- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2026, n° 1906
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Enseignement scolaire
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
| (en euros) | ||
| Programmes | + | - |
| Enseignement scolaire public du premier degré | 0 | 0 |
| Enseignement scolaire public du second degré | 0 | 0 |
| Vie de l'élève | 0 | 0 |
| Enseignement privé du premier et du second degrés | 0 | 2 000 000 000 |
| Soutien de la politique de l'éducation nationale | 0 | 0 |
| Enseignement technique agricole | 0 | 0 |
| Fonds de soutien à la rénovation du bâti scolaire(ligne nouvelle) | 2 000 000 000 | 0 |
| TOTAUX | 2 000 000 000 | 2 000 000 000 |
| SOLDE | 0 | |
La vétusté du bâti scolaire de notre pays constitue un sujet de préoccupation majeure. De nombreux établissements sont installés dans des bâtiments anciens, inadaptés aux enjeux contemporains. D’autres, plus récents, présentent aujourd’hui un état de dégradation tel qu’ils ne permettent plus d’assurer les enseignements dans des conditions satisfaisantes.
Pourtant, la question du bâti scolaire relève avant tout de la santé publique. Certains risques que l’on aurait pu croire révolus demeurent, à l’image de la présence d’amiante. Bien que son utilisation soit interdite depuis 1997, 85 % des établissements scolaires ont été construits avant cette date, et 70 % d’entre eux contiennent encore des matériaux amiantés. Ce chiffre est vraisemblablement sous-estimé, puisque seuls la moitié des établissements déclaraient en 2024 disposer d’un dossier technique amiante (DTA) [1].
Si notre parc scolaire peine à répondre à des enjeux sanitaires d’il y a trente ans, comment pourrait-il faire face aux défis climatiques actuels ? En 2019, les épreuves du diplôme national du brevet ont dû être reportées en raison d’une canicule, révélant l’inadaptation des établissements à de telles températures. En juin 2025 encore, des centaines d’écoles ont dû fermer sous l’effet des fortes chaleurs.
Au-delà de ces épisodes médiatisés, le quotidien des enseignants, élèves et étudiants est souvent marqué par des conditions d’apprentissage dégradées, dans des bâtiments dont les températures extrêmes empêchent d’assurer convenablement la mission de service public qu’est l’éducation. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime d’ailleurs que « les risques d’atteinte à la santé sont réels lorsque les températures dans les locaux sont inférieures à 14 °C ou supérieures à 30 °C » [2].
Les fortes chaleurs ont des conséquences directes sur la santé, mais également sur le travail et l’apprentissage : la productivité moyenne baisse de 50 % dès 33-34 °C, même pour un effort modéré [3]. Plusieurs études ont démontré que les performances scolaires diminuent à mesure que la température des salles de classe augmente [4].
Or, les collectivités locales, faute de moyens suffisants, peinent à engager les travaux de rénovation nécessaires. Les inégalités territoriales sont manifestes : d’une part géographiques, car les besoins d’adaptation sont plus importants en milieu urbain, où la température moyenne peut être jusqu’à 6,5 °C plus élevée que dans les zones rurales – comme cela a été observé entre l’agglomération de Rennes et sa périphérie entre 2010 et 2013 [5]. D’autre part économiques, puisque les collectivités les plus aisées investissent davantage dans leurs établissements scolaires. Les communes appartenant au quartile le plus riche dépensent en moyenne 275,80 € par habitant·e pour l’enseignement, la formation et l’apprentissage, contre 270,40 € pour celles du quartile le plus pauvre [6].
Afin de répondre au double enjeu du manque de moyens et des inégalités territoriales, il est proposé de créer un fonds national de soutien à la rénovation du bâti scolaire. Compte tenu de l’ampleur du retard accumulé et du nombre d’établissements concernés – environ 50 000 écoles publiques –, des moyens significatifs doivent être mobilisés. Le rapport Demarq estimait dès 2020 les besoins à 40 milliards d’euros sur dix ans [7], soit environ 5 milliards d’euros par an en tenant compte de l’inflation.
Le présent amendement propose la création d’un programme “Fonds de soutien à la rénovation du bâti scolaire”, doté de 2 000 000 000 € en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), dans l’hypothèse où l’amendement proposant des crédits à hauteur de 5 milliards d’euros ne serait pas adopté
Afin de respecter la règle de recevabilité financière, il est proposé de réduire d’autant les crédits de l’action 03 « Enseignement en collège » du programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degré ».
Les auteurs du présent amendement n’entendent pas diminuer les moyens alloués à ces actions et appellent le Gouvernement à lever le gage.
Le présent amendement s'appuie sur le travail remarquable réalisé par l’Alliance Écologique et Sociale (AES) dans son rapport « L’école bien dans les murs, Pour une rénovation écologique du bâti scolaire » publié en septembre 2025. La Confédération paysanne, ATTAC, SUD-SolidairEs, GreenPeace, la FSU, Les Amis de la Terre, OXFAM et la CGT Educ'Action ont notamment participé à ce rapport.
[1] SNES-FSU, Amiante dans le bâti scolaire : il faut agir !, 14 mars 2025, https://www.snes.edu/ma-carriere/sante-et-securite/amiante-dans-le-bati-scolaire-il-faut-agir/.
[2] ONS, Les ambiances thermiques dans les locaux, Risques particuliers, Premier et Second degrés, 10 juillet 2019, ONS_FPO_1D_2D_07_08_AmbiancesThermiques_1155660.pdf.
[3] White M. C., Etzel R. A., Wilcox W. D. et Lloyd C., « Exacerbations of Childhood Asthma and Ozone Pollution in Atlanta », in Epidemiology Study, Environmental Research, vol. 65, issue 1, avril 1994, p. 56-68.
[4] Wargocki P and Porras-Salazar J-A., « The relationship between classroom temperature and children’s performance in school », Building and Environnement 157. April 2019.
[5] Foissard X., L’îlot de chaleur urbain et le changement climatique : application à l’agglomération rennaise, thèse pour le doctorat de géographie, Université Rennes 2, 2015.
[6]https://www.collectivites-locales.gouv.fr/bis-ndeg194-la-situation-financiere-des-commues-en-2023-selon-les-revenus-de-leurs-habitants.
[7] Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies, Rapport sur la rénovation énergétique des bâtiments scolaires, François Demarcq, 26 février 2020.