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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2008-2009

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 29 janvier 2009

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Laffineur

1. Modification de l’ordre du jour prioritaire

2. Accession de l’Albanie et de la Croatie à l’OTAN

3. Accord France-Kenya sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements

4. Accord France-Guinée sur la promotion et la protection réciproques des investissements

5. Siège d’Interpol sur le territoire français

6. Loi de finances rectificative pour 2009
Programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012
Accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés

M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009 et de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012

Mme Laure de La Raudière, rapporteure de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

M. Didier Migaud, président de la commission des finances

Discussion générale commune

M. Nicolas Perruchot

M. Jérôme Chartier

M. Jean Launay

M. Roland Muzeau

M. Hervé Mariton

M. François Brottes

M. Jean-François Mancel

M. Pierre-Alain Muet

M. Éric Woerth, ministre du budget

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance

Loi de finances rectificative pour 2009

Amendement no 1

Programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012

Amendements nos 1 rectifié, 2 rectifié, 3 à 9

Accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés

Amendements nos 1, 2, 4 rectifié

7. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Modification de l’ordre du jour prioritaire

M. le président. M. le secrétaire chargé des relations avec le Parlement m’a fait connaître qu’une déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur la consultation des électeurs de Mayotte sur le changement de statut de cette collectivité aurait lieu le mercredi 11 février à neuf heures trente.

2

Accession de l’Albanie et de la Croatie à l’OTAN

Vote sur un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d’examen simplifiée, sur le projet de loi autorisant la ratification des protocoles au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession de la République d’Albanie et de la République de Croatie (n°s 1272, 1409).

Conformément à l’article 107 du règlement, je mets directement aux voix les articles du projet de loi.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

3

Accord France-Kenya sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements

Vote sur un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d’examen simplifiée, sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kenya sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements (n°s 1136, 1411).

Conformément à l’article 107 du règlement, je mets directement aux voix l’article unique du projet de loi.

(L’article unique du projet de loi est adopté.)

4

Accord France-Guinée sur la promotion et la protection réciproques des investissements

Vote sur un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d’examen simplifiée, sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Guinée sur la promotion et la protection réciproques des investissements (n°s 1137, 1411).

Conformément à l’article 107 du règlement, je mets directement aux voix l’article unique du projet de loi.

(L’article unique du projet de loi est adopté.)

5

Siège d’Interpol sur le territoire français

Vote sur un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle le vote, selon la procédure d’examen simplifiée, sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale de police criminelle-Interpol (OIPC-Interpol) relatif au siège de l’organisation sur le territoire français (n°s 1217,1412).

Conformément à l’article 107 du règlement, je mets directement aux voix l’article unique du projet de loi.

(L’article unique du projet de loi est adopté.)

6

Loi de finances rectificative pour 2009
Programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012
Accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés

Discussion de textes de commissions mixtes paritaires

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion des textes des commissions mixtes paritaires relatives au projet de loi de finances rectificative pour 2009 (n° 1405), au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 (n° 1406) et au projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés (n° 1416).

La conférence des présidents a décidé que ces trois textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009 et de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009 et de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, monsieur le ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, réunies mardi dernier, deux commissions mixtes paritaires avaient à examiner deux des trois textes qui font aujourd’hui l’objet d’une discussion commune. Sur ces deux textes – la loi de finances rectificative pour 2009 et la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 –, elles sont parvenues à un accord.

J’aborderai tout d’abord le projet de loi de finances rectificative pour 2009 – fait troublant pour moi, car c’est la première fois que j’ai à rapporter un collectif budgétaire si tôt dans l’année. Parmi les décisions de la commission mixte paritaire, il faut relever l’accord sur l’anticipation des versements du FCTVA.

M. Guy Geoffroy. Ah !

M. Gilles Carrez, rapporteur. Aider les collectivités locales à investir en recourant au FCTVA est une très bonne mesure, car, je le rappelle, les collectivités locales représentent, à elles seules, 70 % de l’investissement public.Il s’agit donc d’un dispositif important du plan de relance destiné à favoriser l’investissement des collectivités territoriales

Le Sénat aurait voulu profiter de cette occasion pour engager une réforme profonde du dispositif du FCTVA ; beaucoup d’élus locaux – moi-même, du reste – le souhaitent. Cela étant, il nous a semblé qu’il fallait limiter l’utilisation du FCTVA au plan de relance.

M. Guy Geoffroy. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur. Nous sommes revenus à la version de l’Assemblée nationale, n’excluant pas, ultérieurement, la possibilité de simplifier et d’améliorer l’efficacité du FCTVA.

Nous avons cependant retenu un certain nombre de propositions de nos collègues sénateurs, en intégrant l’année 2004. L’effort d’investissement 2009 qui déclenchera le remboursement de deux années de FCTVA – 2007 et 2008 – sera donc comparé à la moyenne 2004-2007. Comme dans un concours de saut à la perche, il ne faut pas risquer l’échec en plaçant la barre trop haut, ou minimiser l’effort en la plaçant trop bas ! Nous sommes, monsieur le ministre, parvenus à un équilibre, permettant à de très nombreuses collectivités locales de se sentir concernées. J’espère même que la quasi-totalité d’entre elles jouera le jeu et fera un effort d’investissement supérieur, auquel cas, les 2,5 milliards d’euros prévus seront insuffisants ! Mais ce sera pour la bonne cause, car il s’agit de dépenses d’anticipation.

En outre, nous avons accepté de reporter du 1er avril au 15 avril la date limite de signature de conventions entre État et collectivités locales. À cette date, on dispose déjà d’un certain recul quant à l’exécution pour 2008 et l’on est plus à même de prendre un engagement sérieux vis-à-vis de l’État.

Lors de chaque discussion de loi de finances, initiale ou rectificative, ces trois derniers mois, nous avons évoqué, monsieur le ministre, le cumul de l’éco-PTZ et du crédit d’impôt « économie d’énergie ». Je dois, à cet égard, saluer la ténacité du ministre d’État, en charge de ces sujets !

L’Assemblée nationale avait adopté un amendement du Gouvernement autorisant pour deux ans un cumul total de deux avantages fiscaux. Le Sénat a supprimé ce cumul. L’éco-PTZ est une excellente disposition qui doit réussir, n’est-ce pas, monsieur le président de la commission des affaires économiques ? La CMP est tombée d’accord pour mettre en place une possibilité de cumul, selon le souhait de M. Jean-Louis Borloo, et donner un petit coup de pouce aux ménages les plus modestes. Ainsi, le cumul sur un même équipement d’une réduction d’impôt et d’un prêt à taux zéro ne sera autorisé que pour les personnes dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 45 000 euros, soit 70 % des accédants à la propriété sociale. Un ménage disposant de revenus faibles peut emprunter jusqu’à 30 000 euros au titre de l’éco-PTZ. Même si le taux d’intérêt est nul, la mensualité s’élève à environ 200 euros, ce qui peut être lourd pour un ménage modeste, en dépit des économies d’énergie dont il bénéficiera. Il nous a donc semblé judicieux d’accepter le cumul dans ces conditions. Mais l’ensemble des sénateurs et des députés de la CMP s’est fait violence, monsieur le ministre ! Comme vous, nous tenons à une règle absolue qui consiste à ne pas cumuler deux avantages fiscaux sur une même assiette.

La CMP a confirmé le relèvement temporaire du plafond des aides de minimis – de 200 000 à 500 000 euros – et de la réduction d’ISF sur les investissements en fonds propres des PME. Je pense que vous y serez sensible, monsieur le ministre chargé du plan de relance !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur. Jusqu’à présent, une même entreprise ne pouvait bénéficier de plus de 1,5 million d’euros. Nous portons ce seuil à 2,5 millions d’euros. Des collègues ont estimé que certaines dispositions de la loi TEPA n’étaient pas des plus opportunes. La disposition améliorant les fonds propres des PME – personne ne contestera son efficacité, n’est-ce pas, monsieur le président de la commission des finances ! – est une excellente mesure.

Je dirai quelques mots sur les modifications apportées aux crédits : 375 millions d’euros viendront abonder le fonds de garantie d’OSEO. L’intervention en renforcement du fonds de roulement d’OSEO étant nouvelle, nous devrons la suivre de près dans le cadre de notre mission de contrôle et d’évaluation. Alors que les commandes se raréfient aujourd’hui, il faut que les entreprises puissent tenir le coup et faire face. À côté des efforts de l’État pour rembourser plus rapidement la TVA et les créances d’impôt sur les sociétés, l’intervention d’OSEO en consolidation de fonds de roulement est très importante.

Par ailleurs, 50 millions d’euros seront affectés à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, dans le cadre de l’effort massif que nous engageons en matière d’infrastructures de transport.

J’en viens maintenant au projet de loi de programmation des finances publiques, sur laquelle certains collègues s’interrogent. Pourquoi, selon eux, se doter aujourd’hui, compte tenu d’un contexte financier instable, d’une loi de programmation des finances publiques dont les chiffres risquent d’être, demain ou après-demain, obsolètes ? Pour ce qui me concerne, je ne partage pas cette interrogation. Je rappelle que la loi de programmation des finances publiques a vu le jour grâce à un amendement conjoint du président de la commission des finances et de moi-même, ce qui a conduit à réformer la Constitution pour y introduire la notion de programmation pluriannuelle. Pour moi, quels que soient les chiffres du déficit ou ceux des recettes, avec une hémorragie liée à la crise, c’est une raison supplémentaire, quand tout bouge, de garder quelques points fixes…

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Quand tout bouge, rien ne bouge ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur. … de garder quelques règles de gouvernancesur lesquelles nous ne devons pas transiger.

S’agissant des dépenses, la norme annuelle de progression des dépenses de l’État ne doit pas dépasser l’inflation. Par ailleurs, il faut une programmation triennale des crédits des missions. Dans quelques semaines, monsieur le ministre, vous allez aborder la discussion du budget pour 2010. Je ne doute pas que beaucoup de vos collègues, voire de nombreux députés, proposeront, au nom du plan de relance, d’augmenter tels ou tels crédits ou de baisser la TVA sur telle ou telle assiette.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Très bonne idée !

M. Gilles Carrez, rapporteur. Il y a là un risque de dérive important. Si nous nous éloignons de l’indispensable retour à l’équilibre de nos comptes, nous ne retrouverons plus jamais le droit chemin, ce que nous paierons très cher !

Il est donc indispensable de graver la programmation triennale dans le marbre, afin de vous aider au mieux à négocier au mieux avec les ministres dits « dépensiers ». Je ne vise évidemment pas le ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance, assis à vos côtés ! (Sourires.)

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Je ne l’entendais pas ainsi, en effet ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur. Nous devons réussir à isoler les dépenses du plan de relance, qui sont des dépenses d’anticipation : dépenses de trésorerie au bénéfice des entreprises, dépenses d’investissement que nous aurions faites en 2010, 2011, voire en 2012, que nous ne retrouverons plus ensuite. À cet égard, la loi de programmation sera d’une grande aide.

Dans la loi de programmation, outre la norme sur les dépenses d’assurance maladie, se pose la question des dépenses fiscales. Plus que jamais, la tentation est grande d’utiliser telle ou telle incitation fiscale pour conduire telle ou telle politique. Nous nous engageons sur le principe selon lequel toute diminution d’impôt doit être gagée par une augmentation. Dès lors, puisque la commission des affaires économiques a fait passer le taux de TVA sur l’accession sociale à 5,5 %, elle doit proposer une mesure de compensation du manque à gagner.

Cet exercice, auquel nous nous sommes efforcés de nous livrer pendant toutes les discussions des différentes lois de finances, doit être adossé sur une obligation juridique incluse dans la loi de programmation.

Cette dernière pose également le problème des chiffres. À cet égard, monsieur le ministre des comptes publics, je tiens à saluer votre souci de réactivité et de transparence. Lorsque, en septembre, le déficit public pour 2009 était évalué à 52 milliards d’euros, vous nous en avez immédiatement fait part ; de même lorsque la prévision est passée à 59 milliards en octobre, à 65 milliards en novembre, puis à 79 milliards en décembre, enfin à 86 milliards aujourd’hui.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Continuez donc, monsieur le rapporteur général !

M. Gilles Carrez, rapporteur. Il est vrai que cela donne l’impression d’un défilé, d’un cortège de chiffres…

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Un certain vertige !

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Vertige, non ! Tournis, oui ! (Sourires.)

M. Gilles Carrez, rapporteur. …qui ne vont pas dans le bon sens. Mais mieux vaut un texte dont on adapte progressivement les données chiffrées en fonction d’une situation mondiale extrêmement mouvante, qui comporte des règles, qui témoigne d’une réaction et satisfait à notre devoir de transparence, plutôt que rien du tout !

Dans cette optique, nous avons adopté les amendements de nos collègues sénateurs tendant à renforcer les règles de bonne gouvernance. Tout d’abord, la création de niches fiscales devra être compensée non sur cinq ans – demain, on rasera gratis ! –, mais dans l’année. D’autre part, nos collègues sénateurs ont souhaité que, si telle ou telle niche fiscale doit être créée, elle ne le soit que pour cinq ans. À travers ces règles de gouvernance, nous définissons dès à présent le cadre qui nous permettra de retrouver, une fois sortis de la crise, le chemin du redressement de nos finances publiques.

Je terminerai par deux réflexions sur ce point. La question de l’atterrissage dès que la crise commencera à s’estomper, et notamment celle du retour à l’ardente obligation d’équilibrer nos comptes publics, comporte en effet deux aspects, monsieur le président de la commission des affaires économiques.

Tout d’abord, un aspect économique et financier. Si nous ne sommes pas capables de redresser nos comptes publics alors que l’endettement du seul État a dépassé les mille milliards d’euros, toutes nos marges de manœuvre disparaîtront : nous ne pourrons plus ni investir ni améliorer les services publics. Un seul chiffre : en 2008, le coût de la dette a dû être majoré de 3,5 milliards d’euros par rapport à ce qui était prévu, soit près de deux fois le budget de la culture. C’est insupportable ! Un État surendetté est un État qui n’a plus aucune marge de manœuvre, qui n’a qu’un seul choix : rembourser sa dette.

La seconde considération, peut-être plus importante encore à mes yeux, est morale. Qui dit déficit dit dette et qui dit remboursement de la dette dit générations futures. Or nous n’avons pas le droit de léguer un fardeau insupportable aux générations qui nous suivent.

En conclusion, je souhaite saluer la qualité du travail que nous avons accompli ensemble, monsieur le ministre, en un temps record, il est vrai. Je remercie en particulier vos collaborateurs, avec lesquels nous avons travaillé dans un esprit de dialogue, un esprit constructif, presque au jour le jour. Je remercie également tous ceux de mes collègues qui ont participé à ces travaux, dans l’hémicycle ou en commission.

Je pense très sincèrement qu’avec ce plan de relance, nous faisons du très bon travail, et que nous devons continuer de nous préoccuper du retour à l’assainissement de nos comptes publics. Nous partageons ces objectifs ; dans ces conditions, je vous invite à voter le projet de loi de finances rectificative pour 2009 et le projet de loi de programmation des finances publiques compte tenu des textes adoptés par les commissions mixtes paritaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Guy Geoffroy. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Laure de La Raudière, rapporteure de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le 4 décembre dernier, à Douai, le Président de la République annonçait le plan de relance économique, dont les dispositions législatives et budgétaires ont été examinées en urgence à l’Assemblée comme au Sénat. En effet, la gravité de la crise mondiale que nous traversons nécessite des prises de décision rapides et adaptées à son ampleur.

J’adhère pleinement à l’esprit du plan de relance du Gouvernement, qui veut que la France sorte de la crise non pas exsangue, mais, au contraire, plus compétitive. C’est en investissant que nous construisons l’avenir et que nous maintiendrons l’activité.

Les décisions prises pour faire face à la crise de 1981 nous ont montré les limites des plans de relance fondés sur la consommation. Le plan de 1981 n’a eu aucun effet, si ce n’est qu’il a abouti au plan de rigueur de 1983.

M. Pierre-Alain Muet. N’importe quoi !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Reconnaissons aussi, tous ensemble, que les plans de relance fondés sur la consommation qu’ont lancés nos voisins, par exemple l’Angleterre, sont aujourd’hui sans effet.

En revanche, le dispositif de soutien au marché bancaire, les contreparties demandées aux établissements en question…

M. Roland Muzeau. Rien !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. …et la création du médiateur du crédit sont salués par tous, y compris à l’étranger. Lors de la réunion de contrôle de l’exécution de la loi que le président de la commission des affaires économiques, Patrick Ollier, a organisée le mardi 20 janvier, nous avons tous pu mesurer l’efficacité du dispositif, qui commence à porter ses fruits. Même s’il reste beaucoup à faire, reconnaissez-le, mes chers collègues – en particulier à gauche de l’hémicycle –, et avançons ensemble. J’en suis persuadée : en nous réunissant tous autour de ce projet, nous gagnerons en efficacité et nous sortirons plus vite et mieux de la crise.

Pragmatique, ambitieuse mais réaliste, et, plus que tout, réactive : telles sont les qualités de l’action du Gouvernement pour faire face à la crise.

Nous abordons aujourd’hui la phase finale de l’examen du projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés, dont j’ai l’honneur d’être la rapporteure.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Excellente rapporteure !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Merci, monsieur le président. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. François Brottes. Flagorneur !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Ce projet de loi contient des dispositions visant à permettre au plan de relance de produire les trois quarts de ses effets en 2009. Telle est l’ambition du Gouvernement et de la majorité présidentielle.

Une première série de mesures concerne la simplification des procédures administratives, attendue de longue date par les élus de tous bords. Je citerai en particulier l’alignement des seuils de procédures de commande publique sur les seuils européens, afin de faciliter et d’accélérer les achats de l’État et des collectivités locales, ou la création d’un régime d’autorisation simplifiée pour les installations classées.

Sur ce dernier point, soyons clairs : vous le savez tous, certaines installations classées ne nécessitent pas une procédure d’autorisation excessivement lourde, qui prend douze à quinze mois et se révèle totalement disproportionnée et injustifiée lorsque la population ne court en fait aucun risque. L’instauration de l’autorisation simplifiée ne vise certainement pas à faire passer en catimini, sans enquête publique, des installations dangereuses. L’information du public est bien sûr prévue, et la transparence nécessaire sera garantie.

Une deuxième série de mesures traduit la volonté de faciliter les contrats de partenariat public-privé, permettant ainsi aux collectivités de réaliser des projets par l’intermédiaire de montages financiers avantageux. Dans le contexte économique actuel, ces contrats sont naturellement particulièrement utiles aux collectivités. Nous devions donc autoriser la cession de 100 % de la créance du projet, tout en permettant aux collectivités de garder le contrôle des opérations en ne cédant que 80 % de l’acceptation. Grâce à ces nouvelles dispositions, le financement des projets des collectivités devrait être bouclé plus facilement. Cela aussi contribue à la relance économique.

Une troisième série de mesures concerne la simplification de certaines procédures en matière d’urbanisme. Lors de la discussion, en commission comme dans l’hémicycle, nous avons cherché le juste équilibre entre les contraintes nécessaires qu’impose la protection de notre patrimoine historique ou paysager – que personne ici, et surtout pas moi, ne remet en cause – et les contraintes, non moins nécessaires, des investissements publics et privés en matière de logement, de développement économique ou d’aménagement du territoire.

Voilà pourquoi nous avons souhaité encadrer les délais impartis aux opérations de prescription de diagnostic et de fouilles archéologiques. Conscients des enjeux, nous avons parallèlement augmenté le montant des taxes versées par les aménageurs afin de financer le fonds national pour l’archéologie préventive ou l’INRAP, l’établissement réalisant les fouilles archéologiques.

M. François Brottes. Bien maigre consolation !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Cet équilibre auquel nous sommes parvenus nous semble être de nature à protéger le patrimoine archéologique, si précieux pour éclairer notre passé, tout en assurant le développement des activités humaines actuelles, si précieuses pour l’avenir de notre société.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !

M. François Brottes. Quelle hypocrisie !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Nous avons également souhaité, à l’initiative de notre collègue Nicolas Perruchot, simplifier les décisions quotidiennes des élus en matière d’urbanisme dans les cinq cents zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager. Nous avons donc supprimé l’avis conforme de l’architecte des bâtiments de France.

M. Daniel Boisserie. Ridicule !

M. François Brottes. Scandaleux !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Je tiens à signaler ici que l’architecte des bâtiments de France rendra bien son avis – un avis simple.

M. François Brottes. Cela change tout !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Je rappelle à tous les élus – mais vous le savez – que les ZPPAUP sont fondées par un contrat entre l’État et la collectivité, lequel est instruit par l’architecte des bâtiments de France. Nous souhaitons donc renforcer ce type de contrat en amont, grâce à une procédure assurant toutes les prescriptions nécessaires s’agissant de zones qui doivent être protégées, et permettre aux élus, sur le fondement de ce contrat, de mettre en œuvre les projets des collectivités. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC.) Je rappelle également qu’il n’est nullement question de remettre en cause le rôle précieux des architectes des bâtiments de France dans les zones sauvegardées.

En somme, nous sommes attachés à notre patrimoine historique ; nous souhaitons travailler en amont avec les architectes des bâtiments de France sur les contrats des ZPPAUP ; nous voulons promouvoir les projets décidés par les conseils municipaux. Tel est le sens de l’amendement introduit en CMP.

Une quatrième série de mesures concerne nos PME. Une mesure importante pour leur trésorerie facilite la remise de dettes fiscales. Celle-ci était jusqu’à présent subordonnée à la remise d’une créance d’un fournisseur ; nous avons décidé ensemble que ce ne serait plus le cas, ce qui permettra à certaines entreprises de passer des caps difficiles.

Nous avons également souhaité la création d’un code de la commande publique, dont le travail de préparation par le Gouvernement suscite notre admiration. En quoi cela concerne-t-il les entreprises ? Aujourd’hui, nombre d’entre elles sont découragées d’intervenir sur les marchés publics par la complexité des procédures de la commande publique : baux emphytéotiques, contrats de partenariat, marchés publics, dérogations spécifiques selon qu’il s’agit de construire un stade, un hôpital ou un tribunal, tout cela mérite un toilettage.

Le futur code de la commande publique exclura dans un premier temps les marchés publics, qui continueront de relever du domaine réglementaire. Sachez, monsieur le ministre, que nous souhaitons être associés étroitement à l’élaboration de ce nouveau code et à quel point nous sommes attachés à l’amendement déposé par le Gouvernement.

Je m’arrêterai ici dans le détail des mesures pour souligner l’importance de ce projet de loi. Enrichi par notre assemblée puis par le Sénat, ce texte majeur va contribuer à la relance économique en faisant en sorte que les trois quarts du plan de relance soient réalisés en 2009.

M. Guy Geoffroy. C’est très important, en effet !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Monsieur le ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance, je tiens à vous remercier pour le travail constructif que nous avons effectué avec vous et vos équipes. Je salue également la disponibilité et les compétences dont chacun a fait preuve, en particulier les administrateurs de la commission, qui m’ont beaucoup aidée dans ma tâche de rapporteure. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance.

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais à mon tour adresser mes remerciements aux présidents des commissions pour la rapidité avec laquelle ils se sont saisis de ces deux textes. J’exprime ma gratitude à Mme la rapporteure et à M. le rapporteur général pour le caractère pédagogique et fouillé de nos débats. C’est à l’évidence le résultat d’une très bonne préparation, malgré des délais courts, j’en conviens, et je vous en sais gré ainsi qu’à vos collaborateurs. Vous avez parfaitement compris notre intérêt commun qui était d’aller vite, tout le monde sera d’accord sur ce point.

M. Jean Launay. L’essentiel n’est pas d’aller vite mais de viser juste !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Grâce à votre travail, nous disposons désormais de deux instruments pour mettre en œuvre le plan de relance de manière opérationnelle : un instrument financier, la loi de finances rectificative pour 2009, qui témoigne du caractère massif du plan ; un instrument en apparence plus complexe, le projet de loi relatif à l’accélération des programmes de construction et d’investissement, comportant des mesures diverses qui répondent, en réalité, à une même philosophie.

Il s’agit de simplifier des procédures sans en dénaturer les objectifs. C’est le cas, par exemple, pour les installations classées, comme vient de le souligner Mme la rapporteure.

Il s’agit aussi d’être efficace et de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement de dispositifs dans la conjoncture difficile que nous vivons. Les dispositions de la loi sur les partenariats public-privé illustrent bien ce point. C’est aussi le sens de la mesure que nous vous soumettons par amendement sur le caractère ajustable des offres remises dans le cadre de PPP.

M. François Brottes. Le sens de la mesure, ce n’est pas trop votre style !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Sous votre influence, on finit par comprendre !

Cet amendement n’est d’ailleurs que le rétablissement de la disposition que vous aviez adoptée en première lecture et qui facilitera, je le crois, la conduite des projets.

Il s’agit, enfin, d’assurer une bonne adéquation entre les objectifs que nous nous fixons et les moyens que nous mobilisons. Les débats sur l’archéologie préventive, sur les délais des fouilles et sur la redevance, nous ont permis d’atteindre cet équilibre.

Bien sûr, ce projet de loi n’a pas vocation à réformer l’ensemble de notre législation, ce n’était pas son but. Il regroupe un certain nombre de mesures dont la cohérence s’exprime dans leur assemblage. Il a pour ambition, comme je l’ai déjà précisé, de résoudre les difficultés les plus courantes rencontrées quotidiennement par les élus dans la conduite de leurs projets.

L’heure de l’action et de la mise en œuvre opérationnelle est maintenant venue.

Nous avons fait le choix de l’investissement. C’est une priorité assumée, car nous estimons que l’investissement, parce qu’il est ciblé, aura un effet multiplicateur et une diffusion sur le territoire plus large que des mesures orientées vers la consommation. Il vient renforcer le carnet de commandes des entreprises. C’est un gage de visibilité pour l’avenir et donc l’emploi. En somme, il constitue un facteur de confiance.

Aussi, devons-nous aujourd’hui dépasser les clivages qui nous séparent traditionnellement dans ce genre de débat. Nos concitoyens, qui ont de fortes attentes, ne comprendraient pas que nous ne fassions pas front commun pour une action collective face à cette crise grave. Le plan de relance s’adresse aux entreprises, aux ménages les plus vulnérables ainsi qu’aux collectivités locales.

La singularité de la France est à cet égard souvent pointée du doigt. On critique le nombre important de collectivités et l’enchevêtrement des compétences. Mais cette singularité est aujourd’hui une chance. Elle nous offre l’assurance que les donneurs d’ordre seront en capacité, sur tout le territoire, de prendre rapidement des décisions et de conforter le carnet de commandes des PME locales.

Dans cette perspective, le remboursement anticipé du FCTVA prend tout son sens, de même que la simplification de la passation des marchés publics, qui n’altère en aucun cas le bon respect des règles de la concurrence

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous disposons à présent d’une boîte à outils « plan de relance ». Elle offre les moyens d’accomplir la mission que m’ont confiée le Président de la République et le Premier ministre. Les collectivités locales et les élus ont un rôle fondamental à jouer, on ne le répétera jamais assez.

M. François Brottes. Ils n’ont pas de moyens !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Je vous rendrai régulièrement compte de mon action. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

M. Roland Muzeau. Tout va bien !

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur général, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, je me réjouis que nous puissions discuter en même temps des conclusions de la commission mixte paritaire sur le collectif de relance et sur le projet de loi de programmation des finances publiques. Car, en dépit peut-être des apparences – mais les apparences sont souvent trompeuses –,…

M. Michel Piron. C’est la caverne de Platon !

M. Éric Woerth, ministre du budget. …ces deux lois forment en réalité un tout cohérent : elles constituent les deux faces complémentaires de la politique budgétaire que l’État doit mener face à la crise. Elles combinent la mise en œuvre d’un soutien à l’économie massif mais ciblé et limité dans le temps, avec le plan de relance, et le maintien du cap des réformes, celui de la maîtrise des dépenses courantes et de la gestion responsable des recettes, avec la loi de programmation.

Discuter dès janvier d’une loi de finances rectificative constitue sans conteste une innovation, comme l’a souligné Gilles Carrez. C’était indispensable. En votant dès le 29 janvier le plan de relance, vous permettrez à la France de disposer des armes nécessaires pour lutter contre la crise dans les délais les plus courts et bien en avance sur la plupart de nos partenaires. Nous ne prenons – et ne prendrons – aucun retard dans la mise en place des diverses mesures, Patrick Devedjian y veille scrupuleusement. En ce qui concerne plus particulièrement mon ministère, je peux vous assurer, par exemple, que les remboursements de crédits d’impôt, décidés lors du collectif de décembre, ont déjà commencé.

Les discussions sur ce texte ont été denses tant à l’Assemblée qu’au Sénat : elles ont permis à chacun, dans la majorité comme dans l’opposition, d’apporter sa pierre au débat nécessaire sur les moyens de répondre à la crise.

Mais je veux revenir sur certains arguments. Le parti socialiste nous accuse toujours d’un manque de soutien à la consommation. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Cacheux. C’est vrai !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Je le redis encore une fois : on ne peut pas raisonner en oubliant les mécanismes de transferts sociaux puissants déjà à l’œuvre dans notre pays. On ne peut pas raisonner en oubliant la baisse de l’inflation en 2009, dont l’effet serait quasiment trois fois plus puissant sur le pouvoir d’achat des ménages que la baisse d’un point de TVA.

On nous dit encore que notre plan serait moins ambitieux que celui de nos partenaires. Mais alors que l’Allemagne a dû procéder à un ajustement du barème de l’impôt sur le revenu pour corriger les effets passés de l’inflation, notre système fiscal l’a déjà effectué de manière automatique.

M. Roland Muzeau. Pour les riches !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Quant à Barack Obama, il promet la mise en place d’une couverture maladie universelle, qui est chez nous, inutile de vous le rappeler, une réalité déjà bien ancrée.

M. François Brottes. Grâce à qui ?

M. Alain Cacheux. Grâce à la gauche !

M. Éric Woerth, ministre du budget. C’est une évidence, mais je tiens à le rappeler : la réponse à la crise doit être adaptée à chaque pays !

M. Michel Bouvard. Très juste !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Quand le Royaume-Uni ou les États-Unis aident en priorité leurs ménages, parce que leur protection sociale est faible, c’est la réponse adaptée pour les pays anglo-saxons. Quand l’Allemagne réinvestit dans les infrastructures de l’ouest du pays, qu’elle avait un peu délaissées, c’est la réponse adaptée pour la République fédérale. Quand nous orientons notre plan sur l’investissement et la compétitivité des entreprises, domaines où l’économie française souffre de faiblesses, c’est la réponse adaptée pour notre pays.

Vous le voyez, chacun essaye naturellement de faire d’une pierre deux coups : soutenir l’activité en répondant aux problèmes structurels de son pays et en préparant l’avenir.

Je me tourne vers les rangs de l’opposition, qui estime qu’il n’y a pas assez de mesures en faveur de la consommation : je persiste à penser qu’il y a là une erreur de raisonnement, car les budgets votés soutiennent le revenu et la consommation. Vous dites que le déficit est subi et que cela a moins d’efficacité qu’un déficit suscité. Je persiste à penser qu’il y a, là aussi, une erreur de raisonnement.

Prenez un exemple : l’indexation des prestations sur les prix. Elle est de droit dans notre pays. Si on ne la remet pas en cause alors que les recettes de nos systèmes sociaux ralentissent, le déficit se creuse. L’effet est-il différent de celui d’une mesure discrétionnaire comme celle prise par les Allemands, dont la législation ne comprend pas cette indexation de droit ? Non, à l’évidence.

Nous avons beaucoup dialogué, nous ne vous avons pas convaincus. Soit ! Si j’ai bien compris, vous estimez notre plan insuffisant…

M. Roland Muzeau. Et injuste !

M. Éric Woerth, ministre du budget. …mais vous n’êtes pas allés jusqu’à juger que les mesures que nous proposons portent préjudice à notre pays, à notre économie, à nos concitoyens. Juger que cela ne suffit pas, c’est votre droit, mais pourquoi cela vous conduit-il à voter contre, sinon par posture politique ?

M. François Brottes. C’est pour vous pousser à faire mieux !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Pourquoi ne pas voter pour et attendre ? Je note d’ailleurs que, par temps de crise, vous pourriez abandonner ce genre d’attitude, reconnaissez-le.

M. Roland Muzeau. Demandez donc aux personnes qui manifestent en ce moment place de la Bastille ce qu’elles en pensent !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Pour revenir plus précisément sur le texte que nous examinons aujourd’hui, nos débats ont permis de l’enrichir sur plusieurs points.

Je pense, par exemple, à la possibilité de cumuler le bénéfice de l’éco-prêt à taux zéro et du crédit d’impôt en faveur du développement durable. Je note que la CMP a souhaité assortir cette possibilité d’une condition de ressources, avec un seuil fixé à moins de 45 000 euros. Le doublement des avantages est une mesure puissante, tournée vers les revenus moyens.

Je pense également à l’adaptation temporaire des plafonds de certaines aides fiscales pour tirer parti du relèvement des seuils d’aides de minimis adopté par la Commission, c’est-à-dire les seuils en dessous desquels il n’est pas nécessaire d’avoir l’accord de l’Union européenne. Ce sont au moins 200 000 entreprises qui vont pouvoir bénéficier d’aides fiscales ou budgétaires de 500 000 euros, au lieu de 200 000 euros, sur trois ans.

Je pense enfin au calibrage du dispositif de soutien à l’investissement des collectivités locales et aux discussions nourries que nous avons eues sur la référence à retenir pour apprécier l’effort d’investissement tenant lieu de base pour le doublement du remboursement du FCTVA en 2009.

Sur l’ensemble de ces points, et en particulier sur la question du FCTVA, le texte issu de la CMP me semble un bon compromis. La période de référence, la moyenne des années 2004 à 2007, est comme la barre des perchistes dont parlait le rapporteur général : ni trop basse pour que les collectivités locales puissent fournir un effort suffisamment important pour favoriser la relance, ni trop haute pour qu’elles puissent la franchir largement. En concentrant l’effort sur l’année 2009, le dispositif reste pleinement incitatif.

Comme je l’ai déjà dit au Sénat, cela n’exclut en rien de réexaminer la question si nécessaire, par exemple lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010, mais toujours de façon incitative.

M. Gilles Carrez, rapporteur. Très bien !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Cela dit, j’ose espérer que nous n’aurons pas à le faire.

À l’exception d’un amendement de simple coordination à l’article d’équilibre, le Gouvernement vous propose donc de conserver le texte issu de la commission mixte paritaire.

M. Gilles Carrez, rapporteur. Très bien !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Après l’impératif de la relance rapide, j’en viens maintenant aux dispositions à moyen terme, c’est-à-dire à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. Les deux sont indissociables. En effet, la relance ne peut réussir sans s’inscrire dans un assainissement à terme des finances publiques.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. Éric Woerth, ministre du budget. La loi de programmation met en œuvre, pour la première fois, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui consacre cette nouvelle catégorie de loi. Son élaboration a été le fruit d’une collaboration très étroite avec les parlementaires, que je remercie, et au premier chef avec votre commission des finances, son président et son rapporteur général.

Cette collaboration sur la mise au point initiale, au sein d’un groupe de travail, a permis de déterminer ensemble la forme la plus adaptée. Je précise qu’elle a été continue, si j’ose dire, tout au long des débats, afin non seulement, comme d’habitude, d’améliorer le texte mais aussi de remettre à jour les hypothèses macroéconomiques en novembre dernier.

Mais la période que nous vivons est unique, tant d’événements s’étant produits entre novembre et aujourd’hui.

D’un point de vue législatif, les amendements que je vous présenterai tout à l’heure tirent les conséquences du vote de la loi de financement de la sécurité sociale, du collectif de fin d’année 2008 et du collectif pour 2009. En termes plus concrets, il nous faut intégrer les effets du plan de relance et les moins-values de recettes constatées sur l’exécution 2008. J’y reviendrai dans un instant.

Certains pourraient penser que, compte tenu de la crise, se projeter à l’horizon 2012 n’a plus d’intérêt, que cette loi n’a pas de portée et que ces révisions multiples en sont précisément la preuve. Je ne partage pas du tout cet avis, bien au contraire.

Certes, personne ne peut prétendre savoir aujourd’hui quand la reprise aura lieu et à quel rythme. Mais au-delà du fétichisme des chiffres, ce qui est important, c’est de se donner des règles de conduite de la politique budgétaire, des règles sur la dépense et sur la préservation des recettes. Ce sont ces principes qui permettront l’assainissement de nos finances publiques une fois l’environnement économique redevenu porteur.

Quelles sont ces règles ?

Il faut d’abord une gestion prudente des recettes, une gestion qui n’oblige pas à compenser des baisses de recettes dues à la faiblesse de l’activité économique par des hausses d’impôt, mais surtout des règles qui gagent les créations de dépenses fiscales et de niches sociales pour mettre fin à leur prolifération galopante. C’est un point très novateur, qui répond aux vœux récurrents de beaucoup, n’est-ce pas Gilles Carrez ?

Il faut ensuite des règles de maîtrise des dépenses, avec des objectifs chiffrés précis, que ce soit pour l’État ou la sécurité sociale, et notamment pour l’ONDAM, dont la progression en euros courants est fixée à 3,3 %.

Encore plus précisément pour l’État, la loi contient des plafonds de dépenses par mission pour les trois prochaines années – c’est une première dans notre histoire budgétaire. Ces plafonds traduisent, ou plutôt traduiront si vous adoptez l’amendement correspondant, deux axes majeurs de notre politique budgétaire.

Le premier axe concerne le plan de relance, avec la nouvelle mission. C’est la meilleure illustration du caractère temporaire du plan. Avec Patrick Devedjian, nous sommes déterminés à utiliser tous les crédits, à faire preuve de toute la souplesse nécessaire dans la fongibilité des crédits entre les différentes mesures du plan de relance. Mais ces crédits s’éteindront fin 2010, et l’accélération des investissements en 2009 et 2010 entraîne des diminutions de crédits les années suivantes, de l’ordre de 500 millions d’euros en 2010 et d’un milliard en 2011.

Ces plafonds traduisent aussi la volonté réaffirmée, s’il y avait un doute, de maîtriser les dépenses « ordinaires » sur la durée. Dans cet environnement où tout bouge, voilà le point fixe, voilà la pierre angulaire pour l’assainissement à moyen terme de nos finances publiques. On ne peut pas, même face à une crise de cette ampleur, mettre en péril la soutenabilité à moyen terme de nos finances publiques.

La maîtrise des dépenses est un impératif, pour des raisons éthiques tout d’abord. Qu’aurions-nous résolu si, sous couvert de lutter contre la crise, nous ne faisons que reporter sur nos enfants encore plus de dettes et des charges insupportables ? Ne croyez-vous pas que cela suffise ?

La maîtrise des dépenses est un impératif pour des raisons très pratiques également. Comme l’a rappelé le Premier ministre mardi, nous ne pouvons pas mettre en danger la signature de la France. C’est la solvabilité de l’État qui nous assure un financement aujourd’hui avantageux. C’est un cercle vertueux : un plan de relance qui conforte l’activité aujourd’hui, sans dégrader les finances publiques demain, c’est un plan qui peut être financé avec des taux d’intérêt faibles.

Concernant plus précisément les amendements, je ne vous proposerai aujourd’hui que des modifications de coordination par rapport à la version du texte issue de la commission mixte paritaire. Cette coordination nécessite quelques ajustements rédactionnels dans la loi et l’ajustement des prévisions de finances publiques, conformément à ce que j’ai présenté à votre commission des finances la semaine dernière. Il faudra également modifier en conséquence le rapport annexé, dont les passages conjoncturels vieillissent mal par les temps qui courent.

Les principaux chiffres à amender sont les suivants.

Le déficit de l’ensemble des administrations publiques est désormais prévu à 3,2 points de PIB en 2008, 4,4 points de PIB en 2009, 3,1 points en 2010, 2,3 points en 2011 et 1,5 point en 2012.

La dette publique atteindrait 67 points de PIB en 2008, pour monter jusqu’à 70,5 points de PIB en 2010, et revenir à 68,6 points de PIB en 2012.

Je le répète, aussi important soient-ils, le cœur de la loi n’est pas dans ces chiffres, mais dans les plafonds de dépenses et dans l’ensemble des dispositions qu’il n’est pas nécessaire de modifier aujourd’hui. Quand tous les gouvernements du monde doivent naviguer d’une nappe de brouillard à une autre, la boussole des finances publiques, ce sont bien les plafonds de dépenses.

Je remercie votre Assemblée pour tout le travail accompli, celui de votre commission des finances bien sûr, mais aussi de l’ensemble des députés ainsi que des administrateurs. Je crois sincèrement que, dans l’univers incertain où nous sommes, nous donnons aujourd’hui des bases plus solides à notre politique budgétaire, conformément à l’esprit de la réforme constitutionnelle. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je ferai quelques observations sur les trois textes qui nous sont soumis aujourd’hui, étant entendu que nous avons déjà eu l’occasion de nous exprimer à plusieurs reprises, tant sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 que sur ce que le Gouvernement appelle le plan de relance,...

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est un plan de relance !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. ...et que nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de l’année.

Quelques mots d’abord sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 dont l’existence même est positive. Une fois de plus, je tiens à saluer cette initiative. La pluriannualité est nécessaire et indispensable, car elle permet une bonne visibilité de nos finances publiques. Le Parlement est directement informé de la trajectoire des finances publiques sur trois ans. Je me réjouis également que le Gouvernement ait accepté un amendement permettant d’indiquer les soldes par sous-secteur, ce qui contribue à la lisibilité.

Je me félicite de l’adoption d’un certain nombre de règles de bonne gouvernance, notamment à travers la fixation d’objectifs annuels pour l’évolution des dépenses fiscales et des niches sociales. La commission des finances notamment est extrêmement sensible à ce sujet. Les règles établies dans ce projet de loi me semblent aller dans le bon sens.

Après les aspects positifs, venons-en aux points négatifs.

M. Jean Launay. Ils sont nombreux !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Le rapporteur général vient de nous dire que les chiffres n’étaient pas essentiels – et on comprend pourquoi ! Je crois qu’il a en partie raison : dès lors que les chiffres sont révisables et souvent révisés, mieux vaut s’en tenir aux règles de bonne gouvernance, qui sont effectivement ce qu’il y a d’essentiel dans ce texte. Cela dit, on peut regretter que vous n’acceptiez pas, messieurs les ministres, de réviser d’ores et déjà vos hypothèses de croissance pour 2009 qui figurent dans le projet de loi que nous voterons dans un instant, car elles sont en total décalage avec ce que disent les économistes, avec les hypothèses de travail du Fonds monétaire international et de la Commission européenne.

M. Daniel Boisserie et M. Roland Muzeau. Eh oui !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Du reste, ce décalage s’accentue de semaine en semaine, pour atteindre deux points d’écart, ce qui est considérable...

M. Roland Muzeau. Ahurissant !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. ...et pose, d’une certaine façon, la question de la crédibilité du gouvernement français vis-à-vis de ses partenaires européens et des experts économiques.

Ce texte comporte d’autres invraisemblances, comme les prévisions concernant les dépenses et le besoin de financement des collectivités locales, qui demeurent inchangées alors qu’elles sont appelées à investir. Dans un premier temps, vous souhaitiez que les collectivités territoriales dépensent moins, considérant qu’elles sollicitaient trop un besoin de financement. Puis, en quelques semaines, gravité de la crise oblige, vous avez changé votre discours, les invitant à investir davantage, sans pour autant en tirer les conséquences au niveau du solde de nos comptes publics. Il y a là une contradiction, voire une certaine incohérence.

Quelques mots enfin sur le plan de relance. J’ai eu l’occasion, avec d’autres, de regretter son caractère unijambiste,...

M. Roland Muzeau. Cul-de-jatte même !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. ...et je continue de penser que c’est un défaut par rapport à la réalité à laquelle nous sommes confrontés.

S’il y a décalage entre vos prévisions et celles des conjoncturistes, je note aussi des divergences entre l’analyse que vous faites de la crise et celle que font tous les économistes, ce qui entraîne nécessairement des divergences entre les mesures qui sont proposées et prises.

Par exemple, le Fonds monétaire international considère qu’elle a pour composante principale un effondrement de la demande. C’est également ce que pense la Commission européenne, qui préconise une injonction massive de pouvoir d’achat pour soutenir la demande et restaurer la confiance.

C’est encore ce que soutient le directeur général de l’INSEE dans un récent entretien qu’il a accordé au journal Le Monde : il faut soutenir la demande.

Vous nous expliquez qu’il ne s’agit pas d’un problème touchant à la demande mais seulement d’un retard d’investissements à rattraper ou, tout simplement, qu’il est question d’avancer certains investissements. Il y a donc divergence entre nous sur les mesures prises. Je suis de ceux qui considèrent que le plan français n’est ni global ni massif, qu’il ne correspond pas aux caractéristiques souhaitées par le Fonds monétaire international ou par la Commission européenne. Il est par ailleurs déséquilibré, sans effet immédiat sur la demande, au contraire de ce qui se passe partout ailleurs – en Allemagne, aux États-Unis, au Royaume Uni, notamment – où l’on insiste sur la nécessité de relancer la demande. Or vous faites l’impasse sur la demande, sur le pouvoir d’achat. Je pense que vous serez contraints de nous présenter, d’ici à quelques semaines ou quelques mois, un second plan de relance qui prendra davantage en considération ces éléments.

Je sais bien, messieurs les ministres, que ce débat n’épuisera pas la question, que nous aurons d’autres occasions d’en parler. Vous avez souhaité que, face à la gravité de la crise, nous nous retrouvions. Nous le pourrions d’autant plus facilement si votre plan était à la fois global, massif, équilibré et d’effet immédiat. Or ce que vous proposez se réduit à des avances de trésorerie, à l’anticipation de certaines dépenses qui, en toute hypothèse, devraient être réalisées. Ce plan n’est donc pas à la hauteur d’une crise d’une extrême gravité, qui nécessite l’utilisation de tous les leviers dont nous pouvons disposer. C’est en tout cas le vœu que je forme et je suis persuadé que nous nous retrouverons, messieurs les ministres, pour commenter des propositions que vous ne tarderez pas à nous faire compte tenu de la conjoncture. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Discussion générale commune

M. le président. Dans la discussion générale commune, la parole est à M. Nicolas Perruchot.

M. Nicolas Perruchot. Monsieur le président, messieurs les ministres, messieurs les présidents de commissions, monsieur le rapporteur général, madame la rapporteure, mes chers collègues, je suis très heureux de m’exprimer devant une assemblée si fournie, si garnie.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure, et M. Patrice Martin-Lalande. Choisie !

M. Nicolas Perruchot. Je salue les collègues qui ont su braver les difficultés de la grève et qui sont, malgré tout, présents.

M. Roland Muzeau. Vous voyez bien que, contrairement à ce que dit le Président de la République, les grèves ne passent pas inaperçues !

M. Nicolas Perruchot. C’est bien sûr avec le souhait que l’hémicycle continue de se garnir, que je commence cette intervention.

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 s’inscrit dans le cadre défini par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Désormais, grâce, notamment, à l’amendement du groupe Nouveau Centre adopté lors de cette réforme, le Gouvernement, selon l’article 34 de la Constitution, a l’obligation de déposer un projet de loi de programmation permettant la fixation, par le Parlement, de la trajectoire des finances publiques, visant l’objectif d’équilibre des comptes de l’ensemble des administrations publiques.

Cette inscription dans la Constitution du principe de l’équilibre des comptes publics constitue une double avancée. Pour la première fois dans la Constitution, il est fait référence au principe d’équilibre des comptes de l’ensemble des administrations publiques. Ont ainsi été définies les règles de maîtrise des dépenses de l’État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales. Pour la première fois également, est affirmée la nécessité de concilier l’exigence de la pluriannualité budgétaire et celle de l’équilibre des comptes publics. Ainsi, la stratégie proposée est claire : le redressement de nos finances publiques doit être atteint sans augmentation du poids des impôts et des charges, mais entièrement grâce à la maîtrise des dépenses.

En première lecture, le groupe Nouveau Centre a souhaité attirer l’attention du Gouvernement sur un point : l’intégration dans le périmètre global des dotations du Fonds de compensation de la TVA. Trois raisons justifient notre volonté de sortir le FCTVA du périmètre global des dotations.

D’abord, l’investissement se trouve pénalisé dans la mesure où le remboursement de FCTVA sera en réalité financé par les collectivités sur leurs autres dotations. Or je vous rappelle, chers collègues, que les collectivités locales représentent près des trois quarts des investissements publics civils de la nation.

Ensuite, c’est un remboursement partiel de fiscalité qui doit faire l’objet d’un traitement spécifique. Il ne s’agit en effet ni d’une subvention – il a un caractère automatique –, ni d’un remboursement intégral – certaines dépenses ne sont pas éligibles –, ni d’une dotation globale – il est lié aux dépenses effectuées.

Enfin, l’intégration du FCTVA dans le périmètre global des dotations a de graves conséquences financières pour les collectivités territoriales, provoquant notamment une perte de 663 millions d’euros.

Le Nouveau Centre continuera donc de mener ce combat pour que le rôle du FCTVA dans la participation au financement des investissements des collectivités soit préservé.

En ce qui concerne le plan de relance, deux volets sont à distinguer : le volet budgétaire contenu dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009 et le volet économique.

En ce qui concerne le volet budgétaire, le groupe Nouveau Centre votera, comme en première lecture, en faveur du projet de loi de finances rectificative. En effet, le plan de relance s’inscrit dans un cadre européen et international. Or, à l’heure où la crise est globale, il est essentiel que notre plan de relance prenne en considération les difficultés mais aussi les paramètres positifs qui composent l’économie française, et intègre les mesures prises par nos partenaires, qu’ils soient ou non européens.

Le montant du plan français – 26 milliards d’euros – équivaut à 1,3 % du produit intérieur brut, alors que l’Union européenne a demandé aux États membres, au début de la crise, de réaliser des plans à hauteur de 1,2 % du PIB. Le nôtre se situe donc au-dessus de cette exigence.

Sur le plan international, ensuite, on annonce qu’aux États-Unis le président Obama va lancer un plan de relance de 800 milliards de dollars, soit 600 milliards d’euros. Ce plan est utile, car il devrait, je l’espère, bénéficier à nos entreprises, à nos PME en particulier. Il est en outre important par son ampleur.

Le projet du Gouvernement présente pour nous l’avantage d’être un plan de relance par l’investissement, les ministres viennent de le rappeler. Plus d’investissement, c’est plus d’activité, de valeur ajoutée et d’emplois. L’investissement, c’est aussi un moyen de rattraper le retard de compétitivité accumulé ces dernières années.

Ce choix est très critiqué par l’opposition, moins sur le principe que parce qu’il manquerait un volet consommation à ce plan. Aussi, ferai-je deux remarques à nos collègues socialistes : ce second volet sur le pouvoir d’achat existe déjà dans la loi de financement de la sécurité sociale et dans la loi de finances,…

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Bien sûr !

M. Nicolas Perruchot. …même si nous ne l’avons sans doute pas assez dit.

M. Roland Muzeau. Quelle surprenante discrétion, en effet !

M. Nicolas Perruchot. Voyons les chiffres, monsieur Muzeau. En effet, les mesures prises pour la revalorisation des petites retraites et des pensions de réversion entraînent une augmentation de 6,1 % de l’ensemble des avantages vieillesse – soit 12 milliards d’euros supplémentaires. Il convient de rappeler qu’il s’agit là de mesures qui favorisent le pouvoir d’achat.

M. Patrice Martin-Lalande. M. Perruchot a raison !

M. Nicolas Perruchot. Les dispositions relatives au RSA, qui permettent d’atteindre un montant global de 1,5 milliard d’euros, stimulent elles aussi le pouvoir d’achat de populations paupérisées ou très paupérisées.

Nous en sommes déjà à 13,5 milliards d’euros votés par la majorité et qui contribuent, on le constate d’ores et déjà, à améliorer le pouvoir d’achat de nos concitoyens.

Les mesures de relance par la consommation, telles que les baisses ciblées de TVA, la revalorisation du SMIC ou encore la multiplication des emplois publics, sont économiquement contre-productives parce qu’elles entraîneraient, à n’en pas douter, une hausse des importations.

M. Roland Muzeau. Ce n’est pas vrai !

M. Patrice Martin-Lalande. Mais si, c’est vrai !

M. Nicolas Perruchot. Ce phénomène s’est pourtant bien produit, monsieur Muzeau, et je pense à une hausse de l’importation de produits chinois.

M. Roland Muzeau. C’est faux !

M. Nicolas Perruchot. Eh bien, vous nous prouverez le contraire.

M. Roland Muzeau. Si les revalorisations sont ciblées, elles ne sont pas contre-productives !

M. Nicolas Perruchot. Presque toutes les mesures que vous préconisez sont des trappes à pauvreté.

M. Roland Muzeau. Vous avez bonne mine en avançant de tels propos !

M. Jean Launay. Avec vous, les trappes ouvrent sur des gouffres !

M. Nicolas Perruchot. Je ne crois pas à cette relance par la consommation dans le contexte actuel. J’ajoute qu’en venant à l’Assemblée, j’écoutais avec attention des gens s’exprimer à la radio sur le mouvement de grève que nous subissons aujourd’hui,…

M. Roland Muzeau. Nous ne le subissons pas, nous le vivons !

M. Nicolas Perruchot. …grève très largement liée au pouvoir d’achat – thème le plus présent sur les banderoles. Certains auditeurs soutenaient ce mouvement, ce qui est bien normal, tandis que d’autres la critiquaient nettement, estimant que le pouvoir d’achat avait été affecté pour deux raisons qu’il nous faut bien nous rappeler : d’abord, l’euro a certes joué un rôle protecteur dans la crise actuelle mais également, il faut intégrer cette donnée dans nos réflexions sur le pacte européen de relance, le passage à la monnaie unique a affecté le pouvoir d’achat ; ensuite, ceux qui ne se reconnaissent pas dans cette grève et qui se sentent peu représentés ici invoquent l’impact des 35 heures sur l’économie nationale.

Le poids des 35 heures est très important. J’ai souvenir d’une mission d’évaluation et de contrôle mise en place il y a quatre ou cinq ans à l’Assemblée, au cours de laquelle nous avions réalisé une soixantaine d’auditions pour tenter de mesurer le coût économique et social des 35 heures. À l’époque, Martine Aubry, auditionnée la dernière, avait affirmé – ce qui est sans doute révélateur du fond de sa pensée et de celle du parti socialiste – qu’il ne fallait pas s’en tenir là et qu’il faudrait s’acheminer vers une durée légale du temps de travail hebdomadaire de 32 heures.

Sur le fond, on peut analyser la crise comme on veut, expliquer que c’est la faute de tel ou tel, la responsabilité du Président de la République et du Gouvernement…

M. Roland Muzeau. C’est la crise du capitalisme !

M. Nicolas Perruchot. Si la réalité était aussi simple que cela, il serait très facile de résoudre la crise, monsieur Muzeau : nous passerions à un autre système et tout irait bien mieux !

M. Roland Muzeau. Ce n’est pas moi qui l’affirme mais le Président de la République !

M. Nicolas Perruchot. Il convient de bien prendre conscience que la France, seul pays au monde à mettre en place cette réduction du temps de travail, seul pays à ne pas vouloir en finir avec ce dispositif assez tôt, en pâtit aujourd’hui très largement.

M. Roland Muzeau. Ce n’est pas vrai !

M. Nicolas Perruchot. Il convient de rappeler que, dans toutes les TPE et de nombreuses PME, se fait entendre cette supplique pour la suppression des 35 heures.

M. Roland Muzeau. Vous n’entendez pas, en revanche, la supplique pour la hausse des salaires !

M. Nicolas Perruchot. Parlons-en, monsieur Muzeau !

M. le président. Seul M. Perruchot à la parole !

M. Roland Muzeau. M. Perruchot m’interpelle, je réponds !

M. Nicolas Perruchot. J’entends bien vous répondre sur ce sujet, monsieur Muzeau. Les premières personnes venues me voir dans ma permanence sont les ouvriers et les employés, qui ont subi les premiers l’impact des 35 heures car ils ne pouvaient plus réaliser d’heures supplémentaires, et donc leur salaire a considérablement baissé,…

M. Roland Muzeau. Parce qu’il y a eu blocage des salaires !

M. Nicolas Perruchot. …au contraire des cadres et des cadres supérieurs qui, eux, ont pu bénéficier, peut-être, de la réduction du temps de travail.

Enfin, pour en revenir au plan de relance, nous le voterons parce qu’il est limité dans le temps, l’essentiel des mesures n’ayant d’incidence que pour 2009, l’année 2010 n’étant affectée qu’à hauteur d’un milliard d’euros.

Cependant, le Nouveau Centre estime que deux contraintes doivent être respectées. Il s’agit d’abord du retour à l’équilibre budgétaire. Comme l’a bien dit Éric Woerth, la crise nous a obligés à revoir cet objectif, mais cela doit rester exceptionnel et temporaire et ne doit en aucun cas remettre en cause le principe du retour à l’équilibre. Il faut donc tenir la dépense publique.

Ensuite, une partie des mesures ne sont pas suffisamment liées à un effort d’investissement. En ce qui concerne, par exemple, la mesure concernant le FCTVA – mesure incitative forte –, il est simplement demandé aux collectivités de ne pas abaisser leurs investissements. On aurait pu leur demander un effort plus important que l’euro supplémentaire exigé.

Pour le calcul de cet effort, la commission des finances a proposé de passer d’une moyenne triennale à une moyenne quinquennale, proposition que le Nouveau Centre a soutenue. Nous sommes donc passés de 2004 à 2007, si je ne me trompe. Il s’agit d’une mesure utile, même si l’on aurait pu élargir le nombre d’années pour réduire l’assiette d’investissement et, par là, inciter davantage de communes à le mettre en œuvre.

Je rappelle que, sur cette mesure, 2,5 milliards ont été budgétés, pour un impact estimé à une commune sur deux. Mais beaucoup de communes nous disent déjà qu’elles ne pourront pas mettre en œuvre cette disposition. Je crois que c’est dommage et dommageable. J’espère, monsieur le ministre, qu’elle pourra être reconduite dans les années qui viennent, en tout cas dans le prochain projet de loi de finances.

Pour ce qui est du crédit d’impôt recherche, de la mensualisation du remboursement de TVA ou encore de l’anticipation des déficits pour l’IS, le remboursement de ces sommes aurait pu être, là aussi, conditionné à un effort d’investissement plus important.

Concernant, enfin, le volet économique, nous y sommes également totalement favorables. Il poursuit un objectif de simplification de certaines procédures. C’est là une mesure de bon sens. Nombreux sont ceux qui se plaignent de la lourdeur ainsi que de la lenteur des procédures, et qui finissent parfois par être découragés, voire par abandonner leur projet. Cette simplification est une mesure simple mais utile pour relancer l’investissement, tout en étant neutre pour nos finances publiques.

Je me félicite, à ce titre, que l’un des amendements concernant l’avis des architectes des bâtiments de France ait été retenu. Un avis simple sera demandé, et non plus un avis conforme. Cet amendement permettra de débloquer beaucoup d’investissements qui étaient jusqu’alors considérablement ralentis et parfois même empêchés par la nécessité d’un avis conforme.

Et dans le même esprit, le texte encadre désormais l’archéologie préventive. Sans porter atteinte à son rythme et à ses contraintes particulières, la loi permettra désormais de la faire cohabiter avec les réalités économiques de la construction et de l’urbanisme, dont les intérêts sont bien souvent divergents.

L’examen par les deux assemblées a permis de donner davantage encore de consistance et de cohérence à ce texte, notamment en en supprimant l’article 7, qui n’y avait pas sa place et pouvait donner l’impression d’un texte fourre-tout, et en prévoyant des dispositions destinées à permettre le développement de la fibre optique. La fracture numérique est une réalité qu’on ne peut pas accepter et contre laquelle il faut absolument lutter. Beaucoup de collectivités se sont engagées dans cette voie. Et je crois que ce sera évidemment utile. Les investissements sont lourds et coûteux, mais ils sont essentiels pour l’équilibre de nos territoires.

Le texte final rassemble donc une série de bonnes mesures, mais nous tenons néanmoins à vous faire une dernière proposition, messieurs les ministres, qui nous semble de bon sens. Elle consisterait à mettre en place un groupe de travail chargé du suivi et de l’accompagnement de ce plan de relance. Jusqu’à maintenant, vous nous avez répondu que cette tâche relevait des missions des commissions des finances et des affaires économiques du Parlement,…

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Pas seulement.

M. Nicolas Perruchot. …dont je veux saluer ici le travail. Il me semble que la situation est suffisamment exceptionnelle,…

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Vous avez raison.

M. Nicolas Perruchot. …que les moyens engagés sont d’une telle ampleur, que les outils utilisés, les secteurs touchés et les acteurs concernés sont suffisamment divers, mais également qu’une certaine méfiance peut exister au sein de la population au sujet de l’utilisation de ces dépenses, pour que leur affectation soit contrôlée par des représentants de la nation spécialement réunis à cet effet. J’ai bon espoir d’être entendu, car la création de ce groupe de travail me paraît utile à l’heure où nous engageons autant d’argent dans la relance de notre économie.

Tous ici, dans nos collectivités locales, nous avons des investissements qui attendent. Beaucoup de dossiers sont prêts, beaucoup d’entreprises, de particuliers sont dans les starting-blocks et attendent avec impatience de pouvoir enfin se lancer. À n’en pas douter, ce seront eux, les acteurs de ce plan de relance. Il y a donc évidemment urgence à le voter.

Un dernier mot, monsieur le ministre du budget et des comptes publics, pour revenir sur ce que vous disiez tout à l’heure. Je crois qu’effectivement, le soutien de ce plan de relance s’accompagne de la volonté d’arriver, à terme, à la maîtrise des dépenses publiques. On parle beaucoup de la dette, on parle très souvent du déficit. Je crois qu’il faut à nouveau redire que l’importance de ce que nous faisons doit être appréciée à l’aune de la législature qui s’est ouverte l’année dernière. Cette législature doit nous permettre de mieux maîtriser les dépenses. C’est ainsi que nous réduirons, à terme, le déficit et que nous pourrons, enfin, mieux maîtriser notre endettement national. Il est utile de rappeler ici que le soutien de ce plan va évidemment de pair avec une meilleure maîtrise, demain, de nos finances publiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues,…

M. Patrice Martin-Lalande. Jusque-là, c’est parfait. (Rires.)

M. Jérôme Chartier. Merci, monsieur Martin-Lalande. Je reconnais là votre esprit critique, toujours constructif. Merci de me dire que jusqu’à présent c’est parfait. Je vais essayer de poursuivre dans la même veine.

Le groupe UMP votera le texte issu de la commission mixte paritaire relative au projet de loi de finances rectificative pour 2009.

M. Gilles Carrez, rapporteur. Cela continue d’être parfait !

M. Jérôme Chartier. Je sais que notre collègue Didier Migaud était très inquiet. Je voulais le rassurer d’emblée.

Je voudrais également, cher Didier Migaud, lever deux inquiétudes que vous avez manifestées tout à l’heure.

Vous avez dit que, finalement, le possible décalage entre les prévisions de croissance qui ont été annoncées pour la France pourraient inquiéter nos voisins européens, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Or vous savez que je me suis rendu à Berlin et à Londres pour étudier les plans de relance de nos voisins, ainsi que les conditions économiques dans lesquelles ils s’inscrivent. J’élargis mes observations à la construction budgétaire et à leurs prévisions de croissance. Et qu’est-ce que j’observe ?

J’observe, s’agissant du Royaume-Uni, que les prévisions établies par le gouvernement britannique le 24 novembre dernier situent la croissance entre moins 0,75 % et moins 1,25 %. Comme vous le savez, monsieur le président de la commission des finances, parce que vous êtes un observateur extrêmement attentif de la situation britannique, tous les instituts, qu’il s’agisse de l’Union européenne ou de l’organisme rassemblant les banques anglaises, prédisent pour le Royaume-Uni une récession située entre 2,9 et 3 %.

Par conséquent, monsieur Migaud, n’ayez pas d’inquiétude. Parce que le Royaume-Uni est dans une situation tout à fait dramatique, et en très fort décalage par rapport à la situation française telle qu’on peut l’augurer pour l’année 2009. Il n’y a rien à craindre de ce point de vue. Les chiffres annoncés, avec une très grande prudence, par le Gouvernement français – et dans le cadre d’un effort de transparence absolue que nous avons salué, tout comme d’ailleurs le porte-parole du groupe socialiste en commission des finances – seront ramenés dans leurs justes proportions lorsque les circonstances l’exigeront, en fonction des données les plus fiables dont nous disposerons.

Mes chers collègues, il s’agit de mettre en œuvre des dispositions exceptionnelles pour faire face à une situation tout aussi exceptionnelle. Avec l’adoption de ce texte, ce plan de relance sans précédent va se décliner, il me semble important de le dire et le redire encore, selon trois axes fondateurs. Le premier est un réel accroissement des commandes publiques. Le deuxième est un soutien actif à la trésorerie des entreprises : 11 milliards ! C’est important, lorsqu’on sait à quel point il est difficile pour les entreprises, quoi qu’on en dise, de continuer à se financer, non pas en emprunt, mais en trésorerie et en dette à court terme, comme l’a très bien dit notre rapporteur général s’agissant de ce nouveau dispositif mis en œuvre par OSEO. Le troisième est une solidarité réaffirmée avec les plus exposés aux conséquences de la crise. Je pense, bien sûr, à la prime de solidarité active.

Ce plan de relance s’inscrit dans la logique et dans la cohérence, monsieur Muzeau, de l’adoption du plan de sauvetage des banques, qui a pour objet de fluidifier le crédit et d’irriguer le système bancaire. Et nous sommes particulièrement vigilants quant à sa réalisation concrète sur le terrain. C’est un sujet qui a été abordé hier, en commission des finances, par M. Migaud et par M. Carrez. Je peux vous confirmer cette très grande vigilance de l’Assemblée nationale et de sa commission de référence, s’agissant du dispositif relatif au système bancaire.

M. Roland Muzeau. Cela vaut aussi pour les dividendes ?

M. le président. Seul M. Chartier a la parole.

M. Jérôme Chartier. Merci, monsieur le président, mais lorsque M. Muzeau a envie de contribuer au débat, j’ai, pour ma part, envie de lui répondre directement. Comme vous avez pu l’observer, monsieur Muzeau, s’agissant des bonus, le Président de la République a été catégorique. Il a convoqué les dirigeants des banques,…

M. Roland Muzeau. Cela n’a rien changé.

M. Jérôme Chartier. …en leur disant en substance : grâce au soutien du Président de la République et du Gouvernement, vous avez réussi à vous financer ; il va donc falloir vous engager à ne pas percevoir de bonus. Vous avez entendu le message, très fort, des dirigeants bancaires : pas de bonus perçu au titre de l’année 2008. C’était un engagement du Président de la République. Manifestement, il a été tenu.

M. Roland Muzeau. Pas de bonus, mais des dividendes !

M. Jérôme Chartier. Ce plan de relance s’inscrit également dans la logique et dans la cohérence de l’adoption de la loi de finances rectificative pour 2008, qui constitue un soutien efficace à l’investissement des entreprises et à la construction de logements privés.

Il s’inscrit aussi dans la logique des différentes mesures de soutien à l’activité et à l’emploi annoncées par le Gouvernement. Je pense bien sûr ici aux aides spécifiques en faveur du secteur de l’automobile, qui seront annoncées en principe mi-février.

Je voudrais maintenant revenir sur deux points qui ont fait l’objet de débats lors de cette commission mixte paritaire, et sur lesquels nous avons obtenu une solution que je qualifierai d’équilibrée.

Le premier point concerne le FCTVA. Notre rapporteur général, Gilles Carrez, a été extrêmement attentif à la cohérence du dispositif par rapport au plan de relance, à son originalité et à sa spécificité. Je m’explique.

Le Sénat avait décidé l’extension à 2008 de la période de référence 2005-2007, à partir de laquelle nous avions proposé de calculer la moyenne des investissements au-delà de laquelle chaque collectivité devra investir davantage pour bénéficier du remboursement par avance, d’un an, du FCTVA. Or, nous avions exclu l’année 2008 de la période de référence pour les raisons suivantes.

D’une part, parce que le niveau réel des investissements d’une année ne peut être constaté qu’au travers des comptes administratifs, et ceux de l’année 2008 n’étaient pas encore tous disponibles, loin de là.

D’autre part, l’année 2008 semblait être une année d’augmentation très forte des investissements. Il fallait donc trouver une moyenne équilibrée.

Aussi, la CMP a finalement retenu la période 2004-2007 en lieu et place de la période 2005-2008 comme base de calcul du FTCVA. Elle a également écarté le remboursement immédiat introduit par le Sénat. Ainsi, le FCTVA 2008 qui aurait dû être versé en 2010 sera versé en 2009 pour les collectivités qui s’engagent à augmenter en 2009 leurs dépenses réelles d’équipement par rapport à la moyenne des dépenses constatées entre 2004 et 2007.

Mes chers collègues, voici une mesure concrète de plus, qui va permettre aux collectivités de jouer leur rôle actif face à la crise. Avec ce type de décision, nous jouons, nous, législateurs, dans une telle situation, pleinement le rôle qui doit être le nôtre : prendre toutes les mesures possibles pour que tous les acteurs économiques de notre pays puissent agir et réagir, à nos côtés, afin de contrer les effets sociaux et économiques de la crise actuelle.

Le second point de la commission mixte paritaire sur lequel je souhaiterais revenir est le cumul des dispositifs de l’éco-prêt et du crédit développement durable. Le Sénat avait supprimé l’amendement introduit par le Gouvernement permettant ce cumul. La CMP a réintroduit le cumul de ces deux dispositifs, sous condition de ressources. Nous ne pouvons que nous féliciter de l’équilibre de cette décision et de sa cohérence eu égard à notre politique en matière d’environnement.

Je voudrais enfin, mes chers collègues, revenir sur quelques-uns des éléments retenus pour définir les orientations de nos finances publiques.

La clé de voûte de notre stratégie en matière financière, Gilles Carrez l’a rappelé tout à l’heure, est la maîtrise de la dépense publique. Il ne s’agit pas d’une position dogmatique, car Gilles Carrez n’est pas un dogmatique, mais bien de lutte contre la dépense publique. Elle correspond à une approche pragmatique d’une optimisation de cette dépense au bénéfice de nos concitoyens.

Cette volonté revient à diviser par deux le rythme de croissance annuel de la dépense publique, pour la limiter à environ 1 % en volume. Je crois, mes chers collègues, que nous pouvons nous féliciter que cet objectif ait été atteint en 2008, ce résultat contrastant avec ceux observés au cours des décennies précédentes.

Cette volonté de maîtrise de la dépense publique s’accompagne, de surcroît, d’un objectif de sécurisation des recettes publiques et de stabilisation du niveau des prélèvements obligatoires, aucune augmentation de ces derniers, qui aurait pour conséquence une perte de compétitivité vis-à-vis de nos partenaires européens, n’étant prévue et leur baisse demeurant un objectif de la majorité et du Gouvernement.

Avec cette loi de programmation, nous disposons d’un véritable support de stratégie de retour vers l’équilibre structurel des comptes publics. Il ne doit pas y avoir de doute sur nos objectifs. L’objectif immédiat est d’apporter des réponses efficaces et pragmatiques à la crise. Et c’est ce que nous faisons en adoptant le texte issu de la CMP relatif au projet de loi de finances rectificative pour 2009.

Mes chers collègues, nous ne sommes pas des législateurs coupés de la réalité et nous sommes naturellement attentifs aux différentes revendications de nos concitoyens,…

M. Roland Muzeau. C’est nouveau !

M. Jérôme Chartier. …de ceux qui manifestent aujourd’hui, comme de ceux qui ne manifestent pas, voire qui subissent ces manifestations et dont certains peuvent montrer de l’inquiétude.

Mes chers collègues, l’emploi, le pouvoir d’achat, les inégalités sociales, la nécessaire réglementation de la sphère financière internationale sont certes les préoccupations des syndicats, mais ce sont plus encore celles du gouvernement de Nicolas Sarkozy.

Je voudrais rassurer les syndicats : non seulement le Gouvernement et la majorité tout entière partagent ces préoccupations, mais la majorité répond à ces inquiétudes.

M. Roland Muzeau. Non !

M. Jérôme Chartier. Personne dans la majorité, personne au Gouvernement n’a attendu cette journée de manifestation…

M. Roland Muzeau. Si !

M. Jérôme Chartier. …ni le contre-plan du parti socialiste, qui en fait de mesures adéquates n’a finalement, présenté que des solutions totalement dépassées. Nous aurons l’occasion d’y revenir à plusieurs reprises, dans les prochains jours.

Au fond, aucune des propositions de l’ensemble des centrales syndicales n’aurait pour effet d’éradiquer la crise que nous connaissons, ni ne pourrait se substituer à toutes les mesures prises jusqu’à présent et qui produiront pleinement leurs effets à partir d’aujourd’hui, puisque le plan de relance sera, je l’espère, voté définitivement tout à l’heure.

M. Roland Muzeau. Si je comprends bien, la vérité est à l’UMP !

M. Jérôme Chartier. Prendre des mesures est nécessaire mais pas suffisant. Il va donc falloir faire deux choses. D’une part, il va falloir les expliquer encore et encore aux Français.

M. le président. Je vous prie de conclure, mon cher collègue.

M. Jérôme Chartier. D’autre part, il faudra les expliquer aux responsables des collectivités locales, comme le maire d’Avrillé, qui est exemplaire en matière d’investissements,…

M. le président. C’est vrai ! (Sourires.)

M. Jérôme Chartier. …l’indiquait, hier, en commission des finances.

Les responsables de collectivités et d’entreprises publiques seront les acteurs déterminants de ce plan de relance aux côtés de l’État, pour faire en sorte que ces 26 milliards d’euros puissent produire tous leurs effets.

M. le président. Il vous faut conclure !

M. Roland Muzeau. Laissez-le finir, on attend du concret !

M. Jérôme Chartier. Messieurs les ministres, mes chers collègues, le groupe UMP a soutenu sans réserve les mesures prises par le Gouvernement depuis le début de cette crise et sera présent pour en assurer l’explication, la promotion et aider à la réussite de ce plan de relance.

Aujourd’hui, nous sommes le 29 janvier 2009.

M. Roland Muzeau. Là-dessus, on est d’accord !

M. Jérôme Chartier. Il y aura eu deux dates importantes dans la République française : le 29 janvier 1956 à Creil (Sourires) et le 29 janvier 2009 à l’Assemblée nationale, point de départ du plan de relance. Souhaitons que ces deux destins soient parallèles ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, vous me permettrez de m’étonner de deux points, qui pourraient relever, en apparence, de la méthode s’ils ne touchaient pas au fond du travail parlementaire – avec les restrictions sur le temps de parole dont on peut penser qu’elles sont déjà en marche – mais aussi à notre conception politique différente des choix économiques, budgétaires et financiers à faire pour notre pays.

Mettre en discussion commune le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009-2012 et le projet de loi de finances rectificative pour 2009, on peut le comprendre. C’est moins vrai pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement public et privé. Vous ne pouvez pas arguer en permanence de la crise et de la relance pour justifier cette présentation.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Cela a été accepté en conférence des présidents, en présence de vos représentants.

M. Jean Launay. Le texte sur la programmation pluriannuelle des finances publiques est soumis à la procédure d’urgence, une urgence de plus ! Nous pensons que si le terme « programmation » veut encore dire quelque chose, nous aurions dû prendre le temps du débat et de la confrontation sur les chiffres qui touchent à la stabilité de notre pays. À la stabilité économique, avec l’analyse, qui devrait être objective, du taux de croissance de notre pays ; à la stabilité financière, avec le regard à porter sur le déficit public ; à la stabilité budgétaire, en nous penchant sur le déficit budgétaire et sur le chiffre de la dette publique ; à la stabilité sociale, au regard de l’équilibre des comptes de la sécurité sociale et à l’aune des conséquences de vos politiques sur le corps social, aujourd’hui désarticulé, déformé et sur le lien social, chaque jour un peu plus distendu.

Entendez-vous les grondements de la rue, les inquiétudes multiples dans tous les métiers et dans toutes les couches de la population, en particulier chez les plus défavorisés et dans les classes moyennes ? Ils ne sont que la conséquence d’une politique économique qui s’appuie sur une vision dogmatique des mécanismes viciés et une communication hachée, volontairement parcellaire, mais lacunaire et donc mensongère.

Les corrections que vous allez nous présenter dans les amendements ne masqueront pas cette démarche. Monsieur le ministre des comptes publics, vous ne dites pas la vérité à la représentation nationale et aux Français sur la situation de nos finances publiques.

À la dilapidation de nos marges de manœuvre, entamée avec la loi TEPA de l’été 2007, qui est votre péché originel,…

M. Roland Muzeau. Eh oui !

M. Jean Launay. …vous ajoutez, en virtuose de la communication, à la fois patelin et technique, la dilution des annonces pour masquer la réalité de la dégradation profonde des comptes publics avec ses effets collatéraux et négatifs sur l’emploi.

Dilapidation, oui, le choix initial du paquet fiscal, comprenant des mesures essentiellement tournées vers les plus aisés de notre pays,…

M. Guy Geoffroy. Ce n’est pas vrai ! Le répéter mille fois ne le rendra pas plus vrai !

Plusieurs députés du groupe SRC. Mais si, c’est vrai !

M. Jean Launay. …a dilapidé les marges de manœuvre qui seraient aujourd’hui très utiles.

La mise en œuvre des principales mesures du programme économique du Président de la République – défiscalisation des heures supplémentaires, renforcement du bouclier fiscal, suppression des droits de succession –pèse 14 milliards d’euros en année pleine. Vous persistez dans cette politique, alors même que l’on mesure maintenant très concrètement l’effet désastreux sur l’emploi du dispositif des heures supplémentaires.

M. Guy Geoffroy. Ce n’est pas vrai !

M. Jean Launay. En période de faible activité, ce dispositif freine l’embauche et constitue en période de récession – et nous y sommes – une véritable arme à créer des chômeurs.

M. Alain Cacheux. C’est vrai !

M. Jean Launay. Dilapidation, mais aussi dilution.

Dilution de l’information sur la réalité de la crise et sur son ampleur par la répétition des mêmes annonces pour faire croire aux Français que vous vous attaquez aux conséquences de la crise économique et sociale.

La vérité, c’est que vous révisez de semaine en semaine vos prévisions sous la pression des réalités et que vos hypothèses économiques et budgétaires sont modifiées au compte-goutte, sans lien avec le respect des règles européennes et les engagements que nous devions tenir en matière de finances publiques.

Cette loi de programmation pluriannuelle des finances publiques aurait dû faire l’objet de révisions profondes, résultant des évolutions conjoncturelles et des effets de la crise. Au lieu de cela, le texte issu de la CMP continue d’afficher moins 2,9 % en points de PIB comme solde du déficit public 2008, moins 3,1 % comme solde du déficit public 2009, alors que vous-même, monsieur le ministre, avez annoncé la semaine dernière en commission des finances le chiffre de moins 4,4 % et que la Commission européenne avance le chiffre de moins 5,4 % de points de PIB.

Nous rappelons que la limite communautaire admise est de 3 % et que c’est le coût des politiques publiques menées depuis juin 2007 qui a vidé les caisses.

Le déficit budgétaire, quant à lui, galope. Quelques repères : 32 milliards d’euros à la fin de 2001, 56,2 milliards à la fin de 2008, 57,8 milliards dans la loi de finances initiale pour 2009, 79,3 milliards dans le collectif budgétaire censé mettre en œuvre le plan de relance, 86,5 milliards dans vos dernières prévisions.

La dette publique, dont la limite européenne est fixée à 60 % du produit intérieur brut, subit, elle aussi, une évolution inquiétante. Vous n’avez toujours pas annoncé de révision de votre prévision initiale d’endettement pour 2009. Elle était alors fixée à 69,1 % du PIB, alors que la réalité nous mènera à plus 70 %, voire 72,4 %, selon la Commission européenne.

La vérité, c’est donc une dégradation réelle des comptes publics, et le Gouvernement refuse d’accepter cette réalité. Au lieu d’accepter, comme nos voisins européens, la caducité de la loi de finances récemment adoptée, vous faites le choix de la diffusion, de temps à autre, de révisions partielles de votre budget, pour aboutir à la déclaration que nous avons entendue tout à l’heure, à l’ouverture de ce débat, et après le passage en CMP, sans véritable et nouvelle lecture du texte devant un Parlement véritablement informé et éclairé.

Le vrai problème, monsieur le ministre, est que vous avez en permanence surévalué le niveau de croissance de notre pays dans vos prévisions. Nous le savons tous, un point de croissance en moins provoque, toutes choses égales par ailleurs, environ un demi-point de déficit supplémentaire.

De plus, au lieu d’utiliser les dépenses budgétaires au service de la croissance et de l’emploi dans les domaines de la recherche, de la formation, de l’investissement public, des dotations aux collectivités, le Gouvernement préfère tailler de manière drastique dans ces dépenses essentielles pour financer les cadeaux fiscaux aux plus aisés et les exonérations d’impôts et de charges sur les heures supplémentaires.

Vous continuez d’affirmer que la loi TEPA de 2007 et la loi sur le pouvoir d’achat de 2008 « continueront de soutenir le revenu des ménages et la croissance en 2009. » Et vous maintenez votre prévision de croissance entre 0,3 et 0,5 % pour 2009, ce qui n’est absolument pas réaliste face à l’ampleur de la crise économique internationale et à la récession.

Vous ne nous concédez, à la page 5 du programme de stabilité de la France pour 2009-2012, que l’habile périphrase suivante : « L’incertitude entourant ce scénario de croissance est inhabituellement élevée. » Dans ces conditions, nous pouvons nous interroger sur le retour à un équilibre structurel des finances publiques en 2012. Nous comprenons bien que, pour des raisons de calendrier électoral, vous continuiez à vous agripper à cette idée. Elle volera en éclats, parce que votre plan de relance, exclusivement basé sur l’offre et l’accélération des investissements, méprise la demande et la consommation. Didier Migaud l’a dit et Pierre-Alain Muet y reviendra. Mais aussi parce que vos prévisions sont insincères et que, ce faisant, vous détournez au passage un des objectifs de la LOLF : celui de la lisibilité et de la traçabilité des comptes publics.

Un mot en conclusion sur un autre sujet majeur et toujours d’inquiétude : ce que vous appelez la fiscalité applicable aux investissements, tout simplement la taxe professionnelle. Monsieur le ministre, il ne suffira pas de dire que cet impôt est un impôt imbécile, anti-économique, qu’il contribue à déresponsabiliser les collectivités et à brouiller leurs relations avec les contribuables locaux. Il faudra aussi nous dire par quoi vous le remplacerez. Ce sujet est évidemment au cœur du débat sur la réforme institutionnelle dite du mille-feuille et l’on voit bien qui vont être les accusés.

Il y a bien un peu de cynisme dans cette attitude. Il y a trois mois, vous nous disiez que les collectivités territoriales devaient être actrices de la modération de la dépense publique, et aujourd’hui vous les appâtez en annonçant le remboursement anticipé du FCTVA. Or, dans la pratique, c’est elles qui représentent 72 % de l’investissement public, et les programmes qu’elles pourraient lancer manquent de financement et souffrent souvent de diminutions de dotations.

Je terminerai en évoquant à nouveau la question récurrente du coût des niches fiscales et sociales. Si nous souscrivons à la mise en place d’un objectif annuel de dépenses fiscales et sociales incitatif, nous souhaitons, comme le président de la commission des finances Didier Migaud le réaffirme souvent, aller plus loin et plus fort non seulement dans l’évaluation, mais aussi dans la remise en cause de ces dispositifs qui affaiblissent la matière imposable et la recette fiscale directe.

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les Français dénoncent aujourd’hui les réalités qu’ils subissent du fait de vos choix politiques injustes : dilapidation de nos moyens, dilution dans vos annonces, dégradation des comptes publics, de l’emploi et du pouvoir d’achat. Notre réponse, ici comme dans la rue, c’est : « Non ! » (Applaudissement sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. Monsieur Launay, vous avez pu constater que vous n’avez subi aucune restriction du temps de parole.

M. Jean Launay. J’ai respecté mon temps de parole.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous entamons aujourd’hui la lecture des conclusions des travaux de trois commissions mixtes paritaires qui ont planché sur les différents aspects de votre programme « anti-crise ». Dans le même temps, des centaines de milliers de salariés, de fonctionnaires, de retraités, de jeunes, de demandeurs d’emploi manifestent à Paris et dans des centaines de villes, pour défendre l’emploi, les salaires, le pouvoir d’achat et les services publics.

Ce que ces manifestants réclament, avec le soutien d’une majorité de nos concitoyens – 69 % selon un sondage CSA fait pour Le Parisien, c’est tout simplement une nouvelle orientation de la politique économique conduite dans notre pays. Les Français exigent que vous preniez des mesures en faveur de l’emploi et de la relance par la consommation, plutôt qu’en faveur des banques et des grandes entreprises.

Tout au long de ces derniers mois, vous vous êtes efforcés de masquer l’échec de votre politique derrière un discours très volontariste. Vous avez tout d’abord tenté de minimiser les effets de la crise. Le 20 septembre dernier, alors que tous les indicateurs économiques étaient déjà dans le rouge, Mme la ministre des finances tenait sans rire les propos suivants : « Le gros risque systémique qui était craint par les places financières et qui les a amenées à beaucoup baisser au cours des derniers jours est derrière nous. »

Devant l’ampleur de la crise, il vous a bien fallu changer votre fusil d’épaule, du moins en apparence. Ce fut le discours de Toulon, où le chef de l’État en appelait à « refonder le capitalisme », à « moraliser les pratiques », déclarations qui ne furent suivies, bien sûr, d’aucun effet, comme les textes aujourd’hui soumis à notre examen en portent malheureusement témoignage.

Crise oblige, les projections budgétaires pour la période 2009-2012 contenues dans la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques sont radicalement différentes de celles qui avaient été débattues à l’automne dernier. Elles n’en restent pas moins extrêmement incertaines. Ainsi, le ministre du budget, M. Éric Woerth, n’a pas jugé utile de modifier le niveau de croissance, pourtant caduc, prévu cette année : celui-ci reste fixé entre 0,2 % et 0,5 % du PIB. La progression du PIB atteindrait même 2 % en 2010 et 2,5 % par an ensuite. Vous nous dites que cette programmation budgétaire se veut prudente, mais elle n’est pas assise sur des bases saines. Elle n’est pas sincère. Il y a de bonnes raisons à cela : vous avez la conviction que nous ne sommes pas aujourd’hui confrontés à une crise systémique, mais à une crise conjoncturelle, qu’il s’agit simplement d’un mauvais moment à passer avant de repartir de l’avant.

La crise, nous le savons, a résulté pour une grande part de l’exigence des détenteurs de capitaux, qui voulaient obtenir une rentabilité alignée sur les rendements à deux chiffres que les actifs financiers ont permis sur certains segments. Elle a également résulté des crédits hypothécaires à hauts risques que le chef de l’État, en campagne électorale, s’était proposé un temps d’importer en France. La part croissante de profits non réinvestis est venue nourrir un flux de capitaux libres à la recherche d’une rentabilité maximale et qui ont constitué des bulles spéculatives. Cette économie virtuelle détruit l’économie réelle, entraînant des destructions massives d’emplois, facteur fondamental de l’aggravation de la crise.

Vous semblez persister à vouloir faire croire que la crise n’est qu’une parenthèse et qu’elle sera très vite refermée. Rien ne vous permet pourtant de l’affirmer. À supposer que la crise se résorbe partiellement ou connaisse une accalmie, ses effets dramatiques sont devant nous. Les Américains essuient déjà les plâtres. Le financement des établissements de crédit a certes permis d’éviter l’effondrement du système bancaire américain, mais il n’a pas préservé la population des États-Unis des effets de la crise. Tout au contraire, les difficultés s’accumulent : hausse du chômage, explosion de la précarité, récession économique.

En France, la situation risque d’être assez similaire. Les prévisions de la Commission européenne nous le rappellent : le taux de chômage devrait passer chez nous de 7,8 % à 9,8 % en 2009 et 10,6 % en 2010. Vous vous êtes refusés à commenter ces chiffres, Mme Lagarde se bornant, la semaine dernière, à constater que l’objectif d’un taux de chômage ramené à 5 % en 2012 serait difficile à atteindre. Bel euphémisme ! En effet, cette fois-ci, la manipulation des statistiques de l’emploi n’y suffira pas.

Pas plus que les 360 milliards d’euros de garanties consenties aux banques sans aucun contrôle ni exigence sur leur utilisation, votre plan de sauvetage adopté en catastrophe ne permettra à nos PME et PMI de sortir de l’ornière comme par magie. Les retombées économiques de la crise vont peser douloureusement sur les épaules de nos concitoyens. Malgré tous les avertissements, y compris ceux du FMI et de l’OFCE, malgré le glissement de notre économie vers la récession, vous continuez de penser que tout finira par s’arranger, par la grâce de votre foi libérale et de quelques stabilisateurs automatiques.

Vous vous refusez obstinément à prendre la mesure des événements, à changer de cap, vous persistez dans une politique qui a pourtant mené directement à la situation dramatique où nous sommes. Depuis six ans, vous vous êtes fixé pour unique objectif de calquer le modèle de croissance économique à l’anglo-saxonne, avec son cortège de mesures visant à la seule création de valeur pour l’actionnaire, au détriment du développement des capacités productives et des salaires.

L’épuisement de ce modèle, que révèle l’ampleur de la crise actuelle, devrait vous interpeller. Admettre que le capitalisme actionnarial prend l’eau, que ce modèle a vécu, devrait vous conduire, sinon à vous convertir aux thèses de Marx (Rires sur les bancs du groupe UMP) ou de Keynes, du moins à reconsidérer en profondeur les choix économiques et, par voie de conséquence, les choix budgétaires que vous avez opérés. Il n’en est rien.

La loi de programmation pluriannuelle des finances publiques est la preuve de votre incapacité à agir. En effet, non seulement elle repose sur des hypothèses fausses, mais elle se fixe des objectifs obsolètes. Qui peut croire que le pacte de stabilité européen – vos tables de la loi – ne provoquera dans les prochains mois des discussions, ne connaîtra pas des modifications, des adaptations, des révisions ?

Pour notre part, vous le savez, nous réclamons de longue date la rupture avec le modèle de développement que vous avez porté aux nues et qui, brusquement, nous retombe sur la tête.

Vous n’avez eu de cesse de fustiger notre posture prétendument idéologique lorsque nous vous mettions en garde contre les effets du libre-échange non régulé, contre la pression exercée sur les salaires, contre le gel des revenus compensé par le recours au crédit et à l’endettement des ménages, contre l’absence de réelle politique de soutien aux investissements des entreprises, contre la logique destructrice du dumping fiscal et social.

Force est de constater que les faits nous ont donné raison, que notre revendication d’un meilleur partage des richesses n’est pas seulement un objectif de justice sociale, mais qu’il se justifie par de puissants motifs économiques, lorsqu’on entend asseoir la croissance sur des bases solides et saines.

L’heure n’est cependant pas, chacun en conviendra, à de vaines querelles sur nos profondes divergences. C’est pourquoi nous avons formulé tout au long de la période, depuis novembre, des propositions concrètes. Vous n’avez pas voulu en débattre.

M. Benoist Apparu. Lesquelles ?

M. Roland Muzeau. Ne soyez pas impatient, cher collègue !

Il y a celles relatives au financement du revenu de solidarité active, que nous croyons utile d’asseoir sur la taxation de la distribution des stock-options ; il y a celles qui poursuivent un objectif plus général, consistant à redonner à l’État des marges de manœuvre, notamment par la suppression des niches fiscales les plus coûteuses pour nos finances publiques et dont l’utilité économique est sujette à caution. Nous avons également proposé toute une série de mesures visant à une plus grande progressivité de l’impôt, la création de taux différenciés de l’impôt sur les sociétés – selon que celles-ci consacrent une part plus ou moins grande à l’investissement et aux salaires plutôt que de redistribuer une part croissante de leurs bénéfices aux actionnaires –, la mise en chantier d’un pôle public financier.

Nous vous avons également proposé de saisir l’occasion de la baisse de l’inflation pour engager une véritable politique de relance économique, de relever le SMIC, d’organiser une conférence nationale sur la question des salaires, d’élaborer un plan de relèvement de 25 % des minima sociaux sur cinq ans. Nous vous avons suggéré des baisses ciblées de TVA sur les produits de première nécessité – énergie, transports, alimentation –, ce qui, contrairement à ce que j’ai entendu tout à l’heure, ne favoriserait pas les produits chinois. Aucune de ces propositions n’a trouvé grâce à vos yeux.

Depuis 2002, vous vous évertuez en effet à servir une politique orientée exclusivement vers l’offre. Or cette politique a échoué à relancer la croissance. Vous avez usé du subterfuge qui consiste à pousser les Français à puiser dans leur épargne ou à s’endetter, de façon à relancer la consommation.

Dès lors, plusieurs questions restent en suspens. Entendez-vous, par exemple, assortir les mesures et dépenses fiscales en faveur des entreprises de contreparties en matière de création d’emplois stables et correctement rémunérés, les personnes travaillant à temps partiel étant aujourd’hui les plus directement menacées par les conséquences de la crise ?

Entendez-vous, ensuite, vous rapprocher de nos partenaires européens pour engager une réforme en profondeur du mode de fonctionnement de la BCE, ainsi que pour mettre fin à la politique de concurrence fiscale et de dumping social, dont les effets sont économiquement désastreux et peuvent s’avérer plus dangereux encore dans une période de crise comme celle que nous traversons ?

Entendez-vous, enfin, assortir les garanties accordées aux banques de contreparties réelles en termes de financement des particuliers, des PME-PMI et des collectivités locales ? Ne serait-ce pas la moindre des choses, dans la mesure où c’est l’argent des contribuables qui est en jeu et où les établissements bancaires ont une lourde part de responsabilité dans le gaspillage insensé des richesses produites, dans l’affaiblissement de notre tissu économique et dans les destructions massives d’emplois ? Il n’est pas concevable que l’État vienne directement en aide aux établissements bancaires sans aucune contrepartie sérieuse, autre que purement verbale.

Sortir de la crise impose aujourd’hui de refonder le système financier international, mais également de changer de perspective quant à l’élaboration des outils de financement de notre économie, notamment de privilégier les investissements productifs et créateurs d’emplois.

Nous regrettons que vous ayez abandonné l’idée de recapitaliser ces établissements par des prises directes de participation, qui auraient été un moyen efficace de s’assurer que l’argent public n’est pas utilisé pour éponger des actifs pourris et distribuer des dividendes : ç’eût été le seul moyen de réguler vraiment la finance.

Nous sommes pour la nationalisation du système bancaire et pour faire du crédit et de l’assurance de véritables services publics. L’analyse de la crise financière montre que les bulles se sont nourries des transferts opérés vers la finance, au détriment de l’économie réelle, des salariés, des besoins sociaux. La gravité du mal étant évidente, quels remèdes proposez-vous ? Pour répondre aux besoins de centaines de milliers de mal logés et pour relancer l’économie, la construction de logements est un enjeu essentiel. Le nombre des permis de construire baisse constamment depuis décembre 2006 et vous n’aviez pas réagi, sans doute parce que ce freinage a surtout touché le logement social. En 2008, le nombre de logements commencés s’élève à 368 000, en baisse de 15, % par rapport à 2007, ce qui est dramatiquement insuffisant.

Vos mesures répondent-elles à la gravité de la situation ? M. Alain Dinin, président du groupe Nexity, a répondu le lendemain même de leur annonce : « Ce qui a été annoncé hier n’est pas un plan de relance, mais des adaptations qui ne donneront pas d’effet concret en 2009. Du fait des contraintes administratives (modification des plans locaux d’urbanisme, etc.), ces logements supplémentaires annoncés ne se traduiront pas des constructions en 2009. […] Nous avons entendu hier un discours volontariste avec des mesures du passé. […] S’il n’y avait eu qu’une mesure à prendre, cela aurait dû être la TVA à 5,5 % pour les primo-accédants, sous conditions de ressources […]. Cela aurait eu des effets immédiats sans être inflationniste. »

Maintenant, il est urgent de cesser les discours-alibis et d’agir pour un plan massif de constructions, en particulier de logements sociaux et très sociaux. Le projet de Mme Boutin, actuellement en discussion, ne prend pas cette exigence en considération.

En matière de construction automobile, vous nous resservez, dans le plan de relance, la prime à la casse des automobiles pour encourager les achats de véhicules neufs,…

M. Guy Geoffroy. Neufs et propres !

M. Roland Muzeau. …mais elle relève surtout de l’action psychologique, et 80 % des véhicules vendus à la faveur de cette mesure sont fabriqués à l’étranger. Les expériences antérieures sont loin d’être convaincantes. Selon le rapport produit, en décembre 1997, par notre collègue Gérard Fuchs, « douze mois après la ruée liée à la fin de la “juppette”, la chute des ventes a été jusqu’à atteindre quasiment 40 %. » Il ajoute : « Les primes ont tiré le parc automobile vers le bas de gamme, c’est-à-dire vers les véhicules les moins rentables pour les constructeurs. » Le second rapport parlementaire est l’œuvre de l’ancien sénateur UMP et ancien ministre de l’écologie Serge Lepeltier. Vous le voyez, je sais varier mes sources.

M. Benoist Apparu. C’est bien !

M. Roland Muzeau. Il constatait en 2001 que « ces primes ont accéléré certains remplacements de voitures, suscitant une augmentation des ventes puis, après la fin de chacun des dispositifs, leur effondrement ». D’ailleurs, le ministre de la relance lui-même, M. Devedjian, a déclaré avec une grande franchise : « Ma crainte est que ce soit plus un effet d’aubaine qu’un effet d’entraînement. » Mais il n’en tire malheureusement aucune conséquence.

Pour étoffer un peu votre démarche, vous vous risquez même à alléger dangereusement les règles d’urbanisme et de marchés publics. Vous proposez de créer, par ordonnance, un régime d’autorisation simplifiée applicable aux installations classées pour la protection de l’environnement. À l’évidence, cette mesure est une régression en matière de protection de l’environnement et n’est donc pas acceptable, après que le Président de la République et le Gouvernement nous ont abreuvés de déclarations ronflantes à ce sujet, dans l’esprit du Grenelle de l’environnement. Cet esprit et les promesses faites sont également contredits par votre projet de construire de nouvelles autoroutes au titre de la relance des investissements : il existe pourtant bien d’autres possibilités de réaliser de grands investissements en matière de grands équipements, comme pour le fret ferroviaire, les voies navigables, les transports publics – je pense particulièrement à la situation dramatique de l’Île-de-France.

Votre plan de relance ne répond pas à l’urgence de la situation et ne traite pas l’essentiel du problème, c’est-à-dire le pouvoir d’achat des Français, particulièrement des ménages modestes. Vous avez également refusé nos propositions de baisse ciblée de la TVA.

Améliorer le pouvoir d’achat est indispensable, et il faut donc revaloriser les salaires, qui sont à la traîne depuis des années, augmenter la prime pour l’emploi et les minima sociaux. Contrairement à ce que vous prétendez, cela n’aura pas pour effet d’augmenter les importations, comme le montre un rapport sénatorial réalisé avec le concours de l’OFCE. Une fois encore, la fausseté des dogmes dont vous nous rebattez les oreilles est démontrée. Il apparaît que le contenu moyen en importations des dépenses des 10 % de ménages ayant les plus bas revenus est de 2,4 points inférieur à celui des plus hauts revenus. Il est donc socialement juste et économiquement efficace de relever le pouvoir d’achat des ménages modestes, les plus fragilisés par la crise.

Il faut aussi rétablir la justice fiscale et renforcer la progressivité de l’impôt, supprimer le bouclier fiscal et amplifier la lutte contre la fraude fiscale et contre les paradis fiscaux et bancaires, réorienter l’économie et les investissements vers une croissance conforme aux principes et aux objectifs du Grenelle de l’environnement. Il faut cesser de rançonner les collectivités locales qui vont devoir aider nos compatriotes à garder la tête hors de l’eau ; au contraire, il faut leur allouer des moyens supplémentaires – et non pas seulement des facilités de trésorerie par le biais du FCTVA. Il faut doper la construction de logements sociaux et très sociaux à hauteur de 200 000 par an pendant cinq ans, au moyen de prêts à 2 % de la Caisse des dépôts, et abaisser la TVA à 5,5 % pour les primo-accédants, sous condition de ressources.

La réalité de cette crise, bien loin des discours tonitruants du Président de la République, est que vous poursuivez votre politique de démantèlement de nos services publics – nous en aurons, après la loi sur le logement, une nouvelle illustration avec la discussion du projet de loi sur la santé, qui prévoit le démantèlement de nos régimes de protection sociale. L’affaiblissement de nos finances publiques a pour conséquence la réduction des marges de manœuvre de l’État et l’asphyxie des collectivités locales.

Pour notre part, nous continuerons à prôner d’autres réponses à la crise, conformes aux intérêts du pays et de nos concitoyens, à l’opposé des vôtres, dont le caractère ruineux est aujourd’hui patent.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Les textes des commissions mixtes paritaires dont nous sommes saisis aujourd’hui nous renvoient au plan de relance et, au-delà, à la perspective de la programmation pluriannuelle des finances publiques – le lien entre ces deux horizons est important.

Pour mettre la relance en œuvre, il faut de la volonté, de l’humilité et de l’unité – trois caractères que l’on retrouve dans les présents projets.

Il faut de la volonté, car il faut agir : à ce titre, les décisions budgétaires que vous nous proposez comportent un certain nombre d’engagements et d’investissements nouveaux. Il faut agir, parfois même en dépit de nos intuitions : je pense à la facilitation des contrats de partenariat, par exemple. Alors que la mobilisation de financements privés est plus difficile, cette initiative peut ne pas sembler judicieuse ; elle est cependant nécessaire, car les problèmes que nous constations jusqu’à présent ont beaucoup compliqué la mise en œuvre des contrats de partenariat dans notre pays, et leur préparation peut constituer un outil utile, y compris à la relance.

Il faut agir, mais il faut aussi choisir, entre de nombreuses initiatives et sollicitations. La relance peut servir d’excuse à la multiplication des dépenses publiques et à la facilité – facilité dans laquelle il ne faut pas tomber, mais vous avez jusqu’à présent évité cet écueil. Il faudra, monsieur le ministre des comptes publics, tenir ce cap en 2010, non seulement dans les enveloppes globales, mais aussi dans les choix de dépenses.

S’agissant de choix, il me semble, en matière d’infrastructures, que le curseur entre grands travaux et réseaux n’a pas été correctement placé. Il faudra y être attentif dans les mois qui viennent : chacun a pu constater, qu’il s’agisse de transports ou d’énergie, que la relance pouvait être l’occasion d’améliorer la compétitivité des réseaux de notre pays de manière bien plus utile que par l’annonce – qui ne sera pas toujours réalisée – de grands travaux nouveaux.

S’il faut de la volonté, il faut aussi de l’humilité. Cela passe avant tout par l’évaluation. D’autres collègues l’ont rappelé : dans les jours, les semaines et les mois qui viennent, il faudra constamment évaluer ce que nous aurons voté aujourd’hui. L’évaluation suppose des ajustements : je ne suis pas de ceux qui appellent de leurs vœux un deuxième, un troisième, voire un quatrième plan de relance, car ce serait dévaluer le vote que nous nous apprêtons à émettre aujourd’hui. En revanche, il va de soi que l’évolution de la situation, sa volatilité, la grande variété des sujets et des territoires appelleront un certain nombre de nécessaires ajustements.

Il faudra toujours demeurer capable de répondre aux situations nouvelles et faire face à la suite : la crise peut s’alléger, mais elle peut aussi s’aggraver. La crise d’aujourd’hui peut être résolue demain, mais une autre crise peut survenir après-demain. Il faut donc disposer de la marge budgétaire suffisante pour y faire face.

C’est ce qui a guidé notre commission mixte paritaire, sous l’autorité du rapporteur général et du président de la commission, lorsqu’elle a fait le choix, s’agissant du FCTVA, de ne pas tirer aujourd’hui l’ensemble de ses cartouches. Nous ne savons pas ce dont demain sera fait : il est essentiel de ne pas brûler tous nos vaisseaux dès aujourd’hui.

Volonté, humilité, mais aussi unité, dans le cadre d’un équilibre nécessaire entre politiques de l’offre et de la demande. Ceux qui, aujourd’hui, exigent que davantage d’efforts se concentrent sur la demande n’ont pas nécessairement raison, non plus que ceux qui donnent des leçons au motif que la politique de l’offre serait la seule intelligente. Il faut rechercher l’équilibre, en ayant toujours à cœur de prendre des mesures ciblées, surtout en matière de demande. La réflexion reste à nourrir : il convient de cibler les publics visés, les dépenses envisagées et la durée des mesures. Soyons attentifs à n’engager que des dépenses réversibles, pour éviter qu’elles ne se stratifient dans notre appareil de dépense publique.

L’unité doit aussi être celle de notre attitude politique. Le Premier ministre, il y a quelques semaines, en avait appelé à l’unité nationale ; le discours et la réalité politiques n’ont pas toujours suivi. En ce jour de grèves et de manifestations – même si nous ne les approuvons pas –, notre discours doit, plus que jamais, être un discours d’unité.

Volonté, humilité et unité ne nous dispensent pas de demeurer fidèles à nos convictions. Ces dernières années, des progrès considérables ont été accomplis en faveur de l’assainissement de nos finances publiques. Ils ont ralenti, et sont chahutés par la conjoncture mondiale et nationale. Voilà qui ne nous interdit pas pour autant de conserver nos repères : c’est tout l’intérêt du projet de loi de programmation des finances publiques. Ne pas perdre nos repères signifie préserver notre attachement au rétablissement de l’équilibre dès que possible. Si nous n’y sommes pas aujourd’hui, nous n’en abandonnons pas pour autant l’ambition. Autre repère : la réduction de la dette. Pour affronter les crises à venir, il vaut mieux garder à l’esprit que la réduction de la dette est une priorité dès lors que les circonstances le permettent – nous n’avons pas toujours eu cette vertu. De même, la maîtrise des dépenses demeure un objectif, et la réduction de l’inflation devra y contribuer davantage demain qu’elle ne le fit hier.

M. le président. Veuillez conclure, cher collègue.

M. Hervé Mariton. Je conclus. La question de la maîtrise des recettes, quant à elle, n’est pas technique, mais au contraire très politique. Qui paiera le plan de relance, qui paiera les dépenses que nous engageons aujourd’hui ? L’impôt ? Je ne le souhaite pas. Le Gouvernement a raison de rappeler son objectif de maîtrise de la fiscalité. Si ce n’est pas l’impôt qui paie, alors ce sera la vertu, la sagesse qui gouvernent la gestion de nos finances publiques. Cette vertu est non seulement compatible avec la relance, mais elle est même indispensable à la crédibilité du plan de relance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Gilles Carrez, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. « J’écoute, mais je ne tiens pas compte », déclarait, à Provins je crois, le Président de la République.

M. Éric Woerth, ministre du budget. Pas tout à fait !

M. François Brottes. La formule a le mérite de la clarté, monsieur le ministre, d’abord parce qu’elle rassure sur l’état de santé de celui qui la prononce : il n’est pas atteint de surdité. (Sourires.) Claire, elle l’est aussi parce qu’elle confirme que l’Elysée a installé un hygiaphone d’une telle épaisseur entre le pouvoir et les Français que les maladies du dialogue social ou du dialogue démocratique avec l’opposition ne risquent pas de le contaminer. Je rappelle qu’un hygiaphone est une vitre épaisse qui, à la poste ou à la banque, sépare l’agent du client de sorte qu’ils puissent se parler sans se comprendre…

M. Gilles Carrez, rapporteur. Comme à la mairie de Crolles ? (Sourires.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Critiqueriez-vous La Poste ?

M. François Brottes. En observant bien cet hygiaphone, je déduis non seulement qu’il est constitué d’un verre très épais mais que, de surcroît, ce verre est totalement opaque ; peut-être même s’agit-il d’un verre fumé.

M. Hervé Mariton. Non, c’est une vitre sans teint !

M. François Brottes. Le Président de la République ayant déclaré, il y a peu, que « lorsqu’il y a une grève en France, plus personne ne s’en aperçoit », j’imagine qu’un jour de mobilisation et de colère sociales comme aujourd’hui, l’épaisseur et l’opacité du verre de l’hygiaphone en question ont dû être renforcées pour ne pas démentir la vérité présidentielle.

M. Hervé Mariton. C’est normal, la gare Saint-Lazare était fermée !

M. François Brottes. Vous aussi, monsieur Devedjian, vous renforcez l’opacité de votre politique, en faisant passer, sous couvert de la crise, des choses pas forcément jolies à dire ou à avouer.

Le mot « relance » n’étant, me semble-t-il, pas du tout adapté à la légèreté de l’ambition de votre projet de loi dit « pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés », j’ai cherché une image pour le caractériser.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Aïe aïe aïe !

M. François Brottes. Deux comparaisons me sont venues à l’esprit.

M. Hervé Mariton. Comparaison n’est pas raison !

M. François Brottes. La première est celle du chausse-pied, que l’on utilise pour enfiler des chaussures neuves et brillantes, achetées en solde parce que le pouvoir d’achat a baissé et qui se révèlent trop petites parce qu’on les a choisies à la va-vite sans prendre le temps d’examiner toutes les possibilités.

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Vous ne sortez plus de l’unijambisme !

M. François Brottes. Voilà qui correspond bien à la méthode utilisée pour élaborer votre texte, monsieur le ministre : à peine nommé, vous aviez déjà sorti un plan et le présentiez au Parlement !

La seconde image est celle du sapin de Noël, entouré de tous les petits cadeaux pour les amis et décoré de guirlandes illuminées pour faire croire à ceux qui n’ont pas de cadeaux que, pour eux aussi, c’est jour de fête.

M. Hervé Mariton. C’est mesquin !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Le Sapin, je l’ai rencontré, et ce n’était pas Noël !

M. François Brottes. Qu’il soit chausse-pied ou sapin de Noël, votre texte de loi est, dans le meilleur des cas, inadapté, illusoire, et vous serez contraint, j’en suis sûr, de revoir votre copie dans les semaines qui viennent, ainsi que d’autres l’ont dit avant moi.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Voilà qui illustre notre pragmatisme !

M. François Brottes. Votre loi, monsieur le ministre, donne aussi quelques coups de balai : là comme ailleurs, les feuilles mortes se ramassent à la pelle… En effet, le vent de la crise – pour ne pas dire le prétexte de la crise – a balayé les feuilles vertes du Grenelle. J’en veux pour preuve le nouveau régime d’autorisation simplifiée des installations classées pour l’environnement, qui va remiser sous le tapis le système des protections actuelles, tant il est simplifié – au point que plus personne n’aura son mot à dire : ni les riverains, ni les élus, ni les associations.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. C’est faux !

M. François Brottes. La préservation des vestiges de notre patrimoine historique – et vous y êtes pour quelque chose, madame la rapporteure – est mise au compost. Avec l’objectif affiché de « productivité » des fouilles archéologiques préventives, vous profitez du prétexte de l’accélération pour accroître la pression exercée sur le temps de l’archéologie préventive, et précariser définitivement ses compétences ! Je vous l’ai dit lors de mon explication de vote en première et unique lecture : vous récrivez là la dernière série de l’émission « Chefs-d’œuvre en péril » !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Un peu de mesure, de grâce !

M. François Brottes. J’avais alors expliqué que vous utilisiez ce moyen pour combler les espaces libérés par l’absence de publicité sur les chaînes publiques…

Dans le cadre de votre tri sélectif, vous supprimez l’avis conforme des Architectes des Bâtiments de France dans les zones de protection du patrimoine et, un malheur n’arrivant jamais seul, vous instaurez la liberté d’action du mécénat dans ces périmètres, comme pour rendre nos vestiges dociles devant les projets de promotion immobilière alentour. Je fais là un procès d’intention, j’en conviens, et je l’assume ! Nous en reparlerons dans quelques mois.

Dans le cadre des produits recyclés, vous actez la relance de l’autoroutier avec un petit arrangement pour l’A28 et l’extension promise de la durée des contrats de concession autoroutière, en échange d’aménagements environnementaux. Comme si – soit dit entre nous – les marges dégagées par les concessionnaires autoroutiers depuis la privatisation ne suffisaient à pourvoir à ces légitimes besoins, à défaut d’alléger la facture des usagers.

Une mauvaise rumeur dans les couloirs du Palais-Bourbon prétend, monsieur le ministre, que vous vous apprêteriez – petite cerise sur le gâteau de votre conception du développement durable – à passer en force pour délocaliser, du Massif central vers les Yvelines, le circuit automobile homologué pour la Formule 1, dans une zone naturelle protégée qui plus est. À chacun sa conception de l’aménagement du territoire, du respect du vote du Parlement – je rappelle que la commission mixte paritaire a voté à l’unanimité contre cette disposition – et des principes adoptés dans le cadre du Grenelle. Nous verrons tout à l’heure si la rumeur se confirme.

Comme on n’est jamais si bien servi que par soi-même, monsieur Devedjian, vous vous faites aussi de jolis cadeaux – vous auriez tort de vous en priver – au nom de la grandeur des projets présidentiels pour La Défense – je parle naturellement du quartier qui porte ce nom – ou pour le plateau de Saclay. Désormais, l’État aura seul la mainmise sur le foncier des zones d’opérations d’intérêt national. Ce n’est pas le président du conseil général des Hauts-de-Seine, par ailleurs président de l’établissement public d’aménagement de La Défense, que cela contrariera…

Monsieur le Ministre, cette loi restera dans les annales de notre mémoire législative : elle est le chausse-pied, le sapin de Noël, mais aussi la voiture-balai de plusieurs textes bâclés, encore tièdes de leur promulgation toute récente. Je pense par exemple à la loi de modernisation de l’économie, votée l’été dernier, et que vous déclinez ici avec l’extension du statut de l’auto-entrepreneur – mesure qui nous vaut l’autosatisfaction permanente de votre collègue M. Novelli –, la mutualisation des réseaux existants – une manière de favoriser les opérateurs au détriment des collectivités locales –, ou encore les contrats de partenariat public-privé, dont l’encre n’est pas encore sèche et pour lesquels vous allez, en dernière lecture et alors que la commission mixte paritaire s’y est opposée hier, jusqu’à permettre qu’ils soient signés – on croit rêver ! – entre un entrepreneur privé et une collectivité locale sans même que le montage financier soit bouclé !

Vous « relancez » donc, mais en mettant les réglementations en roue libre, en mettant les contrôles au placard et en améliorant l’ordinaire de quelques acteurs privés, qui pourront désormais agir dans l’opacité, en toute impunité. Telle est votre conception de la relance.

Tout ira plus vite, peut-être, mais la spirale infernale de la dérégulation, de la déréglementation, fera son œuvre… C’est la même logique qui a emporté tout récemment les marchés financiers dans un vent de folie spéculative incontrôlée. C’est toujours la même histoire, et nous vous aurons mis en garde : il y a ceux qui subissent l’augmentation des prix ou perdent leur emploi, et ceux qui ramassent les dividendes à la pelle.

Vous êtes sourds à nos propositions, pourtant responsables et à usage immédiat. Nous avons proposé une relance effective et ambitieuse des investissements industriels et du secteur des travaux publics, qui reste très pessimiste malgré vos annonces, comme l’a rapporté l’INSEE hier encore.

Vous ignorez le rôle des collectivités locales quand ce sont elles, et pas l’État, qui assurent 75 % des investissements de notre pays ! Cherchez l’erreur !

Vous jouez à contre-courant du bon sens avec les nouveaux contrats de partenariat, cessibles à 80 %. Nous avons échappé aux 90 % du Sénat et nous devons une fière chandelle, une fois n’est pas coutume, à Mme de La Raudière qui s’y est opposée !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Vous êtes trop aimable !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Pour une fois, M. Brottes vous est reconnaissant !

M. François Brottes. Ces contrats mettront les collectivités à genoux face aux investisseurs et aux banques qui, c’est un comble, pourront spéculer sur les créances liées à ces contrats. C’est la consécration de la toute-puissance des partenaires privés qui, symboliquement, jouiront même de la prérogative de puissance publique avec le permis d’exproprier que vous leur accordez !

Nous proposons, au contraire, que l’État commence par mieux accompagner les moyens de fonctionnement des collectivités pour qu’elles puissent lancer ou accélérer leurs investissements. Car l’État, depuis trop longtemps, réduit les marges financières des collectivités.

Nous proposons notamment le doublement de la dotation globale d’équipement et du fonds national d’aménagement et de développement du territoire. Nous proposons l’abondement exceptionnel du budget de fonctionnement des collectivités, comprenant en particulier le remboursement des arriérés de paiement du RMI – l’ardoise est lourde –, la restitution du ticket modérateur payé par les collectivités locales sur le plafonnement de la taxe professionnelle et l’octroi de prêts bonifiés pour les investissements relevant de leur champ de compétence. Vous ne pourrez pas dire que nous ne proposons rien !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Non, mais vous ne financez rien !

M. François Brottes. En permettant aux hôpitaux en de bénéficier de façon anticipée des fruits de la vente de leurs infrastructures relevant du domaine public, vous renflouez temporairement leurs caisses – que vous videz par ailleurs, année après année ! Nous proposons, nous, un vrai plan de modernisation de l’hôpital public, d’un montant de l’ordre de 1,4 milliard d’euros.

S’agissant du logement, vous vous contentez de rayer d’un trait de plume les règles de transparence en matière d’urbanisme. Nous proposons la construction, dès maintenant, de 300 000 logements sociaux, alors que vous n’en avez acté que 78 000 pour 2009 et que vous instaurez le droit au logement précaire pour tous en imposant, dans les trois ans, l’expulsion des locataires de HLM appartenant aux classes moyennes – sans mettre sur le marché de logements correspondant à leur pouvoir d’achat.

Pour la croissance écologique, vous ne proposez rien d’ambitieux. Vous laissez s’enliser les discussions sur le Grenelle 1 et le Grenelle 2, qui auront bénéficié, à titre exceptionnel, de deux lectures au Parlement, comme pour garantir durablement une douce musique verte en fond sonore : en parler longtemps pour donner l’illusion de faire beaucoup et souvent, alors qu’en réalité ces textes sont mis au rancard, derrière l’instauration du travail du dimanche ou la loi organique de musellement du Parlement.

Pour nous, l’urgence écologique est la priorité incontestable, quand tous les experts annoncent que les pollutions et les abus coûteront bien plus cher à la planète que les mesures immédiates et nécessaires d’anticipation et de réparation, qui seront créatrices d’emplois et de nouvelles commandes pour des filières à développer et à accompagner dans leurs investissements.

Nous proposons, par exemple, de répondre immédiatement aux enjeux industriels liés à l’énergie par la création d’un contrat énergie-emploi-environnement incitant les entreprises à mieux consommer, au moyen d’un tarif attractif qui serait majoré en cas de non-maîtrise de la consommation – je pense notamment aux pointes de consommation.

Un dispositif semblable pourrait être créé pour les particuliers, avec un tarif modéré pour les besoins courants et incompressibles – se laver, se chauffer, s’éclairer –, dans la limite d’un volume qui serait fonction de la taille du foyer, de sa localisation et des horaires de consommation. En cas de dépassement du forfait prévu, s’appliqueraient les prix du marché, qui, vous en conviendrez, messieurs les ministres, sont fortement dissuasifs.

Relancer l’investissement sans donner aux collectivités locales les moyens d’en être le fer de lance, leur ôter les outils de la transparence et du contrôle, c’est faire peser une lourde menace sur leurs finances et sur la maîtrise de la fiscalité locale.

Passer à la vitesse supérieure sans garde-fous et au détriment du Grenelle, c’est renier des engagements qui ont obtenu notre vote favorable – une fois n’est pas coutume ! – et l’assentiment des Français.

Continuer à déréguler à tous les étages, c’est équiper tout le monde d’un gyrophare pour griller tranquillement et légalement les feux rouges. La seule croissance que vous garantissez, c’est celle du risque d’accident !

Nous ne sortirons pas de cette crise en prenant des mesures qui facilitent la vie aux opportunistes et ouvrent la voie à toutes les dérives. Nous ne voulons pas donner un blanc-seing à vos erreurs, à votre refus de réactiver les leviers locaux de l’investissement ou de contrôler les banques gourmandes d’argent public pour continuer à distribuer des dividendes. Devant votre refus d’entendre la nécessité d’une relance de la consommation, nous ne voterons pas ce texte.

M. le président. Il va falloir conclure, cher collègue.

M. François Brottes. Vous déclarez inlassablement, comme pour vous en convaincre, que relancer la consommation, c’est laisser une dette à nos enfants. S’il vous plaît, messieurs les ministres, un peu de décence !

Regardez dans quel état vos cadeaux fiscaux ont mis l’endettement public, bien avant que ne soient perceptibles les effets de la crise ! Admettez l’évidence, mise en lumière par le très récent rapport conjoint du Sénat et de l’Observatoire français des conjonctures économiques, qui démontre que les Français consomment moins de 15 % de produits importés !

Relancer la consommation, c’est relancer la production industrielle et réinstaurer la confiance, mais c’est aussi relancer l’activité des services dans notre pays, et donc, agir pour l’emploi. En persistant dans votre refus d’actionner ce levier, que tous les pays au monde utilisent pour sauver leur économie et soulager les ménages, vous vous apprêtez à ne plus laisser aucun emploi industriel à nos enfants.

Messieurs les ministres, notre vote sera un carton rouge ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Roland Muzeau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-François Mancel.

M. Jean-François Mancel. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vais vous faire part de quelques réflexions rapides.

Alors que nous entendons les critiques de l’opposition, je veux rappeler le parfait enchaînement réalisé depuis le début de la crise mondiale. Le Président de la République a été le premier à mobiliser avec efficacité la communauté internationale, et notamment l’Europe. Le Gouvernement a enchaîné avec le sauvetage du crédit et, aujourd’hui, avec le plan de relance.

M. Jean Launay. Le monde est merveilleux !

M. Jean-François Mancel. Mes chers collègues de l’opposition, imaginez le cauchemar si Ségolène Royal était aux commandes ! (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. François Brottes. Vous avez des regrets ! Cela se sent !

M. Jean-François Mancel. Le plan de relance est pertinent, bien ciblé, entièrement dirigé vers l’emploi, et il a le mérite, ce qui n’a jamais été le cas auparavant, de faire sauter les obstacles qui auraient empêché sa concrétisation. Sur ce point, monsieur Devedjian, il faudra veiller à ce que, dans les faits, département par département, commune par commune, ce plan soit mis en œuvre jour après jour. Car, si nous voulons réaliser les trois quarts du plan au cours de l’année 2009, nous avons du pain sur la planche et il nous faudra faire preuve de beaucoup de détermination et de pugnacité.

Il est faux de dire que la consommation a été oubliée. D’abord, mes chers collègues de l’opposition, vous l’avez reconnu vous-mêmes : nous avions déjà pensé à la consommation, avec M. Woerth, en août 2007. En effet, la déductibilité des intérêts d’emprunt sur l’acquisition de la résidence principale, l’exonération fiscale sur les heures supplémentaires, la suppression des droits successoraux sur la quasi-totalité des successions ne sont rien d’autre qu’un soutien à la consommation et au pouvoir d’achat.

M. Gilles Carrez, rapporteur. Sans oublier l’ISF-PME !

M. Jean-François Mancel. Absolument !

Je pourrais également évoquer l’anticipation du RSA, la généralisation du contrat de transition professionnelle, l’assouplissement du chômage partiel et la revalorisation des minima sociaux. Nombre de mesures essentielles ont donc été prises en matière de pouvoir d’achat et de relance de la consommation.

Certes, dans le plan de relance, nous n’avons pas choisi de mettre l’accent exclusivement sur la consommation, car c’est en France qu’il faut créer des emplois et non ailleurs, comme ce serait probablement le cas si nous avions joué la seule carte de la consommation.

Comme Éric Woerth et Gilles Carrez, je me réjouis que nous votions en même temps notre programmation triennale en matière de dépenses publiques. Car, une fois la crise passée et l’économie redevenue saine et dynamique, il faudra reprendre l’assainissement de nos finances publiques. Nous devons garder cela en tête, car la période que nous venons de connaître peut nous conduire à certaines facilités à l’avenir. C’est ce que nous avons évité avec le plan de relance, puisque les dépenses qu’il comporte ne sont pas pérennes. Je suis persuadé qu’une majorité de gauche aurait créé des emplois publics à la pelle, comme cela a été le cas sous le gouvernement de M. Jospin, avec des conséquences qui pèsent encore aujourd’hui sur nos finances publiques.

M. Pierre-Alain Muet. Nous avons réduit le déficit !

M. François Brottes. Et créé 2 millions d’emplois ! Et les comptes de la sécurité sociale étaient en équilibre !

M. Jean-François Mancel. Pour ce qui est de la grève d’aujourd’hui, il y a les professionnels de la grève que l’on connaît bien, ceux qui aiment à aller rechercher les banderoles au fond de la cave, derrière les vélos du dimanche, pour aller manifester ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Mais cette grève reflète aussi, à n’en pas douter, l’inquiétude de nos concitoyens, que l’on ne peut nier. À cette inquiétude, il faut répondre par la pédagogie. Nous ne devons pas cesser d’expliquer à nos concitoyens comment nous luttons contre la crise. Il est clair, messieurs les ministres, que nombre d’entre eux n’ont pas bien compris ce qu’était le soutien au crédit. Pour eux, et même pour de nombreux journalistes, ce sont des centaines de milliards qui ont été injectés dans les banques sans que nos compatriotes en ressentent personnellement les effets. Il faut leur expliquer ce qui s’est réellement passé et comment nous avons procédé. Nous devons chasser de l’esprit de nos concitoyens l’idée que nous avons fait pour les riches ce que nous n’avons pas fait pour eux. Il s’agit d’un problème de pédagogie : il faut expliquer et répéter.

Le président Migaud nous parlait tout à l’heure des prévisions en matière de croissance. Nous pouvons en débattre éternellement, d’autant qu’en ce moment elles changent en permanence ! Qui peut dire ce que sera demain, alors que personne n’a été capable de prévoir ce qui s’est produit au cours des douze derniers mois ?

Il est essentiel que nous mettions tout en œuvre, et cela dépend de chacun d’entre nous, pour rétablir la confiance, car une bonne économie est fondée sur la confiance : c’est une économie où le consommateur a envie de consommer et où l’investisseur a envie d’investir. J’ai été frappé de voir, dans les cérémonies de vœux auxquelles nous avons tous assisté, les maires s’ingénier à nous dire : « Cette année, je fais des économies. J’ai diminué les dépenses de mes cérémonies de vœux. »

M. Roland Muzeau. C’est du cinéma !

M. Jean-François Mancel. Dans le cas d’une petite commune, c’est le traiteur du coin qui en est la victime directe. Ce sont les acteurs économiques locaux qui en paient le prix.

M. Jacques Myard. Absolument !

M. Jean-François Mancel. Aujourd’hui, si l’on veut dépenser, il faut dépenser, et si l’on veut investir, il faut investir. Il ne faut pas se recroqueviller sur soi-même.

M. Gilles Carrez, rapporteur. Très bien !

M. Jean-François Mancel. Faire passer ce message à nos compatriotes me semble être la première des priorités.

M. le président. Il faut conclure, cher collègue.

M. Jean-François Mancel. Enfin, il serait aberrant que notre assemblée ne prenne pas les dispositions nécessaires pour que nous ayons de nouveau, en France, un grand prix de Formule 1 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Monsieur le président, messieurs les ministres, chers collègues, c’est la dernière heure de débat sur ce plan de relance, mais ce n’est sûrement pas la dernière sur ce thème.

M. Jean Launay. Enfin un peu de calme et de raison !

M. Pierre-Alain Muet. Je suis convaincu, en effet, que la réalité que vous ne voulez pas voir aujourd’hui vous conduira dans peu de temps à prendre de nouvelles mesures.

Je suis même persuadé que vous serez conduit à prendre certaines des mesures que nous, socialistes, avons proposées, face à une crise dont vous avez toujours sous-estimé l’ampleur et dont, plus fondamentalement, vous sous-estimez les causes profondes.

M. Sarkozy serait bien inspiré pour une fois, contrairement à ce qu’il a dit la semaine dernière à Provins, de tenir compte de ce qu’il entend. En effet, les revendications qui s’expriment massivement dans tout le pays, et que j’ai entendues ce matin à Lyon dans une manifestation d’une ampleur jamais vue depuis le CPE, sont des réponses pertinentes non seulement à la situation sociale, mais également à la situation économique actuelle.

Si vous ne comprenez pas que le problème majeur d’aujourd’hui, c’est le pouvoir d’achat, vous ne comprenez ni la crise ni le mouvement social. Vous ne comprenez pas la crise car, avant même d’être financière, la crise mondiale est économique et sociale. L’accroissement des inégalités, les bas salaires, les régressions sociales sont à l’origine du dévoiement du système financier et économique. Le recours croissant à l’endettement est la conséquence logique d’un système qui refusait la progression du pouvoir d’achat de la majorité des salariés et exigeait des taux de rentabilité incompatibles avec la réalité économique.

Vous ne comprenez pas non plus la réalité de la situation économique de notre pays, car, bien avant que la crise financière ne produise ses effets, notre économie était entrée en quasi-récession, avec un pouvoir d’achat du revenu disponible en diminution depuis le début de l’année 2008, ce qui a entraîné un recul de la consommation au premier trimestre 2008 et une baisse de l’investissement et de l’emploi au second trimestre, avant même que la crise financière ne provoque, à partir d’octobre, un véritable effondrement de la demande.

Nous ne vous reprochons pas aujourd’hui les mesures de ce plan, mais son insuffisance. Nous vous reprochons aussi d’être continuellement en retard sur la réalité de la situation économique et d’en sous-estimer la gravité. En témoignent vos prévisions pour 2009, en total décalage avec celles de tous les instituts, de toutes les organisations internationales, mais aussi avec ce que nous savons de l’effondrement de la demande au dernier trimestre 2008. Tout cela n’est d’ailleurs pas nouveau. Le 19 août 2008, le Premier ministre déclarait que la France n’avait pas besoin de plan de relance et qu’il n’était pas raisonnable de parler de récession, alors même que tout montrait qu’elle était déjà là. Je crois, monsieur le ministre, que vous aviez dit à peu près la même chose lors d’un débat au mois de juillet 2008. Ouvrez donc les yeux et, si vous ne voulez pas écouter la colère qui monte de la rue, regardez au moins la réalité des données économiques.

Nous, socialistes, avons pris nos responsabilités et présenté des propositions. C’est ainsi que nous concevons notre rôle d’opposants. Elles sont sérieuses et crédibles. Si vous les appliquiez, elles auraient, contrairement à votre plan, des effets immédiats. Elles agissent en effet sur toutes les composantes de la demande, car un plan de relance est, par définition, un plan qui agit sur la demande : il n’y aurait pas besoin de plan de relance s’il n’y avait pas effondrement de la demande. Or la demande, c’est la consommation pour 70 % et l’investissement pour 30 %. Vous utilisez le terme « relance » pour faire comme tout le monde, donc comme d’autres pays, mais on sent bien que cette idée vous est profondément étrangère. Ce n’est pas un hasard si vous proposez un plan unijambiste. C’est pourquoi je disais, lors de la discussion en première lecture, que vous aviez besoin d’une révolution culturelle pour élaborer un vrai plan de relance.

Pour être efficace, un plan de relance doit être à la hauteur de l’ampleur de la récession et agir rapidement sur l’économie afin d’éviter des effets irréversibles. Face à une baisse du PIB qui, même avec vos mesures, risque d’atteindre presque 2 % en 2009 selon la Commission européenne et le FMI, il faut une relance de même ampleur, c’est-à-dire comprise entre 2 et 3 % du PIB.

Un plan de relance doit comprendre des mesures réversibles et des mesures permanentes. Il doit agir sur le revenu individuel et l’emploi, qui déterminent la consommation, et sur l’investissement public. Or vous n’agissez que sur l’investissement public, et encore ne vous donnez-vous pas, dans ce domaine, les moyens d’être à la hauteur des enjeux.

Nous proposons, quant à nous, d’agir sur le revenu individuel, avec des mesures immédiates telles que le versement de 500 euros à chacun. Nous ne sommes pas les seuls à proposer des mesures de ce type : Barack Obama le propose, le gouvernement espagnol l’a fait, les Allemands s’y apprêtent. Nous proposons aussi de veiller à ce que les négociations salariales débouchent sur des augmentations de salaires en donnant un coup de pouce au SMIC, et en subordonnant les allégements de cotisations à des résultats en la matière. Nous proposons également une baisse de la TVA, qui a toute sa pertinence dans la conjoncture actuelle, car elle a un impact sur les ménages et sur les entreprises et elle est d’effet immédiat. Dans les secteurs qui enregistrent une forte baisse de la demande, elle relance la consommation des ménages, et dans ceux qui rencontrent, au contraire, des difficultés de trésorerie et moins de problèmes de demande, elle donne un peu de souplesse aux entreprises.

M. Jacques Myard. Ce n’est pas vrai !

M. Pierre-Alain Muet. Il faut aussi agir sur l’emploi. J’imagine, messieurs les ministres, que vous consultez la note de conjoncture de l’INSEE. Elle montre qu’après la suppression de nombreux emplois aidés, les emplois publics que vous avez rajoutés ne suffiront pas puisque les emplois aidés n’augmenteront pas en 2009. Nous proposons, quant à nous, d’augmenter fortement les emplois aidés, d’y ajouter des emplois dans le domaine de l’environnement, comparables aux emplois-jeunes que nous avions créés en leur temps. Il est absurde, dans la situation actuelle, que l’État réalise le plus grand plan social de France en supprimant cette année 30 000 emplois dans la fonction publique et 20 000 dans la fonction publique hospitalière.

M. François Brottes. Emblématique !

M. Pierre-Alain Muet. Je n’évoquerai pas le dispositif des heures supplémentaires, dont vous n’osez plus parler. Quelle absurdité que de subventionner des heures supplémentaires alors que toutes les études montrent qu’elles détruiront près de 60 000 emplois dans un contexte de baisse massive de l’emploi !

Il y a, enfin, une dimension psychologique à la crise. Cela fait plus d’un an – un an et demi – que la confiance s’est brutalement effondrée dans notre pays. Elle a commencé à s’effondrer à l’automne 2007, quand les Français ont pris conscience que votre politique oubliait la grande majorité d’entre eux, et elle se maintient à des niveaux abyssaux depuis six mois !

Puisque vous n’avez de cesse d’en appeler à l’union nationale alors même que votre gouvernement ignore le Parlement et les partenaires sociaux, changez de méthode ! Consultez les partenaires sociaux, comme nous l’avons fait avant d’élaborer nos propositions. Le Président de la République serait bien inspiré de réunir, comme l’a suggéré, il y a deux jours, François Hollande, un vrai « Grenelle de la crise ». Peut-être prendrait-il alors la dimension des inquiétudes de nos concitoyens et y répondrait-il en partie.

Comme nous pensons qu’en matière de relance, l’essentiel reste à faire et que ce plan de relance n’en est pas un, nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Roland Muzeau. Très bien !

M. le président. La discussion générale commune est close.

La parole est à M. le ministre du budget.

M. Éric Woerth, ministre du budget. Je remercie Gilles Carrez et Laure de La Raudière pour leurs propos qui ont permis de nous remettre en mémoire les conclusions des CMP. Je les remercie surtout de nous soutenir et d’avoir démontré à l’ensemble de la représentation nationale l’efficacité de ce plan de relance.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Merci !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Je répondrai aux orateurs de l’opposition qui se sont exprimés. Si j’ai bien compris les propos de MM. Muet et Brottes, nous ne comprendrions rien,…

M. François Brottes. Pas rien, mais pas grand-chose !

M. Éric Woerth, ministre du budget. …nous ne verrions rien, nous n’écouterions rien. Moi, j’ai tout de même l’impression que cette majorité écoute. J’ai l’impression que cette majorité agit. J’ai l’impression que cette majorité est à la hauteur des enjeux. Serait-ce ne rien comprendre que de ne pas appliquer ce que vous nous proposez, et qui n’est, somme toute, qu’une partie de notre plan de relance, à quoi vous ajoutez des mesures en faveur de la consommation ? Je vous aurais volontiers proposé de le voter,…

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Ce serait responsable de leur part !

M. Éric Woerth, ministre du budget. …ce qui serait en effet une attitude assez responsable. Puisque vous considérez que les investissements et l’aide aux entreprises sont satisfaisants et qu’il faut en profiter pour améliorer la compétitivité du pays, votez donc ce plan de relance ! Cela ne vous empêcherait pas de faire par ailleurs votre numéro d’opposants, de dire que ces mesures sont insuffisantes et de nous faire, fort légitimement, les propositions que vous considérez justes. Mais non : vous avez décidé de tout rejeter en bloc. J’ai un peu de mal à le comprendre.

Vous nous reprochez aussi de ne pas comprendre que la crise est un problème de demande. Nous avons toujours ce même débat sur l’offre et la demande, lequel est probablement assez éloigné des préoccupations de nos concitoyens.

M. François Brottes. Nos concitoyens sont d’accord avec nous !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Les crises s’illustrent toujours par un problème de consommation, de demande, mais il est important de ne pas confondre les conséquences et les causes, de s’attaquer aux causes et non aux conséquences. Si vous vous attaquez aux conséquences avec un mauvais diagnostic, vous faites fausse route.

M. Pierre-Alain Muet. Vous ne regardez pas les données, monsieur le ministre !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Si vous n’allez pas bien, vous pouvez certes considérer qu’un peu d’aspirine et de sommeil suffiront, alors que vous souffrez peut-être du foie ou de l’estomac, ce qui appelle un remède différent. Lorsqu’un homme est malade, il faut se demander pourquoi ; c’est la même chose pour l’économie. Le mal dont elle souffre est-il la conséquence d’un manque de revenu et de consommation ? La conséquence d’un manque de compétitivité, qui fait que l’on exporte moins ? D’un mauvais fonctionnement du système financier ? D’un endettement excessif ? La vérité est qu’il s’agit d’abord d’un manque de compétitivité et d’attractivité et, ensuite, d’un problème d’endettement et d’accès à la ressource financière. Je sais qu’il n’est pas politiquement correct de dire que la croissance du revenu et de la consommation, en France, est plutôt plus forte qu’ailleurs depuis plusieurs années, même si nos concitoyens ont le sentiment inverse, ce que je comprends.

M. Pierre-Alain Muet. Le revenu disponible a baissé en 2008 !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Vous connaissez très bien les statistiques, monsieur Muet. Elles traduisent une réalité : l’augmentation de la consommation et du pouvoir d’achat a été plutôt plus forte en France, ces dernières années, qu’en Allemagne, au Royaume-Uni ou aux États-Unis. Le fait que vous partagiez de temps à autre mes propos me ferait plaisir, mais il n’y a rien à faire : vous n’écoutez pas, et c’est donc en vain que j’ai essayé de vous expliquer que les mécanismes par lesquels les revenus sont indexés sur le taux d’inflation nous protègent des pertes de pouvoir d’achat, ainsi que des soubresauts dus à l’augmentation des produits alimentaires ou des produits pétroliers. Il n’en va pas ainsi dans la plupart des autres pays, dont l’Allemagne.

Contrairement à l’idée couramment admise, le partage entre la rémunération du capital, c’est-à-dire les dividendes, et la rémunération des salariés, s’est stabilisé depuis de longues années, ce qui profite davantage aux salaires, et c’est tant mieux.

Si notre déficit commercial s’est creusé, c’est d’ailleurs parce que nous avons probablement plus de revenus que nos partenaires, et aussi parce que nous n’avons pas su rétablir nos finances publiques. C’est bien là le problème : le poids excessif de la dépense publique.

Notre « deuxième jambe » devrait être, si j’ai bien compris ce fameux article de Didier Migaud et Pierre-Alain Muet, matrice de toute pensée économique, l’augmentation des salaires. Mais quelle est la « deuxième jambe » des autres pays ? Pour Mme Merkel, c’est l’indexation des retraites, que les gouvernements précédents avaient remise en cause depuis bien longtemps. Pour M. Obama, c’est peut-être le projet de couverture maladie universelle.

M. Gilles Carrez, rapporteur. Nous, nous avons trois jambes !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Nous n’allons tout de même pas recréer ce que nous avons déjà : trois jambes, a fortiori quatre ou cinq, c’est très difficile à coordonner pour un corps normal… (Sourires.)

Selon les socialistes, enfin, un certain nombre d’économistes prestigieux, dont M. Blanchard, le chef économiste du Fonds monétaire international, diraient que nous allons dans le mauvais sens. Pas du tout ! En vérité, M. Blanchard s’adresse en priorité aux pays anglo-saxons, où la crise immobilière est plus profonde que la nôtre et où les filets de sécurité sociaux ont des mailles beaucoup plus larges que les nôtres, et il leur explique en effet que l’augmentation des revenus sociaux est la bonne réponse, mais il précise aussi que la structure des plans de relance dépend de la nature et de l’ampleur de ce qu’on appelle les stabilisateurs automatiques. C’est aussi ce que disent le secrétaire général de l’OCDE, le commissaire européen à l’économie ou le directeur général de l’INSEE, ce dernier ayant par ailleurs reconnu que le plan de relance français était très bien calibré quant à son montant, de même que nos mécanismes et nos initiatives pour soutenir le secteur bancaire.

Je remercie enfin Nicolas Perruchot, Hervé Mariton, Jérôme Chartier et Jean-François Mancel, ainsi que tous ceux qui nous soutiennent.

M. Roland Muzeau. Leur nombre diminue !

M. François Brottes. Ils sont moins nombreux que dans la rue !

M. Éric Woerth, ministre du budget. Leur soutien nous fait chaud au cœur et nous rassure d’une certaine façon. Dans cet environnement bien compliqué, nous en avons besoin. Dans des moments difficiles, nous aimerions parfois avoir aussi un peu de soutien sur les bancs de la gauche.

Si j’en crois M. Launay ou M. Muzeau, il n’y aurait pas de débat. Nous avons pourtant passé bien des heures dans cet hémicycle et au Sénat depuis le mois d’octobre, et nous vous présentons des collectifs assez régulièrement : on ne peut donc pas dire qu’il n’y a pas de débat, nous passons au contraire beaucoup de temps à débattre, mais nous passons encore plus de temps à agir, et nous essayons de le faire de façon raisonnable et responsable. C’est probablement ce qui vous gêne, et je le regrette.

M. le président. La parole est à M. le ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance.

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Je serai bref, dans la mesure où Éric Woerth a dit beaucoup de choses très justes et très fondées.

Je veux à mon tour remercier le président de la commission des finances, le rapporteur général, le président de la commission des affaires économiques, la rapporteure de la CMP sur le projet relatif à l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés, car examiner ces textes en urgence n’était pas facile.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. C’est vrai !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. C’est le moins que l’on puisse dire, et je suis conscient du travail qui a été accompli pour enrichir ces textes.

Je remercie également les quatre orateurs de la majorité qui se sont exprimés, M. Chartier, M. Mancel, M. Perruchot et M. Mariton, qui ont apporté au Gouvernement un soutien sans faille dont nous leur sommes reconnaissants. Cela montre surtout que la majorité est bien consciente de la crise et de l’urgence qu’il y a à présenter un plan massif.

L’opposition nous a offert deux faces contraires d’une même médaille, avec, dans un partage des rôles, un numéro de chansonnier et un numéro de professeur – chacun se reconnaîtra.

M. François Brottes. Vous êtes bon public, monsieur le ministre !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Monsieur Brottes, il y avait naturellement beaucoup d’humour dans votre propos, ce qui ne m’étonne pas. Je ne sais pas s’il y avait un sapin de Noël, mais c’était sans aucun doute notre fête... (Sourires.)

M. Guy Geoffroy. Nous nous sommes fait enguirlander !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Il n’y aurait que demi-mal si vous n’aviez pas dit un certain nombre de choses injustes.

Pour le logement social, par exemple, notre bilan est tout de même très supérieur à celui de la gauche. En l’an 2000, je le rappelle, elle avait réalisé 42 000 logements sociaux, alors qu’en 1993 la droite en faisait déjà 93 000. En 2008, nous en avons fait 118 000, et nous pensons en faire 140 000 en 2009. Compte tenu de vos résultats, vous n’êtes pas très bien placé pour donner des leçons !

Prenons l’endettement public. La moindre des probités consisterait, pour chacun d’entre nous, à faire preuve d’humilité et à reconnaître que tous les gouvernements, de gauche comme de droite, qui se sont succédé depuis 1981, année où l’endettement public a commencé à s’aggraver, sont responsables de son accroissement.

M. François Brottes. Non ! Sous Jospin, il a baissé.

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Vous ne voulez pas le reconnaître parce que cela vous demanderait un peu de probité intellectuelle.

Vous avez reproché au Président de la République d’avoir déclaré qu’il « écoutait mais ne tenait pas compte ». Vous, c’est plutôt : « Je n’écoute pas, mais je parle. » Quand on veut être écouté, il faut écouter soi-même, c’est le meilleur moyen d’avoir un dialogue. Nous répondons en effet à vos arguments, comme nous le pouvons, peut-être sans vous convaincre, ce qui peut se comprendre, mais vous ne répondez jamais à nos contre-arguments. Vous répétez toujours la même chose sur l’unijambisme, sans égard pour les culs-de-jatte… (Sourires.)

M. François Brottes. Je n’ai pas utilisé le terme !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. C’est peut-être un moyen de ne pas entendre ce que dit l’autre que de s’enfermer dans la répétition de son propre discours.

Monsieur Muet, dans un autre discours, beaucoup plus modéré, beaucoup plus tempéré, mais, dans le fond, tout aussi intolérant, vous nous avez dit d’abord que nous avions sous-estimé la crise. Je vous rappelle que, dans le monde occidental, c’est le Président de la République française qui, le premier, a pris des mesures contre la crise. Vous pouvez nous reprocher beaucoup de choses, mais pas de l’avoir sous-estimée. C’est le Président de la République française qui a organisé le fameux G20 et mis en place toute la procédure qui a permis de réagir sur le plan financier et de prendre des mesures, qui ont été utiles même s’il y a encore beaucoup à faire.

Vous nous dites que nous serons obligés de prendre de nouvelles mesures, mais nous n’avons cessé d’en prendre. Lorsque le Premier ministre a annoncé la semaine dernière un plan de 5 à 6 milliards d’euros pour l’automobile…

Plusieurs députés des groupes socialiste, radical, citoyen et divers gauche et de la Gauche démocrate et républicaine. Ce n’est pas assez !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Tout ce que nous ferons ne sera jamais assez, j’entends bien. Ce que vous avez fait, vous, dans l’opposition, ce n’est pas un plan de relance, c’est un plan de communication, ce qui n’a rien à voir, mais vous êtes sûrs de ne jamais avoir à le mettre en œuvre.

M. François Brottes. Il ne tient qu’à vous !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Quant au débat sur l’investissement et la consommation, permettez-moi de vous dire qu’il est stérile, car les deux ne s’opposent pas.

Lorsque vous prétendez que cibler l’investissement, c’est ignorer la consommation, ce n’est pas exact. L’investissement, nous ne cessons de vous le répéter, concerne également la consommation, car lancer des travaux, c’est distribuer des salaires et donc toucher le consommateur, mais vous ne voulez pas l’entendre.

Notre plan contient aussi des mesures strictement dirigées vers la consommation. Éric Woerth vous a dit à de nombreuses reprises que l’accroissement des transferts sociaux pour l’année 2009 représentait 17 milliards d’euros. C’est tout de même une véritable mesure en faveur de la consommation, mais vous ne répondez pas sur ce point. Par rapport aux 26 milliards du plan de relance, c’est parfaitement équilibré.

Vous parlez des États-Unis et d’Obama, mais les deux tiers du plan Obama concernent l’investissement et un tiers seulement la consommation, alors même que l’effondrement de la consommation aux États-Unis est sans commune mesure avec ce que nous connaissons, même si je reconnais qu’au mois de décembre nous avons été affectés. Surtout, le système social américain, que vous êtes les premiers à dénoncer, et ce à juste titre, n’a rien à voir avec le système social français.

J’ai donc un peu le sentiment que vous faites plus de la communication et que vous ne cherchez pas vraiment de solutions pour notre pays face à la crise.

Ce qu’a dit Éric Woerth tout à l’heure mérite tout de même d’être médité. Nous vous avons écoutés, entendus. Vous trouvez insuffisant ce que nous faisons, mais c’est tout de même quelque chose. Pourquoi voter contre ? C’est une attitude politicienne. Vous pouvez naturellement demander davantage, vous demandez d’ailleurs toujours davantage – toujours plus, c’est l’essentiel de votre discours politique –, mais les mesures que nous prenons, qui sont acquises, vous pourriez les soutenir, car elles auront des effets contre la crise, et vous ne le contestez d’ailleurs pas. Ce n’est pas assez, vous voudriez plus, mais c’est déjà ça. Or vous vous apprêtez à voter contre. C’est ce qui s’appelle faire la politique du pire.

Ce qui m’a frappé dans votre intervention, monsieur Muet, c’est que vous semblez oublier totalement que cette crise vient des États-Unis. Vous dites que la politique économique de la France est tellement mauvaise qu’il ne faut pas s’étonner d’en être là et vous en appelez à la rue. Je suis d’ailleurs étonné que des parlementaires invoquent ainsi la rue. La trouvez-vous plus importante que le Parlement ?

M. Roland Muzeau. Elle en est complémentaire !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Belle idée de l’équilibre des institutions ! C’est à retenir... (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Roland Muzeau. Nous, nous l’entendons, la rue, pas vous !

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Mais si, nous l’entendons !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Nous avons en tout cas envie de vous dire ce qu’on disait aux émigrés revenus sous la Restauration : vous n’avez rien oublié, mais vous n’avez rien appris ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Michel Piron. Très belle chute !

Loi de finances rectificative pour 2009

M. le président. J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2009.

Je suis saisi d’un amendement n° 1.

La parole est à M. le ministre du budget.

M. Éric Woerth, ministre du budget. Cet amendement a pour objet de tirer les conclusions, sur l’article d’équilibre, de la suppression de la dotation de relance pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération, dont le montant avait été fixé à 40 millions d’euros pour 2009.

En conséquence, le déficit budgétaire prévisionnel pour 2009 s’établit à 86,763 milliards d’euros, contre 86,803 milliards d’euros dans le projet voté par le Sénat en première lecture.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur. Favorable à cette économie de 40 millions d’euros.

(L’amendement n° 1 est adopté.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement qui vient d’être adopté.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

Programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012

M. le président. J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements du Gouvernement, nos 1 rectifié, 2 rectifié et 3 à 9.

M. Éric Woerth, ministre du budget. Je défendrai ces amendements ensemble.

Le Gouvernement propose tout d’abord trois amendements à l’article 2. L’amendement n° 1 rectifié précise que la programmation des finances publiques proposée par le Gouvernement inclut les effets du plan de relance de l’économie.

L’amendement n° 2 rectifié modifie la chronique du solde des administrations publiques et sa décomposition par sous-secteurs d’administration pour tenir compte, d’une part, du plan de relance, dont les effets sont temporaires et n’affectent que le solde de l’État, et, d’autre part, des résultats de l’exécution 2008 et de leur impact sur les années suivantes : les moindres recettes constatées pour l’État et la sécurité sociale.

L’amendement n° 3, toujours à l’article 2, modifie la chronique de dette des administrations.

L’amendement n° 4, à l’article 3, tire les conséquences de l’évolution des hypothèses depuis le 6 novembre 2008 dans tous les tableaux chiffrés du rapport : les moindres recettes constatées en 2008 pour l’État et la sécurité sociale, d’une part, les effets du plan de relance en recettes et en dépenses, d’autre part.

Par ailleurs, la rédaction du rapport est ajustée pour décrire les effets du plan de relance mais aussi confirmer que la discipline à laquelle s’astreint le Gouvernement est maintenue. Plutôt que de vous soumettre une litanie d’amendements répétitifs, nous avons pris le parti de récrire l’ensemble du rapport. Il s’agit donc d’un amendement de coordination.

L’amendement n° 5, à l’article 4, précise que la norme d’évolution des dépenses de l’État s’apprécie hors plan de relance et reste, ainsi calculée, limitée à 0,1 % en volume en 2009, puis à l’inflation – 0 % en volume – en 2010 et 2011. Le rapporteur général y sera, je pense, particulièrement sensible.

L’amendement n° 6, à l’article 5, ajuste le montant des plafonds par missions du budget triennal de l’État en fonction de différentes évolutions intervenues depuis l’examen de la programmation des finances publiques au Sénat, le 6 novembre dernier. Il tient compte, par principe, du texte définitif de la loi de finances initial pour 2009. Mais le budget pluriannuel intègre désormais également, par coordination avec la loi de finances rectificative pour 2009, une nouvelle mission intitulée « Plan de relance de l’économie ».

Cet amendement tire également les conséquences des ajustements à la baisse de la programmation sur les autres missions du budget général lorsque les crédits du plan de relance correspondent au moins partiellement à l’anticipation en 2009 et 2010 de dépenses initialement prévues à compter de 2010 ; nous les « rapatrions » sur 2009 et 2010 et nous ne les indiquons plus à partir de cette dernière année.

Le montant total des abattements par rapport à la programmation initiale s’élève à 500 millions environ en 2010, correspondant au contrecoup de la mesure d’augmentation des avances versées par l’État sur les marchés publics, et à près d’un milliard d’euros en 2011, dont une moitié correspond à l’avance sur les marchés publics et l’autre moitié est récupérée sur certaines missions du budget général : défense, écologie…

En outre, l’amendement n° 6 majore l’évaluation des charges de la dette de 500 millions en 2010 et d’un milliard en 2011 pour tenir compte de l’accroissement du volume de la dette de l’État qui est en partie amoindrie par la diminution des taux, mais tout de même augmentée en 2010 et 2011, contrairement à 2009.

Cet amendement procède également, comme le Gouvernement l’avait annoncé le 6 novembre dernier, aux ajustements nécessaires des contributions au compte d’affectation spéciale « Pensions » de chaque mission, compte tenu de la révision à la baisse de l’inflation pour 2009.

L’amendement n° 7, à l’article 6, précise que la norme d’évolution des concours de l’État aux collectivités territoriales s’apprécie, comme celles des dépenses de l’État, hors effets du plan de relance. Cette question a souvent été posée.

L’amendement n° 8, à l’article 9, ajuste la trajectoire des recettes de l’État retenue pour la règle de comportement. Par rapport au texte adopté par le Sénat et repris par la commission mixte paritaire, le tableau prend en considération deux éléments : l’impact du plan de relance, qui diminue les recettes fiscales en 2009 et les majore légèrement par la suite, ainsi que les résultats de l’exécution 2008, qui conduisent à revoir à la baisse le socle des recettes fiscales pour les années suivantes.

Enfin, l’amendement n° 9, toujours à l’article 9, ajuste la trajectoire des recettes des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale retenue pour la règle de comportement. Il s’agit de tenir compte des résultats de l’exécution 2008, qui conduisent à revoir à la baisse le socle des recettes pour les années suivantes.

Vous avez connaissance des tableaux annexés à ces amendements, dont je viens de faire une présentation brève mais complète.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur. Favorable à l’ensemble de ces amendements, qui poursuivent trois buts : tenir compte des effets de la crise économique, notamment des baisses de recettes ; tirer les conséquences du plan de relance, que ce soit l’augmentation des dépenses, notamment des dépenses d’investissement, ou l’évolution des recettes ; enfin, en soulignant le maintien de la maîtrise de la dépense, reprendre, dès que la crise aura été surmontée, la trajectoire indispensable d’assainissement de nos comptes publics.

M. Jacques Myard. Allez, un peu d’inflation ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jean Launay.

M. Jean Launay. Lorsque je me suis exprimé tout à l’heure, en particulier sur le projet de loi de programmation des finances publiques 2009-2012, le président de la commission des affaires économiques s’est mis en colère parce que je critiquais le choix de mettre en discussion commune ces trois textes. L’amendement n° 4, à l’article 3, illustre parfaitement ce que je dénonçais, car il récrit entièrement, en soixante pages, le rapport sur la programmation pluriannuelle des finances publiques. Le Gouvernement réduit ainsi un débat qui aurait avoir dû lieu normalement, une confrontation démocratique sur des visions différentes des politiques économiques, à un simple amendement de coordination. Ce n’est pas admissible.

Oui, nous avons dénoncé ces deux dernières semaines la réforme de la procédure parlementaire que vous nous imposez, les restrictions du temps de parole et les atteintes au droit d’amendement. Oui, il y a bel et bien dans la procédure d’urgence, sous le prétexte de la crise et du plan de relance, une atteinte au débat. Non, nous ne sommes d’accord ni sur la forme – la présentation des choses – ni sur le fond – les politiques mises en œuvre. Ce sera la raison de notre vote négatif sur ce texte.

M. François Brottes. Très bien !

(Les amendements n° 1 rectifié, 2 rectifié et 3 à 9 sont successivement adoptés.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements qui viennent d’être adoptés.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

Accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés

M. le président. J’appelle maintenant le texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 1, 2 et 4 rectifié du Gouvernement.

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Je les présenterai ensemble, monsieur le président.

M. François Brottes. Encore !

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Mais ils seront votés séparément. (Sourires.)

L’amendement n° 1, concernant les partenariats public-privé, permet à des candidats à un appel public à concurrence de soumettre des offres sur la base d’un financement dont les modalités sont ajustables. À l’heure où les marchés sont en pleine tourmente, les conditions financières d’un projet peuvent en effet évoluer fortement pendant la durée de son examen. L’objectif est d’empêcher que des projets de PPP soient bloqués à cause de la difficulté des candidats à obtenir des financements définitifs en amont de la procédure. Il est indispensable, dans le cadre du plan de relance, de lancer des PPP qui, compte tenu de l’instabilité des marchés monétaires, deviendraient autrement bien plus aléatoires. Cela répond parfaitement à la situation actuelle du crédit.

L’amendement n° 2 est rédactionnel, puisqu’il rectifie une erreur dans le choix du texte à modifier. Il s’agit de permettre à la personne privée partie à un PPP de procéder directement à des expropriations après décision de la personne publique.

L’amendement n° 4, également rédactionnel, rétablit le texte de l’Assemblée, qui prévoit que le Gouvernement est habilité à codifier l’ensemble des textes législatifs sur la commande publique dans un code de la commande publique. Il ajoute à la liste des textes qui seront intégrés dans ce code la loi sur la maîtrise d’ouvrage public.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La commission remercie le Gouvernement d’avoir tenu compte des conclusions de la CMP ; elle y est très sensible. Elle donne son accord sur ces trois importants amendements, dont le premier est de loin le plus important. Je précise que cette disposition s’appliquera pendant deux ans, en 2009 et 2010 ; l’insécurité qui règne actuellement sur les marchés financiers implique des mesures de prudence et de sécurité pour les bouclages financiers.

M. Jacques Myard. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je suis un peu contrarié que nous discutions des trois amendements à la fois, car j’avais des questions à poser sur chacun d’eux.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Posez-les donc !

M. François Brottes. Je précise que le président de la commission des affaires économiques n’a pas donné l’avis de la commission, mais le sien, la commission n’ayant pas examiné ces amendements, que nous découvrons en séance. J’imagine que c’était un raccourci rhétorique de sa part.

J’ai bien noté, monsieur le ministre, que l’amendement n° 4 rectifié rétablissait le vote de l’Assemblée nationale et que le n° 2 précisait le vote du Parlement. En revanche, vous avez oublié de dire qu’avec l’amendement n° 1, vous vous passez complètement de l’avis du Parlement, puisque cet amendement n’avait pas été retenu en commission mixte paritaire.

Mme Laure de La Raudière, rapporteure. Il avait été adopté par l’Assemblée nationale.

M. François Brottes. Mme la rapporteure n’a pas souhaité le rétablir en CMP. Le Gouvernement décide de le faire ; c’est son droit. Dans un cas, vous rétablissez ; dans un autre cas, vous précisez ; dans le troisième cas, vous contredisez.

Cet amendement n’est nullement anodin. Même si l’on nous dit qu’il ne s’appliquera que pour une durée limitée, dans un contexte de tourmente des marchés financiers, nous considérons qu’il y a là quelque chose d’extrêmement dangereux pour les collectivités publiques, notamment les collectivités locales.

Il sera en effet permis aux partenaires privés des collectivités de soumettre des offres sans montants d’engagement définitifs ou précis. Tout d’abord, cela faussera considérablement la concurrence : celui qui aura été le plus flou sur ses engagements financiers sera peut-être retenu.

Ensuite, un tel dispositif ne manquera pas de produire une complète insécurisation. Dans la gestion des collectivités publiques, la décision de réaliser ou non un projet dépend souvent de son coût. Or le présent amendement autorise un prestataire à prendre un engagement sans dire le prix de sa prestation. Je crois que c’est totalement extravagant. Le droit des marchés publics autorise déjà un certain degré d’imprécision des engagements sur les tranches dites optionnelles des projets. Avec cette disposition, la totalité du marché sera soumise au flou artistique le plus complet.

C’est la raison pour laquelle les sénateurs, dans leur sagesse et compte tenu de leur proximité avec les collectivités territoriales, avaient considéré qu’il ne fallait pas mettre le doigt dans un engrenage aussi dangereux. Même s’il est vrai que l’on n’a pas aujourd’hui une lecture suffisamment précise de la manière dont les partenaires financiers vont s’engager, on aurait pu prévoir au moins un engagement ferme sur une partie de l’offre finale. Mais leur permettre de ne s’engager de façon précise sur rien, cela n’est pas acceptable. Nous sommes donc contre l’amendement n° 1.

L’amendement n° 2 propose que le titulaire d’un contrat de partenariat puisse, après décision de l’organe délibérant, être autorisé à procéder à des expropriations. Je ne mets pas en cause cet amendement sur le fond, mais j’ai une question à poser : la décision de l’organe délibérant porte-elle seulement sur le principe de la délégation de compétence au partenaire, ou porte-elle aussi sur le périmètre concerné, c’est-à-dire sur l’objet précis de l’expropriation ? En effet, la décision à la parcelle pourrait s’avérer extrêmement douloureuse, et il est important d’avoir des précisions sur ce point.

S’agissant de l’amendement n° 4 rectifié, je n’ai pas de remarques particulières à formuler.

M. le président. La parole est à M. le ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance.

M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en œuvre du plan de relance. Monsieur Brottes, le transfert de compétence porte évidemment sur l’objet de l’expropriation.

(Les amendements n°s 1, 2 et 4 rectifié sont successivement adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par les amendements qui viennent d’être adoptés.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

7

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente.

Suite de la discussion du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quinze.)