 km ou 45 minutes d’une unité urbaine de 1 500 à 5 000 emplois, d’une autoroute ou d’une route aménagée pour la circulation rapide des véhicules ; soit à plus de 60 minutes d’une gare desservie par une ligne à grande vitesse ou à 45 minutes d’une sous-préfecture ou d’une préfecture.
Ces critères ne correspondent pas au bassin de Castres-Mazamet. Castres compte plus de 20 000 emplois et est une sous-préfecture. Mazamet se trouve à moins de 50 km de la première.
En outre, selon Julien Milanesi, économiste à l'université Paul Sabatier et chercheur au CNRS, auditionné dans le cadre de la commission d'enquête, l'agglomération Castres-Mazamet n’était ni enclavée ni une zone défavorisée, mais est un territoire attractif ne perdant pas d'habitants. La zone d'emploi de Castres-Mazamet accueille 140 000 habitants et 50 000 emplois en 2020. Les cartes montrent que les échanges quotidiens entre Castres et Toulouse sont déjà presque équivalents à ceux existants entre Albi et Toulouse. Face à cette réalité, les critères retenus par Atosca pour décrire l'enclavement d'un territoire sont particulièrement obscurs.
Le bassin Castres-Mazamet n’a pas besoin d’être désenclavé. Il a davantage d’établissements de soins et d’enseignement supérieur qu’annoncé dans le projet, comme le relevait le tribunal administratif de Toulouse, le 27 février, pour motiver sa décision d’annuler l’autoroute.
D'autre part, nous savons que le lancement de routes et autoroutes obéit de longue date à deux mantras : ceux du développement économique et précisément, du désenclavement. Or, aucun des deux n’a été démontré, et la communauté scientifique continue d'aborder cette seconde notion avec prudence, comme notre groupe a eu l'occasion de le rappeler dans le rapport accompagnant notre proposition de loi visant à instaurer un moratoire sur les projets routiers et autoroutiers (n° 417).
La notion d’enclavement, maintes fois invoquée depuis cinquante ans pour justifier l’autoroute A69, est elle-même sujette à caution. Elle est souvent affaire de perception par les élus locaux, plutôt qu’un fait établi. Le bassin de Castres‑Mazamet est desservi par une route nationale, une voie ferrée et un aéroport subventionné par la puissance publique – soit trois modes de transport - et pourtant, la construction d’une autoroute a été présentée comme la solution lui permettant de faire face au déclin de l’industrie textile.