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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2009-2010

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 20 janvier 2010

Deuxième séance du mercredi 20 janvier 2010

Présidence de M. Marc Le Fur
vice-président

M. le président . La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Protection des consommateurs en matière de vente à distance

Discussion d’une proposition de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Jean-Pierre Nicolas et de plusieurs de ses collègues visant à renforcer la protection des consommateurs en matière de vente à distance (n os 1940, 2166).

La parole est à M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur de la commission des affaires économiques.

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur de la commission des affaires économiques . Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, monsieur le vice-président de la commission des affaires économiques Poignant, mes chers collègues, la proposition de loi que j’ai l’honneur de rapporter aujourd’hui vise à renforcer la sécurité du consommateur en matière de vente à distance.

Certains pourraient s’étonner de voir arriver en séance publique un texte traitant d’un sujet qui a déjà été abordé par notre assemblée et qui a déjà reçu un certain nombre de réponses.

En effet, outre plusieurs directives communautaires adoptées notamment en 1997 et en 2000 – je précise qu’une nouvelle directive visant à renforcer encore les droits des consommateurs est actuellement en cours de rédaction –, le législateur national s’est depuis longtemps attaché à faire bénéficier le consommateur à distance d’un certain nombre de garanties.

Ainsi l’ordonnance du 23 août 2001 fait-elle figure de texte fondateur puisque c’est elle qui a introduit la définition du contrat de vente à distance dans le code de la consommation. Elle a également renforcé les contraintes pesant sur le professionnel en matière d’informations à dispenser et elle a explicitement prévu l’octroi d’un délai de rétractation de sept jours francs au profit du consommateur.

Par la suite, la loi de juin2004 pour la confiance dans l’économie numérique a spécifiquement traité du commerce électronique, posant notamment le principe selon lequel le professionnel était responsable « de plein droit à l’égard de l’acheteur » de la bonne exécution du contrat en cause, intéressant tout particulièrement le secteur de la vente à distance.

En 2007, le secrétariat d’État à la consommation a, de son côté, établi un baromètre des réclamations permettant ainsi de connaître chaque semestre la typologie des problèmes rencontrés par les consommateurs et, de ce fait, de suivre l’évolution du volume des réclamations et de leur traitement. Signe de l’efficacité des dispositifs précédemment mis en place, les résultats obtenus au fil des années ont mis en évidence une baisse constante des réclamations dans le secteur de la vente à distance.

Enfin, la loi Chatel de janvier2008 a proscrit les appels surtaxés vers les hotlines , cette disposition bénéficiant tout particulièrement aux consommateurs ayant recours à la vente à distance sur les sites internet. Elle a par ailleurs remanié les conditions de rétractation du consommateur tout en renforçant l’obligation d’information qui incombe au professionnel.

Comme vous pouvez le constater, nous ne partons pas de rien! Pour autant, le dispositif existant n’est pas suffisant eu égard à l’évolution permanente de ce type de vente. J’en veux pour preuve les scandales industriels qui ont affecté cette forme si particulière de commerce, provoquant ainsi des préjudices tant pour les salariés de certaines entreprises, qui, à la suite de faillites, ont perdu leur emploi, que pour les consommateurs. La fermeture de Multidiscount en mai2007, le placement en redressement judiciaire de Show Room 2001 en octobre2008, la liquidation judiciaire du Magicien des prix en mai2009 et, surtout, la liquidation judiciaire de la CAMIF en octobre2008, opérateur historique de la vente à distance en France, ont suscité plusieurs interrogations et une légitime incompréhension.

Par ailleurs, et bien que cela reste marginal au regard des presque 220 millions de colis envoyés à travers la France en 2008, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a reçu, pour cette même année 2008, environ 32000 plaintes dans le secteur de la vente à distance. Même si cela ne représente qu’un faible pourcentage de mécontents, 0,015 %, on ne peut s’en satisfaire.

C’est l’ensemble de ces éléments qui ont motivé le dépôt de cette proposition de loi, que je porte avec un certain nombre de collègues, que je tiens d’ailleurs à remercier ici pour leur soutien et les échanges fructueux que nous avons eus sur ce sujet qui, on l’a déjà dit, concerne tout à chacun.

Pour ne prendre que les derniers chiffres disponibles, la vente à distance a représenté en 2008, pour la France, un chiffre d’affaires de plus de 25 milliards d’euros – en 2005, celui-ci n’était que de 8,7 milliards d’euros – dont plus de 85 % ont été réalisés par le seul commerce électronique. Il faut dire que les avantages du e-commerce sont multiples: diversité des produits offerts – en bien des cas, on peut même parler d’exhaustivité –; possibilité pour tout entrepreneur, un groupe multinational comme un entrepreneur individuel, de toucher l’ensemble des acteurs économiques à travers le monde; large comparaison des prix, la multiplicité des acteurs poussant en outre les prix de vente à la baisse de manière inévitable; facilité mais aussi sécurité des transactions, facilité pour le consommateur qui peut acheter aux quatre coins du monde depuis son salon à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit.

En fait, une question se pose: comment faisait-on avant qu’internet n’existe et que le commerce en ligne ne se développe? Et ce mouvement ne cesse d’explorer de nouvelles voies: par exemple, on constate dès à présent que le m-commerce, c’est-à-dire le commerce électronique effectué par le biais des téléphones portables, ne cesse de prendre de l’ampleur et que ses potentialités semblent sans limite.

C’est également à l’aune de ces diverses caractéristiques que l’on peut mieux comprendre la véritable floraison des sites de vente en ligne – dont je rappelle, et je tiens à insister sur ce point, que même si elle représente l’essentiel de la vente à distance, elle ne la résume pas pour autant, la vente à distance pouvant également s’exercer par le biais du téléphone, du fax, de l’envoi d’un bon en papier.

Ainsi, outre les acteurs historiques de la vente à distance – j’ai parlé de la CAMIF mais je pourrais également citer Les Trois Suisses, La Redoute –, on voit se développer les pure players , c’est-à-dire des acteurs qui n’exercent leur activité que sur internet, ainsi qu’un grand nombre de sites qui sont avant tout les relais de magasins traditionnels où le contact entre l’acheteur et le vendeur demeure la règle. Car, même si sa définition peut être discutée, telle est bien la principale caractéristique de la vente à distance: contrairement au commerce traditionnel, elle ne met pas en présence le consommateur et le vendeur. Or le délai de livraison du bien qui s’en suit constitue ipso facto une période à risque pour le consommateur. De plus, la floraison des vendeurs en ligne, dont on estime à plus de 60000 le nombre actuel en France, suscite inévitablement l’apparition de marchands peu scrupuleux mus par l’appât du gain et qui ne présentent que peu de garanties.

Toutes ces raisons m’ont conduit, mes chers collègues, à déposer cette proposition de loi cosignée par de nombreux membres de la majorité et approuvée, dans son principe du moins, je l’espère, par un certain nombre de nos collègues de l’opposition.

Avant d’en venir au contenu proprement dit de ce texte, je tiens à en rappeler la philosophie. Cherchant avant tout à renforcer la protection des consommateurs en matière de vente à distance, il vise également à assurer un équilibre entre cet objectif et la liberté d’action des entreprises exerçant dans ce secteur – l’un ne doit pas se faire au détriment de l’autre, je tiens à insister sur ce point. C’est ce qui a d’ailleurs motivé la commission des affaires économiques lorsqu’elle a été conduite à refuser des amendements qui, tout en soulevant de réels problèmes, n’allaient avoir pour effet que de sanctionner trop durement les professionnels. Un équilibre existe, il nous appartient de le préserver.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Tout à fait!

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Sur le fond du texte, l’article 1 er , qui constitue le cœur du dispositif, vise essentiellement à renforcer le contrôle administratif sur les professionnels défaillants de la vente à distance. Au terme d’une procédure contradictoire, l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation pourra ainsi interdire à un professionnel dont la défaillance est patente toute prise de paiement avant la livraison intégrale du bien ou l’exécution effective du service commandé. Cet article a également pour objet de mieux avertir le consommateur des problèmes rencontrés par un fournisseur en obligeant éventuellement ce dernier à apposer un avertissement en ce sens sur la page d’accueil de son site internet, dont je rappelle qu’il s’agit aujourd’hui, et de très loin, du véhicule privilégié de la vente à distance.

Si l’article 2 n’appelle que peu de commentaires, l’article 3 revêt une importance particulière puisqu’il a pour objet d’exclure l’application de l’action directe en paiement du voiturier. Ce système permet au transporteur qui n’aurait pas été payé en raison des défaillances du professionnel de la vente à distance de ne pas livrer le consommateur final avant que ce dernier ne lui règle la facture normalement due par le professionnel. Absolument inéquitable, cette disposition doit évidemment être supprimée puisqu’elle aboutit, dans les faits, à doublement sanctionner les consommateurs qui, outre le fait qu’ils n’auraient pas reçu leur colis ou leur prestation de service, devront payer une indemnité qui n’est normalement pas à leur charge.

La commission des affaires économiques a par ailleurs adopté plusieurs amendements qui sont autant de nouveaux articles venus enrichir cette proposition de loi, ceux-ci ayant pour but essentiel de mieux informer le consommateur. Il s’agit principalement des articles 4, 5 et 8.

Voici, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la genèse et, brossée à grands traits, la teneur de ce texte qui devrait éviter à l’avenir les difficultés que l’on a connues au cours d’une récente période, qui ont légitimement pu faire naître quelques doutes, voire une certaine défiance à l’égard de la vente à distance. En mai2009, une enquête montrait que de 96 % des consommateurs étaient satisfaits de leur achat à distance et se disaient prêts à recommencer. Ce texte permettra peut‑être à ce taux d’augmenter. C’est son objectif et c’est en tout cas le souhait que je forme. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Mme Geneviève Gaillard. C’est un vrai titre, ça!

M. François Brottes. Un ministre auto-entrepreneur, un entrepreneur multicartes!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission des affaires économiques, Serge Poignant, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, cette proposition de loi est très opportune et très intéressante.

M. Thierry Benoit. C’est vrai!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Pour comprendre son intérêt et son opportunité, il faut revenir aux événements qui l’ont motivée et que vous avez sans doute encore à l’esprit: les 15000 à 20000 clients lésés par la liquidation judiciaire de la CAMIF en octobre2008. Vous avez été nombreux à être saisis par des administrés lésés, spoliés, qui ne pouvaient pas recouvrir des biens qu’ils avaient payés.

À la suite de cet événement, la représentation nationale s’est emparée du sujet. Il y a eu plusieurs initiatives conjointes, avec la constitution d’un groupe de travail composé, notamment, de Jean-Pierre Nicolas, Laure de La Raudière, Bernard Gérard et Jean-Michel Ferrand.

M. Thierry Benoit. Que du beau monde!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Le texte que nous examinons aujourd’hui est l’aboutissement de ce travail collectif et je tiens à saluer l’implication particulière de Jean-Pierre Nicolas, rapporteur de cette proposition de loi.

L’objet de ce texte est d’anticiper pour éviter qu’une situation comme celle de la CAMIF se présente à nouveau. Il vise à renforcer la protection des consommateurs en cas de défaillance d’une entreprise de vente à distance et à clarifier les relations entre les consommateurs et les entreprises. Il s’agit d’un texte important parce qu’il concerne les 22 millions de Français qui achètent des produits sur internet.

On reproche souvent à la loi d’être trop bavarde. Ce n’est pas le cas de cette proposition: il s’agit d’un texte précis, qui a vocation non pas à réécrire le code de la consommation dans son intégralité, mais essentiellement – et c’est déjà remarquable! – à résoudre le problème des défaillances des vendeurs à distance.

Au-delà des conséquences sur l’emploi, les faillites des entreprises de vente à distance peuvent avoir des répercussions pécuniaires importantes sur les consommateurs. Tout l’objet de ce texte est donc de protéger les consommateurs.

Bien sûr, ce souci-là n’est pas nouveau, et la loi du 3 janvier 2008, dite loi Chatel, a renforcé les obligations du professionnel en cas de non-exécution du contrat et en matière de droit de rétractation. Cette loi prévoyait aussi la mise à disposition d’un numéro de téléphone non surtaxé pour toute question relative au suivi de la commande, à l’exercice du droit de rétractation et à la mise en oeuvre de la garantie.

Cependant, au-delà des droits reconnus aux consommateurs relatifs à la formation et à l’exécution d’un contrat de vente à distance, c’est aujourd’hui la confiance des consommateurs dans le commerce à distance qui doit être confortée. C’était le sens de la conclusion de Jean-Pierre Nicolas.

Contrairement à la vente en magasin, la vente à distance implique systématiquement un délai de livraison qui constitue une période à risque pour les consommateurs ayant déjà réglé leurs achats.

Si le texte intervient à la suite de faillites récentes intervenues dans le secteur, force est de constater qu’il est examiné également dans un contexte d’explosion de ce mode de consommation.

Depuis quelques années, les chiffres de la vente à distance, qui incluent la vente à distance, la vente par correspondance et le e-commerce, sont impressionnants. En 2009, la vente à distance a franchi un nouveau cap: plus de 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires, et plus de huit Français sur dix, soit presque deux fois plus qu’en 2000.

Bien sûr, internet y est pour beaucoup puisque le e‑commerce représente près de 80 % du chiffre d’affaires de la vente à distance. Il faut dire qu’internet est désormais entré dans nos habitudes de consommation. La révolution e-commerce est en marche et continue de gagner du terrain. Pour autant, certains pans de ce secteur souffrent de la crise qui secoue aujourd’hui l’économie mondiale. Le secteur vient de perdre près de 10 % de ses effectifs en un an.

Une part non négligeable de la vente à distance est réalisée par de petites entreprises, voire des entreprises unipersonnelles, qui n’ont pas toujours tous les moyens techniques et juridiques nécessaires pour se plier à des réglementations qui seraient trop contraignantes. Afin de ne pas étouffer les initiatives, il importe de leur permettre d’exercer leur activité dans un cadre relativement souple. Ces PME sont fortement créatrices d’emploi. Pour cette raison, la législation ne doit pas constituer un frein; elle doit au contraire soutenir leur activité.

Je remercie donc les auteurs de la présente proposition de loi d’avoir su, au cours de leur travail et des auditions menées, garder un juste équilibre entre la protection légitime du consommateur et la préservation des entreprises du secteur, un équilibre gagnant-gagnant entre les consommateurs et les entreprises, bénéfique pour tous.

Permettez-moi maintenant de revenir sur quelques points du texte qui me paraissent essentiels.

La principale disposition du texte – l’article 1 er – vise à étendre les pouvoirs de l’autorité administrative chargée de la protection des consommateurs – DGCCRF – en lui permettant, après un débat contradictoire avec le professionnel, de suspendre, lors de toute nouvelle commande, pour une période déterminée, la prise de paiement par des vendeurs à distance dans l’incapacité manifeste d’honorer leur obligation de livraison dans les délais convenus avec les consommateurs.

Mme Laure de La Raudière. Eh oui! C’est important!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Il ne s’agit donc plus d’interdire purement et simplement la prise de nouvelle commande, ce qui pourrait paraître excessif et aurait pour effet de condamner à court terme l’entreprise faisant l’objet d’une telle injonction.

Je soutiens ce type d’initiative qui participe de la nécessité d’adapter le cadre légal aux besoins réels de protection des consommateurs et de maintenir, chez ces derniers, un niveau de confiance élevé dans le e-commerce. Je salue, au passage, le comportement responsable de la profession, à travers les recommandations émises par la Fédération de la vente à distance.

L’article 2 de la proposition prévoit de permettre à la DGCCRF d’alerter le président du tribunal de commerce afin qu’il puisse mettre en œuvre les pouvoirs de détection des difficultés qu’il tient du code de commerce. Il complète logiquement le dispositif prévu à l’article 1 er .

L’article 3 vise, quant à lui, à exclure l’action directe des transporteurs contre les consommateurs pour les contrats de vente à distance. Il y avait là quelque chose de choquant et l’article 3 est bienvenu.

Par ailleurs, les travaux menés par la commission des affaires économiques ont également permis de consolider le cadre juridique existant. À ce titre, ont ainsi été adoptées plusieurs dispositions.

La première disposition permet l’accès du consommateur aux conditions contractuelles entourant la commande à distance – article 4 nouveau. Je suis en revanche réservé sur l’acceptation expresse de ces conditions, telle que prévue par cet article. L’article 5 nouveau permet la confirmation, au titre des conditions contractuelles, des informations concernant l’existence d’un droit de rétractation et ses modalités d’exercice.

L’article 6 nouveau étend au téléchargement d’œuvres immatérielles les exceptions au droit de rétractation initialement prévues pour la fourniture d’enregistrements audio ou vidéo ou de logiciels informatiques lorsqu’ils ont été descellés par le consommateur, ce qui me semble aussi bienvenu.

J’aimerais insister sur l’article 7 nouveau, qui prévoit que toutes les ventes conclues par téléphone sont soumises au régime applicable en cas de démarchage téléphonique, y compris lorsqu’elles le sont à l’initiative du consommateur. Je prendrai deux exemples pour montrer qu’il faut se méfier du mieux, qui est souvent l’ennemi du bien. Demain, vous achetez des fleurs ou une place de théâtre par téléphone pour le soir même. Croyez-vous vraiment que vous aurez envie, en plus de la démarche initiale, de rédiger un courrier à l’entreprise pour bénéficier de ce bien ou service? Cette disposition fait peser sur le vendeur des contraintes excessives.

M. Thierry Benoit. C’est vrai!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Je suis donc réservé sur le maintien de cet article.

Mme Laure de La Raudière et M. Thierry Benoit. Vous avez raison!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Cette mesure risque de mécontenter les consommateurs qui ne pourront plus, alors qu’ils le souhaitent et se sont manifestés en ce sens, bénéficier immédiatement ou dans des délais très brefs de la fourniture de services ou de la livraison de produits, puisqu’il faudra au préalable respecter le formalisme de l’envoi par le professionnel d’une confirmation de l’offre et de son acceptation par la signature du consommateur.

Mme Laure de La Raudière. C’est très juste ce que vous dites!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. C’est, à mon avis, irréaliste.

M. Thierry Benoit. Tout à fait!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. En revanche, il nous faut répondre aux cas de consommateurs qui se plaignent d’être trop souvent démarchés par voie téléphonique alors qu’ils ne le souhaitent pas. J’ai donc décidé de créer un groupe de travail avec les professionnels concernés par le démarchage téléphonique, afin de réfléchir à la faisabilité et à l’opportunité de la création d’une liste « ROBINSON » du démarchage téléphonique, ou de tout autre dispositif approprié de nature à répondre aux difficultés rencontrées par les consommateurs.

M. Jean Gaubert. Il aurait été content, Robinson Crusoé, d’avoir un téléphone!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Comme vous le savez, le dispositif « ROBINSON » permet déjà aux consommateurs qui le souhaitent de s’inscrire sur une liste afin de ne plus recevoir dans leurs boîtes aux lettres de publicités écrites.

Si on étendait ce dispositif au démarchage téléphonique, ceux qui ne souhaiteraient plus être démarchés par téléphone pourraient s’inscrire sur une liste similaire et ne seraient donc plus sollicités à leur domicile de cette manière par les entreprises adhérentes aux organisations professionnelles concernées.

M. Thierry Benoit. Tout à fait!

M. Serge Poignant , vice-président de la commission des affaires économiques. Ce serait bien!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Je vous propose de réunir ce groupe de travail d’ici à la fin du mois, afin qu’il rende ses conclusions pour la fin du mois de mars.

M. Serge Poignant , vice-président de la commission des affaires économiques. Très bien!

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Enfin, face au manque de lisibilité de certains contrats de communications électroniques quant aux motifs légitimes de résiliation, certains contrats se contentant de renvoyer à la jurisprudence, je suis favorable à l’obligation de mentionner dans ce type de contrat les motifs légitimes de résiliation pour lesquels aucune pénalité n’est due: c’est l’objet de l’article 8 nouveau. Devront notamment figurer les motifs de résiliation fixés par arrêté. Je recueillerai l’avis du Conseil national de la consommation, préalablement à la parution de l’arrêté, et cette obligation ne s’appliquera qu’aux contrats conclus à compter de la publication de la loi et non aux contrats en cours.

Vous l’avez bien compris, mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement est favorable à cette proposition de loi sous la réserve dont je viens de vous faire part. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été dites sur lesquelles nous sommes d’accord, en particulier s’agissant du constat. Nous ne remonterons pas jusqu’au vieux catalogue qui tend à disparaître, ce qui va d’ailleurs poser un grave problème. En effet, le bottin ayant déjà disparu, comment fera-t-on pour rehausser les chaises et comment feront-ils dans les commissariats de police quand ils auront quelques difficultés face au prévenu ?

M. Thierry Benoit. C’est une réalité!

Mme Laure de La Raudière. Quelle honte de dire ça!

M. Jean Gaubert. Plus sérieusement, cela vient d’être dit, depuis quelques années internet a pris le relais, y compris pour les maisons traditionnelles. C’est aujourd’hui un vrai catalogue qui a permis le développement de la vente à distance. Ce n’est pas une petite affaire pour l’économie puisque 80000 emplois sont concernés.

La vente à distance présente beaucoup d’avantages pour les consommateurs. Ils peuvent ainsi faire leurs courses à la maison, sans stress, quand ils ont le temps. C’est intéressant aussi pour l’entreprise, car il n’y a pas nécessité de « scénarisation » au magasin, ce qui réduit de beaucoup les frais de magasinage. La possibilité de développer une clientèle à distance permet en outre à de nombreuses petites entreprises installées en milieu rural d’avoir une vraie zone de chalandise et des clients répartis sur un large territoire. Ce phénomène est donc plutôt favorable au développement de notre économie.

J’ajoute que les colissimos ont permis à La Poste d’accroître son trafic de 35 % en quatre ans, ce qui n’est pas un luxe eu égard à la situation dans laquelle vous l’avez mise.

Mais ce mode de vente pose également quelques problèmes, car quand il y a des « pépins », ce sont souvent de gros pépins qui ont des conséquences importantes pour le consommateur. C’est par exemple le cas du produit qui a été payé mais jamais livré. Ou bien, ce qui peut être pire, du produit livré avec un tel retard que le consommateur en a acheté un autre ailleurs. Se posent alors les problèmes évoqués par différents orateurs pour obtenir un remboursement. C’est également le cas lorsqu’un produit livré en port payé est gardé par le livreur pour s’assurer du paiement, exerçant ainsi une forme de chantage à la livraison. Nous avons connu cette situation avec la CAMIF. Ce sont enfin les cas de faillites qui peuvent générer des situations dans lesquelles les transporteurs ont accepté de la marchandise mais ne seront jamais payés pour la livraison.

Cette proposition de loi répond-t-elle à ces problèmes? Certes, l’encadrement est amélioré. Mais il serait vain de croire que tous les risques sont écartés.

D’abord, l’article 3, interdisant aux transporteurs de réclamer le port, ne va-t-il pas les amener à garder le produit, ou à refuser de le transporter s’ils n’ont pas l’assurance d’être payés? Dans ce cas, le consommateur ne verra même pas le produit arriver chez lui, et la situation sera donc pire qu’aujourd’hui.

Deuxième élément: le cas du consommateur défavorisé, sur lequel nous reviendrons au moment de l’étude des amendements. Il n’est pas normal que l’on améliore quelque peu les conditions de remboursement avec des taux d’intérêt aussi faibles. Imaginons la situation d’un consommateur ayant effectué son achat par un crédit à la consommation – dont le taux peut atteindre 20 % – et qui aura droit à un remboursement, selon la dernière proposition, à un taux de seulement 6,5 %. Le consommateur sera alors le dindon de la farce, alors même que le crédit lui aura parfois été octroyé par l’intermédiaire du fournisseur. Cette assemblée examinera bientôt la question du crédit à la consommation, mais, une fois encore, on ne peut considérer que l’ensemble des problèmes posés a été réglé par le présent texte.

Autre question en suspens: celle des risques pour l’entreprise de vente. À quel moment doit-on informer que l’entreprise connaît des difficultés? Trop tôt, le risque est d’accentuer les difficultés de l’entreprise en créant un vent de panique. Trop tard, la mesure sera complètement inopérante. Je n’ai pas de réponse à cette question, mais je ne pense pas que ce texte en apporte non plus.

Pour ce qui est de la forme, vous avez vous-même reconnu que, depuis un certain temps, cette assemblée légifère par petits bouts. Le code de la consommation a été rédigé bien avant l’avènement de la carte de crédit. À l’époque, on payait en liquide ou en chèque. Mais plutôt que de proposer un texte refondateur qui tienne compte des nouvelles évolutions des pratiques de consommation ainsi que des pratiques financières, on s’en tient à un pansement posé ici ou là. Et dans notre cas, le pansement me paraît à peine assez grand pour la situation et les besoins qui sont exprimés.

Autre observation sur ce sujet: vous condamnez les consommateurs au recours individuel. Et chacun sait bien que le recours individuel est très compliqué – je pense que beaucoup parmi nous l’ont pratiqué. Il n’y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, et, d’une manière générale, l’interlocuteur du consommateur individuel – y compris le liquidateur judicaire, le cas échéant – ne se presse pas de répondre au consommateur individuel. Cela nous amène à ré-évoquer ce qui serait la vraie solution: l’action de groupe.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Vous êtes obsédé!

M. Jean Gaubert. Plutôt qu’obsédé, je suis obstiné, et ce d’autant plus que je constate que le Gouvernement cherche à gagner du temps sur ce sujet. Un précédent ministre, M. Luc Chatel, avait lui-même théorisé l’intérêt de l’action de groupe alors qu’il était député. Son rapport était excellent, mais, à peine ministre, il l’a considéré moins bon qu’avant. C’est une pratique assez courante sous toutes les majorités, mais votre art de la communication l’a élevée à un niveau de sophistication inconnu jusqu’à présent.

Nous avons ensuite évoqué cette situation lors de l’examen de la LME. Notre regretté collègue Jean-Paul Charié s’était battu en ce sens. M. Chatel avait créé un groupe de travail, qui s’est réuni, le l5 ou le 16 juillet 2008, une seule fois et qui ne s’est plus réuni depuis. Lors des assises de la consommation à la fin du mois d’octobre, vous avez évoqué l’action de groupe.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. En effet.

M. Jean Gaubert. Le président Patrick Ollier a proposé que l’on fasse un groupe de travail, qui n’est toujours pas né, sauf à ce qu’il se soit constitué exclusivement au sein de l’UMP. J’aimerais que, plutôt que de continuer à gesticuler, on en vienne à rechercher de vraies solutions. Et ces solutions, vous les avez!

À vous écouter, monsieur le secrétaire d’Etat, on en vient parfois à se dire qu’au lieu d’une position équilibrée entre intérêts des consommateurs et intérêts des entreprises, vous penchez plutôt en faveur des entreprises. C’est un tort, car, en défendant ou en laissant trop de liberté à ceux qui travaillent mal, qui trichent, qui rabiotent comme l’on dit chez nous ou qui font de la cavalerie financière, on inflige un désavantage à ceux qui ont des pratiques normales, morales, en matière de commerce.

Je voudrais donc que vous nous disiez une bonne fois pour toutes où vous en êtes par rapport à cette question de l’action de groupe. Ayez le courage de nous dire ce qui s’entend dans certains couloirs, à savoir que, tant que Mme Lagarde sera ministre, l’action de groupe ne se fera pas, car elle y est très opposée. Ou bien donnez-nous un échéancier pour mettre enfin en place l’action de groupe « à la française », car nous connaissons les dérives qui ont amené à la condamnation de ce type d’action aux États‑Unis. Dans tous les cas, arrêtez de nous enfumer avec des arguments dilatoires!

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Disons-le sans ambages: cette proposition de loi visant à renforcer la protection des consommateurs en matière de vente à distance déposée par nos collègues de la majorité n'est rien d'autre qu'un texte d'affichage, à quelques semaines des élections régionales, dont le caractère démagogique n’a échappé à personne.

M. Thierry Benoit. Un peu de sérieux!

Mme Laure de La Raudière. Nous travaillons sur ce projet depuis des mois!

M. André Chassaigne. Entendons-nous bien: il n'est pas ici question de minimiser l'émoi qu'ont suscité la faillite récente de la CAMIF, et ses conséquences pour des milliers de consommateurs, que tout le monde sur ces bancs a en tête. Nous ne nions pas non plus l'évidence du développement exponentiel de la vente à distance ces dernières années, et les problèmes juridiques que cette évolution génère inévitablement. L'intention de nos collègues transcrite dans le titre de la proposition est donc louable et leur initiative intéressante à cet égard.

Cependant, il n'en reste pas moins que les solutions préconisées manquent crucialement d’ambition, pour ne pas dire de fond. On attendait un feu d’artifice, mais les fusées ne partent pas. S’il fallait s’en convaincre, il suffirait de reprendre la proposition initiale. Celle-ci tenait en trois petits articles.

Le premier d'entre eux, qui constitue le cœur du dispositif, et notamment son alinéa 3, concentrait sur lui toutes les critiques eu égard à la lourdeur de la procédure envisagée. Elle articulait, d’une part, l'extension des pouvoirs de l'autorité compétente en matière de concurrence et de consommation, en la chargeant de recueillir les informations nécessaires à l'appréciation de la bonne exécution, par un professionnel, des obligations découlant d'un contrat conclu à distance; et, d’autre part, la saisine du ministre en charge de la consommation en cas d'incapacité manifeste du professionnel à remplir ses obligations afin que ce dernier, sur la base des investigations précitées, prenne, au terme d'une procédure contradictoire, un arrêté interdisant au professionnel concerné toute nouvelle prise de commande ou de paiement. Procédure assortie d'une amende en cas de non-respect de l'injonction. Qu’en termes élégants ces choses étaient dites!

En l'état, la lourdeur et la solennité de la procédure faisaient de cette proposition initiale une loi inapplicable. Seul l'article 3, conservé en commission, écartant l'action directe d'un voiturier à l'encontre du destinataire dans le cadre d'un contrat à distance revêtait un intérêt indéniable, et contribuera effectivement à renforcer la protection du consommateur en matière de vente à distance.

Je dois néanmoins, au nom de mon groupe, concéder que les travaux de la commission des affaires économiques ont fait évoluer le texte initial de manière positive.

M. Thierry Benoit. Très positive!

M. André Chassaigne. La procédure de l'article 1 er sera mise en œuvre par la DGCCRF, qui pourra obliger le professionnel à informer le consommateur de la mesure administrative qui le vise. En outre, l'obligation d'information à destination des consommateurs se trouve opportunément renforcée. Quant à la conclusion des contrats procédant d'un démarchage téléphonique, elle est précisément encadrée. Autant de dispositions qui tendent à améliorer la protection des consommateurs, dont nous ne doutons pas qu'elles feront l'objet d'un large consensus sur l'ensemble de ces bancs.

En dépit de ces nouveautés votre texte n'est toujours pas satisfaisant, loin s'en faut!

Notons en premier lieu la contradiction entre les nouvelles missions assignées à la DGCCRF et son démantèlement progressif par le Gouvernement. Pouvez-vous à cet égard nous assurer que cette direction aura les moyens effectifs de faire appliquer cette nouvelle législation de manière exhaustive? Le rapport précise qu'en 2007 le centre de surveillance du commerce électronique rattaché à la DGCCRF a effectué un peu plus de 6000 contrôles. Si l'on soustrait de ce chiffre les doubles contrôles résultant des 887 rappels de réglementation, on arrive donc à un peu plus de 5000 contrôles, soit environ 8 % des sites contrôlés. Au regard du dynamisme du secteur de la vente en ligne et de la prolifération des sites, c'est assez peu.

Sur la forme, l'article 1 er , toujours dans son alinéa 3, nous laisse dubitatifs pour ne pas dire inquiets: il y est prévu que: « s'il apparaît [...] qu'un professionnel [...] est dans l'incapacité manifeste de respecter ses obligations, générant ou susceptible de générer un préjudice financier pour un grand nombre de consommateurs, l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut interdire au professionnel toute prise de paiement ».

Cette rédaction hasardeuse appelle plusieurs remarques.

Premièrement, la sanction a priori qui ne serait pas adossée à la constatation d’un préjudice subi nous semble être dommageable pour le professionnel. Son manquement à ses obligations contractuelles peut en effet résulter d’un facteur qu’il ne maîtrise pas, ou être temporaire.

Nous souhaitons par ailleurs que le rapporteur nous précise ce qu’il entend par « grand nombre de consommateurs ». Prise a contrario , cette formulation donne un blanc-seing aux professionnels ne respectant pas leurs obligations contractuelles, tant que le préjudice financier généré ne concerne qu’un nombre restreint de consommateurs. Or ce nombre est apprécié empiriquement à l’aune de critères qui nous échappent, à moins que le Conseil d’État ne précise cette notion dans le décret d’application des procédures de l’article 1 er auquel renvoie le dixième alinéa de cet article.

En outre, l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation ne sera pas obligée de prononcer une interdiction de prise de paiement à l’encontre d’un professionnel, quand bien même un nombre moins élevé qu’un « grand nombre de consommateurs » subirait un préjudice financier de son fait. Peut-être serait-il opportun que le décret précise qu’en cas d’infraction ne pouvant faire l’objet, à raison de son importance, d’une simple notification d’information parlementaire ou d’un rappel de réglementation, l’autorité administrative sera tenue de prononcer l’interdiction de prise de paiement.

Enfin, dans la même logique, l’alinéa 7 de l’article 1 er ne ménage que la possibilité pour l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation d’enjoindre le professionnel à communiquer sur la mesure administrative dont il fait l’objet. La disposition se trouve ainsi amputée de sa force dissuasive, et, partant, de son efficience.

Si le droit est un tâtonnement perpétuel, fruit de la tension entre l’aspiration au définitif et la nécessaire adaptation à des conditions exogènes sans cesse renouvelées, la loi que nous avons la lourde responsabilité d’élaborer et de voter ne saurait souffrir autant d’approximations sans faire courir un réel danger à ceux qui doivent en bénéficier.

J’en viens donc au fond de cette proposition.

Ces approximations sont in fine révélatrices des intentions qui vous animent: sous couvert de l’intention louable, et porteuse politiquement,…

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Oh!

M. André Chassaigne. …de protéger les consommateurs, vous entendez surtout préserver les entreprises d’une nouvelle réglementation trop contraignante et rassurer les professionnels afin ne pas décourager les initiatives.

M. Thierry Benoit. Et pourquoi pas?

M. André Chassaigne. Ainsi vous arguez du fait que les très petites entreprises manquent de moyens techniques et juridiques pour se conformer aux réglementations en matière de vente à distance. Cette attention est louable, et aucun des parlementaires sur ces bancs ne souhaite brider un secteur économique en pleine expansion.

M. Serge Poignant , vice-président de la commission des affaires économiques . Ce sont des dizaines de milliers d’emplois.

M. André Chassaigne. Mais ce n’est pas l’objectif affiché par le titre de votre proposition. Et ne vous en déplaise, le consommateur individuel ne dispose pas plus que les TPE des moyens pour se défendre d’un préjudice causé par un professionnel négligent, que votre texte, paradoxalement, protège.

De plus, les chiffres éclairent vos desseins d’une lumière que vous préférez voiler. Plus de 56 % des sites marchands enregistrent moins de dix transactions mensuelles, signe qu’Internet est un relais commercial et un levier économique non négligeable pour les TPE. Il n’en reste pas moins que 80 % du chiffre d’affaires du commerce électronique résulte de l’activité des cent premiers sites seulement sur plus de 60000 sites, et ces sites sont les vitrines dématérialisées de très grandes entreprises.

Mme Laure de La Raudière. C’est vrai pour tout le commerce.

M. André Chassaigne. Alors, de grâce, cessez de vous cacher derrière « le nécessaire équilibre entre la protection du consommateur et la liberté d’action des entreprises » pour reprendre le titre de la deuxième partie du rapport. Les approximations de l’article 1 er de la proposition servent surtout à prémunir les très grandes entreprises des effets juridiques de leurs turpitudes ou de leurs faiblesses,…

Mme Laure de La Raudière. Mais non!

M. André Chassaigne. …alors même que les consommateurs sont en première ligne et que vous prétendez les défendre!

Pour conclure, ce texte est notable par ce qu’il n’est pas! Il est stupéfiant de constater que, inspiré en partie par l’affaire de la CAMIF, il ne prévoit pas l’information du consommateur en cas de retrait, par les organismes bancaires, des garanties financières accordées à un professionnel. Les mêmes imbroglios peuvent donc se reproduire et les consommateurs en seront encore une fois pour leurs frais.

Le Gouvernement nous avait fait miroiter un texte sur l’action de groupe, particulièrement pertinente dans ce secteur économique en pleine expansion. Il a été retiré de l’ordre du jour une semaine avant sa discussion! Nous doutons de pouvoir débattre d’une telle initiative avant la fin de la législature. Ce serait pourtant l’une des meilleures formes de protection des consommateurs, mais le Président de la République et Mme Parisot y sont viscéralement hostiles, au nom de la compétitivité des entreprises: les profits des entreprises et de leurs actionnaires sont bien plus importants que la défense des consommateurs qui ne sont bons qu’à les engraisser!

M. Thierry Benoit. On est loin de la vente à distance.

M. André Chassaigne. Ce texte n’est donc ni plus ni moins que le cache-misère des promesses non tenues du candidat Sarkozy (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Rien n’a été mis en œuvre pour augmenter effectivement le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Il s’agit, avant une échéance électorale, de donner un os à ronger aux consommateurs, de les amadouer en présentant une proposition de loi au titre ronflant, …

M. le président. Veuillez conclure, je crois que nous avons bien compris.

M. André Chassaigne . …qui ménage les professionnels et plus particulièrement les grandes entreprises et n’améliore que de façon marginale la protection des consommateurs.

Cette duperie, comme tant d’autres, ne peut, en dépit des quelques dispositions favorables aux consommateurs, que fonder le vote de défiance des députes du groupe GDR sur l’ensemble du texte.

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le vice-président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, après ce que nous venons d’entendre, je voudrais ramener le débat sur le terrain de la réalité, car nous nous sommes vraiment éloignés du texte.

Celui-ci est inspiré par le réalisme.

M. Serge Poignant , vice-président de la commission des affaires économiques. Par du concret!

M. Thierry Benoit. La mise en liquidation judiciaire de la CAMIF et, quelques semaines plus tard, du cybermarchand Show room 2001 a révélé un problème récurrent en matière de vente à distance, que ce soit par correspondance, par téléphone ou sur internet: lorsque l’entreprise ou le transporteur est défaillant, c’est le plus souvent au consommateur d’en assumer la charge financière.

Cette proposition de loi répond donc à un besoin véritable, celui de garantir une meilleure protection aux très nombreux consommateurs pratiquant l’achat à distance.

Le sujet est d’importance. La vente à distance représente un chiffres d’affaires de plus de 25 milliards d’euros et concerne plus de 80000 emplois. Aujourd’hui, près de quatre Français sur cinq achètent à distance et ces dernières années, le développement d’internet a permis un essor considérable de la vente à distance, même si je ne néglige pas le poids des commandes par correspondance ou par téléphone, qui, l’an passé, représentaient tout de même près de 20 % du chiffre d’affaires de ce secteur.

La vente à distance a donc connu un essor important, mais aussi une véritable mutation liée au développement du e‑commerce. En 2008, son chiffre d’affaires a augmenté 25 % pour s’élever à près de 20 milliards d’euros et le nombre de sites marchands actifs est passé de 15000 en 2005 à plus de 50000 aujourd’hui.

Pour les consommateurs, les avantages sont nombreux. La vente à distance permet, parfois, d’acheter moins cher; elle permet d’accéder à un très grand choix de produits sans avoir à se déplacer. Avec internet le consommateur visualise complètement un produit et peut le commander rapidement. Aussi, depuis quelques années, de plus en plus d’achats a distance sont réalisés par ce moyen. Internet assure aujourd’hui près de 80 % du chiffre d’affaires de la vente à distance. L’engouement pour l’achat sur le net, comme au jour de l’ouverture des soldes par exemple, illustre bien le phénomène. La vente à distance, simple et pratique va encore se développer considérablement dans les années à venir.

C’est pourquoi nous estimons que cette proposition constitue un progrès important. Elle permet à la fois de garantir au consommateur une protection accrue et de garantir aux entreprises la liberté d’action dont elles ont besoin.

Avec la multiplication des contrats de vente à distance, les conflits entre acheteurs et vendeurs se multiplient également. Force est de constater qu’à l’issue de ces conflits, c’est le plus souvent le consommateur qui est lésé, faute de protection et de moyens d’action suffisants.

Pour le groupe Nouveau Centre et apparentés, un moment apparaît comme particulièrement critique: c’est le délai entre la commande et la livraison effective du produit acheté. Ce délai, plus ou moins long, constitue une période à risque pour le consommateur qui a déjà payé le produit mais ne peut être totalement certain de le voir arriver un jour. Dans la vente à distance en effet, l’absence de lien physique entre vendeur et acheteur ne permet pas réellement à ce dernier d’apprécier à distance la fiabilité et la viabilité de l’entreprise.

Le plus souvent, il n’y a aucun problème et l’essor de ce type de commerce en est la preuve. Mais lorsque ce n’est pas le cas, le client se trouve dans une situation particulièrement délicate en cas de perte de colis ou de faillite d’entreprise.

Or lorsqu’une entreprise est en liquidation, les dettes des salariés et celles de l’État, notamment du fisc, absorbent généralement la totalité de ce qui peut être retiré d’une cession des actifs.

Le consommateur n’a qu’une solution pour obtenir le remboursement du paiement acquitté lors de sa commande: il doit déclarer sa créance auprès du mandataire judiciaire. Ses chances de récupérer les sommes versées sont extrêmement faibles, voire inexistantes.

Les exemples récents de la CAMIF ou du site internet Show room 2001 ont montré que le consommateur ne pouvait utiliser aucune disposition légale pour obtenir le remboursement ou le dédommagement du paiement acquitté lors de la commande.

Devant ce constat, le droit communautaire s’est saisi de la question de la vente à distance et a apporté au fil des années une réponse indispensable mais néanmoins insuffisante aux citoyens des États membres.

Certes, la loi Chatel du 3 janvier 2008 a permis de réelles avancées, notamment en ce qui concerne les délais de livraison. Mais cette avancée majeure ne protège pas le client d’une éventuelle faillite de l’entreprise.

M. André Chassaigne. Elle est détournée.

M. Thierry Benoit. Aussi, pour notre groupe, il fallait agir. Mais de façon équilibrée, chaque partie devant y trouver son compte. Il fallait proposer une protection du consommateur plus juste et plus efficace, tout en préservant la liberté d’action des entreprises.

Les pistes proposées par cette proposition de loi permettent de mieux garantir et de mieux sécuriser le processus d’achat à distance et le renforcement des possibilités d’action de la DGCCRF en est l’un des points essentiels.

Cet article 1 er aura sans aucun doute un effet préventif dans la mesure où les consommateurs, se sentant plus protégés, retrouveront confiance dans la vente à distance. Il aura surtout un effet dissuasif sur les opérateurs indélicats qui acceptent les commandes sans pouvoir les honorer.

Néanmoins, une question subsiste pour les membres de notre groupe: la DGCCRF disposera-t-elle des moyens nécessaires et suffisants pour mener à bien cette nouvelle mission?

M. André Chassaigne. Avec la RGPP, ce n’est pas sûr!

M. Thierry Benoit. M. le secrétaire d’État répondra très certainement à cette question.

Autre point essentiel de cette proposition de loi visant à corriger une situation liée au droit du transport: le transporteur ne pourra plus se retourner contre le consommateur lorsque le vendeur ne lui aura pas payé la livraison. En effet, dans certains cas, le consommateur devait, alors qu’il avait déjà payé les frais de livraison lors de sa commande, payer une deuxième fois une somme complémentaire au transporteur. Cette situation de double facturation avait été maintes fois constatée lors de la liquidation judiciaire de la CAMIF. L’article 3 de la présente proposition de loi évitera une double facture au consommateur.

Depuis 2001, les obligations d’information sur la nature du bien proposé à l’achat ont été largement renforcées. Néanmoins, ce droit à l’information méritait de l’être encore. La proposition de loi va dans ce sens, par voie d’amendement, en imposant aux opérateurs de vente à distance par Internet de fournir sur leur site un accès direct aux conditions contractuelles.

Toutes ces améliorations expliquent pourquoi le groupe Nouveau Centre et apparentés estime que cette proposition constitue un progrès important permettant, d'une part de garantir au consommateur une protection accrue, d’autre part de garantir aux entreprises la liberté d’action dont elles ont besoin.

En conclusion, la présente proposition de loi permet de donner une meilleure information au consommateur, d’accroître la sécurisation de l’acte d’achat et de renforcer les pouvoirs d’intervention de la DGCCRF.

Il ne s’agit pas ici de prendre parti entre le vendeur ou l’acheteur, entre l’entreprise ou le consommateur, mais de responsabiliser le vendeur et l’acheteur. Voilà pourquoi le groupe Nouveau Centre votera avec confiance cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Merci, monsieur le député!

M. le président. La parole est à Mme Laure de La Raudière.

Mme Laure de La Raudière. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons vise à renforcer la protection du consommateur, tout en garantissant un environnement favorable aux entreprises de vente à distance. Cet équilibre est bien fragile et nous veillerons à ce que celui-ci soit toujours le fil directeur de nos travaux.

En effet, au moment du réel développement de la vente sur Internet, il ne faudrait pas tuer, avec des mesures par trop déséquilibrées, la formidable création d'activité et de richesse que représente Internet pour des dizaines de milliers d'entrepreneurs en France, et particulièrement les PME.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Tout à fait!

Mme Laure de La Raudière. Parallèlement, il convient bien évidemment de protéger les consommateurs des abus.

Le développement de l’e-commerce, la protection des consommateurs, la confiance des clients et l'avenir des entreprises de la vente à distance ont toujours été au cœur de la réflexion menée par les députés du groupe UMP. Nous avons déjà débattu de ces sujets en 2004 dans le cadre de la loi pour la confiance dans l'économie numérique, et en janvier2008 dans le cadre de la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, dite loi Chatel.

De nombreuses dispositions ont déjà été prises visant à protéger les consommateurs de la vente à distance. Permettez-moi de les rappeler rapidement.

Les consommateurs disposent d’un délai de rétractation de sept jours francs sans avoir à justifier de motifs, ni payer des pénalités. Un délai de remboursement maximum de trente jours est imposé au vendeur. Le remboursement du consommateur doit porter sur la totalité des sommes versées. La pratique de l'avoir ne peut être imposée par le vendeur. Le vendeur doit mettre en place un interlocuteur unique en cas de litige, avec la responsabilité de plein droit du vendeur à distance. Il doit indiquer une date limite de livraison et offrir la possibilité au consommateur de dénoncer le contrat de vente si le délai est dépassé de plus de sept jours. Enfin, il doit mettre à disposition un numéro non surtaxé pour toutes les questions relatives au suivi de commandes.

Vous le voyez, mes chers collègues, nous avons déjà beaucoup légiféré pour protéger le consommateur. Ces mesures ont permis de réduire de 15 % le nombre des réclamations adressées au service de l'État en matière de vente à distance.

Nous complétons aujourd'hui ces démarches pour régler quelques cas spécifiques, non encore adressés par la législation en vigueur: celui des entreprises ne livrant pas volontairement – c’est de l’escroquerie – ou involontairement – c’est de la défaillance – le produit ou le service acheté dans le cadre d'une vente à distance.

Avant d’entrer plus avant dans le vif du sujet, je voudrais, au nom du groupe UMP, rappeler le chemin parcouru pour aboutir à la proposition de loi déposée par notre collègue Jean-Pierre Nicolas, également rapporteur.

Nous avons commencé à travailler sur ce sujet au printemps 2009, et non pas il y a seulement quelques semaines, monsieur Chassaigne.

M. André Chassaigne. Si! Regardez l’ordre du jour de l’Assemblée!

Mme Laure de La Raudière. Au printemps 2009, disais-je, le ministère de l'intérieur affiche les bons résultats de la politique gouvernementale en matière de lutte contre la délinquance.

Dans tous les domaines, il enregistre une baisse de la délinquance, sauf dans celui qui concerne les actes de malveillance ou d'escroquerie par l'intermédiaire d'Internet. Cela n'est pas illogique, me direz-vous, étant donné la démocratisation de ce moyen de communication. Mais nous ne souhaitons pas voir s'installer en France de nouvelles formes d'escroquerie ou de délinquance. C'est pour cette raison que le groupe UMP, à l'initiative de son président Jean-François Copé, décida de réfléchir sur ces sujets. Notre collègue Bernard Gérard, député du Nord, qui connaît bien les enjeux de la vente à distance...

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Il les connaît remarquablement!

Mme Laure de La Raudière. ...et moi-même fûmes chargés d'animer la réflexion.

Par souci d'efficacité, nous avons décidé de concentrer notre étude sur la protection des consommateurs et Internet, avec le souci permanent que l'immense majorité des acteurs de commerce électronique sur Internet ont un comportement très responsable, très commercial et offrent par conséquent un service de qualité, reconnu par les Français.

En effet, les chiffres sont bien là pour montrer la confiance qu'ont les Français dans ce mode d'achat: 66 % des internautes ont acheté en ligne en 2008 et le nombre de sites marchands a plus de doublé en deux ans, atteignant fin 2008 plus de 48500 sites.

Plus de 220 millions de colis ont été envoyés en France en 2008 par le biais de la vente à distance pour un chiffre d’affaires de 25 milliards d'euros, la vente par Internet représentant 80 % du chiffre d’affaires total de la vente à distance.

Face à tous ces chiffres impressionnants, rappelons que les plaintes de consommateurs sont faibles puisqu’elles sont au nombre de 32000, soit 0,015 %. Ces plaintes sont concentrées sur quelques acteurs, quelques entreprises ayant des comportements pour le moins malhonnêtes. Il nous appartient ici de trouver les moyens de protéger nos concitoyens face à ces abus. Nous avons tous été sensibles et émus par les témoignages des clients de la CAMIF et de Show-Room 2001, ou encore du Magicien des prix.

Toutes ces entreprises ont finalement été mises en liquidation judiciaire, mais après un processus long et pendant lequel elles ont pu continuer à prendre des commandes qu'elles savaient pertinemment qu'elles ne pourraient pas honorer. C’est là que le bât blesse!

M. Thierry Benoit. Eh oui!

Mme Laure de La Raudière. Le placement en redressement ou en liquidation judiciaire d'une société de vente à distance peut entraîner des préjudices importants vis-à-vis des consommateurs ayant passé commande et n'ayant pas encore été livrés, car les règles habituelles sur le paiement des créanciers dans le cadre des faillites laissent peu de chance de dédommagement.

Certains collègues ont alors proposé de n'autoriser l'encaissement du paiement du produit ou de la prestation de service qu'au moment de l'expédition. Cette idée est séduisante a priori  et réglerait les problèmes. C'est d'ailleurs une pratique de certaines enseignes qui peuvent assurer la livraison, sous quarante-huit heures, de leurs produits. Pour autant, cela ne me semble pas une bonne idée de légiférer sur ce point.

En effet, pour nombre de petites entreprises fabriquant à la commande et dont les délais de livraison ne peuvent donc pas être de quarante-huit heures, cette mesure est très mauvaise.

J'ai récemment commandé des tabourets de belle qualité en chêne du Perche, par téléphone, à un menuisier, après avoir visité son site sur Internet. Les délais de fabrication étaient de huit semaines. Pendant ces huit semaines, cette PME a payé ses salariés, elle a aussi payé la matière première, le bois. Cela me conduit à formuler deux réflexions.

Grâce à Internet, ce menuisier peut développer son activité bien au-delà du rayon d'action habituel de cent kilomètres d'un artisan. Il peut donc développer une ligne de produits et les vendre dans toute la France et dans le monde. Si nous mettions en place le paiement à l'expédition, cet artisan ne pourrait plus vendre par Internet, sa trésorerie ne lui permettant pas de financer les frais engagés pour les commandes.

Cette situation est aussi un véritable problème face à la concurrence étrangère. Le paiement à l’expédition entraînerait nécessairement la délocalisation de sociétés, le commerce électronique n'ayant pas de frontière.

Si nous mettions en place des dispositions trop contraignantes, que ce soit le paiement à l'expédition ou d'autres spécificités franco-françaises, nos plus belles entreprises de vente à distance et de vente par Internet iraient tranquillement s'installer aux frontières. Nous perdrions alors beaucoup: les emplois, les relations avec les fournisseurs locaux, mais aussi les revenus fiscaux.

Avec mes collègues Jean-Pierre Nicolas, Jean-Michel Ferrand et Bernard Gérard, nous avons réfléchi au meilleur équilibre: comment protéger le consommateur sans freiner le développement de l'e-commerce et sans faire peser trop de contraintes sur les entreprises de vente à distance implantées en France qui souffrent déjà de la crise? Il nous a semblé que le plus efficace était de se doter d'outils administratifs plus réactifs pour prévenir en amont les situations.

L'existence, depuis juillet2007, du « baromètre des réclamations des consommateurs » permet aux services de l'État de détecter assez rapidement les entreprises de vente à distance qui ne livrent pas leurs clients.

La proposition de loi étend le pouvoir de l'autorité administrative chargée de la protection des consommateurs en lui permettant d'intervenir pour suspendre ou limiter les encaissements des commandes. Cette mesure permet une protection efficace du consommateur et elle ne crée pas de handicap pour les entreprises. Elle permet à l'État d’augmenter considérablement sa réactivité en cas de détection de pratiques peu responsables des entreprises et a un effet dissuasif vis-à-vis des entreprises, sans gêner celles qui ont toujours apporté à leurs clients des qualités de service au niveau de leurs attentes.

Au début de mon intervention, je parlais d’équilibre. Avec cette proposition de loi, nous y sommes: renforcement certain des consommateurs, sanction pour les entreprises qui ne se comportent pas correctement, mais sans entraver d'aucune façon les entreprises de vente à distance, si nombreuses, qui respectent les lois et réglementations en vigueur et les bonnes pratiques de la vente à distance.

Le groupe UMP pense que cette proposition vient renforcer les dispositions existantes de protection du consommateur dans le cadre de la vente à distance, tout en préservant le développement en France d'un secteur d'activité porteur d'avenir et d'emplois.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP soutiendra cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Annick Le Loch.

Mme Annick Le Loch. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est, et c'est heureux, des sujets liés à la consommation et en particulier à la protection des consommateurs sur lesquels nous pouvons nous retrouver. Le développement, ces dernières années, du e-commerce, notamment, appelle de la part du législateur une certaine vigilance afin de ne pas laisser le consommateur sans protection. Nous ne pouvons pas ne pas nous adapter, compléter notre législation face à une évolution aussi massive que rapide.

Aujourd'hui, Internet représente 80 % du chiffre d'affaires de la vente à distance, loin devant les ventes par téléphone ou par courrier. Les chiffres présents dans le rapport ne peuvent qu'interpeller les législateurs que nous sommes; les ventes en ligne ont connu une progression de 27 % en2008.

Je crois qu’il se crée d’ailleurs un site marchand toutes les heures dans notre pays.

Si l’on peut se féliciter de la vitalité du e-commerce en France, qui témoigne du développement des nouvelles technologies et d’un niveau d’équipement élevé, l’on peut également considérer que la protection du consommateur est devenue un enjeu urgent, d’autant plus que ce sont essentiellement des jeunes, souvent peu argentés, qui commandent en ligne.

Aussi, je veux le redire, toute proposition de loi qui tend à conforter les droits des consommateurs est la bienvenue car il n'est plus possible de laisser perdurer certains abus. Trop de consommateurs modestes se retrouvent encore aujourd'hui lésés après un achat sur internet, et sans véritables possibilités de recours. De ce point de vue, le texte issu de la commission peut être encore grandement amélioré dans l'intérêt des consommateurs. C'est pourquoi, dans un esprit constructif, nous vous proposons, monsieur le secrétaire d’État, d'aller plus loin sur la voie d'une meilleure protection, en avançant par exemple sur la question du droit à l'information du consommateur. Plusieurs de nos amendements porteront également sur l'obligation pour les entreprises fautives de rembourser les sommes engagées dans des délais rapides.

Si la loi du 3 janvier 2008 sur le développement de la concurrence au service des consommateurs a permis un certain nombre d'avancées – je pense notamment aux appels surtaxés des hotlines ou aux délais de livraison imposés aux entreprises de vente à distance – d’importantes lacunes demeurent.

En matière de régulation de la vie économique ou lorsque l’on veut agir en faveur du consommateur, mieux vaut poser des principes clairs dans la loi plutôt que de se réfugier dans la valorisation de pratiques non contraignantes, facultatives, et donc soumises à la bonne volonté des acteurs économiques. Nous avons vu en effet le fiasco auquel cette méthode a conduit en matière de baisse de la TVA.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Ce fut un succès au contraire!

Mme Annick Le Loch. Vous rappelez dans votre rapport combien l'Union européenne valorise les « chartes de qualité » et les « codes de bonne conduite », dont vous vantez même la « force morale », et le fait qu’ils constituent, selon vous, « l'un des meilleurs moyens de protéger le consommateur contre les abus dont ils pourraient être victimes dans le cadre des ventes à distance».

Nous restons pour notre part dubitatifs face à cette croyance dans la moralisation du capitalisme sans contrainte. Cette croyance n'est rien d'autre qu'un pas de plus dans la pensée libérale et ne propose qu'un laisser faire supplémentaire. Ne vous en déplaise, nous restons attachés à la loi et à la contrainte d'intérêt général qu'elle seule peut porter. C'est bien par elle que la meilleure protection des consommateurs peut être assurée.

Je ne prendrai qu'un exemple, un point spécifique sur lequel à mon sens votre texte mérite d'être considérablement amélioré, celui de la protection des consommateurs ayant passé commande auprès d'un professionnel en situation de liquidation judiciaire.

Il est urgent de mettre en place, et ce texte devrait le permettre, des mesures adaptées. Nous avons tous en mémoire l'abandon des clients de cette belle entreprise que fut la CAMIF. Mais ce n'est là qu'un exemple marquant parmi beaucoup d'autres, sans doute moins médiatisés. Nous avons le devoir d'agir. Il revient au législateur de prévoir les modalités qui permettront aux clients, soit d'obtenir livraison des produits commandés, soit de se faire rembourser les sommes versées, même en cas de liquidation judiciaire.

Lorsqu'une entreprise fait faillite, les stocks dans les entrepôts – l’on peut raisonnablement penser qu’il en reste encore un peu – ne devraient pas être gelés, mais servir à honorer les commandes. Une telle mesure permettrait de reconnaître que les biens stockés par l'entreprise qui ont déjà fait l'objet d'un acte d'achat appartiennent aux clients qui en ont passé commande.

Nous devons par ailleurs progresser sur la question de la création d'une « garantie financière » pour les professionnels travaillant dans le champ de la vente sur commande. Cette garantie, qui existe dans d’autres secteurs d’activité, servirait à indemniser les consommateurs. Pourquoi, par exemple, ne pas avancer sur l'idée d'un fonds de garantie de la vente à distance abondé par les entreprises du secteur? L'idée d'une assurance obligatoire à l'égard des clients devrait trouver un écho favorable dans la représentation nationale, même si cela n'est pas facile notamment au regard de l'implantation des entreprises de vente à distance, en particulier au sein de l'Union européenne. Nous avons cependant le devoir d'y réfléchir.

Face à ces propositions formulées par de nombreuses associations de consommateurs, et qui me semblent répondre à un problème bien réel, le Gouvernement a proposé de s'orienter vers une solution non contraignante pour les entreprises. Vous préférez trop souvent favoriser des solutions du type label et promouvoir des démarches de pur volontariat de la part des professionnels du secteur.

Le 29 juin 2009, Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État à l'économie numérique, et la Fédération e‑commerce et vente à distance, la FEVAD, ont ainsi lancé une nouvelle marque de confiance pour les sites comparateurs. Cette charte de confiance est destinée à «renforcer la qualité et la transparence des services proposés » et à « garantir l'actualisation des informations, la transparence des modes de classement utilisés et une information complète sur les prestations proposées par les sites marchands ».

Mais que faire lorsqu'un site ainsi labellisé ne répond pas aux normes volontaires ?

Que faire lorsque les « 48 heures chrono », affichées en engagement marketing ne sont pas respectées?

Les mesures de ce type nous semblent plus cosmétiques que réellement protectrices pour les consommateurs. Il faut passer de la communication à la protection des consommateurs.

Il n'est pas possible d’abandonner la création de garanties financières au bon vouloir des professionnels du secteur. On peut douter en effet que des entreprises dont la santé économique n'est pas assurée ou qui traversent une mauvaise période choisissent de cotiser à un fonds de garantie. Le volontariat n'est pas une solution réaliste.

En réalité, il est urgent d'instaurer dans la loi un système permettant de s'assurer que les clients ne sont pas lésés par la faillite d’une entreprise. Il n'est pas normal qu'un client qui a payé un bien ou un service se retrouve pénalisé par la procédure de liquidation judiciaire, en même temps que l'entreprise fautive concernée par cette procédure. La création d'une garantie financière pour les professionnels du e-commerce et l'instauration d'un principe simple, selon lequel le paiement de la commande ne peut être encaissé par le professionnel qu'après la livraison effective du produit ou du service commandé, constitueraient de véritables avancées et introduiraient de réelles améliorations dans le code de la consommation.

Votre proposition de loi part d'un constat partagé, mais elle n'offre pas de solution satisfaisante malgré le travail de la commission. Une telle proposition mérite néanmoins un vrai débat pour inventer des règles susceptibles d’améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens en les protégeant. Vous le savez, le groupe SRC a fait de nombreuses propositions en ce sens, comme l'action de groupe. Vous nous trouverez toujours volontaires pour travailler avec vous à l’amélioration des droits des consommateurs, dans le respect des équilibres. C'est pourquoi j'espère que vous saurez accueillir favorablement nos amendements afin de faire avancer la cause du droit des consommateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Gérard.

M. Bernard Gérard. En 2003, Internet ne représentait que le quatrième canal de vente à distance alors qu'aujourd'hui, le e-commerce se situe incontestablement à la première place, avec 80 % du chiffre d'affaires de la vente à distance pour un marché qui s'élève en 2008 à 25 milliards d'euros. Il est tout à fait normal que la loi s'adapte à ce secteur en plein essor: protection des consommateurs, régulation de la concurrence sont autant de domaines dans lequel le législateur se doit d'intervenir pour réguler ce jeune secteur en pleine croissance. Cependant, si la vente à distance traditionnelle souffre de la concurrence du e‑commerce et doit s'y adapter jour après jour, elle continue d'attirer nos concitoyens de manière significative, à hauteur de 5 milliards d'euros par an. Bien avant l'essor d'internet, la vente à distance traditionnelle s'est ancrée dans les habitudes commerciales des Français, notamment dans les territoires ruraux, où le fameux catalogue était très attendu et l'est encore! Longtemps synonyme de bonnes affaires ou de modernité, le catalogue a bien sûr quelque peu perdu de son exclusivité en raison de l'émergence du commerce en ligne, mais il reste néanmoins toujours très apprécié, d'où l'importance de conserver ce canal de vente, ce qui oblige la vente à distance à supporter aujourd’hui les charges du catalogue ainsi que celles du passage à internet. Voilà l’équation à laquelle sont confrontés les VADistes traditionnels qui travaillent à améliorer leur modernité, qui s’inquiètent de leurs retards. Ils sont tout à fait conscients des enjeux.

Élu du Nord, berceau de la vente à distance traditionnelle, je partage avec les entreprises et leurs salariés les enjeux de ce secteur capital pour tout un bassin d'emploi, car, ne l'oublions pas, si la vente à distance symbolise les grandes enseignes, elle représente également des milliers de sous-traitants et des dizaines de milliers d'emplois souvent peu qualifiés. Je ne vais pas m'étendre davantage sur les problématiques du secteur, mais je tenais juste à rappeler en propos liminaires que, si la vente à distance est aujourd'hui fortement représentée par le e-commerce, elle ne s'y résume pas. Cette remarque doit nécessairement être posée avant d'envisager cette proposition de loi dont les réglementations devront être nécessairement adaptées à chaque acteur de la vente à distance. Nous devons donc user de prudence et de pragmatisme dans notre manière de légiférer.

Je tiens également à souligner que compte tenu de l'importance que représente le secteur de la vente à distance aujourd'hui, il ne doit pas être considéré à la marge des autres secteurs d'activité « physique ». Le risque de faillite d'une entreprise engagée par des obligations légales à l'égard du consommateur n'est pas l'apanage des seules entreprises de la vente à distance. Dès lors, les mesures de protection des consommateurs qui seraient en proie aux risques de cessation d'activité d'un VADiste français ne doivent pas peser uniquement sur ces derniers, au détriment de leur compétitivité face à leurs concurrents du commerce physique d'une part et des entreprises de vente à distance étrangères d'autre part. La Redoute, Les 3 Suisses sont à seulement cinq kilomètres de la frontière belge...

Cette proposition de loi doit donc répondre à la nécessité d'adopter des mesures adaptées et non discriminatoires pour ce secteur.

Mais le domaine de la vente à distance comporte un risque supplémentaire par rapport à ses concurrents, induit par le délai entre le paiement du produit et sa livraison. Je ne reviendrai pas ici sur le cas de la CAMIF que nous connaissons bien sur ces bancs pour l'avoir présenté à plusieurs reprises, mais, si cet exemple nous conduit aujourd'hui à légiférer, l'objectif de cette proposition de loi n'est pas de pénaliser un secteur d'activité ni d'entraver sa compétitivité. Il s’agit au contraire de prévenir le plus tôt possible les problèmes qui pourraient survenir en cas de défaillance d'une entreprise de vente à distance, défaillance qui peut dans certains cas pénaliser le consommateur par leur caractère exponentiel. Tout l'enjeu de cette proposition de loi réside dans ce fameux équilibre à maintenir entre l'entreprise de vente à distance et le consommateur, et ce texte ne doit pas être un prétexte pour réécrire le droit de la vente à distance.

Selon une étude Médiamétrie, 98 % des Français se disent satisfaits par la vente à distance: ce chiffre doit nous encourager à trouver la bonne réponse à un problème précis sans pour autant entraver la bonne relation entre les entreprises parfaitement solvables et leurs clients.

Dans la métropole lilloise, je suis bien sûr très concerné par la vente à distance: La Redoute, Les 3 Suisses, Damart, Bonprix et tant d'autres sociétés font la renommée du Nord. Les temps changent, la vente à distance doit évoluer. Faire partie de La Redoute, ce n’est pas appartenir à une institution, mais à une entreprise qui doit avoir le courage, avec ses actionnaires et ses salariés, dans le respect du dialogue, de se poser les bonnes questions. Le textile traditionnel se réforme dans le textile innovant. La vente à distance traditionnelle doit en faire autant.

Avec Jean-Pierre Nicolas, Laure de La Raudière, Jean-Michel Ferrand, nous avons décidé de travailler sur ce texte et nous avons consulté de nombreux professionnels avant d’aboutir à une solution équilibrée. Dans le dernier état des travaux de notre commission, nous avons abouti à certaines propositions qui dépassaient nos premiers objectifs. Aussi ai-je déposé deux amendements pour revenir à l’épure originale de notre texte. Si, demain matin, je dois commander par téléphone un taxi pour me rendre à la gare, il ne serait pas normal que je sois obligé d’accepter des conditions générales de vente et confirmer par écrit la commande de mon taxi. Ce serait déraisonnable.

M. François Brottes. Prenez donc le métro. (Sourires).

M. Bernard Gérard. Mes chers collègues, je suis confiant d ans notre capacité à trouver des solutions mesurées, concertées, qui accompagneront les mutations de ce secteur, garantiront sa pérennité, sa réussite à long terme. Pour toutes ces raisons, je suis favorable au texte tel qu’il a été conçu et bâti. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Bravo!

M. le président. La parole est à Mme Véronique Besse.

Mme Véronique Besse. La situation économique que nous connaissons nous impose une double exigence: soutenir notre économie et protéger les consommateurs. À ce titre, la proposition de loi dont nous discutons est en parfaite adéquation avec l'esprit que nous devons avoir en de telles circonstances.

On considère généralement que l'économie française repose sur quatre moteurs: la consommation des ménages, les investissements, le commerce extérieur et les dépenses publiques.

Si la France souffre d’un commerce extérieur proportionnellement plus faible que ses voisins, elle bénéficie en revanche d’une forte consommation des ménages.

Même si on ne remplacera jamais la vente directe en magasin, que ce soit dans les commerces de proximité ou en grande surface, il faut bien constater que la part de la vente à distance dans la consommation des ménages connaît une croissance forte. Elle dépasse aujourd’hui 25 milliards d’euros, dont une majeure partie – 20 milliards – est dépensée sur internet. Les Français sont en effet de plus en plus nombreux à avoir recours à la vente à distance. Ainsi, en 2008, 220 millions de colis ont été délivrés en France.

Ce résultat pourrait facilement être amélioré si la vente à distance gagnait en sécurité.

Comme l’a montré M. le rapporteur, les plaintes relatives à la vente à distance relevées chaque année par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sont relativement marginales: environ une sur 7000.

Mais ce que nos indicateurs ne parviennent pas à calculer, ce sont les achats qui pourraient être effectués et qui ne le sont pas en raison d’un manque d’information, de lisibilité et de garantie, bref, d’un manque de confiance. Or, vous le savez, mes chers collègues, la condition première de la consommation, c’est la confiance: sans confiance, il ne peut y avoir d’échange et sans échange, de consommation.

Pour effectuer un acte d’achat, l’acheteur doit avoir confiance dans le vendeur autant que dans le produit. Un simple doute, qu’il concerne la qualité du produit, la facturation de la livraison ou les conditions de rétractation, peut amener l’acheteur potentiel à différer ou à annuler son achat.

Il y a là un manque à gagner qui freine la consommation et par conséquent l’emploi.

Nous nous devons aujourd’hui de permettre à la France d’utiliser au mieux ses atouts pour surmonter la crise économique qui l’affecte. Sécuriser la vente à distance, c’est rendre un double service à notre pays: cela permettra non seulement de renforcer la protection des consommateurs, mais aussi de dynamiser notre consommation et donc notre croissance.

J’ajouterai que le secteur de la vente à distance est devenu crucial puisqu’il emploie près de 80000 personnes, chiffre qu’il s’agit de consolider et, bien sûr, d’accroître.

La mesure phare qui consiste à autoriser la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à interdire à un commerçant d’encaisser un paiement en cas de manquement à ses obligations est à la fois juste et appropriée.

Au terme de la discussion en commission, le texte s’est enrichi d’amendements tout à fait opportuns. Le fait que les conditions de vente soient très facilement accessibles sur la page d’accueil d’un site internet de vente à distance me paraît absolument nécessaire. Tout comme il est nécessaire que ces conditions de ventes soient acceptées de façon expresse avant la validation de la commande.

J’émettrai simplement deux réserves sur ce point. Tout d’abord, il faudra distinguer dans la réglementation la vente par internet et la vente dite « papier », deux types de vente qui s’adressent à des publics bien différents et dont les habitudes sont sensiblement distinctes. En effet, la vente par catalogue s’adresse à un public d’habitués qui comprendrait sans doute mal le changement soudain de réglementation.

D’autre part, il convient de ne pas contraindre trop étroitement nos entreprises de vente à distance en raison de la concurrence étrangère. Le risque serait en effet de les voir s’installer à nos frontières, en Suisse ou en Belgique par exemple, afin de bénéficier d’une législation plus permissive, emportant avec elle leurs emplois et les rentrées fiscales qui nous feraient défaut.

Il s’agit, en somme, de trouver un bon équilibre entre la pédagogie et la répression. N’oublions pas qu’il s’agit d’un secteur stratégique pour notre économie, appelé à connaître un puissant développement dans les années à venir. En renforçant la protection des consommateurs dans la vente à distance, nous moderniserons notre économie et nous répondrons aux souhaits de millions de Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. Serge Poignant, vice-président de la commission des affaires économiques . Très bien!

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le vice-président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le présent texte entend répondre à un vrai problème. Une grande entreprise de vente à distance que nous croyions solide a mis la clé sous la porte de manière soudaine, inattendue.

Mme Laure de La Raudière. En effet!

M. Lionel Tardy. De nombreux consommateurs ont ainsi été lésés. Des solutions ont été trouvées, non sans peine, mais ces faits ont permis de mesurer les insuffisances de la législation.

Une faille a été mise en évidence, il fallait la combler. Nous nous y sommes attelés et cette proposition de loi est le résultat d’un travail de fond. Par ce texte, nous mettons en place des outils juridiques qui permettront d’agir efficacement, mais nous n’avons pas la prétention de tout régler par la loi.

Je tiens à souligner ce point car, trop souvent, on prête à la loi des vertus magiques qu’elle n’a pas. Il me semble important, une fois le texte adopté, de donner à l’administration les moyens matériels et humains de l’appliquer. Or je nourris sur ce point quelques inquiétudes car tous les échos qui me parviennent du terrain expriment la crainte d’une diminution des capacités d’intervention des services de la DGCCRF.

Je profite donc de l’examen de ce texte pour relayer auprès de vous, monsieur le secrétaire d’État, l’angoisse suscitée par l’absence d’informations sur les priorités de ces nouvelles directions départementales de la protection des populations. Quel sera leur cadrage général? Quelles seront leurs missions prioritaires? Quelles seront les marges laissées aux préfets? Surtout, élément le plus important, les agents pourront-ils mener à bien toutes les missions qui leur seront confiées?

En effet, par ce texte, nous alourdissons encore la barque et il est de notre devoir de parlementaires de nous assurer qu’elle a la solidité requise. À quoi cela servirait-il en effet de voter des dispositions qui resteraient lettre morte, faute de moyens pour les mettre en œuvre? Ce n’est pas ma conception du travail législatif. Aussi, je vous saurais gré, monsieur le secrétaire d’État, de nous apporter quelques éléments de réponse à ce sujet.

Cette proposition, je l’ai souligné, constitue une solution satisfaisante au problème soulevé sans pour autant l’épuiser. La vente à distance, qu’elle se fasse par internet ou par des méthodes plus traditionnelles, répond à des problématiques particulières. Ce texte aurait pu être l’occasion de les traiter, mais on a fait le choix, ce que je ne conteste pas, d’en rester au périmètre initial.

Je souhaite néanmoins aborder rapidement quelques-unes de ces problématiques afin de fixer quelques grands axes pour les prochains textes qui porteront sur le sujet.

L’un des inconvénients majeurs de la vente à distance, au-delà du risque de défaillance du fournisseur avant même la livraison du produit, concerne tous les aléas liés au transport à cause desquels un bien n’est pas livré ou bien l’est dans un état défectueux. Nous devons apporter des clarifications évidentes quant à la responsabilité du transporteur et, s’il aborde la question, le texte ne va pas assez loin à mon sens.

De même, du temps de la vente par correspondance à l’ancienne, l’image de marque et le sérieux des grandes enseignes rassuraient le consommateur. Avec l’essor prodigieux du commerce électronique, où le pire peut côtoyer le meilleur, la donne a changé. Or, plus que jamais, la confiance du consommateur est la base du système.

La solution idéale pour tous serait bien entendu que le consommateur paie au moment de la commande, mais que cet argent ne soit réellement encaissé par le vendeur qu’après acceptation de la livraison par le client. Ainsi, toutes les questions de bonne livraison ou de défaillance du vendeur ne seraient plus un problème puisque l’argent n’aurait pas été encaissé. C’est techniquement possible. Reste à mettre en place les bonnes dispositions juridiques, ce qui n’est pas évident, tant les situations sont différentes en matière de vente à distance, les solutions qui satisferaient les uns pouvant se révéler problématiques pour d’autres.

Le sujet n’est sans doute pas mûr, mais c’est la voie à suivre car le fondement de la vente à distance, c’est la confiance. Néanmoins, cette proposition de loi va dans le bon sens. C’est pourquoi je la voterai avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Huyghe.

M. Sébastien Huyghe. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons un texte qui touche beaucoup de Français. La vente à distance, dans sa forme ancienne comme dans sa forme actuelle, attire de très nombreux consommateurs. Les prix attractifs, la simplicité de commande, la possibilité de comparer prix et produits, mais également la large palette de marchandises proposées sont pour beaucoup dans ce succès.

Il y a encore de cela quelques années, des entreprises comme La Redoute, Les 3 Suisses, Damart, Blanche Porte ou Cyrillus se partageaient le marché avec quelques autres. La réussite de ces sociétés, plébiscitées par les consommateurs – Bernard Gérard en a parlé –, a permis de créer de nombreux emplois, notamment dans le département du Nord, d’où elles sont originaires. Certaines de ces entreprises sont aujourd’hui en difficulté, ce qui, après l’affaire de la CAMIF, aiguise encore un peu plus la méfiance des consommateurs et limite d’autant les achats effectués par leur intermédiaire. Le rétablissement de la confiance – l’un des objectifs de cette proposition de loi – contribuera d’autant à leur rebond.

L’émergence d’internet a constitué une réelle révolution dans ce domaine: en quelques années, une multitude de sites marchands ont émergé sur un marché en pleine expansion. Il existe aujourd’hui plus de 60000 sites marchands contre un peu plus de 15000 en 2005. Ces sites engendrent un volume de transactions de 20 milliards d’euros sur les 25 milliards du marché global de la vente à distance. Des sociétés comme Amazon, CDiscount ou encore Price Minister ont rapidement pris le pas sur les entreprises traditionnelles. Elles posent de nouveaux défis.

Ce marché ne semble pas devoir cesser son expansion. Cette croissance suscite logiquement des convoitises et engendre des dérives, des pièges potentiels pour les consommateurs. La faillite médiatisée de la CAMIF est une bonne illustration de ce genre de pièges. Cette affaire pourrait se reproduire si nous ne légiférions pas. Il est donc nécessaire d’agir pour mieux protéger et encadrer les achats à distance.

L’ampleur des transactions et des perspectives de développement de ce secteur justifie l’examen d’un texte de loi à part entière. Notre devoir est d’organiser ce système d’échanges pour en favoriser la sécurité, tout en évitant de pénaliser un marché en pleine évolution. Il est bien entendu nécessaire de protéger les consommateurs contre les faillites ou dérives éventuelles. Dans cette perspective, il importe que l’information communiquée à l’occasion d’achats à distance soit optimisée et que les risques qu’ils engendrent soient minimisés.

Ce texte n’est pas un frein au développement de la vente à distance, ni une sanction, mais bien au contraire une garantie. Les entreprises de vente à distance bénéficieront des outils que nous nous apprêtons à voter. Ces outils accroîtront, à terme, la confiance des consommateurs. En effet, combien d’entre eux hésitent encore à franchir le pas pour des raisons de sécurité?

La vente à distance emploie 80000 personnes en France, pour un chiffre d’affaires de 20 milliards d’euros. Ce sont donc des dizaines de milliers d’emplois, ainsi que le dynamisme de centaines d’entreprises, qui sont en jeu. Il nous faut donc garantir la qualité du service rendu. En responsabilisant les entreprises de ce secteur, nous les rendrons plus fortes et nous protégerons les consommateurs. Dans cette perspective, le présent texte me paraît juste et équilibré. Il est indispensable de garantir une parfaite information aux consommateurs.

En ce qui concerne l’article 7 introduit par la commission, il me semblerait nécessaire de trouver un système plus équilibré. En effet, à l’heure des nouvelles technologies, l’exigence de l’apposition d’une signature apparaît inadaptée. Il reste toutefois nécessaire de garantir l’engagement de l’acheteur par une validation écrite qui pourrait prendre au minimum une forme électronique.

Il y a quelques mois, j’ai reçu une personne qui s’est trouvée engagée par avenant à son contrat à l’occasion d’un appel téléphonique d’une société avec laquelle elle était en relations commerciales, uniquement à cause de la réponse apportée par sa fille mineure de quatorze ans. La société concernée ne voulait pas revenir sur cet engagement, considérant que l’accord téléphonique valait contrat. Cela doit changer.

Par ailleurs, comment expliquer aux victimes d’une entreprise en état de faillite que le transporteur de leur matériel peut juridiquement se retourner contre eux pour se faire payer, alors même qu’ils ont déjà réglé la livraison? Cela n’est plus tenable.

Enfin, cette proposition de loi permettra à la DGCCRF d’intervenir lorsque la situation l’exigera, ce qui évitera des désagréments à de nombreux consommateurs.

En définitive, il s’agit bien de protéger le consommateur, mais également d’encourager l’assainissement du marché de la vente de distance. Pour protéger les emplois et garantir le développement de cette filière d’avenir, il est indispensable que sa crédibilité soit maximale. C’est pour cette raison que le vote de ce texte est nécessaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Gaillard.

Mme Geneviève Gaillard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne sais, en montant à cette tribune, si je dois me montrer satisfaite ou si je dois pleurer.

Mme Isabelle Vasseur. Soyez satisfaite!

M. Thierry Benoit. Soyez confiante en l’avenir!

Mme Geneviève Gaillard. Plutôt satisfaite car je n’ai jamais autant entendu parler de la CAMIF par des gens qui ne connaissent rien à ce qu’elle était. (« Oh! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Serge Poignant, vice-président de la commission des affaires économiques . Ce n’est pas bien de tenir de tels propos!

Mme Geneviève Gaillard. Je suis donc partagée entre l’envie de pleurer et la satisfaction de ce que l’on parle de la CAMIF, maintenant qu’elle est morte.

Je voudrais vous dire, monsieur le secrétaire d’État, et vous le savez sûrement, que contrairement à ce que j’ai entendu dire par un de mes collègues, la CAMIF n’est pas morte de manière soudaine et imprévue. Elle allait mal depuis longtemps. Et c’est bien grâce à des consommateurs que l’on appelait des sociétaires militants qu’elle a pu maintenir plus de 1000 emplois sur le bassin d’emplois niortais et faire en sorte que des salariés continuent de vivre, au moins pendant quelques années, avec un salaire décent. Et ce soir, je pense à eux en vous écoutant, eux qui n’ont pas retrouvé de travail, alors que, dans cet hémicycle, j’ai posé des questions sur la CAMIF, alors que nous avons vu l’État, dans ma ville de Niort où elle était implantée, ne pas se préoccuper du tout de ce qui allait arriver aux sociétaires militants, dont je rappelle qu’une partie d’entre eux, précisément parce qu’ils étaient sociétaires militants, ont, comme moi, acheté à la CAMIF, payé au moment de l’achat, et jamais réclamé leur dû.

C’est plus pour les consommateurs qui ne sont que des consommateurs que vous voulez cette loi. Mais je peux vous dire qu’elle n’aurait strictement rien changé au problème de la CAMIF. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je gère, en ce moment, les 900 personnes de la CAMIF. OK? Alors, s’il vous plaît, un peu de tenue et un peu d’humilité! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP . – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Tous les articles de votre texte n’auraient rien changé.

Un, les sociétaires et les acheteurs étaient informés. Ils ont été informés à travers les assemblées générales. L’information était présente. Cela n’a rien changé. Certains ont quand même acheté. Beaucoup d’entre eux n’ont rien réclamé. Quelques-uns, qui ne prenaient pas la peine de s’informer convenablement, se sont trouvés floués.

Deuxièmement, si la DGCCRF, qui n’a plus de moyens, aujourd’hui,…

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Oh!

Mme Geneviève Gaillard. Elle en a très peu. J’ai vu, sur le terrain, comment les choses se sont passées. Quand on parlait des consommateurs, personne, pas même le ministre de l’époque, ne s’en est préoccupé. Si l’on avait fait quelques actions au moment de la première crise de la CAMIF, cette entreprise n’aurait pas vécu aussi longtemps qu’elle a vécu. Ses salariés auraient été licenciés bien avant. Je ne pense donc pas que l’on puisse tirer des conclusions aussi hâtives.

Je ne dis pas qu’il ne faut pas protéger les consommateurs de l’e-commerce. Mais c’est un tout autre problème que celui de la CAMIF. Que l’on protège les consommateurs de l’e-commerce – qui ne sont pas des militants, ni des sociétaires –, je trouve cela tout à fait louable. Par contre, au vu de mon expérience, et des propos que vous avez tenus, les uns et les autres, en faisant référence à la CAMIF, je ne pense pas que les mesures proposées dans ce texte soient de nature à protéger convenablement le consommateur.

Si, en 2006, l’action de groupe, que le Président de la République nous avait promise,…

M. Patrice Martin-Lalande. Le quinquennat n’est pas achevé, chère collègue.

Mme Geneviève Gaillard. …était arrivée au Parlement dans de bonnes conditions, peut-être que les consommateurs de la CAMIF qui se sont plaints n’auraient pas eu les problèmes qu’ils ont. Nous avons manqué de courage. L’action de groupe, vous l’avez refusée à plusieurs reprises. Pourtant, un texte de cette nature aurait pu répondre à ces consommateurs de l’e-commerce qui peuvent être floués lorsqu’ils passent commande à des entreprises qui, à un moment donné de leur vie, se portent mal.

Paradoxalement, je suis assez d’accord avec Mme de La Raudière. Si les consommateurs n’avaient pas payé au moment de la commande, la CAMIF n’aurait jamais pu continuer de vivre le temps qu’elle a vécu.

Mme Laure de La Raudière. C’est l’objet de cette proposition de loi.

Mme Geneviève Gaillard. Tout cela pour vous dire que ce texte me paraît totalement insuffisant. Il ne me semble pas du tout répondre à l’objectif de protection des consommateurs. Il y a lieu – car je suis moi aussi pugnace – de travailler à nouveau sur les actions de groupe, afin d’inscrire dans notre droit des dispositions qui s’adressent à tout le monde,…

M. Thierry Benoit. Très bien!

Mme Geneviève Gaillard. …qui soient valables pour tous les consommateurs et qui permettent d’avancer, comme beaucoup de pays européens le font désormais, alors que nous sommes en retard, malgré les promesses qui nous avaient été faites, je le rappelle, par le Président de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je voudrais d’abord remercier l’ensemble des orateurs. Quelles qu’aient été leurs opinions, elles ont toutes été très intéressantes.

D’abord, madame Gaillard, tout le monde a été sensible au drame de la CAMIF.

Mme Geneviève Gaillard. Pas quand j’en ai parlé ici, dans l’hémicycle!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Personne n’a d’exclusivité en la matière. Comme beaucoup, j’ai moi‑même reçu des salariés, puisque j’ai été élu dans une circonscription qui n’est pas si éloignée. Ce drame a été fortement ressenti. Il ne faut pas se tromper d’objet. Ce texte ne vise pas, malheureusement – et qui le pourrait? – à remédier à un drame social. Il vise à protéger les consommateurs des conséquences d’une liquidation telle que celle de la CAMIF. C’est ainsi.

Vous avez parlé de l’action de groupe. M. Gaubert estimait que, sur cette question, le Gouvernement se dérobait.

M. Jean Gaubert. Il l’estime toujours!

Mme Geneviève Gaillard. Moi aussi, je l’estime!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Et vous, madame Gaillard, vous estimiez que si l’action de groupe avait existé, cela aurait évité le drame de la CAMIF, ou que cela aurait en tout cas protégé les consommateurs. Je ne partage pas du tout cette analyse.

Prenons le cas de la CAMIF. De deux choses l’une: soit elle n’était pas en situation de liquidation, mais en difficulté, auquel cas une action de groupe intentée aurait accéléré ses difficultés; soit elle était en liquidation, et donc il n’y avait plus d’argent, de sorte qu’une action de groupe n’aurait eu aucun intérêt pour les consommateurs.

Mais je voudrais maintenant revenir sur le fond, et éclairer, puisque M. Gaubert le demande, les intentions du Gouvernement en matière d’action de groupe. Le Gouvernement ne se dérobe pas. Le 26 octobre dernier, j’ai réuni les assises de la consommation. Nous avons pu débattre de l’ensemble de la politique de protection des consommateurs, et j’ai indiqué à cette occasion les priorités de l’action que je compte mener dans ce domaine durant les prochains mois, en renforçant les pouvoirs des consommateurs. La priorité sera le renforcement des outils permettant de traiter les litiges entre entreprises et consommateurs, avec comme première action la généralisation de la médiation.

Je vous indique que cela devra faire l’objet de dispositions législatives. L’installation de la médiation dans l’ensemble de l’économie française sera le deuxième pas – après le règlement de litiges entre services après-vente et consommateurs.

Mme Laure de La Raudière. Très bien!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Ces procédures amiables, elles peuvent aboutir. Et je pense qu’elles aboutiront dans le plus grand nombre de cas.

Et puis, à l’opposé de ces procédures amiables, il y a les procédures en justice. Un consommateur lésé peut déjà agir en justice, aujourd’hui, à titre individuel ou via une association qui porte ses intérêts. Mais il faut bien reconnaître que la procédure civile de droit commun est peu adaptée dans certains cas.

Pour des cas de dernier recours, je vous indique, monsieur Gaubert, que je suis favorable à la mise en place d’une action de groupe à la française, comme vous la souhaitez, précisément encadrée, pour éviter les dérives à l’américaine.

J’irai même plus loin. Ma conviction est que l’instauration d’un tel dispositif dans notre droit est inévitable et inéluctable. Deux commissions parlementaires, la commission des lois du Sénat et la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, étudient d’ailleurs en ce moment les possibles modalités d’une future action de groupe à la française. Des préalables doivent être levés avant le dépôt au Parlement d’un projet de loi de création des actions de groupe, ainsi que j’ai déjà pu le rappeler: réorganisation du mouvement consumériste, car il est très important qu’il se restructure et que nous ayons quelques associations puissantes et responsables; développement de la médiation; cohérence avec les travaux en cours sur ce sujet au niveau communautaire.

Vous le voyez, monsieur Gaubert, le Gouvernement ne se dérobe pas, mais il souhaite avancer, dans ce dossier, de manière responsable.

M. Patrice Martin-Lalande. Et cohérente.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Et il attend avec intérêt les conclusions des deux groupes de travail parlementaires sur ce sujet.

M. Patrice Martin-Lalande. Excellent!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Monsieur Gaubert, vous vous inquiétez de la fin de l’action directe du voiturier contre le consommateur. Vous craignez que le transporteur refuse de livrer. Il faut savoir que désormais, en cas d’entreprise en difficulté – et c’est même l’objet de l’article 1 er de cette proposition de loi –, le consommateur n’aura rien à payer tant qu’il n’est pas livré. Si le transporteur pense que lui ne sera pas payé, il ne livrera pas. Par conséquent, ni le consommateur ni le transporteur ne seront lésés, monsieur Gaubert. Vous vous situez dans un cas qui est antérieur à l’adoption de la proposition de loi. C’est même pour cela que nous légiférons en ce moment: le cas que vous indiquez ne se posera plus.

En ce qui concerne les clauses abusives, s’agissant des contrats conclus entre des consommateurs et des professionnels de la vente à distance, comme dans tout contrat de consommation, il convient de rappeler qu’en application de la loi de modernisation de l’économie qui a été votée par cette majorité, un décret du 18 mars2009 interdit désormais douze types de clauses dites noires, eu égard à la gravité des atteintes qu’elles portent à l’équilibre du contrat. Elles sont présumées abusives. Sont également présumées abusives dix autres clauses, dites grises, à charge pour le professionnel de rapporter la preuve de leur caractère non abusif. Rappelons que, dans ce domaine, depuis 1978, seules trois types de clauses étaient interdites. Vous le voyez, le Gouvernement a pris ses responsabilités.

J’en viens maintenant à des problèmes importants qui ont été abordés sur tous les bancs de votre assemblée.

La majorité des orateurs ont relevé que cette proposition de loi avait le mérite de permettre un équilibre entre la protection des consommateurs et la compétitivité des entreprises. Car il y a des impératifs de compétitivité. M. Gérard a observé que les principales enseignes historiques de la vente à distance sont situées à quelques kilomètres de la frontière belge. Monsieur Gaubert, il faut faire attention à cela, et aux délocalisations que pourrait éventuellement entraîner une législation beaucoup trop restrictive. Nous devons donc veiller à cet équilibre, pour que les dispositions adoptées ne se traduisent pas par des pertes d’emplois résultant d’une réglementation trop restrictive, alors que de l’autre côté de la frontière, les entreprises n’auraient pas les mêmes contraintes.

Monsieur Chassaigne, je vous ferai la même réponse sur la procédure. Celle que propose le texte est souple, mais elle a un grand avantage. C’est qu’elle laisse la place aux droits de la défense. Il ne faut jamais oublier, monsieur Chassaigne, les droits de la défense. C’est très important. C’est pour cela que cette proposition de loi a prévu la légitime contradiction qui s’attache à tout régime qui croit dans les droits de la défense. C’est légitime, et c’est même nécessaire.

J’en viens aux missions de la DGCCRF et aux moyens qui lui sont alloués en regard. MM. Tardy et Benoit ainsi que Mme Besse ont évoqué l’éventuel manque de moyens matériels et humains de la direction pour mettre en œuvre cette nouvelle mission. Je veux vous éclairer et vous tranquilliser sur ce point. La création de nouvelles structures régionales et départementales illustre précisément la volonté des pouvoirs publics de disposer d’un relais territorial adapté pour mettre en œuvre avec efficacité la politique de l’État.

Au niveau régional, les services de la DGCCRF sont identifiés dans un pôle dédié « concurrence, consommation, répression des fraudes et métrologie » au sein des DIRECCTE. La DIRECCTE est notamment chargée, outre ses fonctions de pilotage des actions départementales, des actions de contrôle du bon fonctionnement des marchés et des relations commerciales entre entreprises, notamment grâce à sa brigade interrégionale d’enquêtes de concurrence.

Au niveau départemental, les unités départementales de la concurrence, les UDCCRF, sont intégrées dans des directions départementales interministérielles, les DDI. Elles sont chargées de mettre en œuvre les politiques relatives à la protection et à la sécurité des consommateurs, et constituent un bon échelon de proximité des actions de l’État dans ce domaine.

La complémentarité des trois missions de la DGCCRF – régulation des marchés, protection économique et sécurité des consommateurs, qui convergent vers le même objectif de bon fonctionnement des marchés au bénéfice du consommateur – est préservée grâce au lien qui existe entre le niveau régional et le niveau départemental d’intervention. La nouvelle organisation territoriale est une opportunité pour tous les services de l’État, notamment ceux de la DGCCRF, de s’organiser plus efficacement, de mieux cibler leurs interventions, de mutualiser leurs moyens et d’être ainsi plus efficaces dans le service rendu à nos concitoyens.

J’insiste sur le fait que la DGCCRF a accompli avec une rare célérité cette année nombre de missions qui lui ont été confiées par la puissance publique. Vous avez parlé d’un fiasco dans la restauration.

Mme Marylise Lebranchu. Un fiasco sur la baisse de la TVA.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cela n’est pas exact. Les 16000 contrôles de la DGCCRF ont montré que, si la baisse de la TVA n’avait pas été répercutée à 100 % sur un certain nombre de prix, la moitié du chemin avait quand même été accomplie. Ce n’est pas pour m’en glorifier, mais pour indiquer que la DGCCRF a été parfaitement en mesure de remplir cette mission spécifique supplémentaire, car les moyens étaient là.

Plusieurs d’entre vous ont abordé le problème du paiement de la commande à la livraison, qui a fait l’objet d’une suggestion de M. Tardy et de M. Benoit. La vente à distance implique un délai de livraison plus ou moins long qui constitue une période de risque pour le consommateur. Mais la proposition de loi vise à limiter au maximum ce risque. L’autorité administrative aura le pouvoir – c’est même l’objet de l’article 1 er – d’interdire aux entreprises qui sont dans l’incapacité manifeste de respecter leurs obligations de réaliser toute prise de paiement avant la livraison du bien ou l’exécution du service. C’est, je crois, une disposition très importante, mais qui n’a vocation qu’à traiter des cas spécifiques. Il ne faut pas en faire une règle générale. Autoriser l’encaissement au moment de la livraison est une idée certes séduisante, mais elle est périlleuse. J’ai particulièrement apprécié l’intervention de Laure de La Raudière, et son exemple clair et pédagogique sur les tabourets. (« Bravo! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Monsieur Tardy, ne vous asseyez pas sur les tabourets de Mme de La Raudière! (Sourires.)

M. François Brottes. Si on nous y invite, on le fera! (Sourires.)

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je suis donc défavorable à l’idée d’élargir cette disposition.

S’agissant de la responsabilité du transporteur, qui fait l’objet de l’article 3 évoqué par M. Benoit, la loi prévoit que le transporteur ne pourra plus se retourner contre le consommateur lorsque le vendeur ne lui aura pas payé la livraison. C’est une disposition de bon sens et de justice envers les consommateurs…

M. Lionel Tardy et M. Thierry Benoit. Tout à fait!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. …qui ne peuvent pas être doublement lésés, ayant payé un produit dont ils ne profitent pas et devant payer le coût du transport qui n’a jamais eu lieu.

Quant aux conditions de vente prévues à l’article 4, madame Besse, vous avez évoqué un point important. Je partage votre avis et celui de la commission, qui a adopté le 16 décembre dernier l’obligation de rendre facilement accessibles les conditions générales de vente sur la page d’accueil d’un site internet de vente à distance. En revanche, je ne suis pas favorable à l’obligation d’accepter de façon expresse les conditions générales de vente, ce qui reviendrait à remettre en cause l’existence même de la vente à distance par téléphone et par courrier.

M. Patrice Martin-Lalande. D’où les amendements à l’article 7.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je suis heureux que la commission ait adopté, au titre de l’article 88, un amendement présenté par M. Gérard qui rectifie ce point.

Compte tenu de l’éclairage que je viens de vous donner, je pense que nous pouvons maintenant passer à la discussion des amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Discussion des articles

M. le président. J’appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

Avant l'article 1er

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 11.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il s’agit, comme nous l’avons indiqué à maintes reprises dans la discussion générale, de préciser les conditions dans lesquelles le paiement de la commande sera encaissé en cas de situations tendues et présentant le risque pour le consommateur de ne pas être livré.

Profitant de la parole, je voudrais, monsieur le ministre, vous reprendre sur un point en prenant comme professeur quelqu’un que vous connaissez bien. Mme Lagarde nous a expliqué l’autre jour que la localisation de l’entreprise n’avait aucune importance eu égard au droit puisque, en matière de consommation, c’est le droit du pays du consommateur qui s’applique. Quand bien même les entreprises changeraient de côté de la frontière, le droit français s’appliquerait.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je parlais des emplois.

M. Thierry Benoit. Oui, en matière d’emplois, c’est majeur!

M. Jean Gaubert. Vous nous opposez le chantage à la traversée de la frontière, alors qu’elles n’ont aucun intérêt à le faire…

Mme Laure de La Raudière. Si, pour la trésorerie!

M. Jean Gaubert. …puisque le droit applicable reste le même. Je vous renvoie à Mme Lagarde, qui saura certainement vous l’expliquer beaucoup mieux que moi.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a donné un avis défavorable. L’amendement vise à instaurer un droit de paiement à la livraison: cela handicaperait fortement la vente à distance, qui repose précisément sur le paiement à la commande, en fonction des liquidités dont elle a besoin.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Avis défavorable. Le dispositif prévu à l’article 1 er a justement pour effet d’interdire la prise de paiement avant la livraison intégrale du bien. Comme il n’est pas sans conséquence sur la trésorerie des entreprises, il convient de l’encadrer et non de le systématiser.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. C’est mal parti, monsieur le ministre! Nous avions l’intention d’aller relativement vite, pensant que vous comprendriez. Si vous lisez bien l’amendement, vous constaterez qu’il vise les situations que nous avons évoquées tout à l’heure, et que cette obligation tombe si l’entreprise peut exhiber une garantie financière sur les paiements. Cela existe dans toutes les transactions interentreprises: l’expression de « paiement au cul du camion » s’applique dès qu’une entreprise est réputée en difficulté. Notre proposition est parfaitement équilibrée, et si l’entreprise fournisseur peut justifier d’une garantie bancaire de bonne fin de la transaction, elle ne sera pas tenue par une telle obligation.

Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, ne prenez pas les amendements de façon tronquée ou nous nous verrons dans l’obligation de vous les expliquer plusieurs fois, ce qui risque de prendre un peu plus de temps. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

(L'amendement n° 11 n'est pas adopté.)

Article premier

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 27.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Cet amendement tend à revenir au texte initial de la proposition de loi qui concerne uniquement la vente à distance. La commission s’est prononcée favorablement.

(L'amendement n° 27, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 8.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. La rédaction retenue pour l’alinéa 3 de l’article 1 er dispode, s’il apparaît qu’un professionnel est « dans l’incapacité manifeste de respecter ses obligations, générant ou susceptible de générer un préjudice financier pour un grand nombre de consommateurs », que l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation peut interdire au professionnel toute prise de paiement. Cette rédaction nous laisse quelque peu circonspects. Elle est imprécise, peu normative et porte en son sein une insécurité juridique tant pour les professionnels que pour les consommateurs.

Si les informations recueillies par l’autorité administrative attestent d’un manquement du professionnel à ses obligations contractuelles ou peuvent légitimement amener à penser que celui-ci fait courir le risque d’un préjudice au consommateur, il n’en reste pas moins que la sanction administrative d’interdiction de prise de paiement, prise avant la constatation du préjudice pour le consommateur, pourrait avoir un impact néfaste pour ledit professionnel. L’incapacité du professionnel peut en effet revêtir un caractère temporaire, susceptible d’être corrigé avant que ne survienne effectivement le préjudice. Nous proposons donc que la décision d’interdiction de prise de paiement se fonde sur un préjudice constaté.

La rédaction de l’article met, en quelque sorte, en œuvre le principe de précaution. Je ne suis pas certain que ce principe de précaution, contenu dans le préambule de la Constitution, ait été prévu pour ce type de problèmes…

Mais c’est surtout la formule « grand nombre de consommateurs » qui risque de poser nombre de problèmes. À partir de quel seuil et selon quels critères quantitatifs l’autorité administrative pourra-t-elle estimer que le préjudice subi concerne un grand nombre de consommateurs? Que se passera-t-il pour les consommateurs victimes d’un préjudice du fait du professionnel si l’autorité estime qu’ils ne sont pas en nombre suffisant? Cette formulation particulièrement floue n’est pas en adéquation avec l’objectif affiché de votre proposition et illustre à merveille les contradictions que j’ai soulevées lors de la discussion générale.

Dans un esprit extrêmement constructif, nous proposons une nouvelle rédaction d’une partie de cet alinéa, purgée de ces approximations.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Cet amendement s’oppose totalement à l’esprit de la présente proposition de loi. Dans la nouvelle rédaction que vous proposez, la suppression du mot « manifeste » va à l’encontre de l’intérêt des entreprises puisque l’intervention des pouvoirs publics ne doit être nécessaire que si l’incapacité du fournisseur est sérieuse et durable. Elle n’est pas justifiée si cette dernière n’est que passagère. D’où l’importance du mot « manifeste ».

De même, la suppression des mots « susceptible de générer » va à l’encontre cette fois de l’intérêt du consommateur, car il est nécessaire d’agir le plus en amont possible pour prévenir tout problème.

Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Cet amendement est intéressant et le Gouvernement partage le souci de clarifier la portée du dispositif. Il approuve la proposition de suppression de la référence à un « grand nombre » de consommateurs, dont M. Chassaigne a parfaitement illustré le caractère trop confus. Par contre, je remarque que la nouvelle rédaction proposée limite considérablement, comme l’a indiqué excel lemment le rapporteur, la dimension préventive de l’injonction administrative en ne la fondant que sur la constatation de préjudice financier avéré et non plus sur le risque de préjudice.

C’est pourquoi je vous propose de retirer cet amendement au profit de l’amendement n° 28 déposé par le rapporteur, qui substitue les mots « le consommateur » aux mots « un grand nombre de consommateurs ». À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je retire l’amendement.

Je constate toutefois que M. le rapporteur est un peu inconséquent dans ses explications. Il a, en effet, remis en cause les deux dimensions de mon amendement, alors que lui-même en reprend une dans le sien…

(L'amendement n° 8 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 28.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . M. le secrétaire d’État s’est déjà exprimé sur l’amendement n° 28.

Il s’agit, monsieur Chassaigne, d’un amendement rédactionnel qui va dans votre sens. On peut en effet s’interroger sur ce que signifient les mots: « un grand nombre de consommateurs ». Il m’a donc semblé préférable de nous en tenir au terme générique du « consommateur », tel qu’il est utilisé à maintes reprises dans le code de la consommation.

(L'amendement n° 28, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 12.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. L’amendement vise à simplifier le texte et à laisser un peu plus de liberté à l’autorité en charge du dossier.

Nous proposons de supprimer la fin de la dernière phrase de l’alinéa 3 après le mot: « reconduite » et de ne pas préciser qu’il s’agit d’une reconduction au mois le mois, car cela peut être moins, ou plus. Il faut laisser à l’autorité la faculté d’en juger, car l’article est déjà précédemment assez cadré.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission est défavorable à cet amendement. Cette suppression instaurerait véritablement une insécurité juridique. Le texte perd de son sens si l’on écrit: « cette mesure peut être reconduite », sans préciser dans quelles conditions elle l’est.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. L’amendement n° 12 semble apporter une certaine simplicité, mais son adoption poserait de graves problèmes.

La mesure d’interdiction d’un mois de prise de paiement doit être ajustée au plus près de la situation de l’entreprise. Il ne s’agit pas de condamner l’entreprise, mais simplement de faire en sorte que les consommateurs soient avertis. Il faut éviter de pénaliser inutilement l’entreprise et lui permettre de reprendre une activité normale dans les meilleurs délais.

La limitation à un mois est pleinement justifiée, d’autant qu’elle n’interdit pas qu’il y ait, en tant que de besoin, répétition de ces périodes; mais il ne faut pas les instituer dans la loi.

Par ailleurs votre amendement, en introduisant une automaticité, n’obligerait plus à tenir une procédure contradictoire préalable à la reconduite de la mesure d’interdiction de prise de paiement – alors que, j’y insiste, cette procédure est garante du respect des droits de la défense.

Puisqu’il n’est pas interdit de reprendre une autre période de suspension, et que donc il n’y a pas de contradiction, je souhaite, monsieur Gaubert, que vous retiriez votre amendement, qui me semble un peu trop contraignant.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je le retire.

(L'amendement n° 12 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 13.

La parole est à Mme Annick Le Loch.

Mme Annick Le Loch. L’amendement vise à insérer, après l’alinéa 3, l’alinéa suivant: « En cas de mise en œuvre de cette mesure d’interdiction temporaire de prise de commandes ou de prise de paiement avant la livraison intégrale du produit ou l’exécution effective du service, le professionnel devra en informer, sans délai et sous contrôle de l’autorité compétente, l’ensemble des clients ayant une commande en cours ».

Au cours de la discussion générale, on a évoqué à plusieurs reprises la nécessité de l’information du consommateur. C’est le but de notre amendement. Il me semble indispensable que les clients soient informés de la suspension des commandes et des raisons qui y ont conduit.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a émis un avis défavorable. Cet amendement vise à permettre à chaque client ayant une commande en cours d’être prévenu d’une mesure d’interdiction de prise de paiement qui viendrait frapper le fournisseur. Mais nous avons abandonné, je vous le rappelle, toute référence aux prises de commandes lors de l’examen du texte en commission. Cet amendement n’a donc aucune portée pratique. Toute mesure d’avertissement n’est qu’un coup d’épée dans l’eau, puisque le risque a d’ores et déjà été pris.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Avis défavorable.

(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Monsieur le rapporteur, je voudrais m’inscrire en faux contre votre précédent propos.

Vous savez bien qu’il existe toujours une période de latence et qu’il peut y avoir des prises de commandes avant que l’avertissement n’ait été fait, qui ne pourront donc pas être honorées. C’est ce à quoi nous pensons. Cela ne joue pas sur de grosses quantités, mais cela existe. Les consommateurs lésés n’aiment pas beaucoup ces situations.

Je considère donc que l’amendement 13 garde toute sa valeur. Nous voudrions également – et c’est l’objet de l’amendement 14‚– que dans ce cas le consommateur soit remboursé dans un bref délai, soit dix jours.

Si vraiment vous estimez que ce type de situations reste très marginal, ou même n’existe pas, vous pouvez alors voter cet amendement, car il n’aura pas de conséquences... Mais si, comme nous le croyons, cette situation vient à se produire, car il y a toujours une période de latence que l’on ne peut éviter, il faut au moins prévoir les conditions dans lesquelles le consommateur lésé sera remboursé. Or, en prévoyant une amende administrative, vous admettez vous-mêmes que ce cas pourra exister.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Je comprends ce que souhaite M. Gaubert. Mais cet amendement obligerait le fournisseur défaillant à rembourser le consommateur lésé dans un délai de dix jours. S’il était adopté, il romprait un peu l’équilibre visé par ce texte.

Un amendement de M Tardy, que nous examinerons dans un instant, va dans le sens que vous souhaitez en raccourcissant le délai de remboursement de trente à quinze jours.

La commission est donc défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

L’objectif de l’article 1 er est, je le rappelle, de prévenir des situations de défaillance manifeste d’entreprises de vente à distance et donc de faire en sorte que le moins possible de consommateurs soient victimes de telles situations.

Lorsqu’on lit rapidement votre amendement, on pourrait comprendre que, dès lors que le vendeur prend un paiement malgré l’injonction, il doit rembourser le client, même si celui-ci reçoit le bien commandé.

M. Jean Gaubert. Non!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Il me semble que cela n’aurait pas de sens.

En revanche, si votre amendement porte sur les clients qui ne reçoivent pas leurs biens, il ne nous paraît pas nécessaire. En effet, les agents de la DGCCRF ont, d’ores et déjà, le pouvoir d’exiger du professionnel qui n’est pas en mesure d’honorer ses commandes la restitution des sommes versées au consommateur. Cette mesure résulte de la loi Chatel du 3 janvier 2008.

Le Gouvernement, pour ces deux raisons, est défavorable à l’amendement.

(L'amendement n° 14 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 15.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il est défendu

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a émis un avis défavorable.

Cette rédaction fait reposer l’initiative de l’avertissement sur l’entreprise défaillante, et non sur l’autorité administrative compétente.

La commission pense qu’il vaut mieux laisser l’administration compétente prendre l’initiative, au terme d’une procédure contradictoire avec le fournisseur, pour imposer à celui-ci d’afficher un avertissement à l’intention du consommateur.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Avis défavorable.

(L'amendement n° 15 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 7.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. L’amendement n° 7 est du même ordre que celui qui vient d’être rejeté.

Je perçois des contradictions dans les réponses apportées par le rapporteur et le secrétaire d’État. Il a été dit par plusieurs intervenants de la majorité, notamment et fort bien par Mme Laure de La Raudière, que cette proposition de loi visait à bâtir des murs contre le développement d’un certain type de délinquance qui peut provenir de cette forme de commerce.

En commission, trois articles – 4, 5 et 8‚– ont été introduits pour faire de l’information du consommateur l’un des principes cardinaux en matière de vente à distance.

Et ici, dans le texte, la sanction, qui consiste en un affichage, devient une simple possibilité. Il y a là une contradiction entre la volonté exprimée et la réalité. Ce qui pose un problème est qu’on laisse le choix à l’administration. Je ne mets pas en cause sa compétence dans ce domaine. Mais la prise de décision peut créer des difficultés pour les agents qui en sont chargés.

Il ne faudrait pas – je le dis sans faire de provocation‚– que, finalement, ce type de possibilité soit en quelque sorte une toile d’araignée qui permettrait de retenir les petites mouches et de laisser passer les grosses…

M. Thierry Benoit. Les moucherons!

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a émis un avis défavorable.

M. André Chassaigne. Elle a eu tort!

Mme Laure de La Raudière. Non! Elle a eu raison!

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur. Elle considère qu’il faut laisser à l’autorité administrative compétente une certaine latitude pour agir.

Mme Laure de La Raudière. Exactement!

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. La question abordée par M. Chassaigne est très importante.

Il existe une grande différence entre nous. Nous n’avons pas une vision punitive de l’entreprise. Nous souhaitons protéger le consommateur sans mettre à bas l’entreprise par des communications intempestives qui risqueraient de nuire à sa survie. La différence entre nous ne porte pas sur la nécessité de la protection du consommateur, mais sur la vision de l’entreprise.

Je ne veux pas que l’entreprise meure du fait d’une communication intempestive qui accroîtrait ses difficultés. Les entreprises peuvent avoir des difficultés, sans être gérées par de mauvais patrons. Il faut prendre en compte la situation économique.

Mme Laure de La Raudière. Tout à fait!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Et tout l’intérêt de cette proposition de loi est de maintenir l’équilibre entre la protection du consommateur et la compétitivité de notre économie.

Mme Laure de La Raudière. Exactement!

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. C’est bien pourquoi je m’étonne, monsieur le secrétaire d’État, que vous ayez refusé l’amendement n° 11, qui prévoyait la possibilité d’une garantie bancaire pour l’entreprise, ce qui réglait le problème.

Les garanties bancaires existent partout, dans les marchés publics par exemple – ce qui évite la caution. Je ne comprends donc pas pourquoi vous n’êtes pas entré dans cette logique de la garantie bancaire, qui nous semble être la bonne formule permettant de régler une grande partie des situations.

(L'amendement n° 7 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 16.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission est défavorable à l’amendement. S’il est défendable dans son principe, il est quasiment impossible à mettre en œuvre sur le plan pratique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Avis défavorable.

(L'amendement n° 16 n'est pas adopté.) (L'article 1 er , amendé, est adopté.)

Article 2

(L'article 2 est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 2.

Après l'article 2

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 23 rectifié.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il convient de régler le problème des prestations de services. Il nous semble que, dans ce cas, le délai de rétractation n’est pas suffisant, et pratiquement impossible à fixer.

Nous pensons qu’après la première exécution de la prestation de services, la rétractation doit être possible si l’on considère que cette prestation n’a rien à voir avec ce qui avait été vendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a émis un avis défavorable à cet amendement. S’il était adopté, que se passerait-il pour des prestations exécutées en une seule fois?

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

D’abord, l’amendement ne prend en compte que des services à exécutions successives, ceux dont la fourniture se prolonge dans le temps, généralement à échéance régulière, en ignorant les cas dans lesquels le consommateur peut se rétracter dès lors qu’il s’agit d’un service fourni en une seule fois.

Un autre point me semble très important.

Vouloir modifier le point de départ du délai de rétractation pour les prestations de service à exécutions successives est contraire à l’article L.121-20-2, qui prévoit une exception au droit de rétractation pour les prestations de service dont l’exécution instantanée ou successive intervient ou commence immédiatement, à la demande expresse du consommateur. Il paraît difficile de se rétracter d’un service dont une part a déjà été consommée: c’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à votre amendement.

(L'amendement n° 23 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 21 rectifié.

La parole est à Mme Annick Le Loch.

Mme Annick Le Loch. Il s’agit, à la première phrase de l’article L.121-20-1 du code de la consommation, de remplacer le mot « trente » par le mot « sept ».

Le délai de remboursement d’un consommateur qui exerce son droit de rétractation est aujourd’hui extrêmement long. Cela n’est pas sans créer de difficultés pour le consommateur.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Avis défavorable de la commission. Il importe que le fournisseur dispose d’un temps suffisamment long pour vérifier que le produit qui lui a été retourné est bien conforme à ce qu’il a expédié.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Il s’agit de la réduction du délai de remboursement par le professionnel des sommes versées par le consommateur lorsque celui-ci a exercé son droit de rétractation. L’amendement n° 5 rectifié, qui prévoit de ramener le délai de remboursement de trente jours à quinze jours au lieu de sept, me paraît plus raisonnable, pour le remboursement au consommateur des sommes qu’il a versées lorsque le produit est indisponible. Dans ce cas, la réduction du délai est justifiée en raison de l’inexécution par le vendeur de ses obligations contractuelles.

C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement au bénéfice de l’amendement n° 5 rectifié.

M. Jean Gaubert. Nous le retirons.

(L'amendement n° 21 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 20 rectifié.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il ne vous aura pas échappé, monsieur le secrétaire d’État, que nous faisons preuve de bonne volonté.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. En effet.

M. Jean Gaubert. Aussi, aimerions-nous qu’il y ait une certaine réciprocité!

Notre amendement vise à préciser les conditions dans lesquelles les sommes qui sont dues au consommateur lui sont remboursées, ces sommes étant en quelque sorte prêtées à l’entreprise. M. le rapporteur nous dira sans doute qu’il présentera un amendement dans ce sens, mais son amendement n’est pas dissuasif. En commission, nous avions proposé un taux de majoration de 25 % pour ensuite revenir sur cette proposition, la bonne formule consistant à l’asseoir sur les taux de crédit qui sont pratiqués dans l’entreprise. Il n’y a aucune raison que ces taux s’appliquent dans un sens et pas dans l’autre. Si vous estimez que ce taux de crédit est trop élevé, admettez que le taux de crédit proposé par l’entreprise l’est également. Le parallélisme des formes doit s’imposer, sinon ce n’est pas sérieux.

On ne peut accepter que l’entreprise puisse payer, sur les sommes qu’elle a indûment encaissées, des taux d’intérêt plus faibles que ceux qu’elle fait payer sur les sommes qu’elle prête.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Le problème soulevé par notre collègue Jean Gaubert est très important. Néanmoins, la commission a émis un avis défavorable car son amendement est inapplicable en l’état. Il peut arriver, en effet, qu’un vendeur ne propose pas de crédit à la consommation. Par ailleurs, qu’entend-on par taux maximum de crédit à la consommation?

Mon amendement n° 26 va dans le sens que vous souhaitez, même si le taux ne correspond pas à ce que vous proposez. En outre, je me permets de vous rappeler qu’un projet de loi relatif au crédit à la consommation va nous être présenté.

M. Jean Gaubert. Rien à voir!

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Je vous suggère donc de retirer votre amendement.

M. Jean Gaubert. Non!

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. L’amendement est intéressant. Il pose le principe d’une majoration des sommes dues en cas de remboursement au-delà du délai légal. Une telle majoration est déjà prévue, mais sa portée est limitée car il est prévu que les sommes dues sont productives d’intérêt au taux légal. Le Gouvernement n’est pas hostile au principe d’une pénalité plus importante, dans le cas visé par l’amendement d’une défaillance du vendeur, en vue de garantir au consommateur le remboursement des sommes qui lui sont dues.

En revanche, cette pénalité ne peut pas, comme l’a indiqué le rapporteur, être calée sur le taux maximum du crédit proposé par le vendeur, car celui-ci ne propose pas nécessairement de solutions de crédits.

M. Jean Gaubert. Mais si!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Il existe en outre un risque avéré de confusion entre les différents taux de crédit proposés, que ce soit le crédit affecté ou le crédit renouvelable.

C’est pourquoi je préfère l’amendement n° 26 du rapporteur qui propose, en cas de remboursement hors délais des sommes dues au consommateur, de calculer à titre de pénalités les intérêts produits par ces sommes au double du taux légal en vigueur. Cette solution me semble plus adaptée que la vôtre, monsieur Gaubert.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Il est dommage que nous ne puissions prolonger le débat de ce soir en enchaînant sur celui qui sera consacré au crédit à la consommation, tant vos positions sur les taux d’intérêt sont raisonnables! (Sourires.) En revanche, je pressens que, quand il s’agira des taux que devront payer les consommateurs, ils resteront très importants. Or ce n’est pas acceptable. Vous défendez l’entreprise qui, dans ce cas, est en faute.

Mme Laure de La Raudière. L’entreprise n’est pas en faute.

M. Jean Gaubert. Nous, nous défendons aussi le consommateur et il n’est pas normal qu’il soit ainsi lésé. Il suffit d’aller sur internet pour s’apercevoir qu’il y a toujours des propositions de crédit. Je n’ai encore jamais vu de vendeur qui ne proposait aucune solution de crédit.

Mme Laure de La Raudière. Si, les PME!

M. Jean Gaubert. Je propose donc de prendre le taux affiché sur les propositions de crédit au moment où l’opération s’est effectuée. C’est simple, mais cela nécessite de la volonté politique, et à cet égard il nous apparaît que votre proposition de loi ne va pas bien loin. Le rapporteur a fait remarquer que vous aviez parcouru un bout du chemin, mais force est de constater que nous en sommes loin: à vrai dire, nous ne sommes pas encore sortis de l’agglomération!

(L'amendement n° 20 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, n os  22 rectifié et 5 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. Jean Gaubert. L’amendement n° 22 rectifié est retiré.

(L'amendement n° 22 rectifié est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy pour présenter l’amendement n° 5 rectifié.

M. Lionel Tardy. Mon amendement devrait faire consensus, monsieur le président.

Un professionnel dispose de trente jours pour rembourser un client qui a annulé sa commande pour non-respect des délais de livraison. Ce délai est anormalement long pour un dossier qui peut facilement être traité par le professionnel, puisqu’il n’y a pas de retour de marchandise à effectuer. De plus, c’est lui qui est en faute. Je propose donc de ramener le délai de trente à quinze jours pour permettre aux clients de récupérer plus vite leur argent, afin qu’ils puissent s’approvisionner auprès d’un autre fournisseur. Ce n’est pas anodin lorsque des sommes importantes sont en jeu. Il s’agit de ne pas bloquer le consommateur et de ne pas l’empêcher de passer commande ailleurs.

M. Patrice Martin-Lalande. Il a raison!

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. L’amendement est intéressant, mais je m’interroge sur le délai de quinze jours, qui peut paraître court et qui fera peser des contraintes opérationnelles sur les entreprises concernées. Cela étant, compte tenu de l’intérêt de l’amendement et de l’avis favorable de la commission, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

Mme Laure de La Raudière. Merci.

(L'amendement n° 5 rectifié est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 24.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. L’amendement est défendu.

(L'amendement n° 24, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 26 de la commission a déjà été défendu.

(L'amendement n° 26, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 19 rectifié.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je retire l’amendement.

(L'amendement n° 19 rectifié est retiré.)

Article 3

(L'article 3 est adopté.)

Article 4

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 2.

La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Dans son deuxième alinéa, l’article 4 prévoit que les conditions contractuelles applicables à la fourniture d’un bien ou d’une prestation de services à distance doivent être facilement accessibles sur la page d’accueil du site internet ou sur tout support de communication de l’offre, et qu’elles doivent faire l’objet d’une acceptation expresse par le consommateur avant validation de la commande.

Cet article 4 a visiblement été conçu pour les achats sur internet: dans ce type de vente, la confirmation expresse de la lecture des conditions générales de vente, avant toute validation de la commande effectuée, est possible et facile car elle est comprise dans le processus même de l’offre en ligne.

Toutefois, l’article 4 est rédigé de manière beaucoup trop large, en ce qu’il vise l’ensemble des ventes effectuées à distance, donc en particulier les ventes par téléphone ou même par bons de commande. Dans ce cas, l’acceptation expresse des conditions générales de vente devient extrêmement compliquée, et surtout si elle doit être prouvée avant validation de la vente. Une case non cochée en bas d’un formulaire de vente risque d’empêcher sa validation, obligeant à un second échange de courrier, préjudiciable à la fois au service et au coût de traitement des commandes. De même, une étape audiotel mal comprise fera perdre patience au client.

Une telle disposition est très préjudiciable pour les secteurs qui recourent à la vente par téléphone, laquelle constitue aujourd’hui une part considérable des ventes à distance; c’est en effet un mode de commercialisation dont tout l’intérêt tient à sa simplicité d’usage pour les consommateurs.

L’amendement que je vous propose supprime donc cette disposition. Par ailleurs, en précisant que les conditions générales de vente devraient être portées « sur tout support » de communication de l’offre, la rédaction de l’article est beaucoup trop large, et rend inopérant ou très onéreux tout support commercial du type brochure, dépliant, etc.

Cette disposition crée en outre une véritable distorsion de concurrence entre les boutiques en ligne, qui pourront obtenir la validation des conditions générales de vente par voie électronique, et les opérateurs traditionnels de vente par correspondance ou par téléphone, notamment ceux pour qui l’enregistrement de la conversation sert de preuve d’achat, et qui ne pourront plus assurer ce service.

C’est la raison pour laquelle le présent amendement a pour objet d’assouplir le formalisme en prévoyant que les conditions de vente doivent être facilement accessibles « à partir » des documents et sites de présentation commerciale de ce service ou bien. La différence avec l’amendement n° 9, que j’ai cosigné à titre d’amendement de repli, est que cet amendement n° 2 règle les problèmes de l’acceptation préalable et de l’inscription sur tout support des clauses générales de vente.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a émis un avis défavorable en considérant que cet amendement soulevait des difficultés pratiques de mise en œuvre, car il limite les possibilités de diffuser les informations à partir des documents et sites de présentation commerciale. L’amendement n° 9 de notre collègue Bernard Gérard satisfait quasiment la demande qui est faite ici…

M. Patrice Martin-Lalande. Non!

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur … tout en laissant davantage de marge de manœuvre aux professionnels pour choisir la forme de diffusion qui leur semble la plus facile à mettre en œuvre.

Je demanderai donc à notre collègue de bien vouloir retirer son amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement de M. Gérard car il remplit les mêmes objectifs que ceux de Patrice Martin-Lalande. L’essentiel dans l’article 4 réside dans l’obligation faite aux professionnels de permettre un accès facile à leurs conditions contractuelles, afin que les consommateurs puissent s’engager en toute connaissance de cause.

La validation de ces conditions juste avant la commande, aisée dans le cas des ventes en ligne, se révèle plus difficile lors des autres formes de vente à distance, sur catalogue pré-imprimé ou par téléachat. Jusque-là, nous sommes d’accord.

Toutefois, la rédaction proposée par M. Gérard me semble plus pertinente. Voilà pourquoi je suis favorable à l’amendement n° 9, plutôt qu’aux deux amendements de M. Martin-Lalande et qu’à l’amendement n° 17 de M. Gaubert.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Les arguments développés par notre collègue Martin-Lalande me conduisent à interroger le rapporteur.

Ce qui compte, c’est que l’acheteur sache ce qu’il achète. Or parler de conditions générales de vente, en termes génériques, ne revient pas à mentionner un produit ou un service personnalisé.

J’ai bien compris que la confirmation de la commande pouvait poser un problème pour certains produits ou services. Cela étant, s’agit-il d’obliger le vendeur à détailler la nature de l’offre personnalisée qu’il adresse au futur acheteur, par SMS ou par internet? C’est ainsi en effet que l’on procède aujourd’hui; même une vente par téléphone inclut une confirmation, non de l’ensemble des conditions générales de vente, mais, au moins, de l’aspect personnalisé du produit vendu. Ainsi, l’acheteur qui constate une différence entre ce qui lui a été précisé par téléphone, par SMS ou par internet et ce qui lui est fourni peut renoncer au produit.

Les conditions contractuelles mentionnées au début de l’alinéa 2 de l’article 4 sont-elles des conditions générales, ou portent-elles sur la fourniture à l’acheteur du bien personnalisé?

M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Comme l’amendement n° 9, mon amendement propose de supprimer de l’article 4 l’obligation de l’acceptation du consommateur avant validation de la commande.

En revanche, l’amendement n° 9 conserve le passage qui précise que les conditions générales « doivent être facilement accessibles sur la page d’accueil du site internet ou sur tout support de communication de l’offre ».

M. François Brottes. Ce n’est pas personnalisé!

M. Patrice Martin-Lalande. En d’autres termes, les vendeurs qui n’ont pas de site internet, et qui présentent leurs produits sur un catalogue ou dans une brochure, sont tenus de faire figurer ces conditions sur ce support.

Selon la rédaction que je propose, c’est « à partir » de ces documents et des sites de présentation commerciale que les conditions générales de vente doivent être accessibles. Ce n’est pas la même chose.

Autrement dit, l’amendement n° 9 – que vous soutenez, monsieur le secrétaire d’État‚– maintient l’obligation, pour les vendeurs qui n’utilisent pas internet, de faire figurer sur tout support les informations relatives aux conditions générales de vente. Cela pose un problème, car il ne sera pas possible de les faire apparaître sur les catalogues ou sur les brochures. Les deux amendements ne se valent donc pas.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Voilà pourquoi je préfère l’amendement n° 9!

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Martin-Lalande?

M. Patrice Martin-Lalande. Oui; mais j’aimerais que le secrétaire d’État me fournisse des explications.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Bien sûr, monsieur Martin-Lalande: je souhaite toujours pouvoir vous répondre quand vous m’interrogez, dans tous les domaines! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrice Martin-Lalande. Merci, monsieur le secrétaire d’État. Peut-être pourrez-vous me répondre favorablement! (Même mouvement.)

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Prenons l’article 4 nouveau. Vous avez raison de dire que l’amendement n° 9 de M. Gérard…

M. Patrice Martin-Lalande. Que j’ai cosigné, d’ailleurs!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. … et le vôtre ont en commun de supprimer l’acceptation expresse par le consommateur avant validation de la commande.

M. Patrice Martin-Lalande. Oui, mais ils diffèrent sur le reste.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. En effet. Cependant, l’article 4 nouveau précise bien « sur la page d’accueil du site internet ou sur tout support de communication de l’offre », c’est-à-dire « sur un support », « sur n’importe quel support », et non « sur tous supports », ce qui voudrait dire « sur tous les supports ». Il ne s’agit donc pas de tous les supports de communication.

M. Patrice Martin-Lalande. Je ne suis pas d’accord.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Dans ce cas, vous n’êtes pas d’accord avec la grammaire française!

M. Thierry Benoit. C’est une nuance incompréhensible!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. C’est très important. Voilà pourquoi je préfère la rédaction de M. Gérard.

M. le président. La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

M. Patrice Martin-Lalande. Selon votre interprétation, monsieur le secrétaire d’État, il suffirait donc de faire figurer ces conditions sur un support pour être dispensé de le faire sur les autres.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Pour qu’elles soient facilement accessibles.

M. Patrice Martin-Lalande. Donc, si on les fait figurer sur un site internet, on n’est pas obligé de le faire sur catalogue, et si on le fait sur catalogue, on n’est pas tenu de le faire sur une brochure. Je doute que ce soit bien cette règle qui s’appliquera si nous adoptons l’amendement en l’état.

M. André Chassaigne. Tout cela est approximatif!

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Non!

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. J’ai dit à plusieurs reprises que ce texte aurait mérité d’être mieux travaillé; en voici un exemple. Je doute que tous comprennent bien ce qu’ils s’apprêtent à voter. Quel est le sens du « ou »?

Il me semble normal que tous les supports de communication qui présentent le produit soient tenus à la même rigueur. Si l’obligation d’acceptation des conditions générales de vente est difficile sur papier, ces conditions doivent du moins figurer sur le document.

Je feuilletais avant-hier soir des catalogues de voyage – cela m’arrive; les conditions générales de vente y figurent.

Mme Laure de La Raudière. Bien sûr!

M. Jean Gaubert. En viendrait-on à dispenser des vendeurs de faire de même sous prétexte qu’ils possèdent un site internet?

Mme Laure de La Raudière et M. Bernard Gérard. Mais non!

M. Jean Gaubert. C’est pourtant ce que vient d’expliquer le secrétaire d’État…

M. Patrice Martin-Lalande. En tout cas, on ne vote pas dans la clarté!

(L’amendement n° 2 n’est pas adopté.)

M. Patrice Martin-Lalande. Nous en reparlerons!

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 17.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. L’amendement 17 est défendu.

Je reviens à ma question, à laquelle j’ai bien compris que le rapporteur ne voulait pas répondre immédiatement. Si vous souhaitez supprimer l’acceptation expresse par le consommateur – ce qui est compréhensible dans certains cas‚–, vous devez alors nous dire si, dans l’amendement n° 9, les conditions générales de vente concernent bien le produit ou le service commandé, et non pas simplement des conditions générales.

Mme Laure de La Raudière. Oui, c’est bien cela.

M. François Brottes. En effet, dès lors que vous supprimez l’acceptation expresse – à la suite, semble-t-il, de pressions exercées par la profession‚–, le consommateur doit au moins savoir si ce qu’il va recevoir correspond bien à ce qu’il a commandé. L’information doit donc porter sur le bien ou le service commandé.

Monsieur le rapporteur, je souhaite vivement que vous nous apportiez cette précision, afin que les consommateurs, comme nous-mêmes, sachent à quoi s’en tenir.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur. Je souhaite répondre à M. Brottes: il s’agit bien d’informer le consommateur sur le produit acheté, le professionnel choisissant le support d’information.

M. François Brottes. D’accord.

(L'amendement n° 17, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Gérard, pour soutenir l’amendement n° 9.

M. Bernard Gérard. Je présenterai l’amendement à la demande insistante de mon collègue Martin-Lalande, qui a demandé à le cosigner, de même que M. Decool, Mme de La Raudière et MM. Kert et Morenvillier. (Sourires.)

L’obligation d’acceptation expresse nous semblant excessive, nous proposons de supprimer la fin de l’alinéa 2, après le mot « offre ». En effet, cette obligation poserait des problèmes au consommateur comme à l’entreprise de vente à distance: elle accroîtrait le coût de traitement des commandes, ce qui rejaillirait sur le client; de son côté, ce dernier devrait consentir des dépenses supplémentaires et l’acceptation retarderait la livraison du bien acheté. Il nous a donc paru raisonnable et pragmatique de revenir à une formulation plus simple.

M. Patrice Martin-Lalande. Cela ne résout le problème qu’à demi!

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Nous ajoutons un alinéa au règlement de l’Assemblée nationale: désormais, on présente des amendements après qu’ils ont été débattus! Mais pourquoi pas une nouveauté de plus? On en voit tant ces derniers temps… (Sourires.)

(L’amendement n° 9, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.) (L’article 4, amendé, est adopté.)

Article 5 et 6

(Les articles 5 et 6 sont successivement adoptés.)

Après l'article 6

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 4.

La parole est à M. Michel Lezeau.

M. Michel Lezeau. Il s’agit d’assouplir le dispositif de démarchage à domicile s’agissant des seules ventes réalisées en réunion au domicile de consommateurs expressément consentants, en permettant aux vendeurs de percevoir le paiement des articles vendus et aux acheteurs de repartir immédiatement avec leurs achats.

Cette mesure ne concerne que le type de ventes en réunion appelées « réunions Tupperware », organisées dans un cercle assez restreint de connaissances ou de voisinage. Elle vise à légaliser une pratique déjà installée de perception de chèques le jour de la commande et de délivrance de la marchandise le jour de la vente.

Les caractéristiques de ces ventes, auxquelles les clients se rendent spontanément et qui n’engagent pas des sommes très élevées, permettent d’apporter cette souplesse sans renoncer au principe du droit de rétractation, qui doit donner lieu au remboursement par le professionnel de la totalité des sommes versées par le client.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Je souhaite savoir si la mesure s’applique aussi aux « voyages casserole »… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Gérard. Le PS s’y connaît en casseroles!

M. Jean Gaubert. …, qui consistent à emmener les anciens de nos villages vers une destination peu éloignée pour y assister à une démonstration commerciale. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) C’est une véritable arnaque!

Le secrétaire d’État peut-il nous assurer que cet assouplissement, compréhensible s’agissant des réunions dites Tupperware, ne s’applique pas à d’autres ventes?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Monsieur Gaubert, je vous confirme que l’amendement n° 4 ne s’applique pas à l’exemple que vous avez cité.

(L’amendement n° 4, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Article 7

M. le président. Je suis saisi de deux amendements de suppression de l’article, n os  3 et 10.

La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour présenter l’amendement n° 3.

M. Patrice Martin-Lalande. L’article 7 prévoit de doubler toute vente effectuée par téléphone, y compris à l’initiative du consommateur, d’un échange écrit – envoi postal ou électronique d’un contrat écrit et renvoi de ce contrat revêtu de la signature de l’acheteur – avant toute validation de la commande effectuée.

Loin de protéger le consommateur, qui l’est déjà par l’ensemble des dispositions actuellement prévues dans la loi pour encadrer la vente à distance, avec notamment la capacité de rétractation, cette disposition institue un processus d’échange postal qui alourdit considérablement l’acte d’achat lors d’une vente par téléphone et le soumet à des délais importants, alors que l’un des atouts de la vente à distance est l’instantanéité de sa réalisation.

Il en va ainsi pour les réservations de places de spectacle, mais aussi pour les changements de formules d’abonnement dans le cadre des prestations liées à un bouquet de chaînes audiovisuelles – permettez-moi d’insister sur ce point, en tant que rapporteur spécial du budget des médias – ou même pour les achats aux centrales de vente par correspondance, déjà fortement attaquées par le développement d’Internet.

Cette disposition crée une véritable distorsion de concurrence entre les boutiques en ligne et les opérateurs traditionnels. Il faut savoir qu’actuellement, les ventes d’abonnements à des bouquets de chaînes de télévision se font pour plus de la moitié d’entre elles par téléphone, de même que les modifications de formules d’abonnement, lesquelles viennent souvent répondre à des besoins urgents.

C’est un service qui n’aurait plus lieu d’être dès lors qu’il entraînerait pour les opérateurs la nécessité de faire précéder la prise en compte des abonnements ou des modifications par un échange de courriers.

Le fait d’obliger les consommateurs à passer par l’étape de la signature d’un contrat avant de pouvoir bénéficier de la prestation est directement préjudiciable à la fois au consommateur, en termes de délais de réalisation de son achat, et à l’opérateur, en termes de gestion de la prestation, donc de coûts de traitement, tôt ou tard répercutés sur le prix de vente.

Enfin, la disparition des services commerciaux téléphoniques se traduira par une importante perte d’emplois dans le secteur des centres d’appels, déjà durement frappé par les délocalisations.

L’article 7 est à la fois contraire à l’intérêt des consommateurs, dont il ne renforce ni la protection ni les droits, et préjudiciable aux opérateurs de vente à distance. Le présent amendement vise donc à le supprimer.

M. le président. La parole à M. Bernard Gérard, pour soutenir l’amendement n°10.

M. Bernard Gérard. Je considère que cet amendement a été défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a donné un avis favorable à ces deux amendements de suppression.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Favorable également.

(Les amendements identiques n os  3 et 10 sont adoptés.) En conséquence, l’article 7 est supprimé.

Article 8

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 25.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . Cet amendement prévoit que le Conseil national de la consommation rende un avis sur l’arrêté qui définira la liste des motifs légitimes de résiliation en matière de contrats de fourniture de services de communication électronique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Favorable.

(L'amendement n° 25 est adopté.) (L'article 8, amendé, est adopté.)

Après l'article 8

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 6.

La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Il arrive trop souvent que des professionnels peu scrupuleux omettent de signaler sur les sites de vente en ligne l’existence de la garantie légale afin de pouvoir vendre des extensions de garantie payantes, qui n’apportent rien de plus à l’acheteur.

Cet amendement propose donc de renforcer l’information du consommateur en la matière.

M. le président. Quel est l'avis de la commission?

M. Jean-Pierre Nicolas, rapporteur . La commission a émis un avis favorable à cet amendement, qui apporte des éclaircissements sur la garantie légale de conformité des biens commandés, laquelle s’applique en tout état de cause.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Avis favorable à cet amendement très opportunément déposé par M. Tardy. Son adoption mettra fin à un paradoxe qui consiste en ce que le consommateur se voit confirmer des informations portant sur des conditions commerciales dont la mise en œuvre relève exclusivement de la responsabilité du vendeur, mais aucunement sur l’exigence légale de conformité.

(L'amendement n° 6 est adopté.)

M. le président. Je ne suis saisi d’aucune demande d’explication de vote.

Nous en venons donc au vote sur l’ensemble.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, jeudi 21 janvier, à neuf heures trente :

Discussion de la proposition de loi relative à l'extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux de l'agriculture;

Discussion de la proposition de loi relative à la protection des missions d'intérêt général imparties aux services sociaux et à la transposition de la directive services.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 21 janvier 2010, à zéro heure trente-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale
Claude Azéma