Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF

N° 1972

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 2009.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES,

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2010 (n° 1946)

TOME VIII

SÉCURITÉ

GENDARMERIE NATIONALE

PAR M. Alain MOYNE-BRESSAND,

Député.

——

Voir le numéro : 1967 (annexe n° 41)

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

PREMIÈRE PARTIE : UN BUDGET EN LÉGÈRE HAUSSE, PRÉSERVANT LES MISSIONS DE LA GENDARMERIE ET PRÉPARANT L’AVENIR 7

A. UNE PROGRESSION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX ACTIONS DE POLICE 7

B. UNE RÉPARTITION INTERNE DES DÉPENSES ÉQUILIBRÉE 9

1. Les dépenses de personnel 9

2. Les dépenses de fonctionnement 10

3. Les dépenses d’investissement 15

4. Les dépenses d’intervention 16

C. DES PRIORITÉS CONFORMES AUX ORIENTATIONS DE LA LOPPSI 16

1. La modernisation de la sécurité intérieure 18

2. Une gestion plus efficace 18

3. Un management valorisant les potentiels humains 19

DEUXIÈME PARTIE : DES INDICATEURS DE PERFORMANCE GLOBALEMENT EN PROGRÈS, QU’IL CONVIENDRA DE CONFIRMER 21

A. L’ORDRE ET LA SÉCURITÉ PUBLICS 21

B. LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE 22

C. LA POLICE JUDICIAIRE ET LES CONCOURS À LA JUSTICE 22

D. LES MISSIONS MILITAIRES 23

E. LE COMMANDEMENT, LES RESSOURCES HUMAINES ET LA LOGISTIQUE 23

TROISIEME PARTIE : DES PROBLÈMES D’ÉQUIPEMENT ET DE GESTION, QU’IL VA FALLOIR RÉSOUDRE 25

A. L’IMMOBILIER 25

B. LA MODERNISATION DES BLINDÉS 25

C. LE RENOUVELLEMENT DES HÉLICOPTÈRES 26

D. LE FINANCEMENT DES OPEX 26

E. LES GARDES STATIQUES ET LES TRANSFÈREMENTS 27

F. L’AMÉLIORATION DE LA GESTION 29

TRAVAUX DE LA COMMISSION 31

I —  AUDITION DU GÉNÉRAL ROLAND GILLES, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE 31

II —  EXAMEN DES CRÉDITS 46

INTRODUCTION

Le projet de budget proposé pour 2010 pour la gendarmerie nationale s’inscrit dans un triple contexte.

D’abord, un contexte juridique. Trois textes majeurs ont été adoptés ou proposés cette année touchant à l’action de la gendarmerie. En premier lieu, la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale (1), consacrant le rattachement de cette force au ministère de l’intérieur. En deuxième lieu, la loi de programmation militaire du 29 juillet 2009 (2), fixant les orientations de notre politique de défense et de sécurité nationale jusqu’en 2014. Enfin, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI) – déposé à l’Assemblée nationale en mai et examiné par la Commission de la défense le 22 juillet dernier sur l’avis de M. Marc Joulaud (3) – traçant les principales orientations de la politique de sécurité intérieure pour les années 2009 à 2013.

Deuxièmement, un contexte social marqué par une dégradation des chiffres de la délinquance et de la criminalité, comme l’a récemment rappelé le ministre de l’intérieur. Ainsi, selon l’observatoire national de la délinquance, les atteintes volontaires à l’intégrité physique ont, par exemple, augmenté de 4,3 % de juillet 2008 à juillet 2009 et les escroqueries et infractions économiques et financières de 3,8 % au cours de la même période.

Troisièmement, avec la crise économique et la nécessaire maîtrise des dépenses publiques, le contexte budgétaire reste toujours aussi tendu.

Ce dernier facteur explique largement la relative stabilité du budget proposé pour la mission « Sécurité » et, en son sein, du programme 152 consacré à la gendarmerie nationale (47 % des crédits de la mission). Avec 7,64 milliards d’euros demandés pour 2010, contre 7,59 milliards en 2009, les crédits de paiement enregistrent une augmentation de 0,6 %. Les autorisations d’engagement, qui s’élèvent à 7,75 milliards d’euros, progressent de 2 %.

Dans l’ensemble, ce projet de budget appelle trois constats principaux :

– les crédits proposés préservent les missions de la gendarmerie, en lui permettant de préparer l’avenir ;

– les indicateurs de performance du programme sont globalement en progrès, mais devront être confirmés ;

– des problèmes d’équipement et de gestion demeurent cependant, auxquels il conviendra d’apporter une solution.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées avant le 22 septembre 2009 pour lui laisser le temps nécessaire à la préparation de son rapport. À Cette date, seules 6 réponses sur 40 avaient été reçues, ce qu’il ne peut que déplorer.

Au 10 octobre 2009, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, 23 réponses lui étaient parvenues, soit un taux de 58 %. Cela n’est pas acceptable.

Le rapporteur tient néanmoins à remercier les services de la direction générale de la gendarmerie nationale, en particulier le bureau du budget, pour leur parfaite coopération.

PREMIÈRE PARTIE : UN BUDGET EN LÉGÈRE HAUSSE, PRÉSERVANT LES MISSIONS DE LA GENDARMERIE
ET PRÉPARANT L’AVENIR

L’examen des crédits par action révèle une augmentation des dotations consacrées aux missions de police, tandis que celles consacrées aux missions militaires et à la gestion baissent légèrement. L’analyse par type de dépense montre une répartition équilibrée, notamment entre le fonctionnement courant et l’équipement. Enfin, les priorités retenues inscrivent d’ores et déjà ce budget dans le cadre de la future LOPPSI et permettent, ce faisant, de préparer l’avenir.

A. UNE PROGRESSION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX ACTIONS DE POLICE

La part relative de chacune des actions du programme en crédits de paiement reste globalement inchangée dans le projet de loi de finances pour 2010 par rapport à 2009. L’action 1 (ordre et sécurité publics) mobilise 39,4 % des crédits et l’action 4 (commandement, ressources humaines et logistique) 29,1 %. Viennent ensuite l’action 3 (missions de police judiciaire et concours à la justice) avec 19,7 %, l’action 2 (sécurité routière) avec 10,3 % et l’action 5 (exercice des missions militaires) avec 1,5 %.

Répartition des crédits de paiement demandés pour 2010



(ordre et sécurité publics) (39,4 %)

(sécurité routière) (10,3 %)

(missions de police judiciaire et concours à la justice) (19,7 %)

(commandement, ressources humaines et logistique) (29,1 %)

(exercice des missions militaires) (1,5 %)

Source : projet de loi de finances pour 2010, projet annuel de performances, mission « Sécurité ».

Comme le montre le tableau ci-après, ce sont les crédits consacrés à l’ordre et la sécurité publics qui connaissent la plus nette augmentation (+ 1,9 %), avec un peu plus de 3 milliards d’euros de crédits de paiement et 56 millions d’euros supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2009.

Récapitulation des crédits par action pour 2009 et 2010

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme

et de l’action

Ouvertes en LFI

pour 2009

Demandées

pour 2010

Ouverts en LFI

pour 2009

Demandés

pour 2010

152

Gendarmerie nationale

7 597,86

7 753,79

7 594,94

7 640,99

01

Ordre et sécurité publics

2 951,83

3 007,27

2 951,83

3 007,27

02

Sécurité routière

782, 13

791,16

782,13

791,16

03

Missions de police judiciaire et

concours à la justice

1 479,72

1 506,76

1 479,72

1 506,76

04

Commandement, ressources

humaines et logistique

2 265,49

2 332,44

2 262,58

2 219,64

05

Exercice des missions militaires

118,68

116,16

118,68

116,16

Source : projet de loi de finances pour 2010, projet annuel de performances, mission « Sécurité ».

Les crédits relatifs aux missions de police judiciaire et aux concours à la justice (1,5 milliard d’euros), avec 27 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2009 et une hausse de 1,8 %, enregistrent le deuxième plus net accroissement.

Les crédits concernant la sécurité routière (791 millions d’euros) augmentent également, plus légèrement, à un rythme de 1,2 %.

Ces évolutions traduisent en termes budgétaires les quatre objectifs stratégiques du Gouvernement en matière de sécurité pour 2010, à savoir :

– faire baisser le nombre de crimes et délits constatés ;

– consolider les progrès enregistrés dans la résolution de ceux-ci ;

– prolonger la baisse de la délinquance de proximité ;

– renforcer l’efficacité de la lutte contre l’insécurité routière, « en recherchant la réduction significative du nombre de tués sur les routes, notamment les jeunes et les deux roues ».

En revanche, les crédits de gestion (commandement, ressources humaines et logistique), avec 2,2 milliards de crédits de paiement prévus, baissent de 43 millions d’euros, soit – 1,9 % par rapport à 2009. Il en est de même de ceux relatifs à l’exercice des missions militaires qui, avec 116 millions d’euros, diminuent de 2,1 %.

Pour toutes les actions, le montant des autorisations d’engagement prévues est identique à celui des crédits de paiement, à l’exception de l’action 4, où elles passent de 2,27 à 2,33 milliards d’euros, soit un accroissement de 3 %.

B. UNE RÉPARTITION INTERNE DES DÉPENSES ÉQUILIBRÉE

1. Les dépenses de personnel

L’essentiel des dépenses concerne les dépenses de personnel (titre 2) qui, avec 6,37 milliards de crédits de paiement demandés pour 2010, rassemblent 83,4 % des crédits du programme et connaissent une augmentation de 76 millions d’euros par rapport à 2009, soit + 1,2 %.

Récapitulation des crédits par titre pour 2009 et 2010

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme

et du titre

Ouvertes en LFI

pour 2009

Demandées

pour 2010

Ouverts en LFI

pour 2009

Demandés

pour 2010

152 /

Gendarmerie nationale

7 597,86

7 753,79

7 594,94

7 640,99

Titre 2.

Dépenses de personnel

6 291,40

6 366,86

6 291,40

6 366,86

Autres dépenses :

1 306,45

1 386,93

1 303,54

1 274,12

Titre 3.

Dépenses de fonctionnement

986,55

1 104,59

990,01

1 085,98

Titre 5.

Dépenses d’investissement

304,90

267,33

297,28

172,15

Titre 6.

Dépenses d’intervention

15,00

15,00

16,24

15,99

Source : projet de loi de finances pour 2010, projet annuel de performances, mission « Sécurité ».

Cette augmentation est imputable pour une large part à l’évolution des pensions (43 millions d’euros), ce poste représentant plus de 42 % des dépenses de personnel.

Le solde de cet accroissement (33 millions d’euros) résulte de la combinaison de deux séries de mesures : la réduction des effectifs et l’augmentation des crédits de rémunération et charges sociales.

• Le plafond d’emploi passe en effet de 99 509 à 98 155 emplois équivalents temps plein travaillé (ETPT) de 2009 à 2010. Il se traduit par une réduction de 1 354 ETPT, qui est le solde de la suppression de 1 844 ETPT de militaires et de la création de 490 ETPT de civils et ouvriers d’État.

Ce solde résulte de deux facteurs :

– la suppression de 1 303 ETPT, en application de la révision générale des politiques publiques et du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ;

– divers transferts, dont 16 ETPT au profit des services du Premier ministre, 28 vers le programme 138 (emploi outre-mer) et 7 vers l’agence de reconversion de la défense de la mission « Défense ».

Parallèlement, le recentrage des gendarmes sur leur « cœur de métier » entraînera la transformation de 600 postes d’officiers et de sous-officiers de gendarmerie en 50 postes d’officiers du corps technique et administratif, 50 postes de sous-officiers du corps de soutien technique et administratif et 500 postes de civils recrutés, formés et gérés par le ministère de l’intérieur.

Par ailleurs, la poursuite du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) rénové conduira à réduire de 334 le nombre de sous-officiers et à augmenter dans la même proportion celui des officiers.

Il convient enfin de noter que, selon les prévisions, le nombre de réservistes devrait rester stable à 27 000 personnes, ce qui rend l’objectif de 40 000 réservistes d’ici 2012 de plus en plus difficile à atteindre.

• L’augmentation des rémunérations et charges sociales (RCS) est liée principalement à trois éléments :

– les mesures salariales générales (augmentation de la valeur du point d’indice de la fonction publique) (24,3 millions d’euros) ;

– les mesures catégorielles (46,5 millions d’euros), comportant : le financement du PAGRE (20 millions), la nouvelle grille indiciaire de la défense (10,5 millions) et la revalorisation de l’indemnité pour sujétion spéciale de police des sous-officiers de gendarmerie (ISSP) (16 millions) ;

– le glissement vieillesse-technicité (GVT) (9,3 millions d’euros).

2. Les dépenses de fonctionnement

Les dépenses de fonctionnement (titre 3), qui représentent 14,2 % des crédits, sont prévues à 1,086 milliard d’euros, soit une forte augmentation par rapport à 2009, de 96 millions d’euros ou + 9,7 %.

Il convient de distinguer, au sein de ces dépenses, celles relatives au fonctionnement courant et les autres, consacrées pour une large part à de l’équipement et participant à ce titre aux investissements.

Les dépenses de fonctionnement courant, prévues à hauteur de 972,2 millions d’euros de crédits de paiement pour 2010, enregistrent une hausse de 47 millions par rapport à 2009, soit + 5,1 %.

Présentation des crédits par titre à périmètre constant pour 2009 et 2010

 

PLF 2010

LFI 2009

Évolution

 

Plafond d’emploi (ETP)

98 155 (95 453 militaires et 2 702 civils et ouvriers d’État)

99 509 (97 297 militaires et 2 212 civils et ouvriers d’État)

- 1 354 (- 1 844 militaires et + 490 civils et ouvriers d’État)

(en millions d’euros)

AE

CP

AE

CP

Évolution AE

Évolution CP

Titre 2

Titre 2 hors pensions

3 665,7

3 665,7

3 633,4

3 633,4

0,9 %

0,9 %

Pensions

2 701,2

2 701,2

2 657,9

2 657,9

1,6 %

1,6 %

Total Titre 2

6 367

6 367

6 291

6 291

1,2 %

1,2 %

Titre 3

Fonctionnement courant

972,2

972,2

925,2

925,1

5,1 %

5,1 %

Hors fonctionnement courant (HFC)

132,4

113,8

77,7

107,6

70,3 %

5,8 %

Total Titre 3

1 105

1 086

1 003

1 033

10,1 %

5,2 %

Titre 5

Systèmes d’information et de communication

62,1

50,1

47,2

68,9

31,5 %

- 27,3 %

Équipements et mobilité

12,6

51,9

78,2

47,0

- 83,9 %

10,5 %

Infrastructure hors AOT (constructions en MOI/MOP et maintenance lourde)

70,0

65,4

131,2

136,3

- 46,6 %

- 52,0 %

Constructions en AOT/LOA

122,7

4,8

32,0

2,4

283,4 %

101,6 %

Total Titre 5

267

172

289

255

- 7,4 %

- 32,4 %

Titre 6

Subventions (construction de casernes locatives – décret de 1993)

15

16

15

16

0,0 %

- 1,6 %

Total hors Titre 2

1 387

1 274

1 306

1 304

6,2 %

- 2,3 %

Total programme 152

7 754

7 641

7 598

7 595

2,1 %

0,6 %

NB : Pour plus de lisibilité, le programme 152 a harmonisé en 2010 la présentation du renouvellement annuel de ses flux d’équipement en les plaçant tous sous la rubrique du titre 3 hors fonctionnement courant (HFC). Le périmètre du titre 3 HFC comprenait en 2009 le maintien en condition opérationnelle des hélicoptères et des systèmes d’information et de communication, l’habillement, les munitions, des petits matériels et la maintenance courante immobilière. Pour 2010, il est élargi – par soustraction au titre 5 – aux terminaux informatiques, aux véhicules de brigade et police de la route, à l’armement, aux matériels de protection, aux matériels techniques et au mobilier. Pour une comparaison à périmètre constant, la présentation par titre de la LFI 2009 a été retraitée.

Source : direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).


Cet accroissement résulte essentiellement de mesures de resoclage 
(4) (20 millions) et de transferts au profit de France Domaine pour prendre en compte l’augmentation des loyers budgétaires (16 millions). A périmètre constant, l’effort budgétaire est de 31 millions, destinés principalement à couvrir la hausse du coût des loyers (5) et à réduire l’insuffisance structurelle du fonctionnement courant.

Les autres dépenses du titre 3 (hors fonctionnement courant – HFC), avec un montant prévu de 113,8 millions d’euros de crédits de paiement pour 2010, augmentent de 6,2 millions, soit + 5,8 %. Les autorisations d’engagement, avec 132,4 millions, connaissent surtout un très fort accroissement (+ 70,3 %).

Elles couvrent notamment le maintien en condition opérationnelle des hélicoptères et des systèmes d’information et de communication, l’habillement, les munitions, les petits matériels ainsi que la maintenance courante immobilière. Ce périmètre est élargi en 2010 aux terminaux informatiques, aux véhicules de brigade et de police de la route, à l’armement, aux matériels de protection, aux matériels techniques et au mobilier.

Elles permettront également de commander de nombreux équipements (cf. encadré ci-après), notamment la nouvelle tenue de maintien de l’ordre (nouvelle tenue motocycliste, équipements de protection individuels, armement et munitions à létalité réduite), le renouvellement de plus de 11 000 ordinateurs et de plus de 1 400 véhicules, ainsi que l’acquisition de nouveaux matériels techniques (cinémomètres, éthylomètres embarqués, projecteurs aveuglants…).

Principaux programmes d’équipements prévus en 2010

LOPPSI :

§ 400 pistolets à impulsions électriques (PIE) et 2 000 munitions : 0,55 M€

§ 550 lanceurs de 40 mm et 2 000 munitions : 0,54 M€

§ 2 400 nouvelles tenues motocyclistes : 4,4 M€

§ 8 007 nouvelles tenues de maintien de l'ordre : 4,5 M€

§ 1 véhicule de transport d'effluents contaminés : 0,15 M€ *

§ 2 875 ensembles de protections individuelles pare-coups : 1 M€

§ 400 cinémomètres laser à mesure dans l'axe : 1,2 M€

§ 430 éthylomètres embarqués pour 1,3 M€

Renouvellement des équipements existants :

§ 9 300 micro-ordinateurs fixes, 1 900 ordinateurs portables et 4 100 imprimantes : 6 M€

§ 1 485 véhicules de brigade et de police de la route : 33,7 M€

§ 330 motocyclettes : 5,5 M€ *

§ 159 véhicules divers : 4,6 M€ *

§ 3 000 gilets pare-balles à port discret et 2 000 gilets pare-balles à port apparent : 3,7 M€

§ 500 boucliers de protection : 0,3 M€

§ 2 000 bâtons télescopiques de protection : 0,1 M€

§ 75 flashballs et 18 850 munitions : 0,2 M€

§ 1 670 grenades de désencerclement : 0,09 M€

§ 1 500 casques de maintien de l'ordre 3e génération : 0,5 M€

§ 1 embarcation de plus de 11 mètres : 0,4 M€ *

NB : ces équipements sont financés sur le titre 3, à l’exception de ceux comportant un astérisque (*), qui le sont sur le titre 5 (M€ = millions d’euros, en AE).

Principaux programmes informatiques et de télécommunication prévus en 2010

LOPPSI :

§ Vidéoprotection : 4,5 M€

§ Lecture automatisée des plaques d’immatriculation (LAPI) : 2,5 M€

§ Télé-services internet au profit des usagers : 2 M€

§ Équipements d’interception de communication et de suivi : 1 M€

§ Dématérialisation des contraventions des 4 premières classes : 1,5 M€ *

§ ANACRIM-NG (anciennement nommé-« Périclès ») : 2,7 M€

§ Cartes à puce d’identification : 0,75 M€

§ Captation et renvoi vidéo par hélicoptères : 1 M€

Renouvellement des équipements existants :

§ Projet ATHENA : 0,2 M€

§ Plan global de secours (PGS) : 4,6 M€

§ MCO des systèmes d’information : 8,5 M€ (dont 3,2 M€ en LOPPSI 2) *

§ Renouvellement des terminaux radio : 9,1 M€

NB : les programmes financés sur le titre 3 sont signalés par un astérisque (*), les autres l’étant sur le titre 5 (M€ = millions d’euros, en AE).

Source : direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).

À côté de ces « petits » investissements, il convient d’ajouter ceux, plus gros, figurant au titre 5.

3. Les dépenses d’investissement

Les crédits d’investissement (titre 5) connaissent apparemment une forte diminution. Les crédits de paiement prévus pour 2010 s’élèvent à 172 millions d’euros (2,3 % du total), contre 255 millions en 2009, soit – 32,4 % ; les autorisations d’engagement, avec 267 millions, baissent de 7,4 %.

Cette diminution est compensée par l’augmentation enregistrée au titre 3, du fait notamment du changement de périmètre.

Les crédits inscrits au titre 5 financent principalement les gros équipements et les moyens mobiles divers (véhicules lourds, hélicoptères, motocyclettes, moyens nautiques…), les programmes des systèmes d’information et de communication, dont la vidéoprojection prévue par la LOPPSI, et les opérations immobilières domaniales.

Pour les systèmes d’information et de communication, la baisse proposée des crédits de paiement (- 27,3 %) est compensée par la hausse des autorisations d’engagement (+ 31 %).

En matière d’infrastructures, les principaux programmes prévus sont les suivants.

Principaux programmes d’infrastructure prévus en 2010

• Constructions domaniales (20 millions d’euros d’AE en titre 5) : mise en chantier de 94 unités-logements et livraison de 559 unités-logements ;

• Constructions locatives (baux emphytéotiques administratifs (BEA), subventions aux collectivités locales en titre 6 (dépenses d’intervention) et montages privés) : mise en chantier de 1 850 unités-logements et livraison de 1 748 unités-logements ;

• Opérations de maintenance lourde (50 millions d’euros d’AE en titre 5) : réalisation d’opérations de mise aux normes d’emprises domaniales (électricité, amiante, ascenseurs, distribution d’eau potable dans les DOM-COM) et amélioration des conditions de travail et de vie des gendarmes (équipements sanitaires, de chauffage et de confort, isolation).

Source : direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).

Comme on le voit, les constructions domaniales prévues restent limitées (20 millions d’euros d’autorisations d’engagement), tandis que les modes de construction sous financement innovant de type AOT / LOA (autorisation d’occupation temporaire / location avec option d’achat) sont, en dotation, beaucoup plus soutenus (122,7 millions d’autorisations d’engagement) (6).

Dans l’ensemble, les autorisations d’engagement prévues pour 2010 aux titres 3 et 5 augmentent de 80 millions (+ 6,2 %), ce qui devrait permettre, selon la direction générale de la gendarmerie nationale, une reprise de la politique d’investissement l’an prochain après une année 2009 très contrainte.

4. Les dépenses d’intervention

Les dépenses d’intervention prévues (0,2 % des crédits totaux) restent à peu près stables, avec environ 16 millions d’euros en crédits de paiement et 15 millions d’euros d’autorisations d’engagement.

Ces crédits, destinés à subventionner les collectivités territoriales finançant la construction de casernes locatives, permettront de maintenir le rythme des opérations locatives engagées jusqu’ici.

C. DES PRIORITÉS CONFORMES AUX ORIENTATIONS DE LA LOPPSI

Dans l’ensemble, la gendarmerie consacrera en 2010, au titre de la future LOPPSI, toujours en cours d’examen à l’Assemblée, 252 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 111 millions de crédits de paiement, dévolus au développement technologique (respectivement 62 et 48 millions), à l’immobilier (140 et 13 millions) et au fonctionnement courant (50 millions).

Programmation budgétaire des crédits de la gendarmerie entre 2009 et 2013 (hors dépenses de personnel)

(en millions d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Total 2009-2013

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Saut technologique (1)

47

20

62

48

55

57

68

61

62

85

294

271

Force de souveraineté outre-mer (FSOM)  (2)

77

         

40

64

28

73

145

137

Immobilier
(constructions nouvelles)  (3)

141

3

140

13

114

25

55

13

19

48

469

102

Resoclage du fonctionnement courant (4)

30

30

50

50

50

50

50

50

50

50

230

230

Besoins complémentaires en termes d’investissement

           

12

12

12

12

24

24

TOTAL LOPPSI 2

295

53

252

111

219

132

225

200

171

268

1 162

764

(1) Améliorations technologiques prévues (dématérialisation des procédures judiciaires, visioconférence, vidéoprojection, déploiement des capacités biométriques…).

(2) Reprise partielle de la mission des armées en outre-mer à partir de 2012.

(3) Maîtrise d’œuvre interne et privée ou avec financements innovants.

(4) Dotation supplémentaire visant à compenser la sous-évaluation structurelle des crédits de fonctionnement.

Source : DGGN.

Le projet de budget est d’ailleurs présenté comme préparant « la montée en puissance » de la LOPPSI. Ce faisant, il permet de préparer l’avenir. Au-delà des objectifs stratégiques tendant à réduire la délinquance et la criminalité, trois orientations principales sont privilégiées, recouvrant celles prévues pour la LOPPSI : la modernisation de la sécurité intérieure ; une gestion plus efficace ; un management valorisant les potentiels humains.

1. La modernisation de la sécurité intérieure

Cette modernisation repose sur trois ensembles de mesures :

– le développement de nouvelles technologies (ou « saut » technologique), telles que la visioconférence, la vidéoprotection, la vidéo embarquée, la lecture automatique des plaques d’immatriculation (LAPI) ou la dématérialisation des contraventions ;

– l’amélioration de l’équipement et de la protection des gendarmes. De nouveaux moyens sont prévus à cet effet, tels que des lunettes de protection, des gilets tactiques ou des tenues renforcées pour les motocyclistes ;

– l’accroissement des capacités d’investigation grâce à la rénovation des outils de la police technique et scientifique. Sont prévus notamment : la modernisation du fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) ; celle des moyens d’exploitation des scènes de crime ; le déploiement de nouvelles applications d’investigation ; l’interopérabilité des fichiers européens ; la réorganisation des organismes de police technique et scientifique ; ou le renforcement des moyens d’analyse et d’interception des réseaux de communication.

2. Une gestion plus efficace

Quatre axes principaux sont retenus :

– poursuivre les mutualisations avec la police nationale, en particulier en matière de logistique, de systèmes d’information et de communication, de fichiers de renseignement, de formations spécialisées (plongée sous-marine, cynophilie, secourisme…), de moyens aériens ou d’armement (7) ;

– adapter le déploiement des forces aux réalités du terrain. La clarification de la répartition des compétences avec la police nationale et le développement des coopérations entre les deux forces sont préconisés. La gendarmerie développera le concept de « police des territoires », reposant sur « le contrôle des espaces et des flux qui la traversent ». L’effort de sécurité routière sera poursuivi en direction du réseau secondaire ;

– recentrer les gendarmes sur leur « cœur de métier ». Ainsi, la réduction des missions indues de la gendarmerie (gardes statiques ou motorisées, protections individuelles, transfèrements) sera confortée. Par ailleurs, chaque fois que possible, des personnels administratifs, techniques et scientifiques seront substitués aux gendarmes pour permettre à ceux-ci de se concentrer sur la lutte contre la criminalité et la délinquance ;

– rationaliser les structures immobilières. Dans ce cadre, la fonction immobilière sera intégrée au sein du ministère et concernera à la fois la police et la gendarmerie nationales. La remise à niveau et la maintenance en commun des bâtiments des deux forces des régions Auvergne et Limousin seront expérimentées dans le cadre d’un partenariat public-privé. Pour la gendarmerie, l’année 2010 sera marquée par la poursuite des travaux préparatoires du futur pôle national de police judiciaire de Pontoise, du futur siège de la direction générale à Issy-les-Moulineaux et du futur pôle de commandement régional de Lyon-Sathonay.

3. Un management valorisant les potentiels humains

Trois priorités sont retenues à cet effet :

– la poursuite de la mise en œuvre du PAGRE, la rénovation des parcours de carrière et le renforcement de l’encadrement. Des revalorisations indemnitaires sont par ailleurs prévues, notamment s’agissant de l’ISSP ;

– l’importance accordée aux personnels de soutien. Leur nombre sera augmenté afin de permettre aux gendarmes de se recentrer sur leur « cœur de métier » ;

– la réaffirmation de la culture de la performance et de la réactivité opérationnelle, au travers de primes de performance et de résultat exceptionnel et d’un recours plus large à la réserve opérationnelle.

Si ces priorités vont dans le bon sens, on peut regretter que l’inscription du projet de LOPPSI à l’ordre du jour des assemblées ait été reportée. L’adoption de ce texte avant le présent projet de loi de finances eût été plus cohérent – la période couverte par la LOPPSI portant sur 2009 à 2013 – et eût permis de tenir compte dans ce projet des débats parlementaires sur les orientations de cette loi de programmation.

DEUXIÈME PARTIE : DES INDICATEURS DE PERFORMANCE GLOBALEMENT EN PROGRÈS, QU’IL CONVIENDRA DE CONFIRMER

Les indicateurs de performance du programme sont dans l’ensemble en progrès, quelle que soit l’action considérée. Mais, pour chacune d’elles, notamment en matière de lutte contre la délinquance et l’insécurité routière, les prévisions devront être confirmées.

A. L’ORDRE ET LA SÉCURITÉ PUBLICS

S’agissant de l’objectif de réduction de la délinquance, les prévisions pour 2009 enregistrent une baisse de 2 % du nombre de crimes et délits constatés en zone gendarmerie par rapport à l’année précédente. En 2010, une nouvelle baisse de 2 % est prévue, avec 995 000 crimes et délits contre 1 016 000 en 2009 et plus de 1 036 000 constatés en 2008.

Ce nombre tend également à baisser concernant la délinquance de proximité. Il est prévu de passer de 405 000 actes constatés en 2008 à près de 385 000 en 2009 et moins de 374 000 en 2010.

Ces tendances devront néanmoins être confirmées. Par ailleurs, ces indicateurs gagneraient à être complétés de manière à apprécier plus finement l’évolution des différentes formes de délinquance et de criminalité (atteintes aux personnes, aux biens, délinquance économique, cybercriminalité…).

Le taux d’engagement des effectifs sur le terrain tend également à progresser, passant de moins de 68 % en 2007 à plus de 68 % en 2008, puis, selon les prévisions, à 70 % en 2009 et à plus de 70 % en 2010.

En revanche, le taux d’interventions réalisées dans un délai supérieur à deux fois le délai moyen – soit deux fois quinze minutes – ne semble guère s’améliorer, avec 2,8 % en 2007, 2,7 % en 2008 et des prévisions inférieures à 3 % en 2009 et 2010.

Quant à l’indice d’efficacité de l’emploi de la gendarmerie mobile en sécurité générale, qui mesure le nombre de personnes remises à un officier de police judiciaire par rapport au nombre d’heures des gendarmes mobiles, son évolution est plus contrastée : situé à 23,3 % en 2007, il a chuté à 20,1 % en 2008, mais devrait, selon les prévisions, remonter à 24 % en 2009, voire au-delà en 2010.

B. LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

L’évolution du nombre des accidents, des tués et des blessés en zone gendarmerie est encourageante.

Le nombre global d’accidents serait en baisse continue depuis 2007, passant de 23 000 à 20 700 en 2008 (- 10 %), puis, selon les prévisions, à moins de 19 700 en 2009 (- 5 %) et moins de 18 300 en 2010 (- 7 %).

Il en est de même du nombre de tués, qui s’établissait à 3 539 en 2007, 3 281 en 2008 (- 7,3 %) et passerait, selon les prévisions, à environ 3 050 en 2009 (- 7 %) et moins de 2 800 en 2010.

Le nombre de blessés diminuerait également : après 31 501 enregistrés en 2007 et 28 123 en 2008 (- 10,7 %), les prévisions tablent sur un peu plus de 26 400 en 2009 et moins de 25 000 en 2010.

Si cette évolution d’ensemble est très positive, ces données devront également être confirmées. En septembre dernier, en effet, pour le troisième mois consécutif, le nombre de personnes tuées sur les routes a augmenté, affichant une hausse de 17,7 %.

C. LA POLICE JUDICIAIRE ET LES CONCOURS À LA JUSTICE

Les résultats en termes de police judiciaire sont plus contrastés.

Le taux global d’élucidation des crimes et délits en zone gendarmerie s’améliore à peine, passant de 41,1 % en 2007 à 41,8 % en 2008, avec un résultat prévu inchangé en 2009 et de 42,2 % en 2010.

En matière de vols (y compris les recels), ce taux, qui était de 16 % en 2007 et 17,2 % en 2008, passerait à 17,5 en 2009 et 18 % en 2010. Ce résultat n’est pas très satisfaisant, même s’il est vrai qu’eu égard au nombre d’actes constatés dans ce domaine il est difficile de le porter à un niveau élevé.

S’agissant des escroqueries et infractions économiques et financières, le taux, après avoir baissé de 78,7 % en 2007 à 69,3 % en 2008, remonterait à environ 75 % en 2009 et 2010.

Le taux d’élucidation des atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes ne s’améliore pas, avec une prévision de 80 % en 2009 et 2010, identique au résultat de 2007.

En revanche, ce taux progresserait pour les autres infractions, avec une prévision de 82 % en 2009 et 2010, contre moins de 74 % en 2008.

Il en est de même pour la délinquance de proximité, où ce taux s’établirait à 18 % en 2010, contre 17,1 % en 2008 et 15,8 % en 2007. Il n’en reste pas moins insuffisant.

Si, dans l’ensemble, la tendance est plutôt favorable en matière de police judiciaire, elle devra être confortée dans les faits dans les années à venir. Il existe par ailleurs encore des marges substantielles de progrès, que le développement technologique des outils programmé en la matière devrait faciliter.

D. LES MISSIONS MILITAIRES

Les indicateurs proposés dans ce domaine ne permettent guère d’évaluer l’efficacité des missions militaires de la gendarmerie, qui représentent au demeurant une faible part de son activité (environ 5 %).

On peut observer que le nombre de jours consacrés aux opérations extérieures (OPEX) tend à s’accroître, avec une prévision de 250 000 pour 2009 et 2010, contre moins de 180 000 en 2008. Cet indicateur témoigne de l’extension des capacités de projection de la gendarmerie à l’étranger, mais il ne mesure pas les résultats atteints.

E. LE COMMANDEMENT, LES RESSOURCES HUMAINES ET LA LOGISTIQUE

Les trois indicateurs tendant à mesurer l’optimisation de l’emploi des ressources devraient progresser selon les prévisions.

Le taux de disponibilité des véhicules devrait passer de moins de 92 % en 2008 à plus de 95 % en 2009 et 2010.

Le taux de vacance moyen des logements, qui était de 3,7 % en 2007 et de 3,3 % en 2008, devrait d’établir à moins de 3 % cette année et l’an prochain.

Quant au coût global des loyers hors casernes, il baisserait, selon les prévisions, de 5 % en 2009 et 7 % en 2010.

Ces tendances devront là encore être confirmées. Leur interprétation doit par ailleurs être nuancée, ces indicateurs ne donnant qu’une idée partielle de l’optimisation de l’emploi des ressources.

D’autres indicateurs gagneraient de fait à compléter ceux figurant dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances, notamment en matière de rénovation immobilière ou de gestion des ressources humaines.

TROISIEME PARTIE : DES PROBLÈMES D’ÉQUIPEMENT
ET DE GESTION, QU’IL VA FALLOIR RÉSOUDRE

Malgré un projet de budget équilibré et des indicateurs de performance encourageants, certains problèmes demeurent, liés à l’immobilier, à la modernisation des blindés, au renouvellement des hélicoptères, au financement des OPEX, aux gardes statiques et transfèrements. La revue du programme 152 effectuée récemment par la Cour des comptes laisse par ailleurs entrevoir des marges d’amélioration dans la gestion.

A. L’IMMOBILIER

Le rapporteur a rappelé l’an dernier les inquiétudes relatives à l’état du casernement. Entre un quart et un tiers des casernes, selon les cas, sont en mauvais état et la contrainte budgétaire est trop forte pour permettre un réel progrès.

Le niveau des crédits consacrés à la construction immobilière sera de l’ordre de 39 millions d’euros d’autorisations d’engagement en moyenne annuelle de 2009 à 2013 au titre de la LOPPSI, contre 122 millions d’euros durant la période 2003-2008. Or, le besoin de financement est estimé par la gendarmerie à 160 millions d’euros par an.

Il en résulte un glissement permanent de la programmation des opérations immobilières domaniales. Le ralentissement du renouvellement du parc domanial est compensé par un effort sans précédent du parc locatif, grâce notamment à l’engagement des collectivités territoriales au travers du dispositif de bail emphytéotique administratif (BEA). Mais cette voie conduit à renchérir le coût global des loyers dont le montant prévu pour 2010 s’élève à 432 millions d’euros, contre 420 millions en 2009.

La question du financement de l’immobilier de la gendarmerie sur le moyen-long terme reste donc posée, comme l’a souligné le directeur général de la gendarmerie nationale, le général Roland Gilles, lors de son audition par la Commission.

B. LA MODERNISATION DES BLINDÉS

La modernisation des véhicules blindés est un autre problème structurel déjà évoqué par le rapporteur.

La capacité blindée dans la conduite des missions de maintien de l’ordre est une spécificité de la gendarmerie nationale. Or, le renouvellement des véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG), dont beaucoup tendent à être obsolètes, avait conduit à lancer, à partir de 2005, un programme d’acquisition pour un format de 92 véhicules (contre 132 à l’origine). En raison des contraintes budgétaires, le marché de 39,5 millions d’euros, qui devait être notifié à Renault Trucks Défense en 2008, a été abandonné.

La gendarmerie a dès lors décidé de réduire son parc à 82 VBRG et de limiter ses frais de soutien. Elle est parvenue, en utilisant les pièces détachées provenant des engins réformés, à faire passer le taux de disponibilité des blindés de 71,5 % en 2007 à 96,5 % en 2008.

Mais le financement du renouvellement du parc – qui devient de plus en plus nécessaire – n’est toujours pas budgété, ni dans ce projet de budget, ni dans le budget triennal, ni dans le projet de LOPPSI.

C. LE RENOUVELLEMENT DES HÉLICOPTÈRES

Le parc des hélicoptères de la gendarmerie – utilisé également par la police nationale, qui dispose, au titre d’accords entre les deux forces, d’un droit de tirage de 1 300 heures par an – se composera en 2010, après la livraison de deux EC 135, de 53 appareils : 15 EC 145, 12 EC 135 et 26 Ecureuils.

Or, comme l’a souligné le rapporteur l’an dernier, les Ecureuils, dotés de monoturbines, ne sont pas conformes aux règles de navigation européennes imposant des biturbines pour le survol des zones urbanisées. Des dérogations ont pu jusqu’ici leur être accordées, mais pourraient à tout moment être supprimées. Par ailleurs, ces appareils vieillissent et ne disposent pas des mêmes capacités de surveillance que les autres, qui comportent notamment des caméras embarquées.

Les contraintes budgétaires ont conduit en 2008 à ne pas notifier la commande prévue de 25 EC 135 (202 millions d’euros), qui avaient vocation à remplacer les Ecureuils.

Aucune solution budgétaire n’a pour l’heure été apportée au problème de financement du remplacement de ces appareils.

D. LE FINANCEMENT DES OPEX

La gendarmerie mobilise pour les OPEX 432 gendarmes, dont 72 officiers et 360 sous-officiers. (8)

Le coût de ces OPEX est intégré dans le budget de la gendarmerie depuis 2004. A ce titre, elle bénéficie depuis 2007 d’un financement de 15 millions d’euros, dont 11 millions pour les dépenses de personnel.

Si ce montant permet généralement de couvrir les besoins de fonctionnement, il est structurellement insuffisant. Chaque année le surcoût constaté est de l’ordre de 20 à 28 millions d’euros, comme le montre le tableau ci-après.

Les surcoûts des OPEX (2003 à 2008)

 

Masse salariale

(Titre 2)

Fonctionnement courant et transport

(Titre 3)

Alimentation

(Titre 3)

Investissement

(Titre 5)

Total

tous titres

2003

18,9

3,8

1,4

0,9

25,0

2004

23

3,6

1,5

0,5

28,4

2005

20

3,4

1,3

0,3

25,2

2006

19,7

2,9

1,5

0,1

24,2

2007

17,9

2,2

1,3

0,1

21,4

2008

16,2

2,2

1,2

0

19,6

Source : direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).

Ce surcoût concerne principalement la masse salariale (16,2 millions sur 19,6 en 2008).

Pour la seule mission en Afghanistan, qui mobilise quelque 150 gendarmes destinés à la formation de la police afghane, le surcoût prévu est de 15 millions d’euros en 2009 et 12 millions en 2010.

Il serait donc souhaitable à l’avenir de mieux évaluer le coût prévisible de ces OPEX, d’intégrer celui-ci en totalité dans le budget de la gendarmerie et, en cas de dépassement lié à des opérations imprévues, de les financer sur un fonds interministériel, afin de ne pas grever le budget de cette force.

E. LES GARDES STATIQUES ET LES TRANSFÈREMENTS

De nombreux gendarmes sont occupés chaque année à des gardes statiques de lieux ou monuments ainsi qu’à des opérations de transfèrements éloignées de leur « coeur » de métier.

La gendarmerie a consacré l’an dernier 2 091 ETP à des gardes statiques au profit de différentes autorités, à Paris et en province (Présidence de la République, Assemblée nationale, Sénat, mais aussi emprises de certaines ambassades (278 ETP), Palais de justice de Paris (540 ETP) ou résidences privées d’anciens présidents de la République (21 ETP)). Ainsi, par exemple, 15 gendarmes à temps plein sont mobilisés pour garder la résidence privée de M. Valéry Giscard d’Estaing à Authon et 6 pour veiller à la sécurité de celle de M. Jacques Chirac à Bity. Y a-t-il lieu de conserver de telles mesures au moment où la gendarmerie doit redéployer ses forces au profit de la sécurité publique ?

Dans l’esprit de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI) du 29 août 2002 (9), ces gardes devraient être limitées au strict nécessaire.

Le dispositif actuel fait l’objet d’une révision en profondeur, selon deux modalités :

– les missions légitimes, confirmées par un texte de valeur normative, continueraient d’être exercées par la gendarmerie. Un audit de sécurité sera chaque fois réalisé pour étudier les réductions d’effectifs possibles ;

– les prestations considérées comme externes au « champ missionnel de la gendarmerie nationale »  feront l’objet soit d’une suppression, soit d’une imputation financière à leur bénéficiaire.

Ces mesures vont dans le bon sens et devraient conduire à atteindre l’objectif recherché. Le nombre de gendarmes prévu pour ces missions en 2009 s’établit d’ailleurs à 1 956 ETP, soit une baisse de 6,5 % par rapport à 2008.

Quant aux transfèrements, ils mobilisent quotidiennement plus d’un millier de gendarmes (10). Beaucoup d’entre eux pourraient à l’évidence être réduits par un recours plus large à des techniques telles que la visioconférence ou la dématérialisation des procédures. Celles-ci pourraient en outre être simplifiées, comme l’a montré le rapporteur dans son précédent avis budgétaire. (11)

Le conseil de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007 a décidé, d’une part, d’accroître le « potentiel opérationnel des forces de sécurité, par allègement des tâches administratives et des mission périphériques » et, d’autre part, de mettre en place un système de facturation des transferts.

Le bilan d’étape réalisé au premier semestre de cette année est encourageant : le nombre de mouvements judiciaires aurait été réduit de 5 % en un an, entraînant une diminution proportionnelle du nombre de services et d’heures consacrées par la gendarmerie à ces tâches, de respectivement 4 % et 6 %. Les transfèrements administratifs auraient pour leur part été réduits de 20 %.

Ces efforts doivent être poursuivis. Par ailleurs, un mécanisme de compensation financière doit être mis en œuvre, ce qui, au vu des informations communiquées au rapporteur, n’est pour l’instant pas le cas.

Les économies engendrées pourront ainsi participer à combler les besoins de financement en termes d’investissements évoqués plus haut.

F. L’AMÉLIORATION DE LA GESTION

D’autres sources d’économies possibles résident dans l’amélioration de la gestion.

Dans un référé adressé notamment au ministre de l’intérieur le 18 juin dernier (12), relatif à la revue du programme 152, la Cour des comptes a évoqué à cet égard plusieurs pistes. Il convient d’en rappeler les principales :

– la déconcentration de la gestion du programme 152, qui fait l’objet d’un seul budget opérationnel de programme (BOP) ;

– la rationalisation de la gestion immobilière (insuffisante sincérité de la dotation budgétaire en matière d’investissements, meilleure adéquation entre contrainte opérationnelle et logement concédé (13), nombre élevé d’agents affectés au recouvrement des charges locatives, complexité des procédures, manque chronique de 50 millions d’euros en trésorerie…) ;

– une meilleure exploitation des perspectives ouvertes par la mutualisation et la coopération avec la police nationale – tout en préservant l’identité des deux forces –, notamment pour les télécommunications, les centres de recherche et les équipements spécialisés ;

– la maîtrise du système d’habillement de la gendarmerie (contrôle insuffisant de la distribution des effets d’uniforme, primes d’habillement partiellement utilisées à d’autres fins, chaîne d’habillement du centre administratif au Blanc sous-employée).

Il est souhaitable que le ministre de l’intérieur indique les suites concrètes qu’il entend donner à ces préconisations et les économies qu’elles pourraient engendrer.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I —  AUDITION DU GÉNÉRAL ROLAND GILLES, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu le général Roland Gilles, directeur général de la gendarmerie nationale, sur le projet de loi de finances pour 2010 (n° 1946) au cours de sa réunion du mercredi 21 octobre 2009.

M. le président Guy Teissier. Nous sommes heureux de recevoir de nouveau le général Roland Gilles, directeur général de la gendarmerie nationale.

La gendarmerie connaît cette année des transformations majeures : loi de programmation militaire ; loi relative à la gendarmerie promulguée le 3 août dernier.

Afin de marquer notre attachement au caractère militaire de la gendarmerie et à sa capacité de projection, nous visiterons prochainement le groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN).

Par ailleurs, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI) est en cours d’examen, même si le Gouvernement doit en modifier certains aspects.

Le projet de loi de finances s’inscrit donc dans ce cadre rénové. Vous nous indiquerez, mon général, le détail des crédits alloués à la gendarmerie au sein de la mission Sécurité. L’examen de cette mission en commission élargie aura lieu le 2 novembre à 21 heures.

Je souhaiterais également que vous fassiez le point sur « les éléments relatifs à l'obtention d'une parité globale » entre gendarmerie et police, pour reprendre les termes de la loi du 3 août.

M. le général Roland Gilles, directeur général de la gendarmerie nationale. Je vous remercie pour votre accueil. Les gendarmes ont été très sensibles aux prises de position des parlementaires et à l’attachement qu’ils ont tous manifesté à l’égard de la gendarmerie lors des débats qui ont conduit à l’adoption de la loi du 3 août.

Les années 2009 et 2010 sont en effet des années de mutation, tant en raison des nouvelles dispositions législatives que des évolutions propres à la gendarmerie. En ancrant celle-ci au ministère de l’intérieur, la loi lui donne toute sa place dans l’architecture de la sécurité intérieure. Après la promulgation, nous nous sommes engagés dans un travail technique portant sur deux grands domaines.

Premièrement, la connexion de notre administration centrale au sein du ministère. Il est important de s’assurer d’un bon positionnement, conforme à ce qu’a décidé la représentation nationale en terme d’équilibre. C’est un des aspects de la « parité globale ». Ce travail s’opère sans difficulté particulière.

Deuxièmement, les missions de la gendarmerie telles que le Parlement les a confirmées dans l’article 1er de la loi. Sous l’égide du cabinet du ministre de l’intérieur, j’étudie avec le directeur général de la police nationale la complémentarité et l’équilibre de nos participations respectives dans l’ensemble des structures partagées : renseignement, exercice de la police judiciaire, action internationale, gestion des forces mobiles. Lors de réunions thématiques, nous faisons le point sur le rôle des uns et des autres et nous recherchons la meilleure coordination possible. Ce sont des questions sensibles, tant chaque maison possède sa culture propre. Il nous appartient d’être constructifs pour l’avenir en veillant à la place de chacun.

Dans le même temps, nous nous efforçons de tirer le plus d’économies possible de ce rattachement, principalement en matière de soutien et de formation. La mutualisation s’accélère. Plus de trente marchés communs auront été signés à la fin de 2009. Les soutiens croisés sont en phase de développement : ateliers automobiles, aménagement des véhicules spécifiques dans l’établissement central logistique de la police nationale de Limoges. En matière de formation, la gendarmerie accueillera notamment les plongeurs et les motocyclistes de la police nationale. La flotte aérienne de la gendarmerie est mise à la disposition de la police pour la gestion des grandes agglomérations. Nous nous engageons également dans un partenariat public-privé mutualisé tendant à confier à un opérateur privé, pour une durée de 20 à 30 ans, la modernisation et la maintenance de l’ensemble du parc immobilier domanial des régions Auvergne et Limousin.

Il existe néanmoins des limites à la démarche, notamment en terme de formation initiale. Comme vous l’avez souhaité, nous veillons au respect et au maintien de l’identité des uns et des autres.

Un mot sur l’engagement de la gendarmerie en Afghanistan. Au 1er décembre, 150 gendarmes seront présents dans ce pays – il y en a déjà une cinquantaine actuellement. Le Président de la République leur a assigné deux missions. La première est la formation, dans un camp sécurisé de Mazar-e-Charif, dans le Nord-Est – en attendant, le cas échéant, de rejoindre Kaboul –, de la police afghane d’intervention, l’ANCOP, qui est par certains aspects l’équivalent de notre gendarmerie mobile et compte plusieurs milliers de policiers. La seconde, le tutorat (POMLT : police operationnal mentoring and liaison team) de quatre commissariats de police dans les provinces de Kapissa et de Surobi – des équipes inséparables de trente gendarmes aideront ces commissariats à la conception et à la conduite des missions de police sur le terrain, tout en assurant, bien sûr, leur propre sécurité. Grâce au concours des armées, ces 120 gendarmes bénéficient d’une formation et d’un équipement identiques à ceux de leurs camarades chasseurs alpins, légionnaires ou marsouins. L’armée de terre, en particulier, nous a cédé douze véhicules de l’avant blindé dont nous avons encore renforcé la protection.

Nous envoyons non des gendarmes, mais des soldats gendarmes qui seront capables de réagir à une embuscade de Talibans, de déclencher si nécessaire un appui tactique aérien ou de procéder à une évacuation sanitaire. Ils seront à la pointe du déploiement de nos armées sur le terrain. Cette mission revêt une valeur très identitaire pour la gendarmerie, à l’heure où l’intégration au ministère de l’intérieur incite certains à affirmer qu’il n’y a guère de différence entre le gendarme et le policier.

Votre visite à Satory sera pour moi l’occasion de vous présenter cette mission en détail.

M. le président Guy Teissier. Quelle en sera la durée ?

M. le général Roland Gilles. Six mois. Je précise que je n’ai pas fait appel au volontariat. Les gendarmes sont des militaires et nous avons besoin sur place d’unités dont la cohésion est forte. J’ai donc pris la décision de désigner deux escadrons de gendarmerie mobile, qui forment un noyau dur, auquel nous agrégeons certaines autres compétences. Ces escadrons viennent de la région Nord et de la région parisienne, les suivants, au printemps, viendront de Bretagne. Nous prenons également soin de l’accompagnement psychologique des familles.

J’en viens au budget pour 2010. Celui-ci s’inscrit dans la continuité d’un budget 2009 marqué par la volonté de maîtrise des dépenses publiques. La gendarmerie participe pleinement à cet effort collectif.

Le plafond d’emplois prévu sera de 98 155 équivalents temps plein (ETP), soit une baisse de 1 354 ETP : 1 303 au titre de l’effort relatif à la maîtrise de la masse salariale de l’État dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et 51 au titre de transferts techniques au sein du ministère de l’intérieur.

Dans ce cadre, nous poursuivrons la démarche consistant à recentrer les gendarmes sur leur cœur de métier. Jusqu’en 1997, la gendarmerie était monolithique : tous les emplois étaient exercés par des gendarmes. Au terme du plan de transformation des postes, nous compterons 12 000 personnels non-gendarmes affectés aux fonctions administratives et de soutien, répartis à égalité entre les personnels civils et les militaires de soutien. En effet, dans la mesure où il est logé et bénéficie de l’indemnité de sujétion spéciale de police (ISSP), le gendarme coûte plus cher qu’un non-gendarme. Il est donc naturel de poursuivre ce mouvement, qui s’effectuera en 2010 à hauteur de 600 transformations d’emploi d’officier et de sous-officier.

Cela étant, les crédits de masse salariale augmentent en 2010, en raison à la fois de l’hypothèse retenue d’accroissement de 0,5 % du point d’indice de la fonction publique et de la mise en œuvre de mesures catégorielles parmi lesquelles :

– le plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées, financé à hauteur de 20 millions d’euros ;

– le financement de la nouvelle grille indiciaire validée à la fin de 2007, assuré à hauteur de 10,5 millions d’euros ;

– la revalorisation de l’ISSP – soit 16 millions d’euros –, non prévue dans le budget triennal mais qui participe de la parité globale.

Les dotations de la réserve opérationnelle sont maintenues à 41 millions d’euros. La réserve est un élément fort de lien avec la nation. Son intervention en soutien aux gendarmes d’active nous permet notamment de gérer les rassemblements de personnes et les manifestations particulières dans les départements.

Le budget des OPEX est provisionné à hauteur de 11 millions d’euros. Notre engagement en Afghanistan imposera certainement un traitement en gestion.

En fonctionnement, hors effets des loyers budgétaires liés à l’intégration progressive du parc domanial de la gendarmerie à France Domaine, le projet de loi de finances (PLF) est abondé de 31 millions d’euros par rapport à 2009. La gendarmerie bénéficie notamment, au titre de la LOPPSI, d’un abondement supplémentaire de 20 millions d’euros, en complément d’un premier rebasage de 30 millions en 2009. Cet effort permettra essentiellement de couvrir l’augmentation des dépenses de loyers, de réduire l’insuffisance structurelle du fonctionnement courant et d’assurer des missions nouvelles comme celles concernant l’outre-mer ou l’étranger.

Le renouvellement annuel des flux d’équipement est désormais présenté sous la rubrique des crédits de titre 3 hors fonctionnement courant, conformément à la nomenclature du ministère de l’intérieur. À périmètre constant, avec 132 millions d’euros contre 77 millions en 2009, notre capacité d’engagement se trouve presque doublée. Après une année difficile, nous retrouvons des possibilités d’investissement plus importantes.

Les crédits de titre 5 comprennent les gros équipements et les moyens mobiles divers – véhicules lourds, hélicoptères, motocyclettes ou encore moyens nautiques –, ainsi que les opérations immobilières domaniales.

Sur ce dernier point, les possibilités budgétaires restent réduites en 2010. Nous concentrerons nos efforts sur la construction des locaux de service et techniques du groupement de gendarmerie du Val-d’Oise et des espaces mutualisés du futur pôle de police judiciaire de la gendarmerie à Pontoise, qui regroupera l’institut de recherches criminelles de la gendarmerie et son service technique de recherches judiciaires et de documentation.

Les crédits affectés à la réhabilitation du parc passent de 28 à 50 millions d’euros.

Enfin, les dotations de titre 6 (subventions aux collectivités locales pour les constructions) restent dans la continuité de 2009.

Si l’on considère le périmètre élargi des investissements de la gendarmerie, mais en excluant les opérations immobilières sous AOT (autorisation d’occupation temporaire) et les moyens consacrés à la reprise du dispositif de souveraineté outre-mer, les capacités d’engagement de la gendarmerie s’accroissent de 20 millions d’euros en 2010, passant de 272 à 292 millions en autorisations d’engagement.

Nous commanderons par exemple 1 400 véhicules, 9 000 ordinateurs, 300 motos, 5 000 gilets pare-balles, 1 500 casques, 2 000 bâtons de protection, tout en maintenant à leur haut niveau nos systèmes d’information et de communication.

La LOPPSI permet d’identifier, parmi les crédits votés annuellement pour la performance de la sécurité intérieure, 62 millions d’euros de matériels procurant une avance technologique. Nous prévoyons de développer la vidéo-protection à hauteur de 4,5 millions d’euros et nous consacrerons 2,7 millions d’euros aux logiciels de lutte contre la délinquance sérielle, 2,5 millions au développement des lecteurs automatisés de plaques d’immatriculation, 2 millions d’euros aux services Internet offerts aux citoyens – la gendarmerie est sans doute l’une des premières administrations à assurer la gestion immédiate de la réception des messages électroniques – et 1 million d’euros à la captation et au renvoi vidéo par hélicoptère.

En conclusion, le budget pour 2010 traduit notre souci de maîtrise de la dépense tout en marquant la reprise de certains investissements.

M. le président Guy Teissier. J’ai le plaisir de vous annoncer qu’un des administrateurs de notre commission vient d’être élevé au rang et grade de lieutenant-colonel de gendarmerie.

M. le général Roland Gilles. La réserve citoyenne de la gendarmerie a une importance particulière à un moment où certaines évolutions nous sont imposées. Elle nous permet de ne pas rester enfermés dans nos réflexions, de garder le contact avec la population et les élus.

M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis. Le renouvellement du parc des blindés n'est, sauf erreur, toujours pas budgété, ni dans le PLF pour 2010, ni dans le budget triennal, ni dans le projet de LOPPSI : comment et à quelle échéance pourra-t-il être financé ? Cette situation comporte-t-elle un risque pour le maintien de l'ordre et de la sécurité publics ?

Je souhaiterais également savoir si les systèmes de radio de la police et de la gendarmerie sont compatibles.

Qu'en est-il du remplacement des hélicoptères Écureuil, qui sont vieillissants et ne disposent pas des biturbines imposées par la réglementation européenne pour le survol des zones urbanisées ?

Par ailleurs, les transfèrements judiciaires et administratifs mobilisent quotidiennement plus de 1 000 gendarmes à temps plein qui pourraient être mieux employés sur le terrain. On a constaté des améliorations ; est-il possible de faire encore des progrès ?

Enfin, dans un référé du 18 juin dernier adressé au ministre de l'intérieur, la Cour des comptes a proposé plusieurs pistes d'amélioration de la gestion de la gendarmerie. Pourriez-vous les détailler ?

M. le général Roland Gilles. La gendarmerie disposait d’un parc de 132 VBRG (véhicules blindés à roues de la gendarmerie), aujourd’hui trentenaire. Il reste 82 véhicules en état de marche, ce qui est suffisant, pendant quelques années encore, pour répondre à nos missions en métropole, en Corse, dans les départements d’outre-mer et en OPEX – au Kosovo par exemple. J’estime que nous pouvons assurer nos missions actuelles avec un volume de 70 à 75 engins blindés opérationnels. Nous visons, pour le renouvellement du parc, le chiffre de 90. J’insiste sur la nécessité de programmer ce renouvellement.

Les systèmes radio de la police et de la gendarmerie sont différents, les bandes de fréquence ne sont pas les mêmes : il n’y a donc pas de connexion sans intervention extérieure. Cela dit, nous disposons pour les besoins opérationnels de valises d’interconnexion entre les deux réseaux. Au moment du renouvellement du dispositif, nous travaillerons bien entendu à un système totalement compatible, mais il n’y a pas péril pour ce qui est de l’aspect opérationnel quotidien.

Les hélicoptères légers monoturbine Écureuil arrivent en effet à un âge avancé. Après une première commande ferme d’une tranche de 12 hélicoptères EC 135, une commande conditionnelle d’une tranche de 25 de ces mêmes appareils est envisagée. Toutefois, s’agissant de cette dernière, le contrat n’a pu être passé, compte tenu du montant des crédits d’investissement annoncés dans le PLF. Nous sommes en discussion avec le constructeur pour préserver une possibilité d’acquisition. Quoi qu’il en soit, les Écureuils accomplissent leur mission, avec cependant quelques limites, puisqu’ils ne sont pas conformes à la norme européenne relative au survol des agglomérations. Nous sommes à même d’assurer leur maintien en condition opérationnelle, bien que cela coûte un peu plus cher.

Par ailleurs, les missions de souveraineté outre-mer se traduisent de facto par l’accroissement de la flotte d’hélicoptères. Des autorisations d’engagement ont déjà été budgétées en 2009 pour l’acquisition d’appareils légers. Nous poursuivons notre réflexion pour optimiser cette dépense, à la lumière des opérations de gestion de l’ordre public dans les départements d’outre-mer au printemps dernier, où nous avons pu, avec des hélicoptères légers EC 145, assurer notre projection de forces en divers lieux sans faire appel à des hélicoptères de manœuvre. Ces derniers appareils étant plus coûteux, peut-être l’achat d’un nombre plus grand d’appareils légers est-il préférable.

Comme vous l’avez dit, monsieur le rapporteur pour avis, les opérations de transfèrement occupent 1 000 équivalents temps plein de gendarme par an. Cette tâche n’est pas indue mais elle ne fait pas partie du cœur de notre métier. Nous en avons déjà réduit la charge de 4,5 % (en heures-gendarmes) au cours du premier semestre 2009 et les juridictions se donnent comme objectif une baisse annuelle de 5 %.

M. Christian Ménard. En matière de répression de la piraterie maritime, il existe souvent une rupture de la chaîne juridique entre le moment où le pirate est arrêté et celui où il est transféré. Les avocats se saisissent facilement de cette faille pour obtenir le relâchement. Le projet de loi visant à renforcer les prérogatives juridiques des commandants de vaisseau, que nous discuterons prochainement, ne réglera pas tout. Ne faudrait-il pas étendre la présence à bord de gendarmes, qui sont officiers de police judiciaire, à l’instar de ce qui se pratique en matière de pêche australe ou sur des vaisseaux comme l’Osiris ? La marine nationale est quelque peu réticente. En revanche, tous les gendarmes que j’ai interrogés le souhaiteraient.

M. Michel Voisin. Vu l’importance des frais de transfèrement, ne serait-il pas plus judicieux que le magistrat se déplace, et non les deux gendarmes et le détenu ? Souvent, il s’agit d’une simple notification de mise en examen.

M. le général Roland Gilles. Pour ce qui est de la piraterie maritime, je suis en discussion avec le chef d’état-major des armées et le chef d’état-major de la marine. Je n’ai cessé de confirmer la disponibilité de la gendarmerie pour assurer une présence sur les bâtiments. Il est vrai que chaque maison a sa culture propre. Pour moi, l’important est que chacun apporte sa pierre dans son domaine d’excellence.

Dans l’esprit de la RGPP, monsieur Voisin, le déplacement du magistrat semble opportun. La solution est néanmoins la généralisation de la visioconférence, à l’exception des cas où les magistrats estiment que la présence physique de la personne est nécessaire et apporte une plus-value réelle. Cette transformation technique suppose des moyens pour doter les établissements pénitentiaires et les palais de justice, mais aussi une modification des habitudes.

M. Christophe Guilloteau. Dans le département du Rhône, le projet de redéploiement de la police et de la gendarmerie préparé par le ministère de l’intérieur touche plusieurs brigades de gendarmerie, dont trois dans ma circonscription, à Saint-Genis-Laval, Tassin et Francheville. Dans cette dernière commune, la construction d’une nouvelle caserne n’est pas encore achevée que l’on parle déjà de fermeture ! Le coût de cette construction apparaît-il dans votre budget au titre des dotations du titre 6 ? Les élus, très attachés à la présence de la gendarmerie dans ces zones périurbaines et rurales, se sentent très démunis.

M. Philippe Folliot. Il a été question de réaliser des schémas établissant des types d’engagement différents pour les gendarmes mobiles et les CRS. Êtes-vous satisfait des conditions d’engagement actuelles ? Estimez-vous que l’équité est respectée ?

Où en est-on dans le redéploiement des escadrons ? Combien d’entre eux seront-ils touchés ?

M. le général Roland Gilles. J’ai suggéré au ministre de l’intérieur que la réflexion gouvernementale en cours sur le concept de « police d’agglomération » s’étende jusqu’à la notion de « police des territoires ». Cela semble politiquement recevable et techniquement nécessaire, et M. Hortefeux en a volontiers convenu.

Les zones urbaines de Lyon, Lille et Marseille font l’objet d’un travail visant à améliorer la cohérence des forces, dans la lignée de ce qui s’est fait à Paris. Lors d’un récent déplacement à Lyon, le ministre de l’intérieur, interrogé à ce sujet, a indiqué que rien ne se ferait sans une concertation approfondie avec les élus. Il est néanmoins vrai que les médias ont mentionné neuf communes de l’agglomération lyonnaise et que, dans certaines d’entre elles, on a lancé ces dernières années des projets immobiliers. La première pierre de la caserne de Francheville a été posée le 20 juin.

M. Christophe Guilloteau. Une caserne toute neuve, de 4 millions d’euros !

M. le général Roland Gilles. Selon tous les témoignages qui me parviennent, la gendarmerie remplit sa mission dans ces zones périurbaines. En même temps, je ne nie pas que la recherche de cohérence a une justification. Dans la région lilloise, la zone de compétence de la police d’agglomération correspond globalement aux caractéristiques de la ville. C’est moins évident dans les agglomérations lyonnaise et marseillaise. Cela dit, rien n’est décidé pour l’heure. Les positions des élus seront écoutées.

Quoi qu’il en soit, l’amélioration de la coordination entre zones de compétence est pour nous un chantier permanent : il y a bien entendu la coordination opérationnelle – échange de renseignements, planification d’opérations concertées entre les deux zones ou à la jonction des deux zones –, mais aussi la question de la couverture territoriale, sur laquelle les élus ont leur mot à dire.

Je suis très attentif, monsieur Folliot, à l’équilibre et à l’équité des conditions d’emploi des CRS et des gendarmes mobiles. Le statut militaire ne doit pas être le prétexte à un allongement de la durée de présence sur le terrain. J’ai donné pour consigne aux commandants de groupements opérationnels de veiller – sans pour autant nier nos capacités particulières – à ce qu’il n’y ait pas de différenciation excessive de l’engagement des uns et des autres.

Une réflexion est en cours sur la réduction du nombre d’unités mobiles – 123 actuellement – pour tenir compte de la diminution du plafond d’emploi. Dans le cadre de la RGPP, il a été décidé que la gendarmerie abandonnerait, entre 2009 et 2011, sa mission de gestion des centres de rétention administrative, qui occupe l’équivalent de 8 escadrons de gendarmerie mobile. La suppression de 7 autres escadrons est à l’étude, soit un total de 15. Il ne s’agit pas, à proprement parler, d’une taille dans les effectifs puisqu’il est envisagé depuis 2008 de restituer 60 postes par escadron – l’effectif d’un escadron est de 110 à 112 – et de redéployer 50 autres postes dans les départements les plus touchés par la criminalité. En d’autres termes, près de la moitié des suppressions est susceptible de contribuer à la territorialisation des effectifs.

On dénombre aujourd'hui 25 départements soumis à une forte pression démographique et à une forte augmentation de la criminalité : le sillon rhodanien, la ceinture méditerranéenne, les régions toulousaine, bordelaise, nantaise, quelques départements de l’Est et les départements de la Grande Couronne. Ces départements bénéficient aujourd'hui d’escadrons de sécurisation. La future territorialisation ne fera que confirmer ce renforcement tout en le rendant moins coûteux.

Je le répète, le maillage territorial de la gendarmerie, qui est une composante essentielle de notre identité, ne fait l’objet d’aucun projet de modification.

M. Damien Meslot. Un rapport remis dans le cadre de la RGPP fait état de la possibilité de supprimer jusqu’à la moitié des brigades de gendarmerie. Or, ce qui fait la force de la gendarmerie est la proximité et le maillage territorial. Derrière les « regroupements », les « redéploiements » au nom d’une « meilleure efficacité », nous craignons que ce ne soit la suppression pure et simple de nombreuses brigades qui se profile.

M. Yves Fromion. Lors d’une précédente audition, mon général, je vous avais posé une question similaire et vous m’aviez répondu qu’il n’y aurait pas de suppression sans l’accord des élus sur le terrain. J’observe que le message n’est pas encore tout à fait passé et que la machine continue de tourner, même si l’on peut espérer des jours meilleurs.

En matière d’immobilier, l’État a laissé se dégrader les casernes dont il est propriétaire au point que certaines sont quasiment inhabitables. Il faut trouver une solution car, d’une part, on force les gendarmes et leurs familles à vivre dans des conditions indécentes et, d’autre part, on prend prétexte du très mauvais état des casernes pour fermer des brigades !

M. le général Roland Gilles. Le document que vous évoquez, monsieur Meslot, est un document de travail. Il n’a jamais fait l’objet de quelque validation que ce soit. Je confirme qu’il n’existe aucun plan de suppression de brigades territoriales et que nous n’avons nullement l’intention d’infléchir ce qui constitue notre identité, notre force et notre philosophie : le maillage territorial et le contact avec la population.

Pour autant, je ne renie pas le terme d’« ajustements », qui ne signifie rien d’autre que la prise en compte d’évolutions locales. Il y a aussi des créations de brigades. Ce sont les préfets qui sont chargés de la réflexion sur ces ajustements. Consigne leur est donnée de débattre avec les élus d’éventuels projets. Il m’arrive de signer des arrêtés de suppression de brigade, mais c’est au terme d’une démarche de discussion avec les élus.

Cela dit, le système n’est viable que si l’immobilier suit. Le parc est à 40 % domanial et à 60 % propriété des collectivités territoriales (conseils généraux, communes…) ou, parfois, de bailleurs privés. Autant les collectivités territoriales entretiennent bien le parc locatif, autant l’État n’a pas su ou pas pu le faire, si bien que nous rencontrons des problèmes pour quelques brigades territoriales et pour plusieurs escadrons de gendarmerie mobile et groupements de gendarmerie départementale, qui vivent dans des locaux anciens et insuffisamment rénovés.

Entre 2009 et 2013, les crédits consacrés à la construction immobilière devraient avoisiner 40 millions d’euros en autorisations d’engagement, alors que le besoin est supérieur à 100 millions.

Dans les dernières années, nous avons essayé de diversifier les modalités de construction. Nous avons notamment fait appel au bail emphytéotique administratif (BEA) ramené à une période de trente ans, ce qui se traduit, en 2009, par la mise en chantier de 2 210 unités-logement et par la livraison de 2 578 de ces unités. En 2010, nous prévoyons la mise en chantier de 1 840 unités et la livraison de 2 300 unités. Cela se traduit mécaniquement par une hausse de notre ligne de loyers, qui s’élève à 420 millions d’euros : le BEA coûte environ 30 % plus cher que le dispositif du décret de 1993, mais les investissements ont permis de mettre à la disposition des gendarmes des logements et des locaux de service en bon état. Nous prévoyons que cette ligne atteindra environ 500 millions d’euros d’ici 2020, mais cela doit être mis en regard 50 millions d’euros que nous dépensons annuellement pour la maintenance du parc immobilier.

M. Patrick Beaudouin. Pourriez-vous préciser la politique que vous entendez mener pour revenir à la mission initiale de contact avec la population ?

Le ministre de l’intérieur a demandé la constitution de cellules anticambriolages. Quelle est la participation de la gendarmerie à ce dispositif ?

Mme Françoise Olivier-Coupeau. Les avantages de la mutualisation ne me sont pas apparus tout à fait évidents. La réparation des véhicules était déjà mutualisée avant la loi. Les gendarmes assurent la formation, fournissent des hélicoptères aux policiers ; bref, on ne voit pas, pour l’instant, l’intérêt pour la gendarmerie.

Vous avez parlé de « parité globale ». Pourtant, l’Assemblée avait voté un amendement qui visait à substituer à cette expression celle de « dualité globale » et qui avait recueilli l’avis favorable de la ministre, Mme Alliot-Marie. En effet, il ne s’agit en aucun cas d’établir une égalité de statut entre gendarmes et policiers, mais de s’assurer qu’il n’y a pas d’inégalité de traitement.

M. le général Roland Gilles. La police d’agglomération répond à une recherche de cohérence sur les grandes plaques urbaines, soit en assurant une coordination, soit en modifiant la couverture territoriale par échange de communes. Il arrive que la police nationale ait en charge de toutes petites circonscriptions, y compris des chefs-lieux de moins de 15 000 habitants. Il faut réfléchir à la façon d’accroître dans la durée les échanges territoriaux. Le travail est engagé : dans les années 2003-2004, la gendarmerie a repris 41 circonscriptions de police.

Cela dit, la mise en place de la police des territoires passe, selon nous, par la recherche d’autres cohérences tenant compte des évolutions de la démographie et de la criminalité. Souvent, la limite entre deux départements n’a de réalité qu’administrative : pour le reste, c’est le même bassin de vie. On peut donc songer à des processus d’habilitation permettant à des gendarmes d’une communauté de brigades de bénéficier de la qualité d’officier de police judiciaire dans le département voisin. Dans certaines régions (Centre, Haute-Normandie, Basse-Normandie), les nécessités opérationnelles ont déjà conduit les gendarmes à mener des patrouilles communes à deux communes limitrophes mais appartenant à deux départements distincts.

La police des territoires passe par la pérennité du contact entre le gendarme et les citoyens, à commencer par le premier d’entre eux, le maire de la commune. Dans l’édiction des normes comme dans le domaine de la formation, j’ai en permanence ce souci d’un contact de qualité. Cela passe par le recentrage sur le cœur de métier. Pour discuter avec les gens, il faut avoir le temps de le faire, donc se libérer le plus possible des tâches indues. Nous devons restituer certaines tâches administratives, comme les notifications de pièces, à l’autorité administrative. J’invite les autres administrations à développer comme nous le lien Internet.

Dans nos écoles, nous devons réapprendre à nos gendarmes à parler aux gens. Les jeunes gendarmes sont désormais issus, dans leur majorité, d’un milieu citadin. Ils ont grandi avec le walkman sur les oreilles et ont appris à « parler » avec leur ordinateur, pas forcément aux gens – mais c’est l’évolution générale de la population et il faudrait aussi que les gens réapprennent à parler !

J’ai également institué l’obligation, pour les commandants de brigade, d’entretenir des contacts suivis avec les maires et les élus, auxquels la loi de 2007 confère de nouvelles prérogatives en matière de sécurité.

S’agissant des mutualisations, madame Olivier-Coupeau, vous regrettez que la gendarmerie donne beaucoup et reçoive peu. Fort de mes trente années de gendarmerie, je puis témoigner, en arrivant au ministère de l’intérieur, que jamais la gendarmerie n’y a été présente comme elle l’est aujourd'hui.

M. Jean-Pierre Soisson. Nous vous en sommes reconnaissants. Votre tâche est extraordinairement difficile.

M. le général Roland Gilles. Dans trois semaines, je m’installerai place Beauvau et c’est ce que je souhaite ! Pour bâtir une sécurité intérieure répondant à tous les besoins de tous les citoyens, c’est nécessaire. Avec le directeur général de la police nationale, je réfléchis aux moyens d’apporter une réponse complète et coordonnée entre nos deux forces. Certes, nous payons les hélicoptères, mais nous obtenons de la police nationale une compensation. Il en est de même en matière de formation. Nous occupons une place sans précédent dans la construction de la politique de sécurité intérieure de notre pays.

Faut-il parler de parité globale ou de dualité globale ? Pour leur part, les syndicats de policiers parlent de parité stricte. Le vocable de parité globale, utilisé pour caractériser les travaux conduits entre les deux directions générales en mai 2008, me semble préférable. J’estime comme vous, madame la députée, qu’il ne peut y avoir de parité stricte : les statuts sont différents, les sujétions sont différentes, les réponses sont différentes. Seuls trois éléments hérités de l’histoire relèvent d’une parité stricte : le taux de couverture de l’ISSP ; la rémunération du gardien de la paix et du gendarme, issus de l’arbitrage « Queuille » de 1949 ; et le taux de l’indemnité journalière d’absence temporaire.

M. Marc Joulaud. Notre commission a été saisie du projet de LOPPSI avant l’été. Ce texte a-t-il connu des modifications depuis ?

M. Guillaume Garot. Dans la pratique quotidienne, comment parvenez-vous à garantir la spécificité du statut militaire des gendarmes en même temps que la parité globale avec les forces de police ?

M. le général Roland Gilles. Conformément au vœu du ministre de l’intérieur, la LOPPSI fait l’objet d’une réflexion complémentaire afin d’assurer nos missions de la manière la plus efficace, dans le respect des libertés. Je suis très attaché à l’amélioration de l’outil informatique de traitement de l’information judiciaire en matière de délinquance sérielle. Nous ciblons aussi bien la grande que la petite et moyenne délinquance. Un voleur de voitures, un voleur à la roulotte ou un cambrioleur n’agit pas qu’une seule fois. Pourtant, il est souvent jugé sur un nombre limité de faits. La réponse pénale pourrait être plus adaptée au « palmarès » de certains malfaiteurs, donc plus sévère. Nous travaillons à délimiter le périmètre des infractions concernées et des informations traitées.

Pour ce qui est des relations avec la direction générale de la police nationale, nous avons obligation de nous informer mutuellement et de bâtir ensemble, sous l’égide du cabinet du ministre, les projets relatifs à la politique des personnels, en analysant l’impact qu’une avancée dans l’une des deux forces aurait sur l’autre.

Cela dit, j’assume pleinement la particularité de notre statut militaire, en matière de concertation notamment : la police nationale est syndiquée, la gendarmerie ne l’est et ne le sera pas, ce qui ne m’empêche pas de faire vivre un dialogue social interne de grande qualité.

M. Jean-Jacques Candelier. Selon vous, le bilan de la situation des hommes et des équipements est positif. Dont acte, même si les mutualisations auraient pu intervenir bien avant.

Reste que l’on va supprimer 3 000 à 4 000 emplois de gendarme d’ici à 2012, dont 1 354 au titre du budget pour 2010. Ce sera un handicap très lourd à gérer.

Le départ de 150 gendarmes en Afghanistan m’inquiète, et pas seulement pour son coût : la situation dans ce pays est infernale. Nous travaillons avec une personnalité dépourvue de crédibilité, M. Karzaï, ancien taliban, qui triche aux élections, ou encore légalise le viol entre époux. Je réitère ma demande d’un calendrier de retrait de nos troupes.

J’ai par ailleurs discuté avec de nombreux gendarmes de ma région, qui m’ont fait état de leurs doutes persistants quant à la fusion avec la police.

M. Bernard Cazeneuve. Quels efforts a-t-on demandé à la gendarmerie dans le cadre de la révision générale des politiques publiques ?

M. Jacques Lamblin. Si l’on peut comprendre la nécessité d’ajuster le maillage territorial, il faudrait cependant codifier et harmoniser les pratiques locales. Je ne doute pas de la sincérité du ministre lorsqu’il appelle à la concertation, mais il arrive que l’interprétation de ses propos soit quelque peu édulcorée sur le terrain.

M. le général Roland Gilles. Entre 2009 et 2011, la déflation des effectifs au titre de la RGPP s’élèvera à 3 034 ETP : 771 en 2009, 1 303 en 2010, 960 en 2011. Je m’efforce de préserver le « muscle » de la gendarmerie, à savoir sa capacité opérationnelle. C’est pourquoi j’affirme que le maillage territorial ne sera pas impacté, sous réserve des quelques ajustements que j’ai évoqués. À 70 %, c’est le secteur non opérationnel qui sera touché : les écoles (4 d’entre elles seront supprimées, soit 480 postes, sans que notre capacité de formation en soit altérée) ; l’administration ; les escadrons de gendarmerie mobile, du fait notamment de l’abandon de compétence sur les centres de rétention administrative (900 postes) ; ou bien les lieux où la gendarmerie n’est pas responsable de la sécurité publique – les brigades territoriales situées au cœur des grandes agglomérations seraient mieux utilisées dans les zones périurbaines.

Il n’y a pas et il n’y aura pas de « fusion » entre police et gendarmerie, monsieur Candelier.

Pour ce qui est de la méthode suivie pour les ajustements, nous demandons au commandant de groupement de bâtir un projet et de le soumettre au préfet. Ce dernier en valide la cohérence, puis il lui appartient d’engager le dialogue avec les élus pour rechercher la meilleure solution. Certains projets ont été écartés faute d’acceptation de la part des élus.

M. le président Guy Teissier. Pourriez-vous apporter des précisions au sujet du référé de la Cour des comptes et au sujet des cellules anti-cambriolages ?

M. le général Roland Gilles. Les cellules anti-cambriolages généralisent une pratique que nous avons instituée depuis bien longtemps dans les régions à forte pression démographique, avec une importante occupation saisonnière, comportant beaucoup de résidences secondaires ou de résidences de vacances. Nous avions mis en place des cellules qui analysaient au jour le jour les activités délictuelles des cambrioleurs, et nous étendons ce dispositif avec la police nationale, indépendamment des zones de compétence. Les cellules, temporaires ou pérennes selon les caractéristiques du terrain, permettent aux policiers et aux gendarmes d’échanger tous les matins leurs informations.

Depuis la fin de 2008, nous avons observé une recrudescence des cambriolages : 12 % au premier semestre 2009 dans la zone de compétence de la gendarmerie. Dès le début de l’année, j’ai donné des directives précises aux groupements de gendarmerie. À partir d’avril, la courbe s’est infléchie nettement, jusqu’à retrouver le niveau où elle était en 2008. Dans les 10 départements concentrant 35 % des cambriolages constatés dans notre zone de compétence, nous avons engagé des forces mobiles d’appoint et nous sommes parvenus à des chiffres inférieurs à ceux de 2008.

Depuis le début de l’année, nous avons interpellé 1 100 cambrioleurs de plus qu’en 2008. Nous espérons que la réponse pénale sera à la hauteur de cet effort.

La Cour des comptes a évoqué la conduite de notre politique immobilière. Aujourd'hui, c’est le ministère de l’intérieur qui est comptable de cette politique. J’ai démembré une partie de ma sous-direction de l’immobilier afin de créer un bureau de la gendarmerie au sein de la direction de l'évaluation de la performance, des affaires financières et immobilières. L’identité de la gestion du parc immobilier de la gendarmerie est donc bien prise en compte au sein du ministère.

La Cour demandait également de faire le point sur les mutualisations avec la police nationale. Je crois avoir apporté certains éléments d’éclairage dans mon propos initial et dans mes réponses à vos questions.

Enfin, la Cour mentionne la réforme administrative et financière de la gendarmerie. L’arrivée au ministère de l’intérieur se traduit par un net changement de culture et d’architecture administratives. Lorsqu’elle relevait du ministère de la défense, la gendarmerie faisait l’objet d’un budget opérationnel de programme (BOP) unique. La nouvelle situation tend à donner aux préfets de zone un regard plus précis en matière de gestion administrative et financière. Nous nous efforcerons de nous inscrire dans cette architecture, tout en faisant respecter l’originalité de notre situation et nos analyses sur les dépenses correspondant à la présence de nos unités sur le terrain. Le préfet de zone avait connaissance de l’engagement de la dépense de la police nationale, pas de celle de la gendarmerie. Demain, il sera ordonnateur secondaire des dépenses de la gendarmerie. Des BOP zonaux seront institués et nos commandants de région en seront responsables. On instituera également un BOP pour l’outre-mer, un autre pour les écoles et enfin un BOP national commandement et soutien. La centralisation s’en trouvera atténuée, mais la hiérarchie de la gendarmerie restera chargée de l’instruction de la dépense dans l’ensemble des régions. Nous expérimentons en 2010 ces BOP zonaux à Lyon et à Rennes. Tant la Cour des comptes que les instances d’audit recommandaient cette décentralisation de l’analyse de notre dépense.

M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis. Et la maîtrise de l’habillement ?

M. le général Roland Gilles. Nous nous rapprochons du dispositif existant dans la police nationale, avec un carnet d’habillement à points dont la mise en œuvre serait confiée à un prestataire privé.

Mme Françoise Olivier-Coupeau. Essayez de protéger la production française !

M. le président Guy Teissier. Merci, mon général, pour ces nombreux renseignements.

II —  EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a procédé, en commission élargie à l’ensemble des députés, lors de sa séance du lundi 2 novembre 2009, à l’audition de M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, sur les crédits de la mission « Sécurité ».

M. le président Didier Migaud. Avec Jean-Luc Warsmann, président de la Commission des lois, nous sommes heureux de vous accueillir, monsieur le ministre de l’intérieur, pour cette réunion en commission élargie consacrée aux crédits de la mission « Sécurité ». Michel Voisin, vice-président de la Commission de la défense, dont le président Guy Teissier est retenu en séance publique par le débat sur les crédits de la mission « Anciens combattants », devrait bientôt nous rejoindre.

La procédure de la « commission élargie » étant destinée à favoriser des échanges directs et vivants avec les ministres, j’invite chacun d’entre nous à faire preuve de concision.

Je tiens, en outre, à saluer le travail accompli par nos rapporteurs : M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la Commission des finances, M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la Commission des lois, suppléé par le président Jean-Luc Warsmann, et M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la Commission de la défense sur les crédits de la gendarmerie. En plus des travaux qu’ils réalisent à l’occasion de la présentation des crédits – leurs projets de rapport ont été mis à votre disposition –, nos collègues accomplissent un travail de suivi, de contrôle et d’évaluation tout au long de l’année.

Après une intervention du président Jean-Luc Warsmann, nous entendrons nos rapporteurs, ainsi que les porte-parole des groupes qui souhaiteront intervenir. Vous pourrez alors vous exprimer, monsieur le ministre, après quoi chacun sera libre de poser les questions qu’il souhaite.

Pour ma part, j’observe que vous nous présentez un budget maîtrisé, notamment en ce qui concerne les charges de personnel, lesquelles représentent l’essentiel des crédits de la mission. En euros constants, le niveau de ces crédits ne variera quasiment pas et les effectifs devraient diminuer : sans dévier de la ligne fixée dans le cadre de la programmation triennale, les plafonds d’emplois seront réduits de 1 300 postes en équivalents temps plein travaillé (ETPT) dans la police nationale et d’autant dans la gendarmerie nationale.

La première loi d’orientation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, adoptée au cours de la précédente législature, avait prévu une forte augmentation des effectifs et des moyens de la police et de la gendarmerie. Quelles sont les raisons de fond qui vous conduisent à envisager maintenant une stabilisation des moyens et des effectifs ? Les objectifs de performance ont-ils été atteints en matière de lutte contre la délinquance, premier objectif de cette mission ?

M. le président Jean-Luc Warsmann, suppléant M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la Commission des lois. Cette réunion est l’occasion de vous entendre, monsieur le ministre, sur ce budget mais aussi sur la politique que vous entendez mener dans les mois à venir.

Notre collègue Guy Geoffroy, qui est un grand sportif, m’a prié de vous demander de l’excuser. Il participait hier au marathon de New York. Je m’exprimerai donc à la fois en tant que président et rapporteur pour avis suppléant de la Commission des lois.

Ma première question porte sur un sujet qui tient à cœur à la commission et qui a été abordé par la mission d’information sur les centres de rétention administrative et les zones d’attente : la salle d’audience de Roissy, construite en 2001 sur l’emprise de l’aéroport pour un coût actualisé de 1,98 million d’euros, demeure à ce jour inutilisée.

Le 24 juin 2009, j’avais interrogé par écrit la ministre de la justice à ce sujet. Dans une longue réponse en date du 24 juillet dernier, elle a précisé que le projet avait été réétudié par le ministère de l’intérieur, puis arrêté fin 2004, car les agencements architecturaux et le fonctionnement du bâtiment devaient être revus pour être mis en conformité avec les standards judiciaires. Une deuxième salle d’audience, de plus grande capacité et bénéficiant d’un système de visioconférence et de liaisons informatiques directes avec le tribunal de grande instance de Bobigny et la cour d’appel de Paris, était prévue, de même que des locaux pour les magistrats, les avocats et les traducteurs.

Le bâtiment devait être livré à la fin de l’année 2005 ou en cours d’année 2006, mais le ministre de l’intérieur a informé la chancellerie, par une lettre du 6 décembre 2005, que les travaux ne pourraient pas être achevés dans les délais prévus, notamment pour des problèmes juridiques de propriété foncière. En septembre 2006, le projet a été relancé par le ministère de l’intérieur avec le concours du ministère de la justice. Transmis par le ministère de l’intérieur le 26 avril 2007, le programme définitif, qui doit être réalisé selon une procédure de conception-construction, a été approuvé le 15 mai 2007 par la chancellerie sous réserve de quelques observations.

Un jury, réuni le 15 avril 2008 à Bobigny, a arrêté une liste de cinq groupements admis à répondre à l’appel d’offre, mais la procédure n’est pas allée plus loin, de sorte qu’aucun lauréat n’a été désigné. Cette situation m’a conduit à vous adresser un courrier, il y a quelques jours, pour vous demander où en était le dossier. Pourriez-vous profiter de cette réunion pour nous apporter une réponse ?

Ma deuxième question a trait à la police d’agglomération mise en place à Paris : ce dispositif consiste à affecter les forces de police en fonction des « bassins de délinquance », et non des structures administratives préexistantes. Quelle analyse peut-on faire dès à présent de cette première expérience ? Souhaitez-vous l’étendre à d’autres territoires et, le cas échéant, dans quelles limites ? Nous aimerions également savoir quelles conséquences ce type de mesures pourrait avoir sur la délimitation des zones de compétence de la police et de la gendarmerie.

En troisième lieu, pourriez-vous revenir sur le rapprochement – déjà bien engagé – entre la police et la gendarmerie ? Nous nous sommes interrogés, dans le cadre de la mission d’optimisation de la dépense publique qui a été créée au sein de la commission des lois, sur la façon dont nous pourrions encore améliorer l’organisation des forces de sécurité et renforcer les synergies entre elles. Quels éléments pouvez-vous porter à notre connaissance dans ce domaine ?

Nous aimerions également en savoir plus sur l’évolution des effectifs que vous envisagez. Est-il possible de réaliser de nouveaux gains de productivité pour respecter les impératifs budgétaires actuels tout en assurant un bon niveau de sécurité et de présence sur la voie publique ?

Enfin le rapporteur pour avis de la commission, Guy Geoffroy, souhaiterait avoir un bilan de l’action des UTeQ, les unités territoriales de quartier, et des compagnies de sécurisation. Quelles sont les perspectives ouvertes par ces différents dispositifs ? Au vu du contexte budgétaire, est-il envisageable de les étendre à l’ensemble des quartiers sensibles ?

M. Michel Voisin, vice-président de la Commission de la défense. Je me ferai le porte-parole de mes collègues de la Commission de la défense, retenus dans l’hémicycle par l’examen des crédits de la mission « Anciens combattants ».

En cette fin d’année, la gendarmerie nationale fait l’objet de nombreuses interrogations : la loi de programmation militaire a prévu un engagement croissant de cette force armée dans le cadre des opérations extérieures et la loi du 3 août dernier a consacré son rattachement au ministère de l’intérieur tout en préservant son statut militaire. Sans revenir sur les inquiétudes suscitées par ces évolutions, déjà longuement abordées au sein de la Commission de la défense, pourriez-vous nous apporter des précisions sur les mutualisations envisageables et sur les moyens alloués en 2010 à la gendarmerie ? Je pense notamment à l’importante question du parc des blindés.

Pourriez-vous également revenir sur l’objectif de parité globale entre la police et la gendarmerie, fixé par la loi du 3 août 2009 ?

J’aimerais enfin savoir dans quel délai la nouvelle loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure viendra en discussion à l’Assemblée.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la Commission des finances. Je voudrais tout d’abord saluer l’effort de modernisation particulièrement vigoureux engagé dans les services de police et de gendarmerie au cours des dernières années.

Les réformes se sont en effet succédé : modification des structures, rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur, mutualisation des moyens, redéploiement des zones de compétence, création des GIR – les groupes d’intervention régionaux – mais aussi des structures d’agglomération et des compagnies de sécurisation, fusion des services de renseignement, restructuration des compagnies républicaines de sécurité, évolution des méthodes, avec notamment un recours systématique à la police scientifique dans le cadre des enquêtes, ou encore réforme du management – au lieu de se contenter d’augmenter les effectifs, on a re-pyramidé les corps, densifié l’information et institué des mécanismes d’intéressement collectif au bénéfice des fonctionnaires en fonction des résultats des services. Parmi les services de l’État, ce sont probablement les services de la police et de la gendarmerie qui ont connu les plus profondes transformations au cours des dernières années.

Les résultats sont là : la délinquance s’est notablement réduite entre 2001 et 2008, le taux d’élucidation des infractions s’est beaucoup amélioré et le nombre des morts sur la route a diminué.

Depuis 2008, la donne a profondément changé du fait de l’application de la révision générale des politiques publiques aux services de police et de gendarmerie comme à l’ensemble des services de l’État : 3 600 emplois ont été supprimés cette année et 2 600 devraient l’être l’an prochain. Dans ces conditions, il devient encore plus nécessaire d’optimiser les moyens mis à disposition des services de sécurité.

Le projet de loi de finances prévoit une dotation de 16,4 milliards d’euros pour 2010, ce qui représente une augmentation de 1,28 % par rapport à l’année précédente. Malgré la diminution des effectifs, la part des rémunérations va continuer à augmenter au sein du budget. Le reste des crédits étant réduit en part relative et en valeur absolue, il faudra faire mieux avec moins d’effectifs et moins de crédits disponibles.

Dans le prolongement des questions posées par le président Warsmann sur le rapprochement de la police et de la gendarmerie, je voudrais vous interroger sur les mutualisations entreprises, notamment en matière de commandes publiques. Ces mutualisations ont-elles permis de réaliser des économies budgétaires significatives et des gains en termes d’efficacité ? Pour l’avenir, quelles sont les pistes envisagées ? Comment concilier la recherche d’une plus grande efficacité dans la gestion des crédits et le maintien d’une identité propre des services de police et de gendarmerie ?

Ma deuxième série de questions porte sur les effectifs et les recrutements. L’année prochaine, les effectifs de la police et de la gendarmerie doivent respectivement diminuer de 1 390 et 1 354 équivalents temps plein. La réforme des retraites a, en outre, permis aux policiers et aux gendarmes de rester plus longtemps en activité. Ces deux évolutions conduisent naturellement à limiter les recrutements. Quelles indications pouvez-vous nous donner pour 2009 et 2010 dans ce domaine ?

Le dispositif de formation est aujourd’hui en voie de resserrement, le nombre des centres de formation de la police passant de 12 à 4 et celui des écoles de gendarmerie de 9 à 5. Est-il possible de mesurer précisément l’impact budgétaire de ces mesures ? Quelle sera leur incidence sur le niveau de formation initiale et permanente des personnels ?

En dernier lieu, pouvez-vous nous dire où en est le développement de la vidéo-surveillance ? Quelles dispositions ont été prises ? Peut-on établir un premier bilan ? Quels résultats peut-on attendre d’une politique vigoureuse en la matière ?

Mme Delphine Batho. Lorsque vous avez pris vos nouvelles fonctions en juin dernier, nous vous avons demandé si vous envisagiez un changement d’orientation compte tenu de l’évolution de l’insécurité : elle est aujourd’hui plus forte, plus violente et plus concentrée géographiquement, notamment du fait des politiques menées depuis 2002.

Vous avez partiellement reconnu que le bilan actuel était mauvais, mais cela ne vous a pas empêché de vous inscrire dans la continuité de l’action engagée par vos prédécesseurs, notamment en ce qui concerne la politique du chiffre, contre laquelle je dois vous mettre en garde.

Au cours des auditions, de nombreux policiers nous ont indiqué que l’on se heurtait à un effet de seuil ou d’étiage : il y a si longtemps que l’on triche qu’il est devenu impossible de faire mieux. Les effets pervers de la politique du chiffre sont unanimement reconnus : le syndicat Alliance police nationale dénonce une « politique contreproductive » qui pourrait conduire, selon le syndicat des commissaires de la police nationale, à un « risque grave de rupture ».

Que faire ? Jusqu’en 2002, on mettait des moyens supplémentaires sur la table quand on demandait des résultats. Or, c’est maintenant la troisième année consécutive que vous réduisez les moyens affectés à la police et à la gendarmerie. Près de 9 121 équivalents temps plein ont été supprimés depuis 2008, ce qui représente 74 % des créations de postes prévues en 2002 par la LOPSI. Plusieurs collègues, dont certains sont issus des rangs de la majorité actuelle, vous ont demandé de mettre un terme à l’application de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, afin de maintenir les effectifs des forces de sécurité à leur niveau actuel.

Contrairement à ce qui avait été initialement indiqué, on constate en effet que les suppressions de postes envisagées ne concernent pas seulement les états-majors. Dans mon département, il est notamment envisagé de supprimer la brigade de gendarmerie du canton de La Mothe Saint-Heray.

On a également l’impression que vous jouez au bonneteau lorsque vous annoncez la création de nouveaux services dans la police nationale : qu’il s’agisse de constituer des cellules anti-cambriolage, une police anti-hooligans, des groupes « cités », des unités spécialisées dans la lutte contre les bandes ou encore des brigades contre les violences familiales, vous déshabillez Paul pour habiller Pierre. La création des brigades contre les violences familiales a ainsi eu pour effet de réduire les effectifs des anciennes brigades des mineurs, et la même observation vaut pour la constitution des unités territoriales de quartier, les UTeQ.

Il est temps de mettre un terme à la RGPP au sein des forces de sécurité – 9 000 postes en moins, cela suffit ! Les rapporteurs ont fait état de 4 000 suppressions de postes supplémentaires en ETPT dans la police nationale d’ici à 2012 ou 2013. Le plafond d’emplois du programme « Police » serait même ramené de 146 000 à 138 000 ETPT d’ici à 2014. Confirmez-vous ces informations ?

J’en viens à la possibilité désormais offerte aux fonctionnaires de rester en activité jusqu’à 65 ans, véritable tremblement de terre qui remet en cause la réforme des corps et des carrières. Quel sera l’impact de cette mesure en 2009 et 2010 ?

Une provision pour la réforme de la catégorie B était prévue en 2010, mais nous n’en avons pas trouvé trace dans le « bleu » budgétaire. Quelles indications pouvez-vous nous apporter à ce sujet ?

Je m’interroge également sur le rythme de création des UTeQ et sur leur conception même. Le Président de la République avait demandé que 100 unités voient le jour d’ici à la fin 2010, or nous n’en sommes qu’à 35. Nous avons appris qu’un rapport d’audit avait été commandé. Qu’en est-il ? Nous avons constaté au cours des auditions que les responsables de la sécurité du « Grand Paris » faisaient preuve d’un certain scepticisme à l’égard de ce dispositif. Qu’en pensez-vous ? Il nous semble, pour notre part, que les problèmes ne tiennent pas seulement aux effectifs, mais aussi à une insuffisance en police judiciaire et à la difficulté de reconquérir certains territoires.

J’aimerais également vous entendre sur le rapprochement entre la police et la gendarmerie : on a l’impression que le climat s’est dégradé entre les deux forces.

Enfin, je terminerai en vous demandant quel bilan vous faites de la réforme du renseignement intérieur. La séparation des services d’information générale et de la direction centrale du renseignement intérieur suscite beaucoup de critiques. N’aurait-il pas fallu, comme à Paris, maintenir ce qui relève du milieu ouvert et du milieu fermé dans une même direction du renseignement ? Un audit ou un point d’étape a-t-il été fait à ce sujet ? Ma question porte non seulement sur la police nationale mais aussi sur l’organisation du renseignement entre les deux forces de sécurité, la gendarmerie concourant également à ces missions. Sur le terrain, dans les départements, le flou règne quant à la répartition entre les deux. Je voudrais donc savoir comment sera défini et encadré le travail confié à la gendarmerie. Pourriez-vous également nous indiquer, monsieur le ministre, quel est le service chargé du suivi de ce qu’il est convenu d’appeler l’ultra-gauche ?

M. Jean-Christophe Lagarde. Avant de vous interroger, monsieur le ministre, je m’adresserai à MM. les présidents pour regretter de devoir étudier les crédits de la mission « Sécurité » dans le cadre d’un débat « simplifié ». Elle est suffisamment importante pour relever d’une procédure classique. S’agissant du centre de Roissy dont le président Warsmann vient de parler, je ne pense pas que les retards soient dus à des problèmes de bâtiments, ou de normes, c’est tout simplement que les professions judiciaires ne veulent pas se rendre à Roissy. Elles auraient l’impression de déchoir. Mais cela oblige à consommer énormément de moyens en transports divers et variés, et en maintien de l’ordre. Et c’est bien regrettable.

La création de la police d’agglomération à Paris est une bonne chose, mais la préfecture de police étant en elle-même, au sein de votre ministère, une institution, il faudra en la matière veiller à éviter certains écueils. Le premier réside dans l’éloignement entre la police nationale et les élus locaux, notamment les maires. En cas de difficulté, ceux-ci avaient pour interlocuteurs les directeurs de la sécurité publique ou les préfets, à la rigueur les sous-préfets. Certes, la mutualisation des moyens ira de pair avec une plus grande mobilité des forces. Encore faudrait-il conserver la réactivité et l’emploi judicieux des moyens que permettaient les échanges qui existaient. Je suis d’autant moins assuré que cette souplesse sera préservée que la culture de la préfecture de police est beaucoup plus centralisée que celle des commissariats des départements. Si la préfecture pilote une opération, on risque de perdre en réactivité ce qu’on aura gagné en effectifs ponctuels. Vous avez d’ailleurs pu, monsieur le ministre, vous en rendre compte récemment à Saint-Denis.

En revanche, la police d’agglomération – Paris n’ayant pas vocation à être la seule concernée – apportera beaucoup, à la fois au ministre et aux parlementaires, en facilitant les comparaisons entre les effectifs qui seront affectés à telle ou telle mission, ou à tel ou tel secteur. Le débat qui existe entre Paris et les départements de la Petite couronne ou même entre les départements de la Petite couronne sera clarifié. D’ailleurs, le préfet de police a rencontré les élus à propos de ces écarts que nous jugeons inexplicables, surtout quand on représente comme moi le département le plus criminogène de France.

La réduction progressive des effectifs programmée dans le cadre de la RGPP fait naître des inquiétudes. Mais j’attends beaucoup de la LOPPSI 2. Vous avez eu raison, monsieur le ministre, de retarder les débats pour réexaminer les choses à votre entrée en fonction. Je ne suis pas sûr que tout ce qui était dans les tuyaux était opportun. Mais tous les efforts que vous ferez risquent de se heurter à la multiplication des missions et à la diminution concomitante des effectifs. Votre budget mérite d’être défendu. Les tâches administratives ne doivent plus, en effet, être assumées par des fonctionnaires de police qui ont été formés à la sécurité. Mais vos efforts de rationalisation trouveront leurs limites.

Enfin, la police d’agglomération me semble une formidable opportunité d’utiliser au service de nos départements et de nos commissariats les moyens d’encadrement qui existent aujourd'hui à la préfecture de police de Paris. Ce serait d’une grande utilité. Il est en effet préférable de mobiliser des gens d’expérience dont on manque cruellement sur le terrain.

Vous me pardonnerez d’en revenir à des sujets que j’aborde année après année.

Tout d’abord, je ne comprends pas comment nous ne parvenons pas à gérer les flux de personnels, en entrée et en sortie. Vous êtes, monsieur le ministre, à la tête de la seule administration qui arrive à muter un fonctionnaire au mois de janvier pour ne le remplacer qu’au mois de juillet. Même l’éducation nationale ne le fait pas. Les mutations devraient être organisées en fonction des sorties de l’école. Faute de faire ainsi, l’effectif théorique annuel n’est pas atteint la moitié de l’année.

Ensuite, les forces mobiles, et plus particulièrement les compagnies républicaines de sécurité. Un ancien ministre de la sécurité, Robert Pandraud, indiquait que nous avions aujourd'hui autant de compagnies que dans les années soixante et soixante-dix, pendant lesquelles les conflits sociaux et les mouvements de masse étaient beaucoup plus importants. Je ne suis pas sûr qu’il faille maintenir un effectif aussi important alors que, dans la police, dans les commissariats, des besoins se font sentir. Vos prédécesseurs ont bien décidé d’utiliser les CRS à d’autres missions, mais ils n’y ont pas été formés, leur organisation n’y est pas forcément adaptée, pas plus que leur mode de commandement qui reste totalement extérieur à celui de la police locale. On voit, lorsqu’ils interviennent, la différence avec les forces de gendarmerie. Il y a une réflexion à mener sur les méthodes d’emploi, la souplesse de commandement et le dimensionnement des forces mobiles.

S’agissant des UTeQ, Mme Batho doute de leur efficacité, mais, pour ma part, j’ai trouvé celles que j’ai vues fonctionner utiles et efficaces. Elles parviennent à recréer un lien essentiel avec la population. Sous la dernière législature, on a opposé, de façon à mon avis surréaliste, police de proximité et police d’intervention. En réalité, nous avons besoin d’une police à la fois fidélisée – je salue ici le choix que vous avez fait de mieux valoriser le travail de ceux qui ont décidé de travailler dans les zones difficiles – et adaptée. On ne fait pas la police de la même façon à Clichy-sous-Bois, à Villeneuve-la-Garenne, à Villemomble ou à Drancy. L’UTeQ permet d’adapter les forces d’intervention au terrain grâce au lien qu’elle a su nouer avec la population. Sans ce lien, la police n’a pas de renseignement et, sans renseignement, elle n’a pas les moyens de travailler.

Une question encore sur le Fonds interministériel de prévention de la délinquance.

M. le président Didier Migaud. Soyez gentil de conclure.

M. Jean-Christophe Lagarde. Voilà pourquoi il aurait mieux valu être dans l’hémicycle

M. le président Didier Migaud. L’examen en commission élargie n’est en rien une procédure simplifiée. Nous sommes exactement dans les conditions de la séance publique, notamment de publicité. Le choix a été fait par la conférence des présidents sur proposition des présidents de commission, en accord avec le Gouvernement. Mais nous avons tout notre temps pour échanger avec le ministre et lui poser toutes les questions que nous souhaitons.

M. Jean-Christophe Lagarde. N’avez-vous pas l’impression que l’utilisation du FIPD, au demeurant fort utile, relève du saupoudrage ? Tous les préfets veulent avoir leur part, et l’on peut s’interroger quand on rapporte les dotations au degré de criminalité enregistré dans chaque département.

Il en va de même pour le développement de la vidéoprotection. Vous y attachez une grande importance, monsieur le ministre, et tous ceux qui sont ici aussi, mais je crains que la stratégie du ministère ne facilite guère l’interconnexion avec les réseaux existants. Je pense notamment aux réseaux municipaux. Certaines villes ont déjà fait un effort considérable pour s’équiper, et elles devraient pouvoir se connecter à la direction départementale de la police nationale. Or ce n’est pas le cas. Pourtant, c’est une priorité et nous gagnerions beaucoup en efficacité.

Par ailleurs, avez-vous envisagé d’étendre les capacités d’intervention des polices municipales et de favoriser les coordinations entre les villes et les forces de sécurité, notamment pour ce qui est de leurs moyens matériels ? Il y a quelques années, les villes passaient des conventions avec l’État pour procurer tel ou tel équipement qu’il aurait été trop long d’obtenir en suivant les circuits habituels. Cette pratique n’a plus lieu aujourd'hui et je le regrette car elle offrait une solution simple à un problème qu’il fallait régler rapidement, parfois dans l’intérêt même des forces de l’ordre. Je souhaiterais pouvoir mieux travailler à la fois en élargissant les missions de la police municipale et en facilitant ce type de convention entre les collectivités locales et les forces de police qui travaillent sur le terrain.

M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre, je souhaite, au nom du groupe UMP, saluer ce projet de budget pour 2010 qui traduit concrètement les engagements pris par le Gouvernement et le Président de la République. Je ne reviendrai pas sur ce qui a déjà été dit par les rapporteurs et je me contenterai de vous interroger sur trois sujets importants.

Au préalable, je souhaiterais féliciter par votre intermédiaire les forces de sécurité qui sont intervenues à Marseille le 25 octobre dernier après l’annulation du match de foot OM-PSG par la Ligue de football, qui nous a mis ce jour-là dans une position difficile. Je profite de l’occasion pour saluer le professionnalisme des hommes et des femmes engagés sur le terrain ce soir-là ainsi que la gestion de la situation par le préfet de police Philippe Klayman et le préfet de région Michel Sappin.

Je salue également le choix fait en faveur de la vidéoprotection. Au-delà de tout a priori idéologique, il résulte d’un constat pratique. C’est une solution qui a montré son efficacité dans de nombreux pays. Et les mesures qui y sont consacrées dans ce budget vont dans le sens à la fois de l’intérêt général et de la volonté des élus locaux, ainsi que de la population.

Premièrement, la quantité de produits stupéfiants saisis chaque année par les services de police, de gendarmerie et de douanes illustre l’importance des trafics et donne surtout la mesure de ce qu’ils rapportent. On parle pour 2008 de 75 tonnes de cannabis, 8,2 tonnes de cocaïne, et 1,2 tonne d’héroïne. Ce trafic engendre une importante délinquance : celle des usagers qui cherchent de quoi payer leurs doses et celle de tous ceux qui vivent de cette économie souterraine qui infecte bon nombre de quartiers. Monsieur le ministre, de quels moyens disposez-vous pour affronter de tels défis ? Et pensez-vous qu’ils sont adaptés ?

Deuxièmement, dans son discours du 28 mai 2009, le Président de la République a déclaré : « La tranquillité des établissements scolaires, quel que soit leur quartier, quel que soit le type d’enseignement, est une condition absolument fondamentale de l’égalité des chances que la République se doit de garantir. Les établissements scolaires doivent être sanctuarisés, à l’abri de toute forme de violence. C’est une priorité absolue pour les autorités de l’État. » Qu’avez-vous entrepris concrètement en ce sens, monsieur le ministre ? Comment comptez-vous, aujourd'hui et demain, lutter contre les violences scolaires ?

Ma dernière question sera plus prospective. Le vieillissement de la population revêtira une ampleur inédite dans les années à venir. S’il est prévu une augmentation d’au moins 10 % de la population métropolitaine d’ici à 2030, le nombre de personnes âgées de plus de soixante ans devrait augmenter de plus de 2 millions d’ici à 2025. Cette transformation aura nécessairement des répercussions en matière de sécurité. Comment votre ministère peut-il anticiper cette évolution ?

M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la Commission de la défense nationale et des forces armées. Messieurs les présidents, monsieur le ministre, je vous prie d’excuser mon retard, mais mon TGV a eu une heure et quart de retard.

Mes questions, monsieur le ministre, porteront sur le programme 152 relatif à la gendarmerie nationale.

En matière de lutte contre la délinquance et la criminalité, le directeur général de la gendarmerie nationale, pendant son audition devant la Commission de la défense, a fait état d’une amélioration des résultats en cette fin d’année et nous vous en félicitons. Mais s’agit-il, selon vous, d’un retournement durable de tendance, après les mauvais chiffres du début de 2009 ? Quels sont les domaines sur lesquels il faut particulièrement faire porter l’effort en 2010 ?

Le même directeur général de la gendarmerie nationale nous a indiqué qu’entre 2009 et 2103, les crédits consacrés à la construction immobilière devraient avoisiner 40 millions d’euros en autorisations d’engagement, alors que le besoin est supérieur à 100 millions et que les loyers augmentent. Comment comptez-vous, monsieur le ministre, répondre à ces besoins ?

Qu’en est-il du remplacement des hélicoptères Écureuil, vieillissants, qui ne disposent pas des bi-turbines imposées par la réglementation communautaire pour le survol des zones urbanisées ?

Le transfèrement judiciaire et administratif mobilise quotidiennement plus de 1 000 gendarmes à temps plein. Malgré les efforts réalisés, ce chiffre demeure très important. Qu’est-il prévu en 2010 pour le réduire ?

Enfin, dans un référé du 18 juin dernier adressé au ministre de l’intérieur, la Cour des comptes a proposé plusieurs pistes pour améliorer la gestion de la gendarmerie : déconcentration de la gestion du programme 152, rationalisation de la gestion immobilière, développement des mutualisations avec la police nationale ou maîtrise du système de l’habillement. Quelles suites entendez-vous, monsieur le ministre, donner à ces préconisations ?

M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Messieurs les présidents, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames et messieurs les députés, merci de me donner l’occasion de m’exprimer pour la première fois devant vous, dans le cadre de mes fonctions actuelles. Et, comme l’a dit le vice-président Voisin, c’est la première fois aussi que cette mission est examinée depuis la loi sur le rapprochement entre la police et la gendarmerie du mois d’août.

Tout d’abord, nous devons tenir compte du contexte budgétaire et financier, comme vous l’avez souligné, les uns et les autres. Quatre considérations me paraissent essentielles.

Premièrement, le cadre fixé par la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2011 offre une visibilité sur trois ans et nous oblige à respecter année après année un plafond de dépenses. Pour l’année 2010, il a été fixé à 24 milliards d’euros pour nos cinq missions : sécurité, sécurité civile, administration générale, outre-mer et relations avec les collectivités territoriales. Et c’est exactement la somme qui figure dans le projet de loi de finances. Le Gouvernement a donc respecté le cadre défini dans la loi de programmation.

Deuxièmement, la révision générale des politiques publiques – même si Mme Batho la déplore, le Gouvernement la revendique – en vertu de laquelle le départ d’un fonctionnaire sur deux ne sera pas compensé. Le ministère de l’intérieur n’entend pas déroger à la règle commune. Ce sont donc 2 632 postes qui seront supprimés dans la police et la gendarmerie. Plutôt que de subir cette contrainte, nous avons tout intérêt à mettre en œuvre des mesures de rationalisation afin d’optimiser notre potentiel opérationnel.

Troisième donnée : la LOPPSI 2. Je l’ai reportée quand j’ai pris mes fonctions fin juin-début juillet. Et j’entends, en collaboration très étroite avec la Commission des lois, la muscler dans sa partie normative. Je souhaite qu’elle soit discutée dès le début de l’année devant le Parlement. En réponse au président Warsmann, j’indique que le projet de loi de finances respecte exactement, s’agissant de la police, la tranche 2010 de la LOPPSI, soit 133 millions d’euros de crédits de paiement « fléchés » vers la modernisation technologique, l’équipement et la logistique.

La LOPPSI, c’est aussi le logement et l’action sociale avec un peu plus de 23 millions d’euros qui serviront à la création de 100 places de crèche et à la construction de 1 000 logements supplémentaires pour les fonctionnaires. Pour la gendarmerie, 111 millions d’euros seront destinés en 2010 au développement de la police scientifique et au renforcement des moyens techniques : lecture automatisée des plaques d’immatriculation et moyens de lutte contre la cybercriminalité.

Quatrième donnée : le rattachement de la gendarmerie nationale sous commandement unique au ministère de l’intérieur. Très concrètement, cela signifie, monsieur le vice-président Voisin, que désormais 34 % du personnel du ministère proviennent de la gendarmerie. Mais ce rattachement ne remet en cause ni les missions confiées à la gendarmerie, ni la répartition territoriale des compétences, ni encore le maillage territorial de la gendarmerie. Les élus locaux, que vous êtes quasiment tous, y sont très attentifs car la gendarmerie sait très bien gérer ses relations avec eux. J’ai d’ailleurs senti chez Jean-Christophe Lagarde une pointe de regret… Mais 95 % du territoire national sont couverts par la gendarmerie. Il faut donc rechercher en permanence des rapprochements et des mutualisations, en particulier autour des pôles d’excellence, comme l’a demandé votre rapporteur spécial, dans le respect du fonctionnement de chacune des deux institutions. Ce sera aussi l’occasion, monsieur Moyne-Bressand, de se pencher sur les procédures et d’aller dans le sens de ce que préconise la Cour des comptes.

En ce qui concerne les résultats sur le terrain, la tendance est, il est vrai, à une légère augmentation de la délinquance depuis mars dernier. Cependant, cette évolution a été cassée dès le mois de septembre, qu’il s’agisse de la délinquance générale ou de la délinquance de proximité. Pour autant, les derniers chiffres ne sont pas satisfaisants puisque, en septembre, la tendance ne s’est pas inversée. À titre d’exemple, le nombre de cambriolages qui avait augmenté en août de 7,6 % a augmenté moins vite : de 5 %. Le taux d’élucidation est resté constant, autour de 38 %. Je vous rappelle qu’il était, il y a dix ans, de 25 %. C’est dire les progrès qui ont été accomplis. Les faits de criminalité organisée ont baissé au mois de septembre de 5,5 %. Les vols d’automobiles ont très légèrement diminué – de 0,41 %. On constate donc que la hausse s’est interrompue au mois de septembre et les premières indications concernant le mois d’octobre confirment une évolution positive. Il appartiendra à l’Observatoire national de la délinquance de rendre les chiffres publics et au ministère de l’intérieur d’en tirer toutes les conséquences. En tout état de cause, j’ai la conviction d’une évolution positive dès le mois d’octobre.

Dans un tel contexte, quelle est la politique que j’entends mener ? Le premier objectif, c’est une évidence biblique, est de faire baisser durablement la délinquance. Telle est la mission que j’ai reçue du Président de la République. Face aux nouvelles formes de la délinquance, nous devons nous adapter. Que Mme Batho m’excuse, mais les résultats en la matière ne dépendent pas exclusivement des effectifs. C’est aussi une question d’organisation et de modernisation. Nous prenons donc des mesures immédiates et structurelles.

Ainsi, nous avons mis en place des cellules anti-cambriolage. Nous avons constaté que l’opération Tranquillité vacances durant la période estivale donnait des résultats spectaculaires. Chez les foyers concernés, le taux de cambriolage est de 0,4 % ; autrement dit négligeable. Ces cellules consistent en équipes mixtes police-gendarmerie qui exploitent des données recueillies localement. On en compte aujourd'hui quatre-vingt-seize au niveau départemental, et dix au niveau régional.

Le cambriolage, parce qu’il est une forme de viol de l’intimité personnelle et familiale, frappe à juste titre l’opinion. Aussi avons-nous réagi très rapidement à la hausse, cet été, de 12 % à 13 % du nombre de cambriolages de résidences principales en décidant dès le mois de septembre la mise en place des cellules anti-cambriolages : dès le mois d’octobre la quasi-totalité des départements était couverte.

Pour combattre les bandes violentes, des groupes spéciaux d’investigation ont été mis en place dans les trente-quatre départements les plus touchés par le phénomène de la violence urbaine – essentiellement les départements de la petite et de la grande couronne. Il faut toutefois demeurer vigilant car ce phénomène peut s’étendre. Nous avons constitué, en vue de prévenir les risques d’atteinte à la sécurité publique, une base de données qui, conçue comme un outil anti-bandes, nous permettra de mieux identifier les fauteurs de troubles et donc de mieux interpeller ceux qui agissent notamment dans les transports en commun et les quartiers sensibles.

Quant à la police d’agglomération, monsieur le président Warsmann, nous travaillons à son extension à Lille, Lyon et Marseille, en concertation avec les élus locaux – je me suis rendu récemment à Lyon à cet effet. Nous n’excluons pas du reste d’étendre ce dispositif à d’autres métropoles à partir de 2010. Par ailleurs, la proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupe et la protection des personnes chargées d’une mission de service public, déjà adoptée par l’Assemblée et qui sera examinée par le Sénat le 18 novembre, renforcera notre arsenal législatif en la matière puisque, désormais, le fait d’appartenir à une bande violente constituera en soi un délit.

S’agissant de la drogue, je rappelle que 40 % des jeunes de dix-sept ans ont vraisemblablement déjà consommé une forme de stupéfiant, ce qui, non seulement, est une source d’inquiétude pour leurs parents, mais alimente, de plus, une économie souterraine très lucrative puisque son chiffre d’affaires est estimé entre 1,7 et 2 milliards d’euros.

C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de lutter désormais avec la même vigueur contre les petits et contre les gros trafiquants : il n’y a pas, d’un côté, le combat glorieux contre les grands réseaux et, de l’autre, celui, plus obscur, contre le trafic au quotidien. C’est dans cet esprit que nous avons déjà lancé dans certaines communes du département de la Seine-Saint-Denis, notamment à Drancy, des opérations, que nous allons poursuivre, de déstabilisation et d’insécurisation des petits trafiquants. En partenariat avec les élus locaux, des opérations ciblées, qui seront parfois spectaculaires, auront lieu très régulièrement, non seulement à Saint-Denis, mais également à Saint-Ouen ou à Drancy. Je regrette l’absence, ce soir, de M. Patrick Braouezec, que j’ai reçu, à la suite du décès de deux trafiquants, avec Mme Jacqueline Rouillon, le maire de Saint-Ouen, et M. Bruno Le Roux, car, je tiens à le souligner, je partage totalement son analyse selon laquelle, s’il est vrai qu’on ne saurait éradiquer le trafic de drogue en donnant un coup de pied dans la fourmilière, cela permet en revanche de disperser celle-ci et de gagner du temps avant qu’elle ne se reconstitue, le plus souvent affaiblie. Cette politique permet donc de progresser dans la lutte contre les trafiquants.

Il convient également de ne pas oublier les opérations de contrôle et de sécurisation dans les établissements scolaires, à leurs abords immédiats et sur les voies d’accès. En effet, si le trafic a lieu à la fois à l’intérieur des établissements et à leur proximité immédiate, le deal se fait surtout sur une couronne un peu plus large – à trois ou quatre cents mètres de ces établissements.

Alors que, sur les routes, le nombre des tués avait diminué de manière spectaculaire entre 2002 et 2008 – de 44 % –, il a de nouveau augmenté au mois de septembre, de 17,7 %, ce qui a obligé les ministres chargés de ce dossier, qu’il s’agisse du ministre de l’écologie, du secrétaire d’État chargé des transports ou du ministre de l’intérieur, à « monter au créneau » ce week-end et à mener des opérations ciblées, lesquelles ont eu un effet positif puisque le week-end de la Toussaint a, semble-t-il, été moins meurtrier cette année que l’an passé. Je me suis prêté moi-même à ces opérations, notamment sur les routes départementales, qui totalisent 63 % des tués contre moins de 6 % pour les autoroutes – et cela ne fait que renforcer là le rôle de la gendarmerie, la nuit et en fin de semaine.

Je rappelle pour mémoire le plan départemental de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes, présenté par le Premier ministre à Villeneuve-la-Garenne, dans les Hauts-de-Seine. La gendarmerie, de son côté, développera une police des territoires. Quant au budget, stable par rapport à l’année dernière, il s’élèvera à 16,4 milliards d’euros pour la mission « Sécurité », les charges de personnels absorbant, ce qui est normal, 85 % des crédits – soit quelque 14 milliards d’euros pour 242 945 emplois de policiers et de gendarmes.

En raison de la révision générale des politiques publiques, le plafond d’emplois sera géré de manière aussi optimale que possible. Un important effort de recrutement sera réalisé en 2010. S’agissant de la police nationale, après l’agitation du mois d’août consécutive à l’injustice faite à certains futurs cadets qu’on ne souhaitait plus recruter, j’ai obtenu du Président de la République l’autorisation de recruter 900 gardiens, 900 cadets et 600 adjoints de sécurité. En complément de ces recrutements tous achevés à ce jour, 4 240 incorporations seront effectuées en 2010 dans la police nationale : 1 500 gardiens de la paix, 700 adjoints de sécurité et 900 cadets, ainsi que 1 000 personnels administratifs, techniques et scientifiques. Le nombre d’emplois vacants et de départs à la retraite étant plus important dans la gendarmerie que dans la police, j’ai obtenu, toujours au mois d’août, l’autorisation de procéder à des recrutements supplémentaires – de 820 sous-officiers et de 1 080 gendarmes adjoints volontaires. Les recrutements prévus dans la gendarmerie en 2010 s’élèveront donc à quelque 6 500.

Monsieur le président de la Commission des lois, vous avez évoqué la salle d’audience de Roissy : le projet, pour lequel 2 millions d’euros avaient été budgétés, a été, fort heureusement, déprogrammé par le ministère de l’intérieur en 2008 – j’étais alors ministre de l’immigration – en raison de la décision de la Cour de cassation d’avril 2008 déclarant illégale l’installation d’une salle d’audience dans l’enceinte d’un centre de rétention administratif. J’ai demandé la tenue d’une réunion sur le sujet au garde des sceaux et au ministre de l’immigration car je n’ai pas l’intention d’investir de nouveau en vain dans un projet qui semble très mal parti puisqu’il suppose un préalable : que magistrats et avocats acceptent d’utiliser une telle salle. Or nous en sommes loin !

M. le président Jean-Luc Warsmann. L’interrogation est unanime, monsieur le ministre.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Je la partage tout à fait.

En ce qui concerne le rapprochement entre police et gendarmerie, qu’ont évoqué M. le président de la Commission des lois et M. le vice-président de la Commission de la défense nationale, je tiens à souligner que la politique de mutualisation des équipements est déjà très largement engagée : l’armement, les munitions et les effets de protection sont globalement les mêmes dans les deux forces, entre lesquelles un accord-cadre a été passé pour le soutien automobile.

La mutualisation s’applique également à la coopération opérationnelle, le directeur général de la police et le directeur de la gendarmerie devant, à cet effet, notamment relancer les GIR, avec le concours des douanes et des services fiscaux. Un autre cadre de coopération concerne l’international, avec le réseau des attachés de sécurité intérieure. Il ne faut pas non plus oublier le partage des connaissances dans le domaine de la police technique et scientifique. J’ai demandé, en vue de lutter contre les cambriolages, l’envoi systématique de la police technique et scientifique. Certes, en matière de cambriolage, des interpellations peuvent être effectuées dans le cadre de circuits bien identifiés, mais la police technique et scientifique permet d’augmenter le taux de résolution, même si des progrès restent encore à réaliser, notamment dans le traitement des données ADN, peut-être en s’adressant à des laboratoires privés.

Des progrès ont été réalisés dans les systèmes d’information et de communication ainsi que dans le domaine des formations spécialisées – celles des maîtres-chiens, des plongeurs, des secouristes ou des personnels administratifs de la gendarmerie.

Monsieur le rapporteur spécial, les pôles d’excellence au sein de la police et de la gendarmerie sont une chance : il faut privilégier la complémentarité.

Monsieur le président Warsmann, des marges existent pour des gains de productivité. Ainsi, dans un département, la fermeture de bureaux de police excentrés et sans réelle activité a permis de créer un groupe de sécurité de proximité et donc de renforcer de cinq patrouilles la présence policière. Nous n’avons sans doute pas encore tiré tout le parti possible du rapprochement entre la police et la gendarmerie.

M. le président Warsmann, Mme Batho et M. Lagarde ont évoqué les unités territoriales de quartier – UTeQ –, qui étaient en cours de constitution lors de mon arrivée au ministère. Il s’agit d’une initiative importante : trente-cinq unités territoriales sont en fonction depuis le mois d’octobre, chacune dotée de vingt à vingt-quatre policiers assurant des patrouilles à pied ou en véhicule. Elles ont effectué 2 792 interpellations. En cas de besoin, elles peuvent recevoir le renfort de sept compagnies de sécurisation, qui sont des unités spécialement dédiées à la lutte contre la délinquance de voie publique et à la prévention des actes de violence urbaine. Ces compagnies, qui comptabilisent 600 policiers, sont déployées dans les Bouches-du-Rhône, la Haute-Garonne, l’Essonne, le Bas-Rhin, les Yvelines, le Val-d’Oise et la Seine-Saint-Denis. Elles ont procédé à 743 mesures de gardes à vue.

J’ai mandaté une mission conjointe de mes services d’audit et d’inspection, à savoir l’IGA et l’IGPN, afin d’évaluer ce dispositif, qui est coûteux. Mme Batho a fait état de réserves enregistrées au cours de différentes auditions : il convient en effet, compte tenu de l’effort budgétaire demandé, de procéder à une analyse approfondie pour savoir s’il faut persévérer en ce sens. Les conclusions devraient en être connues avant la fin de l’année.

Madame Batho, en évoquant la faillite de la politique gouvernementale en matière de sécurité, vous me mettez dans l’obligation de vous répondre. Vous pouvez toujours accuser l’indicateur – l’état 4001 –, il n’en reste pas moins que, si imparfait soit-il, il est demeuré inchangé, ce qui me permet de vous rappeler que la délinquance avait augmenté de 15 % sous la onzième législature, entre 1997 et 2002, et qu’elle a diminué de 14 % depuis cette dernière date.

Mme Delphine Batho. Cet argument ne fonctionne plus ! Le débat, désormais, porte sur votre bilan.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Vous m’avez invité à rappeler ces chiffres : je l’ai fait.

Du reste, à la mi-novembre, l’observatoire de la délinquance rendra publics les résultats d’octobre : je vous donne dès ce soir rendez-vous pour les commenter.

Sur les effectifs de 2012 et de 2013 dans le cadre de la RGPP, j’ignore d’où vous sortez les chiffres que vous avez cités puisque rien n’est encore décidé à ce stade.

Mme Delphine Batho. Du rapport, qui cite le directeur général !

M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Je le répète : rien n’est encore décidé. Ce n’est que récemment que j’ai obtenu les arbitrages pour les effectifs de 2010 : je n’ai donc pas encore ceux de 2012 ni de 2013 !

En ce qui concerne les mesures catégorielles, il existe une enveloppe de 162 millions d’euros pour les catégories B. Les discussions, qui doivent se poursuivre jusqu’en 2011 selon le calendrier arrêté pour la fonction publique, ont déjà été engagées avec les organisations syndicales, que j’ai toutes reçues – elles sont très nombreuses.

S’agissant du renseignement, j’ai demandé à l’inspection générale de l’administration, avec le soutien des inspections générales de la police nationale et de la gendarmerie nationale – IGPN et IGGN –, de conduire un audit des services départementaux de l’information générale – SDIG –, que vous avez évoqués. Il faut analyser l’évolution, qui a été lourde, afin d’en améliorer éventuellement les résultats. Quant à l’ultra-gauche, c’est essentiellement la Direction centrale du renseignement intérieur – DCRI – qui la suit.

Et je vous annonce une nouvelle qui devrait illuminer votre soirée : la dissolution de la brigade de La Mothe Saint-Héray n’est nullement à l’ordre du jour !

Monsieur le vice-président Voisin, la gendarmerie dispose d’une flotte de 107 véhicules blindés qui datent, pour la majeure partie d’entre eux, du début des années soixante-dix. J’ai naturellement demandé le maintien de la capacité opérationnelle, la gendarmerie devant étudier avec beaucoup de discernement la rénovation de cette capacité blindée, qui est très coûteuse, dans le cadre de nos possibilités financières : quatre-vingt-deux engins seront rénovés à partir des machines déclassées et six engins du génie d’armement, servant à réduire des barricades ou à dégager des axes, seront achetés entre 2009 et 2012. L’armée de terre a de plus cédé douze véhicules de l’avant blindés, qui ont été transformés par l’établissement central logistique de la police nationale de Limoges, pour permettre à la gendarmerie de remplir ses missions en Afghanistan.

Monsieur le rapporteur spécial, la mutualisation des exercices d’entraînement des CRS, du GIGN et du RAID, ainsi que celle des formations motocyclistes, est prévue, de même qu’une structure commune pour la reconversion des adjoints de sécurité de la police et des gendarmes adjoints volontaires. En revanche, monsieur le vice-président Voisin, la formation initiale des gendarmes ne peut pas être mutualisée en raison de leur statut militaire, et elle continuera donc de dépendre du ministère de la défense.

Monsieur le rapporteur spécial, la vidéosurveillance est, aux yeux du Gouvernement, un outil efficace. Un rapport montre du reste très clairement que, dans les collectivités qui l’utilisent, la délinquance diminue deux fois plus vite que dans celles qui n’y ont pas recours.

Le Gouvernement souhaite développer le partenariat en la matière avec les collectivités, notamment en faisant passer le concours de l’État de 12 millions d’euros à 20 millions. De plus, l’État financera sur les crédits de la police le raccordement de la vidéosurveillance de la police municipale au commissariat ou à la gendarmerie pour une utilisation immédiate – j’ai visité des collectivités où un tel raccordement fonctionne remarquablement bien.

D’aucuns prétendent qu’au Royaume-Uni l’efficacité de la vidéosurveillance ferait désormais l’objet de critiques. Je tiens à préciser que les caméras y ont été installées le plus souvent en dehors de tout plan de coordination avec les services de police et que, de plus, il y a déjà là-bas 4,5 millions de caméras, contre seulement 20 000 en France : la marge de progression est donc réelle dans ce pays et nous sommes encore loin de tout risque d’embouteillage. Il faut simplifier les procédures et prévoir l’assistance technique.

Monsieur Lagarde, vous avez fait de la préfecture de police de Paris un portrait rigide, voire pessimiste, alors qu’elle a obtenu des résultats très encourageants, notamment dans la lutte contre les cambriolages – moins 8 % cet été à Paris quand ils augmentaient de 12 % à 13 % dans le reste du pays. Soyez donc confiant dans son savoir-faire !

Comme vous l’avez souligné, la police d’agglomération est une chance formidable. Le maire de Saint-Ouen s’est plaint des effectifs de la police dans sa ville – 137. C’est un réflexe naturel d’élu local. Toutefois, il ne convient pas d’oublier que, dans le cadre de la police d’agglomération, le préfet de police devient le patron de 33 000 hommes – 26 000 hommes avec la police urbaine de proximité – : il s’agit donc d’une force capable d’agir très rapidement, alors que le système précédent interdisait aux policiers parisiens de poursuivre un délinquant au-delà du périphérique ! La mesure, effective depuis le 14 septembre, donnera à l’action de la police plus de souplesse, ce qui améliorera son efficacité pour la sécurité de Paris et des trois départements de la petite couronne – les Hauts-de-Seine, le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis. En fonction des résultats obtenus, l’extension de la police d’agglomération sera, ou ne sera pas, proposée à d’autres collectivités. Mais le préfet de police Michel Gaudin, que vous avez rencontré, a certainement su répondre à toutes vos interrogations…

La LOPPSI 2 consacre 244 millions à la modernisation des équipements des forces de sécurité intérieure, dont 133 pour la police, qui serviront notamment à la lutte antiterroriste, aux systèmes de lecture des plaques d’immatriculation et à la radiolocalisation des véhicules. Ils serviront aussi à développer ces petites caméras qui équipent les véhicules ou sont portées par les policiers eux-mêmes et qui ont le triple avantage d’exercer une fonction préventive, parce que les délinquants, même cagoulés, n’aiment pas être filmés, de faciliter l’identification et – et j’y suis très attaché – d’éviter des polémiques. Avec une telle caméra en effet, la police n’aurait pas pu être accusée par trois personnes d’avoir, à Bagnolet, en juillet, causé la mort tragique d’un jeune garçon en percutant la motocross sur laquelle il faisait un rodéo. Il a fallu attendre que l’inspection générale de la police nationale démontre qu’il n’y avait eu aucun contact entre la voiture de police et la moto. J’ai ainsi perdu plusieurs semaines avant de porter plainte, comme je le ferai systématiquement dès lors que l’honneur de la police sera injustement mis en cause.

Pour ce qui est des compagnies républicaines de sécurité, on sait qu’elles sont très occupées, et parfois monopolisées par des tâches permanentes, surtout outre-mer. Le volume disponible pour le maintien de l’ordre au sens strict se monte à une trentaine d’unités par jour, ce qui suffit à couvrir les besoins. Dans le cadre de la RGPP, les effectifs de CRS sont, comme ceux des gendarmes mobiles, en cours de réduction et il faut donc réfléchir à les utiliser de la manière la plus efficace possible.

Il était inévitable, monsieur Mariani, que l’annulation brutale du match OM-PSG donne lieu à des affrontements et je rends moi aussi hommage aux préfets Philippe Klayman et Michel Sappin. Les forces de l’ordre se sont montrées réactives et d’un grand sang-froid. Certes, nous devons renforcer la coopération entre la Ligue et les services opérationnels : c’est engagé depuis le mois de juillet. Mais, comme l’a dit le Premier ministre, on n’annule pas un match 24 heures à l’avance. En attendant, une réunion aura lieu demain pour prendre les mesures nécessaires pour le match reporté.

La LOPPSI consacre 140 millions à la construction immobilière pour 2010 ; 1 234 logements ont été livrés en 2009, 974 le seront en 2010 et 1234 seront encore livrés à la gendarmerie en 2011. Je souhaite redonner tout son intérêt à la construction subventionnée par l’État. Il faut sans doute revaloriser le décret de 1993 pour parvenir à un meilleur équilibre avec le bail emphytéotique administratif, qui est extrêmement utile mais coûte tout de même 30 % plus cher à la gendarmerie.

La flotte de la gendarmerie compte par ailleurs 49 hélicoptères : quinze EC-145, trois EC-135 – dont deux sont équipés d’un radar capable de lire une plaque minéralogique alors que l’appareil est tellement haut qu’on ne l’entend pas depuis la voiture –, et trente et un Ecureuil. Ils ont une dérogation pour le survol des zones habitées. Pour ce qui est de la composante surveillance intervention, douze hélicoptères biturbines EC-135 ont été commandés depuis 2006 pour remplacer des Ecureuil. Ils sont en cours de livraison. Il faudra réfléchir à commander de nouveaux EC-135 après 2009, et donc à la prolongation de la durée de vie des Ecureuil.

M. Claude Bodin. La construction d’un nouvel hôtel de police à Taverny est bloquée, comme d’autres opérations, pour cause de retard de la LOPPSI 2. Le projet est pourtant finalisé. Le conseil régional d’Île-de-France et le conseil général du Val-d’Oise ont accordé leurs subventions. L’État s’est engagé à verser 20 % du montant total des travaux, mais la convention entre la commune et le ministère de l’intérieur prévue par la LOPPSI de 2002 n’est pas encore signée. Ce dispositif devant s’éteindre au 31 décembre 2009, il se crée une incertitude sur la procédure à suivre pour les opérations en cours. Certes, la LOPPSI 2 devrait le pérenniser, mais il faut donc attendre qu’elle soit votée. Comment envisagez-vous de débloquer ce dossier de Taverny et d’autres semblables ?

M. Jean-Jacques Urvoas. L’un des objectifs de la LOPPSI était le remplacement des agents actifs effectuant des tâches de gestion par du personnel administratif, dûment formé à cet effet et moins onéreux. Où en est l’exécution du protocole d’accord de 2004, qui prévoyait la substitution totale ? Par ailleurs, et suite au référé que vous avez reçu de la Cour des comptes, avez-vous engagé une réflexion sur les zones d’implantation des unités de CRS, qui ne sont parfois pas en adéquation avec les zones où elles sont le plus sollicitées ? La même question se pose pour les escadrons de gendarmerie mobile, puisqu’une réduction de quinze unités est envisagée. Quand la décision sera-t-elle prise, et quels seront les critères de choix des unités supprimées ?

Les adjoints de sécurité de la police nationale effectuent souvent le même travail que les gardiens de la paix pour un salaire moins élevé. Les recrutements annoncés compensent-ils ceux qui n’ont pas été faits en 2009 ? Par ailleurs, qu’en est-il de l’immeuble de la Direction centrale du renseignement intérieur de Levallois-Perret, à propos duquel la Cour des comptes vous a demandé l’année dernière de lever l’option d’achat, le coût de l’opération pour l’État étant particulièrement élevé ? Enfin, le transfert de l’Institut national de formation des personnels administratifs, techniques et scientifiques de Gif-sur-Yvette à Lognes est prévu depuis trois ans, mais l’enveloppe n’est jamais consommée. Est-il vrai que vous louiez depuis un an un bâtiment vide à Lognes, pour un million par an ?

M. Jean-Claude Bouchet. Sans sécurité, pas de liberté de se déplacer, de travailler, de se promener en famille. C’est vrai partout, des plus grandes villes aux communes comme la mienne, Cavaillon, 26 000 habitants, à laquelle vous avez affecté à ma demande des moyens très efficaces mais hélas ponctuels. Je ne désespère pas qu’ils soient pérennisés.

La police nationale connaît depuis huit ans une amélioration continue de ses performances mais le premier semestre 2009 a vu un ralentissement : la délinquance générale ne baisse que de 0,47 % et la délinquance de proximité de 1,5 %. Surtout, les cambriolages augmentent de 11,2 %. Quels sont les moyens alloués à la lutte contre l’insécurité ?

Mme Françoise Olivier-Coupeau. Lors du vote de la loi sur le rapprochement entre police et gendarmerie, nous vous avertissions que cette dernière ne devait pas devenir le parent pauvre de l’histoire. Nos craintes étaient fondées. À coup de regroupements, de redéploiements, d’ajustements – bref, de suppressions d’emplois –, la RGPP conduit pour 2010 à une diminution des effectifs de la gendarmerie de 1 303 équivalents temps plein, un chiffre semblable à celui de la police nationale mais pour moitié moins d’effectifs. Vous entendez réduire les postes administratifs mais les gendarmes concernés font aussi, dans la même journée, de la police judiciaire, du renseignement d’opportunité et de la sécurité ! Supprimer un poste administratif dans la gendarmerie, c’est souvent supprimer un poste d’officier de police judiciaire.

Et pour la mutualisation non plus, le compte n’y est pas. Dans la mutualisation des véhicules, qui était effective avant la loi, ce sont les gendarmes qui, la plupart du temps, assurent les formations et qui partagent leurs hélicoptères avec les policiers, qui n’en avaient pas. Comme on n’en a pas commandé de nouveaux, il y en aura moins pour les gendarmes. La mutualisation se fait donc à sens unique et la gendarmerie devient une variable d’ajustement.

Question subsidiaire : quel est l’avenir de l’école de police de Vannes ?

M. Éric Ciotti. Le 10 octobre, Poitiers est devenue le théâtre d’événements d’une grande violence – des événements qui se multiplient, en particulier dans les quartiers. Une proposition de loi pour la lutte contre les violences de groupe est en cours de discussion, qui donnera les armes juridiques adaptées. Mais le budget pour 2010 contient-il les moyens nécessaires ? Le décret du 18 octobre créant une nouvelle base de données s’insère-t-il dans le dispositif ?

M. Gérard Charasse. J’aurais pu vous interroger sur les problèmes d’insécurité routière dans mon département, mais je me contenterai de vous rappeler que nous avons besoin de réponses rapides.

La gendarmerie participe de plus en plus aux opérations extérieures, notamment en matière de formation. Le déploiement en 2008 de 400 à 450 gendarmes sur les différents théâtres d’opération a coûté 15,282 millions, pour une provision de 11 millions. La loi de finances pour 2009 a reconduit cette provision à l’identique, alors que les prévisions de dépenses sont arrêtées à 19,4 millions. Ces prévisions intègrent-elles les dépenses liées aux nouvelles missions ? Sinon, comment celles-ci seront-elles financées ?

M. Michel Grall. Les forces de gendarmerie jouent en effet un rôle extrêmement important dans nos opérations extérieures, au Kosovo, en Afghanistan ou ailleurs. Dans le cadre de son rattachement au ministère de l’intérieur, il est prévu que la gendarmerie garde la totalité de ses missions militaires. Ce rattachement va-t-il modifier cependant ses conditions de déploiement ou le niveau des ressources nécessaires à son intervention à l’extérieur ?

M. Christophe Guilloteau. Dans ma circonscription, trois brigades de gendarmerie sont sur la sellette : Saint-Genis-Laval, Francheville – qui est en construction – et Tassin. Une décision a-t-elle déjà été prise ? Et ces brigades seront-elles remplacées par de nouvelles unités, ou plutôt par un redéploiement de la police ?

Mme Sylvia Pinel. Vous vous êtes donné comme priorité absolue, monsieur le ministre, de faire baisser la délinquance afin d’assurer la sécurité partout et pour tous. Mais la progression de la petite délinquance n’épargne personne, sur aucune partie du territoire. Mon département connaît une augmentation significative de la délinquance organisée et des actes d’incivilité et de violence, qui trouvent souvent leur origine dans le trafic de stupéfiants. Que comptez-vous faire dans nos territoires ruraux, épargnés jusqu’alors, pour lutter contre ces trafics ? Les crédits visant à assurer une présence effective sur l’ensemble du territoire sont en nette diminution. On s’obstine à réduire les moyens de la gendarmerie nationale. Par manque d’effectifs, brigades de gendarmerie et commissariats de police ne peuvent mener à bien leurs missions. Quelles actions de prévention comptez-vous développer afin de lutter contre cette petite délinquance ? Et pourquoi privilégiez-vous la vidéoprotection, dont on sait qu’elle aboutit à délocaliser la délinquance ?

M. Christian Vanneste. Depuis la LOPPSI de 2002, nous étions habitués à penser la sécurité en termes d’effectifs. Le budget pour 2010 nous invite à nous intéresser plutôt aux innovations en matière de méthodes et de technologies. L’accent est enfin mis sur la vidéosurveillance, domaine dans lequel nous avions accumulé beaucoup de retard, mais il faudra aussi insister sur l’importance des communications. Quelques équipes dans des voitures rapides équipées de moyens de communication modernes peuvent accroître de beaucoup l’efficacité de la police. Par ailleurs, notre système de centres d’appel – le 17 – fonctionne mal. On peut devoir entendre plusieurs minutes de réponses enregistrées avant d’obtenir un interlocuteur, qui n’a pas toujours été formé à l’accueil du public et connaît mal le terrain de l’intervention. En comparaison, j’ai vu à Washington un centre d’appels regroupant l’équivalent de Police Secours, des pompiers et du Samu, installé d’ailleurs par une entreprise française, où la réponse s’obtient en cinq secondes, avec visualisation sur écran du secteur de l’appel. Comment envisagez-vous d’améliorer le système d’appel de Police Secours ?

M. Daniel Boisserie. On manque de gendarmes : c’est ce qui ressort de nombreuses interventions, sur tous les bancs. Pour ma part, j’attirerai votre attention sur leurs conditions de logement. La plupart des casernes sont vétustes, et ce sont les collectivités locales qui sont chargées d’en construire de nouvelles. Lorsqu’elles le font, on leur demande d’abord d’aménager les terrains et d’y faire venir les réseaux, certes, mais ensuite aussi de rétrécir les surfaces d’habitation, puis de supprimer les caves et maintenant les garages… C’est vraiment trop. On pinaille au détriment des gendarmes.

M. Philippe Goujon. Un plan de vidéoprotection de 1 200 caméras a été lancé en 2005 à Paris, malgré l’opposition du maire de la ville. Il faut accélérer l’installation, bien trop lente, de ces équipements et envisager d’ores et déjà un deuxième plan de 1 000 caméras – sachant par exemple que 75 000 caméras sont reliées à Scotland Yard ! Par ailleurs, je me réjouis que la police d’agglomération du Grand Paris soit enfin mise en place. Il faudra en tirer toutes les conséquences sur l’organisation de la préfecture de police, qui est un excellent outil mais qui a besoin de certaines réformes : dégraisser les états-majors par exemple, redéfinir les secteurs de la direction départementale de la sécurité publique et la direction de la protection de la jeunesse ou surtout transformer la circulation, quasiment abandonnée aujourd’hui, en une grande direction. Enfin, quel bilan tirez-vous des premières mesures de fidélisation du personnel comme le concours spécifique Île-de-France, l’avancement accéléré ou les aides à la vie personnelle ?

M. Philippe Folliot. Le Tarn est un des pires départements de France en matière de sécurité routière. Je suis sûr que vous saurez convaincre votre collègue ministre de l’aménagement du territoire de la nécessité de l’autoroute Castres-Toulouse.

Les ajustements prévus dans les forces mobiles vont conduire à des disparitions d’escadrons de gendarmerie ou de compagnies de CRS. Un équilibre sera-t-il assuré entre police et gendarmerie ? Par ailleurs, quelle est votre position quant à la force de gendarmerie européenne ? Quels sont les moyens spécifiques dont disposeront les 150 gendarmes qui vont être déployés en Afghanistan, et leurs conditions d’emploi ? Enfin, certains évoquent le retrait de la gendarmerie du Collège interarmées de défense et du Centre des hautes études militaires. Elle ne ferait plus partie que de l’Institut national des hautes études de sécurité. Pouvez-vous nous rassurer à ce propos ?

Mme Sandrine Mazetier. Le but de la police d’agglomération semble être de projeter des forces de maintien de l’ordre dans certaines circonstances bien précises, pas d’occuper le terrain au quotidien. C’est pourtant cela qu’attendent nos concitoyens dans les quartiers où l’insécurité est croissante et la vie de plus en plus difficile. Le directeur de la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne a par ailleurs évoqué, dans son audition, des déplacements qui dépassent très largement la petite couronne, et en particulier une circulation verticale dans toute l’Île-de-France. La police d’agglomération telle qu’elle est conçue pour l’instant ne semble pas devoir parvenir à mettre fin à ces phénomènes, d’autant que son organisation est davantage liée au lieu de dépôt de plainte qu’au lieu de commission des délits. Enfin, sachant que la commune de Port-Saint-Louis-du-Rhône dispose d’un encadrement semblable à celui de Paris – un policier pour 222 habitants, contre 209 à Paris – mais que le taux d’élucidation y est de 54 %, contre 33 % à Paris, que comptez-vous faire pour améliorer le taux d’élucidation dans la capitale ?

M. Didier Quentin. Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier pour votre venue lors des incidents que la ville de Royan a connus pendant la saison estivale. Grâce à l’envoi de 45 fonctionnaires de police supplémentaires, l’ordre est revenu très vite dans les rues et dans les esprits.

Des événements peut-être moins médiatisés mais d’une nature semblable se sont déroulés durant l’été dans plusieurs lieux de vacances, en zone de police comme en zone de gendarmerie. Les trafics en tous genres, notamment les trafics de stupéfiants, semblent augmenter d’année en année le long de nos littoraux. Monsieur le ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour conforter la sécurité des personnes et des biens dans nos stations balnéaires ? Envisagez-vous une augmentation des effectifs de policiers et gendarmes pendant la saison 2010 ? J’insiste aussi pour que des instructions soient données aux autorité de police afin qu’elles informent en priorité les maires des éventuels incidents.

Nos communes sont aussi régulièrement l’objet d’occupations illégales de terrains publics et privés par des gens du voyage ou soi-disant tels. Nous sommes souvent démunis devant la multiplication de ces grands passages. Beaucoup de nos concitoyens sont exaspérés par ce qu’ils considèrent comme une forme d’impuissance publique. Notre Commission des lois a créé sur cette question une mission d’information dont je suis le rapporteur. L’État pourrait-il accueillir sur des terrains domaniaux, notamment sur des sites militaires désaffectés, une partie de ces grands rassemblements ?

M. Yves Vandewalle. Monsieur le ministre, je me fais ici l’écho de l’exaspération de nombreux maires ruraux de la circonscription dont je suis l’élu, ainsi que de leurs administrés, devant les droits exorbitants dont semblent bénéficier les gens du voyage : occupation illégale de terrains publics ou privés en toute impunité, violation du droit de l’urbanisme par des constructions sauvages en zone non constructible, dégradations, violences, troubles à l’ordre public sans suites judiciaires, voire en présence de forces de l’ordre. La population sédentaire comprend d’autant moins cette situation que, tout en refusant de payer les services communaux dont ils bénéficient – fourniture d’eau, enlèvement des ordures ménagères, voire frais de location d’emplacements sur les aires d’accueil – les gens du voyage affichent parfois un train de vie étonnant ; j’ai moi-même pu voir tout récemment de très belles voitures de luxe sur un site de grand passage. Je me réjouis de la création d’une mission d’information sur cette question difficile. Quelles évolutions le Gouvernement et vous-même envisagez-vous pour garantir l’égalité de chaque citoyen de ce pays devant la loi, en droits comme en devoirs ?

Enfin, monsieur le ministre, quel est l’état d’avancement de la rénovation des logements de gendarmes sur le site de Satory ? Nous souhaiterions voir se conclure un feuilleton qui dure depuis de trop nombreuses années.

M. Robert Lecou. Monsieur le ministre, dans les années 90, l’un de vos prédécesseurs, M. Pierre Joxe, avait souhaité déplacer l’escadron de gendarmerie mobile 12/6 à Montpellier. Mme Michèle Alliot-Marie a décidé le maintien définitif de son implantation à Lodève, ainsi que la réhabilitation de la caserne Fouque, bâtiment certes historique mais inadapté, qui l’abrite.

Les premières tranches des travaux sont achevées, les premiers équipements ont été livrés. Malheureusement, la réhabilitation s’est interrompue en juin dernier. Monsieur le ministre, il faut rendre aux gendarmes des conditions de logement adaptées au sein de la caserne ; aujourd’hui, leurs logements sont disséminés à travers la ville. L’annonce de la reprise du projet rassurerait définitivement la sous-préfecture de Lodève. L’importance des 120 hommes et femmes qui composent l’escadron est considérable pour cette ville de 8 000 habitants. Le plan de relance serait un instrument parfaitement adapté pour financer la reprise des travaux. Serait-il possible de le faire intervenir ?

M. Marc Francina. Monsieur le ministre, je vous interroge en tant que président de l'Association nationale des maires de stations classées et de communes touristiques.

Le nombre de maîtres nageurs CRS employés dans les stations littorales est à la baisse. Or, non seulement les services départementaux d’incendie et de secours ne sont guère enclins à affecter des pompiers à la surveillance des plages, mais ces maîtres nageurs exercent aussi une fonction de représentants de l’ordre.

Nous constatons aussi que des prélèvements sont faits régulièrement, pour des événements tels que le Tour de France, sur les renforts de CRS attribués chaque année aux stations touristiques. Les CRS affectés en Haute-Savoie pour deux mois y sont restés à peine plus d’un mois.

Enfin, pensez-vous accroître les renforts de gendarmerie dans les stations de sports d’hiver ? Le besoin est de plus en plus grand dans les stations des Alpes et des Pyrénées.

Mme Delphine Batho. J’ai posé à M. le ministre une question sur le maintien en activité des gendarmes jusqu’à 65 ans et sur les conséquences qu’aura cette mesure sur le budget et la gestion des effectifs, et une autre sur le cadre et l’organisation des missions de la gendarmerie en matière de renseignement. Pourrais-je avoir une réponse ?

M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur Urvoas, vous avez raison : par substitution les agents administratifs remplacent progressivement les policiers dans leurs fonctions administratives : c’est le sens et l’objectif de la réforme « corps et carrières ». En 2009, 1 002 agents ont été recrutés, et ont rejoint les rangs de la police. Cet effort sera poursuivi en 2010 avec l’incorporation au sein de la police nationale de 1 000 agents administratifs.

La fermeture du site de Gif-sur-Yvette de l'Institut national de la formation des personnels administratifs, techniques et scientifiques (INFPATS) a pour objet le regroupement de la formation des agents administratifs de la police nationale mais aussi du secrétariat général du ministère sur un site unique, à Lognes. Des travaux sont nécessaires dans l’immeuble loué, qui n’est aujourd’hui qu’un plateau de bureaux. Le regroupement devrait se faire au tout début de l’année 2010. Je vous donne rendez-vous à cette date.

Trois principes président à la restructuration des escadrons de gendarmerie. D’abord, en ont été écartés les escadrons implantés sur des sites déjà touchés par des restructurations. Ensuite, sont préservés les escadrons bénéficiant d’une évolution ou d’une restructuration immobilière récente. C’est un choix de rationalisation et de cohérence. Enfin, une étude opérationnelle sera conduite pour adapter l’équilibre géographique aux critères opérationnels. Je veillerai tout particulièrement à ce que les deux premiers points, de bon sens, soient respectés.

Monsieur Bodin, le relogement du commissariat de Taverny est une priorité affichée et revendiquée – j’ai un peu honte à le dire – depuis 2001. Très concrètement, du fait des contraintes qui pèsent sur le budget de la police, seule devrait être retenue l’option de la mise à disposition gracieuse à l’issue de la réalisation de l’ouvrage. J’ai aussi demandé l’engagement d’une étude de faisabilité pour l’installation de ce commissariat, avec d’autres services de police, sur le site de la base aérienne de Taverny, que le ministère de la défense devrait libérer au cours de l’année 2011.

Monsieur Bouchet, vous avez rappelé diverses données sur l’évolution de la délinquance. Je vous ai déjà répondu en partie. Les premiers éléments qui remontent du terrain depuis le mois d’octobre confirment la tendance à l’amélioration.

Madame Olivier-Coupeau, sur l’école de police de Vannes, je ne peux vous répondre aussi positivement qu’à Mme Batho. Cette école a vocation à être fermée du fait de la diminution des effectifs à former. Quatorze écoles et centres de formation sont dans ce cas. Si j’ai réussi à protéger l’école de police de Châtelguyon, ce n’est que provisoirement, pour la durée de mes fonctions ; j’ai souligné ce point devant mes interlocuteurs locaux.

Monsieur Guilloteau, vous vous interrogez sur la police d’agglomération à Lyon. Lors de ma visite, j’ai réuni les préfets, les directeurs départementaux de la sécurité publique et les commandants de groupements des départements concernés. J’ai senti de l’inquiétude de la part de vos collègues. Aujourd’hui, rien n’est décidé. Les préfets font des propositions, je vais les expertiser. Je m’impliquerai personnellement dans la concertation qui suivra.

Monsieur Gérard Charasse, je l’ai indiqué, la flotte des hélicoptères Ecureuil sera progressivement remplacée par des EC-135.

Lors d’un déplacement en Allier, j’ai été très impressionné par les équipements de police qui peuvent être installés sur les hélicoptères. Nous allons les développer. L’implantation des bases sera modifiée.

Je souhaite bien sûr encourager la mutualisation des moyens aériens. Les hélicoptères de la gendarmerie et ceux de la sécurité civile – qui sont des EC 145 – seront concernés.

Depuis 2007, le volume des heures de vol mises à la disposition de la police par la gendarmerie ne cesse d’augmenter. En 2009, il a été de 1 300 heures.

Le transport des militaires du groupe d’intervention de la gendarmerie nationale vient d’être ouvert aux policiers du RAID.

Madame Pinel, il faut en effet mobiliser sur le terrain les gendarmes pour lutter contre la délinquance dans les zones rurales. Comme je l’ai déjà indiqué, il en sera recruté 6 500 en 2010.

Monsieur Boisserie, la procédure du bail emphytéotique administratif (BEA) a été très sollicitée entre 2002 et 2007 pour accélérer la construction de casernes de gendarmerie. J’ai demandé une nouvelle inscription dans la future loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. Cette procédure a permis la livraison de 1 234 logements en 2009 ; 974 le seront en 2010 et encore 1 234 en 2011. Afin de faire aboutir avant la fin de la LOPPSI les dossiers validés, le BEA est prorogé chaque année en loi de finances. Pour la gendarmerie, construire selon cette procédure coûte 30 % plus cher que selon la procédure du décret du 28 janvier 1993.

Monsieur Vanneste, merci de votre compte rendu. Dans le cadre du plan d’action sur les systèmes d’information et de communication, je demanderai à la direction de la police nationale d’expertiser cette expérience américaine.

Nous avons prévu d’inscrire dans la LOPPSI les moyens nécessaires non seulement à la gestion des appels au « 17 police secours » mais aussi à l’intervention en temps réel de fonctionnaires par le moyen de la géolocalisation des véhicules. Un effort doit être consacré à cette action essentielle. En 2010, il est prévu d’équiper 4 400 véhicules pour compléter la modernisation de centres d’information et de commandement.

La formation à la langue anglaise des personnes qui répondent doit aussi être développée. Cet été, à Cannes, dans le département des Alpes-Maritimes, une difficulté d’interprétariat s’est posée.

Monsieur Goujon, les réseaux de la SNCF et de la RATP, à Paris et en banlieue, comportent 9 500 caméras en service. En revanche, la préfecture de police ne gère directement que 300 de ces équipements. Ce faible nombre est à l’origine du projet d’implantation de 1 000 caméras supplémentaires ; début juin, le préfet de police a adressé une cartographie aux élus.

Mme Sandrine Mazetier. Nous n’avons rien reçu.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Je le regrette.

Monsieur Goujon, vous avez vous-même organisé dans le quinzième arrondissement une réunion sur cette question à la rentrée. Un débat devrait avoir lieu au Conseil de Paris. J’ai eu récemment un entretien avec le maire de Paris sur ce projet. Je suis convaincu que les Parisiens se rendront compte de tout l’intérêt qu’il présente et je souhaite que les élus parisiens lui apportent un soutien financier. Je n’ai perçu auprès du maire de Paris aucune hostilité de principe mais simplement une interrogation d’ordre financier.

J’ai déjà présenté quelques éléments sur la fidélisation. 5 millions d’euros seront consacrés à des réservations de places de crèches ; l’objectif est de 200 places nouvelles. Un demi-million d’euros sera consacré à l’aide à la garde d’enfants pour les familles monoparentales. Enfin le parc de logements s’accroîtra de 1 000 nouveaux logements réservés.

Monsieur Folliot, vous avez rappelé la création en 2004 de la Force de gendarmerie européenne. Six pays en font partie, l’Espagne, la France, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal et la Roumanie. Deux pays en sont partenaires, la Pologne et la Lituanie. Enfin, la Turquie y occupe le statut d’observateur. La FGE est apte à un spectre très large d’engagement, de la phase militaire à la stabilisation. Sa présidence en 2009 est assurée par la France. Elle sera très prochainement déployée en Afghanistan au sein de l’OTAN. Le Président de la République l’a annoncé, 150 gendarmes vont participer à cette opération ; je vais demain matin saluer ces militaires qui doivent partir dans les dix jours.

Madame Mazetier, j’ai entendu votre argumentation. Cependant, l’initiative que vous critiquez n’a que deux mois d’existence. Laissez-lui, je vous prie, le temps de prouver ou non son intérêt. Il est trop tôt pour tirer un bilan. Ma conviction est qu’elle réussira et attirera d’autres collectivités.

Si la sécurité dans les transports est normalement à la charge des opérateurs, il est néanmoins logique que le ministère de l’intérieur s’y intéresse ; 2 550 policiers et gendarmes sont exclusivement affectés à cette mission.

La vidéoprotection est une technique d’avenir. La SNCF comme la RATP s’efforcent de la développer. D’ores et déjà, 322 des 389 gares du réseau ferré d’Île-de-France sont équipées de 12 000 caméras. Le climat du partenariat entre le ministère de l’intérieur et les opérateurs est bon. Lors d’une visite que nous avons effectuée à Saint-Denis, le directeur général de la SNCF et moi-même nous sommes mis d’accord en faveur d’un plan renforçant, en rapport avec les besoins, l’équipement des quais en appareils vidéo.

Monsieur Quentin, vous avez rappelé ma venue à Royan cet été. Des commerçants, victimes et excédés, ont organisé une opération punitive contre de jeunes banlieusards originaires de l’Essonne qui avaient quelque peu chapardé et squatté. Ces jeunes un peu turbulents ont dû se réfugier auprès des forces de police ! Pour adresser un signal, nous avons affecté 45 personnes de plus à la sécurité. Ce renfort a contribué à rassurer la population.

Comme monsieur Vandewalle, vous avez évoqué les maîtres nageurs. Aujourd’hui, ils ne sont plus présents sur les lacs et les rivières mais seulement dans les stations balnéaires. Je m’y engage ici, le nombre des communes bénéficiant d’une présence des CRS ne diminuera pas ; l’an prochain, il sera de 100, comme cette année. En revanche, le nombre des CRS, lui, va se réduire. Il faut donc améliorer la capacité de formation de personnels maîtres nageurs.

L’application de la loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage continue à poser difficulté. Malgré les subventions proposées, le nombre d’aires d’accueil est insuffisant. Les aires de grand passage demeurent beaucoup trop rares, et sont souvent suroccupées du fait de la capacité insuffisante des aires d’accueil. Au 1er janvier 2009, 358 communes et 172 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) étaient encore défaillants dans la mise en œuvre des schémas départementaux d’accueil ; 80 % de ceux-ci devant être révisés d’ici à 2010, j’ai demandé l’élaboration d’une circulaire à l’attention des préfets. Nous souhaitons limiter le nombre de stationnements irréguliers. L’excellent rapport du président de la commission consultative des gens du voyage, le sénateur Pierre Hérisson, montre que l’utilisation des terrains de l’Etat n’est pas une solution pérenne. Celle-ci ne sera trouvée que par la mobilisation de tous les protagonistes : gens du voyage, collectivités locales et État. Il faudra aller au-delà de la loi de 2000.

Monsieur Lecou, le plan de relance ne comporte aucun crédit pour les installations immobilières des forces de sécurité intérieure.

J’ai répondu à M. Francina.

Les dispositions prises la saison dernière pour la sécurité des massifs montagneux – la constitution d’équipe mixtes de gendarmes départementaux et de gendarmes mobiles – seront reconduites cet hiver.

Madame Batho, le maintien de l’activité des policiers au-delà de la limite d’âge actuelle, de 55 ans, prendra effet à compter de l’année prochaine. En 2010, nous pourrons mieux évaluer les réactions des policiers à cette mesure.

Il faut distinguer information et renseignement. Tout fonctionnaire de police ou militaire de la gendarmerie est chargé de recueillir de l’information. La mission de renseignement, elle, incombe, pour l’information ouverte, aux services départementaux de l’information générale (SDIG) et, pour l’information fermée, à la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). La gendarmerie collaborant avec les SDIG, j’attends le rapport de l’inspection générale de l’administration pour définir les périmètres de chacun.

Monsieur Ciotti, les bases de données sont en effet nécessaires à l’efficacité de l’action policière. Vous avez d’ailleurs observé que la mise en place des deux bases de données destinées respectivement à la surveillance des bandes de hooligans et des groupuscules et aux informations sur les personnes désirant intégrer la police, la gendarmerie ou des secteurs sensibles comme le nucléaire ou les aéroports, n’a soulevé aucune polémique. Toutes les précautions ont en effet été prises à cet effet. Ainsi, j’ai refusé de signer les textes correspondants au début de juillet, car je venais de prendre mes fonctions et tenais d’abord à savoir de quoi il s’agissait et, surtout, quelle serait la méthode employée. J’ai ensuite voulu obtenir l’avis du Conseil d’État et de la CNIL, ainsi que celui d’associations telles que SOS-Racisme ou la LICRA – en sachant bien d’ailleurs qu’elles pourraient fort bien ne pas être d’accord. Nous nous sommes donc entourés de toutes les garanties et avons supprimé de ces bases tout ce qui pouvait poser problème et ne présentait aucun intérêt, comme l’orientation sexuelle pour le recrutement dans les forces de sécurité.

La solution à laquelle nous sommes parvenus est très équilibrée et sera très efficace. Le matin même où je me suis rendu à Poitiers, l’ancien Premier ministre Laurent Fabius a d’ailleurs regretté que les services de renseignement intérieur ne disposent pas d’éléments suffisants et le député-maire de Poitiers a lui-même évoqué cette question d’une manière très cordiale et très républicaine. La réponse est venue : nous allons remédier à l’insuffisance de renseignements.

Toutefois, je le répète, je ne transige pas avec le respect des libertés individuelles, et c’est bien le cas dans cette affaire. Il reste que la police et la gendarmerie ont besoin de ces sources de renseignement, et il n’est pas un seul Français qui ne puisse comprendre que quelques éléments d’information sont nécessaires sur les candidats à l’entrée dans ces corps.

Mme Delphine Batho. Lorsque je vous ai demandé tout à l’heure quel était le service chargé du suivi de l’ultra-gauche, vous m’avez répondu qu’il s’agissait de la DCRI. Il y a donc une certaine « habileté » intellectuelle à utiliser les incidents de Poitiers pour évoquer le manque d’information d’un service privé de fichiers depuis le retrait des décrets sur Edwige et l’absence de suivi de la recommandation 53 du rapport parlementaire que nous avons rendu. Je crois d’ailleurs savoir que la SDIGE avait fait remonter des informations, mais que celles-ci n’ont pas bien circulé.

Je n’en dirai pas plus ce soir sur les fichiers, dont nous débattrons en séance publique le 19 novembre, puisque le groupe socialiste a fait inscrire à l’ordre du jour la proposition de loi qui avait été votée par la Commission des lois.

M. Gérard Charasse. Je souhaite corriger une méprise : ma question portait essentiellement sur le financement de la participation de la gendarmerie nationale aux opérations extérieures – ou OPEX – et sur l’écart, constaté notamment dans le budget 2008, entre les provisions et le coût réel. En 2009 également, les prévisions ont été arrêtées à 19,4 millions d’euros, pour 11 millions inscrits en loi de finances. Comment pensez-vous financer ces dépenses supérieures aux prévisions ?

M. Michel Grall. Comme M. Charasse, je m’interrogeais sur la pérennité du rôle et de l’emploi des forces de gendarmerie dans les opérations extérieures. Ces forces sont en effet très sollicitées sur les différents théâtres d’opérations et jouent un rôle important, qui dépasse de loin les considérations budgétaires.

M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre, je vous avais interrogé sur le maintien de la gendarmerie dans le cadre du Collège interarmées de défense et du Centre des hautes études militaires.

M. Robert Lecou. Ma question très brève vous a permis, monsieur le ministre, de me faire la réponse la plus rapide : c’était « non ». Cependant, compte tenu des vicissitudes qu’a connues l’escadron 12/6, je vous interrogerai par écrit pour recevoir une réponse rassurante quant à la volonté de l’État de poursuivre la réhabilitation de cette caserne.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre, je partage votre volonté de généraliser les moyens vidéo embarqués ou portés. Ces dispositifs pourraient également être ouverts aux policiers municipaux, afin d’éviter les problèmes auxquels peuvent parfois donner lieu leurs interventions. Je souhaiterais que vous précisiez aux élus locaux le cadre réglementaire dans lequel peut s’organiser l’utilisation de ces moyens – je suis en effet confronté actuellement à cette difficulté.

M. Jean-Jacques Urvoas. Monsieur le ministre, je vous rappelle que je vous ai demandé si, à propos de la levée d’option d’achat de l’immeuble de la DCRI à Levallois-Perret, vous aviez suivi le conseil de la Cour des comptes.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.. Monsieur Urvoas, l’option n’a pas été levée.

Madame Batho, le cas d’école de Poitiers est particulièrement intéressant et j’aurai sans doute l’occasion de le préciser lors du débat que vous évoquez.

Monsieur Charasse, on compte aujourd’hui 432 gendarmes en opérations extérieures, principalement dans les Balkans et en Afrique. Depuis 2007, 15 millions d’euros sont identifiés au sein du programme 152 de la gendarmerie nationale. Pour 2009, les dépenses prévisionnelles sont estimées à 36,7 millions d’euros, soit un surcoût de 21,7 millions, qui correspond à l’engagement actuel de plus de 500 gendarmes en OPEX. L’engagement de 150 gendarmes, que j’évoquais tout à l’heure en réponse à M. Folliot, entraîne de nouvelles dépenses pour 2009 et 2010, évaluées à 15,2 millions d’euros en 2009 et 12,2 millions en 2010. La question du financement des OPEX doit donc être mieux prise en compte dans la construction budgétaire et le ministre du budget, Éric Woerth, a déclaré que les dépassements à ce titre feraient l’objet d’un prélèvement sur la réserve interministérielle. J’ai demandé à mes services de rechercher avec ceux de M. Woerth une solution qui pourrait être rapidement mise en œuvre.

Monsieur Folliot, je vous rassure : la gendarmerie se maintient tant dans le cadre du Collège des hautes études militaires que dans celui de l’École de guerre. En outre, il est officiel depuis samedi que l’Institut national des hautes études de sécurité, l’INHES, se réorganise sous l’autorité du Premier ministre et devient l’Institut des hautes études de sécurité et de justice, qui sera implanté à l’École militaire.

M. le président Didier Migaud. Monsieur le ministre, nous vous remercions, ainsi que les hauts fonctionnaires et les collaborateurs qui vous accompagnaient.

*

* *

À l’issue de l’audition du ministre, la commission de la défense a examiné pour avis, sur le rapport de M. Alain Moyne-Bressand, les crédits pour 2010 du programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurité ».

La commission a approuvé les conclusions du rapporteur et a émis un avis favorable à l’adoption des crédits du programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurité ».

© Assemblée nationale

1 () Loi n° 2009-971.

2 () Loi n° 2009-928 du 29 juillet 2009 relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense.

3 () Avis n° 1861.

4 () Dotation supplémentaire visant à compenser la sous-évaluation structurelle des crédits de fonctionnement courant.

5 () Cf. Troisième partie, A) infra.

6 () Sur les 122,7 millions d’euros, 120 étaient initialement prévus pour la construction de la zone « logements » du futur pôle de police judiciaire de la gendarmerie à Pontoise, selon le dispositif AOT. La DGGN a été amenée, au premier semestre 2009, à substituer une opération locative à cette construction. Ces crédits sont néanmoins susceptibles d’être réemployés pour d’autres projets immobiliers de ce type.

7 () Cf. sur ce point l’état des lieux sur les mutualisations en cours et à venir avec la police nationale dressé par le rapporteur dans le rapport qu’il a présenté au nom de la Commission de la défense sur le projet de loi relatif à la gendarmerie nationale (rapport n° 1703, juin 2009). Ces mutualisations concernent, pour mémoire, sept domaines principaux : le dialogue institutionnel, les actions opérationnelles, les fichiers de renseignement, les réseaux de communication, la mise en commun des moyens logistiques, les marchés publics et la formation.

8 () Données arrêtées au 30 juin 2009.

9 () n° 2002-1094.

10 () Environ 1 000 pour les transfèrements judiciaires et 150 pour les transfèrements administratifs (escortes de détenus ou d’étrangers vers les centres de rétention administrative).

11 () Avis n° 1202, tome 8, novembre 2008.

12 () Référé n° 54885.

13 () La Cour rappelle+ que 5 750 gendarmes n’ayant pas d’emploi à caractère opérationnel sont logés aux frais de l’État.