XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023
Séance du mercredi 30 novembre 2022
- Présidence de Mme Valérie Rabault
- 1. Dépôt d’une motion de censure
- 2. Soutien à l’Ukraine et condamnation de la guerre menée par la Russie
- Discussion générale
- M. Pieyre-Alexandre Anglade
- Mme Laurence Robert-Dehault
- M. Aurélien Saintoul
- Mme Nathalie Serre
- Mme Maud Gatel
- M. Alain David
- Mme Stéphanie Kochert
- Mme Cyrielle Chatelain
- M. André Chassaigne
- M. Jean-Louis Bricout
- Mme Emmanuelle Ménard
- Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d’État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux
- Explications de vote
- Vote sur la proposition de résolution
- Discussion générale
- 3. Défendre un accord ambitieux lors de la conférence sur la diversité biologique
- 4. Ordre du jour de la prochaine séance
2e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Je vous informe que la présidente de l’Assemblée nationale a pris acte aujourd’hui, mercredi 30 novembre, à vingt heures vingt, du dépôt, par Mme Mathilde Panot, M. Boris Vallaud, Mme Cyrielle Chatelain, M. André Chassaigne et 144 députés, d’une motion de censure, en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, la Première ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement sur l’adoption, en lecture définitive, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.
Très bien !
L’ordre du jour appelle la discussion, en application de l’article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution affirmant le soutien de l’Assemblée nationale à l’Ukraine et condamnant la guerre menée par la fédération de Russie (no 390).
Avant de commencer la discussion, je tiens à saluer la présence de M. Vadym Omelchenko, ambassadeur d’Ukraine en France. (Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.)
Avant de commencer la discussion, je tiens à saluer la présence de M. Vadym Omelchenko, ambassadeur d’Ukraine en France. (Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.)
La parole est à M. Pieyre-Alexandre Anglade.
Nous sommes réunis aujourd’hui pour un vote dont la portée est particulièrement chargée de sens et de gravité. Pour la première fois depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Assemblée nationale entend, avec cette résolution, apporter son soutien au peuple ukrainien et à sa résistance face à l’agresseur russe et condamner sans ambiguïté le conflit odieux mené par la Russie de Vladimir Poutine contre l’Ukraine.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Ce vote intervient à un moment crucial de la guerre. Alors que l’hiver est là, l’armée russe a intensifié ses frappes sur nombre de villes ukrainiennes, visant délibérément des installations énergétiques et bien d’autres cibles civiles.
Force est aujourd’hui de constater que l’armée russe, défaite sur le champ de bataille, s’en prend avec cruauté à la population ukrainienne. Des pluies de missiles et de drones meurtriers s’abattent chaque jour sur le pays. Rien n’est épargné : ni les immeubles d’habitation ni les écoles ni les maternités ni les hôpitaux, selon une stratégie de terreur conçue, planifiée et organisée par le Kremlin. Terroriser la population civile pour qu’elle cède, se servir de l’hiver comme d’une arme de guerre : voilà le projet barbare et inacceptable de la Russie qui rappelle les heures les plus sombres de l’obscurantisme. Il a raison ! Soyons-en certains : même plongé dans le froid et le noir, le peuple ukrainien combattra à la lumière de son courage et de sa résistance et survivra. Mais il n’oubliera pas. Et il est de notre devoir, à nous, Français, de ne pas oublier non plus les atrocités dont il a été victime : le bombardement de la gare de Kramatorsk, celui du théâtre de Marioupol qui abritait des enfants ou la destruction de Lyman, Sievierodonetsk, Marioupol et bien d’autres villes.
Souvenons-nous aussi des massacres d’Izioum et de Boutcha – parmi d’autres – et de toutes les salles de torture qui, dans les zones envahies, sont la signature des mercenaires russes. Souvenons-nous des déportations, orchestrées par le pouvoir russe, d’enfants et d’adolescents. Souvenons-nous des viols innombrables. Souvenons-nous de Kherson, ville libérée mais aujourd’hui martyrisée, en représailles évidemment préméditées.
Les crimes de guerre perpétrés par la Russie de Poutine sont pléthore. Et ils ne sont pas le fait de dérapages de soldats perdus dans le brouillard de la guerre. Ils sont commandités et intentionnels. Face à ce mal incommensurable, la justice devra passer. C’est aussi ce que nous voulons affirmer avec cette résolution. Il viendra immanquablement, ce jour où les responsables de ces crimes et leurs complices devront rendre des comptes devant la justice internationale. (Mêmes mouvements.)
Nous avons la conviction, madame la secrétaire d’État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux, que nous devons travailler à la création d’un tribunal spécial pour la répression du crime d’agression contre l’Ukraine. Exactement ! La France, avec ses partenaires européens, aide l’Ukraine depuis le premier jour. Le 13 décembre prochain, à l’initiative du Président de la République, notre pays accueillera une conférence internationale pour soutenir la résistance et la résilience de la nation ukrainienne.
Cependant, le vote de notre assemblée est attendu car il affirmera, de façon symbolique, la solidarité de toute la nation française avec le peuple ukrainien. Il sera aussi un message envoyé au Kremlin pour lui dire que nous soutenons toujours les livraisons d’armes et les sanctions contre Moscou et que nous demandons au Gouvernement de les poursuivre. Eh oui, bravo ! Il nous permettra aussi de dire que les Français resteront aux côtés de l’Ukraine jusqu’au bout, jusqu’à ce qu’elle ait recouvré son intégrité territoriale et sa souveraineté, jusqu’à ce que le dernier soldat russe ait quitté son territoire. (Mêmes mouvements.)
Nous savons bien que l’Ukraine est une cible parce qu’elle croit en la démocratie libérale, respectueuse de l’individu, des minorités et des droits fondamentaux, et parce qu’elle partage nos valeurs européennes. Dans notre for intérieur, nous savons aussi que nous ne trouverons la paix en Europe que dans la défaite du régime de Vladimir Poutine, lequel, en martyrisant l’Ukraine, cherche à anéantir la liberté, la démocratie et nos valeurs, et à redéfinir l’ordre de sécurité à sa manière sur notre continent.
Quand je dis « nous », je suis volontairement optimiste car je sais bien en réalité que dans cet hémicycle, malheureusement, Vladimir Poutine compte encore un certain nombre de soutiens… Eh oui ! …qui condamnent verbalement cette guerre mais s’opposent systématiquement aux livraisons d’armes et aux sanctions contre la Russie. La semaine dernière, au moment où celle-ci bombardait massivement l’Ukraine, les élus du Rassemblement national votaient au Parlement européen contre une résolution condamnant la Russie et ceux de la France insoumise s’abstenaient. Exactement ! C’est une honte ! Il faudrait peut-être chercher la paix ! Aujourd’hui, vous qui, au sein de ces deux formations, vous réclamez des valeurs de la République, de la liberté et de la paix, aurez-vous le courage de soutenir le peuple ukrainien dans son martyr en votant ce texte, le courage de condamner les crimes de la Russie, le courage d’appeler à plus de livraisons d’armes et de sanctions ? Ou ferez-vous la même erreur, au regard de l’histoire, que vos collègues qui siègent à Strasbourg et ont refusé de voter en faveur du soutien financier qui doit aider l’Ukraine à passer l’hiver ?
Nous avons fait le choix de soutenir l’Ukraine et d’ouvrir pour elle le chemin de l’intégration à l’Union européenne. Continuons sur cette voie qui nous honore et aujourd’hui, avec ce vote, affirmons le soutien indéfectible du peuple français au peuple ukrainien qui souffre horriblement et résiste héroïquement. Vive l’Ukraine ! (Mmes et MM. les députés du groupe RE se lèvent et applaudissent.) La parole est à Mme Laurence Robert-Dehault. Le Rassemblement national soutient depuis le début du conflit le peuple ukrainien. Dès le mois de février, Marine Le Pen affirmait que l’invasion russe sur le territoire souverain de l’Ukraine devait « sans ambiguïté être condamnée ».
« Aucune raison ne peut justifier le lancement d’une opération militaire contre l’Ukraine par la Russie qui rompt l’équilibre de la paix en Europe », expliquait-elle.
Voilà ce que nous souhaitons pour l’Europe… Ah ? Vous êtes pour l’Europe maintenant ! …et l’Ukraine : la paix, la protection des peuples et le rétablissement des principes du droit international, piétinés depuis bien trop d’années par ceux qui, au vu de la place qu’ils occupent au Conseil de sécurité des Nations unies, devraient les défendre.
Rappelons ici que, malgré la campagne électorale et notre opposition à la politique gouvernementale, Marine Le Pen a toujours soutenu l’action diplomatique d’Emmanuel Macron… Ah bon ? Première nouvelle ! Apprenez à écouter ! …pour protéger la paix quand nous pensions qu’elle était possible et pour essayer de trouver une solution diplomatique. Jamais le Rassemblement national n’utilisera la politique internationale pour faire de la politique politicienne (Exclamations sur les bancs du groupe RE) … Si peu ! …ou pour diviser le front uni que la nation doit afficher face au reste du monde, en particulier en période belliqueuse.
Votre motion défend les principes cardinaux du droit international de la Charte des Nations unies, de la protection de la souveraineté des peuples et de la justice internationale qui, seuls, peuvent œuvrer à une paix durable.
Oui, l’ONU et la Cour pénale internationale devront enquêter sur les crimes de guerre commis par l’armée russe pour établir les responsabilités et condamner les coupables. Oui, il faut se féliciter que le régime russe n’ait pas réussi à diviser les nations européennes et que nos alliés, en particulier la Pologne, aient fait preuve d’une grande détermination et d’une grande humanité dans l’accueil des réfugiés.
Cependant, il est incompréhensible que votre motion ne parle jamais de l’objectif que nous devons tous garder à l’esprit : comment arriver à un cessez-le-feu et à la paix pour rétablir la souveraineté de l’Ukraine et faire en sorte que le peuple ukrainien ne soit plus martyrisé ? Quelle est votre solution ? Vous réclamez toujours plus de sanctions sans préciser lesquelles. Or, si certaines sanctions fonctionnent et affaiblissent le régime russe – notamment son économie de guerre –, d’autres, au contraire, le renforcent et l’enrichissent au détriment des Français. Ah ! On y vient ! Les annonces de vos sanctions sur l’énergie puis les sanctions elles-mêmes n’ont absolument pas affaibli le régime russe mais l’ont enrichi. Quelles sanctions l’ont enrichi ? Vous êtes trop intelligents pour ne pas comprendre ! Ne faites pas semblant ! Tandis que ces sanctions mettent les Français et nos entreprises en difficulté, la Russie est devenue le premier exportateur de pétrole en Chine. Elle s’allie avec l’Inde et avec des puissances du Moyen-Orient et d’Asie contre nos intérêts. À moyen terme, on ne peut cacher aux Français les dangers multiples, pour l’Europe, d’une alliance entre la Russie, première réserve de matières premières au monde, avec la dictature chinoise, première puissance industrielle du monde.
Votre aveuglement est incompréhensible. Ce qui importe, ce n’est pas de multiplier les sanctions d’affichage mais bien d’exercer des pressions qui obligent le gouvernement russe à revenir à la table des négociations de paix et à cesser son agression.
Vous évoquez la livraison d’armes sans préciser lesquelles et dans quel but. S’il faut soutenir matériellement les Ukrainiens, notamment pour s’assurer qu’ils pourront se protéger du froid, de la faim, de la soif et des maladies, et s’il est nécessaire de livrer des armes défensives, nous ne pensons pas qu’il faille aller plus loin dans la livraison d’armes offensives. Nous devons les soutenir ! Il faut savoir ce que vous voulez ! En prenant le risque que la France devienne cobelligérante, vous prenez aussi celui qu’elle ne soit plus en mesure d’exercer son rôle historique de médiatrice et de facilitatrice de la paix. Passez un coup de téléphone ! Un coup de fil, c’est simple ! C’est minable ! Si aucune puissance européenne n’est plus reconnue comme non belligérante, la solution de paix sera définitivement entre les mains de la Turquie, de la Chine, de l’Inde et des États-Unis. Il serait impensable d’exclure ainsi les nations européennes de la maîtrise du destin de leur propre continent.
Enfin, votre motion cherche hélas à diviser les Français plutôt qu’à les rassembler autour de la cause ukrainienne. Absolument ! Relisez le texte ! Pourquoi promettre l’intégration européenne alors que l’Union européenne n’est pas capable de s’élargir davantage et que les Français ne le souhaitent pas ? Les Ukrainiens demandent l’adhésion à l’Union ! Ne pourriez-vous pas écouter l’oratrice ? Pourquoi faire de l’agenda de l’Otan un enjeu politicien, alors que vous savez parfaitement que le plus grand défenseur de la souveraineté des peuples et de l’équilibre international, le général de Gaulle, avait clairement établi que le destin de la France n’était pas de faire partie du commandement intégré de l’Otan ? Il vous reste quelques secondes et nous ne connaissons toujours pas votre vote ! Ils n’ont aucun respect ! C’est scandaleux ! Nous vous invitons, chers collègues, à renouer avec la mission historique de la France : être une puissance d’équilibre qui cherche à défendre le droit international, la protection des peuples et la recherche de la paix. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) C’est du blabla ! Vous dites cela parce que vous faites partie de la majorité mais vous n’avez aucun courage ! La parole est à M. Aurélien Saintoul. Il vaut infiniment mieux empiler les bonnes intentions que d’en exhiber de mauvaises. C’est sans doute ce qu’ont pensé les auteurs de ce texte bizarre et emphatique qui condamne l’invasion de l’Ukraine par la Russie et les crimes que cette dernière y commet.
Ce texte est en effet bizarre pour trois raisons.
Tout d’abord, il survient neuf mois après le début de la guerre, et son rejet ou son adoption ne changeront donc strictement rien aux événements ni aux décisions de l’exécutif en la matière. En cela, il reflète bien votre conception ornementale du parlementarisme, mes chers collègues. Tout à fait ! Ensuite, il met en scène un débat qui n’existe pas. Pour nous, l’affaire est entendue de longue date : oui, la Russie est coupable d’une guerre d’agression contre l’Ukraine, au cours de laquelle elle brise successivement presque tous les tabous du droit international. Pourquoi La France insoumise s’est-elle abstenue au Parlement européen ? Enfin, la tonalité de votre proposition de résolution est en total décalage avec les récentes déclarations du Président de la République et du ministre des armées, qui s’emploient plutôt à ouvrir un chemin à des négociations qu’à bomber le torse idiotement. Or c’est précisément ce que reflète votre texte avec un manque de subtilité… C’est vous qui parlez de subtilité ? …que je qualifierai d’artistique puisqu’il appelle à la guerre à outrance en appelant outrancièrement à la guerre. Non, il appelle au soutien ! À sa lecture, on sent que ses auteurs se sont exaltés à l’idée d’un héroïsme dont ils aimeraient être capables depuis leurs bureaux et leurs cabinets. Ce bellicisme rhétorique a ceci de spécialement repoussant que ses partisans sont certes prodigues, mais le plus souvent du sang des autres. Le pathos de cette proposition de résolution parvient même à occulter l’authentique tragédie humaine à laquelle il prétend nous rendre sensibles : le sort du peuple ukrainien, accablé par la guerre en cours.
Je regrette de devoir m’attarder sur le style d’un texte. Ces considérations sont forcément abstraites et même quelque peu dérisoires en regard de la mort, du viol et de l’exil de dizaines de milliers de personnes. Mais que faire d’autre puisque le texte est vide ou presque, émaillé de pétitions de principes, d’effets de manche, d’exagérations, de généralisations et de sophismes plus ou moins sournois ? Vous avez lâché la bride à l’émotion et la raison se traîne loin derrière.
S’agissant de la guerre en Ukraine, il y avait pourtant tellement à dire,… On vous écoute ! …tant de questions demeurant en suspens. Pourquoi se contenter d’un propos si étroit et sans nouveauté ? Ne voyez-vous donc aucune difficulté due aux choix qui ont été faits depuis le 24 février ? N’avez-vous donc aucun doute quand leurs conséquences pèsent si durement sur notre propre situation économique et sociale ? En vérité, vous ne vous demandez jamais quel monde façonne la politique de sanctions adoptée par l’Union européenne et par ce qu’assez imprudemment vous qualifiez de bloc occidental. Si on avait écouté Mélenchon, les Russes seraient à Kiev ! Vous ne vous demandez jamais pourquoi tant d’États réputés amis ont manifesté de si grandes réserves devant cette stratégie. Vous ne feignez même pas de vous demander à quelles conditions la guerre pourrait cesser ni à quelles conditions surtout elle pourrait ne pas revenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Nulle part vous ne dites d’où vient l’impuissance de l’ONU et du droit international : serait-ce parce que notre allié états-unien porte une responsabilité décisive dans cet état de fait en ayant, par exemple, envahi l’Irak ou bien notre pays en ayant fait une guerre illégale en Libye ? (Mêmes mouvements.) Vous ne vous demandez pas davantage comment nous pourrions œuvrer à la restauration d’un ordre international fondé sur le droit.
En outre, avec une candeur admirable, vous faites comme si ce despote qu’est Vladimir Poutine était une singularité absolue de notre temps plutôt qu’un avatar parmi d’autres des tyrans qui hantent le monde et dont vous saluez obséquieusement la plupart pour leur vendre des armes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.)
Vous ne mentionnez pas les opposants russes, qui auront pourtant nécessairement un rôle dans la résolution du conflit. Vous vantez l’accueil des réfugiés ukrainiens, mais vous ignorez que nombre d’entre eux ont souffert ces derniers mois de la fermeture de structures d’hébergement. Dans ma propre circonscription, à Montrouge, des familles ont été dispersées un peu partout en France sans véritable assistance, livrées à elles-mêmes, coupées de la solidarité qui s’était organisée pour elles. C’est inhumain ! Enfin, vous nous servez le catéchisme ordinaire et contradictoire selon lequel l’Europe doit devenir une puissance souveraine et que cela sera possible si sa sécurité est assurée par l’Otan. Je rappelle que la souveraineté européenne n’est qu’un hochet puisque la souveraineté appartient au peuple, comme le rappelle notre Constitution. Vous ne croyez pas en l’Europe et vous soutenez Poutine ! De surcroît, la prépondérance des États-Unis dans l’Otan interdit d’imaginer une quelconque souveraineté à l’entité qui lui déléguerait le soin de sa sécurité.
J’achève mon intervention en précisant que votre seule proposition concrète porte sur la sécurisation par la communauté internationale de la centrale de Zaporijjia. Bien sûr, nous la soutenons. Vous reprenez une proposition faite il y a des mois par Jean-Luc Mélenchon et que vous aviez accueillie à l’époque par des quolibets. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.) Par conséquent, considérant votre capacité à vous adapter et à changer, nous avons le droit d’espérer que vous finirez par quitter votre posture va-t-en guerre pour un réel souci de construire la paix. (Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent.) Qu’allez-vous voter ? La parole est à Mme Nathalie Serre. Le 24 février au matin, nous avons découvert incrédules que, durant la nuit, la Russie avait lancé une offensive militaire majeure contre son voisin ukrainien. Les signes avant-coureurs existaient depuis un certain temps, mais il faut reconnaître que nous étions nombreux à ne pas avoir cru que le président russe entraînerait notre continent, si souvent meurtri par le passé, dans une nouvelle guerre fratricide. Presque dix mois après, les Ukrainiens vivent toujours sous les bombes, en partie sans eau ni électricité, et sans chauffage, à l’orée d’un hiver souvent glacial dans ces régions. Ils sont très courageux ! Des milliers d’entre eux sont morts, des millions d’autres ont fui cette folie meurtrière que nous pensions – sans doute naïvement – bannie à tout jamais de notre continent. Un peuple entier qui vivait globalement selon nos standards de développement européen s’est retrouvé, du jour au lendemain, confronté aux bombardements massifs, aux sirènes d’alerte, à l’occupation, aux pillages, au chantage nucléaire, aux déportations de population et aux exactions les pires que l’on puisse imaginer : viols, tortures, assassinats.
En premier lieu, il convient de rendre un hommage appuyé au courage des Ukrainiens, à la résilience de ce peuple qui se bat chaque jour depuis des mois pour protéger sa terre. (Mme Maud Petit applaudit.) Car ne nous y trompons pas, les choses sont parfaitement claires : il y a un pays agresseur, la Russie, et un pays agressé, l’Ukraine. Les digressions historiques, les prises de recul parfois nécessaires et les tentatives d’explication ne changeront rien à cet état de fait indéniable.
Les conséquences de ce conflit se font sentir non seulement chez le peuple ukrainien puisque l’ensemble de notre continent est touché à divers degrés, mais aussi ailleurs dans le monde, dans les contrées qui dépendent de la production agricole ukrainienne pour leurs besoins alimentaires quotidiens et vitaux. Comme la crise du covid, ce conflit à nos frontières nous a fait réaliser combien nous vivions dans un monde interdépendant et combien nos sociétés ouvertes, démocratiques et libres pouvaient être fragiles : dépendance massive aux énergies et aux matières premières provenant de la Russie, faiblesse de notre outil de défense face à un conflit de haute intensité dont certains d’entre nous pressentaient la possibilité sans que nous ayons encore eu le temps de nous y préparer pleinement. À ce titre, le groupe Les Républicains sera particulièrement attentif à la prochaine loi de programmation militaire qui devra concrétiser notre prise de conscience de cette faiblesse.
Ce conflit nous interroge par ailleurs sur nos propres capacités de résilience : aurions-nous le même courage que les Ukrainiens pour défendre notre pays ? Car notre situation à ce jour n’est pas difficile : nous sommes réunis en ce début de soirée pour discuter et adopter une proposition de résolution affirmant le soutien de notre assemblée à l’Ukraine et condamnant la guerre menée par la fédération de Russie – tout cela dans la douce température de 19 degrés recommandée par le Gouvernement, comme en attestent les thermomètres installés dans les bureaux de l’Assemblée depuis quelques jours…
Les députés du groupe Les Républicains voteront cette proposition de résolution proposée par nos collègues de la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Voilà des députés responsables ! Ce vote reste bien entendu symbolique, mais il permet à l’Assemblée nationale de marquer une nouvelle fois son soutien à l’Ukraine. Je souhaite par ailleurs rappeler que notre objectif, le seul qui vaille au fond, est que cette guerre cesse. Nous savons tous qu’elle finira un jour. Mais ce n’est pas à nous de fixer les conditions pour que les Ukrainiens et les Russes s’installent autour d’une table. En revanche, notre groupe soutient de manière particulièrement ferme la proposition de la résolution invitant « le Gouvernement et l’Union européenne à favoriser toute initiative de nature à encourager la fin du conflit dans le respect de la souveraineté de l’Ukraine ».
Nous sommes dans l’opposition et pourtant, nous l’avons dit à plusieurs reprises, nous pensons que le Président de la République a eu raison de tenter de maintenir le dialogue avec la fédération de Russie. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RE. – Mme Maud Petit applaudit également.) Cela n’a aucunement empêché de faire preuve de fermeté en matière de sanctions, ni de livrer armes et matériels divers aux Ukrainiens, ni de condamner avec la plus grande fermeté les agissements criminels de l’armée d’occupation russe, ni de mobiliser nos forces armées au sein de l’Otan, ni à l’Union européenne de rester unie. La France doit peser sur tous ces sujets à l’occasion de la visite d’État du Président de la République aux États-Unis : il doit porter la voix ferme et singulière de notre pays. Elle a raison ! Mes chers collègues, nous n’avons pas, hélas, fini de découvrir les conséquences à long terme de ce 24 février 2022. Mais une nouvelle ère s’est ouverte pour notre pays et pour notre continent, clôturant les années de paix que nous avons connues à l’Ouest en oubliant que certains de nos partenaires avaient vécu des décennies dans l’oppression politique et totalitaire. Notre prochain grand défi sera d’aider l’Ukraine à se reconstruire : à nous d’y participer, dans l’intérêt du peuple ukrainien et du peuple européen. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RE. – Mme Maud Petit applaudit également.) La parole est à Mme Maud Gatel. Je voudrais très sincèrement vous remercier, monsieur le président de la commission des affaires européennes, de nous donner l’occasion aujourd’hui de voter une résolution qui affirme le soutien de notre assemblée à l’Ukraine.
Lors des précédents débats tenus sur le sujet à l’initiative du Gouvernement, Jean-Louis Bourlanges et Frédéric Petit ont rappelé notre position : les députés du groupe Démocrate sont et resteront aux côtés du peuple ukrainien dans son combat pour la liberté. Ce soutien indéfectible et ancien puisqu’il date de la révolution de 2004, se retrouve dans les couleurs de notre famille politique – l’orange symbolisant la démocratie ukrainienne –, mais aussi et surtout dans les actes de nos élus dans cette assemblée comme au Parlement européen où nos collègues de L’Europe ensemble ont soutenu toutes les aides financières décidées en faveur de l’Ukraine, les sanctions contre la Russie ou encore récemment la reconnaissance de cette dernière comme un État soutenant le terrorisme, à la différence du RN et de LFI qui n’ont pas jugé utile de voter pour cette prise de position forte. Lorsqu’on se prétend défenseur de la démocratie, il faut savoir aligner les actes sur les paroles. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.) Et Macron ? Les mêmes qui affichent leurs scrupules lorsqu’il s’agit de voter un soutien effectif aux Ukrainiens sont aussi les premiers à critiquer la réaction européenne et française, comme nous le voyons encore ce soir. Il faut rappeler que l’Union européenne et ses États membres ont été au rendez-vous pour soutenir nos voisins ukrainiens par la prise de sanctions inédites, dans un temps record, contre les dirigeants russes, et par le soutien financier, militaire et humanitaire ou encore par l’accueil de réfugiés qu’il faudra pérenniser.
Les Européens ont répondu présents. Alors que la Facilité européenne pour la paix a fourni une aide à hauteur de 8 milliards d’euros jusqu’ici, aide qui se poursuivra en 2023, les pays ont également contribué individuellement. C’est le cas de la France avec ses fameux canons Caesar – camions équipés d’un système d’artillerie –, ses missiles Milan et Crotale ou encore avec ses véhicules blindés. À cet effort s’ajoutera en 2023 une aide exceptionnelle de 200 millions d’euros sous forme d’équipements militaires français, un renforcement du soutien à l’Ukraine que nous avons souhaité dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Après plus de neuf mois de guerre, je pense aux centaines de milliers de familles ukrainiennes qui sont aujourd’hui privées d’eau, d’électricité et de chauffage à la veille d’un hiver si rude. Je forme le vœu que notre pays fournisse aussi à l’Ukraine une assistance technique garantissant à sa population un accès aux biens de première nécessité, ce qu’il a déjà commencé à faire en envoyant, il y a quelques jours, 100 générateurs électriques. Ce soutien inébranlable, couplé à l’extraordinaire courage des Ukrainiens, permet aujourd’hui à l’Ukraine de regagner du terrain en infligeant des défaites à celle qui se présentait jusqu’alors comme la deuxième armée du monde.
Cette guerre a certes révélé des dissensions dans la famille européenne, du fait notamment de la grande dépendance énergétique de certains de ses membres, bien plus forte que dans notre pays. Mais ce conflit de haute intensité a surtout démontré une volonté d’agir ensemble pour relever les défis sur le plan diplomatique, ainsi que les défis de l’indépendance énergétique et de la transition écologique. Ce besoin d’union n’a d’ailleurs pas échappé aux Ukrainiens, qui savent que la construction d’un ensemble fort, indépendant et démocratique est la seule réponse aux problèmes d’aujourd’hui.
Enfin, mes chers collègues, les horreurs de ce conflit mettent à l’épreuve notre humanité et nos valeurs. Quoi qu’en disent certains poutinophiles, nous n’oublierons pas les victimes civiles, les blessés, les femmes violées, les enfants arrachés à leurs parents. N’oublions pas Boutcha, n’oublions pas les crèches, les écoles, les hôpitaux bombardés – des crimes de guerre qui devront être jugés.
Bien évidemment, les députés Démocrates soutiendront cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.) La parole est à M. Alain David. Après que l’armée ukrainienne a repris des territoires du nord du pays, en particulier la ville stratégique de Kherson, le conflit s’est encore durci : l’armée russe mène de nombreuses attaques contre les infrastructures à l’approche de l’hiver et vise désormais intentionnellement les populations civiles.
Ce revirement dans la dynamique du conflit au profit de l’armée ukrainienne est en partie dû au soutien militaire des pays occidentaux, mais il s’explique bien sûr par le courage et l’engagement du peuple ukrainien et de son président.
Alors que les États-Unis et les États européens s’étaient montrés prudents, lors les premières semaines de la guerre, dans leur volonté de fournir un soutien militaire à l’Ukraine, les succès importants des opérations militaires et les gains territoriaux obtenus depuis par l’armée ukrainienne ont permis une véritable montée en puissance du soutien des États-Unis, des alliés de l’Otan et des États européens.
Face à l’agression armée de la Russie, l’Otan a réactivé ses plans militaires au mois de février dernier, et elle a renforcé sa posture de défense en mobilisant, notamment aux frontières, une force de réaction de 40 000 soldats. Lors du sommet de l’Otan qui s’est tenu du 27 au 30 juin 2022, les chefs d’État et de gouvernement ont décidé de porter bien au-dessus de 300 000 soldats sa force de réaction, force multinationale à haut niveau de préparation.
S’agissant du soutien économique, l’Union européenne a fourni à l’Ukraine, en 2022, une aide exceptionnelle de 9 milliards d’euros. Un montant de 867 millions d’euros lui a également été attribué pour la mise en œuvre de projets humanitaires en faveur des civils touchés par la guerre, et facilitant l’accès aux biens et services de base. Pour l’année 2023, le gouvernement ukrainien évalue ses besoins de financement à 3 à 4 milliards d’euros par mois. Ce soutien financier sera assuré principalement par l’Union européenne, les États-Unis et les institutions financières internationales. La présidente de la Commission européenne a ainsi annoncé une aide de près de 18 milliards d’euros en 2023, soit 1,5 milliard d’euros par mois. Depuis le début du conflit, la Banque mondiale a déjà débloqué une aide de 17,8 milliards d’euros dans le cadre de son programme Peace.
L’Union européenne a adopté sept trains de sanctions contre la Russie, dont le dernier en réaction aux déclarations russes sur l’éventualité d’une frappe nucléaire. Ont été décidées des limitations partielles d’accès aux marchés primaires et secondaires des capitaux, une interdiction pour certaines banques de recourir au système Swift, une interdiction d’importation de charbon et de pétrole, et une interdiction d’émission de certains médias russes.
Le gouvernement français a longtemps privilégié le maintien d’un canal de discussion diplomatique entre chefs d’État, qui n’a pas obtenu beaucoup de résultats et s’est finalement révélé infructueux. Sa position n’est pas encore tout à fait claire quant à savoir si l’Ukraine doit recouvrer ses frontières internationalement reconnues de 1991 ou si elle doit se conformer aux frontières qui étaient les siennes à la veille du 24 février 2022. En ce qui nous concerne, nous pensons que les Ukrainiens doivent décider.
La France a livré à l’Ukraine des canons Caesar qui se sont révélés déterminants sur le terrain. Elle a récemment accru son soutien avec l’envoi de lance-roquettes et de deux batteries de défense antiaérienne Crotale. Outre son soutien matériel, la France contribue à hauteur de 550 millions d’euros à la Facilité européenne pour la paix de l’Union européenne.
La présente proposition de résolution couvre un champ de sujets assez étendu. Cependant, sur certains points, d’autres propositions de résolution proposaient d’aller plus loin et faisaient état de dispositions plus approfondies. C’est le cas notamment pour ce qui concerne les condamnations des violations du droit international humanitaire, l’extension des sanctions à l’égard de la Russie comme à l’égard des entreprises françaises dont l’activité bénéficie à l’effort de guerre russe, ou les mesures pour lutter contre la guerre d’influence et la diffusion des médias russes dans l’espace européen.
Sur les autres points, on note une large convergence, y compris sur les questions territoriales relatives à l’objectif de revenir aux frontières internationalement reconnues de l’Ukraine. C’est pourquoi, avec mes collègues du groupe des députés Socialistes et apparentés, nous voterons évidemment ce texte. Nous assurons le peuple ukrainien de notre soutien et de notre solidarité en saluant le courage dont il fait preuve face à l’agression russe. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à Mme Stéphanie Kochert. Cela fait maintenant neuf mois que l’impensable a fait son retour sur le continent européen, neuf mois que le peuple ukrainien se bat sans relâche pour préserver son intégrité territoriale et défendre les fondements de notre démocratie, neuf mois que la fédération de Russie a renié l’ensemble de ses engagements internationaux en attaquant l’Ukraine.
Depuis le début du conflit, les Ukrainiens font preuve d’un courage absolu, que nous ne pouvons que saluer. Ce courage s’exprime sur le front et porte ses fruits. D’abord, l’invasion au nord a été repoussée, empêchant dans le même temps la prise hautement symbolique de Kiev. Plus récemment, c’est avec la même détermination qu’une partie du territoire injustement annexée par l’armée de Vladimir Poutine a été reprise.
Voilà donc neuf mois que la terreur russe frappe les populations civiles. Ces hommes, ces femmes et même ces enfants défendent inlassablement leur patrie au péril de leur vie. Car la réalité, c’est que les bombes qui pleuvent dans le ciel ukrainien ne se soucient pas d’arracher cruellement des parents à leur famille ou de tomber sur une maternité. Ces bombes, qui plongent l’Ukraine dans le froid et l’obscurité, font désormais planer la menace d’une catastrophe nucléaire qui toucherait au premier chef les habitants de Zaporijjia.
Notre devoir d’Européens est de ne pas laisser les Ukrainiens se battre seuls. Parce que nous tenons à la souveraineté des États et à la défense des démocraties européennes, nous avons apporté notre assistance à ce peuple et nous continuerons.
Il y a d’abord notre soutien militaire. La livraison d’armes qui permet aux Ukrainiens de se défendre doit se poursuivre.
Il y a aussi notre soutien face à un écocide car des terres, des sols et des rivières sont durablement pollués.
Il y a ensuite notre soutien diplomatique. La coordination de la France et de ses alliés au sein des organisations internationales doit être soulignée. L’Assemblée générale des Nations unies a condamné à une large majorité l’agression contre l’Ukraine. Même la Chine et l’Inde ont signé un texte condamnant le conflit et ses conséquences pour le commerce international.
Il y a enfin notre soutien humanitaire qui passe par le financement de la reconstruction du pays. L’Union européenne a alloué 485 millions d’euros d’aide humanitaire pour aider les civils touchés par la guerre. Au total, 13,4 millions de personnes ont d’ores et déjà bénéficié de cette aide. Nous avons également créé un mécanisme de protection temporaire pour les réfugiés et leurs enfants qui ont fui la guerre.
Parce que nous soutenons la démocratie ukrainienne, la Russie de Vladimir Poutine a décidé de mener contre nous une guerre hybride. Elle a tenté de nous désunir et de mettre à mal notre détermination. Ces tentatives sont vaines : systématiquement, nous avons su nous défendre. C’est vrai ! Face aux menaces portant sur notre indépendance énergétique, nous avons répliqué par un embargo sur le pétrole russe et par un plan ambitieux pour l’indépendance énergétique de l’Union européenne. Face aux stratégies de propagande les plus insidieuses qui mettent en péril la qualité des débats dans nos démocraties, la France et l’Europe ont réagi rapidement en l’imitant l’accès aux canaux de diffusion russes. Enfin, alors que nous commémorons les débuts du Holodomor qui a eu lieu il y a quatre-vingt-dix ans, la fédération de Russie menace maintenant la sécurité alimentaire mondiale. Nous avons mis en place des couloirs de solidarité pour permettre à l’Ukraine d’écouler les produits de son agriculture.
À cette guerre hybride s’ajoutent les trop nombreux et inacceptables crimes de guerre, exactions et violations des droits humains dont la Russie s’est rendue coupable pendant le conflit. Le bombardement de la maternité de Marioupol, le massacre de Boutcha, les fosses communes d’Izioum nous ramènent aux heures les plus sombres de notre histoire. La gendarmerie nationale est aux côtés des Ukrainiens pour collecter et conserver les preuves de ces crimes. Nous espérons que l’enquête de la Cour pénale internationale se poursuivra et sanctionnera les responsables de ces atrocités. La France doit continuer sa coopération en ce sens, avec les autorités ukrainiennes, afin que lumière soit faite.
Chers collègues, la situation humanitaire dramatique en Ukraine ne saurait tomber dans l’indifférence et l’oubli généralisés. L’enlisement du conflit ne doit pas décourager nos efforts. Plus que jamais, le peuple ukrainien a besoin de notre soutien. Nous devons sans cesse le réaffirmer. C’est au fond l’objet de cette proposition de résolution : l’Assemblée nationale réaffirme qu’elle est et restera aux côtés du peuple ukrainien. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem, ainsi que sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.) La parole est à Mme Cyrielle Chatelain. Je commencerai en ayant une pensée pour le peuple ukrainien, un peuple qui depuis maintenant neuf mois subit l’occupation, les bombardements, la privation, la torture, le viol et la mort ; un peuple qui, face à l’envahisseur, a su faire preuve d’héroïsme et de courage ; un peuple qui devra subir la rigueur de l’hiver souvent sans chauffage, sans électricité, parfois avec bien peu de nourriture ou sans eau potable courante.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a poussé un cri d’alarme. L’hiver sera meurtrier pour des millions de personnes en Ukraine. La Russie veut faire geler l’Ukraine. Elle prive les Ukrainiens d’énergie, elle les prive de soins, elle les prive de tout.
La moitié des infrastructures énergétiques sont soit endommagées, soit détruites. Les bombardements de stations d’épuration ont provoqué une pollution de l’eau, des centaines d’hôpitaux et d’établissements de soins ne sont plus opérationnels – quelque 700 d’entre eux ont été attaqués – et certains sols ont été contaminés.
Cette situation est le résultat des bombardements ininterrompus de la Russie contre les infrastructures énergétiques et les infrastructures publics ukrainiennes. Ces pratiques dessinent une stratégie russe de la terreur qui vise à faire faiblir la détermination ukrainienne. Pourtant, celle-ci ne vacille pas. Dans cette situation, l’accès à l’aide humanitaire est crucial, de même que la livraison des générateurs d’énergie.
Nous saluons la solidarité internationale, européenne et française qui s’est organisée pour venir en aide à l’Ukraine, pour fournir l’aide humanitaire et le matériel militaire. Face au retour de la guerre, l’Union européenne n’a pas failli. L’Europe a su être solidaire. Nous avons accueilli les millions de réfugiés ukrainiens arrachés à leur maison, à leur famille, à leurs proches. Cet accueil nous honore mais, surtout, il nous rappelle que personne ne quitte son foyer le cœur léger et que notre devoir est d’offrir protection et asile à toutes celles et à tous ceux qui en ont besoin.
L’Europe a également su dessiner l’embryon d’une Europe de la défense. Son soutien a été déterminant dans cette guerre et dans la capacité de l’Ukraine à faire face à Vladimir Poutine et à sa folie meurtrière. Ce sursaut des États européens ne doit pas faire oublier le manque de coordination et de mutualisation, et l’absence d’une politique de défense européenne structurée. Il ne doit pas nous faire oublier non plus qu’en 2014, nous avons dénoncé mais laissé se produire l’annexion illégitime et illégale de la Crimée. C’est l’invasion commencée en 2014 qui se poursuit aujourd’hui.
Dans un monde incertain, nous avons besoin de développer une politique étrangère et de défense européenne forte, cohérente, crédible et dissuasive. L’Europe de la défense est aujourd’hui indispensable pour garantir la paix, garantir notre souveraineté, notre intégrité géographique ainsi que notre autonomie diplomatique et stratégique à l’égard des grands blocs qui composent notre monde multipolaire.
De même, dans un monde incertain, l’indépendance, notamment énergétique, est cruciale. Aujourd’hui, le manque d’indépendance énergétique, les Français et les Françaises en paient littéralement la facture.
Malgré l’agressivité croissante manifestée par la Russie qui, comme d’autres régimes autoritaires, a pour seul objectif de fragiliser nos démocraties, nous n’avons rien fait, avant le déclenchement de cette guerre, pour mettre un terme à notre dépendance énergétique, notamment à l’égard du gaz et de l’uranium russes. Malheureusement, nous n’en sommes pas complètement sortis puisque, pas plus tard qu’hier matin, à Dunkerque, la France a reçu une livraison d’uranium russe. Nous devons cesser toute importation avec les Russes : continuer à leur importer de l’énergie, c’est leur donner du pouvoir.
Le soutien que nous apportons à l’Ukraine s’inscrit dans le cadre du droit ; il est fondé par le droit des peuples à s’autodéterminer. Si le groupe Écologiste s’apprête à voter la proposition de résolution, c’est non seulement pour soutenir le peuple ukrainien dans sa lutte contre un occupant illégitime et violent qui commet de nombreuses exactions, mais aussi pour soutenir les Russes qui s’opposent au régime autocrate de Vladimir Poutine et s’élèvent contre la guerre. C’est aussi pour rappeler à tous les États autoritaires que l’Europe et la France se tiennent aux côtés des peuples qui luttent pour leurs droits, leur autodétermination et leur aspiration à vivre libres. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et Dem.) La parole est à M. André Chassaigne. Écoutons la voix de la sagesse et de la paix ! Chers collègues de la majorité, par cette résolution, vous entendez apporter votre entière solidarité au peuple ukrainien dans sa lutte contre l’envahisseur. Les députés de mon groupe ne peuvent que soutenir cette solidarité indispensable. Je constate cependant que les attendus de cette résolution n’apportent rien de nouveau et la limitent dans une dimension symbolique qui n’est pas à la hauteur de ce que notre assemblée, si elle avait un peu d’ambition, pourrait préconiser à l’exécutif. Absolument ! En effet, la France accomplit déjà quasiment tout ce que vous demandez, qu’il s’agisse du soutien humanitaire à l’Ukraine, de l’accueil des réfugiés, de l’envoi d’aide, notamment militaire, de la dénonciation des faux référendums menés dans les régions du Donbass et de Donetsk, du renforcement de l’Otan ou de l’autonomie militaire européenne.
Après neuf mois de guerre, cette résolution n’aurait-elle pas dû prendre en considération l’avenir du conflit et faire scintiller les lumières de la paix ? Il semble qu’elle ne mentionne l’avenir qu’au prisme de la reconstruction du pays, attendue avec intérêt par les majors français et européens du bâtiment et des travaux publics. Ce n’est pas sérieux ! D’ailleurs, le 13 décembre prochain, l’exécutif tiendra une conférence qui a, entre autres objectifs, celui d’aider à reconstruire les infrastructures du pays.
Mais avant de reconstruire, ne faut-il pas construire ce qui est prioritaire, à savoir la paix ? (MM. Stéphane Peu et Frédéric Maillot applaudissent.) Je veux faire miens ces mots du pape François : « La paix ne peut se vendre ni s’acheter : elle est un don à recevoir avec patience et à construire ’’artisanalement’’ par des petits et grands gestes… » Construisons la paix, car un Poutine aura beau couper toutes les fleurs, il n’empêchera pas le printemps. Construisons la paix, car c’est elle qui permettra aux Ukrainiennes et aux Ukrainiens, ainsi qu’aux conscrits russes, de retrouver, si j’ose dire, une vie normale. (M. Aurélien Saintoul applaudit.)
Ce texte présente d’autres lacunes : il ne contient pas un mot de solidarité avec le peuple russe qui souffre le martyre par la faute de Vladimir Poutine, pas un mot sur les multiples emprisonnements politiques en Russie, qu’il s’agisse des pacifistes ou des mères de famille qui protestent contre la guerre ou la conscription des jeunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES.) Exactement ! Personne n’en a parlé ! La guerre détruit des vies, mais elle détruit également la planète. Pensez aux restes des explosifs qui pollueront les sols ukrainiens ! Nous aurions pu demander à l’exécutif d’engager des moyens pour assurer leur déminage et leur nettoyage. Cela permettrait, là encore, de préparer l’avenir.
La mise en place d’une cour pénale internationale, dont vous faites la demande, est une mesure essentielle que nous approuvons. Reste que nous devons lever un obstacle : la France a drastiquement limité sa compétence universelle qui lui permet d’arrêter un criminel de guerre étranger sur son sol. En effet, quatre règles strictes doivent être observées avant de déférer ce dernier en justice : l’obligation de prouver la résidence habituelle du suspect en France ; le principe de double incrimination, qui prescrit que l’on ne peut juger un individu que si la peine est reconnue également dans son pays d’origine ; le monopole des poursuites, en vertu duquel seul le ministère public peut se saisir d’une telle affaire ; l’inversion du principe de complémentarité, impliquant que la France ne peut poursuivre le suspect que si la Cour pénale internationale (CPI) a décliné sa compétence.
Ces quatre verrous font de la France un paradis pénal. Mon collègue Jean-Paul Lecoq avait à ce sujet alerté la commission des affaires étrangères, qui a fini par émettre l’idée d’une réforme permettant à la France de prendre toute sa part dans le processus de justice internationale qui s’imposera.
Enfin, la proposition de résolution aurait pu indiquer que la France allait tout mettre en œuvre sur le plan politique pour imposer un cessez-le-feu et l’ouverture de pourparlers de paix. Consolider la paix, c’est concevoir un cadre de sécurité collective incluant tous les pays européens, y compris la Russie et l’Ukraine. Car la Russie, même dirigée par un homme aussi dangereux que Vladimir Poutine, restera toujours un voisin : la géographie est implacable. Seul le peuple russe pourra, de ses propres mains, briser les lourdes chaînes dont il est prisonnier. (M. Stéphane Peu applaudit.)
Si cette résolution était véritablement tournée vers l’avenir, elle devrait encourager l’exécutif à travailler, plus qu’il ne fait déjà, à un cessez-le-feu immédiat en Ukraine et à l’ouverture de négociations, sous l’égide de l’ONU. À ce titre, pourquoi ne pas mobiliser une force d’interposition internationale ?
Nous nous désolidarisons de plusieurs considérants et attendus, notamment en ce qui concerne l’Otan, l’autonomie stratégique européenne et le ton belliqueux employé. Toutefois, nous réaffirmons avec force la souveraineté pleine du peuple ukrainien qui doit décider collectivement de ce qu’il va faire des territoires disputés et de l’opportunité d’entrer ou non dans l’Union européenne.
Notre vote positif sur cette résolution est un signal de solidarité au peuple ukrainien. Mais il nous oblige aussi à redoubler d’exigence sur les demandes que notre assemblée formule à l’exécutif : il faut non seulement que le Parlement soit force de proposition mais aussi qu’il soit respecté. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à M. Jean-Louis Bricout. En s’attaquant à l’Ukraine, la Russie a confirmé, et ce n’est pas une nouveauté, qu’elle bafouait les règles les plus fondamentales du droit international. L’annexion illégale de la Crimée, en 2014, n’était qu’un avertissement. Malgré sa posture victimaire, Vladimir Poutine ne trompe personne : l’agresseur, c’est bien la Russie !
La réalité, c’est que les troupes russes ciblent délibérément les civils.
La réalité, c’est que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) recense déjà plus de 6 000 civils tués et 10 000 blessés. À ce funeste cortège s’ajoutent les centaines de milliers de déplacés ukrainiens qui tentent de trouver refuge partout en Europe : rien qu’en France, on en compte 100 000 ! Certains d’entre eux sont repartis en Ukraine, d’autres ont choisi de rester. Je salue ici la belle solidarité dont ont fait preuve nos concitoyens qui ont accueilli ces réfugiés.
La réalité, c’est que le pouvoir russe cible systématiquement les infrastructures civiles, notamment les hôpitaux, les transports et les lieux de production d’énergie. Oui, les déplacements forcés, notamment d’enfants depuis la débâcle de Kherson, nous sont insupportables ! Oui, les viols et la torture sont une abomination qui doit cesser ! Oui, ces crimes de guerre ne peuvent rester impunis ! C’est la raison pour laquelle la France a envoyé en Ukraine des experts de la gendarmerie, en particulier à Boutcha, ce qui permettra de recueillir les preuves nécessaires à un futur procès – voilà une coopération salutaire !
Ce sont près de 6 millions de civils qui sont aujourd’hui concernés par les coupures d’électricité en Ukraine et en Moldavie – conséquence du ciblage systématique des infrastructures énergétiques, conséquence d’une stratégie désespérée, conséquence aussi des choix de Vladimir Poutine et de son état-major. Cet hiver, il faut que notre soutien soit plus puissant encore : nous ne devons plus seulement fournir du matériel militaire et un appui diplomatique à Kiev ; nous devons aussi proposer un plan de reconstruction sur le long terme.
À cet égard, réjouissons-nous que le Parlement européen ait voté une aide de 18 milliards d’euros au bénéfice de l’Ukraine. Félicitons-nous également que la France organise, le 13 décembre prochain, une conférence internationale pour créer les conditions d’une aide énergétique. Saluons enfin la pérennisation de l’initiative céréalière de la mer Noire – on parle de l’exportation de plus de 15 millions de tonnes de denrées alimentaires ukrainiennes – et le programme Grain from Ukraine , grâce auquel l’Ukraine concourt à la sécurité alimentaire mondiale.
Toutes ces mesures et ces formes de coopération permettront à l’Ukraine d’être dans la meilleure position possible pour négocier les conditions de la paix. Lors du sommet du G20, qui s’est tenu ce mois-ci à Bali, le président Zelensky n’a pas dit autre chose, appelant chacun des pays présents à peser de tout son poids pour mettre fin à cette guerre destructrice, engagée unilatéralement par la Russie.
Il nous faut cependant rester vigilants, tant les équilibres sont fragiles ! Les adhésions de la Suède et de la Finlande à l’Otan ne sont pas encore effectives. La centrale nucléaire de Zaporijjia reste le théâtre d’opérations, si bien que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) doit constamment lutter pour assurer sa protection. Notre engagement ne peut se faire sans trouver des alternatives aux approvisionnements russes qui, jusqu’alors, représentaient la moitié des importations européennes de gaz et près du quart des importations de pétrole. Les pays qui ont su réduire de 20 % leur dépendance aux importations de gaz russe, comme l’Autriche, nous montrent la voie à suivre.
Enfin, condamner la Russie doit nous amener à condamner tout aussi fermement la Biélorussie d’Alexandre Loukachenko, qui a permis l’attaque de l’Ukraine par le nord.
Parce que notre soutien au peuple ukrainien est le moteur de sa résistance héroïque, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires votera avec force et conviction la présente résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et SOC, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Bravo ! La parole est à Mme Emmanuelle Ménard. Il est des temps où les hésitations sont des trahisons, où les tergiversations sont des abandons, où les faux questionnements sont des lâchetés. Nous vivons un de ces temps.
L’Ukraine a besoin de nous, et nous avons besoin d’elle. Tout le reste n’est que rhétorique, petit calcul politicien ou, pour les cyniques de toujours, du réalisme à l’arrière-goût munichois. Il est des temps où l’on doit choisir son camp, où l’on fait corps, où l’on ne mégote pas son soutien ; des temps où le monde se partage en deux sans qu’il y ait de troisième voie. Nous vivons un de ces temps.
Comment faut-il le dire ? Au risque de se répéter, l’avenir de l’Europe – de notre Europe – se joue là-bas, sur les rives de la Dniepr. En effet, après avoir répété qu’elle était impensable, inenvisageable, impossible, l’Union européenne a découvert, stupéfaite et démunie, qu’une guerre conventionnelle et de haute intensité se déroulait à ses frontières, alors qu’elle n’y était pas préparée et était encore moins armée. Cette impréparation des États européens pose d’ailleurs quelques questions, d’abord en termes de solidarité. « Nous n’avons pas à rougir de ce qui est fait », a assuré le ministre Sébastien Lecornu, ajoutant que « nous allons continuer à aider l’Ukraine aussi longtemps que le conflit durera ».
Et pourtant ! Les données enfin communiquées par le Gouvernement permettent d’utiles comparaisons avec nos voisins – notamment l’Allemagne et le Royaume-Uni – qui malheureusement ne sont pas vraiment à notre avantage. Nous apprenons ainsi que la France a formé 400 militaires ukrainiens. En neuf mois de conflit, vous avouerez que cela ne pèse pas lourd, sachant que plus d’un demi-million de soldats ukrainiens sont actuellement engagés ! Outre-Rhin, plus de 700 soldats ukrainiens ont reçu une formation, soit presque deux fois plus qu’en France ! Et que dire du Royaume-Uni ? C’est l’un des pays, après les États-Unis, qui soutient le plus l’Ukraine. Notez qu’il a déjà formé plus de 7 400 recrues et qu’il forme actuellement 1 900 soldats supplémentaires.
On se souvient, en octobre dernier, de la vidéo dans laquelle le président ukrainien nous demandait de l’aide militaire mais soulignait, de facto , le rôle modeste, voire très modeste joué par la France en ce domaine, quels que soient les critères – matériels ou humains – pris en considération. Ce n’est pas tout à fait ce qu’il a dit ! Heureusement, un fonds de soutien – initialement de 100 millions d’euros, puis porté à 200 millions d’euros – a été voté par notre Parlement. Il permet aux Ukrainiens de passer des commandes d’équipement aux entreprises françaises, et d’assurer l’entretien et la maintenance des systèmes déjà livrés. Dans ce cadre, nous devons absolument renforcer notre autonomie en termes d’équipement militaire en pesant de tout notre poids pour que l’Europe privilégie les armements européens plutôt qu’américains, par exemple, ainsi qu’en donnant de vrais moyens à notre armée par le biais de la nouvelle loi de programmation militaire attendue cet hiver au Parlement,… Chers collègues, je vous invite à écouter l’oratrice. …laquelle fixera pour les six prochaines années la trajectoire des moyens alloués à la défense de la France. Devant la montée des tensions à l’international et la guerre en Ukraine, qui posent le problème de l’indépendance stratégique de la France, le rejet par Emmanuel Macron du cadrage budgétaire proposé par l’état-major français n’est pas bon signe.
Peut-être serait-il temps également d’accepter de regarder en face la nouvelle utilité de l’OTAN, loin de l’état de « mort cérébrale » qu’on lui prêtait et qui se révèle au contraire, depuis l’agression russe, indispensable à la défense de l’Europe. En effet, elle a contribué à empêcher toute extension du conflit hors de l’Ukraine. L’arrivée prochaine de la Suède et de la Finlande en son sein renforcera la continuité géographique du bloc occidental européen face à celui des États autoritaires. Il faut l’admettre, on est loin aujourd’hui du « machin » de 1966.
Pour finir, je voudrais, du haut de cette tribune où tant d’hommes et de femmes ont plaidé, depuis tant d’années, pour les droits de l’homme et du citoyen, dire à nos amis ukrainiens que nous sommes avec eux, aujourd’hui et demain. Notre pays, mon pays, qui a incarné et incarne toujours la liberté, la liberté des peuples, est à leurs côtés. Alors, du haut de cette tribune, je veux leur dire : Vive la liberté ! Vive l’Ukraine ! Vive l’Ukraine libre ! Jive vilna Ukraïna ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, LR, Dem, HOR et GDR-NUPES.) La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux. La proposition de résolution dont nous débattons aujourd’hui porte sur un enjeu crucial pour la France, pour l’avenir du continent européen et pour la stabilité du monde. Je réaffirme devant vous le soutien indéfectible de la France à l’Ukraine. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem, HOR et sur plusieurs bancs du groupe GDR-NUPES.)
L’agression russe en Ukraine, déclenchée le 24 février dernier, a marqué le retour de la guerre sur le continent européen ; de plus, il s’agit d’une guerre impliquant un État doté de l’arme nucléaire. Par cet acte gravissime, la Russie viole délibérément les règles fondamentales du droit international (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE) , notamment les principes fondateurs de la Charte des Nations unies que sont la souveraineté des États et le respect de leur intégrité territoriale. Cette invasion et ses objectifs portent directement atteinte à l’existence de l’Ukraine en tant que nation indépendante libre de choisir son destin. Mes chers collègues, je vous demande d’écouter Mme la secrétaire d’État. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem, SOC et HOR.) L’annexion illégale de quatre régions ukrainiennes début octobre, à l’issue de simulacres de référendum, n’a fait qu’aggraver cette situation. Elle démontre et confirme le mépris de la Russie pour l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine.
Mais, dans cet acte d’agression, la Russie a connu une série de revers. La succession d’échecs russes a mis en lumière les limites de son appareil militaire : l’armée russe s’est montrée incapable de prendre Kiev et s’est retirée du nord du pays en avril ; elle est toujours incapable de s’emparer de l’ensemble du Donbass, malgré le caractère prioritaire de cet objectif pour l’armée russe et ses supplétifs ; en septembre, la contre-offensive ukrainienne a repoussé la Russie de la région de Kharkiv ; enfin, face à la résilience ukrainienne, l’armée russe a dû se retirer de Kherson mi-novembre. Cette dernière défaite est majeure, sur le plan militaire comme politique : la Russie perd ainsi l’unique capitale régionale conquise, puis prétendument annexée depuis février. L’Ukraine a montré qu’elle pouvait reprendre l’ascendant face à l’envahisseur russe. Elle l’a fait en s’appuyant sur la résilience exceptionnelle de son peuple, sur la bravoure et la détermination de ses soldats et sur les équipements sophistiqués que nous lui avons livrés avec nos alliés. Et la stratégie ? Vous pourriez nous en parler ! Depuis que l’Ukraine a repris l’ascendant militaire, la Russie a opté pour une stratégie lâche et cynique, la fuite en avant, qui vise à semer la terreur, à mettre l’Ukraine à genoux, à faire de la souffrance du peuple ukrainien une arme de guerre. Pour cela, la Russie vise systématiquement les infrastructures critiques, pour les détruire et mettre en péril la population ukrainienne. Quelle est la vision de la France ? Vous ne faites que décrire la situation ! (« Chut ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.) À chaque victoire de l’Ukraine, la Russie réplique par de nouveaux bombardements ciblant spécifiquement des infrastructures critiques. Ces frappes n’ont qu’un but : priver la population ukrainienne d’électricité, de chauffage et même d’eau – cela en plein hiver. Toutes ces infrastructures sont indispensables à la survie de la population civile pendant l’hiver. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe RE.)
Ces frappes de représailles visant délibérément les civils sont intolérables. Nous le redisons : la Russie ne parviendra pas à briser la résistance du peuple ukrainien. Celui-ci se bat pour sa liberté.
Dans cette lutte, l’Ukraine n’est pas seule. Nous nous tenons à ses côtés et continuerons de le faire. Dès le début de cette agression, que nous avons cherché à éviter jusqu’au dernier moment, la France s’est placée du côté du respect du droit. Nous soutenons pleinement l’Ukraine et l’exercice de sa légitime défense. Nous lui avons livré des équipements militaires qui jouent un rôle majeur pour appuyer sa contre-offensive. Je pense notamment aux dix-huit canons Caesar, mais aussi aux lance-roquettes unitaires qui ont été livrés hier. Très bien ! Nous continuerons cet effort, en particulier dans le domaine antiaérien, essentiel pour protéger la population des frappes russes. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.) Des systèmes Crotale seront livrés dans les tout prochains jours. Nous avons aussi contribué au lancement de la mission d’assistance militaire de l’Union européenne en soutien à l’Ukraine. Le ministre des armées, Sébastien Lecornu, a annoncé que nous allions former 2 000 soldats ukrainiens. Pour un pays comme la France, c’est à pleurer ! Vous nous lisez les pages du Monde . Où est la stratégie de la France ? Nous sommes également l’un des plus importants contributeurs à la Facilité européenne pour la paix, qui apporte un soutien en équipement militaire létal inédit au niveau européen. Nous pouvons donc être fiers de notre soutien militaire à l’Ukraine (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR) ; les Ukrainiens nous en sont d’ailleurs très reconnaissants. Mais notre aide ne se limite évidemment pas au domaine militaire.
Notre soutien est aussi civil et humanitaire, pour faire face à l’urgence et préparer la reconstruction. Nous consacrons à l’Ukraine un total de 2 milliards d’euros d’aide civile et humanitaire bilatérale. Dans le secteur humanitaire, nous avons consacré 200 millions d’euros pour financer des actions en Ukraine et dans les pays limitrophes. La semaine dernière encore, nous avons accueilli à Paris, sous l’égide du Président de la République, une nouvelle conférence de soutien à la Moldavie, qui se trouve en première ligne. (M. Jean-Charles Larsonneur applaudit.)
Le Centre de crise et de soutien a mené une trentaine d’opérations qui ont permis d’acheminer près de 2 400 tonnes d’aide, dont 1 000 tonnes pour la seule opération « Un bateau pour l’Ukraine » ; ce sont chaque fois des équipements indispensables en matière de sécurité civile, d’aide médicale et alimentaire ou de réhabilitation d’urgence, notamment des ponts mobiles pour la région de Tchernihiv. Enfin, face aux frappes actuelles, nous répondons aux besoins urgents de l’Ukraine pour passer l’hiver. C’est pour cela que nous venons d’envoyer 100 générateurs électriques sur place. Nous allons voter pour la résolution, mais franchement… Heureusement que nous avions pris notre décision avant d’écouter la secrétaire d’État ! Au-delà de l’effort humanitaire, nous avons également octroyé des prêts de 400 millions d’euros par l’intermédiaire de l’Agence française de développement et fléché 1,2 milliard d’euros vers des garanties à l’export bénéficiant à un large spectre de projets essentiels à la reconstruction de l’Ukraine. En parallèle, nous mobilisons, avec nos partenaires européens et internationaux, nos principaux instruments multilatéraux, à la fois pour répondre à l’urgence et pour préparer la reconstruction. Afin de poursuivre ces efforts et de mieux les coordonner au niveau international, le Président de la République accueillera le 13 décembre prochain, avec le président Zelensky, une conférence sur la résilience civile de l’Ukraine. Très bonne initiative ! Une paix durable ne sera pas obtenue si la justice n’est pas rendue, et la France apporte un soutien précieux aux autorités ukrainiennes dans leur lutte contre l’impunité. Nous soutenons les enquêtes de l’Ukraine, de la Cour pénale internationale et d’Eurojust afin de contribuer à la collecte des preuves de crime de guerre : nous avons envoyé trois équipes de médecins légistes et de gendarmes à Boutcha en avril, à Kiev fin juin, et dans la région de Kharkiv fin septembre, et nous entendons poursuivre ces missions. Nous avons également fourni deux laboratoires d’analyse ADN, dont le second sera transféré en Ukraine dans les prochains mois.
Mesdames et messieurs les députés, soyez assurés du soutien indéfectible que continuera d’apporter la France à l’Ukraine dans tous les domaines, aussi longtemps qu’il le faudra. (Mmes et MM. les députés des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que plusieurs membres des groupes SOC et Écolo-NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) La conférence des présidents a décidé qu’il serait procédé à un scrutin public sur la proposition de résolution.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Ce vote intervient à un moment crucial de la guerre. Alors que l’hiver est là, l’armée russe a intensifié ses frappes sur nombre de villes ukrainiennes, visant délibérément des installations énergétiques et bien d’autres cibles civiles.
Force est aujourd’hui de constater que l’armée russe, défaite sur le champ de bataille, s’en prend avec cruauté à la population ukrainienne. Des pluies de missiles et de drones meurtriers s’abattent chaque jour sur le pays. Rien n’est épargné : ni les immeubles d’habitation ni les écoles ni les maternités ni les hôpitaux, selon une stratégie de terreur conçue, planifiée et organisée par le Kremlin. Terroriser la population civile pour qu’elle cède, se servir de l’hiver comme d’une arme de guerre : voilà le projet barbare et inacceptable de la Russie qui rappelle les heures les plus sombres de l’obscurantisme. Il a raison ! Soyons-en certains : même plongé dans le froid et le noir, le peuple ukrainien combattra à la lumière de son courage et de sa résistance et survivra. Mais il n’oubliera pas. Et il est de notre devoir, à nous, Français, de ne pas oublier non plus les atrocités dont il a été victime : le bombardement de la gare de Kramatorsk, celui du théâtre de Marioupol qui abritait des enfants ou la destruction de Lyman, Sievierodonetsk, Marioupol et bien d’autres villes.
Souvenons-nous aussi des massacres d’Izioum et de Boutcha – parmi d’autres – et de toutes les salles de torture qui, dans les zones envahies, sont la signature des mercenaires russes. Souvenons-nous des déportations, orchestrées par le pouvoir russe, d’enfants et d’adolescents. Souvenons-nous des viols innombrables. Souvenons-nous de Kherson, ville libérée mais aujourd’hui martyrisée, en représailles évidemment préméditées.
Les crimes de guerre perpétrés par la Russie de Poutine sont pléthore. Et ils ne sont pas le fait de dérapages de soldats perdus dans le brouillard de la guerre. Ils sont commandités et intentionnels. Face à ce mal incommensurable, la justice devra passer. C’est aussi ce que nous voulons affirmer avec cette résolution. Il viendra immanquablement, ce jour où les responsables de ces crimes et leurs complices devront rendre des comptes devant la justice internationale. (Mêmes mouvements.)
Nous avons la conviction, madame la secrétaire d’État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux, que nous devons travailler à la création d’un tribunal spécial pour la répression du crime d’agression contre l’Ukraine. Exactement ! La France, avec ses partenaires européens, aide l’Ukraine depuis le premier jour. Le 13 décembre prochain, à l’initiative du Président de la République, notre pays accueillera une conférence internationale pour soutenir la résistance et la résilience de la nation ukrainienne.
Cependant, le vote de notre assemblée est attendu car il affirmera, de façon symbolique, la solidarité de toute la nation française avec le peuple ukrainien. Il sera aussi un message envoyé au Kremlin pour lui dire que nous soutenons toujours les livraisons d’armes et les sanctions contre Moscou et que nous demandons au Gouvernement de les poursuivre. Eh oui, bravo ! Il nous permettra aussi de dire que les Français resteront aux côtés de l’Ukraine jusqu’au bout, jusqu’à ce qu’elle ait recouvré son intégrité territoriale et sa souveraineté, jusqu’à ce que le dernier soldat russe ait quitté son territoire. (Mêmes mouvements.)
Nous savons bien que l’Ukraine est une cible parce qu’elle croit en la démocratie libérale, respectueuse de l’individu, des minorités et des droits fondamentaux, et parce qu’elle partage nos valeurs européennes. Dans notre for intérieur, nous savons aussi que nous ne trouverons la paix en Europe que dans la défaite du régime de Vladimir Poutine, lequel, en martyrisant l’Ukraine, cherche à anéantir la liberté, la démocratie et nos valeurs, et à redéfinir l’ordre de sécurité à sa manière sur notre continent.
Quand je dis « nous », je suis volontairement optimiste car je sais bien en réalité que dans cet hémicycle, malheureusement, Vladimir Poutine compte encore un certain nombre de soutiens… Eh oui ! …qui condamnent verbalement cette guerre mais s’opposent systématiquement aux livraisons d’armes et aux sanctions contre la Russie. La semaine dernière, au moment où celle-ci bombardait massivement l’Ukraine, les élus du Rassemblement national votaient au Parlement européen contre une résolution condamnant la Russie et ceux de la France insoumise s’abstenaient. Exactement ! C’est une honte ! Il faudrait peut-être chercher la paix ! Aujourd’hui, vous qui, au sein de ces deux formations, vous réclamez des valeurs de la République, de la liberté et de la paix, aurez-vous le courage de soutenir le peuple ukrainien dans son martyr en votant ce texte, le courage de condamner les crimes de la Russie, le courage d’appeler à plus de livraisons d’armes et de sanctions ? Ou ferez-vous la même erreur, au regard de l’histoire, que vos collègues qui siègent à Strasbourg et ont refusé de voter en faveur du soutien financier qui doit aider l’Ukraine à passer l’hiver ?
Nous avons fait le choix de soutenir l’Ukraine et d’ouvrir pour elle le chemin de l’intégration à l’Union européenne. Continuons sur cette voie qui nous honore et aujourd’hui, avec ce vote, affirmons le soutien indéfectible du peuple français au peuple ukrainien qui souffre horriblement et résiste héroïquement. Vive l’Ukraine ! (Mmes et MM. les députés du groupe RE se lèvent et applaudissent.) La parole est à Mme Laurence Robert-Dehault. Le Rassemblement national soutient depuis le début du conflit le peuple ukrainien. Dès le mois de février, Marine Le Pen affirmait que l’invasion russe sur le territoire souverain de l’Ukraine devait « sans ambiguïté être condamnée ».
« Aucune raison ne peut justifier le lancement d’une opération militaire contre l’Ukraine par la Russie qui rompt l’équilibre de la paix en Europe », expliquait-elle.
Voilà ce que nous souhaitons pour l’Europe… Ah ? Vous êtes pour l’Europe maintenant ! …et l’Ukraine : la paix, la protection des peuples et le rétablissement des principes du droit international, piétinés depuis bien trop d’années par ceux qui, au vu de la place qu’ils occupent au Conseil de sécurité des Nations unies, devraient les défendre.
Rappelons ici que, malgré la campagne électorale et notre opposition à la politique gouvernementale, Marine Le Pen a toujours soutenu l’action diplomatique d’Emmanuel Macron… Ah bon ? Première nouvelle ! Apprenez à écouter ! …pour protéger la paix quand nous pensions qu’elle était possible et pour essayer de trouver une solution diplomatique. Jamais le Rassemblement national n’utilisera la politique internationale pour faire de la politique politicienne (Exclamations sur les bancs du groupe RE) … Si peu ! …ou pour diviser le front uni que la nation doit afficher face au reste du monde, en particulier en période belliqueuse.
Votre motion défend les principes cardinaux du droit international de la Charte des Nations unies, de la protection de la souveraineté des peuples et de la justice internationale qui, seuls, peuvent œuvrer à une paix durable.
Oui, l’ONU et la Cour pénale internationale devront enquêter sur les crimes de guerre commis par l’armée russe pour établir les responsabilités et condamner les coupables. Oui, il faut se féliciter que le régime russe n’ait pas réussi à diviser les nations européennes et que nos alliés, en particulier la Pologne, aient fait preuve d’une grande détermination et d’une grande humanité dans l’accueil des réfugiés.
Cependant, il est incompréhensible que votre motion ne parle jamais de l’objectif que nous devons tous garder à l’esprit : comment arriver à un cessez-le-feu et à la paix pour rétablir la souveraineté de l’Ukraine et faire en sorte que le peuple ukrainien ne soit plus martyrisé ? Quelle est votre solution ? Vous réclamez toujours plus de sanctions sans préciser lesquelles. Or, si certaines sanctions fonctionnent et affaiblissent le régime russe – notamment son économie de guerre –, d’autres, au contraire, le renforcent et l’enrichissent au détriment des Français. Ah ! On y vient ! Les annonces de vos sanctions sur l’énergie puis les sanctions elles-mêmes n’ont absolument pas affaibli le régime russe mais l’ont enrichi. Quelles sanctions l’ont enrichi ? Vous êtes trop intelligents pour ne pas comprendre ! Ne faites pas semblant ! Tandis que ces sanctions mettent les Français et nos entreprises en difficulté, la Russie est devenue le premier exportateur de pétrole en Chine. Elle s’allie avec l’Inde et avec des puissances du Moyen-Orient et d’Asie contre nos intérêts. À moyen terme, on ne peut cacher aux Français les dangers multiples, pour l’Europe, d’une alliance entre la Russie, première réserve de matières premières au monde, avec la dictature chinoise, première puissance industrielle du monde.
Votre aveuglement est incompréhensible. Ce qui importe, ce n’est pas de multiplier les sanctions d’affichage mais bien d’exercer des pressions qui obligent le gouvernement russe à revenir à la table des négociations de paix et à cesser son agression.
Vous évoquez la livraison d’armes sans préciser lesquelles et dans quel but. S’il faut soutenir matériellement les Ukrainiens, notamment pour s’assurer qu’ils pourront se protéger du froid, de la faim, de la soif et des maladies, et s’il est nécessaire de livrer des armes défensives, nous ne pensons pas qu’il faille aller plus loin dans la livraison d’armes offensives. Nous devons les soutenir ! Il faut savoir ce que vous voulez ! En prenant le risque que la France devienne cobelligérante, vous prenez aussi celui qu’elle ne soit plus en mesure d’exercer son rôle historique de médiatrice et de facilitatrice de la paix. Passez un coup de téléphone ! Un coup de fil, c’est simple ! C’est minable ! Si aucune puissance européenne n’est plus reconnue comme non belligérante, la solution de paix sera définitivement entre les mains de la Turquie, de la Chine, de l’Inde et des États-Unis. Il serait impensable d’exclure ainsi les nations européennes de la maîtrise du destin de leur propre continent.
Enfin, votre motion cherche hélas à diviser les Français plutôt qu’à les rassembler autour de la cause ukrainienne. Absolument ! Relisez le texte ! Pourquoi promettre l’intégration européenne alors que l’Union européenne n’est pas capable de s’élargir davantage et que les Français ne le souhaitent pas ? Les Ukrainiens demandent l’adhésion à l’Union ! Ne pourriez-vous pas écouter l’oratrice ? Pourquoi faire de l’agenda de l’Otan un enjeu politicien, alors que vous savez parfaitement que le plus grand défenseur de la souveraineté des peuples et de l’équilibre international, le général de Gaulle, avait clairement établi que le destin de la France n’était pas de faire partie du commandement intégré de l’Otan ? Il vous reste quelques secondes et nous ne connaissons toujours pas votre vote ! Ils n’ont aucun respect ! C’est scandaleux ! Nous vous invitons, chers collègues, à renouer avec la mission historique de la France : être une puissance d’équilibre qui cherche à défendre le droit international, la protection des peuples et la recherche de la paix. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) C’est du blabla ! Vous dites cela parce que vous faites partie de la majorité mais vous n’avez aucun courage ! La parole est à M. Aurélien Saintoul. Il vaut infiniment mieux empiler les bonnes intentions que d’en exhiber de mauvaises. C’est sans doute ce qu’ont pensé les auteurs de ce texte bizarre et emphatique qui condamne l’invasion de l’Ukraine par la Russie et les crimes que cette dernière y commet.
Ce texte est en effet bizarre pour trois raisons.
Tout d’abord, il survient neuf mois après le début de la guerre, et son rejet ou son adoption ne changeront donc strictement rien aux événements ni aux décisions de l’exécutif en la matière. En cela, il reflète bien votre conception ornementale du parlementarisme, mes chers collègues. Tout à fait ! Ensuite, il met en scène un débat qui n’existe pas. Pour nous, l’affaire est entendue de longue date : oui, la Russie est coupable d’une guerre d’agression contre l’Ukraine, au cours de laquelle elle brise successivement presque tous les tabous du droit international. Pourquoi La France insoumise s’est-elle abstenue au Parlement européen ? Enfin, la tonalité de votre proposition de résolution est en total décalage avec les récentes déclarations du Président de la République et du ministre des armées, qui s’emploient plutôt à ouvrir un chemin à des négociations qu’à bomber le torse idiotement. Or c’est précisément ce que reflète votre texte avec un manque de subtilité… C’est vous qui parlez de subtilité ? …que je qualifierai d’artistique puisqu’il appelle à la guerre à outrance en appelant outrancièrement à la guerre. Non, il appelle au soutien ! À sa lecture, on sent que ses auteurs se sont exaltés à l’idée d’un héroïsme dont ils aimeraient être capables depuis leurs bureaux et leurs cabinets. Ce bellicisme rhétorique a ceci de spécialement repoussant que ses partisans sont certes prodigues, mais le plus souvent du sang des autres. Le pathos de cette proposition de résolution parvient même à occulter l’authentique tragédie humaine à laquelle il prétend nous rendre sensibles : le sort du peuple ukrainien, accablé par la guerre en cours.
Je regrette de devoir m’attarder sur le style d’un texte. Ces considérations sont forcément abstraites et même quelque peu dérisoires en regard de la mort, du viol et de l’exil de dizaines de milliers de personnes. Mais que faire d’autre puisque le texte est vide ou presque, émaillé de pétitions de principes, d’effets de manche, d’exagérations, de généralisations et de sophismes plus ou moins sournois ? Vous avez lâché la bride à l’émotion et la raison se traîne loin derrière.
S’agissant de la guerre en Ukraine, il y avait pourtant tellement à dire,… On vous écoute ! …tant de questions demeurant en suspens. Pourquoi se contenter d’un propos si étroit et sans nouveauté ? Ne voyez-vous donc aucune difficulté due aux choix qui ont été faits depuis le 24 février ? N’avez-vous donc aucun doute quand leurs conséquences pèsent si durement sur notre propre situation économique et sociale ? En vérité, vous ne vous demandez jamais quel monde façonne la politique de sanctions adoptée par l’Union européenne et par ce qu’assez imprudemment vous qualifiez de bloc occidental. Si on avait écouté Mélenchon, les Russes seraient à Kiev ! Vous ne vous demandez jamais pourquoi tant d’États réputés amis ont manifesté de si grandes réserves devant cette stratégie. Vous ne feignez même pas de vous demander à quelles conditions la guerre pourrait cesser ni à quelles conditions surtout elle pourrait ne pas revenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Nulle part vous ne dites d’où vient l’impuissance de l’ONU et du droit international : serait-ce parce que notre allié états-unien porte une responsabilité décisive dans cet état de fait en ayant, par exemple, envahi l’Irak ou bien notre pays en ayant fait une guerre illégale en Libye ? (Mêmes mouvements.) Vous ne vous demandez pas davantage comment nous pourrions œuvrer à la restauration d’un ordre international fondé sur le droit.
En outre, avec une candeur admirable, vous faites comme si ce despote qu’est Vladimir Poutine était une singularité absolue de notre temps plutôt qu’un avatar parmi d’autres des tyrans qui hantent le monde et dont vous saluez obséquieusement la plupart pour leur vendre des armes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.)
Vous ne mentionnez pas les opposants russes, qui auront pourtant nécessairement un rôle dans la résolution du conflit. Vous vantez l’accueil des réfugiés ukrainiens, mais vous ignorez que nombre d’entre eux ont souffert ces derniers mois de la fermeture de structures d’hébergement. Dans ma propre circonscription, à Montrouge, des familles ont été dispersées un peu partout en France sans véritable assistance, livrées à elles-mêmes, coupées de la solidarité qui s’était organisée pour elles. C’est inhumain ! Enfin, vous nous servez le catéchisme ordinaire et contradictoire selon lequel l’Europe doit devenir une puissance souveraine et que cela sera possible si sa sécurité est assurée par l’Otan. Je rappelle que la souveraineté européenne n’est qu’un hochet puisque la souveraineté appartient au peuple, comme le rappelle notre Constitution. Vous ne croyez pas en l’Europe et vous soutenez Poutine ! De surcroît, la prépondérance des États-Unis dans l’Otan interdit d’imaginer une quelconque souveraineté à l’entité qui lui déléguerait le soin de sa sécurité.
J’achève mon intervention en précisant que votre seule proposition concrète porte sur la sécurisation par la communauté internationale de la centrale de Zaporijjia. Bien sûr, nous la soutenons. Vous reprenez une proposition faite il y a des mois par Jean-Luc Mélenchon et que vous aviez accueillie à l’époque par des quolibets. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.) Par conséquent, considérant votre capacité à vous adapter et à changer, nous avons le droit d’espérer que vous finirez par quitter votre posture va-t-en guerre pour un réel souci de construire la paix. (Mmes et MM. les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent.) Qu’allez-vous voter ? La parole est à Mme Nathalie Serre. Le 24 février au matin, nous avons découvert incrédules que, durant la nuit, la Russie avait lancé une offensive militaire majeure contre son voisin ukrainien. Les signes avant-coureurs existaient depuis un certain temps, mais il faut reconnaître que nous étions nombreux à ne pas avoir cru que le président russe entraînerait notre continent, si souvent meurtri par le passé, dans une nouvelle guerre fratricide. Presque dix mois après, les Ukrainiens vivent toujours sous les bombes, en partie sans eau ni électricité, et sans chauffage, à l’orée d’un hiver souvent glacial dans ces régions. Ils sont très courageux ! Des milliers d’entre eux sont morts, des millions d’autres ont fui cette folie meurtrière que nous pensions – sans doute naïvement – bannie à tout jamais de notre continent. Un peuple entier qui vivait globalement selon nos standards de développement européen s’est retrouvé, du jour au lendemain, confronté aux bombardements massifs, aux sirènes d’alerte, à l’occupation, aux pillages, au chantage nucléaire, aux déportations de population et aux exactions les pires que l’on puisse imaginer : viols, tortures, assassinats.
En premier lieu, il convient de rendre un hommage appuyé au courage des Ukrainiens, à la résilience de ce peuple qui se bat chaque jour depuis des mois pour protéger sa terre. (Mme Maud Petit applaudit.) Car ne nous y trompons pas, les choses sont parfaitement claires : il y a un pays agresseur, la Russie, et un pays agressé, l’Ukraine. Les digressions historiques, les prises de recul parfois nécessaires et les tentatives d’explication ne changeront rien à cet état de fait indéniable.
Les conséquences de ce conflit se font sentir non seulement chez le peuple ukrainien puisque l’ensemble de notre continent est touché à divers degrés, mais aussi ailleurs dans le monde, dans les contrées qui dépendent de la production agricole ukrainienne pour leurs besoins alimentaires quotidiens et vitaux. Comme la crise du covid, ce conflit à nos frontières nous a fait réaliser combien nous vivions dans un monde interdépendant et combien nos sociétés ouvertes, démocratiques et libres pouvaient être fragiles : dépendance massive aux énergies et aux matières premières provenant de la Russie, faiblesse de notre outil de défense face à un conflit de haute intensité dont certains d’entre nous pressentaient la possibilité sans que nous ayons encore eu le temps de nous y préparer pleinement. À ce titre, le groupe Les Républicains sera particulièrement attentif à la prochaine loi de programmation militaire qui devra concrétiser notre prise de conscience de cette faiblesse.
Ce conflit nous interroge par ailleurs sur nos propres capacités de résilience : aurions-nous le même courage que les Ukrainiens pour défendre notre pays ? Car notre situation à ce jour n’est pas difficile : nous sommes réunis en ce début de soirée pour discuter et adopter une proposition de résolution affirmant le soutien de notre assemblée à l’Ukraine et condamnant la guerre menée par la fédération de Russie – tout cela dans la douce température de 19 degrés recommandée par le Gouvernement, comme en attestent les thermomètres installés dans les bureaux de l’Assemblée depuis quelques jours…
Les députés du groupe Les Républicains voteront cette proposition de résolution proposée par nos collègues de la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Voilà des députés responsables ! Ce vote reste bien entendu symbolique, mais il permet à l’Assemblée nationale de marquer une nouvelle fois son soutien à l’Ukraine. Je souhaite par ailleurs rappeler que notre objectif, le seul qui vaille au fond, est que cette guerre cesse. Nous savons tous qu’elle finira un jour. Mais ce n’est pas à nous de fixer les conditions pour que les Ukrainiens et les Russes s’installent autour d’une table. En revanche, notre groupe soutient de manière particulièrement ferme la proposition de la résolution invitant « le Gouvernement et l’Union européenne à favoriser toute initiative de nature à encourager la fin du conflit dans le respect de la souveraineté de l’Ukraine ».
Nous sommes dans l’opposition et pourtant, nous l’avons dit à plusieurs reprises, nous pensons que le Président de la République a eu raison de tenter de maintenir le dialogue avec la fédération de Russie. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RE. – Mme Maud Petit applaudit également.) Cela n’a aucunement empêché de faire preuve de fermeté en matière de sanctions, ni de livrer armes et matériels divers aux Ukrainiens, ni de condamner avec la plus grande fermeté les agissements criminels de l’armée d’occupation russe, ni de mobiliser nos forces armées au sein de l’Otan, ni à l’Union européenne de rester unie. La France doit peser sur tous ces sujets à l’occasion de la visite d’État du Président de la République aux États-Unis : il doit porter la voix ferme et singulière de notre pays. Elle a raison ! Mes chers collègues, nous n’avons pas, hélas, fini de découvrir les conséquences à long terme de ce 24 février 2022. Mais une nouvelle ère s’est ouverte pour notre pays et pour notre continent, clôturant les années de paix que nous avons connues à l’Ouest en oubliant que certains de nos partenaires avaient vécu des décennies dans l’oppression politique et totalitaire. Notre prochain grand défi sera d’aider l’Ukraine à se reconstruire : à nous d’y participer, dans l’intérêt du peuple ukrainien et du peuple européen. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RE. – Mme Maud Petit applaudit également.) La parole est à Mme Maud Gatel. Je voudrais très sincèrement vous remercier, monsieur le président de la commission des affaires européennes, de nous donner l’occasion aujourd’hui de voter une résolution qui affirme le soutien de notre assemblée à l’Ukraine.
Lors des précédents débats tenus sur le sujet à l’initiative du Gouvernement, Jean-Louis Bourlanges et Frédéric Petit ont rappelé notre position : les députés du groupe Démocrate sont et resteront aux côtés du peuple ukrainien dans son combat pour la liberté. Ce soutien indéfectible et ancien puisqu’il date de la révolution de 2004, se retrouve dans les couleurs de notre famille politique – l’orange symbolisant la démocratie ukrainienne –, mais aussi et surtout dans les actes de nos élus dans cette assemblée comme au Parlement européen où nos collègues de L’Europe ensemble ont soutenu toutes les aides financières décidées en faveur de l’Ukraine, les sanctions contre la Russie ou encore récemment la reconnaissance de cette dernière comme un État soutenant le terrorisme, à la différence du RN et de LFI qui n’ont pas jugé utile de voter pour cette prise de position forte. Lorsqu’on se prétend défenseur de la démocratie, il faut savoir aligner les actes sur les paroles. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.) Et Macron ? Les mêmes qui affichent leurs scrupules lorsqu’il s’agit de voter un soutien effectif aux Ukrainiens sont aussi les premiers à critiquer la réaction européenne et française, comme nous le voyons encore ce soir. Il faut rappeler que l’Union européenne et ses États membres ont été au rendez-vous pour soutenir nos voisins ukrainiens par la prise de sanctions inédites, dans un temps record, contre les dirigeants russes, et par le soutien financier, militaire et humanitaire ou encore par l’accueil de réfugiés qu’il faudra pérenniser.
Les Européens ont répondu présents. Alors que la Facilité européenne pour la paix a fourni une aide à hauteur de 8 milliards d’euros jusqu’ici, aide qui se poursuivra en 2023, les pays ont également contribué individuellement. C’est le cas de la France avec ses fameux canons Caesar – camions équipés d’un système d’artillerie –, ses missiles Milan et Crotale ou encore avec ses véhicules blindés. À cet effort s’ajoutera en 2023 une aide exceptionnelle de 200 millions d’euros sous forme d’équipements militaires français, un renforcement du soutien à l’Ukraine que nous avons souhaité dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Après plus de neuf mois de guerre, je pense aux centaines de milliers de familles ukrainiennes qui sont aujourd’hui privées d’eau, d’électricité et de chauffage à la veille d’un hiver si rude. Je forme le vœu que notre pays fournisse aussi à l’Ukraine une assistance technique garantissant à sa population un accès aux biens de première nécessité, ce qu’il a déjà commencé à faire en envoyant, il y a quelques jours, 100 générateurs électriques. Ce soutien inébranlable, couplé à l’extraordinaire courage des Ukrainiens, permet aujourd’hui à l’Ukraine de regagner du terrain en infligeant des défaites à celle qui se présentait jusqu’alors comme la deuxième armée du monde.
Cette guerre a certes révélé des dissensions dans la famille européenne, du fait notamment de la grande dépendance énergétique de certains de ses membres, bien plus forte que dans notre pays. Mais ce conflit de haute intensité a surtout démontré une volonté d’agir ensemble pour relever les défis sur le plan diplomatique, ainsi que les défis de l’indépendance énergétique et de la transition écologique. Ce besoin d’union n’a d’ailleurs pas échappé aux Ukrainiens, qui savent que la construction d’un ensemble fort, indépendant et démocratique est la seule réponse aux problèmes d’aujourd’hui.
Enfin, mes chers collègues, les horreurs de ce conflit mettent à l’épreuve notre humanité et nos valeurs. Quoi qu’en disent certains poutinophiles, nous n’oublierons pas les victimes civiles, les blessés, les femmes violées, les enfants arrachés à leurs parents. N’oublions pas Boutcha, n’oublions pas les crèches, les écoles, les hôpitaux bombardés – des crimes de guerre qui devront être jugés.
Bien évidemment, les députés Démocrates soutiendront cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.) La parole est à M. Alain David. Après que l’armée ukrainienne a repris des territoires du nord du pays, en particulier la ville stratégique de Kherson, le conflit s’est encore durci : l’armée russe mène de nombreuses attaques contre les infrastructures à l’approche de l’hiver et vise désormais intentionnellement les populations civiles.
Ce revirement dans la dynamique du conflit au profit de l’armée ukrainienne est en partie dû au soutien militaire des pays occidentaux, mais il s’explique bien sûr par le courage et l’engagement du peuple ukrainien et de son président.
Alors que les États-Unis et les États européens s’étaient montrés prudents, lors les premières semaines de la guerre, dans leur volonté de fournir un soutien militaire à l’Ukraine, les succès importants des opérations militaires et les gains territoriaux obtenus depuis par l’armée ukrainienne ont permis une véritable montée en puissance du soutien des États-Unis, des alliés de l’Otan et des États européens.
Face à l’agression armée de la Russie, l’Otan a réactivé ses plans militaires au mois de février dernier, et elle a renforcé sa posture de défense en mobilisant, notamment aux frontières, une force de réaction de 40 000 soldats. Lors du sommet de l’Otan qui s’est tenu du 27 au 30 juin 2022, les chefs d’État et de gouvernement ont décidé de porter bien au-dessus de 300 000 soldats sa force de réaction, force multinationale à haut niveau de préparation.
S’agissant du soutien économique, l’Union européenne a fourni à l’Ukraine, en 2022, une aide exceptionnelle de 9 milliards d’euros. Un montant de 867 millions d’euros lui a également été attribué pour la mise en œuvre de projets humanitaires en faveur des civils touchés par la guerre, et facilitant l’accès aux biens et services de base. Pour l’année 2023, le gouvernement ukrainien évalue ses besoins de financement à 3 à 4 milliards d’euros par mois. Ce soutien financier sera assuré principalement par l’Union européenne, les États-Unis et les institutions financières internationales. La présidente de la Commission européenne a ainsi annoncé une aide de près de 18 milliards d’euros en 2023, soit 1,5 milliard d’euros par mois. Depuis le début du conflit, la Banque mondiale a déjà débloqué une aide de 17,8 milliards d’euros dans le cadre de son programme Peace.
L’Union européenne a adopté sept trains de sanctions contre la Russie, dont le dernier en réaction aux déclarations russes sur l’éventualité d’une frappe nucléaire. Ont été décidées des limitations partielles d’accès aux marchés primaires et secondaires des capitaux, une interdiction pour certaines banques de recourir au système Swift, une interdiction d’importation de charbon et de pétrole, et une interdiction d’émission de certains médias russes.
Le gouvernement français a longtemps privilégié le maintien d’un canal de discussion diplomatique entre chefs d’État, qui n’a pas obtenu beaucoup de résultats et s’est finalement révélé infructueux. Sa position n’est pas encore tout à fait claire quant à savoir si l’Ukraine doit recouvrer ses frontières internationalement reconnues de 1991 ou si elle doit se conformer aux frontières qui étaient les siennes à la veille du 24 février 2022. En ce qui nous concerne, nous pensons que les Ukrainiens doivent décider.
La France a livré à l’Ukraine des canons Caesar qui se sont révélés déterminants sur le terrain. Elle a récemment accru son soutien avec l’envoi de lance-roquettes et de deux batteries de défense antiaérienne Crotale. Outre son soutien matériel, la France contribue à hauteur de 550 millions d’euros à la Facilité européenne pour la paix de l’Union européenne.
La présente proposition de résolution couvre un champ de sujets assez étendu. Cependant, sur certains points, d’autres propositions de résolution proposaient d’aller plus loin et faisaient état de dispositions plus approfondies. C’est le cas notamment pour ce qui concerne les condamnations des violations du droit international humanitaire, l’extension des sanctions à l’égard de la Russie comme à l’égard des entreprises françaises dont l’activité bénéficie à l’effort de guerre russe, ou les mesures pour lutter contre la guerre d’influence et la diffusion des médias russes dans l’espace européen.
Sur les autres points, on note une large convergence, y compris sur les questions territoriales relatives à l’objectif de revenir aux frontières internationalement reconnues de l’Ukraine. C’est pourquoi, avec mes collègues du groupe des députés Socialistes et apparentés, nous voterons évidemment ce texte. Nous assurons le peuple ukrainien de notre soutien et de notre solidarité en saluant le courage dont il fait preuve face à l’agression russe. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à Mme Stéphanie Kochert. Cela fait maintenant neuf mois que l’impensable a fait son retour sur le continent européen, neuf mois que le peuple ukrainien se bat sans relâche pour préserver son intégrité territoriale et défendre les fondements de notre démocratie, neuf mois que la fédération de Russie a renié l’ensemble de ses engagements internationaux en attaquant l’Ukraine.
Depuis le début du conflit, les Ukrainiens font preuve d’un courage absolu, que nous ne pouvons que saluer. Ce courage s’exprime sur le front et porte ses fruits. D’abord, l’invasion au nord a été repoussée, empêchant dans le même temps la prise hautement symbolique de Kiev. Plus récemment, c’est avec la même détermination qu’une partie du territoire injustement annexée par l’armée de Vladimir Poutine a été reprise.
Voilà donc neuf mois que la terreur russe frappe les populations civiles. Ces hommes, ces femmes et même ces enfants défendent inlassablement leur patrie au péril de leur vie. Car la réalité, c’est que les bombes qui pleuvent dans le ciel ukrainien ne se soucient pas d’arracher cruellement des parents à leur famille ou de tomber sur une maternité. Ces bombes, qui plongent l’Ukraine dans le froid et l’obscurité, font désormais planer la menace d’une catastrophe nucléaire qui toucherait au premier chef les habitants de Zaporijjia.
Notre devoir d’Européens est de ne pas laisser les Ukrainiens se battre seuls. Parce que nous tenons à la souveraineté des États et à la défense des démocraties européennes, nous avons apporté notre assistance à ce peuple et nous continuerons.
Il y a d’abord notre soutien militaire. La livraison d’armes qui permet aux Ukrainiens de se défendre doit se poursuivre.
Il y a aussi notre soutien face à un écocide car des terres, des sols et des rivières sont durablement pollués.
Il y a ensuite notre soutien diplomatique. La coordination de la France et de ses alliés au sein des organisations internationales doit être soulignée. L’Assemblée générale des Nations unies a condamné à une large majorité l’agression contre l’Ukraine. Même la Chine et l’Inde ont signé un texte condamnant le conflit et ses conséquences pour le commerce international.
Il y a enfin notre soutien humanitaire qui passe par le financement de la reconstruction du pays. L’Union européenne a alloué 485 millions d’euros d’aide humanitaire pour aider les civils touchés par la guerre. Au total, 13,4 millions de personnes ont d’ores et déjà bénéficié de cette aide. Nous avons également créé un mécanisme de protection temporaire pour les réfugiés et leurs enfants qui ont fui la guerre.
Parce que nous soutenons la démocratie ukrainienne, la Russie de Vladimir Poutine a décidé de mener contre nous une guerre hybride. Elle a tenté de nous désunir et de mettre à mal notre détermination. Ces tentatives sont vaines : systématiquement, nous avons su nous défendre. C’est vrai ! Face aux menaces portant sur notre indépendance énergétique, nous avons répliqué par un embargo sur le pétrole russe et par un plan ambitieux pour l’indépendance énergétique de l’Union européenne. Face aux stratégies de propagande les plus insidieuses qui mettent en péril la qualité des débats dans nos démocraties, la France et l’Europe ont réagi rapidement en l’imitant l’accès aux canaux de diffusion russes. Enfin, alors que nous commémorons les débuts du Holodomor qui a eu lieu il y a quatre-vingt-dix ans, la fédération de Russie menace maintenant la sécurité alimentaire mondiale. Nous avons mis en place des couloirs de solidarité pour permettre à l’Ukraine d’écouler les produits de son agriculture.
À cette guerre hybride s’ajoutent les trop nombreux et inacceptables crimes de guerre, exactions et violations des droits humains dont la Russie s’est rendue coupable pendant le conflit. Le bombardement de la maternité de Marioupol, le massacre de Boutcha, les fosses communes d’Izioum nous ramènent aux heures les plus sombres de notre histoire. La gendarmerie nationale est aux côtés des Ukrainiens pour collecter et conserver les preuves de ces crimes. Nous espérons que l’enquête de la Cour pénale internationale se poursuivra et sanctionnera les responsables de ces atrocités. La France doit continuer sa coopération en ce sens, avec les autorités ukrainiennes, afin que lumière soit faite.
Chers collègues, la situation humanitaire dramatique en Ukraine ne saurait tomber dans l’indifférence et l’oubli généralisés. L’enlisement du conflit ne doit pas décourager nos efforts. Plus que jamais, le peuple ukrainien a besoin de notre soutien. Nous devons sans cesse le réaffirmer. C’est au fond l’objet de cette proposition de résolution : l’Assemblée nationale réaffirme qu’elle est et restera aux côtés du peuple ukrainien. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem, ainsi que sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.) La parole est à Mme Cyrielle Chatelain. Je commencerai en ayant une pensée pour le peuple ukrainien, un peuple qui depuis maintenant neuf mois subit l’occupation, les bombardements, la privation, la torture, le viol et la mort ; un peuple qui, face à l’envahisseur, a su faire preuve d’héroïsme et de courage ; un peuple qui devra subir la rigueur de l’hiver souvent sans chauffage, sans électricité, parfois avec bien peu de nourriture ou sans eau potable courante.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a poussé un cri d’alarme. L’hiver sera meurtrier pour des millions de personnes en Ukraine. La Russie veut faire geler l’Ukraine. Elle prive les Ukrainiens d’énergie, elle les prive de soins, elle les prive de tout.
La moitié des infrastructures énergétiques sont soit endommagées, soit détruites. Les bombardements de stations d’épuration ont provoqué une pollution de l’eau, des centaines d’hôpitaux et d’établissements de soins ne sont plus opérationnels – quelque 700 d’entre eux ont été attaqués – et certains sols ont été contaminés.
Cette situation est le résultat des bombardements ininterrompus de la Russie contre les infrastructures énergétiques et les infrastructures publics ukrainiennes. Ces pratiques dessinent une stratégie russe de la terreur qui vise à faire faiblir la détermination ukrainienne. Pourtant, celle-ci ne vacille pas. Dans cette situation, l’accès à l’aide humanitaire est crucial, de même que la livraison des générateurs d’énergie.
Nous saluons la solidarité internationale, européenne et française qui s’est organisée pour venir en aide à l’Ukraine, pour fournir l’aide humanitaire et le matériel militaire. Face au retour de la guerre, l’Union européenne n’a pas failli. L’Europe a su être solidaire. Nous avons accueilli les millions de réfugiés ukrainiens arrachés à leur maison, à leur famille, à leurs proches. Cet accueil nous honore mais, surtout, il nous rappelle que personne ne quitte son foyer le cœur léger et que notre devoir est d’offrir protection et asile à toutes celles et à tous ceux qui en ont besoin.
L’Europe a également su dessiner l’embryon d’une Europe de la défense. Son soutien a été déterminant dans cette guerre et dans la capacité de l’Ukraine à faire face à Vladimir Poutine et à sa folie meurtrière. Ce sursaut des États européens ne doit pas faire oublier le manque de coordination et de mutualisation, et l’absence d’une politique de défense européenne structurée. Il ne doit pas nous faire oublier non plus qu’en 2014, nous avons dénoncé mais laissé se produire l’annexion illégitime et illégale de la Crimée. C’est l’invasion commencée en 2014 qui se poursuit aujourd’hui.
Dans un monde incertain, nous avons besoin de développer une politique étrangère et de défense européenne forte, cohérente, crédible et dissuasive. L’Europe de la défense est aujourd’hui indispensable pour garantir la paix, garantir notre souveraineté, notre intégrité géographique ainsi que notre autonomie diplomatique et stratégique à l’égard des grands blocs qui composent notre monde multipolaire.
De même, dans un monde incertain, l’indépendance, notamment énergétique, est cruciale. Aujourd’hui, le manque d’indépendance énergétique, les Français et les Françaises en paient littéralement la facture.
Malgré l’agressivité croissante manifestée par la Russie qui, comme d’autres régimes autoritaires, a pour seul objectif de fragiliser nos démocraties, nous n’avons rien fait, avant le déclenchement de cette guerre, pour mettre un terme à notre dépendance énergétique, notamment à l’égard du gaz et de l’uranium russes. Malheureusement, nous n’en sommes pas complètement sortis puisque, pas plus tard qu’hier matin, à Dunkerque, la France a reçu une livraison d’uranium russe. Nous devons cesser toute importation avec les Russes : continuer à leur importer de l’énergie, c’est leur donner du pouvoir.
Le soutien que nous apportons à l’Ukraine s’inscrit dans le cadre du droit ; il est fondé par le droit des peuples à s’autodéterminer. Si le groupe Écologiste s’apprête à voter la proposition de résolution, c’est non seulement pour soutenir le peuple ukrainien dans sa lutte contre un occupant illégitime et violent qui commet de nombreuses exactions, mais aussi pour soutenir les Russes qui s’opposent au régime autocrate de Vladimir Poutine et s’élèvent contre la guerre. C’est aussi pour rappeler à tous les États autoritaires que l’Europe et la France se tiennent aux côtés des peuples qui luttent pour leurs droits, leur autodétermination et leur aspiration à vivre libres. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et Dem.) La parole est à M. André Chassaigne. Écoutons la voix de la sagesse et de la paix ! Chers collègues de la majorité, par cette résolution, vous entendez apporter votre entière solidarité au peuple ukrainien dans sa lutte contre l’envahisseur. Les députés de mon groupe ne peuvent que soutenir cette solidarité indispensable. Je constate cependant que les attendus de cette résolution n’apportent rien de nouveau et la limitent dans une dimension symbolique qui n’est pas à la hauteur de ce que notre assemblée, si elle avait un peu d’ambition, pourrait préconiser à l’exécutif. Absolument ! En effet, la France accomplit déjà quasiment tout ce que vous demandez, qu’il s’agisse du soutien humanitaire à l’Ukraine, de l’accueil des réfugiés, de l’envoi d’aide, notamment militaire, de la dénonciation des faux référendums menés dans les régions du Donbass et de Donetsk, du renforcement de l’Otan ou de l’autonomie militaire européenne.
Après neuf mois de guerre, cette résolution n’aurait-elle pas dû prendre en considération l’avenir du conflit et faire scintiller les lumières de la paix ? Il semble qu’elle ne mentionne l’avenir qu’au prisme de la reconstruction du pays, attendue avec intérêt par les majors français et européens du bâtiment et des travaux publics. Ce n’est pas sérieux ! D’ailleurs, le 13 décembre prochain, l’exécutif tiendra une conférence qui a, entre autres objectifs, celui d’aider à reconstruire les infrastructures du pays.
Mais avant de reconstruire, ne faut-il pas construire ce qui est prioritaire, à savoir la paix ? (MM. Stéphane Peu et Frédéric Maillot applaudissent.) Je veux faire miens ces mots du pape François : « La paix ne peut se vendre ni s’acheter : elle est un don à recevoir avec patience et à construire ’’artisanalement’’ par des petits et grands gestes… » Construisons la paix, car un Poutine aura beau couper toutes les fleurs, il n’empêchera pas le printemps. Construisons la paix, car c’est elle qui permettra aux Ukrainiennes et aux Ukrainiens, ainsi qu’aux conscrits russes, de retrouver, si j’ose dire, une vie normale. (M. Aurélien Saintoul applaudit.)
Ce texte présente d’autres lacunes : il ne contient pas un mot de solidarité avec le peuple russe qui souffre le martyre par la faute de Vladimir Poutine, pas un mot sur les multiples emprisonnements politiques en Russie, qu’il s’agisse des pacifistes ou des mères de famille qui protestent contre la guerre ou la conscription des jeunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES.) Exactement ! Personne n’en a parlé ! La guerre détruit des vies, mais elle détruit également la planète. Pensez aux restes des explosifs qui pollueront les sols ukrainiens ! Nous aurions pu demander à l’exécutif d’engager des moyens pour assurer leur déminage et leur nettoyage. Cela permettrait, là encore, de préparer l’avenir.
La mise en place d’une cour pénale internationale, dont vous faites la demande, est une mesure essentielle que nous approuvons. Reste que nous devons lever un obstacle : la France a drastiquement limité sa compétence universelle qui lui permet d’arrêter un criminel de guerre étranger sur son sol. En effet, quatre règles strictes doivent être observées avant de déférer ce dernier en justice : l’obligation de prouver la résidence habituelle du suspect en France ; le principe de double incrimination, qui prescrit que l’on ne peut juger un individu que si la peine est reconnue également dans son pays d’origine ; le monopole des poursuites, en vertu duquel seul le ministère public peut se saisir d’une telle affaire ; l’inversion du principe de complémentarité, impliquant que la France ne peut poursuivre le suspect que si la Cour pénale internationale (CPI) a décliné sa compétence.
Ces quatre verrous font de la France un paradis pénal. Mon collègue Jean-Paul Lecoq avait à ce sujet alerté la commission des affaires étrangères, qui a fini par émettre l’idée d’une réforme permettant à la France de prendre toute sa part dans le processus de justice internationale qui s’imposera.
Enfin, la proposition de résolution aurait pu indiquer que la France allait tout mettre en œuvre sur le plan politique pour imposer un cessez-le-feu et l’ouverture de pourparlers de paix. Consolider la paix, c’est concevoir un cadre de sécurité collective incluant tous les pays européens, y compris la Russie et l’Ukraine. Car la Russie, même dirigée par un homme aussi dangereux que Vladimir Poutine, restera toujours un voisin : la géographie est implacable. Seul le peuple russe pourra, de ses propres mains, briser les lourdes chaînes dont il est prisonnier. (M. Stéphane Peu applaudit.)
Si cette résolution était véritablement tournée vers l’avenir, elle devrait encourager l’exécutif à travailler, plus qu’il ne fait déjà, à un cessez-le-feu immédiat en Ukraine et à l’ouverture de négociations, sous l’égide de l’ONU. À ce titre, pourquoi ne pas mobiliser une force d’interposition internationale ?
Nous nous désolidarisons de plusieurs considérants et attendus, notamment en ce qui concerne l’Otan, l’autonomie stratégique européenne et le ton belliqueux employé. Toutefois, nous réaffirmons avec force la souveraineté pleine du peuple ukrainien qui doit décider collectivement de ce qu’il va faire des territoires disputés et de l’opportunité d’entrer ou non dans l’Union européenne.
Notre vote positif sur cette résolution est un signal de solidarité au peuple ukrainien. Mais il nous oblige aussi à redoubler d’exigence sur les demandes que notre assemblée formule à l’exécutif : il faut non seulement que le Parlement soit force de proposition mais aussi qu’il soit respecté. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à M. Jean-Louis Bricout. En s’attaquant à l’Ukraine, la Russie a confirmé, et ce n’est pas une nouveauté, qu’elle bafouait les règles les plus fondamentales du droit international. L’annexion illégale de la Crimée, en 2014, n’était qu’un avertissement. Malgré sa posture victimaire, Vladimir Poutine ne trompe personne : l’agresseur, c’est bien la Russie !
La réalité, c’est que les troupes russes ciblent délibérément les civils.
La réalité, c’est que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) recense déjà plus de 6 000 civils tués et 10 000 blessés. À ce funeste cortège s’ajoutent les centaines de milliers de déplacés ukrainiens qui tentent de trouver refuge partout en Europe : rien qu’en France, on en compte 100 000 ! Certains d’entre eux sont repartis en Ukraine, d’autres ont choisi de rester. Je salue ici la belle solidarité dont ont fait preuve nos concitoyens qui ont accueilli ces réfugiés.
La réalité, c’est que le pouvoir russe cible systématiquement les infrastructures civiles, notamment les hôpitaux, les transports et les lieux de production d’énergie. Oui, les déplacements forcés, notamment d’enfants depuis la débâcle de Kherson, nous sont insupportables ! Oui, les viols et la torture sont une abomination qui doit cesser ! Oui, ces crimes de guerre ne peuvent rester impunis ! C’est la raison pour laquelle la France a envoyé en Ukraine des experts de la gendarmerie, en particulier à Boutcha, ce qui permettra de recueillir les preuves nécessaires à un futur procès – voilà une coopération salutaire !
Ce sont près de 6 millions de civils qui sont aujourd’hui concernés par les coupures d’électricité en Ukraine et en Moldavie – conséquence du ciblage systématique des infrastructures énergétiques, conséquence d’une stratégie désespérée, conséquence aussi des choix de Vladimir Poutine et de son état-major. Cet hiver, il faut que notre soutien soit plus puissant encore : nous ne devons plus seulement fournir du matériel militaire et un appui diplomatique à Kiev ; nous devons aussi proposer un plan de reconstruction sur le long terme.
À cet égard, réjouissons-nous que le Parlement européen ait voté une aide de 18 milliards d’euros au bénéfice de l’Ukraine. Félicitons-nous également que la France organise, le 13 décembre prochain, une conférence internationale pour créer les conditions d’une aide énergétique. Saluons enfin la pérennisation de l’initiative céréalière de la mer Noire – on parle de l’exportation de plus de 15 millions de tonnes de denrées alimentaires ukrainiennes – et le programme Grain from Ukraine , grâce auquel l’Ukraine concourt à la sécurité alimentaire mondiale.
Toutes ces mesures et ces formes de coopération permettront à l’Ukraine d’être dans la meilleure position possible pour négocier les conditions de la paix. Lors du sommet du G20, qui s’est tenu ce mois-ci à Bali, le président Zelensky n’a pas dit autre chose, appelant chacun des pays présents à peser de tout son poids pour mettre fin à cette guerre destructrice, engagée unilatéralement par la Russie.
Il nous faut cependant rester vigilants, tant les équilibres sont fragiles ! Les adhésions de la Suède et de la Finlande à l’Otan ne sont pas encore effectives. La centrale nucléaire de Zaporijjia reste le théâtre d’opérations, si bien que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) doit constamment lutter pour assurer sa protection. Notre engagement ne peut se faire sans trouver des alternatives aux approvisionnements russes qui, jusqu’alors, représentaient la moitié des importations européennes de gaz et près du quart des importations de pétrole. Les pays qui ont su réduire de 20 % leur dépendance aux importations de gaz russe, comme l’Autriche, nous montrent la voie à suivre.
Enfin, condamner la Russie doit nous amener à condamner tout aussi fermement la Biélorussie d’Alexandre Loukachenko, qui a permis l’attaque de l’Ukraine par le nord.
Parce que notre soutien au peuple ukrainien est le moteur de sa résistance héroïque, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires votera avec force et conviction la présente résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et SOC, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Bravo ! La parole est à Mme Emmanuelle Ménard. Il est des temps où les hésitations sont des trahisons, où les tergiversations sont des abandons, où les faux questionnements sont des lâchetés. Nous vivons un de ces temps.
L’Ukraine a besoin de nous, et nous avons besoin d’elle. Tout le reste n’est que rhétorique, petit calcul politicien ou, pour les cyniques de toujours, du réalisme à l’arrière-goût munichois. Il est des temps où l’on doit choisir son camp, où l’on fait corps, où l’on ne mégote pas son soutien ; des temps où le monde se partage en deux sans qu’il y ait de troisième voie. Nous vivons un de ces temps.
Comment faut-il le dire ? Au risque de se répéter, l’avenir de l’Europe – de notre Europe – se joue là-bas, sur les rives de la Dniepr. En effet, après avoir répété qu’elle était impensable, inenvisageable, impossible, l’Union européenne a découvert, stupéfaite et démunie, qu’une guerre conventionnelle et de haute intensité se déroulait à ses frontières, alors qu’elle n’y était pas préparée et était encore moins armée. Cette impréparation des États européens pose d’ailleurs quelques questions, d’abord en termes de solidarité. « Nous n’avons pas à rougir de ce qui est fait », a assuré le ministre Sébastien Lecornu, ajoutant que « nous allons continuer à aider l’Ukraine aussi longtemps que le conflit durera ».
Et pourtant ! Les données enfin communiquées par le Gouvernement permettent d’utiles comparaisons avec nos voisins – notamment l’Allemagne et le Royaume-Uni – qui malheureusement ne sont pas vraiment à notre avantage. Nous apprenons ainsi que la France a formé 400 militaires ukrainiens. En neuf mois de conflit, vous avouerez que cela ne pèse pas lourd, sachant que plus d’un demi-million de soldats ukrainiens sont actuellement engagés ! Outre-Rhin, plus de 700 soldats ukrainiens ont reçu une formation, soit presque deux fois plus qu’en France ! Et que dire du Royaume-Uni ? C’est l’un des pays, après les États-Unis, qui soutient le plus l’Ukraine. Notez qu’il a déjà formé plus de 7 400 recrues et qu’il forme actuellement 1 900 soldats supplémentaires.
On se souvient, en octobre dernier, de la vidéo dans laquelle le président ukrainien nous demandait de l’aide militaire mais soulignait, de facto , le rôle modeste, voire très modeste joué par la France en ce domaine, quels que soient les critères – matériels ou humains – pris en considération. Ce n’est pas tout à fait ce qu’il a dit ! Heureusement, un fonds de soutien – initialement de 100 millions d’euros, puis porté à 200 millions d’euros – a été voté par notre Parlement. Il permet aux Ukrainiens de passer des commandes d’équipement aux entreprises françaises, et d’assurer l’entretien et la maintenance des systèmes déjà livrés. Dans ce cadre, nous devons absolument renforcer notre autonomie en termes d’équipement militaire en pesant de tout notre poids pour que l’Europe privilégie les armements européens plutôt qu’américains, par exemple, ainsi qu’en donnant de vrais moyens à notre armée par le biais de la nouvelle loi de programmation militaire attendue cet hiver au Parlement,… Chers collègues, je vous invite à écouter l’oratrice. …laquelle fixera pour les six prochaines années la trajectoire des moyens alloués à la défense de la France. Devant la montée des tensions à l’international et la guerre en Ukraine, qui posent le problème de l’indépendance stratégique de la France, le rejet par Emmanuel Macron du cadrage budgétaire proposé par l’état-major français n’est pas bon signe.
Peut-être serait-il temps également d’accepter de regarder en face la nouvelle utilité de l’OTAN, loin de l’état de « mort cérébrale » qu’on lui prêtait et qui se révèle au contraire, depuis l’agression russe, indispensable à la défense de l’Europe. En effet, elle a contribué à empêcher toute extension du conflit hors de l’Ukraine. L’arrivée prochaine de la Suède et de la Finlande en son sein renforcera la continuité géographique du bloc occidental européen face à celui des États autoritaires. Il faut l’admettre, on est loin aujourd’hui du « machin » de 1966.
Pour finir, je voudrais, du haut de cette tribune où tant d’hommes et de femmes ont plaidé, depuis tant d’années, pour les droits de l’homme et du citoyen, dire à nos amis ukrainiens que nous sommes avec eux, aujourd’hui et demain. Notre pays, mon pays, qui a incarné et incarne toujours la liberté, la liberté des peuples, est à leurs côtés. Alors, du haut de cette tribune, je veux leur dire : Vive la liberté ! Vive l’Ukraine ! Vive l’Ukraine libre ! Jive vilna Ukraïna ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, LR, Dem, HOR et GDR-NUPES.) La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux. La proposition de résolution dont nous débattons aujourd’hui porte sur un enjeu crucial pour la France, pour l’avenir du continent européen et pour la stabilité du monde. Je réaffirme devant vous le soutien indéfectible de la France à l’Ukraine. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem, HOR et sur plusieurs bancs du groupe GDR-NUPES.)
L’agression russe en Ukraine, déclenchée le 24 février dernier, a marqué le retour de la guerre sur le continent européen ; de plus, il s’agit d’une guerre impliquant un État doté de l’arme nucléaire. Par cet acte gravissime, la Russie viole délibérément les règles fondamentales du droit international (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE) , notamment les principes fondateurs de la Charte des Nations unies que sont la souveraineté des États et le respect de leur intégrité territoriale. Cette invasion et ses objectifs portent directement atteinte à l’existence de l’Ukraine en tant que nation indépendante libre de choisir son destin. Mes chers collègues, je vous demande d’écouter Mme la secrétaire d’État. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem, SOC et HOR.) L’annexion illégale de quatre régions ukrainiennes début octobre, à l’issue de simulacres de référendum, n’a fait qu’aggraver cette situation. Elle démontre et confirme le mépris de la Russie pour l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine.
Mais, dans cet acte d’agression, la Russie a connu une série de revers. La succession d’échecs russes a mis en lumière les limites de son appareil militaire : l’armée russe s’est montrée incapable de prendre Kiev et s’est retirée du nord du pays en avril ; elle est toujours incapable de s’emparer de l’ensemble du Donbass, malgré le caractère prioritaire de cet objectif pour l’armée russe et ses supplétifs ; en septembre, la contre-offensive ukrainienne a repoussé la Russie de la région de Kharkiv ; enfin, face à la résilience ukrainienne, l’armée russe a dû se retirer de Kherson mi-novembre. Cette dernière défaite est majeure, sur le plan militaire comme politique : la Russie perd ainsi l’unique capitale régionale conquise, puis prétendument annexée depuis février. L’Ukraine a montré qu’elle pouvait reprendre l’ascendant face à l’envahisseur russe. Elle l’a fait en s’appuyant sur la résilience exceptionnelle de son peuple, sur la bravoure et la détermination de ses soldats et sur les équipements sophistiqués que nous lui avons livrés avec nos alliés. Et la stratégie ? Vous pourriez nous en parler ! Depuis que l’Ukraine a repris l’ascendant militaire, la Russie a opté pour une stratégie lâche et cynique, la fuite en avant, qui vise à semer la terreur, à mettre l’Ukraine à genoux, à faire de la souffrance du peuple ukrainien une arme de guerre. Pour cela, la Russie vise systématiquement les infrastructures critiques, pour les détruire et mettre en péril la population ukrainienne. Quelle est la vision de la France ? Vous ne faites que décrire la situation ! (« Chut ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.) À chaque victoire de l’Ukraine, la Russie réplique par de nouveaux bombardements ciblant spécifiquement des infrastructures critiques. Ces frappes n’ont qu’un but : priver la population ukrainienne d’électricité, de chauffage et même d’eau – cela en plein hiver. Toutes ces infrastructures sont indispensables à la survie de la population civile pendant l’hiver. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe RE.)
Ces frappes de représailles visant délibérément les civils sont intolérables. Nous le redisons : la Russie ne parviendra pas à briser la résistance du peuple ukrainien. Celui-ci se bat pour sa liberté.
Dans cette lutte, l’Ukraine n’est pas seule. Nous nous tenons à ses côtés et continuerons de le faire. Dès le début de cette agression, que nous avons cherché à éviter jusqu’au dernier moment, la France s’est placée du côté du respect du droit. Nous soutenons pleinement l’Ukraine et l’exercice de sa légitime défense. Nous lui avons livré des équipements militaires qui jouent un rôle majeur pour appuyer sa contre-offensive. Je pense notamment aux dix-huit canons Caesar, mais aussi aux lance-roquettes unitaires qui ont été livrés hier. Très bien ! Nous continuerons cet effort, en particulier dans le domaine antiaérien, essentiel pour protéger la population des frappes russes. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.) Des systèmes Crotale seront livrés dans les tout prochains jours. Nous avons aussi contribué au lancement de la mission d’assistance militaire de l’Union européenne en soutien à l’Ukraine. Le ministre des armées, Sébastien Lecornu, a annoncé que nous allions former 2 000 soldats ukrainiens. Pour un pays comme la France, c’est à pleurer ! Vous nous lisez les pages du Monde . Où est la stratégie de la France ? Nous sommes également l’un des plus importants contributeurs à la Facilité européenne pour la paix, qui apporte un soutien en équipement militaire létal inédit au niveau européen. Nous pouvons donc être fiers de notre soutien militaire à l’Ukraine (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR) ; les Ukrainiens nous en sont d’ailleurs très reconnaissants. Mais notre aide ne se limite évidemment pas au domaine militaire.
Notre soutien est aussi civil et humanitaire, pour faire face à l’urgence et préparer la reconstruction. Nous consacrons à l’Ukraine un total de 2 milliards d’euros d’aide civile et humanitaire bilatérale. Dans le secteur humanitaire, nous avons consacré 200 millions d’euros pour financer des actions en Ukraine et dans les pays limitrophes. La semaine dernière encore, nous avons accueilli à Paris, sous l’égide du Président de la République, une nouvelle conférence de soutien à la Moldavie, qui se trouve en première ligne. (M. Jean-Charles Larsonneur applaudit.)
Le Centre de crise et de soutien a mené une trentaine d’opérations qui ont permis d’acheminer près de 2 400 tonnes d’aide, dont 1 000 tonnes pour la seule opération « Un bateau pour l’Ukraine » ; ce sont chaque fois des équipements indispensables en matière de sécurité civile, d’aide médicale et alimentaire ou de réhabilitation d’urgence, notamment des ponts mobiles pour la région de Tchernihiv. Enfin, face aux frappes actuelles, nous répondons aux besoins urgents de l’Ukraine pour passer l’hiver. C’est pour cela que nous venons d’envoyer 100 générateurs électriques sur place. Nous allons voter pour la résolution, mais franchement… Heureusement que nous avions pris notre décision avant d’écouter la secrétaire d’État ! Au-delà de l’effort humanitaire, nous avons également octroyé des prêts de 400 millions d’euros par l’intermédiaire de l’Agence française de développement et fléché 1,2 milliard d’euros vers des garanties à l’export bénéficiant à un large spectre de projets essentiels à la reconstruction de l’Ukraine. En parallèle, nous mobilisons, avec nos partenaires européens et internationaux, nos principaux instruments multilatéraux, à la fois pour répondre à l’urgence et pour préparer la reconstruction. Afin de poursuivre ces efforts et de mieux les coordonner au niveau international, le Président de la République accueillera le 13 décembre prochain, avec le président Zelensky, une conférence sur la résilience civile de l’Ukraine. Très bonne initiative ! Une paix durable ne sera pas obtenue si la justice n’est pas rendue, et la France apporte un soutien précieux aux autorités ukrainiennes dans leur lutte contre l’impunité. Nous soutenons les enquêtes de l’Ukraine, de la Cour pénale internationale et d’Eurojust afin de contribuer à la collecte des preuves de crime de guerre : nous avons envoyé trois équipes de médecins légistes et de gendarmes à Boutcha en avril, à Kiev fin juin, et dans la région de Kharkiv fin septembre, et nous entendons poursuivre ces missions. Nous avons également fourni deux laboratoires d’analyse ADN, dont le second sera transféré en Ukraine dans les prochains mois.
Mesdames et messieurs les députés, soyez assurés du soutien indéfectible que continuera d’apporter la France à l’Ukraine dans tous les domaines, aussi longtemps qu’il le faudra. (Mmes et MM. les députés des groupes RE, Dem et HOR, ainsi que plusieurs membres des groupes SOC et Écolo-NUPES se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) La conférence des présidents a décidé qu’il serait procédé à un scrutin public sur la proposition de résolution.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Benjamin Haddad.
Le groupe Renaissance soutiendra cette résolution avec détermination et gravité. Ces derniers jours, l’Assemblée nationale a voté à l’unanimité des résolutions de soutien au peuple arménien et au peuple iranien pour défendre leur liberté. C’est un message fort que la France envoie au monde…
Au monde, c’est vite dit !
Je ne suis pas sûr que cela sorte de l’hémicycle.
…et j’espère que nous verrons la même unanimité pour la défense des Ukrainiens. Je salue tout spécialement l’ambassadeur d’Ukraine, venu assister à nos débats.
(Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
À travers cette proposition de résolution, nous rappelons des vérités simples. Le 24 février, l’Ukraine a été victime d’une agression injustifiable et illégale de la part de la Russie. Depuis, le peuple ukrainien résiste aux bombardements, aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité avec un courage et un héroïsme qui forcent notre admiration.
À travers cette proposition de résolution, nous appelons à soutenir les Ukrainiens jusqu’à la victoire et jusqu’à la reconquête de leur territoire. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) Car il ne peut y avoir de paix s’il y a soumission à l’agresseur. La paix de soumission ne serait qu’une trêve, l’invitation à une nouvelle agression. Tel est le sens de la proposition de résolution.
À travers ce texte, nous rappelons une autre vérité simple : la France est grande quand elle est du côté de la liberté des peuples, des Européens et de ses alliés, et non dans la fascination des hommes forts. La France est grande quand elle est aux côtés des Ukrainiens, qui se battent pour leur liberté. Slava Ukraïni ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy. Nous soutenons, et nous avons toujours soutenu, les efforts de la France, du Président de la République et du Gouvernement pour défendre une position unanime en faveur du peuple ukrainien et contre l’agression russe. Marine Le Pen a toujours condamné clairement cette attaque illégale et tragique. La guerre a éclaté en pleine campagne présidentielle, mais pas une fois Marine Le Pen, principale candidate de l’opposition face à Emmanuel Macron, n’a tenté d’instrumentaliser cet événement à son profit, au détriment de la France et du peuple ukrainien. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) On ne parle pas de Marine Le Pen, on parle des Ukrainiens ! Chaque fois que cela s’est avéré nécessaire, les élus du Rassemblement national, réunis autour de Marine Le Pen, ont soutenu les efforts du Gouvernement de manière unanime.
Il est regrettable et déplorable que jamais vous n’ayez saisi cette main tendue pour unir les Français derrière une position française unanime (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR) , comme l’ont fait tous les grands présidents de la République française, que ce soit François Mitterrand, Jacques Chirac ou, évidemment, le général de Gaulle. Vous cherchez systématiquement à créer la division ! C’est factuellement faux ! Comme les maires des autres partis politiques, les maires Rassemblement national ont accueilli des réfugiés ukrainiens dans leurs communes et continueront de le faire, au nom d’un principe essentiel d’humanité et conformément au droit international auquel nous croyons tous.
Je m’interroge donc sur l’angle choisi par la majorité dans cette proposition de résolution. Vous nous reprochez de ne pas avoir soutenu la résolution de soutien à l’Ukraine au Parlement européen, mais Emmanuel Macron lui-même, ainsi que Joe Biden, ont refusé de qualifier la Russie « d’État promoteur du terrorisme ». (Protestations sur les bancs du groupe RE.)
De tels mots ne facilitent ni la paix ni la démocratie. Ils mettent de l’huile sur le feu d’une guerre déjà dévastatrice. En réalité, vous gênez l’action du Président de la République ! Il y a là un paradoxe terrible, causé par votre esprit de division : le Rassemblement national soutient davantage les initiatives du Président de la République que la majorité de l’Assemblée nationale et la majorité du Parlement européen ! (Mêmes mouvements.) Arrêtez ! Vous êtes poutinistes ! C’est un paradoxe terrible que le principal parti de l’opposition campe sur cette position ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Il est regrettable que la majorité nous présente une proposition de résolution servant en réalité ses propres ambitions fédéralistes et européennes au détriment de la paix sur le continent européen. Oh là là ! Oui, il faut un front uni et fort des démocraties européennes contre le régime russe ! Il faut d’ailleurs un front uni contre toutes les tyrannies, mais vous soutenez certaines d’entre elles… Ne confondez pas ce front uni avec vos rêves d’empire européen… Vous pouvez être bien meilleur ! Ce n’est pas à la hauteur ! …et d’armée européenne. La majorité des Français n’en veulent pas ! (Exclamations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Ils l’ont dit encore dernièrement. Pourquoi vous obstinez-vous à ne pas le comprendre ? Il ne faut pas confondre la justice internationale, la nécessité pour l’ONU et la Cour pénale internationale d’établir les faits et d’identifier les coupables en Ukraine, avec votre volonté d’instaurer un ordre international dont plus personne ne veut. C’est une honte pour la France ! Il faut restaurer l’ordre international. La France est le dernier membre du Conseil de sécurité de l’ONU à n’avoir jamais enfreint la Charte des Nations unies. Pourquoi n’en êtes-vous pas fiers ? Pourquoi vous alliez-vous à des pays qui n’ont pas respecté ce texte ? Cela n’a aucun sens ! C’est ce que vous dites qui n’a aucun sens ! Tous les présidents de la République française l’ont défendu ! Il faut rétablir le concert des nations. (Brouhaha.) Ce n’est pas la résolution, ça ! Faites une lettre à Poutine ! Chers collègues, j’aimerais pouvoir conclure mon intervention, qui n’a aucune intention polémique, dans la paix et la sérénité. (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Rien de ce que j’ai dit ne mérite vos hurlements ou vos critiques ! Explication de vote ? Le groupe Rassemblement national soutiendra toujours l’ambition d’un gouvernement français qui défend le seul rôle qui sied à la France :… C’est quoi le vote ? Tu la votes ou pas ? …celui d’être garante du droit international, de la Charte des Nations unies, de la souveraineté et de la sécurité des peuples et, surtout, de la paix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à Mme Nathalie Oziol. Pour notre famille politique, qui s’inscrit dans l’héritage des idéaux humanistes,… Quelle blague ! …la force n’a jamais permis de régler les différends géopolitiques. À son échelle, La France insoumise a toujours œuvré à la construction d’une paix juste et durable. Nous apportons notre soutien plein et entier au peuple ukrainien. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Nous approuvons le principe d’une proposition de résolution réaffirmant le soutien de l’Assemblée nationale à l’Ukraine et condamnant la guerre menée par Poutine. Toutefois, nous jugeons que ce texte n’est pas pleinement satisfaisant. (« Ah ! » sur les bancs des groupes RE et Dem.)
Mon collègue Aurélien Saintoul a énoncé les différents points du texte qui posent problème sur le fond et sur la forme. La proposition de résolution pose des questions qui n’existent pour personne et ne répond pas à celles qui mériteraient d’être posées.
Ainsi, pour obtenir la guerre,… Lapsus ! …pour obtenir la paix, voulais-je dire, on ne fait pas la guerre. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) Or, justement, la proposition de résolution propose de faire la guerre pour arriver à la paix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Ce texte ne mentionne jamais les modalités, les conditions dans lesquelles la guerre pourra cesser et surtout ne pas se reproduire. Ce devrait pourtant être son objet principal. Nous, on propose de soutenir les Ukrainiens ! C’est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons. (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Quelle faute politique ! Les missiles sont à l’Est et les pacifistes à l’Ouest ! À l’heure où nous parlons, 40 000 civils sont morts et plus de 15 000 sont portés disparus. Et vous vous abstenez ? Et vous les abandonnez ? Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 5,5 millions de personnes ont quitté l’Ukraine et 6,3 millions ont été déplacées au sein même du pays. Depuis plusieurs semaines, l’armée russe mène des frappes sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes,… Et sur des civils ! …et 6 millions de foyers se retrouvent privés d’électricité alors que les températures sont descendues au-dessous de zéro.
Si notre discours sur le nécessaire retour à la table des négociations a été peu entendu et souvent critiqué, force est de constater que ce sont désormais les Américains qui le reprennent, par la voix de leur président, Joe Biden, et de celle du chef d’état-major, Mark Milley. Doutant de la probabilité d’une victoire militaire ukrainienne, celui-ci a déclaré récemment : « Donc, quand il y a une possibilité de négocier, quand la paix peut être atteinte, saisissez-la. » Si je cite ces propos, ce n’est pas parce que nous avons eu une révélation au sujet de la diplomatie américaine mais parce qu’ils montrent que nous avons tous intérêt à l’apaisement. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Plus récemment encore, par voie de presse, Emmanuel Macron a lui-même parlé du retour à la table des négociations. Enfin, lors de la libération de Kherson, Volodymyr Zelensky a déclaré qu’il était prêt pour la paix, avant d’évoquer le début de la fin de la guerre. Ne parlez pas pour lui ! Je tiens à rappeler également que notre groupe a accueilli, il y a quelques semaines, nos camarades de la coalition des socialistes russes, qui nous ont fait part de leur volonté « de permettre à tout le peuple russe, qui vit dans la peur, d’avoir une voix ». L’un des moyens essentiels d’empêcher Poutine de poursuivre sa guerre est de nouer des liens avec ceux qui s’opposent à lui dans son propre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. André Chassaigne applaudit également.) Exactement ! Rappelons que ce n’est pas le peuple russe qui fait la guerre à l’Ukraine, mais Poutine et son oligarchie. (Mêmes mouvements.)
Aujourd’hui, à l’initiative de notre présidente de groupe, Mathilde Panot, deux commissions de l’Assemblée ont auditionné une délégation de militants ukrainiens, qui nous ont alertés sur les désastres écologiques causés par la guerre menée dans leur pays. Dans cette délégation figurait Yuliya Ovchynnykova, une députée qui appartient au parti de Volodymyr Zelensky. La délégation nous demande d’agir en vue d’obtenir la paix. Voilà précisément ce qui manque dans la proposition de résolution.
Comment œuvrer à la paix avec tous ceux qui, en Ukraine, militent pour la fin de la guerre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Stéphane Peu applaudit également.)
Comment faire pour que Poutine retire ses armées d’Ukraine ? À notre échelle, nous veillerons à ce que la reconstruction de l’Ukraine respecte différents critères. Tout d’abord, l’Ukraine doit retrouver sa souveraineté. Vous lui déniez sa souveraineté ! Ensuite, il faut que la reconstruction écologique du pays soit assurée. La protection du site nucléaire de Zaporijjia est, à ce titre, absolument nécessaire. Enfin, nous veillerons au respect des critères sociaux.
En attendant, nous soutenons toute initiative provenant de la société civile ukrainienne. Qui veut la paix prépare la paix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe GDR-NUPES.) Scandaleux ! Déshonorant ! La parole est à M. Pascal Lecamp. Comment ne pas soutenir cette proposition de résolution lorsqu’on connaît l’ignominie de la stratégie choisie par le président Poutine ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Ce sont des frappes quotidiennes sur la population civile, alliées à la privation d’eau, d’électricité et de chauffage. Cet hiver s’annonce lourd de morts chez les Ukrainiens…
Comment pouvons-nous ne pas unanimement apporter notre soutien à la proposition de résolution, ce soir, en présence de M. l’ambassadeur d’Ukraine ? (Mêmes mouvements.) Il a raison ! Avec d’autres parlementaires, j’étais jeudi et vendredi derniers à l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) à Varsovie. Au cours des deux jours de discussions qui se sont tenues à la Diète de Pologne, un seul sujet nous a occupés : l’Ukraine. Tous les pays présents ont affiché leur unanimité – la Russie n’était pas représentée. (M. André Chassaigne proteste.) Je sais, monsieur l’ambassadeur Omelchenko, que vous avez boycotté cette manifestation parce que vous souhaitez que la Russie soit exclue de l’OSCE pendant le conflit.
Je suis d’accord avec vous, monsieur Chassaigne : pour restaurer la paix, il faudra que tous les belligérants se retrouvent un jour autour de la table. C’est précisément la raison pour laquelle il faut préserver les espaces dans lesquels ce dialogue est possible. C’est la grandeur de la France ! À Varsovie, où les Russes ne pouvaient pas être présents pour une question de visas, une rencontre bilatérale d’une heure et demi a eu lieu entre la délégation française et la délégation ukrainienne. Deux points sont ressortis de cette rencontre.
Premièrement, l’Europe n’a pas pris la dimension des actes belliqueux commis par la Russie. Elle n’a pas saisi l’impossibilité de négocier avec elle.
Deuxièmement, la délégation ukrainienne a remercié cinq fois la France de son soutien militaire et de la livraison de canons Caesar, qui aident le pays à se protéger des agressions russes et à reconquérir son territoire.
La France apporte un soutien militaire fort à l’Ukraine au cœur du conflit. Elle lui apportera un soutien diplomatique fort pendant les négociations, un soutien civil fort au moment de la reconstruction et un soutien politique fort dans son parcours d’adhésion à l’Union européenne. La France veut être aux côtés d’une Ukraine libre et indépendante au sein de l’Europe.
Le groupe Démocrate soutiendra sans aucune réserve la proposition de résolution. Elle sera, je l’espère, adoptée très largement par notre assemblée, y compris par certains de nos amis de la NUPES. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.)
À travers cette proposition de résolution, nous rappelons des vérités simples. Le 24 février, l’Ukraine a été victime d’une agression injustifiable et illégale de la part de la Russie. Depuis, le peuple ukrainien résiste aux bombardements, aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité avec un courage et un héroïsme qui forcent notre admiration.
À travers cette proposition de résolution, nous appelons à soutenir les Ukrainiens jusqu’à la victoire et jusqu’à la reconquête de leur territoire. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) Car il ne peut y avoir de paix s’il y a soumission à l’agresseur. La paix de soumission ne serait qu’une trêve, l’invitation à une nouvelle agression. Tel est le sens de la proposition de résolution.
À travers ce texte, nous rappelons une autre vérité simple : la France est grande quand elle est du côté de la liberté des peuples, des Européens et de ses alliés, et non dans la fascination des hommes forts. La France est grande quand elle est aux côtés des Ukrainiens, qui se battent pour leur liberté. Slava Ukraïni ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy. Nous soutenons, et nous avons toujours soutenu, les efforts de la France, du Président de la République et du Gouvernement pour défendre une position unanime en faveur du peuple ukrainien et contre l’agression russe. Marine Le Pen a toujours condamné clairement cette attaque illégale et tragique. La guerre a éclaté en pleine campagne présidentielle, mais pas une fois Marine Le Pen, principale candidate de l’opposition face à Emmanuel Macron, n’a tenté d’instrumentaliser cet événement à son profit, au détriment de la France et du peuple ukrainien. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) On ne parle pas de Marine Le Pen, on parle des Ukrainiens ! Chaque fois que cela s’est avéré nécessaire, les élus du Rassemblement national, réunis autour de Marine Le Pen, ont soutenu les efforts du Gouvernement de manière unanime.
Il est regrettable et déplorable que jamais vous n’ayez saisi cette main tendue pour unir les Français derrière une position française unanime (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR) , comme l’ont fait tous les grands présidents de la République française, que ce soit François Mitterrand, Jacques Chirac ou, évidemment, le général de Gaulle. Vous cherchez systématiquement à créer la division ! C’est factuellement faux ! Comme les maires des autres partis politiques, les maires Rassemblement national ont accueilli des réfugiés ukrainiens dans leurs communes et continueront de le faire, au nom d’un principe essentiel d’humanité et conformément au droit international auquel nous croyons tous.
Je m’interroge donc sur l’angle choisi par la majorité dans cette proposition de résolution. Vous nous reprochez de ne pas avoir soutenu la résolution de soutien à l’Ukraine au Parlement européen, mais Emmanuel Macron lui-même, ainsi que Joe Biden, ont refusé de qualifier la Russie « d’État promoteur du terrorisme ». (Protestations sur les bancs du groupe RE.)
De tels mots ne facilitent ni la paix ni la démocratie. Ils mettent de l’huile sur le feu d’une guerre déjà dévastatrice. En réalité, vous gênez l’action du Président de la République ! Il y a là un paradoxe terrible, causé par votre esprit de division : le Rassemblement national soutient davantage les initiatives du Président de la République que la majorité de l’Assemblée nationale et la majorité du Parlement européen ! (Mêmes mouvements.) Arrêtez ! Vous êtes poutinistes ! C’est un paradoxe terrible que le principal parti de l’opposition campe sur cette position ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Il est regrettable que la majorité nous présente une proposition de résolution servant en réalité ses propres ambitions fédéralistes et européennes au détriment de la paix sur le continent européen. Oh là là ! Oui, il faut un front uni et fort des démocraties européennes contre le régime russe ! Il faut d’ailleurs un front uni contre toutes les tyrannies, mais vous soutenez certaines d’entre elles… Ne confondez pas ce front uni avec vos rêves d’empire européen… Vous pouvez être bien meilleur ! Ce n’est pas à la hauteur ! …et d’armée européenne. La majorité des Français n’en veulent pas ! (Exclamations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Ils l’ont dit encore dernièrement. Pourquoi vous obstinez-vous à ne pas le comprendre ? Il ne faut pas confondre la justice internationale, la nécessité pour l’ONU et la Cour pénale internationale d’établir les faits et d’identifier les coupables en Ukraine, avec votre volonté d’instaurer un ordre international dont plus personne ne veut. C’est une honte pour la France ! Il faut restaurer l’ordre international. La France est le dernier membre du Conseil de sécurité de l’ONU à n’avoir jamais enfreint la Charte des Nations unies. Pourquoi n’en êtes-vous pas fiers ? Pourquoi vous alliez-vous à des pays qui n’ont pas respecté ce texte ? Cela n’a aucun sens ! C’est ce que vous dites qui n’a aucun sens ! Tous les présidents de la République française l’ont défendu ! Il faut rétablir le concert des nations. (Brouhaha.) Ce n’est pas la résolution, ça ! Faites une lettre à Poutine ! Chers collègues, j’aimerais pouvoir conclure mon intervention, qui n’a aucune intention polémique, dans la paix et la sérénité. (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Rien de ce que j’ai dit ne mérite vos hurlements ou vos critiques ! Explication de vote ? Le groupe Rassemblement national soutiendra toujours l’ambition d’un gouvernement français qui défend le seul rôle qui sied à la France :… C’est quoi le vote ? Tu la votes ou pas ? …celui d’être garante du droit international, de la Charte des Nations unies, de la souveraineté et de la sécurité des peuples et, surtout, de la paix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à Mme Nathalie Oziol. Pour notre famille politique, qui s’inscrit dans l’héritage des idéaux humanistes,… Quelle blague ! …la force n’a jamais permis de régler les différends géopolitiques. À son échelle, La France insoumise a toujours œuvré à la construction d’une paix juste et durable. Nous apportons notre soutien plein et entier au peuple ukrainien. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Nous approuvons le principe d’une proposition de résolution réaffirmant le soutien de l’Assemblée nationale à l’Ukraine et condamnant la guerre menée par Poutine. Toutefois, nous jugeons que ce texte n’est pas pleinement satisfaisant. (« Ah ! » sur les bancs des groupes RE et Dem.)
Mon collègue Aurélien Saintoul a énoncé les différents points du texte qui posent problème sur le fond et sur la forme. La proposition de résolution pose des questions qui n’existent pour personne et ne répond pas à celles qui mériteraient d’être posées.
Ainsi, pour obtenir la guerre,… Lapsus ! …pour obtenir la paix, voulais-je dire, on ne fait pas la guerre. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) Or, justement, la proposition de résolution propose de faire la guerre pour arriver à la paix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Ce texte ne mentionne jamais les modalités, les conditions dans lesquelles la guerre pourra cesser et surtout ne pas se reproduire. Ce devrait pourtant être son objet principal. Nous, on propose de soutenir les Ukrainiens ! C’est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons. (Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Quelle faute politique ! Les missiles sont à l’Est et les pacifistes à l’Ouest ! À l’heure où nous parlons, 40 000 civils sont morts et plus de 15 000 sont portés disparus. Et vous vous abstenez ? Et vous les abandonnez ? Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, 5,5 millions de personnes ont quitté l’Ukraine et 6,3 millions ont été déplacées au sein même du pays. Depuis plusieurs semaines, l’armée russe mène des frappes sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes,… Et sur des civils ! …et 6 millions de foyers se retrouvent privés d’électricité alors que les températures sont descendues au-dessous de zéro.
Si notre discours sur le nécessaire retour à la table des négociations a été peu entendu et souvent critiqué, force est de constater que ce sont désormais les Américains qui le reprennent, par la voix de leur président, Joe Biden, et de celle du chef d’état-major, Mark Milley. Doutant de la probabilité d’une victoire militaire ukrainienne, celui-ci a déclaré récemment : « Donc, quand il y a une possibilité de négocier, quand la paix peut être atteinte, saisissez-la. » Si je cite ces propos, ce n’est pas parce que nous avons eu une révélation au sujet de la diplomatie américaine mais parce qu’ils montrent que nous avons tous intérêt à l’apaisement. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Plus récemment encore, par voie de presse, Emmanuel Macron a lui-même parlé du retour à la table des négociations. Enfin, lors de la libération de Kherson, Volodymyr Zelensky a déclaré qu’il était prêt pour la paix, avant d’évoquer le début de la fin de la guerre. Ne parlez pas pour lui ! Je tiens à rappeler également que notre groupe a accueilli, il y a quelques semaines, nos camarades de la coalition des socialistes russes, qui nous ont fait part de leur volonté « de permettre à tout le peuple russe, qui vit dans la peur, d’avoir une voix ». L’un des moyens essentiels d’empêcher Poutine de poursuivre sa guerre est de nouer des liens avec ceux qui s’opposent à lui dans son propre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. André Chassaigne applaudit également.) Exactement ! Rappelons que ce n’est pas le peuple russe qui fait la guerre à l’Ukraine, mais Poutine et son oligarchie. (Mêmes mouvements.)
Aujourd’hui, à l’initiative de notre présidente de groupe, Mathilde Panot, deux commissions de l’Assemblée ont auditionné une délégation de militants ukrainiens, qui nous ont alertés sur les désastres écologiques causés par la guerre menée dans leur pays. Dans cette délégation figurait Yuliya Ovchynnykova, une députée qui appartient au parti de Volodymyr Zelensky. La délégation nous demande d’agir en vue d’obtenir la paix. Voilà précisément ce qui manque dans la proposition de résolution.
Comment œuvrer à la paix avec tous ceux qui, en Ukraine, militent pour la fin de la guerre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Stéphane Peu applaudit également.)
Comment faire pour que Poutine retire ses armées d’Ukraine ? À notre échelle, nous veillerons à ce que la reconstruction de l’Ukraine respecte différents critères. Tout d’abord, l’Ukraine doit retrouver sa souveraineté. Vous lui déniez sa souveraineté ! Ensuite, il faut que la reconstruction écologique du pays soit assurée. La protection du site nucléaire de Zaporijjia est, à ce titre, absolument nécessaire. Enfin, nous veillerons au respect des critères sociaux.
En attendant, nous soutenons toute initiative provenant de la société civile ukrainienne. Qui veut la paix prépare la paix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe GDR-NUPES.) Scandaleux ! Déshonorant ! La parole est à M. Pascal Lecamp. Comment ne pas soutenir cette proposition de résolution lorsqu’on connaît l’ignominie de la stratégie choisie par le président Poutine ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Ce sont des frappes quotidiennes sur la population civile, alliées à la privation d’eau, d’électricité et de chauffage. Cet hiver s’annonce lourd de morts chez les Ukrainiens…
Comment pouvons-nous ne pas unanimement apporter notre soutien à la proposition de résolution, ce soir, en présence de M. l’ambassadeur d’Ukraine ? (Mêmes mouvements.) Il a raison ! Avec d’autres parlementaires, j’étais jeudi et vendredi derniers à l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) à Varsovie. Au cours des deux jours de discussions qui se sont tenues à la Diète de Pologne, un seul sujet nous a occupés : l’Ukraine. Tous les pays présents ont affiché leur unanimité – la Russie n’était pas représentée. (M. André Chassaigne proteste.) Je sais, monsieur l’ambassadeur Omelchenko, que vous avez boycotté cette manifestation parce que vous souhaitez que la Russie soit exclue de l’OSCE pendant le conflit.
Je suis d’accord avec vous, monsieur Chassaigne : pour restaurer la paix, il faudra que tous les belligérants se retrouvent un jour autour de la table. C’est précisément la raison pour laquelle il faut préserver les espaces dans lesquels ce dialogue est possible. C’est la grandeur de la France ! À Varsovie, où les Russes ne pouvaient pas être présents pour une question de visas, une rencontre bilatérale d’une heure et demi a eu lieu entre la délégation française et la délégation ukrainienne. Deux points sont ressortis de cette rencontre.
Premièrement, l’Europe n’a pas pris la dimension des actes belliqueux commis par la Russie. Elle n’a pas saisi l’impossibilité de négocier avec elle.
Deuxièmement, la délégation ukrainienne a remercié cinq fois la France de son soutien militaire et de la livraison de canons Caesar, qui aident le pays à se protéger des agressions russes et à reconquérir son territoire.
La France apporte un soutien militaire fort à l’Ukraine au cœur du conflit. Elle lui apportera un soutien diplomatique fort pendant les négociations, un soutien civil fort au moment de la reconstruction et un soutien politique fort dans son parcours d’adhésion à l’Union européenne. La France veut être aux côtés d’une Ukraine libre et indépendante au sein de l’Europe.
Le groupe Démocrate soutiendra sans aucune réserve la proposition de résolution. Elle sera, je l’espère, adoptée très largement par notre assemblée, y compris par certains de nos amis de la NUPES. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.)
Je mets aux voix la proposition de résolution.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 399
Nombre de suffrages exprimés 304
Majorité absolue 153
Pour l’adoption 303
Contre 1 (L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble de la proposition de résolution.)
(À l’exception des députés du groupe RN, Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent en direction de M. Vadym Omelchenko, ambassadeur d’Ukraine. – M. l’ambassadeur Vadym Omelchenko applaudit également.)
Nombre de votants 399
Nombre de suffrages exprimés 304
Majorité absolue 153
Pour l’adoption 303
Contre 1 (L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble de la proposition de résolution.)
(À l’exception des députés du groupe RN, Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent en direction de M. Vadym Omelchenko, ambassadeur d’Ukraine. – M. l’ambassadeur Vadym Omelchenko applaudit également.)
L’ordre du jour appelle la discussion, en application de l’article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution appelant à un accord ambitieux lors de la quinzième conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique (no 392).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Marc Zulesi.
En présentant une résolution appelant le Gouvernement à soutenir un accord ambitieux lors de la prochaine conférence des parties (COP) à la Convention sur la diversité biologique, nous tenons à ce que l’Assemblée nationale se saisisse d’une des questions politiques les plus essentielles de notre temps : le maintien de la vie.
Pour se nourrir, se loger, se livrer à l’ensemble de ses activités économiques et sociales, l’humanité a utilisé de plus en plus d’espace, mordant années après années sur les espaces naturels, au point que seules 5 % de la surface de la terre demeureraient totalement inaltérées. La sixième extinction, en cours, est inédite, par sa rapidité et par son origine humaine.
La question de la biodiversité s’est donc invitée à l’agenda des Nations unies quasiment en même temps que celle du climat. La COP biodiversité vise un triple objectif : conserver la diversité biologique ; promouvoir sa durabilité ; renforcer le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques.
Pourquoi défendons-nous cette proposition de résolution ? La COP15 sera l’une des plus importantes depuis que les Nations unies se consacrent à la biodiversité. Néanmoins, disons-le, les conditions pour parvenir à un accord ne sont pas encore entièrement réunies. Le présent texte vise à donner au Gouvernement les moyens de se prévaloir d’un soutien clair et sans faille de notre assemblée, afin de soutenir les objectifs de la France et de l’Union européenne : préserver 30 % des terres et 30 % des océans ; nous engager à réduire autant que possible l’empreinte écologique des activités humaines ; reconnaître le rôle passé et présent des peuples autochtones dans la conservation de la biodiversité ; mobiliser des ressources financières pour permettre aux pays en développement de préserver la biodiversité sans entraver leur marche vers le bien-être.
La COP15 de Montréal constituera un rendez-vous crucial pour l’avenir de la planète. En 2021, 28 % des espèces étudiées figuraient sur la liste des espèces menacées. Au rythme actuel des déforestations, les forêts tropicales pourraient avoir disparu entre 2070 et 2090. Au-delà de ces tristes données, c’est une conception de notre monde qui est en jeu. Rappelons d’abord que la disparition d’une espèce entraîne souvent la disparition de celles qui lui sont liées. Si nous n’y prenons garde, l’être humain disparaîtra un jour, faute de pouvoir trouver dans la nature, par un prélèvement raisonné, les ressources dont il a besoin pour se nourrir et se soigner.
La COP15 ne consiste pas simplement à créer de vastes zones naturelles. Elle nous oblige à réfléchir à notre place et à notre rôle sur terre ; elle nous oblige également, puisque nous sommes l’espèce la plus évoluée – du moins, je le crois –, à assumer nos responsabilités à l’égard du vivant.
Je formule le vœu, qui m’est cher, que la présente proposition de résolution soit votée à l’unanimité de notre assemblée, tout en étant conscient que la question de la biodiversité est traversée par des divisions. Elle vise pourtant des objectifs suffisamment ambitieux pour mériter votre soutien, d’autant qu’ils seront difficiles à atteindre. Ils se situent dans la droite ligne de notre politique étrangère en matière d’écologie, marquée le 7 novembre dernier par la déclaration du Président de la République en faveur de l’interdiction d’exploiter les grands fonds marins. Notre collègue Nicolas Thierry a d’ailleurs déposé une proposition de résolution en ce sens. Nous ne pouvons présager d’un succès de la COP15 : soutenons ensemble une ambition commune et forte en faveur de la biodiversité.
Chers collègues, je vous appelle à adopter cette résolution, qui exprimera l’engagement de notre nation, de notre assemblée, à défendre la vie sur terre. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.) La parole est à M. Pierrick Berteloot. Le projet d’adopter une réglementation internationale durant cette COP est l’occasion de mener à bien la politique essentielle de protection des biodiversités. Pour y parvenir, il faudrait néanmoins que celle-ci s’inscrive dans une politique globale et cohérente, afin que le texte ne devienne pas un énième accord de bonne volonté, que nous laisserons traîner sous une pile de dossiers jusqu’à la COP suivante.
Par la proposition de résolution présentée aujourd’hui, la France entend défendre l’objectif de 30 % de zones protégées en mer et sur terre à l’horizon 2030 ainsi qu’une mesure de participation financière des États.
J’aimerais tout d’abord évoquer l’objectif de 30 % de zones protégées, auquel nous voulons rallier les Nations unies. Notre pays fait partie de ceux qui comptent le plus grand nombre de normes environnementales et écologiques au monde. (Exclamations sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.) Elles pèsent sur l’urbanisme de nos communes, sur l’activité de nos entreprises, sur les productions de nos industries, sur les exploitations de nos agriculteurs, et sur tout le quotidien de nos concitoyens. Combien de pays dans le monde peuvent en dire autant ?
Malgré cette terrible réalité, certains mouvements politiques pensent toujours que c’est en se culpabilisant et en alourdissant la chape de plomb qui pèse sur les Français que toutes les solutions émergeront. Croire en de pareilles inepties revient à emprunter le chemin de la facilité ; c’est la conséquence d’une idéologie aussi incohérente qu’illusoire.
Nous demandons à notre peuple et à notre économie de multiplier les efforts au nom de l’écologie et de l’environnement, cependant que nous multiplions les contrats avec des pays qui ne respectent aucune norme.
Nous pourrions pourtant parler de la Chine, premier pollueur mondial, et de sa politique, qui considère l’environnement comme une denrée indéfiniment remplaçable. Nous pourrions parler des accords passés avec les États-Unis : tandis que la France interdit sur son sol l’exploitation du gaz de schiste, nous importons en 2022 plus de 3 millions de tonnes de GNL – gaz naturel liquéfié – venant de l’Amérique. Ainsi, du moment que le gaz est originaire des États-Unis, il ne pollue pas ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.) Les exemples sont encore nombreux, comme la déforestation au Brésil ou les mines de cobalt en République démocratique du Congo.
La protection de la biodiversité et de l’environnement ne se réglera pas par 10 000 COP, qui ne peuvent se suffire à elles-mêmes, mais bel et bien par une diplomatie pragmatique, sans hypocrisie et sans langue de bois ! (Mme Béatrice Roullaud et M. Jean-Philippe Tanguy applaudissent.)
Toutes les entreprises qui s’installent en France doivent se conformer à des règles de protection de l’environnement extrêmement contraignantes, ce qui n’est pas le cas de l’écrasante majorité des pays dont nos entreprises subissent pleinement la concurrence. Est-ce ainsi que nous voulons défendre nos ambitions environnementales ? Nous devons subordonner les accords de libre-échange à de réelles conditions réciproques de respect des droits de l’homme et de l’environnement, afin de faire cesser cette concurrence déloyale qui devient insupportable ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
La réindustrialisation de notre territoire constitue également une manière de s’assurer du respect de nos normes environnementales. Sans cette mesure, qui ne relève que du bon sens, nous pourrons fixer tous les objectifs du monde, ils ne seront jamais atteints.
Des règles insensées viennent entraver notre économie et le pouvoir d’achat de nos concitoyens, alors qu’elles ne pourront jamais contrebalancer l’effet que provoquent sur le climat, sur l’environnement et sur la biodiversité le Ceta – Accord économique et commercial global – signé avec le Canada ou l’Accord global sur les investissements, conclu avec la Chine.
Il y a un second point dans ce projet de résolution : l’objectif d’augmenter la participation financière des États à cette politique commune, sans aucune forme de garantie. Je dois bien avouer que cela nous pose un énorme problème. Par cette mesure, la France demande à son peuple, qui traverse une crise économique et énergétique majeure, de mettre encore la main à la poche pour financer un projet opaque, sans contrôle des dépenses ni obligation de résultat. Sur ce point, notre position est claire : les Français paient trop et, hélas, trop souvent, pour rien.
Pour toutes les raisons que je viens de citer, nous considérons que la ligne politique du Gouvernement est fourbe et malicieuse. Si cette proposition de résolution, comme la COP à venir, tend à instaurer un cadre mondial féerique, sans aucunement prendre en considération les réalités internationales, nous perdrons une fois de plus notre temps et notre argent.
Le groupe Rassemblement national s’abstiendra donc sur le vote de ce texte. Car si un objectif international de protection de la biodiversité est indispensable, prévoir un chèque en blanc avec l’argent des Français, sans contrôle ni contrepartie, serait une pure folie. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Aymeric Caron. Olé ! Aucun des objectifs de protection de la biodiversité définis par la Convention d’Aichi en 2010 n’a été atteint. On peut toujours se consoler en se disant que, si ces objectifs n’avaient pas existé, la situation serait encore pire. C’est toutefois une bien maigre consolation, car l’extinction du vivant se poursuit inexorablement.
Le chiffre le plus marquant est probablement celui fourni par le WWF – Fonds mondial pour la nature –, qui établit que les populations mondiales d’oiseaux, de mammifères, de reptiles, d’amphibiens et de poissons ont décliné de 69 % depuis 1970. En France par exemple, les populations d’oiseaux ont diminué de 30 % en trente ans. Les populations de hérissons sont en baisse, tout comme les populations de chauves-souris, et celles des espèces que l’on ignore ou que l’on méprise, telles que les abeilles ou les vers de terre, pourtant essentielles au vivant, en particulier pour la culture de notre nourriture végétale. Nous, l’espèce humaine, sommes responsables de l’extinction en cours, pourtant nous ne faisons rien pour enrayer la catastrophe.
Les COP sur la biodiversité n’ont jusqu’à présent servi qu’à produire des déclarations d’intention, comme celle sur laquelle nous devons nous prononcer aujourd’hui. Leur objectif réel est de disculper les gouvernements de l’accusation d’indifférence. Pas plus que les autres pays, la France n’est à la hauteur des enjeux.
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a publié il y a deux ans un rapport très critique sur l’inaction de notre pays, qui manque de moyens humains et financiers pour protéger le vivant, comme en atteste la situation de l’Office français de la biodiversité (OFB). Par ailleurs, les lois qui vont dans le bon sens ne sont pas appliquées, comme la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, qui prévoyait de « réduire à zéro la perte nette de biodiversité ». Aujourd’hui même, la presse rapporte que, malgré l’interdiction en vigueur depuis le 1er janvier 2022, la France continue à exporter massivement des milliers de tonnes de pesticides toxiques.
Ceux qui nous gouvernent ont également pris des décisions graves, comme celles d’autoriser à nouveau les néonicotinoïdes, de détricoter le droit de l’environnement et de laisser une réglementation laxiste provoquer une artificialisation excessive des sols. Les outre-mer hébergent 80 % de la biodiversité française, mais sont privés de toute politique ambitieuse de protection du vivant. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Jiovanny William applaudit également.) Il a raison ! Il faut ajouter la soumission de ce gouvernement aux lobbies de l’industrie agroalimentaire et de la chasse. Les chasseurs sont tellement privilégiés par votre gouvernement, madame la secrétaire d’État chargée de l’écologie, qu’ils sont désormais légalement désignés – c’est tristement ironique – comme des agents de protection de la biodiversité. Prétendre protéger le vivant en tuant ses représentants, il fallait oser, surtout dans notre pays, qui est celui d’Europe où l’on chasse le plus d’espèces, et même des espèces menacées. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
La résolution que vous nous proposez de soutenir poursuit cette logique des déclarations inutiles, car floues et sans ambition réelle. Elle réclame « […] des engagements clairs pour réduire l’empreinte écologique des activités humaines et la ramener dans ses limites planétaires ».
« Les limites planétaires » : l’objectif est bon, mais concrètement, ça veut dire quoi ? L’empreinte écologique des Français est telle que nous produisons et consommons trois fois plus en une année que ce que la planète peut régénérer pendant cette période. Pourquoi ne pas indiquer clairement que le seul moyen de venir en aide au vivant consiste à revoir de fond en comble notre modèle économique ? On ne sauvera pas la biodiversité si on ne renonce pas au modèle agro-industriel ; si on ne renonce pas à mener des politiques économiques qui reposent sur des logiques de production et de consommation excessives, avec des rendements financiers nécessairement maximaux ; si on ne renonce pas à l’urbanisation démesurée ; si on ne lutte pas véritablement contre le changement climatique.
Chers collègues, une économie qui repose sur le dogme de la croissance prend nécessairement le monde naturel comme adversaire et sème la ruine écologique. C’est ainsi : on ne peut pas à la fois faire croître le PIB et faire diminuer l’empreinte écologique. (Mme Marie Pochon applaudit.) On ne peut pas découpler la croissance et les ressources naturelles, c’est-à-dire les matières. Même le Giec – Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – et l’IPBES – Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques –, qui ne sont pas des organes de la gauche écologiste radicale, défendent cette idée.
Alors que faire si l’on veut réellement préserver la biodiversité ? Il nous faut tendre vers un nouvel imaginaire politique, qui doit intégrer l’idée que le vivant ne peut être réduit à sa valeur marchande. Nous devons lui reconnaître une valeur intrinsèque ; nous devons repenser notre rapport aux objets, au temps, au travail, à la consommation ; nous devons interroger le sens des vies que nous menons ; nous devons prendre le temps de réfléchir au sens du mot bonheur, qui n’a aucun lien avec les verbes posséder ou dominer.
Nous sommes une partie de la biodiversité et la question qui se pose est celle de notre propre survie. Celle-ci implique d’assumer notre statut d’espèce responsable pour toutes les autres. Aucun de ces objectifs ne transparaît dans la résolution qui nous est proposée. C’est pour cela que le groupe La France insoumise s’abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. Emmanuel Maquet. Chaque année, 10 000 à 40 000 espèces disparaissent de la surface de la planète ; 28 % des espèces restantes sont menacées d’extinction d’ici à la fin du siècle : l’appauvrissement de la biodiversité se poursuit inexorablement. Votre proposition de résolution à ce sujet, pleine de bonnes intentions, appelle le Gouvernement à s’engager fortement lors de la COP15 sur la biodiversité. Cette conférence s’inscrit dans un contexte international chargé. L’ultime session de négociations, tenue en juin à Nairobi, a révélé de lourds désaccords, qui font craindre un nouvel échec, après les fameux objectifs d’Aichi de 2010, dont jamais aucun n’a été atteint.
Vos déboires de politique intérieure, la fragilité du commerce extérieur, le lent affaiblissement du réseau diplomatique, les va-et-vient permanents de la parole présidentielle : tout cela nous laisse dubitatifs quant à la capacité réelle de la France à peser dans ces négociations et à mener un combat aussi capital. Eh oui ! M. Maquet a raison ! Si le Gouvernement n’est pas capable de convaincre l’Allemagne, comment fera-t-il avec la Chine et les pays d’Afrique, où la biodiversité est un enjeu de première importance, mais où notre influence n’a jamais été aussi faible ? Le point majeur que vous souhaitez voir défendu par le Gouvernement est la préservation de 30 % des terres rares et des mers d’ici à 2030. Il ne sera pas trop dur à défendre, la France l’ayant déjà atteint grâce à une politique ancienne et renouvelée de protection des espaces naturels, lancée dès les années 1960 sous le général de Gaulle, avec la création des parcs nationaux. Exact ! Cet engagement fort de préserver, protéger et transmettre le patrimoine dont nous avons hérité, nous le poursuivons au sein de notre famille politique avec la demande de création, à l’initiative de nos collègues membres de la commission développement durable, d’une mission d’information sur le suivi des objectifs climatiques de la France.
C’est pourquoi nous regrettons l’écart permanent entre les discours et les actes qui transparaît dans la politique du Gouvernement en matière de biodiversité. Quel dommage ! La France a ainsi engagé avec la Grande-Bretagne et le Costa Rica la Coalition de la haute ambition pour la nature et les peuples, afin de défendre le double objectif de protection de 30 % de terres rares et de mers en 2030. Mais, par excès d’ambition ou par activisme désordonné, nous avons fini par agacer nos partenaires, qui veulent réorienter cette action dans un sens plus opérationnel. C’est fort dommageable ! Autre exemple : lors de la COP27 en Égypte, le Président de la République s’est engagé à soutenir l’interdiction de l’exploitation des grands fonds marins, sans donner plus de suite à son engagement, comme s’il craignait d’hypothéquer la seule richesse qu’il nous reste avec la large superficie des zones économiques exclusives. Enfin, comment voulons-nous que notre parole porte à l’extérieur si, en même temps, à l’intérieur, le Gouvernement développe à toute force les éoliennes sur terre au détriment de la protection des oiseaux, et en mer, alors qu’on ignore tout de conséquences sur la biodiversité marine ? C’est un grand écart ! Ces contradictions entre nos paroles et nos actes, les autres les voient. Elles rendent avant tout service à ceux qui veulent en faire le moins possible.
Demander au Gouvernement de prendre des engagements forts sur la biodiversité, c’est aussi risquer de voir l’État sacrifier les secteurs les plus fragiles de l’économie et se décharger de ses responsabilités sur les territoires. Ainsi, l’État se débarrasse de la gestion des zones Natura 2000 sur les régions, étrangle le budget des agences de l’eau en leur faisant payer pour la biodiversité et la renaturation des villes, et fait peser sur les petites communes l’immense effort nécessaire pour atteindre en 2050 l’objectif de zéro artificialisation nette, fixé par l’exécutif. Les petites communes sont prises à la gorge ! Les maires n’en peuvent plus ! De même, la suppression des subventions dites nuisibles à la biodiversité, axe privilégié des politiques de lutte pour la biodiversité encouragées aux niveaux national et international, cible essentiellement les agriculteurs et les pêcheurs.
La défense de la biodiversité est souvent l’alibi des vieilles lunes anticapitalistes et de leur opposition systématique à toute activité économique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Pourtant, l’environnement n’est jamais mieux protégé que dans les sociétés développées. Croissance économique et défense de la biodiversité ne sont pas incompatibles. C’est toujours par la croissance qu’on défend l’environnement, non l’inverse. Eh oui ! Eh non ! J’en veux pour preuve le fait que, contrairement à une idée reçue, la surface forestière croît en France depuis trente ans, comme dans tous les pays développés.
Il est nécessaire de relancer l’activité en France avec de hauts standards d’exigence en matière de protection de la biodiversité, pour éviter la pollution importée que nous connaissons depuis trop d’années ; de mieux encadrer le commerce mondial, qui favorise la diffusion d’espèces invasives et encourage l’importation de bois issus de la déforestation chinoise, brésilienne ou indonésienne, alors que notre pays s’évertue à replanter des forêts,… Bravo, enfin du bon sens ! …de mettre aux mêmes standards européens les pratiques agricoles et halieutiques, plutôt que de toujours taper sur les producteurs français.
C’est avec bienveillance que nous accueillons votre proposition de résolution, mais nous restons sceptiques quant à la capacité du Gouvernement à l’appliquer. Afin de ne pas cautionner l’un ni condamner l’autre, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Excellent ! La parole est à M. Frédéric Zgainski. En 1992, lors du Sommet de la terre de Rio de Janeiro, la Convention sur la diversité biologique reconnaissait l’importance de la conservation de la biodiversité pour l’ensemble de l’humanité. Trente ans plus tard, je ne peux le démentir. Les bénéfices de la biodiversité ne sont pas quantifiables, tant elle apporte à tous et toutes les ressources nécessaires à notre survie, à notre développement et à notre condition humaine entière.
Quand nous parlons de biodiversité, nous ne parlons pas seulement d’espèces animales et végétales, mais de leur diversité génétique et des écosystèmes complexes qu’elles génèrent. Toutes les réponses à nos besoins primaires s’y trouvent. Or ces réponses sont en train de devenir des interrogations, en raison de l’érosion de la biodiversité de la planète.
Il nous faut le rappeler sans cesse : les activités humaines entraînent l’érosion de la biodiversité. Dégradation des terres, réchauffement climatique, pollutions, espèces exotiques envahissantes : tels sont les maux qui nous accablent et contre lesquels nous devons lutter, chacun, individuellement, et tous, collectivement. N’oublions pas l’alerte du Giec : près de 30 % des espèces végétales et animales vont connaître un risque croissant d’extinction : une crise massive mondiale est en cours. Ceci n’est pas un phénomène anodin. La plateforme intergouvemementale sur la biodiversité et les services écosystémiques nous le rappelle : la surexploitation humaine de ces ressources menace la survie des populations.
Quand il nous faut une réponse mondiale, l’espèce humaine pèche. Nous devons nous interroger au sujet des négociations entre les délégations du monde entier lors des réunions de préparation de la prochaine COP15. Si la réponse n’est pas globale, alors elle n’est pas. La COP15, qui se tiendra en décembre à Montréal, doit tenir compte de cet enjeu majeur.
Mais j’ai bon espoir, parce que je sais que la France sera au rendez-vous de l’histoire et qu’elle apporte toujours une réponse, alors que beaucoup d’autres pays doutent. J’ai bon espoir, parce que la France n’a pas attendu la COP15 pour agir. En plus des nombreuses actions menées par le Gouvernement, elle a organisé la première édition du One Planet Summit, entièrement dédié à la protection de la biodiversité, ainsi que le Congrès mondial de la nature de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), lors duquel le manifeste de Marseille, présentant des engagements forts, a été acté.
J’ai bon espoir, parce que je connais votre compétence et votre dévouement, madame la secrétaire d’État, à la préservation de la biodiversité. Immédiatement après votre entrée en fonction cet été, vous êtes venue vous inquiéter des conséquences sur la biodiversité des incendies ravageurs qui ont touché les forêts de Gironde. Les annonces que vous avez faites sont ambitieuses, mesurées et pertinentes : 150 millions issus du Fonds vert dédiés à l’accompagnement de la stratégie nationale biodiversité ; concernant les aires protégées, l’atteinte, au plus vite, de l’objectif de 10 % du territoire sous protection forte d’ici à 2022 ; le lancement de sept nouveaux plans nationaux d’actions de protection d’espèces sensibles ; des actions fortes en faveur de la protection des cétacés.
Madame la secrétaire d’État, je sais que vous arriverez à faire entendre la voix de la France, afin de préserver et de restaurer la biodiversité ; que vous défendrez une position ambitieuse en proposant des solutions concrètes et mesurées ; que vous poursuivrez les efforts déjà accomplis de mobilisation des ressources financières ; que vous trouverez des solutions concernant le traitement des informations de séquençage numérique ; que vous contribuerez, enfin, à l’adoption d’un mécanisme efficace de redevabilité.
Je souhaite remercier M. le président de la commission du développement durable pour son travail, fruit d’une belle initiative parlementaire transpartisane qui nous fait honneur à toutes et tous. Le groupe Démocrate votera en faveur de la proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.) La parole est à Mme Chantal Jourdan. La biodiversité connaît une crise mondiale majeure. Un récent rapport du Fonds mondial pour la nature indique que les populations de vertébrés – poissons, oiseaux, mammifères, amphibiens et reptiles –, étudiées sur plusieurs décennies, ont chuté de 69 % en moyenne entre 1970 et 2018.
La COP15 qui se tiendra à Montréal en décembre représente une occasion unique d’avancer pour la protection de la biodiversité à l’échelle mondiale. Aussi, je remercie Jean-Marc Zulesi de donner aux membres de l’Assemblée l’occasion de s’exprimer en faveur d’une COP15 ambitieuse, à la hauteur des enjeux actuels. Cette expression est particulièrement bienvenue alors que la Conférence des parties sur la diversité biologique reste relativement méconnue. Les associations craignent d’ailleurs que cette chance de protéger l’environnement nous échappe. Le fait que les chefs d’État ne soient pas directement conviés à l’événement participe à cette crainte. Le fait que le texte final issu de la COP27, qui s’est tenue il y a quelques jours, ne mentionne pas l’occasion cruciale qu’est la COP15 est également inquiétant. Cela démontre la persistance des obstacles à une approche plus intégrée, « malgré les appels des scientifiques et des peuples autochtones », ainsi que le souligne le directeur de Campaign for Nature, Brian O’Donnell.
Nous avons un rôle à jouer pour sensibiliser le plus grand nombre à l’importance de ces discussions et pour mobiliser autour de cet événement. Cette proposition de résolution nous en donne l’occasion. Les députés du groupe Socialistes et apparentés, qui en partagent les objectifs, la voteront. (M. Jean-Marc Zulesi applaudit.)
La France doit être force motrice en matière de protection de la biodiversité. Elle devra soutenir, lors de la COP15, la position commune adoptée par les États de l’Union européenne, qui réclament un engagement mondial s’accompagnant de la réalisation, d’ici à 2030, d’objectifs tels que la protection effective d’« au moins 30 % des terres émergées et 30 % des océans » ou la restauration de « 3 milliards d’hectares d’écosystèmes terrestres dégradés » et d’autant d’écosystèmes océaniques. Nous approuvons ce niveau d’ambition.
Néanmoins, pour être réaliste, il nécessite des moyens financiers très importants. Dans un contexte où, globalement, notamment dans le budget de la France, les moyens financiers dédiés à la protection et à la restauration de la biodiversité restent faibles, nous alertons sur le besoin d’une volonté politique forte pour parvenir à mobiliser les fonds nécessaires. Pour que la France puisse défendre le message selon lequel un accord ambitieux est nécessaire, elle doit elle-même se fixer des objectifs ambitieux et, surtout, se donner les moyens de les atteindre.
Je profite de cette occasion pour rappeler plusieurs points, notamment budgétaires, qui ne vont pas dans le bon sens. Par exemple, les moyens dévolus à l’Office national des forêts – ONF – sont largement insuffisants. La diminution de vingt postes en 2023 est complètement à rebours des besoins du terrain pour protéger et restaurer notre bien commun qu’est la forêt, laquelle abrite une biodiversité d’une grande richesse.
Les moyens dévolus à la transition de notre modèle agricole vers l’agroécologie sont également insuffisants et, à certains égards, mal orientés. Nous le dénonçons régulièrement : les aides issues de la politique agricole commune doivent être davantage fléchées pour accompagner les agriculteurs vers des productions réellement respectueuses de la santé humaine, de l’environnement et donc de la biodiversité.
Je veux dire un mot sur les haies, sujet qui me tient à cœur car il a une importance très particulière pour la protection de la biodiversité et pour la création d’écosystèmes riches et résilients. Alors que le plan France relance avait prévu des fonds pour la plantation et l’entretien des haies, aucune reconduction budgétaire n’est prévue dans le projet de loi de finances pour 2023. C’est tout à fait problématique, les démarches engagées risquant de fortement ralentir, voire de s’arrêter.
Plus largement, vous invitez le Gouvernement à défendre des engagements clairs « afin de réduire l’empreinte écologique des activités humaines et de la ramener dans ses limites planétaires ». Comme l’ont montré les travaux du Giec, cela suppose une réelle bifurcation de notre modèle de développement, de notre façon de produire et de consommer, qui doivent s’appuyer sur une réelle sobriété et pas uniquement sur quelques économies d’énergie.
Telle n’est pas vraiment l’orientation soutenue par le Gouvernement et sa majorité, ce qui est fort regrettable. Aussi, tout en soutenant les objectifs de cette proposition de résolution relative à la COP15, appelons-nous le Gouvernement et sa majorité à s’inspirer de ceux-ci pour l’élaboration des politiques publiques conduites en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) La parole est à Mme Anne-Cécile Violland.
Pour se nourrir, se loger, se livrer à l’ensemble de ses activités économiques et sociales, l’humanité a utilisé de plus en plus d’espace, mordant années après années sur les espaces naturels, au point que seules 5 % de la surface de la terre demeureraient totalement inaltérées. La sixième extinction, en cours, est inédite, par sa rapidité et par son origine humaine.
La question de la biodiversité s’est donc invitée à l’agenda des Nations unies quasiment en même temps que celle du climat. La COP biodiversité vise un triple objectif : conserver la diversité biologique ; promouvoir sa durabilité ; renforcer le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques.
Pourquoi défendons-nous cette proposition de résolution ? La COP15 sera l’une des plus importantes depuis que les Nations unies se consacrent à la biodiversité. Néanmoins, disons-le, les conditions pour parvenir à un accord ne sont pas encore entièrement réunies. Le présent texte vise à donner au Gouvernement les moyens de se prévaloir d’un soutien clair et sans faille de notre assemblée, afin de soutenir les objectifs de la France et de l’Union européenne : préserver 30 % des terres et 30 % des océans ; nous engager à réduire autant que possible l’empreinte écologique des activités humaines ; reconnaître le rôle passé et présent des peuples autochtones dans la conservation de la biodiversité ; mobiliser des ressources financières pour permettre aux pays en développement de préserver la biodiversité sans entraver leur marche vers le bien-être.
La COP15 de Montréal constituera un rendez-vous crucial pour l’avenir de la planète. En 2021, 28 % des espèces étudiées figuraient sur la liste des espèces menacées. Au rythme actuel des déforestations, les forêts tropicales pourraient avoir disparu entre 2070 et 2090. Au-delà de ces tristes données, c’est une conception de notre monde qui est en jeu. Rappelons d’abord que la disparition d’une espèce entraîne souvent la disparition de celles qui lui sont liées. Si nous n’y prenons garde, l’être humain disparaîtra un jour, faute de pouvoir trouver dans la nature, par un prélèvement raisonné, les ressources dont il a besoin pour se nourrir et se soigner.
La COP15 ne consiste pas simplement à créer de vastes zones naturelles. Elle nous oblige à réfléchir à notre place et à notre rôle sur terre ; elle nous oblige également, puisque nous sommes l’espèce la plus évoluée – du moins, je le crois –, à assumer nos responsabilités à l’égard du vivant.
Je formule le vœu, qui m’est cher, que la présente proposition de résolution soit votée à l’unanimité de notre assemblée, tout en étant conscient que la question de la biodiversité est traversée par des divisions. Elle vise pourtant des objectifs suffisamment ambitieux pour mériter votre soutien, d’autant qu’ils seront difficiles à atteindre. Ils se situent dans la droite ligne de notre politique étrangère en matière d’écologie, marquée le 7 novembre dernier par la déclaration du Président de la République en faveur de l’interdiction d’exploiter les grands fonds marins. Notre collègue Nicolas Thierry a d’ailleurs déposé une proposition de résolution en ce sens. Nous ne pouvons présager d’un succès de la COP15 : soutenons ensemble une ambition commune et forte en faveur de la biodiversité.
Chers collègues, je vous appelle à adopter cette résolution, qui exprimera l’engagement de notre nation, de notre assemblée, à défendre la vie sur terre. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.) La parole est à M. Pierrick Berteloot. Le projet d’adopter une réglementation internationale durant cette COP est l’occasion de mener à bien la politique essentielle de protection des biodiversités. Pour y parvenir, il faudrait néanmoins que celle-ci s’inscrive dans une politique globale et cohérente, afin que le texte ne devienne pas un énième accord de bonne volonté, que nous laisserons traîner sous une pile de dossiers jusqu’à la COP suivante.
Par la proposition de résolution présentée aujourd’hui, la France entend défendre l’objectif de 30 % de zones protégées en mer et sur terre à l’horizon 2030 ainsi qu’une mesure de participation financière des États.
J’aimerais tout d’abord évoquer l’objectif de 30 % de zones protégées, auquel nous voulons rallier les Nations unies. Notre pays fait partie de ceux qui comptent le plus grand nombre de normes environnementales et écologiques au monde. (Exclamations sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.) Elles pèsent sur l’urbanisme de nos communes, sur l’activité de nos entreprises, sur les productions de nos industries, sur les exploitations de nos agriculteurs, et sur tout le quotidien de nos concitoyens. Combien de pays dans le monde peuvent en dire autant ?
Malgré cette terrible réalité, certains mouvements politiques pensent toujours que c’est en se culpabilisant et en alourdissant la chape de plomb qui pèse sur les Français que toutes les solutions émergeront. Croire en de pareilles inepties revient à emprunter le chemin de la facilité ; c’est la conséquence d’une idéologie aussi incohérente qu’illusoire.
Nous demandons à notre peuple et à notre économie de multiplier les efforts au nom de l’écologie et de l’environnement, cependant que nous multiplions les contrats avec des pays qui ne respectent aucune norme.
Nous pourrions pourtant parler de la Chine, premier pollueur mondial, et de sa politique, qui considère l’environnement comme une denrée indéfiniment remplaçable. Nous pourrions parler des accords passés avec les États-Unis : tandis que la France interdit sur son sol l’exploitation du gaz de schiste, nous importons en 2022 plus de 3 millions de tonnes de GNL – gaz naturel liquéfié – venant de l’Amérique. Ainsi, du moment que le gaz est originaire des États-Unis, il ne pollue pas ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.) Les exemples sont encore nombreux, comme la déforestation au Brésil ou les mines de cobalt en République démocratique du Congo.
La protection de la biodiversité et de l’environnement ne se réglera pas par 10 000 COP, qui ne peuvent se suffire à elles-mêmes, mais bel et bien par une diplomatie pragmatique, sans hypocrisie et sans langue de bois ! (Mme Béatrice Roullaud et M. Jean-Philippe Tanguy applaudissent.)
Toutes les entreprises qui s’installent en France doivent se conformer à des règles de protection de l’environnement extrêmement contraignantes, ce qui n’est pas le cas de l’écrasante majorité des pays dont nos entreprises subissent pleinement la concurrence. Est-ce ainsi que nous voulons défendre nos ambitions environnementales ? Nous devons subordonner les accords de libre-échange à de réelles conditions réciproques de respect des droits de l’homme et de l’environnement, afin de faire cesser cette concurrence déloyale qui devient insupportable ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
La réindustrialisation de notre territoire constitue également une manière de s’assurer du respect de nos normes environnementales. Sans cette mesure, qui ne relève que du bon sens, nous pourrons fixer tous les objectifs du monde, ils ne seront jamais atteints.
Des règles insensées viennent entraver notre économie et le pouvoir d’achat de nos concitoyens, alors qu’elles ne pourront jamais contrebalancer l’effet que provoquent sur le climat, sur l’environnement et sur la biodiversité le Ceta – Accord économique et commercial global – signé avec le Canada ou l’Accord global sur les investissements, conclu avec la Chine.
Il y a un second point dans ce projet de résolution : l’objectif d’augmenter la participation financière des États à cette politique commune, sans aucune forme de garantie. Je dois bien avouer que cela nous pose un énorme problème. Par cette mesure, la France demande à son peuple, qui traverse une crise économique et énergétique majeure, de mettre encore la main à la poche pour financer un projet opaque, sans contrôle des dépenses ni obligation de résultat. Sur ce point, notre position est claire : les Français paient trop et, hélas, trop souvent, pour rien.
Pour toutes les raisons que je viens de citer, nous considérons que la ligne politique du Gouvernement est fourbe et malicieuse. Si cette proposition de résolution, comme la COP à venir, tend à instaurer un cadre mondial féerique, sans aucunement prendre en considération les réalités internationales, nous perdrons une fois de plus notre temps et notre argent.
Le groupe Rassemblement national s’abstiendra donc sur le vote de ce texte. Car si un objectif international de protection de la biodiversité est indispensable, prévoir un chèque en blanc avec l’argent des Français, sans contrôle ni contrepartie, serait une pure folie. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Aymeric Caron. Olé ! Aucun des objectifs de protection de la biodiversité définis par la Convention d’Aichi en 2010 n’a été atteint. On peut toujours se consoler en se disant que, si ces objectifs n’avaient pas existé, la situation serait encore pire. C’est toutefois une bien maigre consolation, car l’extinction du vivant se poursuit inexorablement.
Le chiffre le plus marquant est probablement celui fourni par le WWF – Fonds mondial pour la nature –, qui établit que les populations mondiales d’oiseaux, de mammifères, de reptiles, d’amphibiens et de poissons ont décliné de 69 % depuis 1970. En France par exemple, les populations d’oiseaux ont diminué de 30 % en trente ans. Les populations de hérissons sont en baisse, tout comme les populations de chauves-souris, et celles des espèces que l’on ignore ou que l’on méprise, telles que les abeilles ou les vers de terre, pourtant essentielles au vivant, en particulier pour la culture de notre nourriture végétale. Nous, l’espèce humaine, sommes responsables de l’extinction en cours, pourtant nous ne faisons rien pour enrayer la catastrophe.
Les COP sur la biodiversité n’ont jusqu’à présent servi qu’à produire des déclarations d’intention, comme celle sur laquelle nous devons nous prononcer aujourd’hui. Leur objectif réel est de disculper les gouvernements de l’accusation d’indifférence. Pas plus que les autres pays, la France n’est à la hauteur des enjeux.
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a publié il y a deux ans un rapport très critique sur l’inaction de notre pays, qui manque de moyens humains et financiers pour protéger le vivant, comme en atteste la situation de l’Office français de la biodiversité (OFB). Par ailleurs, les lois qui vont dans le bon sens ne sont pas appliquées, comme la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, qui prévoyait de « réduire à zéro la perte nette de biodiversité ». Aujourd’hui même, la presse rapporte que, malgré l’interdiction en vigueur depuis le 1er janvier 2022, la France continue à exporter massivement des milliers de tonnes de pesticides toxiques.
Ceux qui nous gouvernent ont également pris des décisions graves, comme celles d’autoriser à nouveau les néonicotinoïdes, de détricoter le droit de l’environnement et de laisser une réglementation laxiste provoquer une artificialisation excessive des sols. Les outre-mer hébergent 80 % de la biodiversité française, mais sont privés de toute politique ambitieuse de protection du vivant. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Jiovanny William applaudit également.) Il a raison ! Il faut ajouter la soumission de ce gouvernement aux lobbies de l’industrie agroalimentaire et de la chasse. Les chasseurs sont tellement privilégiés par votre gouvernement, madame la secrétaire d’État chargée de l’écologie, qu’ils sont désormais légalement désignés – c’est tristement ironique – comme des agents de protection de la biodiversité. Prétendre protéger le vivant en tuant ses représentants, il fallait oser, surtout dans notre pays, qui est celui d’Europe où l’on chasse le plus d’espèces, et même des espèces menacées. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
La résolution que vous nous proposez de soutenir poursuit cette logique des déclarations inutiles, car floues et sans ambition réelle. Elle réclame « […] des engagements clairs pour réduire l’empreinte écologique des activités humaines et la ramener dans ses limites planétaires ».
« Les limites planétaires » : l’objectif est bon, mais concrètement, ça veut dire quoi ? L’empreinte écologique des Français est telle que nous produisons et consommons trois fois plus en une année que ce que la planète peut régénérer pendant cette période. Pourquoi ne pas indiquer clairement que le seul moyen de venir en aide au vivant consiste à revoir de fond en comble notre modèle économique ? On ne sauvera pas la biodiversité si on ne renonce pas au modèle agro-industriel ; si on ne renonce pas à mener des politiques économiques qui reposent sur des logiques de production et de consommation excessives, avec des rendements financiers nécessairement maximaux ; si on ne renonce pas à l’urbanisation démesurée ; si on ne lutte pas véritablement contre le changement climatique.
Chers collègues, une économie qui repose sur le dogme de la croissance prend nécessairement le monde naturel comme adversaire et sème la ruine écologique. C’est ainsi : on ne peut pas à la fois faire croître le PIB et faire diminuer l’empreinte écologique. (Mme Marie Pochon applaudit.) On ne peut pas découpler la croissance et les ressources naturelles, c’est-à-dire les matières. Même le Giec – Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – et l’IPBES – Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques –, qui ne sont pas des organes de la gauche écologiste radicale, défendent cette idée.
Alors que faire si l’on veut réellement préserver la biodiversité ? Il nous faut tendre vers un nouvel imaginaire politique, qui doit intégrer l’idée que le vivant ne peut être réduit à sa valeur marchande. Nous devons lui reconnaître une valeur intrinsèque ; nous devons repenser notre rapport aux objets, au temps, au travail, à la consommation ; nous devons interroger le sens des vies que nous menons ; nous devons prendre le temps de réfléchir au sens du mot bonheur, qui n’a aucun lien avec les verbes posséder ou dominer.
Nous sommes une partie de la biodiversité et la question qui se pose est celle de notre propre survie. Celle-ci implique d’assumer notre statut d’espèce responsable pour toutes les autres. Aucun de ces objectifs ne transparaît dans la résolution qui nous est proposée. C’est pour cela que le groupe La France insoumise s’abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. Emmanuel Maquet. Chaque année, 10 000 à 40 000 espèces disparaissent de la surface de la planète ; 28 % des espèces restantes sont menacées d’extinction d’ici à la fin du siècle : l’appauvrissement de la biodiversité se poursuit inexorablement. Votre proposition de résolution à ce sujet, pleine de bonnes intentions, appelle le Gouvernement à s’engager fortement lors de la COP15 sur la biodiversité. Cette conférence s’inscrit dans un contexte international chargé. L’ultime session de négociations, tenue en juin à Nairobi, a révélé de lourds désaccords, qui font craindre un nouvel échec, après les fameux objectifs d’Aichi de 2010, dont jamais aucun n’a été atteint.
Vos déboires de politique intérieure, la fragilité du commerce extérieur, le lent affaiblissement du réseau diplomatique, les va-et-vient permanents de la parole présidentielle : tout cela nous laisse dubitatifs quant à la capacité réelle de la France à peser dans ces négociations et à mener un combat aussi capital. Eh oui ! M. Maquet a raison ! Si le Gouvernement n’est pas capable de convaincre l’Allemagne, comment fera-t-il avec la Chine et les pays d’Afrique, où la biodiversité est un enjeu de première importance, mais où notre influence n’a jamais été aussi faible ? Le point majeur que vous souhaitez voir défendu par le Gouvernement est la préservation de 30 % des terres rares et des mers d’ici à 2030. Il ne sera pas trop dur à défendre, la France l’ayant déjà atteint grâce à une politique ancienne et renouvelée de protection des espaces naturels, lancée dès les années 1960 sous le général de Gaulle, avec la création des parcs nationaux. Exact ! Cet engagement fort de préserver, protéger et transmettre le patrimoine dont nous avons hérité, nous le poursuivons au sein de notre famille politique avec la demande de création, à l’initiative de nos collègues membres de la commission développement durable, d’une mission d’information sur le suivi des objectifs climatiques de la France.
C’est pourquoi nous regrettons l’écart permanent entre les discours et les actes qui transparaît dans la politique du Gouvernement en matière de biodiversité. Quel dommage ! La France a ainsi engagé avec la Grande-Bretagne et le Costa Rica la Coalition de la haute ambition pour la nature et les peuples, afin de défendre le double objectif de protection de 30 % de terres rares et de mers en 2030. Mais, par excès d’ambition ou par activisme désordonné, nous avons fini par agacer nos partenaires, qui veulent réorienter cette action dans un sens plus opérationnel. C’est fort dommageable ! Autre exemple : lors de la COP27 en Égypte, le Président de la République s’est engagé à soutenir l’interdiction de l’exploitation des grands fonds marins, sans donner plus de suite à son engagement, comme s’il craignait d’hypothéquer la seule richesse qu’il nous reste avec la large superficie des zones économiques exclusives. Enfin, comment voulons-nous que notre parole porte à l’extérieur si, en même temps, à l’intérieur, le Gouvernement développe à toute force les éoliennes sur terre au détriment de la protection des oiseaux, et en mer, alors qu’on ignore tout de conséquences sur la biodiversité marine ? C’est un grand écart ! Ces contradictions entre nos paroles et nos actes, les autres les voient. Elles rendent avant tout service à ceux qui veulent en faire le moins possible.
Demander au Gouvernement de prendre des engagements forts sur la biodiversité, c’est aussi risquer de voir l’État sacrifier les secteurs les plus fragiles de l’économie et se décharger de ses responsabilités sur les territoires. Ainsi, l’État se débarrasse de la gestion des zones Natura 2000 sur les régions, étrangle le budget des agences de l’eau en leur faisant payer pour la biodiversité et la renaturation des villes, et fait peser sur les petites communes l’immense effort nécessaire pour atteindre en 2050 l’objectif de zéro artificialisation nette, fixé par l’exécutif. Les petites communes sont prises à la gorge ! Les maires n’en peuvent plus ! De même, la suppression des subventions dites nuisibles à la biodiversité, axe privilégié des politiques de lutte pour la biodiversité encouragées aux niveaux national et international, cible essentiellement les agriculteurs et les pêcheurs.
La défense de la biodiversité est souvent l’alibi des vieilles lunes anticapitalistes et de leur opposition systématique à toute activité économique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Pourtant, l’environnement n’est jamais mieux protégé que dans les sociétés développées. Croissance économique et défense de la biodiversité ne sont pas incompatibles. C’est toujours par la croissance qu’on défend l’environnement, non l’inverse. Eh oui ! Eh non ! J’en veux pour preuve le fait que, contrairement à une idée reçue, la surface forestière croît en France depuis trente ans, comme dans tous les pays développés.
Il est nécessaire de relancer l’activité en France avec de hauts standards d’exigence en matière de protection de la biodiversité, pour éviter la pollution importée que nous connaissons depuis trop d’années ; de mieux encadrer le commerce mondial, qui favorise la diffusion d’espèces invasives et encourage l’importation de bois issus de la déforestation chinoise, brésilienne ou indonésienne, alors que notre pays s’évertue à replanter des forêts,… Bravo, enfin du bon sens ! …de mettre aux mêmes standards européens les pratiques agricoles et halieutiques, plutôt que de toujours taper sur les producteurs français.
C’est avec bienveillance que nous accueillons votre proposition de résolution, mais nous restons sceptiques quant à la capacité du Gouvernement à l’appliquer. Afin de ne pas cautionner l’un ni condamner l’autre, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Excellent ! La parole est à M. Frédéric Zgainski. En 1992, lors du Sommet de la terre de Rio de Janeiro, la Convention sur la diversité biologique reconnaissait l’importance de la conservation de la biodiversité pour l’ensemble de l’humanité. Trente ans plus tard, je ne peux le démentir. Les bénéfices de la biodiversité ne sont pas quantifiables, tant elle apporte à tous et toutes les ressources nécessaires à notre survie, à notre développement et à notre condition humaine entière.
Quand nous parlons de biodiversité, nous ne parlons pas seulement d’espèces animales et végétales, mais de leur diversité génétique et des écosystèmes complexes qu’elles génèrent. Toutes les réponses à nos besoins primaires s’y trouvent. Or ces réponses sont en train de devenir des interrogations, en raison de l’érosion de la biodiversité de la planète.
Il nous faut le rappeler sans cesse : les activités humaines entraînent l’érosion de la biodiversité. Dégradation des terres, réchauffement climatique, pollutions, espèces exotiques envahissantes : tels sont les maux qui nous accablent et contre lesquels nous devons lutter, chacun, individuellement, et tous, collectivement. N’oublions pas l’alerte du Giec : près de 30 % des espèces végétales et animales vont connaître un risque croissant d’extinction : une crise massive mondiale est en cours. Ceci n’est pas un phénomène anodin. La plateforme intergouvemementale sur la biodiversité et les services écosystémiques nous le rappelle : la surexploitation humaine de ces ressources menace la survie des populations.
Quand il nous faut une réponse mondiale, l’espèce humaine pèche. Nous devons nous interroger au sujet des négociations entre les délégations du monde entier lors des réunions de préparation de la prochaine COP15. Si la réponse n’est pas globale, alors elle n’est pas. La COP15, qui se tiendra en décembre à Montréal, doit tenir compte de cet enjeu majeur.
Mais j’ai bon espoir, parce que je sais que la France sera au rendez-vous de l’histoire et qu’elle apporte toujours une réponse, alors que beaucoup d’autres pays doutent. J’ai bon espoir, parce que la France n’a pas attendu la COP15 pour agir. En plus des nombreuses actions menées par le Gouvernement, elle a organisé la première édition du One Planet Summit, entièrement dédié à la protection de la biodiversité, ainsi que le Congrès mondial de la nature de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), lors duquel le manifeste de Marseille, présentant des engagements forts, a été acté.
J’ai bon espoir, parce que je connais votre compétence et votre dévouement, madame la secrétaire d’État, à la préservation de la biodiversité. Immédiatement après votre entrée en fonction cet été, vous êtes venue vous inquiéter des conséquences sur la biodiversité des incendies ravageurs qui ont touché les forêts de Gironde. Les annonces que vous avez faites sont ambitieuses, mesurées et pertinentes : 150 millions issus du Fonds vert dédiés à l’accompagnement de la stratégie nationale biodiversité ; concernant les aires protégées, l’atteinte, au plus vite, de l’objectif de 10 % du territoire sous protection forte d’ici à 2022 ; le lancement de sept nouveaux plans nationaux d’actions de protection d’espèces sensibles ; des actions fortes en faveur de la protection des cétacés.
Madame la secrétaire d’État, je sais que vous arriverez à faire entendre la voix de la France, afin de préserver et de restaurer la biodiversité ; que vous défendrez une position ambitieuse en proposant des solutions concrètes et mesurées ; que vous poursuivrez les efforts déjà accomplis de mobilisation des ressources financières ; que vous trouverez des solutions concernant le traitement des informations de séquençage numérique ; que vous contribuerez, enfin, à l’adoption d’un mécanisme efficace de redevabilité.
Je souhaite remercier M. le président de la commission du développement durable pour son travail, fruit d’une belle initiative parlementaire transpartisane qui nous fait honneur à toutes et tous. Le groupe Démocrate votera en faveur de la proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE.) La parole est à Mme Chantal Jourdan. La biodiversité connaît une crise mondiale majeure. Un récent rapport du Fonds mondial pour la nature indique que les populations de vertébrés – poissons, oiseaux, mammifères, amphibiens et reptiles –, étudiées sur plusieurs décennies, ont chuté de 69 % en moyenne entre 1970 et 2018.
La COP15 qui se tiendra à Montréal en décembre représente une occasion unique d’avancer pour la protection de la biodiversité à l’échelle mondiale. Aussi, je remercie Jean-Marc Zulesi de donner aux membres de l’Assemblée l’occasion de s’exprimer en faveur d’une COP15 ambitieuse, à la hauteur des enjeux actuels. Cette expression est particulièrement bienvenue alors que la Conférence des parties sur la diversité biologique reste relativement méconnue. Les associations craignent d’ailleurs que cette chance de protéger l’environnement nous échappe. Le fait que les chefs d’État ne soient pas directement conviés à l’événement participe à cette crainte. Le fait que le texte final issu de la COP27, qui s’est tenue il y a quelques jours, ne mentionne pas l’occasion cruciale qu’est la COP15 est également inquiétant. Cela démontre la persistance des obstacles à une approche plus intégrée, « malgré les appels des scientifiques et des peuples autochtones », ainsi que le souligne le directeur de Campaign for Nature, Brian O’Donnell.
Nous avons un rôle à jouer pour sensibiliser le plus grand nombre à l’importance de ces discussions et pour mobiliser autour de cet événement. Cette proposition de résolution nous en donne l’occasion. Les députés du groupe Socialistes et apparentés, qui en partagent les objectifs, la voteront. (M. Jean-Marc Zulesi applaudit.)
La France doit être force motrice en matière de protection de la biodiversité. Elle devra soutenir, lors de la COP15, la position commune adoptée par les États de l’Union européenne, qui réclament un engagement mondial s’accompagnant de la réalisation, d’ici à 2030, d’objectifs tels que la protection effective d’« au moins 30 % des terres émergées et 30 % des océans » ou la restauration de « 3 milliards d’hectares d’écosystèmes terrestres dégradés » et d’autant d’écosystèmes océaniques. Nous approuvons ce niveau d’ambition.
Néanmoins, pour être réaliste, il nécessite des moyens financiers très importants. Dans un contexte où, globalement, notamment dans le budget de la France, les moyens financiers dédiés à la protection et à la restauration de la biodiversité restent faibles, nous alertons sur le besoin d’une volonté politique forte pour parvenir à mobiliser les fonds nécessaires. Pour que la France puisse défendre le message selon lequel un accord ambitieux est nécessaire, elle doit elle-même se fixer des objectifs ambitieux et, surtout, se donner les moyens de les atteindre.
Je profite de cette occasion pour rappeler plusieurs points, notamment budgétaires, qui ne vont pas dans le bon sens. Par exemple, les moyens dévolus à l’Office national des forêts – ONF – sont largement insuffisants. La diminution de vingt postes en 2023 est complètement à rebours des besoins du terrain pour protéger et restaurer notre bien commun qu’est la forêt, laquelle abrite une biodiversité d’une grande richesse.
Les moyens dévolus à la transition de notre modèle agricole vers l’agroécologie sont également insuffisants et, à certains égards, mal orientés. Nous le dénonçons régulièrement : les aides issues de la politique agricole commune doivent être davantage fléchées pour accompagner les agriculteurs vers des productions réellement respectueuses de la santé humaine, de l’environnement et donc de la biodiversité.
Je veux dire un mot sur les haies, sujet qui me tient à cœur car il a une importance très particulière pour la protection de la biodiversité et pour la création d’écosystèmes riches et résilients. Alors que le plan France relance avait prévu des fonds pour la plantation et l’entretien des haies, aucune reconduction budgétaire n’est prévue dans le projet de loi de finances pour 2023. C’est tout à fait problématique, les démarches engagées risquant de fortement ralentir, voire de s’arrêter.
Plus largement, vous invitez le Gouvernement à défendre des engagements clairs « afin de réduire l’empreinte écologique des activités humaines et de la ramener dans ses limites planétaires ». Comme l’ont montré les travaux du Giec, cela suppose une réelle bifurcation de notre modèle de développement, de notre façon de produire et de consommer, qui doivent s’appuyer sur une réelle sobriété et pas uniquement sur quelques économies d’énergie.
Telle n’est pas vraiment l’orientation soutenue par le Gouvernement et sa majorité, ce qui est fort regrettable. Aussi, tout en soutenant les objectifs de cette proposition de résolution relative à la COP15, appelons-nous le Gouvernement et sa majorité à s’inspirer de ceux-ci pour l’élaboration des politiques publiques conduites en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) La parole est à Mme Anne-Cécile Violland.