- Texte visé : Proposition de loi visant à créer une croix de la valeur des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, n° 255
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur les conditions de travail des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. Il s’intéresse notamment à la charge de travail supportée par les sapeurs-pompiers, tant dans son intensité que par le volume horaire qu’elle représente, et ses conséquences sur leur santé physique et mentale. Ce rapport détaille les mesures pouvant mener à une amélioration desdites conditions de travail. Il examine l’hypothèse et les effets d’une campagne de recrutements de professionnels visant à diminuer le volume horaire des gardes postées assurées par les sapeurs-pompiers. Ce rapport présente des préconisations relatives à l’amélioration de la santé des sapeurs-pompiers, en intégrant une approche préventive et de médecine du travail, visant à minimiser les risques sanitaires auxquels ils sont exposés.
Par cet amendement, le groupe LFI-NFP souhaite porter le sujet des conditions de travail dégradées et de leurs conséquences sur la santé, tant physique que mentale, des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires.
Notre groupe soutient l'initiative ici présentée consistant à accorder une rétribution symbolique, au moyen d'une médaille dénommée "croix de la valeur des sapeurs-pompiers", à ceux que l'exposé des motifs de la présente proposition de loi qualifie à juste titre de "maillons indispensables de la sécurité civile", pour récompenser leur bravoure et leurs actions déterminantes tout au long d'un engagement continu et de longue date au service de la Nation.
Les député.e.s insoumis.es souhaiteraient toutefois offrir de meilleurs conditions d'exercice de cet engagement, professionnel ou volontaire. Elles sont de fait pour les premiers cités des conditions de travail et y sont assimilables pour les volontaires.
Cela passe à notre sens par un allégement de la charge de travail pesant sur les sapeurs-pompiers.
Premièrement, il s'agit de faciliter les recrutements au sein des services d'incendie et de secours, qui progressent trop faiblement et trop lentement, pour faire face à des phénomènes de crise tels les méga-feux, les inondations, les tempêtes qui se multiplient sous l'effet du changement climatique et alors que les sapeurs-pompiers sont toujours plus sollicités pour de l'assistance et du secours aux personnes qu'un système de santé exsangue ne parvient plus à assurer. Au total, l'activité des services d'incendie et de secours a progressé de près de 30% sur les deux dernières décennies.
Il nous apparaît également nécessaire de procéder à ces recrutements pour assurer le bien-être des sapeurs-pompiers, confrontés à une surcharge de travail. En témoigne le volume horaire important qu'ils consacrent aux gardes postées. Les sapeurs-pompiers consacrant plus de 600 heures par an aux gardes postées sont nombreux, ce qui a conduit l'Inspection Générale de l'Administration à alerter sur la conformité des pratiques des services d'incendie et de secours vis-à-vis de la directive européenne sur le temps de travail. Par ailleurs, certains sapeurs-pompiers supportent un poids écrasant avec 32,1% du volume horaire des gardes assuré par des sapeurs-pompiers qui en réalisent plus de 1000 heures par an.
Il faut assurément recruter des professionnels pour prendre en charge ces heures surnuméraires, ce qui, selon l'IGA, en coûterait 159 millions d'euros. C'est le prix du respect du droit au repos des volontaires et de la fin de la surexploitation des professionnels.
La santé des pompiers est menacée. Plutôt que de récompenser à posteriori ceux ayant survécu à leur engagement continu et de longue date, il pourrait être intéressant d'agir en amont et en prévention. Les accidents des sapeurs-pompiers sont de plus en plus graves : à 43,9 jours en moyenne, cette durée a progressé de 4,5 jours en 5 ans. Alors même que le Centre international de recherche sur le cancer a reconnu l'activité de pompier comme cancérogène, la France ne reconnaît que deux types de cancer comme maladies professionnelles liées à cette activité, tandis que c'est 19 au Canada ! Les sapeurs-pompiers mériteraient également un peu plus de transparence relative aux équipements qui leurs sont fournis. La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) révélait en 2018 que les cagoules présentées comme "filtrantes" ne l'étaient pas et ne protégeaient donc en rien des émanations toxiques et des particules fines auxquelles sont confrontés les sapeurs-pompiers. Enfin, une reconnaissance des problématiques de santé mentale des sapeurs-pompiers vaudrait tout autant qu'une médaille, alors que plus de 10% des sapeurs-pompiers seraient en état de stress post-traumatique et qu'ils n'ont que difficilement accès à un psychologue : il y en a 1 pour 734 dans les services d'incendie et de secours.
Cette proposition de loi reconnaît tous ces problèmes, évoquant "le temps consacré à la disponibilité opérationnelle", la "bravoure [...] manifestée lors d'opérations de secours" ou "la souffrance endurée du fait de blessures en intervention". Autant de difficultés et de souffrance qu'une récompense symbolique ne peut compenser.
Pour toutes ces raisons, le groupe LFI-NFP sollicite la remise d'un rapport sur les conditions de travail, leurs effets sur la santé des sapeurs-pompiers, et les mesures susceptibles de les améliorer.