Interdiction des vols en jets privés : rejet d'une proposition de loi

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Commission du développement durable : Proposition de loi visant à interdire les vols en jets privés

Mardi 28 mars, la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire examiné puis rejeté la proposition de loi visant à interdire les vols en jets privés (rapporteur Julien Bayou).

 

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Le rapporteur a d’abord évoqué les conclusions du dernier rapport publié par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui dresse comme objectif premier celui de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, prioritaire sur celui de la décarbonation des émissions qui ne peuvent pas être réduites. M. Julien Bayou a également mis en avant les analyses des experts climatiques concernant les inégalités dans la transition écologique : « les moins responsables, les plus pauvres, sont les plus fragilisés : ce sont ceux qui contribuent le moins au changement climatique qui en subissent les effets ».

 

Julien Bayou a souligné, dans ce contexte, l’intérêt de la régulation du trafic aérien dans un double objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de renforcement de l’acceptabilité sociale de la transition écologique. L’ONG Transport & Environnement estime qu’un vol effectué en jet privé représente dix fois plus d’émissions de gaz à effet de serre par voyageur qu’un vol commercial classique, et cinquante fois plus que le train. Les jets privés transportent en moyenne 4 à 5 personnes, et près de 40 % des vols sont réalisés « à vide ». Pour le rapporteur, il s’agit d’ « émissions superflues qui pourraient être évitées », notamment car sur la plupart des trajets réalisés par les jets privés, des alternatives en train et/ou en vol régulier commercial existent. L’interdiction des vols en jets privés contribuerait par ailleurs à renforcer l’acceptabilité sociale de la transition écologique, selon le rapporteur, qui a rappelé qu’un Français émet en moyenne 10 tonnes de CO2 par an, un niveau qui atteint 5 tonnes pour les classes populaires, contre 8 000 tonnes pour les ultra-riches, et que 41 % de l’empreinte carbone des 1 % les plus riches de la population européenne serait liée au transport aérien. Aussi, Julien Bayou a affirmé qu’une telle mesure « enverrait le signal que les efforts sont partagés ».

 

Enfin, le rapporteur a souhaité évoquer le « mirage » décarbonation de l’aviation comme solution aux émissions issues du trafic aérien à court et moyen terme. Il a notamment rappelé que lors des auditions, la Direction générale de l’aviation civile et Mme Yamina Saheb, experte du GIEC, avaient estimé que la décarbonation du secteur sur une échéance de quinze ans était irréalisable ; tout en soutenant la nécessité de poursuivre la recherche et développement pour décarboner la part du trafic aérien qui ne peut être réduite.

 

L’article 1er de la proposition de loi prévoit l’interdiction des services de transport aérien non réguliers de passagers ne faisant pas l’objet d’une exploitation commerciale, soit les vols en jet privé lorsque l’usager est également le propriétaire du jet. Des exceptions permettent à certains vols d’intérêt général de perdurer (vols d’aéronefs d’État ou militaires, vols médicaux, de sauvetage, de sécurité civile, activités des aéroclubs, etc.)

 

L’article 2 prévoit l’interdiction des services non réguliers de transport aérien public de passagers, soit les vols en jet privé lorsque le jet est affrété à la demande d’un particulier ou d’une entreprise à titre onéreux. Cette interdiction ne concerne que les vols dont le nombre de passagers est inférieur à soixante.

 

La commission a rejeté la proposition de loi. Elle est examinée en séance publique dans sa version initiale le jeudi 6 avril.