- Texte visé : Projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030, n° 1641
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des affaires culturelles et de l'éducation
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement, un rapport public présentant le suivi budgétaire, économique, social et environnemental de l’ensemble des dépenses fiscales liées aux jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Il met à disposition l’ensemble des données dans des conditions permettant leur consultation par le public et par la recherche en économie.
Le rapport détaille notamment :
1° La liste exhaustive des dispositifs fiscaux ayant bénéficié aux organisateurs, à leurs filiales, aux partenaires contractuels, ainsi qu’aux fédérations sportives internationales dans le cadre des jeux Olympiques et Paralympiques, leur évolution annuelle depuis 2017 ;
2° Le coût ex ante et ex post de chacun de ces dispositifs, ainsi que les données disponibles sur leurs bénéficiaires effectifs ;
3° Les difficultés rencontrées par les services compétents pour assurer leur suivi, leur évaluation et leur contrôle ;
4° Les recommandations du Gouvernement pour garantir un suivi annuel fiable de ces dépenses fiscales.
Le rapport inclut également un bilan consolidé des dépenses fiscales rattachées à la mission « Sport, jeunesse et vie associative », et formule des pistes d’amélioration pour leur pilotage.
Le présent amendement vise à renforcer le pilotage, la transparence et le contrôle parlementaire des dépenses fiscales rattachées aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, dont la Cour des comptes a dressé un constat nous inquiétant dans son rapport public thématique de septembre 2025. Dans ce rapport, à côté de nombreux points satisfaisants sur ces Jeux, la Cour souligne que « les dépenses fiscales liées aux Jeux ne font l’objet d’aucun suivi structuré depuis 2021 » (Cour des comptes, sept. 2025, Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, p. 37). Elle relève : l’absence de chiffrage consolidé, comme l’absence de données fiables transmises par les bénéficiaires, l’absence d’instruction adressée aux services fiscaux pour assurer le suivi de ces dispositifs. La Cour note en outre que plusieurs exonérations accordées au COJO, à ses filiales commerciales, à certains de ses partenaires, ainsi qu’aux fédérations sportives internationales, ont été appliquées sans justification ex ante, et sans transmission au Parlement d’une estimation sincère de leur coût, pourtant exigée par l’article 51 de la LOLF. Alors que cela devait faire l’objet de sa mission fixée par la loi.
Ces constats rejoignent les alertes formulées dès l’examen du PLF pour 2024, notamment à travers des amendements contestant le caractère disproportionné et insuffisamment contrôlé des avantages fiscaux liés aux JO 2024 et leur extension de dernière minute à des filiales et prestataires. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2023‑859 DC et saisi par nous avec nos partenaires de gauche, a d’ailleurs censuré partiellement ces dispositifs, en relevant le législateur n’avait « pas fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction du but qu’il s’est proposé » en organisant des exonérations d’imposition pour les fédérations internationales installées en France.
Plus largement, les difficultés rencontrées pour documenter les dépenses fiscales JO 2024 s’inscrivent dans un problème structurel de pilotage des finances publiques, largement analysé dans la littérature récente.
Dans « L’État droit dans le Mur » (Anne-Laure Delatte, 2023), l’auteure décrit l’essor des dépenses fiscales non pilotées, qui échappent de plus en plus aux mécanismes ordinaires de régulation budgétaire. Dans Qu’ont-ils fait de nos milliards ? (Lucie Castets, 2024), il est montré que la multiplication de ces niches — non évaluées, non conditionnées et peu transparentes — contribue à une forme de post-keynésianisme inversé, où la dépense fiscale croît en dehors du champ démocratique classique, au bénéfice des contribuables les plus aisés entreprises et grands patrimoines, tandis que les dépenses budgétaires classiques sont contraintes, exposées et arbitrairement comprimées, et les services publics avec eux.
Les dépenses fiscales associées aux JO 2024 en constituent un exemple emblématique : lourdes en volume, dérogatoires, orientées vers des acteurs privés internationaux, mais faiblement contrôlées et dépourvues de tout lien avec les objectifs sociaux, écologiques ou sportifs fixés par la Nation.
Le présent amendement propose donc de travailler remédier à ces failles en demandant au Gouvernement un rapport public établissant, pour la première fois, une vision exhaustive du coût réel, des bénéficiaires et des impacts de ces dépenses fiscales. Il permettra au Parlement de disposer de données fiables pour exercer pleinement sa mission de contrôle, et de formuler, le cas échéant, des recommandations pour l’avenir.