- Texte visé : Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026, n° 1907
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Code concerné : Code de la sécurité sociale
À la fin du deuxième alinéa du c du 2° du III de l’article 18 de la loi n° 2025‑199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, le taux : « 200 % » est remplacé par le taux : « 150 % ».
Cet amendement de repli des députés socialistes et apparentés vise à fixer le point de sortie des exonérations sociales en cible (après l'année 2025 de transition) à 2,5 SMIC et non à 3 SMIC, comme prévu par l'article 18 de la LFSS pour 2025.
Plusieurs arguments justifient cet amendement.
Tout d'abord, de nombreux études économiques démontrent l'inefficacité de toute exonération de cotisation sociale au-delà de 2,5 SMIC.
C'est pourquoi le rapport Bozio-Wasmer, qui a inspiré cet article 6, fixe dans son scénario central, le point de sortie à 2,5 SMIC.
Ensuite, le déficit aggravé de la Sécurité sociale tel que présenté dans le présent PLFSS justifie des mesures nouvelles d'économies sur des dépenses inefficaces, et non celles injustes proposées sur l'hôpital, ou les retraités.
Dès lors, avancer à 2,5 SMIC - et non 3 - le point de sortie des exonérations sociales fera mécaniquement rentrer des cotisations sociales, sans détruire de l'emploi.
Cet amendement est donc vertueux budgétairement : son rendement serait de 2,25 milliards d'euros dès 2026, selon des simulations opérées sur le simulateur LexImpact.
Il nous sera probablement opposé l'impact négatif sur l'emploi, notamment industriel, d'un tel amendement.
Nous tenons dès lors à rappeler plusieurs éléments du rapport d’Antoine Bozio et d’Etienne Wasmer :
- Si ses préconisations sont mises en oeuvre, le rapport évalue que le secteur industriel gagnerait 3 960 ETP, grâce notamment au lissage des exonérations de cotisations sociales sous 2,5 SMIC (“L’emploi industriel serait affecté positivement, alors même que les exonérations ont été réduites sur les salaires plus élevés.”
- La variation du coût du travail induite par la réforme ne serait toutefois pas homogène entre secteurs industriels : - 0,3 % pour l’industrie agroalimentaire, 0 % pour la fabrication d’autres produits industriels, mais + 0,3 % pour la fabrication d’équipements électriques et machines ;
- En comparaison de ses voisins européens, l’évolution en France des coûts unitaires de la main-d’œuvre dans les pays de l’Union européenne depuis 1996 a été une des plus faibles (+ 20 % par rapport en 1996 environ, contre + 60 % en Italie et + 50 % au Royaume-Uni) ;
Les secteurs industriels (textile, électronique, etc.) sont dans la moyenne des montants et des taux d’exonération apparent par secteur d’activité en fonction du salaire moyen par tête ; les secteurs qui profitent le plus des exonérations de cotisations sociales étant la finance, l’informatique, etc. Autrement dit, une réduction de 3 à 2,4 SMIC du point de sortie des exonérations de cotisations sociales n’impacterait pas spécifiquement le secteur industriel
Les secteurs industriels (textile, électronique, etc.) sont dans la moyenne des montants et des taux d’exonération apparent par secteur d’activité en fonction du salaire moyen par tête ; les secteurs qui profitent le plus des exonérations de cotisations sociales étant la finance, l’informatique, etc. Autrement dit, une réduction de 3 à 2,4 SMIC du point de sortie des exonérations de cotisations sociales n’impacterait pas spécifiquement le secteur industriel
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Cet amendement s'inscrit en complément des propositions budgétaires formulées par les Socialistes lors de leur Université d'été à Blois le samedi 30 août 2025.
Ces propositions budgétaires se fixent 4 principes :
1er principe : Soutenir les classes populaires et moyennes et les travailleurs ;
2e principe : Mettre à contribution les grandes entreprises et les grandes fortunes ;
3e principe : Relancer l’économie française via un plan d’investissement vert ;
4e principe : Retrouver la maîtrise de la dette publique : objectif 3% de déficit à l'horizon 2032, avec une cible de 5% pour 2026.
Pour ce faire, les socialistes proposent de :
- Collecter 26,9 milliards d'euros de recettes nouvelles ;
- Réaliser 14 milliards d'euros d'économies ;
- Engager 19,2 milliards d'euros de dépenses nouvelles (pour suspendre la réforme des retraites, soutenir le pouvoir d’achat ses travailleurs et relancer l’investissement).
En ce qui concerne spécifiquement le PLFSS pour 2026, les socialistes proposent :
1/ D'augmenter les recettes sans imposer les ménages aux revenus les plus modestes (pour un total de 7,5 milliards d'euros) : affectation d’une partie des recettes de la taxe dite Zucman à hauteur de 2 % sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros pour compenser le coût de la suspension de la réforme des retraites (500 millions d'euros), introduction d’une progressivité sur la CSG applicable aux revenus du capital (1,9 milliard d'euros), création d’un prélèvement social de 1 % sur les transmissions de capital à titre gratuit (1 milliard d'euros), baisse du point de sortie des allégements généraux de cotisations sociales de 3 à 2,4 SMIC (2 milliards d'euros), suppression de la déduction forfaitaire de cotisations sociales patronales applicables aux entreprises de moins de 20 salariés (-1,5€) ou de moins de 250 salariés (-0,5€) visant les heures supplémentaires (0,9 milliard d'euros), doublement de la taxe sur les services numériques (taxe “GAFAM”) (0,8 milliard d'euros), création d'une taxe sur l’ajout de gras, de sucre, et de sel dans les produits transformés et sur les publicités n’affichant pas le nutriscore (0,2 milliard d'euros), développement de la lutte contre la fraude aux cotisations sociales (0,2 milliard d'euros) ;
2/ De maîtriser les dépenses sans rogner sur les prestations des assurés (pour un total de 4,6 milliards d'euros) sur la base notamment des propositions du rapport Charges et produits de l'Assurance maladie et du rapport du Haut conseil du financement de la protection sociale, du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, et du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge : contrôle plus fin des dépenses sur les produits de santé (médicaments à faible service médical rendu, etc.) (1,2 milliard d'euros), lutte contre les phénomènes de rente et d’optimisation financière (0,4 milliard d'euros), meilleure pertinence des prescriptions des soins (0,8 milliard d'euros), réduction des dépenses liées à l’intérim médical et paramédical (0,2 milliard d'euros), amélioration des parcours de soins et du lien ville - hôpital (0,1 milliard d'euros), choc de prévention pour lutter contre les dépenses évitables liées aux addictions (0,4 milliard d'euros), meilleur encadrement du régime cumul emploi - retraite (0,5 milliard d'euros), plafonnement des indemnités versées suite à une rupture conventionnelle pour les revenus très élevés (1 milliard d'euros) ;
Soit un total d’effort de rééquilibrage avant dépenses nouvelles de 12,1 milliards d'euros.
3/ D'engager des dépenses nouvelles (1,7 milliards d'euros) : suspension de la réforme des retraites (- 500 millions d'euros), prise de mesures d’urgence pour l’hôpital public, les EHPAD, les crèches, etc. notamment sur les rémunérations et les conditions de travail (- 1,2 milliard d'euros).
En partant des prévisions de la Commission des comptes de la Sécurité sociale, juin 2024, déficit de la Sécurité sociale à 24 milliards d'euros en 2026), le déficit de la Sécurité sociale en 2026 après application de nos propositions serait ainsi - 13,6 milliards d'euros, à comparer aux - 17,5 milliards d'euros prévus par le Gouvernement.