- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, de programmation pour la refondation de Mayotte, n° 1470
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
La restriction des conditions d’accès au séjour pour motif familial à Mayotte introduite à l'article 2 repose sur de mauvaises raisons et produira des effets dévastateurs.
De mauvaises raisons : le gouvernement justifie ce traitement différencié par la situation particulière de Mayotte - référence forcée à l'article 73 de la constitution -, en s’appuyant sur le fait qu’un nombre important de titres de séjour y sont délivrés pour des motifs familiaux. Cette dynamique sociale propre à Mayotte ne doit pas servir de prétexte à une politique d'exception : les parents d'enfants français à Mayotte ne sont en effet pas moins légitimes à obtenir un titre que ceux de métropole. Les migrations sont une réalité avec laquelle il faut composer, au lieu de chercher à la camoufler. La fonction du droit n'est pas de neutraliser ce que l'on refuse de voir. Ce régime d'exception repose sur une logique inique de dissuasion des flux migratoires, dont toutes les études démontrent l'absurdité.
Les conséquences pour les familles sont, en revanche, très concrètes : ce dispostitif ne fera qu'accentuer leur précarité et condamner nombre d’enfants à grandir dans un vide juridique. Le Défenseur des droits l’a souligné : le laboratoire juridique que constitue Mayotte entretient l’insécurité administrative et freine toute perspective d’intégration, au détriment du développement de l’île. Il faut ajouter que ces dispositions portent atteinte au droit des enfants de nationalité française de séjourner en France car l'un des deux parents se retrouvera privé de son droit au séjour et susceptible de faire l'objet d'une OQTF s'il n'en remplit pas les conditions. Concrètement, cela obligera ces derniers à quitter le territoire français avec les autres membres de leur famille. Or, cette situation est contraire au droit reconnu à tout citoyen européen de séjourner sur le territoire dont il a la nationalité (article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), tel qu’interprété par la Cour de justice de l'UE (CJUE), applicable à Mayotte, en tant que Région ultrapériphérique de l'UE).
Loin de résoudre la crise à Mayotte, ces mesures d’exception ne font qu'en nourrir les causes, alimentant ainsi un cycle de misère et de violence. Ce texte crée le désordre qu'il prétend combattre.