XVIe législature
Session ordinaire de 2023-2024

Première séance du jeudi 23 mai 2024

Sommaire détaillé
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Première séance du jeudi 23 mai 2024

Présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Justice patrimoniale au sein de la famille

    Commission mixte paritaire

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille (no 2620).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Perrine Goulet, rapporteure de la commission mixte paritaire.

    Mme Perrine Goulet, rapporteure de la commission mixte paritaire

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    Le 18 janvier dernier, nous examinions cette proposition de loi dans l’hémicycle ; quatre mois plus tard, nous sommes réunis pour voter le texte adopté par la commission mixte paritaire (CMP) la semaine dernière. Je souhaite, en préambule, saluer l’engagement de son auteur, mon collègue Hubert Ott. Sans son travail, nous n’aurions pas mis fin aux incohérences juridiques actuelles. Je me félicite également du travail constructif mené avec la rapporteure du Sénat, Isabelle Florennes, et je remercie les services de l’Assemblée pour leur soutien, en particulier Raphaële Jegou, administratrice de la commission des lois. Enfin, je salue la volonté d’avancer du Gouvernement, qui a déclenché la procédure accélérée sur ce texte et nous permet ainsi de mettre rapidement fin à une injustice.
    La proposition de loi comporte deux volets en faveur d’une meilleure justice fiscale et patrimoniale. L’article 1er comble une faille juridique : aujourd’hui, lorsqu’un époux tue son époux, il demeure bénéficiaire des avantages issus de sa convention matrimoniale. Pour y remédier, cet article crée un dispositif de déchéance des avantages matrimoniaux en cas de condamnation pour meurtre ou violences sur conjoint. Le texte initial se référait au mécanisme d’ingratitude existant pour les libéralités, mais la commission des lois de l’Assemblée a fait le choix de créer un dispositif autonome, plus proche de celui qui existe pour déchoir un époux meurtrier de ses droits successoraux. Lorsqu’elle est facultative, la déchéance pourra être demandée par le ministère public, par les héritiers ou par la victime elle-même. Pour tenir compte de l’éventuel décalage entre la dissolution de la communauté et la condamnation de l’époux, ce dernier devra restituer les revenus dont il a eu indûment la jouissance.
    Deux dispositions nouvelles viennent compléter ce mécanisme. Le futur article 1399-5 du code civil prévoit qu’un époux déchu sera privé du bénéfice des biens propres de son époux décédé lorsque ceux-ci avaient été apportés à la communauté. Il paraissait injuste et incohérent avec la proposition de loi que les biens propres d’une femme assassinée par son époux soient récupérés par lui : cette disposition permet d’y remédier.
    L’article 1er bis A prévoit la possibilité de réaliser un inventaire lors du décès de l’un des époux. Cette faculté doit pouvoir être actionnée même en cas de clause d’attribution intégrale au dernier vivant, laquelle n’ouvre pas la succession du conjoint décédé, pour qu’un état des lieux du patrimoine du conjoint décédé soit établi. Le Sénat a renforcé le dispositif de déchéance des avantages matrimoniaux tout en conservant la structure proposée par l’Assemblée. À l’initiative de sa rapporteure, il a supprimé la faculté de pardon prévue dans le texte pour mieux prendre en compte les cas d’emprise.
    Outre le dispositif de déchéance des avantages matrimoniaux, nous avons modifié l’article 265 du code civil relatif au sort des avantages matrimoniaux en cas de divorce, donnant ainsi suite à une recommandation de la Cour de cassation. Tel est le sens de l’article 1er bis du texte. Comme Isabelle Florennes l’a fait hier au Sénat, je précise que l’irrévocabilité ne s’applique pas à la clause matrimoniale, mais à l’avantage que celle-ci procure.
    J’en viens maintenant à l’article 2, qui, dans sa version initiale, modifiait le dispositif de décharge de responsabilité solidaire pour exonérer un ex-conjoint d’une partie des dettes fiscales dues par le couple au titre d’une imposition commune passée. Le dispositif n’était pas totalement satisfaisant. En lien avec le ministère chargé des comptes publics, nous l’avons complètement modifié pour créer un dispositif de remise gracieuse : lorsqu’un ex-conjoint pourra prouver qu’il est extérieur à la fraude à l’origine d’une dette fiscale, il pourra être considéré comme tiers et déchargé de la totalité de la dette. Les sénateurs ont complété le dispositif de remise gracieuse en prévoyant une application à l’ensemble des dossiers en cours n’ayant pas fait l’objet d’une décision définitive.
    Sur ce point, je me félicite des engagements pris hier au Sénat par le ministre délégué chargé des comptes publics, Thomas Cazenave, notamment celui de faire remonter les dossiers au niveau central afin de garantir un traitement harmonisé et la prise en compte par l’administration de ces nouvelles orientations. Il nous reviendra, en tant que parlementaires, de veiller à la mise en œuvre du nouveau dispositif, à son appropriation par les personnes concernées et à la publication, avant le mois d’octobre, de la nouvelle doctrine fiscale.
    La commission mixte paritaire a également retenu, dans le texte final, deux articles ajoutés au Sénat qui modifient le dispositif de décharge de responsabilité solidaire pour prévoir la restitution des sommes prélevées lorsqu’une décharge a été accordée, ainsi que la clarification du calcul des intérêts et des pénalités.
    Je me félicite que la proposition de loi achève déjà son examen parlementaire et je souhaite qu’elle soit adoptée à une large majorité par notre assemblée : ce serait un signal fort envoyé à nos concitoyens et surtout à nos concitoyennes. Il s’agit d’un beau texte, élaboré en un temps record par les deux chambres, grâce au Gouvernement. Nous pouvons en être fiers ! (M. Sacha Houlié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, ainsi que Mme Anne-Cécile Violland, applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics

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    Je suis particulièrement heureux d’être parmi vous pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille, à la suite de l’adoption du texte hier soir au Sénat à l’unanimité.
    Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2024, nous avions examiné des amendements visant à revoir les conditions d’examen des demandes de décharge de responsabilité solidaire, défendus par nombre d’entre vous. Je m’étais engagé à travailler rapidement sur le sujet ; c’est chose faite. Ce travail, mené notamment par le groupe Démocrate et auquel nous avons collaboré dès le mois de décembre, a été enrichi par l’Assemblée et le Sénat, ce qui nous permet d’examiner les conclusions de la commission mixte paritaire et d’enregistrer des avancées notables, en particulier pour les femmes victimes de violences conjugales.
    Le texte qui nous est présenté est l’aboutissement d’un riche travail transpartisan à l’Assemblée comme au Sénat, puis en commission mixte paritaire. Je veux tout particulièrement saluer le travail de Perrine Goulet et d’Hubert Ott, mais aussi de la rapporteure du texte au Sénat, Isabelle Florennes, qui ont beaucoup œuvré pour que nous aboutissions à une CMP conclusive. Ce texte propose d’abord des avancées en matière de droit civil, et je vous prie d’excuser l’absence du garde des sceaux, en raison d’une contrainte d’agenda. La proposition de loi comble, en effet, une grave carence de notre droit des régimes matrimoniaux. C’est l’ambition de l’article 1er, qui s’attaque directement aux violences conjugales.
    En l’état actuel du droit, il n’existe pas de disposition spéciale dans le droit matrimonial qui soit de nature à répondre à la situation d’un époux ayant provoqué ou tenté de provoquer la mort de son conjoint. Pour ne citer qu’un funeste exemple, un époux meurtrier peut bénéficier de la clause d’attribution intégrale de la communauté, qui lui permet de jouir de la pleine propriété, au décès de son conjoint, de l’ensemble des biens communs. Cette lacune est aussi injuste qu’insupportable.
    En créant le régime de la déchéance matrimoniale, la proposition de loi transpose concrètement aux régimes matrimoniaux cet adage dont nous avons fait une devise : « Le crime ne paie pas. » Désormais, l’époux qui a provoqué ou tenté de provoquer la mort de son conjoint ne pourra plus tirer profit des avantages matrimoniaux qui n’auraient pas eu d’effet si la victime n’était pas décédée avant lui. Cette déchéance s’appliquera automatiquement en cas de condamnation pénale pour homicide conjugal. Elle s’appliquera également, sur décision du juge, pour d’autres actes particulièrement graves, notamment la torture, le viol ou les violences sur conjoint. Le Sénat a renforcé ce mécanisme nouveau et la CMP a parfait le dispositif en prévoyant notamment qu’en cas d’apport à la communauté de biens propres par l’époux décédé, la communauté lui devra récompense, ce qui concrètement permettra aux héritiers de récupérer lesdits biens, en valeur ou en nature.
    La proposition de loi répond également à d’autres formes d’injustices patrimoniales au sein de la famille. Elle modifie, en particulier, l’article 265 du code civil, qui prévoit que les avantages matrimoniaux sont révoqués en cas de divorce. Cela concerne, par exemple, la clause par laquelle les biens professionnels de l’un des époux sont exclus du calcul de la créance due à l’autre époux au moment de la liquidation du régime matrimonial. Aujourd’hui, les époux peuvent contrer cette révocation de plein droit en prévoyant, dans la convention de divorce, que l’avantage matrimonial produira ses effets même après le divorce. Demain, grâce à la proposition de loi, ils pourront aussi le prévoir dans le contrat de mariage. Cette modification, que nous saluons, permettra de sécuriser les conventions matrimoniales et d’améliorer la prévisibilité et la sécurité juridiques de ces mécanismes.
    Je tiens à rassurer certains praticiens qui s’inquiètent de la portée du texte : l’article 1397 du code civil, qui permet aux époux de modifier leur régime matrimonial tout au long du mariage, s’appliquera. Autrement dit, les époux qui auront convenu de l’irrévocabilité des avantages matrimoniaux dans leur contrat de mariage pourront toujours revenir sur leur décision durant le mariage.
    En ce qui concerne le ministère dont j’ai la charge et les sujets fiscaux, ce texte constitue une avancée majeure pour les personnes victimes de la solidarité fiscale. Je suis fier de le voir aboutir aujourd’hui. Former un couple, vivre ensemble et payer ses impôts : cela peut virer au cauchemar pour certaines personnes dont le conjoint commet une fraude fiscale. Au drame personnel vient alors s’ajouter la détresse financière. Nous le savons, ce sont avant tout des femmes qui sont concernées. Or, malgré le dispositif actuel de décharge de responsabilité solidaire, aujourd’hui encore, l’administration peut réclamer les dettes contractées par un conjoint fraudeur.

    Mme Emmanuelle Anthoine

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    Eh oui !

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Une maison, un véhicule, les économies d’une vie peuvent être saisis. Cette situation est injuste et inhumaine ; nous allons y mettre fin. Pour protéger les personnes victimes de la solidarité fiscale, une évolution du droit était indispensable, ce que permet le texte en prévoyant d’annuler la dette fiscale. Ma demande à l’administration fiscale va dans ce sens : elle ne doit pas ajouter de l’inhumanité à la détresse. Je me félicite du compromis auquel la commission mixte paritaire est parvenue sur le sujet. Pour cela, elle a repris la proposition d’Hubert Ott et Perrine Goulet, en commission des lois, de s’appuyer sur le dispositif de remise gracieuse. C’est donc le fruit d’un travail collectif qui vous est présenté aujourd’hui, mené de conserve par le Gouvernement, le Parlement et les acteurs associatifs engagés, en particulier le collectif Femmes divorcées victimes de la solidarité fiscale, que je salue et que je remercie.
    Il apporte une solution concrète et opérationnelle en plus de la décharge de responsabilité solidaire. Comme vous le savez, cette solution permet à l’administration fiscale de déclarer tiers à la dette les personnes victimes de la solidarité fiscale. En l’adoptant, j’ai conscience que la commission mixte paritaire a témoigné sa confiance à l’égard de cette faculté et de la présentation que j’en ai faite. Cette confiance, nous saurons en être dignes pour faire la preuve, dès les prochaines semaines, de la portée du dispositif.
    Permettez-moi de détailler les conditions dans lesquelles il sera mis en œuvre par l’administration fiscale. Premièrement, la portée large que vous avez accepté de lui donner, en permettant le dépôt des demandes de remise gracieuse aux personnes s’étant vu refuser l’octroi d’une décharge de responsabilité solidaire non définitivement jugée, devrait nous permettre de disposer rapidement de plusieurs demandes. Celles-ci seront désormais traitées en lien étroit avec l’administration centrale de la direction générale des finances publiques (DGFIP) pour s’assurer de l’harmonisation des réponses et de la bonne application du nouveau dispositif.
    Deuxièmement, en parallèle du traitement des premiers dossiers, nous allons rapidement finaliser la doctrine, c’est-à-dire l’interprétation retenue par l’administration fiscale pour l’application de cette faculté, qui lui est opposable. J’en prends l’engagement : la doctrine sera publiée d’ici le mois d’octobre et nous consulterons les acteurs en amont pour qu’ils nous fassent part de leurs éventuelles observations.
    Enfin, au-delà des avancées sur la remise gracieuse, je n’oublie pas la volonté qui s’est exprimée sur ces bancs de mieux protéger les personnes qui demandent une décharge de responsabilité solidaire. Sans revenir sur les discussions que nous avons eues sur le sujet, je vous confirme que je m’engage sur une évolution : désormais, les biens issus d’un héritage ne seront plus recherchés par l’administration fiscale lors de la phase de recouvrement de la dette fiscale.
    La lutte contre les violences faites aux femmes et pour l’égalité entre les femmes et les hommes est depuis bientôt sept ans une priorité du Président de la République et de ses gouvernements successifs. Désormais, l’enjeu consiste à faire en sorte que la solidarité fiscale ne soit plus un fardeau pour les femmes. Avec ce texte, nous conjuguons un peu plus fiscalité et égalité ; grâce à l’action du garde des sceaux et celle de tous les parlementaires, nous mettons fin à un monde dans lequel un homme qui tue sa femme peut récupérer l’ensemble des biens qui leur appartenaient. Ce texte est donc une avancée majeure au service du droit des femmes ; nous pouvons en être fiers. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR, ainsi que sur les bancs des commissions.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hubert Ott.

    M. Hubert Ott

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    C’est un honneur pour moi de vous présenter aujourd’hui la version finale de la proposition de loi dont je suis l’auteur, qui vise à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille. Cette dernière version est issue de la commission mixte paritaire du 14 mai dernier.
    Ce texte a commencé son cheminement lors de la niche parlementaire du groupe Démocrate, le 18 janvier. Une nouvelle fois, je tiens à remercier le président Jean-Paul Mattei et mes collègues du groupe Démocrate de leur soutien. L’humanisme est non seulement l’héritage, mais aussi une des valeurs fondatrices du MODEM. Il trouve, à travers ce texte, une expression forte et une concrétisation dans la vie de nos concitoyens.
    Le respect de la personne humaine et de son épanouissement nous oblige à un engagement total en faveur d’une justice intrafamiliale, en y combattant toutes les formes de violence. Cette lutte sans merci pour corriger les injustices du droit matrimonial et fiscal nous amène à exprimer notre volonté de faire progresser dans le droit l’égalité entre les femmes et les hommes ; dans plus de 80 % des cas concernés par ce texte, ce sont bien les femmes les victimes.
    Le premier volet prévoit de priver automatiquement l’époux qui a tué son conjoint des avantages tirés du contrat de mariage. Actuellement, le droit des successions et des assurances vie exclut les meurtriers, mais la loi reste muette au sujet des avantages matrimoniaux ; en l’absence de dispositions expresses, l’époux meurtrier les conserve. Selon une étude de 2022, un meurtre conjugal survient tous les deux jours et demi, les principales victimes étant des femmes. Grâce à cette loi, le code civil sera modifié pour empêcher les auteurs ou complices de violences de s’enrichir par leurs crimes. Une déchéance matrimoniale automatique est instituée dans ce cas, mettant fin à l’injustice et à la double peine pour les victimes.
    Le deuxième volet de ce texte vise à protéger les ex-conjoints des fraudes fiscales commises à leur insu. La solidarité fiscale entre époux ou pacsés rend l’un responsable des dettes fiscales de l’autre : si l’un des époux fraude et devient insolvable, l’administration fiscale peut exiger le paiement des dettes par l’autre époux, même après une séparation ou un divorce.
    La décharge de solidarité fiscale, créée en 2008, reste difficile à obtenir dans certains cas individuels. Grâce à ce texte, une nouvelle procédure de demande de décharge gracieuse est instituée pour les personnes divorcées ou dépacsées. Ces dernières pourront demander à l’administration fiscale d’être considérées comme des tiers et de ne pas être redevables des impositions communes, en cas de fraude fiscale par exemple, ou de violences conjugales commises par l’ex-conjoint ou partenaire, évitant ainsi une précarité très injuste.
    Comme le souligne ce texte, au-delà des violences physiques, les violences économiques et fiscales touchent très fortement les femmes, les rendant doublement vulnérables. Notre responsabilité nous oblige à corriger sans délai ces injustices. Dans une société libre et respectueuse des valeurs républicaines, notre devoir de législateurs est de rétablir leur respect partout, y compris au sein de la famille.
    Enfin, je tiens à remercier une nouvelle fois ma collègue Perrine Goulet, qui m’a remplacé dans mes fonctions de rapporteur lors de ma convalescence en décembre, et qui a suivi les négociations pendant la CMP. Permettez-moi de remercier également la sénatrice Isabelle Florennes, rapporteure de la proposition de loi au Sénat, qui a pris le relais pour défendre le texte promu par le MODEM. Je tiens particulièrement à remercier le Premier ministre et son gouvernement d’avoir engagé la procédure accélérée sur cette proposition de loi. Ma reconnaissance s’étend également au ministre de la justice pour son engagement sans faille en faveur de cette cause, ainsi qu’au ministre des comptes publics, qui a pris la mesure des difficultés auxquelles de nombreuses femmes se retrouvent confrontées.
    Le groupe Démocrate se réjouit du soutien unanime des députés et des sénateurs. Le Sénat a voté ce texte hier ; il nous appartient de le voter aujourd’hui à l’Assemblée et de confirmer ainsi notre attachement profond à une justice patrimoniale et fiscale au sein de la famille, afin d’obtenir une promulgation rapide. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR, ainsi que sur les bancs des commissions – M. Antoine Léaument applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Anne-Cécile Violland.

    Mme Anne-Cécile Violland

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    En premier lieu, je tiens à remercier nos collègues du groupe Démocrate d’avoir inscrit à l’ordre du jour ce texte indispensable, et en particulier Hubert Ott, qui est à son initiative. Cette proposition de loi visant à rétablir une justice patrimoniale au sein de la famille s’inscrit dans une dynamique que le groupe Horizons et apparentés partage en tous points. Il a pour objectif de corriger une incohérence législative permettant aux maris auteurs d’un féminicide de conserver le bénéfice du patrimoine de leur femme et de mieux protéger fiscalement les femmes divorcées ou séparées contre les éventuelles dettes fiscales contractées par leur ex-mari.
    Le sujet de la lutte contre les violences conjugales, grande cause du quinquennat actuel et du précédent, n’est malheureusement pas épuisé. Tout ce qui apporte davantage de justice et d’équité, avec efficacité et réalisme, est bienvenu. De nombreuses mesures ont permis des avancées majeures en matière de protection des femmes, notamment face aux violences intrafamiliales : renforcement de l’ordonnance de protection des victimes, élargissement des cas d’ordonnance de port du bracelet antirapprochement, attribution aux victimes d’un téléphone grave danger, accompagnement à l’accès au logement, suspension pour le parent violent du droit de visite et d’hébergement de l’enfant mineur, etc.
    Venons-en aux articles de cette proposition de loi, qui a fait l’objet d’un accord heureux entre députés et sénateurs, preuve, s’il en fallait, de notre capacité à trouver des accords unanimes sur des sujets aussi importants pour nos concitoyens.
    L’article 1er est essentiel, tant l’injustice du droit actuel est révoltante : un mari qui assassinerait sa femme pourrait conserver le bénéfice de son patrimoine, en application de l’avantage matrimonial auquel ils auraient consenti lors de leur union.

    Mme Emmanuelle Anthoine

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    Il en va de même pour une femme qui assassine son époux !

    Mme Anne-Cécile Violland

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    Cela paraît d’autant plus absurde qu’en matière de succession ou de donation, le code civil prévoit des possibilités de révocation lorsque le bénéficiaire a fait preuve d’ingratitude ou d’indignité. Ainsi, un enfant condamné pour violences ayant entraîné la mort de l’un de ses parents est considéré comme indigne de succéder ; tel n’est pas le cas du mari assassin, au titre de l’avantage matrimonial. C’est absurde et insensé : il est temps de corriger cela.
    Nous saluons la réécriture de cet article, adoptée à l’Assemblée et conservée en commission mixte paritaire, privilégiant la création d’un régime autonome de déchéance de l’avantage matrimonial plutôt qu’un régime d’ingratitude. Cette réécriture semble plus pertinente, notamment parce que le bénéfice de l’avantage matrimonial ne serait révoqué qu’en cas de condamnation pénale de l’auteur bénéficiaire.
    L’article 2, tel que proposé initialement, soulevait des problèmes de compatibilité avec le principe structurant de solidarité fiscale existant dans le droit civil et fiscal, en ce qu’il visait à restreindre le champ des biens entrant dans l’appréciation de la situation patrimoniale du demandeur de la décharge de solidarité. Réintroduit sous une autre forme au Sénat, il n’a finalement pas été retenu par la commission mixte paritaire, ce qui nous semble préférable.
    Néanmoins, force est de constater que l’administration fiscale est souvent très réticente à accorder une telle décharge aux demandeurs – souvent des femmes –, qui peuvent ne pas avoir eu connaissance d’une dette fiscale contractée par leur ex-mari. Ainsi, en 2022, 59 % des demandes de décharge ont été rejetées.
    Nous nous réjouissons de l’adoption de l’article réécrit, qui facilitera l’obtention d’une telle décharge. Celui-ci prévoit qu’en cas de divorce ou de séparation, l’ex-conjoint pourra saisir l’administration fiscale afin d’être considéré comme un tiers. Cette modification permettra ainsi, sans remettre en cause le principe de solidarité fiscale, de créer une nouvelle possibilité d’être déchargé de la dette commune, mais surtout d’offrir un recours aux demandeurs en cas de refus de l’administration.
    L’aménagement de la décharge fiscale en cas de séparation ou de divorce a été largement complété par nos collègues sénateurs, afin d’en faciliter l’obtention. La proposition de loi prévoit désormais de rendre plus proportionnées les pénalités dont peuvent être déchargées les victimes d’un époux ayant eu un comportement frauduleux, ou encore de permettre la restitution des sommes déjà payées consécutivement à l’octroi d’une décharge en l’absence d’une décision de justice définitive. C’est une très bonne chose. Vous l’aurez compris, c’est avec force, conviction et fierté que le groupe Horizons et apparentés votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marietta Karamanli.

    Mme Marietta Karamanli

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    La proposition de loi que nous examinons ce matin a pour objet de régler le sort des avantages matrimoniaux en cas de meurtre ou de tentative de meurtre d’un époux par l’autre, ou de violences conjugales. À ce titre, elle prévoit de priver automatiquement l’époux reconnu coupable de meurtre sur conjoint du bénéfice des avantages matrimoniaux insérés dans le contrat de mariage. Elle vise aussi à mieux encadrer les conséquences d’une séparation au sein d’un couple en cas de violences conjugales.
    Je souhaite insister sur le cœur de cette proposition, me réjouir de son enrichissement et apporter le soutien des députés du groupe Socialistes et apparentés à ce texte d’initiative parlementaire. Sans conteste, sa principale motivation tient à la modification qu’il apporte aux avantages matrimoniaux. Ces profits, résultants de la convention matrimoniale, ne sont pas considérés comme des donations en tant que telles ; puisqu’ils ne résultent pas des règles régissant les donations, ils ne peuvent être révoqués pour ingratitude. En outre, prévus par la convention matrimoniale et non par la loi, ils sont perçus par le conjoint en sa qualité d’époux et non d’héritier. L’indignité successorale ne s’appliquant qu’aux héritiers et portant sur des droits successoraux, l’auteur de violences à l’encontre de son conjoint ne pouvait être déchu des droits qu’il tirait du régime matrimonial. La doctrine et les praticiens du droit dénonçaient cette injustice. La déchéance instituée par nos assemblées constitue une pénalité civile qui viendra s’ajouter à la sanction pénale ; ce n’est que justice !
    À cette dimension de justice civile a été ajoutée une dimension de justice fiscale. Le Sénat et notre assemblée se sont entendus pour adopter un dispositif devant faciliter l’obtention de la décharge de solidarité fiscale pour les victimes de leurs ex-conjoints endettés. Ainsi, des ex-épouses – ou ex-partenaires de pacs – ont appris un jour que leur ex-mari – ou ex-partenaire de pacs – avait contracté des dettes auprès de l’administration fiscale pendant leur vie conjointe, dettes dont elles restaient redevables. J’emploie le terme d’ex-épouses parce que les victimes sont des femmes dans la très grande majorité des cas.
    Cette situation inique persistait, même en cas de pacs ou de mariage sous le régime de la séparation des biens, parce que l’impôt est dû solidairement en cas d’imposition commune. La commission mixte paritaire a été conclusive ; elle a adopté le mécanisme visant à reconnaître que les victimes de violences conjugales ne sont pas responsables de la dette fiscale de leur ex-conjoint, ce qui constitue un pas en avant.
    Le critère retenu – une distorsion marquée entre le montant de la dette et la situation financière et patrimoniale nette du demandeur de l’exonération – sera interprété par le ministère, ce qui suppose une lecture plus neutre de la part de l’administration. On peut espérer que les contribuables qui pourront apporter la preuve qu’ils sont étrangers aux dettes contractées par leur ex-conjoint pourront bénéficier d’une exonération de leur paiement. Je précise que l’administration conservera le contrôle de la procédure d’exonération.
    Les dispositions de ce texte amélioreront la situation et contribueront à l’avènement d’une égalité réelle. En matière de fiscalité comme en d’autres, le législateur peut corriger les injustices légales, mais l’application des dispositions de la loi dépend de leur interprétation conforme par l’administration. Or les principes posés par la loi font trop souvent l’objet d’une interprétation restrictive ; les textes réglementaires, les circulaires et les directives, bien que conformes aux dispositions législatives, limitent parfois moins la générosité du texte que la recherche de l’intérêt général, à tel point que législateur doit remettre sur le métier son ouvrage pour en garantir l’application souhaitée.
    S’agissant du présent texte, nous ne pouvons qu’espérer qu’un tel retour ne sera pas nécessaire.
    La proposition de loi de notre collègue Hubert Ott et du groupe MODEM a été améliorée au long de sa discussion par les deux assemblées, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter. Le groupe Socialistes et apparentés a apporté et apporte encore aujourd’hui son soutien plein et entier au texte tel qu’il a été amendé et enrichi et, comme les autres groupes, il sera attentif à son application conforme au souhait unanimement exprimé par nos deux assemblées. (Applaudissements sur les bancs des commissions.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Karine Lebon.

    Mme Karine Lebon

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    La proposition de loi de nos collègues du groupe MODEM sur la justice patrimoniale au sein de la famille se donne pour objectif de rendre plus juste le droit des régimes matrimoniaux et donc de préserver les intérêts des ex-conjoints et de leurs héritiers en cas de divorce, de dissolution du pacs ou d’homicide conjugal. Elle tend donc à assurer une justice fiscale et à épargner une double peine aux victimes et covictimes, en préservant leur intégrité patrimoniale.
    En effet, les époux et partenaires de pacs forment un foyer fiscal. Ils sont donc soumis au principe de solidarité fiscale, mais en cas de dissolution du pacs, de divorce ou de décès de l’un des conjoints, cette solidarité se transforme souvent en injustice, par effet de laquelle l’un des ex-conjoints et ses héritiers sont lésés.
    Il est toujours délicat de parler d’argent et de patrimoine au sein du couple. Titiou Lecoq écrivait dans son ouvrage Le Couple et l’argent : « Dans un couple, parler d’argent reste délicat. Comme si défendre son intérêt personnel revenait à dire :  Je ne crois pas en notre amour . On bute là sur un premier tabou. Cela revient souvent à envisager que l’on ne sera pas toujours ensemble. Or, pendant la vie conjugale, personne ne veut évoquer une hypothétique rupture. »
    Notre rôle de législateur est pourtant de réparer des injustices, où qu’elles se trouvent. Cette proposition de loi vise justement à améliorer la situation des femmes qui sont, dans la plupart des cas, concernées par des injustices clairement présentées dans l’exposé des motifs : « En cas de séparation, une dette fiscale peut peser injustement sur l’un des ex-conjoints et il s’agit à plus de 80 % de femmes, alors même que la séparation entraîne déjà pour une grande majorité d’entre elles une perte sensible de revenus. »
    L’appauvrissement après une séparation touche aussi les femmes âgées : le revenu des femmes sexagénaires chute ainsi de 31 % après leur divorce. Quel que soit leur âge, le niveau de vie des femmes accuse une baisse de 14 % l’année suivant le divorce, alors que celui des hommes augmente de 1,6 %.
    La dette de l’ex-conjoint pose d’autant plus problème qu’il n’est pas financièrement indépendant. Il apparaît ainsi que la solidarité fiscale imposée aux femmes est l’une des raisons pour lesquelles elles se maintiennent dans le domicile conjugal, alors même qu’elles sont victimes de violences intrafamiliales.
    Oui, les femmes sont les principales victimes de violences conjugales et intrafamiliales : en 2022, 118 femmes sont décédées des suites de violences conjugales, contre 27 hommes. Réalisée par la délégation aux victimes du ministère de l’intérieur, l’étude nationale sur les morts violentes au sein du couple pour l’année 2022 montre qu’un meurtre conjugal en moyenne est enregistré tous les deux jours et demi. Nous ne pouvons continuer de tolérer cette situation révoltante.
    Cette proposition de loi ne vise pas à enrayer les violences faites aux femmes, mais permettra au moins à certaines d’entre elles de divorcer, de partir, de se sauver. Le groupe Gauche démocrate et républicaine salue le travail et l’implication de Mme la rapporteure sur ces questions.
    Très concrètement, la proposition de loi tend à corriger plusieurs injustices. Elle met notamment fin à l’incohérence législative, en reconnaissant, dans le droit positif, la notion d’indignité successorale, qui permet d’exclure de la succession les personnes condamnées pour avoir « volontairement donné ou tenté de donner la mort au défunt ». Le vote de cette proposition de loi rappelle qu’il est actuellement possible, pour un époux ayant attenté à la vie de son conjoint, de bénéficier légalement d’un avantage matrimonial.
    L’article 1er tend à empêcher la personne qui a tué son conjoint d’hériter des biens de ce dernier. Il était urgent de rectifier ce qui était une anomalie, une honteuse injustice juridique et morale, qui persistait jusqu’à maintenant dans notre droit. À l’occasion de son examen par le Sénat, le texte a été enrichi : sa rapporteure a renforcé le dispositif de déchéance des avantages matrimoniaux, ce dont nous pouvons nous satisfaire.
    L’article 2 vise quant à lui à encadrer l’appréciation de la situation patrimoniale du demandeur, afin d’éviter les situations dans lesquelles une dette fiscale pèse lourdement et injustement sur l’un des ex-conjoints.
    En matière de droits des femmes, ces dispositions envoient le bon signal et nous voterons pour, mais non sans vous rappeler, chers collègues de la majorité, combien il est nécessaire d’aller plus loin – et beaucoup plus vite – dans la lutte contre les violences faites aux femmes. En effet, malgré quelques tentatives louables, vous n’êtes pas encore allés assez loin dans la lutte contre ces violences.
    L’écrivain Philippe Besson résume parfaitement la situation, lorsqu’il écrit : « Les féminicides sont rangés dans la catégorie des faits divers, alors qu’ils disent quelque chose de nous en tant que société. Le féminicide est un fait social qui nous interroge sur la domination masculine. » Ainsi, pour que ces violences, ces crimes intolérables, ne fassent plus partie de la réalité de notre société, cessons de nous contenter de mesurettes ponctuelles. Agissons collectivement, non pour diminuer le nombre de victimes, mais bien pour éradiquer ces violences.
    Prenons exemple sur la loi-cadre de notre ancienne collègue Marie-George Buffet, qui comptait 103 articles et tentait d’apporter une réponse globale au fléau que représentent les violences faites aux femmes. La route est encore longue, mais le chemin est pris. Tipa tipa, narivé – on y arrivera pas à pas !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Benjamin Saint-Huile.

    M. Benjamin Saint-Huile

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    Je commencerai mon propos en saluant nos collègues du groupe MODEM, dont l’initiative aboutit aujourd’hui. J’y vois la preuve que, pourvu qu’on la leur laisse, l’initiative des parlementaires produit des fruits à partager entre tous.
    La lutte contre les violences faites aux femmes et, plus largement, pour l’égalité entre les femmes et les hommes, a été érigée grande cause nationale par le Président de la République – ce que vous avez rappelé, monsieur le ministre. Sur ces sujets, nous devons nous efforcer de faire œuvre utile, en nous accordant malgré les divergences politiques que nous connaissons bien et qui sont souvent exacerbées dans cet hémicycle.
    Ces dernières années, le législateur a accompagné la volonté gouvernementale, notamment en matière pénale. Notre collègue Violland a d’ailleurs évoqué certaines dispositions dont l’application semble aller dans le bon sens.
    La proposition de loi présentée ce jour nous fournit l’occasion d’actionner des leviers auquel nous pouvons ne pas penser spontanément, mais dont la portée n’est pas négligeable – je pense aux leviers en matière fiscale ou patrimoniale.
    Le crime ne paie pas. Au moment où je vous parle, cet adage populaire n’est pas tout à fait le reflet de la réalité, notamment de la réalité matrimoniale. Nous nous réjouissons que la déchéance matrimoniale effective corrige cette réalité, qui conservait un caractère ulcérant. Nous répondons à cet état de fait de manière appropriée, en comblant un « trou dans la raquette », pour reprendre une expression trop populaire. En tout cas, nous considérons qu’il est absolument nécessaire d’avancer.
    Le sujet de la dette fiscale présente également des spécificités : la fragilisation des victimes est d’autant plus importante que celles-ci sont en situation de détresse financière, du fait de leur ex-conjoint.
    La solidarité fiscale est l’un des grands principes du mariage, mais elle ne peut pas devenir le fardeau sous lequel ploient les victimes. Nous le savons bien – et M. le ministre certainement mieux encore –, l’application de la décharge de solidarité fiscale se heurte parfois à une réalité administrative relativement froide. Nous nous réjouissons donc que le texte crée les conditions de son assouplissement, en précisant, avec bienveillance et confiance, que nous serons très attentifs à l’effectivité de ce dispositif, salué par tous.
    Cette décharge de solidarité fiscale permettra d’annuler la dette fiscale contractée par l’ex-conjoint et offrira aux victimes de violences conjugales la possibilité de retrouver le chemin de la sérénité.
    Pour toutes ces raisons et parce que nous ne pouvons pas méconnaître la réalité des chiffres rappelés nos collègues – 139 féminicides comptés en 2023, 49 déjà dénombrés en 2024, un féminicide tous les deux jours et demi en France – les députés du groupe LIOT voteront en faveur de ce texte. Ils le feront avec enthousiasme et détermination, attentifs qu’ils sont à donner de l’élan à cette cause nationale.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérémie Iordanoff.

    M. Jérémie Iordanoff

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    Je tiens à saluer une nouvelle fois l’initiative prise par Hubert Ott et l’implication de la rapporteure Perrine Goulet. La proposition de loi va assurément dans le bon sens et apporte une contribution supplémentaire à l’œuvre de justice en général et à l’égalité entre les femmes et les hommes en particulier.
    Je me félicite du fait que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord et que le Sénat ait adopté à l’unanimité ce texte qui règle deux des principales difficultés qui pouvant survenir au sein du couple.
    L’article 1er supprime une aberration juridique, à savoir l’existence d’une communauté entre l’assassin et sa victime. Actuellement, rien n’empêche le conjoint meurtrier de profiter de son avantage matrimonial en dépit du meurtre ou des violences commis sur son époux ou son épouse – le plus souvent son épouse, d’autres l’ont rappelé.
    Il n’est jamais trop tard pour mettre un terme à une situation choquante et c’est chose faite avec ce texte. Son article 1er crée un dispositif de déchéance matrimoniale en cas de condamnation pour meurtre ou violence sur conjoint.
    Un travail constructif avec la rapporteure nous a permis d’améliorer le texte : nous avons adopté en commission un dispositif applicable à l’ensemble des mécanismes matrimoniaux, respectueux de la garantie judiciaire et plus opérationnel. Le texte a été complété en séance de l’introduction d’un mécanisme autonome, applicable aux contrats de mariage en cours.
    Je remercie Mme la rapporteure d’avoir tenu compte des réserves formulées en commission, et accepté de découpler la déchéance des modalités d’application de l’indignité successorale. Ainsi, la déchéance ne peut plus dépendre du bon vouloir ou des diligences de l’héritier.
    Il convient également de saluer le travail réalisé au Sénat qui, pour renforcer l’application de cette déchéance, a retiré la faculté de pardon aux victimes pour mieux prendre en compte les situations d’emprise – nous avions évoqué ce problème en première lecture.
    L’article 2 porte sur la solidarité fiscale entre ex-conjoints. Discuté plus longuement que l’article 1er par la commission mixte paritaire, il a fait l’objet d’une solution de compromis acceptable, soit la promesse d’une cellule centralisée en charge de traiter uniformément les demandes de remise gracieuse. Ainsi, la justice fiscale connaîtra une avancée réelle.
    Les écologistes soutiendront évidemment ce texte. (Mme Cyrielle Chatelain applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Caroline Yadan.

    Mme Caroline Yadan

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    C’est parce que la justice n’est pas qu’une notion abstraite, mais un besoin qui ne peut attendre demain, que je suis heureuse, au nom du groupe Renaissance, de vous présenter le texte, issu des conclusions de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille, déposée par mon collègue Hubert Ott.
    Alors que tout est prévu, en droit de la famille, en droit des successions, en droit des libéralités, en droit des assurances ou encore en droit de la sécurité sociale, pour sanctionner le comportement infamant d’un époux, il n’existe pas de dispositif analogue en matière de régimes matrimoniaux.
    À ce jour, un époux qui serait reconnu coupable de la mort de son conjoint peut valablement bénéficier, en vertu des dispositions de son contrat de mariage, d’un avantage matrimonial. Les époux ayant opté pour le régime de la communauté universelle avec attribution intégrale au survivant bénéficient d’un avantage matrimonial qui leur permet de vider la succession de la personne assassinée et de léser ses héritiers. Il s’agit d’une immense injustice et d’un angle mort indécent, aussi majeur qu’insupportable, de la législation civile actuelle.
    Par ailleurs, les époux et les partenaires d’un pacte civil de solidarité forment un foyer fiscal et sont soumis au principe de solidarité fiscale. Pourtant, en cas de dissolution du pacs ou du régime matrimonial, cette solidarité peut léser les ex-conjoints et les héritiers. Cette injustice est bien souvent genrée, puisque 80 % des dettes fiscales sont contractées par les femmes, alors même que la séparation entraîne déjà, pour une grande majorité d’entre elles, une perte sensible de revenus.
    La proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille, dont nous examinons le texte issu de la CMP, tend à réparer ces deux injustices.
    L’article 1er, qui a fait l’objet d’un compromis entre les deux chambres, a pour vocation d’empêcher l’époux coupable du meurtre ou de l’assassinat de son conjoint de bénéficier des avantages pouvant découler de son régime matrimonial. Il substitue la référence à l’ingratitude par une référence aux cas justifiant une indignité successorale, notion plus sécurisante juridiquement.
    Le dispositif adopté permet également de distinguer, d’une part, les cas dans lesquels la déchéance matrimoniale s’applique de plein droit, si un époux est reconnu coupable d’avoir volontairement donné ou tenté de donner la mort à son conjoint, d’autre part, ceux où la déchéance sera laissée à l’appréciation du juge.
    L’article 2 tend à corriger la deuxième injustice en permettant aux ex-époux de se voir accorder plus facilement par l’administration fiscale une décharge de l’obligation de paiement de la dette fiscale. Même s’il existe depuis 2022 une atténuation au principe de solidarité grâce à la diminution de la période d’appréciation du patrimoine net de l’ex-conjoint, la décharge facilitée permettra de protéger les ex-époux – particulièrement les femmes, qui doivent souvent faire face seules au paiement des dettes fiscales du couple alors même qu’elles disposent de revenus modestes et sont en situation de détresse.
    En définitive, la proposition de loi contribue à l’égalité entre les femmes et les hommes, qui demeure une priorité pour notre majorité. Ce texte est utile et nécessaire en ce qu’il corrige un vide juridique et cherche à résoudre, autant que faire se peut, les difficultés auxquelles risquent d’être confrontées les personnes en situation de précarité après une séparation. En bonne intelligence avec nos collègues du Sénat, nous avons su trouver les points d’équilibre, notamment grâce à l’excellent travail de Mme la rapporteure, Perrine Goulet, que je salue.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Renaissance votera en faveur de ce texte de justice et d’égalité. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR ainsi que sur les bancs des commissions.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Alexandra Masson.

    Mme Alexandra Masson

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    La proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille, dont nous débattons après son examen en commission mixte paritaire, propose de réparer une véritable injustice.
    Le groupe Rassemblement national et moi-même nous réjouissons de débattre d’un sujet aussi important : la réparation d’une injustice énorme qui pèse sur les épaules des femmes de notre pays. Elles sont les plus concernées par les violences et les homicides conjugaux.
    Dans les cas où le conjoint aurait été violent ou aurait ôté la vie à sa conjointe, il ne doit évidemment plus bénéficier des avantages matrimoniaux. Par conséquent, l’article 1er de la proposition de loi est une vraie avancée pour mettre fin à une situation contraire à toute forme de justice en matière de régime matrimonial. Les débats sur cet article ont conduit à supprimer la faculté du pardon laissée à la victime, pour mieux prendre en considération les cas d’emprise. Ils ont aussi permis d’étendre le dispositif prévu à l’article en cas de divorce ; c’est une excellente chose. Les divers ajouts confèrent une solidité juridique au texte et garantissent son efficacité.
    Le texte, par son article 2, résout le problème des conjoints s’étant soustraits à leurs obligations déclaratives fiscales à l’insu de leurs partenaires. Cette nouvelle disposition permet, dès lors que l’union a pris fin, aux partenaires d’être déchargés de leur responsabilité solidaire d’une dette fiscale qu’ils n’ont pas contractée. À cet égard, il est important que les engagements pris par le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la France auprès des membres de la commission mixte paritaire soient honorés.
    Le traitement des demandes de décharge de responsabilité solidaire devra être confié à une cellule centralisée, conformément aux engagements pris par Bercy à l’égard des membres de la CMP. Cette mesure sera seule à même de garantir une bonne appréhension de la complexité des situations et, ainsi, de garantir l’effectivité de la mesure. Les membres de la commission des finances du groupe Rassemblement national veilleront à ce que cette promesse soit tenue.
    Saluons aussi l’article 1er bis, introduit à l’initiative de l’Assemblée nationale, qui donne son plein effet à la clause d’exclusion des biens professionnels du calcul de la créance de participation. Dorénavant, son application ne se heurtera plus à la jurisprudence de la Cour de cassation.
    Nous croyons que ce texte de bon sens fera l’unanimité parlementaire à l’Assemblée et au Sénat. Il vient corriger juridiquement des rapports entre conjoints empreints d’une inégalité et d’une injustice manifestes, surtout lorsqu’ils se caractérisent par de la violence ou des abus.
    Pour toutes ces raisons, parce que nous sommes des défenseurs du bon sens, de l’équité et de la justice, le groupe Rassemblement national votera en faveur de ce texte, sous réserve du respect des engagements pris par le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Sur le vote de l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par les groupes Démocrate (MODEM et indépendants) et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Antoine Léaument.

    M. Antoine Léaument

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    Soyons parfaitement honnêtes, lorsque nous avons commencé à examiner ce texte en séance, un certain nombre d’entre nous ne savaient pas qu’à condition d’être marié sous le régime de la communauté des biens, un homme qui tuait sa femme pouvait ensuite en hériter. Tout le monde a été choqué de découvrir que rien dans notre droit n’empêchait cette situation aberrante.
    Je vous remercie, madame la rapporteure, ainsi que M. Ott, qui n’a pu défendre ce texte pour des raisons médicales. Il fallait corriger cette aberration juridique ; nous voterons en faveur de ce texte.
    Néanmoins, nous abordons la question des violences conjugales par le petit bout de la lorgnette. En 2023, 134 féminicides ont été commis, parmi lesquels une centaine étaient des féminicides conjugaux. L’objectif de la représentation nationale doit être d’empêcher que ce type de meurtre soit commis. Pour lutter contre les féminicides, les associations féministes demandent 3 milliards d’euros à l’État. Il y a quelques années, elles demandaient 1 milliard d’euros ; cependant, comme rien n’a été fait – du moins les actions menées sont-elles insuffisantes –, elles réclament désormais 3 milliards pour mener des actions de prévention. Cette somme correspond peu ou prou au coût des violences conjugales pour la société – qui inclut notamment le coût de la prise en charge médicale des femmes victimes –, estimé à 3,6 milliards d’euros.
    Étant donné que le texte s’intitule « proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille », j’en profite pour parler de justice patrimoniale au sein de la société – l’occasion est trop belle. Dans notre pays, 50 % des personnes les plus riches détiennent 92 % du patrimoine national, alors que 50 % des personnes les plus pauvres en détiennent seulement 8 %.
    La question du patrimoine porte atteinte au principe d’égalité qui, dans la République française, s’impose en droit et dans le cadre de notre capacité à légiférer. Une personne est égale à une voix. Le jour du vote, dans l’isoloir, le vote de la personne la plus pauvre de France vaut celui de M. Bernard Arnault.
    La question du patrimoine soulève aussi celle de l’égalité sociale ; si nous voulons envisager une justice patrimoniale réelle, nous devons y répondre. Le patrimoine des 1 % les plus riches est supérieur à 2,24 millions d’euros, tandis que celui des 10 % les plus pauvres est inférieur à 3 000 euros. On constate l’immense fossé qui existe entre les plus riches et les plus pauvres. Cette différence se traduit, par exemple, en matière d’accès au logement, puisque 50 % des logements mis en location dans le parc privé sont détenus par 3,5 % des propriétaires.
    Voilà les questions de justice patrimoniale auxquelles nous devrons répondre un jour si nous voulons que la promesse républicaine prenne en considération la question du capital.
    Pour atteindre cet objectif, nous proposons une solution qui risque de vous faire bondir : le plafonnement de l’héritage à 12 millions d’euros – qui est une belle somme pour commencer dans la vie. Il ne concernerait que 0,1 % de la population française. Corriger cette injustice patrimoniale, pour reprendre les termes de la proposition de loi, serait l’un des objectifs d’une république achevée, la république sociale. (M. Idir Boumertit applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Meyer Habib.

    M. Meyer Habib

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    Au mois de janvier, ce texte a été adopté à l’unanimité en première lecture à l’Assemblée nationale. Encore une fois, je salue l’accord trouvé en CMP qui démontre – c’est important pour nos compatriotes – qu’un consensus politique est possible sur des textes justes et utiles.
    Sur le fond, le texte touche à des enjeux de fiscalité très techniques, qui viennent corriger des situations incroyables, dont on ne pouvait pas imaginer qu’elles subsistent en 2024, et qui méritent donc que l’on y remédie en urgence.
    En premier lieu, il constitue une avancée importante pour toutes les personnes victimes de la solidarité fiscale – des femmes, pour 80 % d’entre elles – qui se retrouvent à payer seules la dette fiscale de leur ex-conjoint. Afin d’aider les victimes d’ex-conjoints endettés, la CMP a retenu l’idée de leur permettre d’être reconnues par Bercy comme « tiers à la dette » de leur ex-conjoint ; à condition, évidemment, qu’elles prouvent qu’elles ne sont pas responsables de cette dette. Autre avancée : quand une décharge de solidarité sera prononcée, les sommes versées au fisc pourront être restituées.
    La proposition de loi permettra également de mieux encadrer les conséquences de la séparation du couple en cas de violences conjugales, en privant automatiquement l’époux qui a, par exemple, tué son conjoint, du bénéfice des avantages tirés du contrat de mariage, ce qui est actuellement possible, de manière absolument invraisemblable ! Nous mettrons ainsi fin à une situation absurde, où il est possible, en cas de mariage sous le régime de la communauté universelle, de tuer, violer ou frapper son conjoint – 80 % de femmes, encore une fois – et d’en hériter, grâce à l’avantage matrimonial permettant au conjoint survivant d’obtenir une partie du patrimoine du conjoint décédé.
    La loi était mal faite. Le groupe Les Républicains salue donc ces avancées, qui ne pourront néanmoins être efficaces que si elles s’accompagnent d’une évolution de la doctrine fiscale de Bercy. Le Gouvernement s’y est engagé et nous serons attentifs, dans les prochains mois, à l’augmentation du nombre de décharges de solidarité fiscale accordées par l’administration fiscale.
    Les députés de mon groupe saluent également l’auteur du texte, M. Hubert Ott. Nous voterons en faveur de sa proposition qui met fin à des injustices archaïques et insupportables, et qui s’inscrit dans la lignée de notre combat commun pour faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une réalité. Le crime ne doit plus payer. Une personne n’a pas le droit de s’enrichir avec le crime. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.

    Texte de la commission mixte paritaire

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire.
    Conformément à l’article 113, alinéa 3, du règlement, je vais d’abord appeler l’Assemblée à statuer sur l’amendement dont je suis saisie.
    La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement no 1.

    M. Thomas Cazenave, ministre délégué

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    Il vise à corriger une erreur matérielle. Dans le texte, il ne peut être fait référence à l’époux « condamné » dans le cas où l’action publique n’a pu être exercée ou s’est éteinte en raison du décès de celui-ci. Nous faisons désormais référence à l’époux « qui a commis les actes » mentionnés au premier alinéa, lequel correspond à la rédaction du dernier alinéa de l’article 727 du code civil.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Perrine Goulet, rapporteure

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    La rédaction souffrait effectivement d’une petite incongruité : nous avions mentionné l’époux « condamné », sans envisager que si celui-ci se suicidait juste après avoir commis le crime, il ne serait jamais condamné, comme le Gouvernement ainsi que les services de l’Assemblée nous l’ont judicieusement fait remarquer. Pour éviter de voter un dispositif bancal, je vous invite à adopter l’amendement. J’émets donc un avis très favorable et remercie autant le Gouvernement que les services de l’Assemblée d’avoir repéré ce petit défaut d’écriture.

    (L’amendement no 1, modifiant l’article 1er, est adopté.)

    Vote sur l’ensemble

    Mme la présidente

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    Je mets maintenant aux voix l’ensemble de la proposition de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement adopté par l’Assemblée.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        80
            Nombre de suffrages exprimés                80
            Majorité absolue                        41
                    Pour l’adoption                80
                    Contre                0

    (La proposition de loi est adoptée.)
    (Applaudissements sur tous les bancs.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Perrine Goulet, rapporteure

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    Je remercie tous les collègues ayant participé à l’écriture du texte, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition, ainsi que les sénateurs et le Gouvernement. Mené conjointement, ce travail a permis, en quatre mois, de mettre un terme à une injustice. Enfin, je remercie notre collègue du groupe Démocrate, Hubert Ott, à l’initiative du texte, de l’avoir repérée. (Applaudissements sur tous les bancs.)
    J’espère que nous avons ainsi bouclé la boucle, et que quelqu’un qui tue son conjoint ne pourra plus jamais bénéficier du moindre avantage lié à ce meurtre. Nous rappelons ainsi notre engagement à lutter contre les féminicides. Merci à M. Ott et merci à son groupe d’avoir inscrit le texte à l’ordre du jour de sa niche parlementaire, merci au Gouvernement d’avoir appliqué la procédure accélérée, et merci aux services de l’Assemblée pour leur travail. Enfin, merci à vous, chers collègues. Nous pouvons être fiers de cette victoire. (Mêmes mouvements.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix heures cinq, est reprise à dix heures quinze.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    2. Souveraineté alimentaire et renouvellement des générations en agriculture

    Suite de la discussion d’un projet de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture (nos 2436, 2600).

    Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente

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    Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 3837 à l’article 8.
    Sur les amendements nos 3837 et 1511, je suis saisie par le groupe Écologiste-NUPES de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Article 8 (suite)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 3837, 1507 et 1511, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir l’amendement no 3837.

    Mme Marie Pochon

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    Avec votre permission, madame la présidente, je présenterai conjointement mon amendement no 3837 et les deux amendements nos 1507 et 1511 de M. Fournier.
    L’amendement no 3837 vise à compléter, de manière cohérente, l’objectif final du nombre d’exploitants agricoles à atteindre en 2035, que nous avons voté hier. Que cet objectif soit fixé dans la loi est une bonne chose. En commission, nous avions proposé une meilleure solution, qui nous aurait permis de gagner du temps : maintenir à au moins 1,5 % la part des agriculteurs dans l’emploi total. Nous aurions pu nous rendre compte, avant l’examen du texte en séance publique, qu’il est plus utile de donner un nombre d’exploitants à atteindre, plutôt qu’un nombre d’exploitations.
    Si nous sommes ravis que cette disposition ait été adoptée, nous souhaitons la compléter en fixant un objectif d’installations d’au moins 30 000 exploitants agricoles par an, dont 13 000 en agriculture biologique. Le premier chiffre permet de compenser, et même un peu plus, les départs à la retraite ; le second constitue une estimation, fondée sur le fait que les nouveaux exploitants souhaitent très largement s’installer en agriculture biologique. En effet, les données relatives à la dotation jeunes agriculteurs (DJA) montrent que 48 % des installations en région Occitanie relèvent de l’agriculture biologique ; elles étaient 40 % en région Bretagne en 2022, et 41 % en région Auvergne-Rhône-Alpes en 2021 – même dans cette région dirigée par un président climatosceptique et défenseur du lobby de la chimie, les jeunes s’installent massivement en bio.
    Pour être atteint, un objectif final requiert des points d’étape. Vous aimez à rappeler, monsieur le rapporteur, qu’en tant que commissaire aux finances, vous êtes habitué à suivre l’évolution du déficit et de la dette ; vous êtes donc bien placé pour savoir que les objectifs fixés en la matière ne se limitent pas à une date aussi lointaine que 2035, qui ne serait pas jugée crédible par les agences de notation, et déresponsabiliserait les gouvernants conscients du fait qu’ils ne seront plus aux responsabilités à cette échéance. Soyons donc sérieux et, comme dans toutes les organisations, fixons des objectifs annuels, qui nous permettront de suivre les politiques publiques, de les adapter et de les rendre efficaces.
    Les amendements nos 1507 et 1511 sont des amendements de repli ; ils visent à fixer respectivement à 30 000 et à 25 000 le nombre d’exploitants agricoles installés chaque année, à partir de 2026. Ces chiffres se fondent sur les données fournies par le recensement agricole de 2020, qui indique que pour atteindre l’objectif de 400 000 exploitations agricoles d’ici à 2035, 25 000 installations annuelles sont nécessaires. Ces objectifs sont pleinement cohérents avec ceux fixés par l’amendement no 160 adopté hier soir.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir le sous-amendement no 5539, à l’amendement no 3837.

    Mme Lisa Belluco

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    Je vous épargne la défense que j’avais préparée – qui convoquait le nucléaire allemand et le gaz russe – et propose de retirer ce sous-amendement. Nous sommes prêts à nous montrer efficaces.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Cela changera !

    (Le sous-amendement no 5539 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 1507 et 1511 de M. Charles Fournier sont défendus.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Lecamp, rapporteur de la commission des affaires économiques pour le titre III, pour donner l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune.

    M. Pascal Lecamp, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    Madame Pochon, la commission des finances fixe bel et bien une trajectoire de l’endettement public jusqu’en 2035,…

    Mme Marie Pochon

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    Avec une précision année par année !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    …que l’on communique aux agences de notation ainsi qu’aux autorités européennes. Hier soir, nous avons fixé, grâce à l’adoption de l’amendement no 160 de M. Potier, un double objectif – à la fois de 400 000 exploitations et de 500 000 exploitants agricoles en 2035 – qui implique 25 000 à 30 000 installations d’exploitants par an.

    Mme Marie Pochon

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    C’est bien de l’écrire !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    L’écrire en précisant le nombre d’installations en agriculture biologique serait ajouter des contraintes totalement inutiles.

    Mme Marie Pochon

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    Il y a des amendements de repli !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Les aides de la politique agricole commune (PAC) sont conditionnées au respect de la norme no 8 des bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE), qui fixe déjà des surfaces minimales à réserver aux cultures favorables à la biodiversité, et un pourcentage de terres en légumineuses. Il convient de laisser une marge de manœuvre aux exploitants, tout en maintenant nos objectifs, y compris en matière d’agriculture biologique. Vos amendements sont superflus et compliqueraient le texte ; j’y suis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, pour donner l’avis du Gouvernement sur les trois amendements en discussion commune.

    M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire

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    Vous avez adopté hier l’amendement no 160, qui constitue un compromis avec les propositions issues d’autres bancs. Il n’est pas besoin d’en rajouter, ou l’on finira par fixer dans la loi le nombre d’installations mois par mois !

    Mme Marie Pochon

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    Non !

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Les contraintes et les normes en la matière sont suffisamment nombreuses. Avis défavorable, comme sur tout autre amendement qui viendrait modifier l’équilibre trouvé hier.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    L’alinéa 2 de l’article 8 fixe un objectif d’augmentation du nombre d’exploitations agricoles – et désormais du nombre d’exploitants – pour les dix prochaines années. Cependant, la question de la surface agricole utile (SAU), pourtant nécessaire à l’installation d’agriculteurs, n’a pas été évoquée. Je livrerai trois chiffres à votre réflexion. Dans mon département, le Doubs, 95 000 hectares de surface agricole utile ont été perdus en un siècle – c’est autant d’exploitations et d’exploitants en moins. Or, sur ces 95 000 hectares perdus, seulement 20 000 l’ont été du fait de l’urbanisation, et 75 000 par l’extension de la forêt.

    Mme Marie Pochon

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    Ah !

    Mme Annie Genevard

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    La question de l’équilibre de l’occupation des sols, entre agriculture et forêt, doit donc être posée. La forêt n’a pas diminué en France – au contraire, elle a considérablement progressé. On a tendance à considérer que les forêts sont de meilleurs puits de carbone que les prairies ; or ce n’est pas le cas, les prairies étant de puissants puits de carbone. Pour atteindre les objectifs fixés à l’article 8, il faut étendre la surface agricole utile, et interroger son équilibre avec la forêt.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Nicole Le Peih.

    Mme Nicole Le Peih

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    Je souhaiterais rectifier une affirmation que j’entends depuis hier : la majorité des jeunes ou des nouveaux agriculteurs qui s’installent ne sont pas particulièrement attirés par le bio. Il faut le prendre en compte. La nouvelle génération souhaite s’installer pour bénéficier d’une quiétude, d’une meilleure qualité de vie, et accorde beaucoup d’importance à l’acceptabilité sociale de sa production.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Hier, du fait de la fatigue, j’ai eu un mot malheureux à l’encontre de la présidence ; je souhaite présenter mes excuses devant la représentation nationale.
    Nous soutenons les amendements présentés par nos collègues écologistes, qui ne font que décliner les objectifs ambitieux fixés en commun – leur formulation est un peu planificatrice, mais nous en soutenons l’esprit.
    Pour répondre à Mme Genevard, le Doubs est l’un des trois ou quatre départements français où la régulation – du marché foncier et du marché du lait, grâce aux appellations d’origine protégée (AOP) – crée les conditions de la prospérité. Ce département compte l’un des taux d’installations agricoles les plus élevés, fondé sur une régulation du foncier par les syndicats et l’État, et sur une régulation des marchés à travers, notamment, le comté. Le Doubs est un exemple de ce que nous devrions construire à l’échelle nationale – réguler le marché et le foncier crée les conditions de la prospérité – et le contre-exemple des libéraux qui veulent faire tomber toutes les digues. Vive le Doubs ! Vive l’amendement de nos collègues du groupe Écologiste !

    Mme la présidente

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    Tous les départements sont formidables.

    Mme Marie Pochon

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    Surtout la Drôme !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurélie Trouvé.

    Mme Aurélie Trouvé

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    Nous soutenons l’amendement no 3837. Je voudrais répondre à Mme Genevard, et il est important pour cela de se référer aux chiffres sur longue période et au niveau national : en quarante ans, les surfaces artificialisées ont augmenté de 70 %, en particulier au détriment des surfaces agricoles ; parmi ces terres artificialisées, 30 % l’ont été au profit des infrastructures de transport et 40 % pour l’habitat – ce sont les chiffres officiels. Le cas du Doubs, et des forêts qui ont pris le pas sur l’agriculture, est donc très particulier : la diminution de la surface agricole utile est avant tout le fait de l’habitat et des transports.
    Très régulièrement, le groupe La France insoumise a fait des propositions en matière de lutte contre l’artificialisation des sols, en proposant notamment de limiter l’extension des infrastructures de transport – c’est pourquoi nous luttons contre le projet de l’A69, qui empiète sur les terres agricoles ; malheureusement, vous êtes loin d’avoir tous rejoint ce combat. Il faut lutter contre ces projets d’autoroutes, de grandes surfaces, de zones d’activités qui grignotent progressivement les terres agricoles. Ne nous trompons pas de combat, ce n’est certainement pas la faute des forêts ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 3837.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        66
            Nombre de suffrages exprimés                64
            Majorité absolue                        33
                    Pour l’adoption                16
                    Contre                48

    (L’amendement no 3837 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 1507 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1511.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        66
            Nombre de suffrages exprimés                62
            Majorité absolue                        32
                    Pour l’adoption                16
                    Contre                46

    (L’amendement no 1511 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir les amendements nos 159 et 156, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Dominique Potier

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    L’amendement no 159 vise à préciser que l’objectif fixé à l’alinéa 2 de l’article 8 doit être atteint en maintenant une agriculture diversifiée et en préservant le modèle familial – conformément à son acception internationale reprise lors des travaux en commission, il faut entendre par « modèle familial » non pas que l’exploitation est gérée par une même famille, mais qu’elle est à taille humaine et que ceux qui y travaillent sont ceux qui la dirigent et la possèdent.
    L’amendement no 156, plus technique, vise à programmer la réforme des schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles (Sdrea) en cohérence avec l’objectif de 400 000 exploitations et 500 000 exploitants en 2035. En effet, certains schémas directeurs en vigueur accélèrent, au contraire, la concentration du foncier. Or ils constituent le premier outil de planification à notre main ; sans mise en cohérence avec le texte, l’objectif fixé restera purement déclaratif.

    M. Guillaume Garot

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    Il a raison !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    S’agissant de l’amendement no 159, nous avons déjà adopté un amendement similaire de M. Potier en commission ; il est donc satisfait.

    M. Dominique Potier

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    C’est vrai, pardon !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    En ce qui concerne l’amendement no 156, les schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles constituent un outil d’application des politiques publiques, et sont donc impliqués dans l’objectif fixé par la loi. Arrêtons, comme le ministre l’a dit, d’empiler des dispositions qui ont la même signification. Par souci de clarté et de lisibilité du texte, mon avis est défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Vous avez raison, il ne faut pas être bavard : je retire l’amendement no 159, qui est effectivement satisfait par celui adopté en commission. En revanche, nous avons un réel désaccord sur l’amendement no 156 : les dispositions adoptées hier définissent un objectif, et manifestent une volonté de régulation de tous les marchés agricoles – qu’ils soient sociétaires ou physiques – ainsi que de la délégation de travaux. Mais si l’on ne précise pas, dans le texte, quelles conséquences en tirer dans les schémas directeurs régionaux, alors nous en resterons à une simple déclaration d’intention. Il faut enclencher un mouvement institutionnel, engageant l’État et les régions, sans quoi les dispositions adoptées resteront évanescentes et inopérantes. Je maintiens donc l’amendement no 156, que je défends avec force.

    (L’amendement no 159 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Loïc Prud’homme.

    M. Loïc Prud’homme

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    Pour revenir sur les déclarations faites hier à notre endroit – qui faisaient référence à Martine à la ferme ou à l’URSS –,…

    M. Julien Dive

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    C’était la semaine dernière !

    M. Loïc Prud’homme

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    …je souhaite préciser, en toute sérénité, que nous avons à cœur, depuis six jours, de défendre un modèle qui pourvoie avant tout aux besoins alimentaires, offre un revenu digne aux agriculteurs et garantisse une agriculture diversifiée et respectueuse de l’environnement. Il s’agit de demandes relayées sur le terrain, par des syndicats comme la Confédération paysanne, les Jeunes Agriculteurs (JA), la fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) ou la Coordination rurale. Nous nous opposons au modèle que vous défendez, monsieur le ministre, dont la priorité est l’exportation, qui soumet l’agriculture aux marchés mondiaux, expose les agriculteurs à la concurrence, fait baisser leurs revenus, et les rend dépendants des intrants produits à l’étranger – qu’ils soient à base d’azote de synthèse ou de phosphore issu de l’extraction minière.
    C’est le modèle que défend la direction de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, c’est le modèle Avril-Sofiprotéol de M. Arnaud Rousseau.
    Il s’agit de savoir à laquelle de ces deux visions différentes de l’agriculture la priorité sera donnée. Nous ne sommes pas opposés à l’industrie – je l’ai dit à M. Lecamp – mais nous pensons qu’il faut d’abord satisfaire les besoins et, pourquoi pas, dans un deuxième temps, faire de l’exportation : l’agriculture n’a pas vocation à n’être qu’une ligne comptable dans le bilan du commerce extérieur. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Dive.

    M. Julien Dive

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    La référence à Martine à la ferme était destinée à celles et ceux qui considèrent qu’être agriculteur, ce n’est pas être chef d’entreprise, et que l’agriculture n’est pas une activité économique : si M. Prud’homme – ou tout autre collègue – considère que les agriculteurs sont bien des chefs d’entreprise, cette remarque ne lui était donc pas destinée et il n’a pas à en être offensé. M. Potier, la semaine passée, l’a bien compris.
    L’amendement de M. Potier sur les schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles me paraît assez pertinent. Nous définissons ici les grandes orientations de la politique agricole, et dans nos débats, en commission ou dans l’hémicycle, nous avons veillé, à travers de nombreux amendements, à ce qu’elles cernent au plus près la réalité des territoires. Celui que nous examinons à présent s’inscrit dans cette logique, et je ne vois pas de difficulté à ce que les Sdrea soutiennent cet objectif de parvenir à un nombre suffisant d’exploitants.

    (L’amendement no 156 est adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 1967.

    M. André Chassaigne

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    Le premier signataire de cet amendement est Davy Rimane, président de la délégation aux outre-mer de notre assemblée.
    Il s’inscrit dans ce que l’on pourrait appeler le « réflexe d’outre-mer », consistant à ce que chaque projet de loi connaisse une déclinaison spécifique pour les territoires d’outre-mer. J’ai déjà pu m’exprimer hier en ce sens, à propos de la Guyane.
    Cet amendement vise à ce que l’objectif du nombre d’exploitations agricoles puisse être décliné pour chacune des collectivités relevant des articles 73 et 74 de la Constitution, en prenant en considération la dynamique et la géographie spécifiques à chacune d’entre elles.
    M. Rimane souligne dans l’exposé des motifs combien les départements ou les collectivités d’outre-mer diffèrent entre eux. Il donne l’exemple de la Martinique et de La Réunion, qui ont perdu un cinquième de leurs exploitations agricoles en dix ans, tandis que cette déperdition atteint 25 % à Saint-Martin, mais n’est que de 8 % en Guadeloupe. En Guyane, nous assistons au contraire à une croissance de 3 %.
    Ces différences peuvent donc rendre nécessaires des interventions spécifiques à chacune de ces collectivités, en fonction des urgences qui leur sont propres.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Vos remarques sont légitimes. La loi s’applique à tout le territoire national, sans exclusion. Mais la mise en œuvre des politiques publiques doit bien entendu tenir compte des spécificités régionales, en général, et ultramarines, en particulier. Il ne me semble donc pas nécessaire de le mentionner : avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Je comprends vos objectifs, mais ce qui figure déjà à l’article 1er du texte que nous examinons – ainsi que ce que disposent les articles de la Constitution que vous avez mentionnés – emporte naturellement la déclinaison territoriale que vous appelez de vos vœux. Votre amendement me semble donc satisfait : avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Permettez-moi, en tant qu’ancien de cet hémicycle, de faire une simple observation. Il avait été admis, mandat après mandat, législature après législature, qu’un regard spécifique devait être porté à l’outre-mer. Cela peut certes paraître redondant, et comme déjà contenu dans l’énoncé des orientations générales ; mais rejeter ces mentions spécifiques que nous demandons, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, me semble témoigner de ce que j’appellerai presque une forme d’inculture – ou, tout du moins, de méconnaissance de ce qu’il y a dans l’esprit des populations d’outre-mer.
    Il ne coûte pas grand-chose de donner ces signes, que vous jugez redondants, et dont l’importance est plus grande que vous ne pouvez l’imaginer.
    Ce principe du « réflexe d’outre-mer » a d’ailleurs été respecté sous différentes majorités. Je suis élu depuis 2002, et j’ai connu une époque où chaque projet de loi comportait des articles spécifiques à l’outre-mer. Je regrette que vous ne respectiez plus ce principe, au nom de je ne sais quel jacobinisme.

    (L’amendement no 1967 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de six amendements, nos 1021, 2702, 2711, 2712, 2713 et 2714, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 1021 et 2702 sont identiques.

    Mme la présidente

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    Sur les amendements nos 1021 et identique, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 1021.

    Mme Mathilde Hignet

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    Avec votre accord, madame la présidente, je défendrai également les amendements no 2711, 2712, 2713 et 2714.
    Nous nous réjouissons de la victoire remportée hier, qui a vu l’objectif de 500 000 exploitants agricoles fixé dans la loi : c’est une demande que nous avions formulée dès l’examen du texte en commission.
    Cependant, cet objectif reste insuffisant. Nous le voyons bien : deux visions du monde agricole s’opposent dans cet hémicycle. Ce que nous proposons, à travers cette liste d’amendements, c’est d’augmenter encore le nombre d’exploitants – proposition qui rejoint naturellement une demande des syndicats agricoles. Ces objectifs ambitieux ne sont pas irréalistes : dans les années 1990, la France comptait 1 million d’agriculteurs et d’agricultrices.
    La question est importante, car un nombre élevé d’agriculteurs et d’agricultrices contribue à la dynamique des territoires ruraux et à la préservation des liens sociaux. C’est tout un tissu qui se crée autour du métier d’agriculteur : mécaniciens agricoles, vétérinaires, épiceries locales ou bien consommateurs qui viennent s’approvisionner directement chez le producteur. On a bien vu, pendant la crise du covid, comment les fermes ont répondu à cette demande alimentaire dans les territoires. Les producteurs qui font de la vente directe nous l’ont dit : heureusement qu’ils étaient là.
    Ces amendements traduisent donc notre souhait de voir des paysans et des paysannes nombreux dans les territoires. Ce sont eux qui font la richesse de nos campagnes et de notre pays. C’est aussi de cette manière que nous pourrons satisfaire à l’exigence de souveraineté alimentaire.
    Face à des plans sociaux massifs, il est urgent de se donner des objectifs bien plus ambitieux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 2702, 2711, 2712, 2713 et 2714 de Mme Aurélie Trouvé sont défendus.
    Quel est l’avis du Gouvernement sur l’ensemble de ces amendements ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Je commencerai par dire qu’il est dommage, madame Hignet, que vous revendiquiez comme une « victoire »…

    Mme Lisa Belluco

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    Une victoire de M. Potier !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    …le compromis auquel nous sommes parvenus hier soir sur le nombre d’exploitations et d’exploitants, fruit d’un consensus démocratique et intelligent. J’avais de plus cru comprendre qu’après la dernière intervention de M. le ministre, nous nous étions mis d’accord sur une trajectoire : et voici qu’en cinq amendements, vous avancez au moins dix chiffres différents ! Si nous voulons définir une orientation lisible pour tout le pays et tous les agriculteurs, il faut que nous nous en tenions à ce que nous avons déterminé hier soir.
    Naturellement, si nous parvenons à dépasser le plancher que nous avons fixé, je pense que nous aurons tous lieu de nous en réjouir. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Vous proposez des amendements qui, s’ils étaient adoptés, auraient pour conséquence de remettre en cause l’amendement que vous avez vous-même voté hier soir. (Mme Manon Meunier s’exclame.) Il serait bon que nous ayons de la continuité dans notre action, sans changer les chiffres d’un jour à l’autre.

    Mme Manon Meunier

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    Il n’y a pas de contradiction entre les deux !

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Un accord global sur le nombre d’exploitations et d’exploitants a été trouvé hier, à l’unanimité : je propose qu’on en reste là. Avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurélie Trouvé.

    Mme Aurélie Trouvé

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    Vous voudrez bien nous excuser, monsieur le ministre, de faire notre travail de parlementaires !
    Oui, nous avons remporté une victoire. C’est parce que nous avons souligné, en commission des affaires économiques, le problème que posait l’absence, dans la version initiale du projet de loi, d’objectif chiffré à propos du nombre d’exploitations agricoles à conserver que vous avez proposé – et nous en sommes heureux – un amendement de compromis permettant au moins de garantir un statu quo du nombre d’exploitations, à savoir 400 000 exploitations et 500 000 chefs d’exploitations, précision que nous avons fait ajouter. Si nous avons pu en arriver là, c’est bien parce que nous y avons travaillé, notamment du côté de la NUPES !
    Nous avions de plus annoncé, dès la présentation de cet article, que nous considérions que l’objectif retenu était insuffisant – même si, certes, c’est mieux que rien.
    Enfin, nous avons dès le début affirmé que nous préférons, pour atteindre ces objectifs, que l’on détermine des moyens, sans se contenter de simples déclarations programmatiques. Or, et nous ne cessons de le répéter depuis des mois, ce texte, supposé être la grande loi agricole du quinquennat sur le renouvellement des générations, ne précise pas ce qui relève pourtant de l’élémentaire. Quels sont les moyens, pour ceux qui veulent s’installer, d’accéder au foncier ? Comment leur assurer un revenu digne ? Après des semaines de mobilisation, il n’y a toujours rien à ce sujet. Quels sont les moyens financiers auxquels l’État s’engage ? Lors de l’examen du dernier projet de loi de finances, nous avions fait des propositions ambitieuses, qu’une majorité de députés ont votées, sur un certain nombre de financements supplémentaires destinés à l’agriculture : vous les avez supprimées par le recours à l’article 49.3 de la Constitution. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Lavergne.

    M. Pascal Lavergne

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    Je veux bien que l’on donne des chiffres, mais, sincèrement, si des agriculteurs nous regardent, ils doivent se demander si l’on pourrait, à un moment donné, leur faire confiance. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    Mme Lisa Belluco

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    Mais absolument !

    M. Antoine Villedieu

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    Ils veulent des revenus !

    M. Pascal Lavergne

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    Je voudrais justement que, au travers de ce projet de loi, nous leur témoignions de notre confiance, et que nous arrêtions de leur adresser des injonctions.
    Ils doivent aussi s’adapter à la réalité du marché (« Ah ! » sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES. – Mme Catherine Couturier s’exclame.)

    Mme la présidente

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    Madame Couturier, s’il vous plaît : seul l’orateur a la parole.

    M. Pascal Lavergne

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    Jusqu’à preuve du contraire, nous aidons bien l’agriculture, avec 9,5 milliards qui passent par les aides de la PAC et les autres aides européennes, auxquelles il faut ajouter celles qui viennent de notre ministère et de notre budget.
    Mais nous devons accepter le principe de réalité : notre économie est une économie de marché, et pas une économie administrée. (M. Arnaud Le Gall s’exclame.)
    Cessons de donner des injonctions aux agriculteurs et adressons-leur un message de confiance ! Ils sauront alors répondre aux exigences du changement climatique. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    Chers collègues, j’invite chacun d’entre vous à ne pas crier, pour le bien-être de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC – Mme Laurence Robert-Dehault applaudit également.)
    Je mets aux voix les amendements identiques nos 1021 et 2702.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        76
            Nombre de suffrages exprimés                75
            Majorité absolue                        38
                    Pour l’adoption                15
                    Contre                60

    (Les amendements identiques nos 1021 et 2702 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements nos 2711, 2712, 2713 et 2714, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 3752, je suis saisie par le groupe Écologiste-NUPES d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir les amendements nos 3753 et 3752, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    Mme Marie Pochon

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    Par ces amendements, nous souhaitons insister sur la nécessité de maintenir la part des agriculteurs exploitants dans l’emploi total à 1,5 % au minimum.
    En quarante ans, cette part a fortement diminué, passant de 7,1 % en 1982 à 1,5 % en 2019. Si nous ne voulons pas de fermes sans paysans, il faut stopper l’hémorragie et ne pas descendre en deçà de ce seuil.
    En commission, vous avez accepté d’inscrire dans la loi un objectif de 400 000 exploitations en 2035 et hier, un autre de 500 000 exploitants en 2035 – il s’agit de planchers, qui peuvent donc être rehaussés.
    Les débats qui ont eu lieu hier nous ont permis d’avancer en clarifiant la différence entre exploitation et exploitant, que certains collègues n’avaient pas bien perçue lors de l’examen du texte en commission. Ainsi, un groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec) peut rassembler quatre ou cinq exploitants agricoles – c’est une bonne chose. À l’inverse, il est regrettable qu’un seul chef d’exploitation puisse contrôler par le biais d’une holding douze sociétés agricoles distinctes. C’est par exemple le cas du président de la FNSEA, à la tête de quatre sociétés et de 700 hectares. Si l’on est pessimiste et que l’on extrapole, on pourrait donc se retrouver en 2035 avec 400 000 exploitations contrôlées par dix sociétés. Cela correspondrait à la tendance lourde, qui est à la diminution du nombre de chefs d’exploitation et au développement du salariat au sein de structures toujours plus importantes.
    Par ces amendements, nous voulons insister sur ces données qui ont été prises en compte dans le débat qui a eu lieu hier soir. Elles ont notamment permis l’adoption, à une très large majorité, de l’amendement de M. Potier, que nous vous proposons de compléter : en votant l’inscription dans la loi d’un objectif de maintien de la part des agriculteurs exploitants dans l’emploi total à 1,5 % au minimum, nous en augmentons la portée.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Pour les raisons déjà invoquées, j’émets un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Même avis.

    (L’amendement no 3753 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 3752.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        79
            Nombre de suffrages exprimés                78
            Majorité absolue                        40
                    Pour l’adoption                19
                    Contre                59

    (L’amendement no 3752 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1225 de Mme Mathilde Paris est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    L’alinéa 5, introduit en commission, prévoit déjà un soutien à l’investissement, et l’article 9 prend en compte la stratégie de mécanisation.
    Avis défavorable.

    (L’amendement no 1225, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2523 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 2523, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Alexandre, pour soutenir l’amendement no 1610.

    M. Laurent Alexandre

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    Il est crucial pour améliorer les conditions de travail quotidiennes des agriculteurs, puisqu’il facilite leur accès à des congés alignés sur ceux de tous les autres salariés. Il permet de garantir la continuité du service agricole tout en offrant aux agriculteurs le repos qu’ils méritent. Reconnaître le droit au repos, mais aussi le droit à la vie de famille et à la formation – un impératif à l’heure de la nécessaire transition des pratiques agricoles – est d’autant plus important que le mal-être des agriculteurs se fait de plus en plus palpable, et que ceux qui travaillent 365 jours par an sont encore très nombreux. Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas déclarer que l’agriculture est d’intérêt général majeur sans vous soucier des hommes et des femmes qui la pratiquent.
    Les agriculteurs n’ont droit qu’à quatorze jours de service de remplacement, partiellement pris en charge par un crédit d’impôt. Cette durée est largement inférieure aux vingt-cinq jours de congés payés auxquels ont droit les salariés dans les autres secteurs de l’économie – c’est totalement incompréhensible.
    Il y a quelques jours, j’ai défendu un autre amendement pour favoriser l’installation des jeunes agriculteurs. Mais comment ce métier pourrait-il être attractif si les jeunes qui souhaitent se lancer doivent, après avoir investi beaucoup d’argent, supporter la contrainte des horaires, le manque de vacances et les fluctuations de revenus ? Il ne s’agit pas de défendre un droit à la paresse, mais de redonner de la valeur humaine au travail agricole. Installer des agriculteurs, c’est bien ; installer des agriculteurs qui ne soient pas condamnés à la précarité ou à un travail quasi forcé, c’est beaucoup mieux.
    Pourtant, par idéologie, vous écartez toutes nos propositions qui permettraient de garantir des prix rémunérateurs aux agriculteurs en instaurant des prix planchers, ou de relever les retraites agricoles pour qu’elles atteignent le niveau du Smic, lui-même revalorisé. Ferez-vous de même avec les mécanismes d’entraide et de remplacement, qui permettraient de reconnaître un droit au congé pour les agriculteurs ?
    Le numéro 1620 a été attribué à cette mesure de justice sociale en faveur de nos paysans. Retenez-le en prévision du vote… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Je ne vois aucun rapport entre votre argumentaire et l’amendement no 1610 que vous étiez censé défendre.
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    J’ai moi aussi du mal à comprendre le rapport avec votre amendement. J’en profite toutefois pour rappeler que nous avons fait passer de quatorze à dix-sept le nombre de jours éligibles au service de remplacement, et de 50 % à 60 % le taux de prise en charge pour les congés ordinaires, porté de 60 % à 80 % en cas de maladie ou d’accident du travail – c’est dans la loi de finances pour 2024. Nous ne nous contentons pas de mots et de déclarations ; nous agissons.

    M. Stéphane Travert, président de la commission des affaires économiques

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    Très bien !

    (L’amendement no 1610 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 3455 et 943, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Jordan Guitton, pour soutenir ces deux amendements.

    M. Jordan Guitton

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    Hier soir, nos débats ont porté sur le nombre d’agriculteurs ; il dépend entre autres de la viabilité économique de leurs activités. Lors des manifestations, ils nous disaient vouloir vivre de leur travail – ce slogan est sain et naturel. Monsieur le ministre, pourquoi la majorité à laquelle vous appartenez vote-t-elle des textes au Parlement européen, notamment des déclinaisons du Pacte vert, qui, d’après la revue France agricole, prévoient une baisse de 10 à 15 % de la production agricole en Europe ? Comment peut-on augmenter, ou du moins maintenir, le nombre d’agriculteurs en France tout en votant des textes de décroissance avec les Verts et toute la gauche européenne ? Cette forme d’incohérence m’inquiète.
    Par cet amendement, nous souhaitons donner envie aux jeunes agriculteurs de s’installer en leur assurant un avenir économique, en rendant leurs activités viables, en garantissant des prix stables et en simplifiant les normes. Il faut simplifier leur travail – faire une déclaration de dossier PAC ou de relevé parcellaire se révèle très compliqué. Être jeune agriculteur ne consiste plus simplement à produire et à passer du temps dans ses champs. À défaut d’expertise administrative ou comptable, il faut déléguer les démarches bureaucratiques complexes, ce qui peut engendrer des dépenses phénoménales. Se donner des objectifs, c’est bien ; se donner les moyens de les atteindre, c’est mieux.
    Il faudrait également appliquer les lois existantes, notamment les lois Egalim du 30 octobre 2018, du 18 octobre 2021 et du 30 mars 2023 – cela fait partie des revendications des agriculteurs, et j’aimerais vous entendre sur ce point. Vous n’avez pas non plus répondu aux questions sur la baisse de la fiscalité s’agissant des transmissions, une thématique qui suscite beaucoup d’inquiétude : quels engagements prendrez-vous à ce sujet cet automne lors de l’examen de la loi de finances pour 2025 ? C’est déterminant pour l’avenir du nombre d’agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Ce gouvernement est le premier à fixer un objectif en matière de nombre d’exploitants et d’exploitations. Le but est clair : il faut produire plus, et nous nous en réjouissons. Je ne comprends donc pas très bien le procès en décroissance que vous faites au Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Tous ici, du moins le Gouvernement et la majorité d’entre nous, souhaitent la croissance agricole, le maintien de l’agriculture familiale, et le dépassement, ou du moins le maintien, du nombre actuel d’exploitations et d’exploitants. La viabilité économique est une variable importante – c’est d’ailleurs une demande des jeunes agriculteurs. Si l’on veut qu’ils reprennent des exploitations, il faut faire en sorte qu’elles soient viables.

    M. Jordan Guitton

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    Oui !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    L’article 9 porte justement sur le diagnostic, qui comprendra un module consacré à la viabilité économique.
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Des dispositifs fiscaux ont déjà été intégrés à la loi de finances pour 2024 – déduction pour épargne de précaution (DEP), relèvement des seuils du régime micro-BA – pour bénéfices agricoles. Le Premier ministre a annoncé une évolution de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB). Nous travaillerons aussi sur une exonération des plus-values sur les transmissions en augmentant les seuils, et sur les exonérations des droits de succession et de donation en cas de transmission de biens ruraux donnés à bail rural à long terme. Enfin, un régime d’exonération des plus-values pour départ en retraite en cas de reprise par un jeune agriculteur sera aussi créé. Ces dispositions seront intégrées au projet de loi de finances pour 2025.
    Par ailleurs, une mission menée conjointement par l’Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a été lancée pour esquisser d’autres pistes. Il faut envisager la fiscalité agricole de manière globale, et ne pas procéder appartement par appartement, si vous me passez l’expression.
    Enfin, je comprends bien la nécessité des petites pastilles européennes dans le moment que nous traversons. Je vous renvoie aux décisions prises il y a moins de quinze jours pour simplifier la PAC et garantir qu’elle suive une logique de production.
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Grégoire de Fournas.

    M. Grégoire de Fournas

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    Je veux expliquer à M. le rapporteur pourquoi nous considérons qu’il soutient la décroissance. De multiples études d’impact, parmi lesquelles celle du règlement relatif à l’usage durable des pesticides, le SUR, …

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Il n’a pas été voté !

    M. Grégoire de Fournas

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    …indiquent que l’adoption du Pacte vert européen entraînerait une baisse de la production : il s’agit bien de décroissance. Hier soir, vous nous avez indiqué que les objectifs d’exploitation en agriculture bio conformes au Pacte vert seront inscrits dans la loi ; là encore, vous soutenez la décroissance agricole, c’est clair et net. (M. le rapporteur fait un signe de dénégation.)
    Monsieur le ministre, vous avez évoqué des pistes de réflexion pour alléger la fiscalité sur les transmissions, en prévoyant notamment des exonérations. Cette loi était censée être une grande loi d’orientation agricole sur les transmissions. Nous aurions donc aimé qu’elle comprenne ces dispositifs fiscaux – c’était tout à fait faisable. Nous ne pourrons pas en débattre lors de l’examen du projet de loi de finances, car il sera de nouveau adopté par 49.3, ce qui privera cette assemblée d’une discussion sérieuse et importante. Nous constatons une nouvelle fois que cette loi d’orientation agricole est désespérément vide. (M. Emmanuel Blairy applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Ces amendements qui tournent en boucle relèvent vraiment de l’incantation, et on a bien du mal à m’y retrouver.
    Les déclarations des ministres à propos de cette loi ont été très claires s’agissant des mesures fiscales. Nous avons bien parlé de fiscalité, par exemple de l’article 238 quindecies du code général des impôts, lequel exonère certaines plus-values lors d’une transmission. Nous avons aussi évoqué l’augmentation continue des seuils d’exonération en cas de bail rural à long terme.

    M. Grégoire de Fournas

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    Ça n’a rien à voir !

    M. Jean-Paul Mattei

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    Ce débat aura lieu dans le cadre de l’examen du PLF. Nous débattrons aussi en commission (Mme Marie Pochon s’exclame), où les débats sur ces sujets sont très sereins. Vos représentants y participent activement – comme les autres d’ailleurs. Vous avez évoqué le 49.3 ; si vous étiez prêts à voter le PLF, il n’y aurait pas forcément besoin d’y recourir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)

    M. Marc Fesneau, ministre

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    C’est vrai !

    M. Arnaud Le Gall

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    Vous théorisez le musèlement de l’Assemblée nationale !

    M. Jean-Paul Mattei

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    Les mesures fiscales sont nécessaires, et nous devons y travailler – le rapporteur général l’a rappelé lors de la discussion générale. Nous devrons être très présents et force de proposition. Je suis ainsi favorable à un pacte Dutreil pour les exploitations agricoles – je ne comprends pas pourquoi deux régimes fiscaux différents coexisteraient en matière de transmission d’exploitation agricole. J’ai bon espoir que nous puissions apporter une pierre à l’édifice, pour l’ensemble de nos agriculteurs.

    (Les amendements nos 3455 et 943, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1613 et 3451.
    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 1613.

    Mme Mathilde Hignet

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    Il s’agit d’un amendement de cohérence. Hier, nous avons adopté un objectif de 500 000 exploitants d’ici à 2035 ; nous proposons donc un objectif du double d’ici à 2050. C’est du reste une demande des syndicats.
    Par ailleurs, nous avons défendu de nombreux amendements en présentation groupée afin d’exercer notre droit d’amendement tout en prenant en compte vos remarques. Nous avons, en quelque sorte, fait un pas vers vous ; or, vous nous rentrez dans le lard, si vous me permettez l’expression. Ce n’est pas une méthode propice à la sérénité des débats !

    Mme la présidente

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    L’amendement no 3451 de M. Michel Sala est défendu.

    (Les amendements identiques nos 1613 et 3451, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Catherine Couturier, pour soutenir l’amendement no 3129.

    Mme Catherine Couturier

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    Cet amendement vise à s’assurer que les politiques d’installation prennent en compte le maintien de l’exception agricole française, en soutenant les variétés et races anciennes. Monsieur le ministre, je pense que vous y serez favorable.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Vous pensez mal !

    Mme Catherine Couturier

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    C’est l’une des préconisations de la mission d’information sur les dynamiques de la biodiversité dans les paysages agricoles et l’évaluation des politiques publiques associées, dont les corapporteurs étaient un représentant du groupe Démocrate, M. Hubert Ott, et ma collègue Manon Meunier. Ils ont réalisé un excellent travail et proposé différentes mesures favorables à la préservation de la biodiversité, des paysages et des races anciennes – je n’en citerai pas pour ne pas en oublier, ce qui froisserait ceux qui les défendent –, essentiels à l’équilibre de nos territoires. Monsieur le ministre, je vous sais attaché au groupe politique auquel vous appartenez. C’est pourquoi je vous invite, comme Mathilde Hignet, à éviter de nous rentrer dans le lard, pour une fois. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    Mme Émilie Bonnivard

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    Ce serait bien que la réciproque soit vraie !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Je vais essayer d’utiliser un vocabulaire plus châtié. La préservation des races anciennes est un sujet d’importance, tout le monde en convient. Ce n’est pas mon corapporteur et ami, l’éleveur Pascal Lavergne, qui dira le contraire.

    M. Pascal Lavergne

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    Effectivement, de même que la préservation des races locales !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Chaque fois, chez lui, il faut manger de la bazadaise ! Reste que votre amendement n’a pas sa place ici. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Votre référence au lard fait sans doute allusion à la truie évoquée hier.

    Mme Catherine Couturier

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    Absolument ! (Sourires.)

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Je reconnais la continuité dans l’effort ! Vous faites également appel à mes bons sentiments vis-à-vis de mon groupe, mais nous avons déjà eu ce débat et, en présence du président dudit groupe, je maintiens ma position : votre amendement n’a pas sa place au sein d’un article relatif aux orientations en matière de nombre d’exploitants et d’installation. Bien sûr, comme vous, je suis attaché à la préservation des races locales et plaide pour l’implication de toutes les régions, car ces races sont importantes pour la transition agroécologique. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pascal Lavergne.

    M. Pascal Lavergne

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    Je vais tenter de prendre ma voix la plus douce, madame la présidente, mais je n’irai pas jusqu’à me jeter à la Garonne, car c’est elle qui m’a donné une grosse voix !

    Mme la présidente

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    Je vous remercie, monsieur Lavergne.

    M. Pascal Lavergne

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    La diversité des races animales dans notre pays est une richesse, car elles constituent une ressource génétique. Je suis éleveur de blondes d’Aquitaine, mais en Aquitaine, dans le département de la Gironde, existe une autre race locale, la bazadaise – Mme Mette pourra le confirmer. Demain, ces races nous rendront d’énormes services, car elles sont beaucoup plus économes en céréales, ce qui facilite leur engraissement. Elles peuvent également présenter des caractéristiques d’engraissement à l’herbe dont l’évolution climatique fait ressortir l’utilité. Le Gouvernement, comme les éleveurs, y attache de l’importance. Une vache ne met bas qu’un veau par an : pour constituer ou convertir un troupeau, il faut du temps et de la recherche. Le moment venu, nous saurons, nous éleveurs, puiser dans les ressources que nous offre, je le répète, la diversité des races françaises.

    Mme la présidente

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    Je vous remercie de cette douce voix, monsieur Lavergne – vous voyez que la chose est possible. La parole est à Mme Catherine Couturier.

    Mme Catherine Couturier

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    J’ai probablement, moi aussi, une voix un peu forte… Je vous ai provoqué, monsieur le ministre ; il faut savoir dans ma circonscription, l’élevage doit bien représenter 80 % de l’activité. La vache limousine domine, mais le porc cul noir limousin est malheureusement menacé – certaines fermes continuent pourtant d’en élever. Cet article vise à fixer des objectifs concernant le nombre d’exploitants : la préservation de ces races s’inscrirait parfaitement dans cette perspective, car il faut soutenir les exploitants qui les valorisent, d’autant que certaines sont en voie d’extinction. Ce serait un signal fort pour les techniciens agricoles qui travaillent dans nos territoires. De plus, lors du Salon international de l’agriculture, le public plébiscite souvent les races, souvent dotées d’une robe très spécifique, qui font la beauté et la diversité de l’élevage français. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Dive.

    M. Julien Dive

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    Nous connaissons tous des races anciennes que nous souhaitons conserver et que les agriculteurs prennent eux-mêmes l’initiative de préserver. Elles sont en effet mises en vedette lors du Salon de l’agriculture – ce sont même parfois ses égéries : je pense à la bleue du Nord, à la salers.

    M. Francis Dubois

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    Et la maraîchine !

    M. Julien Dive

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    Néanmoins, chère collègue de la Creuse, nous avons adopté, lors de l’examen de l’article 1er, un sous-amendement de M. Echaniz qui répond à votre demande. Enfin, sans vouloir vous offenser – le débat est très intéressant –, il faut avancer dans l’examen de l’article 8…

    Un député du groupe LR

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    Quelle autorité !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    M. Dive a raison : le sous-amendement no 5137, adopté à l’unanimité, visait à préserver « les ressources génétiques rares associées aux races, populations et variétés animales ou végétales locales, la biodiversité domestique ou cultivée ». Cela devrait vous inciter à retirer votre amendement. (M. Inaki Echaniz s’exclame.)

    (L’amendement no 3129 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 4546.

    Mme Mélanie Thomin

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    Évoquer les politiques d’installation des nouvelles générations est l’occasion de rappeler un objectif essentiel : préserver dans ce cadre la diversité des filières, pratiques et productions, fondement de la richesse de notre agriculture et d’un patrimoine rural, paysager, alimentaire à défendre. Certaines filières, comme celle du lait, prennent un tournant décisif en termes de perspectives de reprise. Il est nécessaire de les promouvoir, de porter un message politique fort : la résilience est possible et nous avons besoin de ces filières locales d’exception pour atteindre nos objectifs de décarbonation. Préservons-les donc et inscrivons-le dans la loi.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Préserver les filières, les savoir-faire territoriaux et les productions emblématiques locales, c’est un beau sujet, mais sa place n’est pas au sein de l’article 8. Avis défavorable.

    (L’amendement no 4546, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 3838, je suis saisie par le groupe Écologiste-NUPES d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    L’amendement no 1614 de Mme Mathilde Hignet est défendu.

    (L’amendement no 1614, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny, pour soutenir l’amendement no 3137.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Dans le sud de l’Aisne, terre de champagne, comme dans beaucoup de départements, les besoins en matière de main-d’œuvre pour les vendanges ne sont pas toujours satisfaits et les solutions proposées – par France Travail ou les missions locales – pas toujours adaptées. Ainsi, même si les bénéficiaires du RSA ont la possibilité de cumuler cet emploi et leur prestation, force est de constater que cela ne suffit pas. C’est pourquoi nous plaidons pour la possibilité de suspendre, durant les vendanges, le contrat de travail des salariés et intérimaires : cela permettrait à ces derniers de ne pas perdre leurs congés payés et aux vignerons de disposer d’une main-d’œuvre assez nombreuse. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    J’ai une bonne nouvelle : c’est déjà possible. Tous les salariés, y compris pendant un congé payé, et les agents publics peuvent, avec l’accord de leur employeur, être embauchés par contrat vendanges. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Le rapporteur a raison : le contrat vendanges répond à votre demande. Bien sûr, il est préférable que l’employeur saisonnier demande au salarié une attestation sur l’honneur de l’accord de son employeur habituel. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny.

    M. Jocelyn Dessigny

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    J’entends que la chose est faisable, mais force est de constater que, sur le terrain, ces dispositions ne sont pas appliquées. En outre, le dispositif reste méconnu des employeurs et des salariés. Il faudrait donc au moins les informer de cette possibilité, qui éviterait le recours à des entreprises de travail temporaire étrangères, par exemple.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Dive.

    M. Julien Dive

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    L’amendement du collègue Dessigny a beau être satisfait, il aborde un sujet important : chaque année, il manque environ 30 % de vendangeurs. Quand la fin de l’été approche, des campagnes de promotion sont lancées dans toutes les régions concernées. Cependant, la pénurie devient partout si criante qu’il a fallu s’adapter. Les départements viticoles, quel que soit le type de viticulture, ont instauré la possibilité de cumuler le RSA et un emploi saisonnier : c’est une belle opération, offrant aux allocataires un levier supplémentaire pour sortir de leur quotidien difficile, mais elle ne profite qu’aux résidents des départements qui ont autorisé ce cumul, notamment celui de la Marne, cher au rapporteur général, et l’Aisne. À l’inverse, dans le Nord, plus brassicole que viticole, l’allocataire qui participerait aux vendanges perdrait ses droits au RSA. Il conviendrait que le Gouvernement, en particulier M. le ministre, sensibilise les départements à l’intérêt d’une telle mesure.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Il y a souvent en France, et pas seulement dans le domaine de l’agriculture, un problème de communication. Nous pouvons espérer que la création d’un guichet unique destiné à l’ensemble de la profession contribuera à la diffusion de telles informations.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Vous avez raison, monsieur Dive. Vos propos renvoient à la décentralisation : chaque département détermine les principes et les modalités d’application des politiques publiques qui lui incombent, notamment le versement du RSA. Cela pose aussi la question de la dérogation au nombre d’heures travaillées, qui occupe plusieurs départements. Catherine Vautrin, originaire d’une région viticole, et moi-même travaillons sur l’ensemble de ces sujets, qui relèvent de l’application de la législation, donc du niveau réglementaire. Je retiens également la nécessité de mieux informer des possibilités existantes, ce qui ne relève pas non plus du législatif.

    (L’amendement no 3137 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir l’amendement no 3838.

    Mme Marie Pochon

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    L’ambition de renouveler les générations est intrinsèquement liée à l’aménagement des territoires : l’installation massive de nouveaux agriculteurs ne saurait être possible sans actions en faveur de la vitalité de nos territoires ruraux, sans un maillage renforcé de commerces et de services, afin d’accueillir au mieux les arrivants. Le départ des services publics, la disparition des industries, les fermetures de classes, la désertification médicale sont autant de freins à l’installation agricole, qu’il nous faut au moins mentionner dans le texte, et contre lesquels des moyens doivent être déployés.
    L’accès au logement pose également problème. Des candidats voient leur installation entravée car la moindre maison, même au cœur du village, coûte 300 000 euros. Les éleveurs pastoraux sont aussi confrontés à cette difficulté. Il conviendrait de rénover les cabanes dans lesquelles les bergers sont logés – dans la Drôme, un tiers d’entre elles nécessitent des travaux – et d’en construire de nouvelles. C’est indispensable à leur installation et plus largement aux activités agricoles en montagne. Tel est l’objet de cet amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Vous évoquez un sujet que je connais bien, car j’habite dans un territoire très rural – je suis plongé dans ces questions tous les jours, tous les soirs, tous les week-ends. Il est en effet important que ces territoires vivent ; et comme les agriculteurs sont les premiers à les faire vivre, il est important qu’il y ait des agriculteurs.

    Mme Marie Pochon

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    Tout à fait !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Les maisons France Services, créées depuis trois ans à l’initiative de Jacqueline Gourault et de Joël Giraud, fonctionnent très bien, pour 90 % d’entre elles. Elles ont réintroduit les services publics ; on peut espérer que, ce faisant, elles réintroduiront de l’activité. Je conviens tout à fait de la nécessité de repeupler de commerces et de services les zones rurales, mais cette question n’a rien à faire dans le texte. Avis défavorable.

    Mme Marie Pochon

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    Pourquoi cela n’aurait rien à voir ?

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurélie Trouvé.

    Mme Aurélie Trouvé

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    Il faut se poser les bonnes questions : comment faire pour qu’il y ait de nombreuses installations dans les campagnes ? Premièrement, favoriser l’accès au foncier – ce n’est pas dans le texte ; deuxièmement, garantir un revenu digne – cela n’y est pas non plus ; troisièmement, maintenir les services publics que, depuis sept ans de présidence Macron, le Gouvernement détruit petit à petit, notamment par l’austérité budgétaire qu’il a imposée ces derniers mois, voire ces dernières années. Les économistes de l’institut La Boétie viennent de publier un excellent rapport qui met en évidence, chiffres à l’appui, cette destruction progressive, en particulier dans les zones rurales. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Je voudrais également répondre aux collègues de la droite et de l’extrême droite : la meilleure façon de recruter des saisonniers, c’est de leur proposer des conditions de travail et des revenus attractifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Marie Pochon applaudit également.) Si certains d’entre vous ont été salariés agricoles, notamment pendant leurs études, ils savent ce que c’est : on est payé au Smic,…

    M. Frédéric Cabrolier

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    Et on est content !

    Mme Aurélie Trouvé

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    …quand on ne travaille pas au noir ou au gris – phénomène assez important en France. Les contrats sont ultraprécaires, avec des durées extrêmement brèves, parfois entrecoupées ; les conditions de travail très difficiles, surtout physiquement. Évidemment, il est difficile de trouver des candidats ! De nombreux exploitants agricoles en arrivent à recourir au travail détaché – je crois que c’est le cas de Grégoire de Fournas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Grégoire de Fournas

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    C’est faux, c’est un mensonge !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Puisque nous ne disposons que d’un temps limité, je serai bref – je ne m’exprime pourtant pas souvent. J’ai déposé, en décembre dernier, la proposition de loi no 1967 visant à garantir aux travailleurs saisonniers agricoles des conditions de travail et d’accueil dignes, à l’exposé des motifs particulièrement détaillé. La question doit en effet être prise à bras-le-corps. J’insisterai sur le sujet de l’hébergement : c’est une catastrophe, même si certaines communes essayent de trouver des solutions. Les gardiens de troupeaux sont hébergés en montagne dans des conditions absolument déplorables, sous des tôles ; durant leurs jours de congé, il leur est impossible de redescendre, en raison du temps nécessaire. J’ai déposé, il y a quelques années, un amendement qui tendait à créer un droit de préemption sur les jasseries ou les burons, comme on les appelle chez nous, qui se vendent à des bobos annuellement bucoliques.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Excellent, les « bobos annuellement bucoliques » !

    M. André Chassaigne

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    Les jeunes qui s’installent, que ce soit lors de la décohabitation avec leurs parents ou hors du cadre familial, rencontrent les pires difficultés. L’application très rigoureuse des plans locaux d’urbanisme soumet à des conditions très précises la création d’un hébergement à proximité de l’exploitation. (Mme Émilie Bonnivard applaudit.)

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Il a raison !

    M. André Chassaigne

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    Par ailleurs, les règles nationales d’urbanisme sont appliquées si strictement qu’un jeune couple reprenant une exploitation agricole a beaucoup de mal à habiter à proximité, ne pouvant bénéficier d’aucune dérogation. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR.)

    Mme la présidente

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    Je vous demande un effort collectif : si vous faites preuve de concision, je pourrai distribuer largement la parole. La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin

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    Le groupe Socialistes soutiendra l’amendement de Mme Pochon, car il aborde la question centrale de la capacité d’hébergement, qui doit être prise en compte dans le cadre du débat sur les politiques d’installation. Ainsi, les jeunes peuvent être d’abord salariés dans l’exploitation qu’ils envisagent de reprendre. Lorsque le chef d’exploitation souhaite conserver son logement, y compris au-delà de son départ à la retraite, où peut-on loger les nouvelles générations, notamment quand l’exploitation n’appartient pas à leur famille ? La crise du logement est prégnante dans les départements littoraux et touristiques, qui sont aussi des zones rurales. Lorsque l’on souhaite mener des politiques d’installation et de soutien aux filières, il convient de renforcer d’abord les politiques de logement dans ces territoires en crise.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Grégoire de Fournas.

    M. Grégoire de Fournas

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    Notre groupe n’a aucune leçon à recevoir de Mme Trouvé en matière de travail manuel. J’ai écimé du maïs à 16 ans ;…

    M. Arnaud Le Gall

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    J’ai ramassé des pommes à 15 ans : ne venez pas larmoyer ! Nous parlons des conditions de travail, pas de votre vie !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, chers collègues, nous devons nous écouter mutuellement.

    M. Grégoire de Fournas

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    …c’était très difficile, mais, à cet âge, j’étais heureux de toucher le Smic. Il ne faut donc pas faire de généralités. S’agissant des ouvriers, je vous rappelle que de nombreux agriculteurs payent leurs salariés plus cher qu’ils ne se payent eux-mêmes – je connais un peu le problème. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.) Je reconnais, cependant, que vous faites preuve d’une certaine cohérence, car vous défendez, comme nous, des prix rémunérateurs qui leur permettraient de payer correctement leurs salariés.
    En revanche, vous ne faites guère preuve de courage en me diffamant. Il est absolument faux que je recoure au travail détaché. J’aurais dû déposer plainte contre France Info ; je l’ai fait contre Mathieu Lefèvre, qui a eu l’imprudence de répéter cette calomnie sur un plateau télé. Je vous invite, madame Trouvé, à réitérer vos propos hors de cet hémicycle, sans « je crois » – les « je crois » permettent de dire tout et n’importe quoi, ce qui est un peu facile. Je pourrai ainsi vous attaquer en justice, comme M. Lefèvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Concentrons-nous sur le sujet qui nous occupe. La parole est à M. Éric Martineau.

    M. Éric Martineau

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    Je souhaite réagir aux propos tenus sur la main-d’œuvre saisonnière.

    Mme Marie Pochon

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    Ce n’est pas le sujet de mon amendement !

    M. Éric Martineau

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    Beaucoup d’efforts ont été faits, même si des défauts persistent. Les filières disposent souvent de cahiers des charges. S’agissant des fruits et légumes, la certification GlobalGap oblige à fournir des réfectoires et des logements décents ; des contrôles sont réalisés, y compris dans les toilettes et dans les vergers. Il ne faut pas laisser croire que les agriculteurs ne se soucient pas de leurs saisonniers. Nous sommes contrôlés par la Mutualité sociale agricole (MSA), par l’Inspection du travail, par les organismes certificateurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et RE.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 3838.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        96
            Nombre de suffrages exprimés                74
            Majorité absolue                        38
                    Pour l’adoption                23
                    Contre                51

    (L’amendement no 3838 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l’amendement no 901.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Si nous voulons garantir l’avenir de l’agriculture française, nous devons tout faire pour favoriser l’installation de nouveaux agriculteurs. C’est pourquoi, afin de tenir compte des spécificités et des besoins des territoires, cet amendement vise à ce que soit réalisée une estimation précise du nombre des installations nécessaires en vue de répondre aux enjeux énoncés par le texte.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Définir des objectifs département par département, filière par filière, serait très énergivore pour les services de l’État. Les acteurs que ce projet de loi réunira au sein du réseau France Services agriculture connaissent les territoires dans lesquels ils interviennent, leurs besoins, leurs ressources et leurs contraintes. Les rapports de l’Onit, certes insuffisants – je partage votre analyse sur ce point –, seront sans doute améliorés. Nous pouvons encore progresser, c’est vrai : espérons que le répertoire unique permettra une meilleure lisibilité des actions existantes et de ce qui reste à faire, département par département. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Des caps ont été fixés au niveau national : il appartient à chaque département de les suivre, y compris au sein des organisations professionnelles agricoles. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    (L’amendement no 901 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 1165 de Mme Mathilde Paris et 2929 de Mme Christine Engrand sont défendus.

    (Les amendements nos 1165 et 2929, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Francis Dubois, pour soutenir l’amendement no 114.

    M. Francis Dubois

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    Cet amendement déposé par Anne-Laure Blin vise à compléter l’alinéa 4, afin de favoriser, au-delà de l’accompagnement personnalisé à l’installation, le recensement des aides financières. Cela permettra aux personnes qui souhaitent s’engager dans une activité agricole de le faire plus rapidement, avec le soutien des banques.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Je ne vois pas le rapport entre cette proposition et l’objectif de l’article 8. Si le but est de faire connaître les régimes d’aides en matière d’installation, je vous invite à consulter le plan stratégique national (PSN) de la France pour la PAC 2023-2027, dans lequel ces aides sont répertoriées.
    En outre, un article du code rural prévoit que les régions établissent chaque année un bilan, rendu public, de la conduite de la politique d’installation et de transmission en agriculture. Ces bilans sont consolidés à l’échelle nationale par l’État et comportent un bilan des versements de l’année écoulée, que l’on peut, je suppose, obtenir. Le ministre en dira sans doute plus que moi sur le sujet. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    L’objectif de l’amendement de votre collègue Blin est de mettre à la disposition du futur exploitant l’ensemble des dispositifs d’aide. C’est précisément ce à quoi servira France Services agriculture ! Vous connaissez, comme moi, les structures agricoles et savez qu’en matière d’installation, l’une des premières choses que l’on étudie, au-delà du bilan économique de l’exploitation et de son équilibre, ce sont les aides auxquelles on peut prétendre. Cet amendement est donc satisfait par le processus actuel, qui sera d’ailleurs consolidé grâce à France Services agriculture. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    (L’amendement no 114 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Sur les sous-amendements identiques nos 5436 et 5534, je suis saisie par le groupe Écologiste-NUPES d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    L’amendement no 2926 de Mme Christine Engrand est défendu.

    (L’amendement no 2926, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 3642, qui fait l’objet des sous-amendements identiques nos 5436 et 5534.

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Il s’agit d’un amendement de clarification des missions de France Services agriculture à l’égard des actifs agricoles, plus particulièrement des porteurs de projet. Ce réseau, nous l’avons souligné en commission, doit offrir un guichet unique, neutre, équitable, réunissant les services et actions proposés par le microcosme qui gravite autour des agriculteurs. S’agissant du conseil et de l’accompagnement assurés par un réseau de structures agréées, c’est au porteur d’un projet d’installation ou de cession d’une exploitation qu’est destiné France Services agriculture, dont les objectifs sont l’accueil de tous, l’orientation vers ce qui existe dans les territoires et, je le répète, l’accompagnement « personnalisé et coordonné » de ces porteurs de projet. J’en profite d’ailleurs pour annoncer que j’émettrai un avis favorable aux sous-amendements, qui visent à souligner l’aspect « pluraliste » de ce guichet.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement sur les sous-amendements et l’amendement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Nous avons effectivement eu ce débat en commission. Dès lors que nous créons un guichet qui rassemblera l’ensemble des acteurs, il faut assumer qu’il puisse être pluraliste. J’émets donc un avis favorable à l’amendement et aux sous-amendements qui lui sont rattachés. Je formule toutefois le vœu de ne pas retrouver, lors de l’examen des alinéas suivants, d’amendements visant à l’ajout du terme « pluraliste » : une fois le principe posé, nous gagnerons du temps à ne pas en reparler à chaque fois.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir le sous-amendement no 5436.

    Mme Marie Pochon

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    J’ai bien noté les avis favorables de M. le rapporteur et de M. le ministre. Je les en remercie – ce sera sans doute pour moi l’unique occasion de le faire.
    Ce sous-amendement vise à compléter l’amendement du rapporteur en y ajoutant le pluralisme de l’accompagnement proposé aux porteurs de projet. Même si cet objectif est partagé, il importe de le préciser dans le texte : les remontées du terrain sont unanimes concernant la nécessité, face à la diversification des profils des candidats à l’installation, d’un accompagnement pluriel, afin que chacun reçoive ce qui lui correspond. Même s’il s’agit d’une modification mineure, le message sera fort.
    Nous insisterons sans doute de nouveau, lors de l’examen des amendements à venir, sur cette notion de pluralisme : faute d’une telle approche, d’un accompagnement adapté, un tiers des personnes souhaitant s’engager dans l’agriculture y renoncent au cours de leur installation. C’est pourquoi nous vous invitons à adopter ce sous-amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir le sous-amendement no 5534.

    M. Loïc Prud’homme

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    Il s’agit, en quelque sorte, d’un sous-amendement rédactionnel. Nous ne sommes pas opposés à l’idée d’une porte d’entrée unique ; toutefois, même si le rapporteur nous a assurés du contraire, il ne faudrait pas qu’il n’y ait derrière cette porte qu’un couloir, des modalités d’installation conformes aux seuls canons de l’agriculture traditionnelle, celle-là même qui nous a menés dans l’impasse. Le guichet unique doit présenter toutes les possibilités offertes, dans leur diversité. Actuellement, les structures alternatives aux chambres d’agriculture accompagnent tous les projets tant soit peu originaux en ce sens qu’ils défrichent, si je puis dire, de nouvelles façons de s’établir, qu’il s’agisse d’installations collectives, de surfaces peu habituelles ou des cultures innovantes. Je suis donc ravi que vos avis soient favorables au pluralisme, en espérant qu’il se traduise concrètement dans les guichets France Services agriculture : une porte unique avec, derrière, tous les couloirs possibles. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    J’avais envisagé de déposer un sous-amendement, auquel j’ai renoncé pour ne pas allonger encore le texte de cet alinéa. Permettez-moi cependant d’envoyer un message fort : n’oublions jamais ces invisibles que sont les salariés agricoles.

    Mme Marie Pochon

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    Tout à fait !

    M. André Chassaigne

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    Je me demande s’il ne faudrait pas instaurer, comme c’est le cas pour les entreprises de l’économie sociale et solidaire, une obligation d’information de ces salariés en cas de projet de cession de l’exploitation. J’irai même plus loin : nous pourrions réfléchir à une forme de priorité donnée aux salariés agricoles pour la reprise d’une exploitation dans laquelle ils travaillent depuis des années.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Pour une fois, je suis heureux, madame Pochon, de vous faire mentir en prouvant que je peux approuver même vos propositions ! Nous partageons, depuis le début, cet impératif de pluralisme. Dans une autre vie, avant d’être député, j’ai eu l’occasion de créer un guichet unique – à d’autres fins – et je suis d’accord avec ce qui vient d’être dit : le succès de France Services agriculture dépendra de notre capacité à faire en sorte que les chambres d’agriculture, qui ont une mission de service public, assurent le pluralisme et l’ouverture vers l’ensemble des services et produits proposés aux agriculteurs. C’est donc avec joie que je réitère mon avis favorable.
    Par ailleurs, la remarque de M. Chassaigne est très juste. Je ne sais pas si la loi le permet déjà, mais il me semble indispensable d’informer les salariés agricoles en amont d’une transmission – d’autant que la moitié des fermes changeront de main dans les dix ans à venir. Le guichet permettra peut-être cette information grâce aux données enregistrées dans le répertoire unique, sous réserve qu’il soit visible par tout le monde.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les sous-amendements identiques nos 5436 et 5534.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        88
            Nombre de suffrages exprimés                68
            Majorité absolue                        35
                    Pour l’adoption                68
                    Contre                0

    (Les sous-amendements identiques nos 5436 et 5534 sont adoptés.)
    (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    (L’amendement no 3642, sous-amendé, est adopté ; en conséquence, les amendements nos 3429, 3839, 3525, 3955, 4143, 4352 et 4471 tombent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Emmanuel Blairy, pour soutenir l’amendement no 2254.

    M. Emmanuel Blairy

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    Il ne s’agit pas d’un sujet de fond, mais de forme. Cet amendement reprend les recommandations du Conseil d’État s’agissant de la dénomination du réseau France Services agriculture. La loi doit rester fluide et à même de s’adapter en toutes circonstances. En nommant cette entité, nous la rendons moins fluide. Avant-hier, nous avons rejeté un amendement visant à fixer le programme scolaire, qui ne relève pas du domaine de la loi – cela paraissait évident.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Ce n’est pas la même chose !

    M. Emmanuel Blairy

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    C’est pourquoi nous devons, de la même manière, supprimer la dénomination « France Services agriculture ». (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    (L’amendement no 2254, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 1935 et 4400, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 1935.

    Mme Mélanie Thomin

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    Comme plusieurs d’entre vous, je viens d’une région agricole, fière de produire pour nourrir notre pays et contribuer à sa souveraineté alimentaire. Cet amendement vise à réintroduire une disposition figurant dans une précédente version du projet de loi et qui prévoyait une coopération entre l’État et les régions dans la gouvernance et la mise en œuvre de France Services agriculture. L’installation agricole relève de la compétence des régions : la Bretagne, par exemple, a contribué à installer, depuis 2014, près de 3 200 nouveaux exploitants dans notre territoire.
    Les régions souhaitent que cette coopération soit affirmée dans la loi. Monsieur le ministre, vous nous avez indiqué lors des travaux en commission que vous n’aviez pas attendu ces débats pour vous entretenir à ce sujet avec les présidents des conseils régionaux. Dont acte : inscrivons-le dans le texte. Je profite de la présence de M. Woerth pour réaffirmer la nécessité d’y inscrire également la compétence régionale en matière d’installation en agriculture – ce serait une fierté pour nos régions agricoles.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l’amendement no 4400.

    M. Christophe Naegelen

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    Mme Thomin l’a souligné, la compétence régionale est d’un grand secours – je pense à la DJA dans les régions Grand Est ou Occitanie. Il importe d’inscrire dans la loi le rôle et l’implication des régions – nous leur demandons de contribuer, n’oublions pas de leur rendre hommage. Cet amendement souligne que l’installation des agriculteurs dans les territoires est un travail collectif, dans lequel les régions prennent toute leur place.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    La gouvernance du réseau France Services agriculture associera en effet l’État, les régions et les professionnels, ce qui est reflété à l’article 10 dans les modalités d’élaboration du cahier des charges et l’agrément des structures de conseil et d’accompagnement, qui associe les instances du Cnit et du Crit, c’est-à-dire du Comité national et du comité régional installation-transmission. Même si nous l’avons affirmé dès l’article 1er, je ne vois pas d’inconvénient à rappeler à l’article 8 que la gouvernance de France Services agriculture inclura les régions. Avis favorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Vous l’avez rappelé, madame la députée, nous avons travaillé ces questions avec les régions – en particulier avec le président de votre conseil régional, Loïg Chesnais-Girard. Les dispositions qui les concernent le plus, celles relatives à l’installation, à la formation et au guichet France Services agriculture, leur conviennent. Même s’il n’y a pas de difficulté particulière, vous avez raison : ce n’est pas parce que le dialogue se passe bien avec ce gouvernement que les précautions sont inutiles pour l’avenir – on ne saurait être trop prudent. Avis favorable. (« Oh ! Bravo ! » sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Maillard.

    M. Sylvain Maillard

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    Je ne voulais pas forcément prendre la parole immédiatement après un avis favorable ; reste que ce texte important suscite des discussions très longues. Les deux semaines prévues par notre calendrier touchent à leur fin et nous souhaitons tous terminer l’examen de ce projet de loi, qui est attendu par les agriculteurs, vendredi. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, LR et SOC.) Je n’ai pas le sentiment d’avoir monopolisé la parole ! J’ai cru comprendre que les oppositions étaient d’accord pour que nous avancions un peu plus rapidement, à condition que l’examen de la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle soit officiellement repoussé. J’ai pris l’attache du Gouvernement : ce report sera annoncé dans les prochaines minutes. Je demande à chacun d’entre vous d’être responsable et de faire en sorte que l’examen du texte s’achève vendredi, comme l’espèrent les professionnels de terrain. (Exclamations sur quelques bancs des groupes RN, LFI-NUPES, LR et SOC.)

    Rappels au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard, pour un rappel au règlement.

    Mme Annie Genevard

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    Il se fonde sur l’article qui régit la conduite de nos débats. Bien sûr, nous aspirons tous à ce que les débats se terminent dans les meilleurs délais – nous sommes attendus dans nos circonscriptions. Cela fait un mois que ceux d’entre nous qui, comme moi, suivent à la fois ce projet de loi et celui relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, dont l’examen en séance publique commence lundi, doivent pour cela être présents du lundi au samedi matin. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et LR. – M. Inaki Echaniz applaudit également.) Par la voix du président de notre groupe, nous avons dénoncé cette organisation des débats en conférence des présidents. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RN et LR. – M. Frédéric Maillot applaudit également.) Inscrire en même temps à l’ordre du jour des textes aussi fondamentaux, qui en outre se tuilent – la semaine dernière, j’ai couru entre la salle de la commission pour la fin de vie et l’hémicycle pour ce texte –, était un désastre assuré et une source de tensions inutiles, alors que les élections européennes approchent – nous aimerions bien pouvoir faire campagne sur le terrain. Vous êtes pris à votre propre piège : un agenda totalement impensé. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RN et LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurélie Trouvé, pour un rappel au règlement.

    Mme Aurélie Trouvé

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    Il se fonde sur l’article 100 de notre règlement, relatif à la bonne tenue des débats. J’irai dans le même sens qu’Annie Genevard. Nous sommes nombreux à être mobilisés sans arrêt, tous les jours, par ce texte. Il devait être la grande loi agricole du quinquennat : prévoir d’y consacrer seulement deux semaines, où son examen est de surcroît entrecoupé jusqu’à ne représenter que quelques jours de débat, n’était pas suffisant. Nous ne sommes pas dans notre tort : c’est vous qui nous mettez dans cette situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Francis Dubois

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    Cela fait dix jours que vous êtes absent, monsieur Maillard, et vous arrivez à nous faire perdre du temps !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Inaki Echaniz, pour un rappel au règlement.

    M. Inaki Echaniz

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    Ce rappel au règlement se fonde également sur l’article 100. Nous avons, comme Mme Genevard, dénoncé l’organisation des débats concernant ce texte, le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades, la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public – encore une fois examinée à marche forcée. (M. Aurélien Saintoul applaudit.) Rachida Dati a même fait circuler la rumeur que l’examen du texte que nous examinons serait suspendu afin de faire adopter plus vite la proposition de loi sénatoriale, ce qui est assez déplorable, car, outre les points soulignés par Mme Genevard, il s’agit d’un texte essentiel pour l’audiovisuel public. Je remercie M. Maillard de nous avoir fait perdre dix minutes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé de Lépinau, pour un rappel au règlement.

    M. Hervé de Lépinau

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    Il se fonde, comme les précédents, sur l’article 100 du règlement. Monsieur Maillard, nous ne vous avons pas beaucoup vu dans l’hémicycle pour débattre de ce texte.

    Mme Anne-Laure Blin

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    Même pas vu du tout !

    M. Hervé de Lépinau

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    Personnellement, je me passerai volontiers des leçons d’un ouvrier de la onzième heure. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Article 8 (suite)

    Mme la présidente

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    J’appelle votre attention sur le fait que les amendements nos 1935 et 4400 font l’objet d’une discussion commune : ils ne sont pas identiques, puisque le premier vise à « compléter l’alinéa 4 » tandis que le second vise à « insérer […] après l’alinéa 4 ». Même si la différence est mince, nous devons choisir celui sur lequel nous nous prononcerons en premier. Je suivrai l’ordre indiqué par la feuille jaune et mettrai d’abord aux voix le no 1935 : s’il est adopté, le no 4400 tombera.

    (L’amendement no 1935 est adopté ; en conséquence, l’amendement no 4400 tombe.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois demandes de scrutin public : sur l’amendement no 1945 rectifié, par le groupe Socialistes et apparentés ; sur l’amendement no 3906, par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale ; sur l’amendement no 1963, par le groupe Socialistes et apparentés.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 852 et 1810, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. David Taupiac, pour soutenir l’amendement no 852.

    M. David Taupiac

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    Il vise à insérer un alinéa rappelant que l’État, afin de favoriser l’installation, assure la transparence et la régulation des marchés fonciers avec pour critères l’emploi par unité de surface, les pratiques agroécologiques, dont l’agriculture biologique, la déspécialisation des territoires et les productions déficitaires nationales et locales.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hubert Ott, pour soutenir l’amendement no 1810.

    M. Hubert Ott

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    Il vise à insérer, après l’alinéa 4, l’alinéa suivant : « À cet effet, l’État assure également la transparence et la régulation de l’ensemble des marchés fonciers, afin d’orienter les immeubles à usage ou vocation agricole vers l’installation, en favorisant l’emploi par unité de surface et les pratiques agroécologiques, dont l’agriculture biologique. »

    M. Grégoire de Fournas

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    Où est M. Maillard ?

    M. Yoann Gillet

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    Il est parti.

    M. Hubert Ott

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    L’objectif du projet de loi est le renouvellement des générations en agriculture. Toute installation a pour passage obligé l’accès au foncier, que ce soit par l’achat de biens immobiliers ou de parts sociales, ou par location. Freiner la concentration des terres et maintenir le nombre d’exploitants suppose donc de réaménager les structures foncières. L’État, qui soutient l’accès au foncier, doit revoir la transparence et la régulation des marchés. (Mme Manon Meunier applaudit.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Ces amendements sont satisfaits par l’adoption, hier, de l’amendement no 1956 de M. Potier relatif à la lutte contre la concentration des terres. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Nous avons déjà eu cette discussion, ce qui a conduit à l’adoption de l’amendement de M. Potier. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    (L’amendement no 1810 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    Mme Manon Meunier

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    Nous soutenons ces amendements issus pour partie de la majorité – nous avions défendu, lors de l’examen de l’alinéa 1er, quelque chose de similaire. Le Gouvernement doit se positionner sur le foncier, dont il est fondamental d’orienter les usages en faveur de la souveraineté alimentaire et de la transition agroécologique.
    Je crois que si M. Ott a déposé son amendement, c’est parce que nous avons eu l’occasion, lors de notre mission d’information sur les dynamiques de la biodiversité dans les paysages agricoles, de rencontrer, dans les territoires, des acteurs qui mettent en avant le rôle du foncier – il importe de soutenir les jeunes porteurs de projet, nombreux à tendre vers les pratiques agroécologiques, les plus durables, que les scientifiques nous signalent la nécessité d’adopter. Le foncier joue un rôle déterminant au moment de l’installation ; vous devez accéder à la demande, issue, je le répète, de vos propres rangs, de renforcer les politiques en la matière. Des multinationales de l’agro-industrie accaparent les terres : soutenons les institutions nationales pour stopper ce processus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Concernant l’organisation des débats, puisque la présidence a retenu le principe « un pour, un contre », il serait intéressant de favoriser la diversité. Nous devons nous précipiter pour lever la main, et nous aimerions donc qu’une rotation entre les groupes soit organisée. Quant à la présence du président Maillard, quand on cite la Bible, il convient d’en faire l’exégèse de façon correcte. La parabole des ouvriers de la onzième heure vise à montrer que celui qui arrive à la dernière heure compte autant que celui qui est arrivé à la première. Il est légitime qu’un président de groupe, comme M. Maillard, intervienne au sujet de l’organisation des débats même s’il n’y a pas participé. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) Je ne cautionne pas les propos tenus à son encontre.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Il faut expliquer au RN ce que c’est que la démocratie ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Où est M. Maillard ?

    M. André Chassaigne

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    Nous devons être très attentifs aux sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) : si tout se passe bien dans certains départements, dans d’autres, les avis émis par les commissions cantonales sur la reprise d’exploitations ne sont pas toujours suivis. Il faut enjoindre aux Safer de fonctionner de façon plus démocratique : elles ont fait des progrès en la matière, mais il serait nécessaire qu’elles tiennent systématiquement compte des avis de terrain – ceux des commissions cantonales.

    Mme la présidente

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    Monsieur le président Chassaigne, je n’ai pas bien compris votre proposition concernant les prises de parole, qui sont très diversifiées.

    M. André Chassaigne

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    Non, ce que je voulais dire…

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco, brièvement, car trois orateurs se sont déjà exprimés.

    Mme Lisa Belluco

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    Je ne serai pas longue, madame la présidente : je rappellerai seulement l’importance de réguler le foncier agricole et de le réserver à l’installation agricole. À Adriers, dans la Vienne – notre département, monsieur le rapporteur –, une exploitation de 650 hectares, soit 10 % de la surface de la commune, est à vendre : le candidat pressenti par la Safer est prêt à l’acheter 4,5 millions d’euros, soit 7 000 euros par hectare, dans une zone dominée par les pâturages et l’élevage extensif où le prix moyen est de 3 500 euros. Je vous passe les détails, mais son projet consiste en enclos de chasse, éoliennes et panneaux photovoltaïques. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Sans régulation, de grandes exploitations risquent ainsi de servir à des projets énergétiques et non agricoles, car les Safer ne sont pas en mesure de l’empêcher.

    (L’amendement no 852 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Taupiac, pour soutenir l’amendement no 3983.

    M. David Taupiac

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    Cet amendement dû à Nathalie Bassire vise à rappeler les spécificités de l’outre-mer, notamment les contextes géographique et démographique propres à chaque territoire ultramarin. Les jeunes agriculteurs qui souhaitent s’installer, notamment hors du cadre familial, rencontrent de grandes difficultés : ils se heurtent à un ensemble de résistances locales, tant formelles qu’informelles.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Votre amendement, je le comprends, vise à intégrer le « réflexe outre-mer » mentionné tout à l’heure par le président Chassaigne. Toutefois, il comporte un risque : empiéter sur les compétences de ces territoires en matière d’installation et de transmission. Les orientations que vise à déterminer cet article concernent les territoires ultramarins sans pour autant mettre de côté leurs spécificités. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    L’amendement empiéterait en effet sur les compétences que la Constitution a dévolues aux collectivités d’outre-mer. Je rappellerai que lors de l’examen de l’article 1er, votre assemblée a adopté un sous-amendement du groupe GDR-NUPES à l’amendement no 3952, visant à ce que le V de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime soit ainsi rédigé : « La politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation tient compte des spécificités des outre-mer ainsi que de l’ensemble des enjeux économiques, sociaux et environnementaux de ces territoires. Elle a pour objectif de favoriser le développement des productions agricoles d’outre-mer, en soutenant leur accès aux marchés, le revenu des agriculteurs, la recherche et l’innovation, l’organisation et la modernisation de l’agriculture par la structuration en filières organisées compétitives et durables, l’adaptation des exploitations au changement climatique, l’emploi, la formation, le renouvellement des générations, la satisfaction de la demande alimentaire par des productions locales, notamment en s’appuyant sur les filières de diversification, la préservation et la pleine mobilisation de la surface agricole utile, […]. »
    Cette réécriture globale, qui a vocation à infuser l’ensemble des politiques agricoles, puisqu’elle se situe à l’article L. 1A du code rural qui en énumère les finalités, est beaucoup plus respectueuse des prérogatives des collectivités d’outre-mer et tient mieux compte des spécificités ultramarines que la version initiale du texte. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    M. Taupiac voudra bien me pardonner : mon intervention concerne l’amendement précédent. Il est tout de même savoureux d’entendre un membre du groupe Écologiste s’émouvoir du fait que l’on convertisse des terres agricoles en vue de la production d’énergies renouvelables.

    M. Hervé de Lépinau

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    Eh oui !

    Mme Annie Genevard

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    C’est précisément ce que vous avez toujours défendu et ce que nous combattons. Nous refusons que ces terres servent à installer des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques au sol.

    Mme Sandra Regol

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    Vous ne venez pas assez souvent pour savoir ce que l’on vote !

    Mme Annie Genevard

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    Vous voilà pris à votre propre piège ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Delphine Batho.

    Mme Delphine Batho

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    Madame Genevard, pour avoir participé à tous les débats concernant la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, je peux vous dire que le groupe Écologiste-NUPES a déposé tous les amendements possibles afin de tenter d’empêcher l’occupation, l’utilisation, la conversion de surfaces agricoles ou d’espaces naturels à des fins d’agrivoltaïsme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme Annie Genevard

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    Et les éoliennes, où les mettez-vous ?

    Mme Marie Pochon

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    Sur les terres déjà artificialisées !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Sur les toits ?

    Mme Delphine Batho

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    Vous pouvez aller vérifier le contenu de nos amendements dans le Journal officiel. Notre position est cohérente et constante. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    (L’amendement no 3983 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1945 rectifié – ainsi que les amendements nos 1944 et 1946 rectifié, peut-être ?

    M. Dominique Potier

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    J’allais vous le proposer, madame la présidente, pour contribuer à l’accélération que nous appelons tous de nos vœux afin de terminer dans les délais prévus.
    Nous assistons à une dérégulation massive en matière de foncier. Invité il y a quelques années par l’Académie d’agriculture de France, je soulignais qu’un hectare sur trois échappait aux règles communes ; certains de ses membres m’ont précisé que dans le Bassin parisien, le phénomène touchait un hectare sur deux. Certes, cette dérégulation est moindre dans les régions plus pauvres, mais dans toutes les zones à fort potentiel, la compétition devient redoutable. Qu’est-ce qu’une république dont une partie du territoire échappe à la règle commune ?
    Nous connaissons par cœur cette évolution. Toutes les missions d’information de notre assemblée, du Sénat, les constats du Conseil économique, social et environnemental (Cese) convergent vers le même constat : trois phénomènes se conjuguent. Le premier est l’importance prise par les structures sociétaires dans l’accès au foncier : une régulation a été esquissée par la loi du 23 décembre 2021 portant mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires, dite loi Sempastous, mais elle n’est pas suffisante. Le deuxième est le démembrement de propriété, qui revient en force, notamment dans l’Ouest, en tant que voie de contournement des politiques de structures. Le troisième, ce sont les dysfonctionnements dénoncés par André Chassaigne et qui touchent commissions départementales d’orientation de l’agriculture (CDOA), directions territoriales des territoires (DDT), comités techniques des Safer. J’en ajouterai un quatrième : le travail délégué, sur lequel nous avons très peu d’informations, et qui échappe à toute forme de régulation.
    Plusieurs de nos amendements visant à apporter des solutions ont été déclarés irrecevables. Des réformes précises, ne coûtant pas un euro, auraient parfaitement pu être intégrées à ce texte dans l’attente d’une grande loi foncière proposant une nouvelle architecture : cela n’a pas été possible, alors même que nous avons identifié le mal et que nous aurions pu le combattre par la législation.
    L’amendement de repli no 1945 rectifié part du principe qu’il n’y a pas de politique publique sans métrique, si l’on veut évaluer les objectifs qu’elle se fixe : cette métrique passe par la création d’un registre national des exploitations agricoles et d’observatoires régionaux des marchés fonciers ruraux. Les amendements suivants en constituent une déclinaison.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en présentation groupée ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    S’agissant de l’orientation, l’amendement adopté hier soir répond pour partie à vos souhaits. Pour ce qui est du registre national des exploitations agricoles, je vous signale que le registre des actifs agricoles a été supprimé et que les entreprises agricoles relèvent depuis 2023 du registre national des entreprises. Par ailleurs, l’article 10 prévoit un répertoire départemental unique, géré par la chambre d’agriculture, où seront recensées les installations et les transmissions. Vous proposez la création d’observatoires des marchés fonciers : a-t-on vraiment besoin de nouvelles entités pour réguler ce secteur ? Il ne faudrait pas rendre la lecture de cet ensemble de marchés plus complexe encore. On peut espérer que ce que nous sommes en train de construire, avec l’inscription des transactions dans le répertoire départemental, apporte la lisibilité nécessaire. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Pour la fluidité de nos débats, je vais retirer les amendements nos 1944 et 1946 rectifié, qui ne font pas l’objet d’un scrutin public et n’étaient, encore une fois, que des variantes du no 1945 rectifié.
    Monsieur le rapporteur, il s’agit de questions très techniques et je ne vais pas entamer un débat trop fastidieux, mais les répertoires actuels ne répondent pas à cette exigence de transparence. Tous les observateurs, qu’il s’agisse des préfets, des responsables de DDT ou des directeurs de Safer, vous diront que le poids des structures sociétaires et des holdings les empêche d’avoir une vision claire des marchés. Ils n’ont aucune information non plus sur la part du travail délégué, qui a acquis, à l’usage, une puissance équivalente aux formes de concentration par la propriété. Bref, nous sommes aveugles à plusieurs phénomènes, alors que la transparence fonde la démocratie. Ma proposition peut être améliorée, affinée, même appliquée avec peu de moyens, mais elle reste le point de départ d’une politique publique sérieuse. C’est grâce à une documentation claire et accessible que nous pourrons savoir où nous en sommes par rapport aux objectifs que nous nous sommes fixés.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Les répertoires prévus par le projet de loi amélioreront certes les choses, mais nous disposons des outils nécessaires pour connaître, même au sein des holdings, les bénéficiaires effectifs des terres : la réglementation qui impose de les déclarer, bien qu’elle concerne surtout les sociétés commerciales, s’applique aux exploitations agricoles. À cela s’ajoutent d’autres éléments, comme le cadastre ou les déclarations faites au titre des aides issues de la PAC. Vos amendements ne sont donc pas utiles. Ils restent toutefois intéressants, car ils nous auront permis d’évoquer un vrai problème : le manque de cohérence dans la gestion des outils existants.

    (Les amendements nos 1944 et 1946 rectifié sont retirés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article no 1945 rectifié.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        100
            Nombre de suffrages exprimés                69
            Majorité absolue                        35
                    Pour l’adoption                29
                    Contre                40

    (L’article 1945 rectifié n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurélie Trouvé, pour soutenir l’amendement no 3906.

    Mme Aurélie Trouvé

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    Il vise à donner à l’État l’objectif de réformer la PAC, ainsi que le PSN, qui en constitue la déclinaison en France. Hier, monsieur le ministre, en évoquant les objectifs en matière d’agriculture biologique, vous affirmiez que ce qui importait, c’était le PSN : dont acte. Son poids tient à ce que la PAC représente chaque année 9 milliards d’euros d’aides aux agriculteurs, soit 25 000 euros par bénéficiaire. Pour un très grand nombre d’éleveurs, ces aides constituent même la quasi-totalité des revenus agricoles. La PAC est sans doute la politique qui oriente le plus fortement le développement agricole de notre pays.
    Cela fait des années que le groupe La France insoumise demande que le PSN fasse l’objet d’une discussion et d’un vote dans cet hémicycle. En tant qu’élus du peuple, il nous revient en effet d’en décider. Dans cet amendement, nous demandons à revenir sur la logique de la PAC : au Parlement européen, le groupe auquel nous nous rattachons a voté contre sa dernière réforme, approuvée par tous les députés européens de l’extrême droite, de la droite et de la Macronie. En effet, depuis 1992, on ne cesse, par l’intermédiaire de la PAC, de déréguler les marchés : fin des prix garantis, fin des quotas, fin du stockage public. Les aides censées compenser ces évolutions ne dépendent ni des prix ou des revenus, comme aux États-Unis, ni des services environnementaux rendus. Elles sont uniquement fondées sur le capital foncier : les sommes sont distribuées selon le nombre d’hectares. Comme les Jeunes Agriculteurs et la Coordination rurale, nous souhaitons en outre les réserver aux agriculteurs actifs. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Nous nous éloignons encore une fois du sujet. Tout le monde est conscient de l’importance du revenu des agriculteurs. Vous travaillez à l’améliorer, nous aussi : depuis la première loi Egalim du 30 octobre 2018, cette majorité et le Gouvernement auront fait plus en la matière qu’aucun de leurs prédécesseurs. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Vous êtes en train de décrire le processus démocratique européen. Les grandes lignes de la PAC sont définies par une assemblée de députés, élus comme vous,…

    M. Arnaud Le Gall

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    Avec votre plein soutien !

    M. Marc Fesneau, ministre

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    …renouvelés en juin, si j’ai bien compris le film. Acceptez le fait que votre définition de la PAC est ultraminoritaire et un tel amendement inopérant. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurélie Trouvé.

    Mme Aurélie Trouvé

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    Monsieur le ministre, vous devez la vérité à chacun. Nous convenons que la PAC est régie par un cadre européen,…

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Eh oui !

    Mme Aurélie Trouvé

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    …convenez, de votre côté, qu’elle est de plus en plus renationalisée.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Pas du tout !

    Mme Aurélie Trouvé

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    Les États membres disposent d’énormes marges de manœuvre, notamment concernant la nature des aides versées, leur montant et leurs conditions d’éligibilité. Beaucoup font d’ailleurs adopter par leur parlement la déclinaison nationale de la PAC ; vous, vous évitez ce vote parce qu’il suppose un débat ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Par ailleurs, je suis inquiète, monsieur le rapporteur, de vous entendre déclarer que la PAC n’a rien à voir avec le renouvellement des générations agricoles. Les 9 milliards annuels d’aides et la façon dont la France décide de les verser n’auraient-ils aucun rapport avec l’installation d’agriculteurs ? Les bras m’en tombent ! (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Dive.

    M. Julien Dive

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    Que change la réforme de la PAC ? Premièrement, grâce au PSN, elle donne un peu de latitude aux États membres – c’est une bonne chose. Deuxième point, d’ailleurs à son origine : elle accompagne mieux et plus finement les petites exploitations. Troisièmement, elle soutient la transition agricole. Le groupe du Parlement européen dans lequel siège la formation politique de la collègue Trouvé, seul à voter contre la réforme, s’est opposé à ces progrès. C’est un manque cruel de cohérence !
    Cependant, je rejoins Mme Trouvé à propos du dernier point qu’elle a soulevé, à savoir le souhait de débattre du PSN dans notre enceinte. Décider de la déclinaison de la PAC à l’échelle nationale nous permettrait de trouver le bon équilibre entre l’accompagnement des exploitants de grandes cultures et celui des éleveurs – ceux, notamment, qui vivent en zone de montagne et sont tributaires de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN). C’est pourquoi l’examen du PSN, au-delà de ce que l’on appelle vulgairement les projets de loi Ddadue – portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne –, nous donnerait l’occasion de débattre réellement de l’orientation agricole. (M. Dominique Potier applaudit.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 3906.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        104
            Nombre de suffrages exprimés                98
            Majorité absolue                        50
                    Pour l’adoption                28
                    Contre                70

    (L’amendement no 3906 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 1963.

    M. Dominique Potier

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    Je m’inscris dans la même logique qu’Aurélie Trouvé et Julien Dive. Un débat, du moins l’esquisse d’un débat sur le PSN serait utile. En ne discutant ni du foncier ni des aides de la PAC, nous éludons deux leviers majeurs de la politique d’installation des agriculteurs. Cet amendement d’appel vise à tracer deux axes de réforme du PSN : l’un relatif à l’agroécologie, l’autre à la politique sociale. En 2013, la PAC avait intégré le versement d’aides découplées pour les 52 premiers hectares ; ce chiffre correspondait alors à la surface d’exploitation médiane, qui est de 69 hectares en 2023 – vous mesurez ainsi la progression de la taille moyenne des exploitations. Augmenter de 10 % les enveloppes de bonification pour les exploitations dont la surface est inférieure ou égale à la surface médiane constituerait, à l’instar du cumul des aides au-delà d’une certaine surface, un moyen puissant de favoriser une politique d’installation.
    Si, chaque fois que vous agrandissez votre exploitation – en contournant parfois la politique des structures, dont nous savons qu’elle est très défaillante –, vous êtes récompensé par des primes supplémentaires de la PAC, notre débat est vain. Réintroduire dans le PSN un plafonnement et une régulation des aides en fonction de la surface médiane réactualisée à 69 hectares serait donc un levier majeur. Cette mesure demande simplement de la volonté politique. L’État a supprimé le taux de 10 % sur un mouvement d’humeur du monde paysan, ce qui ne lui a pas rendu service. Porter ce taux à 20 % changerait la donne dans l’échelle des revenus agricoles, en réduisant les inégalités qui constituent un tabou dans notre débat.
    Mon amendement vise aussi à aligner les objectifs du label Haute Valeur environnementale (HVE) sur ceux du plan Écophyto. Leur non-alignement constitue une anomalie qui pourrait être corrigée dans le cadre du nouveau plan Écophyto et d’une nouvelle ambition du PSN. Somme toute, le PSN est un élément capital qui mérite un vrai débat démocratique.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Beaucoup d’amendements à l’article 8 visent à réformer la politique d’installation dans les dix prochaines années. Nul besoin de la loi pour réviser le PSN. Quant à la réforme du cahier des charges de la certification HVE, largement débattue par ailleurs, nous nous éloignons toujours plus de notre sujet. Le Gouvernement travaille sur l’ensemble de ces questions et mobilise des moyens à un niveau jamais connu jusqu’alors. Le ministre en dira peut-être davantage. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Avec cet amendement d’appel, vous soulignez l’importance du PSN et de sa révision à mi-parcours. Je me tiens à la disposition de la commission quand le temps de la révision viendra, mais ce n’est pas l’objet du projet de loi. La négociation du PSN ne se déroule pas comme vous semblez l’imaginer : c’est un aller-retour permanent avec la Commission européenne. Ne faisons donc pas semblant d’ignorer la manière dont le PSN se construit. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Le PSN est un sujet majeur. Nicole Le Peih et moi-même dirigeons d’ailleurs, pour la commission des affaires européennes, une mission d’information dont nous livrerons prochainement le rapport, afin de comparer ses méthodes d’élaboration et d’application en France à celles d’autres États. Nous ferons des recommandations, parce que nous sommes sensibles aux questions qui se posent. Le risque le plus important est qu’il conduise à une forme de renationalisation de la PAC : nous devons y être extrêmement attentifs. Si telle devait être la tendance – ce n’est pas encore le cas –, il pourrait en résulter des distorsions de concurrence au sein de l’Union européenne. La commission d’enquête relative aux produits phytosanitaires a d’ailleurs dévoilé les différences d’application des politiques en la matière selon les États membres – et leurs conséquences économiques. De plus, le PSN sert-il de levier pour instaurer une agriculture différente, à savoir l’agroécologie ? Tel est le fond du problème. L’Allemagne a fait des choix différents des nôtres, en actionnant ce levier au maximum : c’est une forme d’échec.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    C’est tout à fait vrai !

    M. Julien Dive

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    Oui, c’est un échec !

    M. André Chassaigne

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    En ce qui concerne la France, ce levier est à mes yeux insuffisamment actionné, ce que confirment beaucoup d’économistes, notamment de l’Inrae, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. Il faut ouvrir le débat. Les recommandations de notre mission d’information en constitueront l’occasion.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Taupiac.

    M. David Taupiac

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    Le groupe LIOT soutient cet amendement. Je salue notamment l’alinéa qui vise à expérimenter un système assurantiel destiné à accompagner les changements de pratiques agricoles. Dans le Gers, je constate la difficulté de l’agriculture à s’adapter au changement climatique, vecteur d’aléas de plus en plus fréquents et dévastateurs pour les récoltes, alors que la demande et l’attente sociétale de bio, de produits HVE, sont de plus en plus fortes. On ne peut sécuriser les revenus ni les productions agricoles sous la double contrainte de l’aléa climatique et de la pression sociétale.
    La réforme du système assurantiel peut contribuer à sécuriser nos agriculteurs au cours de cette transition. Les pistes de réforme intègrent la moyenne olympique – nous l’avons évoqué hier –, mais aussi l’assurance obligatoire ou l’assurance chiffre d’affaires. Il faut ouvrir le débat. Monsieur le ministre, je me tiens à votre disposition pour en parler. J’appelle régulièrement votre attention sur la situation du Gers, dont le vignoble a beaucoup souffert ces dernières années du gel, de la grêle, du mildiou, contre lequel les exploitants n’étaient pas assurés. Dès l’année prochaine, il conviendra d’évaluer la dernière réforme du système assurantiel, entrée en application début 2023.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Je prolonge un peu le débat, mais le sujet est important. Vous avez eu raison, monsieur Chassaigne, de rappeler que vous y travaillez avec votre collègue Le Peih. Comme vous, je crains la discordance des PSN : nous risquons de créer des distorsions que chacun critiquera en pointant des applications plus favorables chez son voisin. Or la PAC représente le premier budget de l’Union, et dans un marché unique, il ne faut pas créer ou laisser se développer des distorsions. Nous devrons alerter l’Europe à ce propos. Si chacun fait sa petite cuisine dans sa petite casserole – permettez-moi cette métaphore un peu triviale –, la politique agricole européenne ne sera plus commune. Or la force de la PAC est de déterminer des orientations communes en matière de transition, de production, de souveraineté et de sécurité alimentaire.
    Vous avez raison également de souligner que nos amis allemands ont choisi un PSN très restrictif, s’agissant notamment de l’accès aux écorégimes. Résultat : peu de candidats se sont signalés et les crédits ont été sous-consommés. Nous avons fait le choix d’un modèle plus intégratif en essayant d’embarquer le maximum de monde. Les résultats ont même été au-delà des prévisions, ce qui explique que les paiements soient moins élevés que prévu. Afin d’analyser les réussites et les échecs de nos voisins, nous aurons besoin du travail de parangonnage – pour éviter les anglicismes – que conduira votre mission d’information.
    Pour répondre à M. Taupiac, il convient – dans le cadre de l’évaluation à mi-parcours des PSN et de la PAC, mais aussi de l’élaboration de la future PAC – d’imaginer des systèmes assurantiels au sens général du terme. Nous travaillons sur la réforme de la moyenne olympique, plusieurs fois évoquée. Nous avons déjà lancé, monsieur Taupiac – peut-être l’avez-vous votée –, une réforme : plusieurs centaines de millions d’euros ont été débloqués, ce qui a trouvé un large écho auprès des agriculteurs puisque des centaines de milliers d’hectares supplémentaires ont été assurés dès 2023 et le seront de nouveau en 2024. Rappelons notre action, sous peine de donner l’impression que l’on part de rien : nous avons opéré la réforme la plus profonde du système assurantiel depuis vingt ou vingt-cinq ans. Cependant, ses biais sont visibles, notamment quand les crises se succèdent ou que les défauts de la moyenne olympique sont dénoncés.
    Il faut donc améliorer le système : les agriculteurs doivent être préservés des aléas climatiques dont nous parlons depuis le début de nos travaux. Cette réflexion sera intégrée, non seulement à l’évaluation à mi-parcours du PSN, mais à un débat d’ensemble au sujet de l’assurance – assurance revenu, assurance récolte et ainsi de suite –, visant à éviter les situations dans lesquelles un agriculteur, après trois accidents climatiques, ne se relève pas. Je partage cette réflexion avec vous, tout en rappelant que le dispositif a permis de consolider les systèmes prairiaux, la viticulture et les grandes cultures. Dans le domaine de l’arboriculture, il faut encore progresser : nous y travaillons avec les assureurs.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1963.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        101
            Nombre de suffrages exprimés                98
            Majorité absolue                        50
                    Pour l’adoption                29
                    Contre                69

    (L’amendement no 1963 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir les amendements nos 2302 et 2303, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Dominique Potier

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    Nous souhaitons aborder dans le cadre de ce projet de loi la question des organisations agricoles. La force du monde agricole pendant l’épopée des années 1960 résidait dans les collectifs, qu’il s’agisse de coopératives visant la commercialisation, de collectifs d’étude et d’expérimentation – je pense aux centres d’études agricoles techniques (Ceta) et aux groupements de vulgarisation agricole (GVA) – ou encore de coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma), qui ont permis d’introduire collectivement la mécanisation de la pratique agricole. Tous sont désormais en panne – en panne de sens, d’instruments juridiques, de définition, de soutien budgétaire.
    Vous vous apprêtez à rouvrir un débat relatif à la fiscalité. Continuerons-nous à appliquer une logique de capitalisation et à accompagner les plus privilégiés en effaçant l’ardoise fiscale ? Utiliserons-nous au contraire la fiscalité, comme nos aînés l’ont fait dans les années 1960 à 1980, pour encourager des systèmes vertueux qui favorisent l’égalité des chances et qui promeuvent une économie agricole fondée sur la gestion en amont autant que sur la performance en aval ?
    Depuis plusieurs années, nous travaillons avec les Cuma, les centres d’initiative pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (Civam) et les groupements de développement agricole (GDA) à une nouvelle définition de l’agriculture de groupe. Il en est besoin, car depuis les années 1960, aucune disposition du code rural la concernant n’a été actualisée. À la suite d’un dialogue constructif et du dépôt d’une proposition de loi cosignée par de très nombreux parlementaires, nous étions parvenus à une définition. Nous l’avons fait adopter dans le cadre de la loi Egalim du 30 octobre 2018, lorsque Stéphane Travert était ministre de l’agriculture ; elle a été supprimée par le Conseil constitutionnel.
    Il ne coûterait rien de l’ajouter à l’article 8, et cela nous permettrait de disposer d’une définition juridique sur laquelle pourront s’appuyer, le cas échéant, des politiques fiscales et budgétaires. Cette définition, issue de la coconstruction, est très simple. Elle est reprise dans les amendements nos 2302 et 2303, formulés ainsi : « L’État se donne comme objectif de définir l’agriculture de groupe, constituée de collectifs composés d’une majorité d’agriculteurs, lesquels ont pour vocation la mise en commun de façon continue et structurée de connaissances ainsi que de ressources humaines et matérielles. Cette définition permet de renforcer » – ou « d’orienter » – « les politiques budgétaires fiscales et réglementaires qui contribuent à développer cette forme d’organisation. » Je conclurai en soulignant que l’agriculture de groupe est vertueuse sur les plans économique, social et psychologique : or il faudra un mental solide pour affronter les défis de l’agriculture de demain.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en présentation groupée ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Vous proposez que l’État se fixe pour objectif de définir l’agriculture de groupe, ce qui ne constitue pas une véritable orientation pour les politiques publiques.

    M. Dominique Potier

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    Ah bon ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Diverses formes de ce que l’on appelle communément l’agriculture de groupe peuvent être mobilisées pour favoriser l’installation des agriculteurs. Je parle de sociétés civiles agricoles comme les Gaec – vous affirmez qu’ils fonctionnent mal, mais nombre d’entre eux fonctionnent très bien –,…

    M. Dominique Potier

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    Vous m’avez mal compris, ce n’est pas ce que j’ai dit !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    …les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL), les groupements fonciers agricoles (GFA) ou encore les coopératives agricoles, que vous avez évoquées. Je ne comprends pas l’objet de vos amendements, dès lors que cette batterie d’installations collectives existe en France depuis plus de soixante ans.

    M. André Chassaigne

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    Il n’a pas parlé des kolkhozes !

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Pas cette fois. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Je comprends votre intention, non votre méthode : vous demandez que l’État élabore une définition, mais vous proposez la vôtre, d’ailleurs assez bonne. Par ailleurs, vous posez la question des politiques fiscales : je rappelle que nous en avons débattu et que votre assemblée a adopté un amendement tendant à promouvoir le recours aux outils fiscaux. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Si nous rejetons ces amendements, nous ferons un bond en arrière, puisque la définition proposée avait été adoptée à l’unanimité lors de l’examen de la première loi Egalim ; M. Travert s’en souvient certainement. De l’avis général, il existait un vide juridique non en ce qui concerne les Gaec ou les coopératives agricoles – vous m’avez mal compris, monsieur le rapporteur –, mais en ce qui concerne les groupements agricoles territoriaux. Les Cuma, les Civam ou encore la FNGEDA, la Fédération nationale des groupes d’études et de développement agricole, appellent de leurs vœux une définition juridique. Monsieur le ministre, vous semblez disposé à prendre des mesures fiscales et budgétaires : comment les ciblerez-vous en l’absence d’un objet juridique correspondant à l’agriculture de groupe ? C’est pourquoi nous avons bâti une définition, quelque imparfaite qu’elle puisse être. Quant à la mention selon laquelle cette définition relève de la compétence de l’État, elle était nécessaire pour que ces amendements soient considérés comme recevables : il s’agit d’habileté légistique.
    Sur le fond, je suis déçu que nous ne faisions pas droit à ces paysans qui tendent souvent la main à d’autres ruraux pour relever des défis en commun. Il serait largement préférable de les accompagner et de faciliter à tous l’exercice du métier que de destiner les mesures fiscales à quelques privilégiés. Nous n’accueillerons pas demain 200 000 paysans s’ils sont individualistes et entrent en compétition les uns avec les autres. Par une simple définition juridique, il nous est possible de privilégier une forme d’organisation vertueuse.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    La question abordée par M. Potier est intéressante. Ainsi, les aides dont peuvent bénéficier les Cuma varient d’une région à l’autre. Dans ma région, la Nouvelle-Aquitaine, il existe une enclave appartenant à la région Occitanie, où les aides sont plus avantageuses : le siège de la Cuma locale s’y est installé. Il y a donc un problème d’inégalité territoriale. Les Gaec constituent une spécificité française, ce qui, au niveau européen, complique les choses, entre autres l’attribution des aides. Nous devons donc nous montrer prudents en réfléchissant à l’organisation de l’agriculture de groupe, pour éviter que de tels problèmes ne se posent.
    La question mérite une réflexion à long terme, y compris dans sa dimension fiscale. Nous pourrions par exemple l’aborder lors de l’examen d’un projet de loi de finances, dans l’optique de favoriser la structuration d’entreprises visant à mutualiser le matériel ou les savoir-faire. L’idée est bonne, mais je ne suis pas sûr que sa place soit dans le texte qui nous occupe, lequel a pour but de formuler des orientations, des tendances ; je le répète, il serait préférable de la traiter à l’occasion d’un PLF, ou dans le cadre d’une réflexion globale sur l’organisation de l’agriculture de groupe.

    (Les amendements nos 2302 et 2303, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l’amendement no 2465.

    Mme Lisa Belluco

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    Puisque nous avons voté la réintroduction dans le texte d’objectifs relatifs à l’installation et au développement de la SAU en agriculture biologique, nous proposons de préciser à l’alinéa 5 que les fonds mobilisés pourront aussi servir à l’installation en agriculture biologique. Il ne s’agit pas d’exclure les autres types d’installation, ni même de rendre celui-ci prioritaire, mais seulement de faire preuve de cohérence.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Comme vous l’avez rappelé, la commission a introduit à l’article 8 l’objectif de favoriser la transition agroécologique. De plus, nous nous apprêtons à voter un amendement portant article additionnel après l’article 8 qui vise à fixer des objectifs chiffrés relatifs au développement de la SAU en agriculture biologique. L’amendement est donc satisfait. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    (L’amendement no 2465, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2703 de Mme Mathilde Hignet est défendu.

    (L’amendement no 2703, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 1621, 2704, 4207 et 4439.
    La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir l’amendement no 1621.

    M. Loïc Prud’homme

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    Il concerne le portage foncier et son rôle dans l’installation de nouveaux exploitants agricoles. Nous constatons à la fois une diminution de 20 % du nombre de fermes et une augmentation de 25 % de leur taille moyenne, ce qui révèle un problème de concentration. De plus, une ferme sur dix est une société financiarisée, offrant peu de prise à la régulation de l’accès au foncier. Notre proposition, issue d’échanges avec la Fédération nationale des Safer (FNSAFER), consiste donc à redonner des moyens aux Safer pour appuyer la transition de notre modèle et pour inverser la courbe démographique agricole.
    Le portage et le stockage fonciers doivent permettre de proposer des surfaces libres aux porteurs de projet. Cela nécessite un financement public. Or les Safer en manquent : la majeure partie de leurs ressources provient désormais de leurs transactions, le financement public ayant été réduit à la portion congrue. Il importe également de leur transmettre une feuille de route claire, détaillant des objectifs et des critères qui leur permettront de hiérarchiser les projets.
    Au fond, nous en revenons à l’opposition de deux conceptions de l’agriculture. Nous voulons donner des moyens à des structures porteuses d’une mission d’intérêt général, tandis que le texte fait la part belle aux investisseurs privés, animés par des motivations très éloignées de cet intérêt. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Sur les amendements identiques nos 1621, 2704, 4207 et 4439, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 2704.

    Mme Mathilde Hignet

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    Bien que le portage du foncier libère l’investissement nécessaire pour adapter le bâti, diversifier les productions et acquérir du foncier agricole, il serait dangereux de laisser à des investisseurs privés la liberté d’en faire un nouveau marché. Les citoyens ou les entreprises privées peuvent participer à la transition en finançant des associations reconnues d’intérêt général, telles que Terre de liens, qui, en assurant un portage du foncier dépourvu de spéculation financière et en soutenant en particulier des projets agroécologiques, apportent un appui durable aux agriculteurs. Cela vaut mieux que de laisser les terres agricoles aux mains d’investisseurs lambda, non reconnus par l’État.
    Vous reconnaissez les difficultés d’accès aux terres que rencontrent les porteurs de projet. Le Président de la République a fait part en 2022 de sa volonté d’aider les jeunes à s’installer et à lisser sur plusieurs années la charge financière qui en résulte. Pour répondre à cette préoccupation majeure, vous avez prévu 80 millions d’euros sur dix ans, destinés à l’investissement dans des structures de portage publiques ou privées. Cette somme est dérisoire ! D’après le calcul de Terre de liens, elle permettrait d’acheter 1 300 hectares par an, soit 0,1 % des terres agricoles vendues chaque année. Enfin, comme l’a rappelé M. Prud’homme, les Safer, organismes sous la tutelle de l’État, vous alertent également au sujet des dérives du foncier agricole. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir l’amendement no 4207.

    Mme Marie Pochon

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    Pour que la terre se maintienne à un prix accessible aux jeunes agriculteurs, nous devons réguler le foncier et empêcher la spéculation sur les terres agricoles. Il faut donc que les systèmes de portage du foncier soient publics. C’est pourquoi nous proposons de supprimer la mention des investisseurs privés à l’alinéa 5. Il est impensable de prendre en considération des intérêts privés et court-termistes, plus impensable encore d’accorder à de tels investisseurs le bénéfice de fonds publics destinés à soutenir le portage du foncier agricole. Ces fonds doivent servir l’intérêt commun en massifiant l’installation d’agriculteurs et en leur permettant de s’engager dans la transition agroécologique. Nous avons eu en commission, avant de supprimer feu l’article 12, un débat sur les dangers de la financiarisation et de la spéculation s’agissant des terres agricoles : je n’y reviendrai donc pas. Monsieur le ministre, pour nourrir nos concitoyens, il nous faut des paysans, pas des licornes ! (M. Frédéric Maillot applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Barthès, pour soutenir l’amendement no 4439.

    M. Christophe Barthès

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    Cet amendement dû à Hélène Laporte vise à supprimer la mention d’investisseurs privés à l’alinéa 5. En effet, cet alinéa introduit en commission a pour objet d’instaurer un système de portage foncier public servant l’intérêt général. Un tel système est conforme au modèle agricole français, que nous avons choisi après la deuxième guerre mondiale et qui repose sur un tissu de petites exploitations protégées par la puissance publique. Dans un tel cadre, la mention d’investisseurs privés est incongrue. Il est préférable d’acter dès maintenant que l’aide publique à l’accès au foncier relève de l’État et des collectivités territoriales. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Avis défavorable. Monsieur Chassaigne, avant de revenir sur les sovkhozes et les kolkhozes, permettez-moi de rappeler que je suis très favorable au portage public. Ainsi, c’est moi qui ai introduit dans ce projet de loi l’appel aux banques du groupe Caisse des dépôts, à la Banque des territoires et à la Banque publique d’investissement, BPIFrance.
    Public et privé vont ensemble. L’objectif du portage public est de donner à des propriétaires privés la capacité de procéder à un transfert du foncier en garantissant les risques que prennent les banques ou d’autres investisseurs privés pour accompagner le changement de main. Si vous voulez vraiment rater le portage, vous pouvez décider que l’État possède tout et confier à des fonctionnaires la tâche d’exploiter les parcelles. Tel n’est pas du tout notre objectif.
    Des fonds publics seront mobilisés en masse : comme nous l’avons dit hier, nous prévoyons de consacrer à ces transferts 1 à 2 milliards par an au cours des dix prochaines années. L’objectif est similaire à celui du groupement foncier agricole d’investissement (GFAI) du rapporteur général : avec les collectivités et les banques privées, nous voulons conclure des partenariats financiers public-privé afin de permettre le transfert entre les générations. Je sais que les députés qui siègent à gauche de l’hémicycle ne sont pas d’accord ; d’autres le sont. Madame Pochon, vous avez déclaré en substance : « si ce n’est pas public, c’est donc spéculatif ».

    Mme Marie Pochon

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    Non, il y a des coopératives.

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Je le répète, il ne faut pas opposer public et privé, mais les faire travailler ensemble, aller chercher les fonds là où ils sont pour permettre à des jeunes de s’installer. Nous partageons tous cet objectif. La massification d’un fonds de portage, Elan ou autre, sera nécessaire, car nous aurons besoin de fonds publics pour y adosser des financements privés. C’est dans cet esprit que j’ai voulu faire appel aux banques du groupe Caisse des dépôts après avoir discuté avec elles. Que les fonds soient apportés par l’État, les collectivités ou les Safer, ils doivent rester des leviers financiers pour permettre des transmissions de propriétés au cours des dix prochaines années.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Sincèrement, j’ai du mal à comprendre ces amendements : à moins que quelque chose ne m’ait échappé ou que j’aie basculé dans une faille spatio-temporelle, la propriété agricole française est privée. Je vous entends soutenir que, par nature, les investisseurs privés, c’est-à-dire les centaines de milliers de propriétaires privés, seraient court-termistes et ne se soucieraient pas de l’intérêt général. Vous irez leur expliquer ça, compte tenu du statut du fermage. Penser que derrière chaque emploi du mot « privé » se cachent de grands spéculateurs, c’est une drôle de conception des choses. Je le répète, la terre française, les exploitations françaises appartiennent à des fonds privés.

    M. Pascal Lecamp, rapporteur

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    Oui !

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Je ne veux pas vous faire offense, mais simplement rappeler quelle est la réalité. Vous nous dites que l’État doit investir davantage : c’est ce qu’il fait grâce au fonds Entrepreneurs du vivant, qui s’élève à 400 millions d’euros. Vous avez voté en sa faveur – enfin, pas tous, mais disons que vous l’avez fait ; c’est ma bonne action de cette fin de matinée. À la fin du mois de juin, ou début juillet, sera donc déployé un fonds de portage de 400 millions auquel pourront recourir différentes structures, dont les Safer. Néanmoins, compte tenu des enjeux financiers, il sera nécessaire de faire appel à des fonds privés – pardonnez-moi ce gros mot, je ne voudrais offusquer personne ; mais c’est bien ainsi que cela se passera.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Il a raison !

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Si j’étais un peu taquin, je vous adresserais d’ailleurs une question : que feriez-vous du mouvement Terre de liens, qui est de nature privée ? (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Francis Dubois

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    Eh oui, il a raison !

    M. Arnaud Le Gall

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    L’association est d’intérêt général !

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Il y a quelque chose de curieux dans une démarche aboutissant à lui interdire d’investir. Continuez donc comme ça : le dogme finit par tuer les meilleures intentions. Vous n’allez tout de même pas nous proposer un amendement visant à distinguer des méchants les gentils investisseurs privés, dont un décret en Conseil d’État fixerait la liste ?

    M. Arnaud Le Gall

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    Et l’intérêt général ?

    Mme la présidente

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    Seul M. le ministre a la parole.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Le Président de la République et le Gouvernement ont proposé le fonds Entrepreneurs du vivant, qui vise à employer des moyens publics, aux côtés des collectivités locales, pour exercer un effet de levier aux côtés des investisseurs privés.
    Je m’adresse à présent aux députés du groupe Rassemblement national : votre amendement m’étonne. Vous faites comme si les fonds privés n’étaient pas nécessaires, comme si vous ignoriez la structure agricole française : c’est une grave erreur. La puissance publique, celle de l’État et des collectivités locales, ne pourrait accomplir à elle seule ce qui se fait depuis des dizaines d’années et qui repose sur une subtile alchimie entre fonds publics, fonds privés et système de régulation.
    Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable. Je vous garantis que nous courrons très vite à la catastrophe si ces amendements identiques étaient adoptés.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Oui, c’est vrai !

    Mme la présidente

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    J’ai reçu sept demandes de prise de parole. Afin que chacun puisse s’exprimer, je vous propose de ne laisser qu’une minute à chaque orateur : nous aurons ainsi le temps de mettre les amendements aux voix avant de lever la séance. Je vous invite donc à aller droit au but.
    La parole est à M. André Chassaigne, dont je suis certaine qu’il donnera l’exemple.

    M. André Chassaigne

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    Dans son analyse, M. le ministre a oublié le mot « investisseurs ». Nous ne sommes pas opposés au privé. Si un citoyen peut apporter de l’argent par l’intermédiaire d’une organisation participative comme Terre de liens, pourquoi pas ? La Safer avait monté le fonds de portage Élan, mais je crois que le Gouvernement l’a bloqué ensuite.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Non, il n’est pas bloqué !

    M. André Chassaigne

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    Ce fonds offrait la possibilité de faire appel à des banques mutualistes, par exemple – encore une fois, pourquoi pas, si c’est bien encadré ? Dans le cadre de l’économie sociale et solidaire, on peut concevoir une contribution du privé. Le problème réside dans la mention des investisseurs. Pardonnez-moi cette expression triviale : je n’ai jamais vu un investisseur faire l’amour à l’œil ! L’investisseur cherche des revenus ; il va donc se nourrir sur la bête. C’est cela que nous ne voulons pas.

    Mme la présidente

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    Bravo, monsieur Chassaigne, d’avoir respecté le temps imparti ! La parole est à M. Julien Dive.

    M. Julien Dive

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    Nous avons débattu en commission des risques de la financiarisation et de l’accaparement des terres agricoles. Comme la plupart des groupes, nous nous sommes opposés à l’article 12, relatif aux GFAI. Nous en débattrons de nouveau, car le rapporteur général de la commission des finances a déposé l’amendement no 4467 après l’article 12, qui a été jugé recevable.
    Ces amendements identiques s’inscrivent dans le droit fil du débat d’hier, surréaliste par rapport à notre sujet : nous avons passé je ne sais combien d’heures à entendre opposer les formations privées aux formations publiques. Leur logique est la même. Or il ne s’agit pas là d’accaparement foncier, mais d’aide à l’installation. Un agriculteur qui veut s’installer va voir son banquier : la banque est un investisseur privé.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Eh oui !

    M. Julien Dive

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    Les coopératives, représentant les agriculteurs, qui s’engagent pour aider des jeunes à s’installer sont des investisseurs privés. Il n’y a aucune raison de couper la branche sur laquelle sont assis les exploitants.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    Le temps est écoulé, monsieur Dive. La parole est à M. Loïc Prud’homme.

    M. Loïc Prud’homme

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    Nous n’avons pas prétendu que tout le foncier français devait être public. Les Safer réalisent un travail de régulation au moment du remembrement des propriétés : c’est une telle régulation que nous voulons et qui fait d’ailleurs l’objet d’une demande unanime. Par ailleurs, votre argumentation au sujet du mouvement Terre de liens est fallacieuse : il ne s’agit pas d’un investisseur privé, mais d’une structure de portage à but non lucratif. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Julien Dive

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    Structure néanmoins privée !

    M. Loïc Prud’homme

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    Si vous jugez que la rédaction de ces amendements n’est pas assez précise, je vous invite à les sous-amender, car il est trop tard pour que nous puissions le faire.

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Prenez vos responsabilités !

    M. Loïc Prud’homme

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    Nous ne confondons pas les financiers qui ont pour objectif de faire de l’argent à court ou moyen terme avec les structures de portage, qu’il s’agisse d’une association à but non lucratif ou, comme les Safer, d’une société ayant des missions d’intérêt général : il convient de promouvoir celles-ci au lieu de favoriser une spéculation dont nous constatons les effets délétères. Vous l’aviez d’ailleurs reconnu lors de l’examen de la loi Sempastous. Ne nous faites pas dire ce que nous ne pensons pas ; vous avez très bien compris de quoi nous parlons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Non, non !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    En vous écoutant, je me disais que si ces amendements identiques étaient adoptés, l’agriculteur qui voudrait recourir à un crédit vendeur dans le cadre de son retrait d’une exploitation ne pourrait pas le faire, car il deviendrait alors un investisseur privé. Une famille dont l’un des enfants souhaite reprendre l’exploitation et qui l’accompagne financièrement est un ensemble d’investisseurs privés. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Aurélie Trouvé

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    N’importe quoi !

    M. Jean-Paul Mattei

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    Il ne faut pas voir les investisseurs d’une manière manichéenne, en opposant les bons et les méchants. Franchement, c’est beaucoup plus complexe que cela. N’écartons pas les investisseurs privés : on le devient souvent par les hasards de la vie, ce qu’empêcheraient ces amendements.

    M. Arnaud Le Gall

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    Soyez un peu sérieux ! Vous savez très bien qui visent ces amendements !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Grégoire de Fournas.

    M. Grégoire de Fournas

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    Monsieur le ministre, vous avez paru confondre agriculteurs et investisseurs. Je relis le début de l’alinéa 5 : « Afin de favoriser l’installation de nouveaux exploitants agricoles et l’adaptation des exploitations agricoles au changement climatique, l’État se donne comme objectif, aux côtés des collectivités territoriales volontaires ainsi que d’investisseurs privés, d’accroître progressivement la mobilisation de fonds publics au soutien du portage du foncier agricole […]. » L’investisseur est bien dissocié de l’agriculteur ; effectivement, ce n’est pas du tout la même chose. Par ailleurs, monsieur Dive, une banque n’est pas un investisseur : elle prête à un investisseur, mais ne prend pas de parts dans une société.
    Monsieur le ministre, je suis désolé de vous le dire, nous voyons dans cet alinéa le retour du GFAI, qui témoigne d’une volonté très claire de déposséder les agriculteurs de leurs terres, sous prétexte d’un manque de rentabilité économique.

    Mme la présidente

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    Je vous remercie, monsieur de Fournas.

    M. Grégoire de Fournas

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    Nous souhaitons que les agriculteurs soient propriétaires de leur foncier,…

    M. Marc Fesneau, ministre

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    Ce n’est pas le cas actuellement.

    M. Grégoire de Fournas

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    …afin qu’ils puissent, à défaut d’en vivre, se constituer un capital durant leur carrière.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires économiques.

    M. Éric Girardin, rapporteur général de la commission des affaires économiques

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    Premièrement, j’ai entendu M. Potier évoquer le démembrement de la propriété agricole. Comment l’expliquer ? La réponse est simple : la fiscalité est trop forte. J’ai évoqué hier le poids de la fiscalité sur la transmission ; si nous ne réglons pas ce problème, nous continuerons à accélérer ce démembrement.
    Deuxièmement, le ministre a pris les dispositions nécessaires concernant l’installation. Sauf erreur de ma part, il est prévu de consacrer aux projets de cet ordre 2 milliards d’euros de prêts ou de garanties de prêts, auxquels s’ajoutent les 400 millions du fonds Entrepreneurs du vivant.
    Troisièmement, permettez-moi quelques rappels concernant le portage foncier. Dans le cadre du groupement foncier agricole d’épargnants (GFAE), le portage foncier désigne l’acquisition de terres par l’intermédiaire d’un GFA mis à la disposition, dans le cas d’un bail rural à long terme, des porteurs de projets ou des futurs installés. Où est le problème de dissociation entre investisseurs et publics ? C’est le bail qui contrôle en quelque sorte le dispositif.
    Enfin, des garde-fous ont été créés concernant la limitation de la surface et le fait que des personnes physiques pouvaient détenir plus de capital que les personnes publiques. Les articles de droit transposés au GFAE concernaient le GFA lui-même, avec une ouverture aux fonds publics. Pourquoi ? Parce que le mur du foncier n’est pas haut de quelques centaines de millions d’euros, mais de milliards d’euros ! Il va bien falloir y faire face. Il est donc normal d’aller chercher l’argent nécessaire afin de le mettre à disposition des futurs installés. L’engagement porte sur 500 000 exploitants et 400 000 exploitations. Le président Chassaigne l’a dit, nous devons réorganiser et renforcer la régulation, l’encadrement et le contrôle du foncier, afin de clarifier la situation.

    M. Francis Dubois

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    On est bien d’accord !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 1621, 2704, 4207 et 4439.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        98
            Nombre de suffrages exprimés                98
            Majorité absolue                        50
                    Pour l’adoption                55
                    Contre                43

    (Les amendements identiques nos 1621, 2704, 4207 et 4439 sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je vous indique que la présidente de l’Assemblée nationale a reçu de la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement une lettre l’informant que la discussion de la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public était retirée de l’ordre du jour.
    L’examen du texte a déjà duré quarante-six heures et quarante et une minutes. Nous devons encore étudier 1 431 amendements. Au cours de la dernière séance, nous en avons examiné vingt-quatre à l’heure.

    M. Loïc Prud’homme

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    C’est la vitesse d’un tracteur, madame la présidente !

    Mme la présidente

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    À ce rythme, le temps nécessaire à l’achèvement de la discussion est estimé à cinquante-huit heures et trente minutes. Je vous rappelle qu’il nous reste dix-neuf heures de débat.

    M. Loïc Prud’homme

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    La journée de travail d’un agriculteur !

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion du projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à treize heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra