- Texte visé : Projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année 2023, n° 3
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport détaillant l’évolution dans le temps et la décomposition précise de la mission Remboursement et dégrèvements, publié en annexe du projet de loi de finances pour 2024. Ce rapport détaille notamment les méthodes de modélisation et de calculs de ces crédits évaluatifs, et détaille les écarts entre les estimations et les réalisation année par année.
Par cet amendement, le groupe LFI-NFP demande à faire toute la lumière sur la première dépense publique, systématiquement révisée à la hausse, et jamais évaluée : la mission remboursements et dégrèvements.
Nous apprenons dans le présent projet de loi que les dépenses sur cette mission s’élèvent finalement à 142,45 milliards d’euros. Il s’agit, de très loin, de la première dépense publique de ce pays. C’est deux fois plus que le budget de l’Éducation nationale, souvent évoqué, à tort, par les libéraux de tout bord comme le premier budget de l’État.
Le projet de loi de fin de gestion pour 2023 contenait une surprise de taille : la mission remboursements et dégrèvements, au montant colossal de 131,6 milliards d’euros en loi de finance initiale pour 2023, devait être abondée de 12,5 milliards d’euros supplémentaires, l’équivalent du budget du ministère de la Justice !
Ce montant spectaculaire d’abondement supplémentaire est à mettre en regard du décret d’annulation de 10 milliards d’euros en février 2024 : pour réaliser des économies, le gouvernement était prêt à cesser de payer les heures supplémentaires des enseignants, mais il considère qu’un trou de 12,5 milliards d’euros dans cette mission n’est après tout qu’un ajustement comptable. La lumière doit être faite sur cette politique de subventionnement à outrance du grand capital, directement lié à un recul sans précédent des services publiques et de la sécurité sociale au nom de l’austérité.
Présent en annexe de ce projet de loi, le Rapport annuel de performances de la mission Remboursements et dégrèvements se contente de donner les montants par sous-actions, et les éventuels différentiels entre la LFI et l’exécution. Il reste très évasif sur les mécanismes politiques qui mènent à une telle dépense, et sur les modalités de prévision de ces dépenses : on y apprend par exemple que les remboursements sur les acomptes d’impôts sur les sociétés sont en hausse de 6 milliards d’euros, alors que le bénéfice fiscal des entreprises connaît une croissance forte de 3,5%, bien au-dessus des 0,9% de croissance du PIB.
De même, le crédit d'impôt contemporain de services aux particuliers a été élargi aux mandataires et aux plateformes, leur permettant de prélever de l’argent sur cette niche fiscale généreuse, tout en effectuant une mise en concurrence frontale pour les travailleurs. Cet élargissement antisocial n’est même pas explicitement défini dans le rapport de performance, alors que son coût est loin d’être anecdotique : 1 milliard d’euros ! La moindre des choses serait alors d’effectuer un travail sérieux d’évaluation des effets d’une telle dépense, ce que le gouvernement refuse de faire.
La question des dégrèvements, lorsqu’il s’agit de remboursements sur une imposition indûment prélevée, doit bien sûr elle aussi être interrogée, en particulier quand les fraudes de type carrousel ou cumcum coutent plusieurs milliards à l’État chaque année. Quels sont les mécanismes de défiscalisation ou de surprélèvements qui sont la source de ces remboursements et de leur évolution à la hausse ?
De l’ampleur des dépenses que cela représente, de tels phénomènes ne peuvent être ignorés par le gouvernement : refuser de détailler ces évolutions revient à refuser toute évaluation de l’action politique du gouvernement et de ses réformes antisociales et coûteuses. En conséquence, nous demandons la mise en place d’un rapport permettant de suivre l’évolution de cette mission dans le temps long, et dans le détail.