- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
L’article 1605 nonies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le second alinéa du II est supprimé ;
2° Le premier alinéa du IV est ainsi rédigé :
« IV. – La taxe concerne toutes les plus-values foncières sur valeur déclarative. Elle est établie au taux de 35 % de la plus-value réalisée. » ;
3° À la première phrase du second alinéa du V, les mots : « ou par l’effet de l’abattement prévu au second alinéa du II du présent article » sont supprimés.
Protéger les sols contre l'artificialisation est essentiel pour préserver la biodiversité des sols et maintenir les services écosystémiques qu'ils fournissent, tels que le stockage de carbone, la régulation du cycle de l'eau et la production alimentaire. Bien que la loi Climat et Résilience ait fixé des objectifs cruciaux pour cette protection, elle n’a pas permis de s'attaquer aux moteurs de l'artificialisation des sols ni d'apporter les ressources nécessaires à la mise en œuvre efficace de la politique Zéro Artificialisation Nette (ZAN). Cet amendement vise à répondre à ces enjeux.
L’une des causes de l’artificialisation réside dans l’attrait financier des terrains constructibles, dont la valeur est bien supérieure à celle des terres agricoles, naturelles et forestières. En France, la valeur moyenne d’un hectare de terre agricole est estimée à 6 130 € en 2022 , un hectare de terrain constructible environ 920 000 € . Cet écart de prix se fait au détriment de la transmission des terres aux agriculteurs désireux de s’installer, développe l’étalement urbain ce qui est contraire à l’esprit du principe Zéro Artificialisation Nette.
A défaut de pouvoir rétablir un cycle de l’eau originel, il convient de maintenir l’existant pour permettre l’infiltration de l’eau dans les sols et la recharge des nappes phréatiques.
Cet amendement propose une augmentation et une fusion des taxes existantes sur les plus-values de cessions de terrains nus devenus constructibles.
Codifié à l’article 1529 du code général des impôts, la taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains nus devenus constructibles est une taxe facultative qui a été instaurée par 6657 communes et 2 EPCI au 29 décembre 2023. Cette taxe s’applique sur les plus-values qui sont supérieures à 3 fois le prix d’acquisition avec un taux de 10%.
Codifié à l’article 1605 nonies du code général des impôts, la taxe nationale sur les plus-values de cessions de terrains nus rendus constructibles s’applique de manière obligatoire sur tout le territoire national. Elle alimente un fonds pour l’installation des jeunes agriculteurs, plafonné à 12 millions d’euros, le reste étant attribué au budget général de l’État. Cette taxe s’applique sur les plus-values supérieures à 10 fois le prix d’acquisition avec un taux de 5% pour les plus-values comprises entre 10 et 30 fois le prix d’acquisition et de 10% pour les plus-values supérieures à 30 fois le prix d’acquisition.
Certaines dispositions de ces taxes contreviennent à l’objectif de sobriété foncière. L’assiette taxable est réduite de 10% par an à partir de la 9ème année suivant le classement du terrain en zone constructible. Pour éviter la rétention foncière et de pénaliser les finances publiques, cet amendement prévoit la suppression de ce dispositif. De plus, les seuils de déclenchement de la taxe et les assujettis ne sont pas les mêmes selon les deux taxes : nous préconisons la fusion de ces taxes et de retenir la base d’assujettis la plus large et le seuil de déclenchement le plus faible.
Afin de rendre cette taxe plus incitative, cet amendement prévoit une hausse de la taxation à 30% des plus-values. Cette disposition suit la recommandation du Conseil Économique Social et Environnemental (CESE), qui préconise une hausse de la taxation permettant d’envoyer un signal aux propriétaires sans être confiscatoire.
De plus, les recettes issues de cette taxe seraient affectées non pas uniquement aux collectivités locales et à l’État, mais à des acteurs tels que les Établissements publics fonciers (EPF) et les agences de l'eau. Ces organismes jouent un rôle clé dans la maîtrise de l'artificialisation et la renaturation des sols. Les agences de l’eau ont, depuis 2016, pour nouvelle compétence la protection de la biodiversité terrestre et marine et peuvent réaliser des acquisitions foncières, des opérations de désimperméabilisation et de renaturation qui participent aux objectifs de sobriété foncière. Grâce à leur expertise, les EPF sont des acteurs clés de l'aménagement du territoire. Ils permettent de mener des opérations foncières complexes, comme l'acquisition de terrains pour la renaturation ou la création de zones d'activités et de logements, que les communes ne peuvent souvent pas réaliser seules. La mise en œuvre du ZAN va amener ces acteurs à avoir un rôle de plus en plus important : il est nécessaire de leur attribuer les ressources suffisantes. D’autant plus que les ressources des agences de l’eau et des EPFs ont été fragilisées : l’augmentation de la redevance pour pollution diffuse et celle sur le prélèvement de l’eau par les agriculteurs irrigants ont été supprimées lors des débats sur le projet de loi de finance pour 2024 et la suppression de certains impôts locaux a eu un impact sur le modèle économique des EPFs qui se financent en partie grâce à la taxe spéciale d’équipement (TSE), elle-même adossée aux impôts locaux. Cet amendement préserve également les recettes attribuées au fonds d’installation pour les jeunes agriculteurs et réserve une quote-part aux communes.
En utilisant l'outil fiscal, cet amendement contribuerait à limiter les incitations à l'urbanisation des espaces naturels, agricoles et forestiers, tout en renforçant les moyens des acteurs engagés dans la protection des sols.
Cet amendement a été suggéré par la Fondation pour la Nature et l’Homme.