Accueil > Documents parlementaires > Amendements
Version PDFRetour vers le dossier législatifVoir le texte de référenceVoir le compte rendu

APRÈS ART. 2 BISN°98

ASSEMBLÉE NATIONALE
12 mai 2016

JUSTICE DU XXIÈME SIÈCLE - (N° 3726)

Commission
 
Gouvernement
 

Non soutenu

AMENDEMENT N°98

présenté par

M. Gosselin, M. Straumann, M. Abad, M. Verchère, Mme Nachury, M. Morel-A-L'Huissier, M. Gérard, M. Fromion, M. Le Mèner, M. Lazaro, M. Luca, M. Vitel et M. Bonnot

----------

ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS, insérer l'article suivant:

Le sixième alinéa du 7 du I de l’article 6 de la loi n° 2004‑575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Compte tenu de l’intérêt général attaché à la lutte contre le financement de la criminalité organisée et du terrorisme, les personnes mentionnées aux 1 et 2 doivent agir avec diligence en prenant toutes mesures proactives raisonnables et adéquates afin de concourir à la lutte contre la promotion, la commercialisation et la diffusion de produits contrefaisants ou de contrefaçons telles que définis aux articles L. 521‑1 et L. 716‑1 du code de la propriété intellectuelle.

« Tout manquement aux obligations définies aux quatrième, cinquième et sixième alinéas est puni des peines prévues au 1 du VI. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Depuis plusieurs années, la contrefaçon apparait comme une importante source de financement du crime organisé et du terrorisme, plus importante encore, que le trafic de drogues, le blanchiment d’argent et la corruption[1]. En effet, les produits contrefaisants sont le plus souvent importés et écoulés par des réseaux criminels pour lesquels l’activité contrefactrice constitue, à moindre risque, et comme l’a souligné un rapport remis par l’Union des fabricants pour la protection internationale de la propriété intellectuelle (Unifab) au ministre des Finances et des Comptes publics Michel SAPIN le 28 janvier 2015, une source de revenus susceptible de contribuer au financement du terrorisme ou d’autres activités criminelles de dimension internationale.

La contrefaçon et sa diffusion croissent en très grand partie grâce au développement du commerce en ligne. En effet, le trafic s’est véritablement professionnalisé, profitant de la croissance du marché, du sentiment d’anonymat et d’impunité que confère internet et de la facilité de création et de mutation des sites.

Malgré ce constat, il est fréquent que les opérateurs de plateformes en ligne – véritable portail vers l’internet pour de nombreux consommateurs – guident par inadvertance vers des contenus et produits illicites. Catalyseurs d’innovation, créateurs de fonctionnalités de grande valeur et centralisateurs d’une partie toujours croissante du réseau, les opérateurs de plateformes en ligne ne peuvent s’affranchir de toute responsabilité et doivent désormais prendre toute leur part dans cet effort collectif et se montrer vigilants.

Or, le régime juridique actuellement applicable ne le permet pas. Bien souvent les opérateurs de plateformes en ligne ne sont pas tenus de mettre en place des outils adéquats pour lutter contre ces activités illégales. A charge alors pour les seuls titulaires de droits de propriété intellectuelle, les pouvoirs publics et les consommateurs de rester vigilants et de signaler ces contenus.

Aussi, ce projet de loi constitue une opportunité d’opérer un rééquilibrage des responsabilités entre titulaires de droits et opérateurs de plateformes en ligne dans la lutte contre la contrefaçon en ligne.

A cette fin, l’obligation de moyens introduite par le présent amendement – sans préjudice des dispositions législatives ou règlementaires plus contraignantes applicables – notamment aux éditeurs de contenus en ligne – technologiquement neutre pour les opérateurs de plateformes en ligne, vise à la mise en place par ces derniers de mesures raisonnables, adéquates et proactives dans le cadre de leurs activités, pour éviter de porter préjudice aux consommateurs, aux titulaires de droits et aux tiers.

Juridiquement, cette notion doit constituer pour les opérateurs de plateformes en ligne une obligation dont le non-respect pourra être sanctionné. L’interprétation et la sanction de cette obligation reposeront in fine sur les autorités judiciaires, seules compétentes pour apprécier le caractère suffisant ou non des mesures mises en œuvre par les plateformes pour se conformer à leur devoir en fonction du rôle qu’elles jouent ou peuvent jouer dans la promotion, la commercialisation et la diffusion de produits contrefaisants.

Le présent amendement s’inscrit pleinement dans les objectifs d’une modernisation de notre justice, en amplifiant la lutte et la répression des infractions associées à la criminalité, et en intensifiant la détection et la répression du financement de ces activités.

[1]Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime, « Gros plan sur : le trafic illicite de biens contrefaits et la criminalité transnationale organisée », p.2