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Commission des affaires européennes

mardi 7 juillet 2009

17 heures

Compte rendu n° 112

Présidence de M. Michel Herbillon, puis de M. Didier Quentin Vice-présidents

I. Communication de M. Marc Laffineur sur les aides d’Etat accordées au cours de la crise économique et financière actuelle

II. Examen du rapport d’information de M. Marc Laffineur sur l’avant-projet de budget de l’Union européenne pour 2010

III. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES

Mardi 7 juillet 2009

Présidence de M. Michel Herbillon, puis de M. Didier Quentin, Vice-présidents

La séance est ouverte à 17 heures.

I. Communication de M. Marc Laffineur sur les aides d’Etat accordées au cours de la crise économique et financière actuelle

M. Marc Laffineur, rapporteur. Au nom du respect de la libre concurrence, la Commission européenne écarte avec détermination toute intervention étatiste, ce qui l’amène souvent à se heurter aux Etats, qui lui reprochent sa vision trop libérale, entravant le développement d’une politique industrielle européenne, par une sorte de naïveté que n’auraient pas les grands pays concurrents.

Néanmoins, sous la pression de la crise mais également, il faut le reconnaître, de certains grands Etats tels que la France, la Commission européenne a accepté, sur l’année écoulée, l’octroi par les Etats d’aides qui s’élèvent à 3 000 milliards d’euros (2 300 milliards d’euros de systèmes de garanties, 300 milliards d’euros de plans de recapitalisation des banques et 400 milliards d’euros de mesures ad hoc de sauvetages et de restructurations). Toutefois, si elle a dû composer avec la crise, il serait pour le moins prématuré d’en conclure qu’elle a opéré une révolution culturelle vers le colbertisme. Elle s’est surtout inclinée devant le principe de réalité, car l’économie mondiale traverse actuellement l’une des plus graves crises financières de l’histoire économique.

Une fois caractérisée, l’aide d’Etat contrôlée par la Commission peut être considérée comme compatible avec le marché commun au regard du bilan entre la distorsion de concurrence générée par l’aide et la contribution de celle-ci à l’intérêt communautaire. Peuvent être ainsi déclarées compatibles des aides destinées à remédier au sous-développement régional ou au sous-emploi, à une perturbation grave de l’économie ou encore à la protection de l’environnement.

Dès l’origine, le contrôle des aides d’Etat était motivé par le souci d’empêcher le favoritisme national et la Commission européenne maintient ce critère malgré la crise, bien que les divergences entre intérêt national et intérêt communautaire génèrent des tensions (en particulier dans l’automobile).

La France, qui présidait l’Union européenne pour six mois, a joué un rôle très actif dans l’organisation de la réponse à la crise financière. Le Conseil « Ecofin » du 7 octobre 2008 s’est engagé à prendre toutes les mesures nécessaires pour renforcer la solidité et la stabilité du système bancaire. Le 10 octobre, le G7 a défini des principes clairs. Dès le 12 octobre, à l’initiative du Président Nicolas Sarkozy, l’Eurogroupe, élargi au Premier ministre du Royaume-Uni, adoptait un plan anti-crise fondé sur les principes définis au G7 (protéger les épargnants, assurer le financement de l’économie, éviter la faillite d’institutions financières systémiques) appelé à se décliner dans chaque Etat membre. Le lendemain, la France annonçait son plan de soutien. Le 16 octobre, le Conseil européen approuvait à son tour le plan anti-crise défini dans la déclaration de Paris.

Dans ce contexte, il était important que la Commission européenne relaye la politique voulue par les dirigeants européens et, que dans un domaine qui relève de l’exercice de ses pouvoirs propres, elle ne contrarie pas la mise en œuvre des plans de sauvetage.

Juridiquement, les plans de soutien aux banques sont considérés comme des aides d’Etat. Ils ont été autorisés par la Commission européenne au titre de l’article 87§3(b) du traité instituant la Communauté européenne (TCE), qui autorise sous certaines conditions les aides destinées à « remédier à une perturbation grave de l’économie ».

Trois communications ont précisé les conditions de compatibilité des aides avec le traité de Rome, définissant un cadre pour autoriser les opérations de soutien aux institutions financières dans le contexte de crise.

Pour être compatible avec le traité, le régime d’aide doit être de portée générale, les mesures exceptionnelles et temporaires, et prendre fin dès que la situation économique le permet. Ces aides ne doivent pas excéder deux ans et doivent être réexaminées tous les six mois par la Commission européenne. Les aides doivent être ciblées, proportionnées et non discriminatoires, et leur attribution fondée sur des critères objectifs.

L’action communautaire a été complétée par celle de la BCE et des banques centrales qui ont conduit des actions concertées, en abaissant leurs taux directeurs et en fournissant des liquidités aux banques commerciales.

Le montant total de refinancements accordés aux banques par l’Eurosystème dépasse aujourd’hui 960 milliards d’euros contre 450 milliards d’euros avant la crise.

Comme le souligne la Cour des comptes « la Banque de France a dû passer dans ses comptes au 31 décembre 2008 une provision de 1,2 milliard d’euros correspondant à sa quote-part de pertes d’autres banques centrales nationales. Cette provision est venue amputer le montant de l’impôt sur les sociétés (1,5 milliard d’euros) et celui du dividende versé à l’Etat (1,7 milliard d’euros) ». Le soutien de l’Eurosystème est donc un élément-clé dans le dispositif de concours publics aux établissements de crédit qui représente un coût financier significatif pour notre pays, solidaire des pays de l’Union européenne.

Vers la fin 2008, un ralentissement très important des activités a commencé à s’étendre à l’économie dans son ensemble et les Etats membres ont annoncé des plans nationaux de redressement pour permettre à leur économie de faire face au resserrement du crédit, ce qui a conduit la Commission européenne à publier le 17 décembre 2008 un cadre temporaire pour accorder ces aides.

Les Etats membres doivent démontrer que les aides d’Etat notifiées à la Commission sont nécessaires, appropriées et proportionnées pour remédier à une perturbation grave de l’économie d’un Etat membre et que toutes les conditions sont pleinement respectées.

Depuis l’adoption par la Commission européenne des communications concernant le secteur bancaire et la recapitalisation, 23 régimes ont été approuvés: 12 systèmes de garantie, 5 plans de recapitalisation, 5 régimes combinant différentes mesures et un fonds d’acquisition d’actifs financiers.

La Commission européenne concentre son attention sur trois piliers principaux : le rétablissement de la viabilité à long terme des bénéficiaires, la contribution du secteur privé à la couverture des coûts de restructuration (aide limitée au minimum) et les mesures visant à réduire au maximum les distorsions de concurrence.

Outre les régimes de portée générale, 10 Etats membres ont adopté des interventions individuelles ad hoc en faveur de certains établissements financiers.

S’agissant des autres secteurs économiques, la Commission européenne a autorisé 24 mesures au titre du « cadre temporaire ».

Conformément à cet encadrement, les autorités françaises ont notifié cinq régimes d’aides correspondant aux conditions prévues par celui-ci.

Le secteur automobile a été particulièrement touché par la crise économique actuelle. La Commission européenne a réagi en publiant, le 25 février 2009, une communication sur le soutien de l’Union européenne à la lutte contre la crise dans le secteur automobile. Cette communication prévoit diverses mesures visant à améliorer l’accès au crédit, précise les règles en matière d’octroi d’aides d’Etat dans des circonstances particulières pour stimuler la demande de nouveaux véhicules par une action nationale coordonnée, minimiser les coûts sociaux, conserver la main-d’oeuvre qualifiée et défendre une concurrence équitable sur des marchés ouverts.

La Commission européenne a adopté une position intransigeante face à certaines tentatives visant à mettre en oeuvre des mesures protectionnistes dans l’industrie automobile. Depuis que la France a annoncé qu’elle prévoyait d’accorder une aide au secteur automobile en échange de l’absence de licenciements par les constructeurs automobiles, la Commission européenne a déclaré que toutes les aides accordées selon ces critères seraient jugées incompatibles. Les contacts entre la Commission européenne et les autorités françaises ont abouti et la France s’est engagée à éviter d’imposer toute condition contraire aux règles du marché intérieur à ses constructeurs automobiles. Il convient toutefois de noter que les opinions publiques risquent d’admettre difficilement qu’un constructeur percevant des aides d’Etat puisse avoir une stratégie de délocalisation de sa production au sein de l’Union européenne.

La crise actuelle a également frappé le secteur du transport aérien, qui peinait déjà face aux prix élevés du brut durant le premier semestre.

En janvier 2009, la Commission européenne a autorisé une aide au sauvetage sous la forme d’une garantie de prêt d’Etat en faveur d’Austrian Airlines, qui a permis à l’entreprise de récolter des fonds sur le marché malgré le rationnement du crédit et de rester en activité jusqu’à ce que la Commission européenne se prononce sur son plan de privatisation.

Il est exact que la Commission européenne a su faire diligence devant la crise économique. Par exemple, au cours du dernier trimestre de l’année 2008, 18 décisions relatives à des régimes d’aides au secteur bancaire et 16 décisions concernant des banques individuelles ont été adoptées. Plus particulièrement, sur les 22 décisions relatives à des régimes d’aides au secteur bancaire arrêtées par la Commission avant mars 2009, 9 l’ont été en moins d’une semaine.

Des procédures accélérées s’appliquent également aux mesures relevant du cadre temporaire. En ce qui concerne les autres mesures urgentes qui ne relèvent pas du cadre temporaire mais qui sont liées à la crise qui frappe le monde de la finance et l’économie réelle, la Commission européenne applique également, dans la mesure du possible, la procédure accélérée.

Mais il est à craindre que les bonnes dispositions dont la Commission européenne a su faire preuve, grâce en partie à la forte pression de la Présidence française et des grands Etats, ne s’étiolent avec le temps.

La question qui ne manque pas de se poser à la lumière de la crise économique est celle de la mise en place d’une véritable politique de ré-industrialisation de l’Union européenne mais cela relève surtout d’un accord politique entre les Etats membres.

M. Jacques Myard. Merci, Monsieur le rapporteur, pour ce rapport, que vous auriez pu sous-titrer « Histoire d’un décalage idéologique », pour montrer, bien sûr, le décalage de la Commission européenne qui a rendu sa copie à contrecœur, acceptant des actions temporaires, et restant attachée à son rêve d’absence au niveau européen de politique industrielle et de planification.

De fait, alors que la Commission européenne a eu jusqu’en 1995 une action progressiste, faisant tomber les chauvinismes économiques et les barrières, elle n’a pas pris pleinement conscience de la nécessité de rétablir la préférence communautaire face à des pays émergents qui n’ont pas les mêmes règles économiques et sociales. Malheureusement, s’il est nécessaire de retrouver une politique industrielle communautaire, celle-ci n’est pas compatible avec les traités actuels. Même s’il existait un accord politique sur ce point, celui-ci se heurterait à la nécessité d’avoir un nouvel accord juridique, face à une Commission européenne gardienne des traités. Il est temps que nous prenions position officiellement, et au plus vite : au moindre petit signe de reprise, la crise sera oubliée, et ce sera, à l’instigation de la Grande-Bretagne, la fin de la réforme du système. Nous n’avons pas de temps à perdre pour élaborer une politique de planification intelligente. J’espère que la Commission Rocard/Juppé nous y aidera.

M. Michel Piron. Merci pour cet excellent rapport et pour son excellente conclusion, qui est en fait une introduction. De fait, quelle pourrait être une politique européenne industrielle ? Je suis perplexe de voir ce qu’il en est aujourd’hui. La concurrence n’est pas actuellement conçue par la Commission européenne comme un moyen mais comme une fin en soi, ce qui a entraîné, malheureusement, à plusieurs reprises l’exigence de démantèlement de grands groupes européens qui avaient pourtant mis des années à atteindre la taille critique pour se battre à l’échelle internationale. Je pense qu’il y a un problème d’approche. Le débat n’est plus aujourd’hui celui de la concurrence intra-européenne mais celui de la concurrence entre l’Europe et le reste du monde. La dimension mondiale n’est pas assez prise en compte dans de nombreux secteurs tels que l’automobile ou l’énergie. Il serait intéressant d’établir une comparaison entre les stratégies des groupes mondiaux communautaires et ceux de la Russie, de l’Inde ou des Etats-Unis.

M. Philippe Tourtelier. Nous avons, il y a quelque temps, établi un rapport avec notre collègue, M. André Schneider, qui a bien montré que le souci de la concurrence s’est fait au détriment de notre sécurité énergétique.

M. Marc Laffineur, rapporteur. Il est vrai que la Commission européenne est très attachée au libéralisme et à la libre concurrence. Elle a toutefois répondu de manière, certes contrainte, mais très rapide lorsque la question des aides s’est posée, accordant la possibilité d’aides massives. Elle s’est toutefois opposée à la France, qui souhaitait que ces aides soit conditionnée à l’absence de délocalisations, y compris au niveau intra-européen. Il est vrai, en outre, que l’absence de politique européenne industrielle nous empêche de réagir face à la concurrence de poids lourds mondiaux tels que l’Inde ou la Chine.

M. Philippe Armand Martin. Comment présenter à l’opinion publique des aides qui ne seraient pas conditionnées à l’absence de délocalisation, y compris à l’échelle intra-européenne ? C’est impossible.

Le Président Michel Herbillon. Sur la question des aides au secteur automobile, l’attitude de la Commission européenne et la perception de l’opinion publique ont en effet été en total décalage. Il serait intéressant dans quelques semaines ou mois de voir si la Commission européenne va changer d’attitude et tirer l’expérience de la crise. La Commission européenne est-elle capable de pragmatisme ?

M. Jacques Desallangre. La Commission européenne n’est pas un être désincarné. Commençons par demander aux pouvoirs publics de « réviser leur copie » ! Je suis content de voir que vous prenez enfin conscience que la concurrence n’est pas une fin en soi. Nous devrions délibérer en ce sens et souhaiter un pouvoir politique fort sur cette question.

M. Jérôme Lambert. C’est un sujet primordial. Je suis frappé par une chose : en France, les points de vue évoluent ; mais ce n’est pas le cas dans les autres pays européens, et ce quels que soient les bords politiques. Nous devons clarifier nos points de vue, pour pouvoir mettre en avant nos pratiques et convaincre nos voisins européens.

M. Gérard Voisin. La Commission européenne ne changera pas. Les comités d’experts priment sur les politiques.

M. Marc Laffineur, rapporteur. Certes, mais la présidence française a démontré que la volonté politique avait le pouvoir de faire évoluer les choses. Malheureusement, comme l’indique M. Jérôme Lambert, cette volonté fait défaut sur cette question dans nombre de pays européens. Je suggère d’établir un nouveau rapport dans quelques mois pour voir quelle sera l’évolution de la position de la Commission européenne sur cette question. Nous avons besoin de pouvoir lutter à armes égales avec le reste du monde ; et c’est dans l’intérêt aussi du reste du monde d’avoir une Europe forte et en croissance.

Le Président Michel Herbillon. Notons que le traité de Lisbonne acte une première évolution, puisque la concurrence libre et non faussée y est envisagée comme un moyen et non comme une fin en soi, la France étant d’ailleurs à l’origine de ce « déclassement ».

M. Marc Laffineur, rapporteur. Ce même traité renforçant en outre le pouvoir politique.

M. Jacques Desallangre. Ce traité n’est pas en vigueur, et il est bien dommage que nous n’en ayons pas exigé la renégociation à la suite du « non » français.

M. Marc Laffineur, rapporteur. Nous verrons les effets de cette modification quand le traité sera en vigueur.

II. Examen du rapport d’information de M. Marc Laffineur sur l’avant-projet de budget de l’Union européenne pour 2010

M. Marc Laffineur, rapporteur. Comme chaque année, la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale est saisie de l’avant-projet de budget pour l’année prochaine, qui sera examiné en première lecture par le Conseil « Ecofin » dans quelques jours.

Le budget communautaire pour 2010 sera le quatrième budget d’application des perspectives financières 2007-2013. Ce cadre pluriannuel est donc à mi-parcours ; or, l’accord interinstitutionnel qui a formalisé ce cadre prévoyait justement qu’à mi-parcours s’engagerait une vaste réflexion sur l’avenir du système budgétaire communautaire, qu’il s’agisse des recettes ou des dépenses. Il faut espérer que l’année 2010 marquera effectivement le lancement de ce grand chantier, sur lequel mon collègue Michel Delebarre et moi-même sommes chargés de faire rapport devant notre commission. La Commission européenne n’a toujours pas présenté sa proposition qui doit servir de base aux travaux, et le retard ainsi pris
– qui se justifiait par le souci de ne pas influencer négativement le processus de ratification du traité de Lisbonne – est néanmoins très regrettable, car nul ne peut ignorer qu’une réforme d’ensemble du budget communautaire, qui portera à la fois sur les recettes et sur les dépenses, va nécessiter de très longues négociations.

La procédure budgétaire elle-même, menée cette année sous présidence suédoise du Conseil, devrait en principe constituer le dernier exercice du genre, car l’entrée en vigueur attendue du traité de Lisbonne, si elle se produit dans les mois qui viennent, transformera profondément le déroulement de la préparation du budget annuel de l’Union… à partir du budget pour 2011.

S’agissant du contenu du budget annuel, comme les années précédentes, les propositions de la Commission européenne pour l’exercice 2010 sont globalement marquées par le respect de l’impératif de discipline budgétaire. L’enjeu central de ce budget est la question de sa contribution à l’effort commun de relance de l’activité économique : si la question du financement de la tranche 2009 du Plan européen de relance a pu être réglée – la fameuse enveloppe dite « des cinq milliards » –, les modalités de financement de la tranche 2010 de ce plan demeurent incertaines.

L’avant-projet de budget présenté par la Commission européenne s’établit à 138,6 milliards d’euros en crédits d’engagement, soit 1,18 % du RNB communautaire, en hausse de 1,5 % par rapport à 2009, et à 122,3 milliards d’euros en crédits de paiement, soit 1,04 % du RNB, en hausse de 5,3 % par rapport à 2009.

Les propositions de la Commission respectent les plafonds fixés par le cadre financier pluriannuel, pour ces montants globaux, comme pour chacune des grandes Rubriques du budget. Les « grandes masses » de cet avant-projet sont les suivantes :

– la rubrique 1B, qui est celle des fonds structurels et du fonds de cohésion, s’élève à 49,4 milliards d’euros en engagements, soit 35,6 % du budget proposé ;

– la politique agricole commune serait dotée pour 2010 de 43,7 milliards d’euros en engagements, soit 31,6 % du budget ;

– la rubrique 1A, qui regroupe les politiques de la stratégie de Lisbonne, c’est-à-dire notamment la recherche-développement, les réseaux transeuropéens de transport et d’énergie, les actions dans le domaine de l’éducation et de la formation, représente environ 13 milliards d’euros en engagements, soit 9 % du budget proposé ; ce pourcentage peut sembler faible, mais s’y ajoutera l’enveloppe de 2,4 milliards d’euros correspondant au volet « 2010 » du plan européen de relance économique, une fois que les modalités exactes de son financement auront été fixées ;

– la rubrique 4, celle des actions extérieures, s’élève à 7,9 milliards d’euros, soit 5,7 % du budget. La Commission européenne a signalé que ce montant était susceptible d’être revu à la hausse à l’automne, afin de prendre en considération, en puisant dans la marge ménagée sous le plafond fixé par les perspectives financières, des besoins précis liés par exemple à l’action de l’Union européenne au Moyen-Orient, au Kosovo et dans la lutte contre le changement climatique.

Au sein du Conseil, les Etats membres sont parvenus à un accord sur un projet de budget de 137,9 milliards d’euros en crédits d’engagement et de 120,5 milliards en crédits de paiement. Les Etats membres souhaiteraient, comme d’habitude, procéder à des coupes par rapport aux propositions de la Commission. La présidence suédoise affichait de très ambitieux objectifs en termes de réductions par rapport aux propositions de la Commission européenne. Elle allait jusqu’à envisager des coupes de plus de 2,2 milliards d’euros en crédits de paiement par rapport à l’avant-projet de budget. Mais de très nombreux Etats membres se sont opposés, avec succès, aux coupes massives initialement envisagées dans les crédits de paiement des Fonds structurels, des aides directes de la PAC et des actions extérieures.

La France a particulièrement veillé, avec quatorze autres Etats, à ce qu’il n’y ait pas de coupes dans les crédits de paiement pour les aides directes agricoles au stade de cette première lecture, car il est de tradition d’attendre, pour calibrer au mieux le montant de ces aides, de pouvoir disposer des prévisions mises à jour que la Commission européenne présente en septembre sous forme d’une lettre rectificative.

Le compromis élaboré par les Etats membres sera formellement adopté le 10 juillet par le Conseil « Ecofin ». Les négociations ont à présent commencé entre le Conseil, le Parlement européen et la Commission. Comme à l’accoutumée, le résultat final de la procédure budgétaire se situera quelque part entre les montants proposés initialement par la Commission européenne, dont le Parlement européen essaye toujours de se rapprocher le plus possible, et les montants plus réduits dont le Conseil fait sa base de négociation.

M. Jacques Myard. Les années passent mais les évidences demeurent. Le budget européen n’a décidément aucune logique intrinsèque, mais conserve bien ses lacunes criantes.

Le saupoudrage est la première, flagrante pour les fonds structurels, minés par le raisonnement absurde qu’il est utile de faire remonter de l’argent à Bruxelles pour qu’il descende aussitôt dans les piscines des villages d’Europe, entretenant au passage une lourde administration et d’innombrables intermédiaires. Au fond, l’utilité du budget se résume à la seule politique communautaire, la politique agricole commune. Tout le reste n’est que saupoudrage et prébendes à divers organismes. Cette situation est en contradiction flagrante avec le système originaire du traité de Rome, qui veut que Bruxelles édicte des normes qui sont ensuite intégralement mises en œuvre par les Etats.

La seconde faiblesse est évidemment la taille du budget, en contradiction absolue avec les ambitions démesurées dont se targuent les europhiles. Ce hiatus confine à l’hypocrisie lorsqu’il nourrit des espoirs indus qui n’ont aucune chance d’être satisfaits avec 1 % seulement du RNB de l’Union.

M. Marc Laffineur, rapporteur. La taille insuffisante du budget communautaire est bien connue. J’avais d’ailleurs eu l’occasion, en particulier dans mon rapport sur la révision des perspectives financières pluriannuelles, de relever cette forte contradiction entre ce que l’on attend de l’Europe et les moyens que les Etats consentent, avec une forte volonté politique, à lui accorder. Pour autant, il faut prendre la mesure des progrès accomplis en particulier s’agissant des fonds structurels. L’accusation de « saupoudrage » est de moins en moins étayée par l’expérience locale. J’ai régulièrement contesté l’opportunité que l’Europe finance la moindre rénovation de la place du village. Je constate aujourd’hui qu’elle le fait de moins en moins et se concentre efficacement sur les projets pour lesquels son intervention est légitime.

M. Jacques Desallangre. Cette logique peut d’ailleurs être poussée à l’extrême, puisqu’il devient aujourd’hui fort difficile d’obtenir des financements européens, les services instructeurs accumulant les obstacles à un usage souple et efficace des crédits disponibles, conduisant à une sous-consommation préoccupante des fonds qui nous sont alloués.

M. Michel Piron. Il est vrai qu’en la matière comme ailleurs la France, éprise des beaux concepts d’efficacité, de fongibilité et de subsidiarité, n’en tombe pas moins régulièrement dans ses vieux travers légendaires de méticulosité et de frilosité administrative. Cette propension dramatique explique sans doute le fort décalage entre les attentes et les résultats en matière d’allocation des fonds structurels.

M. Didier Quentin. Il faut bien aussi reconnaître que les plus empressés à critiquer l’Europe et dénoncer ses insuffisances sont souvent ceux qui en profitent le plus. La comparaison de la carte du « non » au référendum de 2005 sur la Constitution européenne et de celle des principaux bénéficiaires des fonds structurels est à cet égard éloquente.

Suite à ce débat, la Commission a adopté la proposition de résolution suivante :

« L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu l’article 272 du traité instituant la Communauté européenne et l’article 177 du traité Euratom,

Vu l’accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 sur la discipline budgétaire et la bonne gestion financière,

Vu la décision 2009/407/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009 modifiant l’accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 en ce qui concerne le cadre financier pluriannuel (2007-2013),

Vu l’avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l’exercice 2010 (n° E 4533),

1. Prend acte des grandes orientations de l’avant-projet de budget général pour 2010, quatrième budget de la période couverte par les perspectives financières en vigueur ;

2. Salue la poursuite par la Commission européenne de ses efforts de discipline budgétaire conduisant à la fois au strict respect des plafonds fixés par les perspectives financières et à la préservation de marges sous ces plafonds ;

3. Demande aux Etats membres et au Parlement européen de conclure le plus rapidement possible un accord sur les modalités du financement de la tranche 2010 de l’enveloppe de cinq milliards d’euros décidée lors du Conseil européen de mars 2009 pour contribuer, essentiellement à travers des projets d’investissement dans le domaine des infrastructures énergétiques, à la relance de l’activité économique en Europe ;

4. Appelle la Commission européenne à présenter sans plus attendre la proposition qu’elle s’est engagée à élaborer avant la fin de l’année 2009 pour lancer enfin les travaux relatifs à la réforme du budget communautaire à l’horizon 2013 ;

5. Réitère son appel au lancement immédiat d’un débat national sur les enjeux, les options, le calendrier et les modalités de cette réforme essentielle pour l’avenir de l’Union. »

III. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Didier Quentin, la Commission a examiné des textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution.

Point B

Aucune observation n’ayant été formulée, la Commission a approuvé les textes suivants :

Ø Agriculture

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1234/2007 portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole, en ce qui concerne les normes de commercialisation pour la viande de volaille (document E 3889).

Ø Commerce extérieur

- proposition de règlement du Conseil relatif à l'ouverture d'un contingent tarifaire autonome pour les importations de viande bovine de haute qualité (document E 4531).

Ø Espace de liberté, de sécurité et de justice

- initiative de la République française en vue de l'adoption d'une Décision du Conseil portant modification de la Convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes (Convention SID) du 26 juillet 1995 (document E 4104).

Ø Questions budgétaires

- avant-projet de budget rectificatif n° 6 au budget général 2009. Etat général des recettes (document E 4243-6) ;

- avant-projet de budget rectificatif n° 7 au budget général 2009 - Etat des dépenses par section Section III – Commission (document E 4243-7)

- proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à la mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne (document E 4549).

Ø Relations extérieures

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1717/2006 instituant un instrument de stabilité (document E 4453) ;

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1905/2006 portant établissement d'un instrument de financement de la coopération au développement et modifiant le règlement (CE) n° 1889/2006 instituant un instrument financier pour la promotion de la démocratie et des droits de l'homme dans le monde (document E 4477) ;

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1934/2006 portant établissement d'un instrument financier de coopération avec les pays industrialisés et les autres pays et territoires à revenu élevé (document E 4478).

Ø Transports

- projet de décision du Conseil concernant des directives de négociation complémentaires dans le cadre des négociations en vue de la conclusion d'un traité instituant une Communauté des transports entre la Communauté européenne et l'Albanie, la Bosnie Herzégovine, la Croatie, l'ancienne République yougoslave de Macédoine, le Monténégro et la Serbie, ainsi que le Kosovo, conformément à la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité des Nations unies (document E 4545) ;

- projet de règlement de la Commission du modifiant le règlement (CE) n° 216/2008 du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes dans le domaine de l'aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne, et abrogeant la directive 91/670/CEE du Conseil, le règlement (CE) n° 1592/2002 et la directive 2004/36/CE (document E 4546).

Accords tacites

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping) et 28 janvier 2009 (projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines nominations), celle-ci a approuvé tacitement les trois documents suivants :

- règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 423/2007 du 19 avril 2007 concernant l'adoption de mesures restrictives à l'encontre de l'Iran (document E 4541) ;

- décision du Conseil portant nomination d'un membre du Royaume-Uni du Comité économique et social européen (document E 4544) ;

- proposition de règlement du Conseil clôturant le réexamen intermédiaire partiel, au titre de l'article 11, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 384/96 du Conseil, du droit antidumping sur les importations de certains systèmes d'électrodes en graphite originaires de l'Inde (document E 4548).

La séance est levée à 18 heures.