- Texte visé : Texte, en nouvelle lecture, sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à réformer le mode d'élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (n°1487)., n° 1656-A0
- Stade de lecture : Nouvelle lecture
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
Cet amendement vise à supprimer l’article 2, qui participe de la mise en oeuvre de la réforme du mode de scrutin municipal à Paris, Lyon et Marseille, proposée par la présente proposition de loi.
La présente proposition de loi soulève de graves interrogations quant au respect des principes démocratiques fondamentaux, au premier rang desquels figure la sincérité du scrutin, à laquelle le Conseil Constitutionnel reconnaît une valeur constitutionnelle constante.
La réforme proposée, en prévoyant l’organisation de deux scrutins parallèles au sein d’un même bureau de vote — l’un pour l’élection des conseils d’arrondissement ou de secteur, l’autre pour l’élection des conseils municipaux — introduit une complexité procédurale inédite dans le processus électoral de trois des plus grandes villes de France. Cette dualité simultanée impose à chaque électeur de manipuler deux bulletins distincts, de les insérer dans deux enveloppes séparées, et de les déposer dans deux urnes différentes. Une telle organisation, qui s’écarte des standards habituels du vote municipal, multiplie mécaniquement les risques d’erreur de manipulation, de confusion entre les scrutins, voire de nullité des bulletins en cas de panachage ou de dépôt de bulletin mal ordonné.
Ce dispositif alourdi à la lisibilité démocratique discutable menace non seulement la clarté de l’expression du suffrage mais aussi la régularité des opérations électorales. La distinction, pour l’électeur, entre les compétences respectives des conseils d’arrondissement et du conseil municipal n’est aujourd’hui ni évidente, ni communément maîtrisée. L’introduction d’un tel système ne peut dès lors qu’aggraver la méconnaissance des enjeux du vote, accroître le taux d’abstention ou induire un vote erroné, altérant ainsi profondément la sincérité du scrutin.
Par ailleurs, la situation propre à la ville de Lyon interroge. Au sein de cette commune, la tenue simultanée de trois scrutins – pour les conseils d’arrondissement, le conseil municipal et la métropole de Lyon – dans un même bureau de vote, constituerait une première historique. Cette configuration inédite ne manquerait pas d’alimenter les risques de confusion, tant pour les électeurs que pour les organisateurs, et d’introduire un facteur significatif d’insécurité juridique dans le déroulement du scrutin.
Ce n’est pas sans raison que le rapporteur de la proposition de loi lui-même, M. Jean-Paul Mattei, a tenté, lors de l’examen en première lecture du texte à l’Assemblée nationale, par l’amendement n° 62 (rect.), de soustraire la ville de Lyon au champ d’application de la réforme. Dans l’exposé sommaire de cet amendement, il reconnaît explicitement le « fort risque de censure constitutionnelle » que ferait peser l’organisation simultanée de trois scrutins dans cette ville, en raison de l’atteinte qu’elle porterait à l’intelligibilité du vote et à la compréhension de ses enjeux par les électeurs. Ce constat, émanant du rapporteur du texte lui-même, constitue un aveu d’irrégularité démocratique et renforce la légitimité de la présente.
La complexité procédurale et le risque avéré de mécompréhension du vote constituent autant de facteurs de nature à vicier la sincérité du scrutin. Le Conseil Constitutionnel ne pourra que constater que cette proposition de loi, loin d’améliorer le processus démocratique, y porte une atteinte substantielle.